fonction l p-adique d'une forme modulaire
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© Cédric Dion, 2020
Fonction L p-adique d'une forme modulaire
Mémoire
Cédric Dion
Maîtrise en mathématiques - avec mémoire
Maître ès sciences (M. Sc.)
Québec, Canada
Résumé
L'objectif de ce mémoire est de donner la construction de la fonction L p-adique associée
à une forme modulaire en suivant l'exposition de [MTT86] et d'étudier les coecients du
développement en série de puissances de cette fonction. Dans le chapitre 1, nous introduisons
les nombres p-adiques. Le corps des nombres p-adiques est déni de manière arithmétique et
est un outil important en théorie des nombres. Nous étudierons également les fonctions dont
le domaine est les p-adiques et les distributions p-adiques. Ensuite, nous verrons les notions
de base sur les formes modulaires et nous présenterons leur fonction L complexe. Dans le
chapitre 2, nous construirons une distribution p-adique µf attachée à une forme modulaire
f avec la propriété que cette dernière interpole les valeurs de la fonction L complexe de f .
Par la suite, nous dérivons l'équation fonctionnelle pour la fonction L p-adique obtenue par
la distribution µf . Finalement, dans le chapitre 3, nous démontrerons des conséquences de
l'équation fonctionnelle. Certains résultats de ce chapitre sont nouveaux et ont été publiés
dans [DS19].
ii
Table des matières
Résumé ii
Table des matières iii
Remerciements iv
Introduction 1
1 Notions préliminaires 3
1.1 Analyse p-adique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31.1.1 Nombres p-adiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31.1.2 Extensions de Qp . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71.1.3 Fonctions et distributions p-adiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
1.2 Formes modulaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121.2.1 Dénitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131.2.2 Opérateurs de Hecke . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
1.3 Caractères de Dirichlet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191.4 Fonctions L complexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
2 Fonctions L p-adiques 25
2.1 Symboles modulaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 252.1.1 Dénition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 252.1.2 Action des opérateurs de Hecke . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 282.1.3 Convolutions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
2.2 Construction de Lpf,s . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 322.3 Équation fonctionnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 382.4 Périodes et valeurs d'interpolation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 412.5 Le cas pSap . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
3 Conséquences de l'équation fonctionnelle 50
3.1 Coecients directeurs et sous-directeurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 513.2 Invariants d'Iwasawa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
Conclusion 59
Bibliographie 60
iii
Remerciements
Je tiens d'abord à remercier mon superviseur Antonio Lei pour son encadrement, ses précieux
conseils et sa passion pour les mathématiques. Sans lui, ce mémoire n'aurait pas pu être
complété. Je remercie également Florian Sprung d'avoir accepté de collaborer au projet qui a
mené à l'écriture de l'article [DS19]. Je remercie Cassandra De Blois pour son support continu.
Je remercie le département de mathématiques et de statistique de l'Université Laval pour avoir
fourni un environnement propice à l'écriture de ce mémoire. Finalement, je remercie les fonds
de recherche nature et technologie du Québec ainsi que le conseil de recherche en sciences
naturelles et génie du Canada pour le support nancier accordé lors de ma maîtrise.
iv
Introduction
La conjecture de Birch et Swinnerton-Dyer est un important problème ouvert en mathéma-
tiques. Cette conjecture prédit que le premier coecient non nul du développement de Taylor
de la fonction L complexe associée à une courbe elliptique peut être exprimé en fonction d'in-
variants arithmétiques de la même courbe elliptique. Les travaux d'Amice et Vélu [AV75] en
1975 ont montré qu'il est possible de construire un analogue p-adique de la fonction L complexe
d'une courbe elliptique ou, plus généralement, de la fonction L complexe d'une forme modu-
laire. Par la suite, en utilisant la fonction d'Amice-Vélu, Mazur,Tate et Teitelbaum [MTT86]
ont formulé une version p-adique de la conjecture de Birch et Swinnerton-Dyer. Celle-ci relie
plutôt le premier terme non nul de la fonction L p-adique à la valuation p-adique de certains
invariants d'une courbe elliptique.
Soit H z x iy > C y A 0 le demi-plan supérieur de Poincaré. Une forme modulaire
f de poids k pour le groupe SL2Z est une fonction holomorphe f H C respectant une
condition de croissance et une propriété d'invariance par rapport à SL2Z. Pour une forme
modulaire f xée, il est possible de dénir des symboles modulaires par la formule
λfP ;a,m 2πiSa~m
ªfzP mz adz
où P est un polynôme de degré plus petit ou égal à k 2. La fonction L p-adique que nous
voulons construire est en fait une distribution (une mesure non bornée) sur le groupe des
entiers p-adiques Zp. Les ensembles ouverts et compacts de Zp étant de la forme apvZp, une
approche naïve pour construire une telle distribution serait de poser
µa pvZp λf0;a,pv 2πiSapv
ªfzdz.
Or, déni ainsi, µ n'est pas une distribution. En particulier, si l'ensemble U est la réunion
disjointe d'ensembles Vi, µU x PµVi. Nous verrons dans le chapitre 2 comment modier
la dénition de µ an d'obtenir une distribution. Nous montrons qu'à partir de µ, il est pos-
sible de dénir une fonction p-adique analytique Lpf,s en intégrant les caractères de Zp par
rapport à µ.
1
La fonction L p-adique interpole certaines valeurs spéciales des convolutions de la fonction L
complexe par des caractères de Dirichlet. Par exemple,
Lpf,1 ep Lf,1où ep est un facteur d'interpolation explicite. Cette propriété donne un lien entre la théorie
complexe et la théorie p-adique. De plus, en imposant certaines conditions sur f , la fonction
L p-adique satisfait une équation fonctionnelle de la forme
Lpf,s gsLpf,2 s.La symétrie de la fonction Lpf,s autour de l'axe s 1 donne lieu à plusieurs phénomènes
intéressants. Par exemple, en utilisant l'équation fonctionnelle, il est possible de montrