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www.tbs-education.fr GDDCC - Compte rendu d’intervention du 10 Mars 2014 M. Eric Julien Accompagnement au Changement et Ouverture Interculturelle Bruno Fonteyne

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GDDCC - Compte rendu d’intervention du 10 Mars 2014 M. Eric Julien Accompagnement au Changement et Ouverture Interculturelle

Bruno Fonteyne

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Que faut-il comprendre à l’intitulé de l’intervention ? Qu’entend-t-on précisément par “accompagnement du changement”, et “ouverture interculturelle” dans le cadre d’une formation consacrée au Développement Durable ? Dès son arrivée, Eric JULIEN nous a rapidement mis en situation en nous invitant à exposer, en un seul point, LA problématique à laquelle nous conduit l’ensemble des enseignements dispensés jusqu’à lors au Mastère: S’agit-il de la gouvernance ? des comportements ? De “règles” internationales caduques ? … De la même manière, l’intervenant nous sollicite sur ce que serait l’initiative la plus illustrative ou symbolique des “actions allant dans le bon sens” : l’agroécologie ? L’économie sociale et solidaire ? L’économie de l’usage ? … E. JULIEN précise ici en introduction – avant d’exposer son parcours – que l’enjeu face au dérèglement climatique et ses conséquences consiste à répondre à ceci : q  Comment réinventer notre « développement » dans un monde fini, limité ? Réinventer nos rapports aux

autres, nos modalités de gestion du bien commun, nos valeurs ? q  En d’autres termes, comment, compte tenu de notre diversité (de points de vue, d’expériences), faire en

sorte de tendre ensemble vers un objectif commun ? La réussite des projets de Développement Durable serait, d’après lui, conditionnée par : q  La manière de fédérer les énergies q  La capacité de faire vivre des relations de coopération entre les acteurs q  La conception et le pilotage des processus

En introduction

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En 1997, Eric JULIEN crée l’association Tchendukua, Ici & ailleurs, association qui accompagne les peuples racines, et notamment les Indiens Kogis en Colombie. En 2006, il crée l’école de la nature et des Savoirs, dans la Drôme, lieu de formation et de recherche, pour un développement « humain » durable.   A ce jour, 1500 ha de terres ont été rachetés et restitués aux Indiens Kogis. Sur ces 1500 ha, 1000 ha de terres de biodiversité ont été réservés et/ou reconstitués. Il a raconté son histoire, à travers plusieurs ouvrages, des reportages TV ont relayé cette expérience, dont une émission USCHUAÏA de Nicolas HULOT.   Dans le contexte qui est le nôtre - une planète « finie » aux ressources limitées - les questions de la gestion du bien commun, dans un espace borné, donc de gouvernance, vont nous amener à nous ré-interroger fondamentalement sur notre rapport au monde, et nos modalités de fonctionnement collectif. Pour nourrir ces questionnement, il se propose de nous faire découvrir d’autres sociétés humaines porteuses d’autres rapports au monde, dont celle des indiens Kogis, non pas comme une société archaïques, mais comme une société vivant un présent différent. Les menaces auxquelles sont exposées les Kogis sont nombreuses : guérillas et milices, déforestation, narcotrafiquants, pilleurs de tombe, produits défoliants… L’histoire de la civilisation Kogis (15.000 individus environ) serait longue de plus de 4000 ans. D’après Eric JULIEN, que nous soyons Kogis ou hommes et femmes modernes, nous sommes finalement confrontés aux mêmes questions fondamentales, à commencer par : comment apprendre à vivre en paix ensemble, dans des espaces aux ressources limitées ?   Partant de là, il est fort probable que des « passerelles » puissent exister, entre deux mondes, en apparence très lointains, et qui auraient pourtant beaucoup à se dire, pour peu qu’un dialogue créatif puisse se mettre en place.

Parcours de l’intervenant

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Au cours de son histoire, l’Humanité a inventé quatre « façons » de vivre ensemble, pour tenter de gérer la diversité, l’altérité : q  la guerre (pas nécessairement sous sa forme violente) q  la partition (les murs…) q  la loi, et la sanction associée (souvent déresponsabilisante) q  les valeurs, vécues, partagées, qui deviennent le cadre de référence du “vivre ensemble” La diversité est source “d’inquiétudes”. Or, tout commence par poser cette question à l’autre : “que penses-tu (vraiment) de moi ?” Les situations de vrai dialogue, sont finalement assez rares. Des situations, où l’on pourrait admettre que nous sommes des êtres incomplets, en permanente recomposition par la rencontre de « l’autre », avec cette constatation, comme le rappelait Baudelaire que « moi est autre ». Dit autrement, nous ne connaissons pas les méandres, les émotions, les croyances et les ancrages qui agissent souvent à notre insu. Notre conscience des êtres, des choses et des relations, est conditionnée par l’expérience que nous avons dans : q  notre rapport aux territoires et aux lieux q  nos pratiques, ou non-pratiques, religieuses q  nos parcours de formation q  notre famille

Contenu de l’intervention (1/5)

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Contenu de l’intervention (2/5)

Dans les sociétés traditionnelles dont font partie les Kogis, « connais-toi toi-même et tu connaitras l’univers et les hommes », est un principe éducatif de base. Il ne s’agit donc pas d’opposer la vision du monde Kogis, et celle de nos sociétés modernes, mais au contraire, de les appréhender comme complémentaires. L’une ésotérique (intérieure qui s’intéresse aux dimensions invisibles de la vie, émotions, énergies, croyances, intentions etc..) et l’autre, qui s’intéresse aux dimensions exotériques (extérieures, matières, objets, formes incarnées etc..) en recherchant les voies du dialogue et de la rencontre.   La rupture anthropologique est suscitée par le basculement d’une large partie de la population mondiale, des campagnes vers les villes (en 2007, 50% de la population mondiale vivait en ville, en 2027 : 75%...).   Les milieux naturels, cette nature qui nos porte et nous fait vivre, n’est plus vue que comme, ressources naturelles, paysage ou terrain de loisir.   Ultime étage d’une pyramide, ou l’on apprend à apprivoiser et canaliser ses désirs «  ce cheval fou », comme le nomme les Kogis….

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La communauté Kogis fontionne par l’observation et la mise en oeuvre des “règles” du vivant, à savoir : q  Le don. C’est la base des services rendus par les écosystèmes : ils sont gratuits ! q  L’idée de système et interdépendance : on se positionne dans le regard de l’autre q  L’émergence. Quelquechose “d’intelligent” sortira nécessairement à partir du moment où l’on fait appel à

des méthodes appropriées q  La coopération. Les exemples de coopération abondent dans le monde animal. La loi de la jungle ne serait-

elle pas plutôt appropriée au monde urbain ? q  La mémoire. La moindre parcelle de vie (cellule) contient une information/mémoire/énergie, qui, s’il

venait à disparaître, compromettrait la survie même de la cellule q  La créativité q  L’homéostasie (l’équilibre). Tout système recherche en permanence un équilibre, c’est d’ailleurs la raison

pour laquelle il évolue sans cesse

Les valeurs fondamentales sur lesquelles reposent le Mamu (chaman Kogi – ayant passé 18 ans dans l’obscurité), et desquelles nous pouvons tirer des enseignements sont : q  L’humour, ou la poésie : une intelligente manière de colorer la réalité (surtout s’agissant de sujets

environnementaux..) q  La cohérence (entre le ‘dire’ et le ‘faire’) q  L’humilité (se mettre dans la tête de l’autre, pratiquer l’écoute active) q  La justesse (être adapté au moment opportun)

Contenu de l’intervention (3/5)

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Contenu de l’intervention (4/5)

La déclinaison dans l’entreprise nous amène se poser cette question : comment passer du management “pierre” (consistant à s’efforcer à convaincre les gens car j’ai raison) au management “cheval” (consistant à donner aux gens envie d’y aller ; il s’agit ici au contraire de tenir la bride). Le partage d’une situation en entreprise s’opère idéalement en trois étapes : 1.  L’élaboration d’un diagnostic partagé, permettant de se mettre d’accord sur la perception d’une situation,

ce qui va bien, moins bien etc… è où en sommes-nous ? 2.  Puis la construction, d’un rêve, d’une étoile, d’une vision partagée, de ce vers quoi souhaite tendre une

organisation, un collectif. Plusieurs techniques de projections, permettent de se déconnecter des contingences du présent, oser la projection, vers un futur non encore advenu è où voulons-nous aller ?

3.  Enfin, un « plan stratégique », permettra de poser les bases, des axes opérationnels de mise en œuvre è comment allons-nous faire ?

Pour progresser dans ces trois dimensions, il est nécessaire, comme le font les Kogis, d’ouvrir des espaces de confiance, où les participants peuvent se dire réellement et en conscience les choses. Ce n’est qu’en identifiant les failles, les faiblesses, les manques, que l’on peut progresser, individuellement et collectivement, et donc s’engager. Est cité également l’exemple des levées de liquidités opérées dans les fonds de dotation (ex. http://klub-terre.com/index.php), qui fonctionnent sur un mode particulier : q  Récolte de dons (sans qu’un projet soit connu), mis à disposition de la société civile q  Sélection d’un projet sur un mode participatif L’audience comprend dès lors en quoi la connaissance de ces concepts nous seront utiles dans l’exercice d’une profession ayant trait du Développement Durable.

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En conclusion

L’intervention d’E. Julien nous a surpris, et conquis. La configuration de l’audience, propice à l’échange (en cercle), la décontraction abordée pour témoigner d’un sujet sensible (pour synthétiser : la mise en contact avec les contre-effets du développement sur une communauté autochtone), les séances de dialogue, ne correspondent pas tout à fait au cadre des interventions précédentes, si passionnantes et riches fussent-elles. L’intérêt porté au témoignage porté par Eric Julien est multiple : q  tout d’abord cette unique expérience de vie, dont rêve tout ‘anthropologue’ dans l’âme ou apprenti

aventurier : celle d’une rencontre fortuite avec le (grand) Autre. A titre personnel, je repense alors aux Sherpas du Khumbu (Népal), ou encore au thème développé dans ‘La Vallée’ de Barbet Schroeder…

q  sa vaste culture, assise notamment sur une solide formation q  l’expérience du conseil aux cadres en entreprise q  les quelques ‘trucs et astuces’ de communication, connaissance de certains mécanismes

psychosociologiques fort utiles en contexte professionnel

L’univers dans lequel évolue Eric Julien ne sera sans doute pas le nôtre. Mais cette rencontre – pas tout à fait le fruit de hasard – restera dans nos mémoires. Pour terminer, rappelons-nous que c’est le processus, la démarche, qui précède le résultat. Chez les Kogis même, le processus (la méthode de travail) précède la forme (le résultat).

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q  “Au nom de quoi je dis/fais des choses” ? q  “Vous voulez aller jusqu’où, plus vite ?” (Mamu, chaman Kogi) q  “Tu es, donc je suis” q  “Qu’est-ce qu’on va faire ensemble en amont ?” (plutôt que comment on fait après)

q  Apprendre quelquechose, c’est le pratiquer. L’expérience seule change les comportements q  L’autre me renseigne sur ce que je ne sais pas de moi q  Passer de la controntation à la controverse et au dialogue : “Raconte-moi pourquoi…?”, “Comment

feriez-vous si….?” q  Réver, et illustrer son rêve q  Le rêve est fait pour se mettre en marche

De bonnes questions à se poser… des messages clés…

ECRIVREZ VOTRE HISTOIRE !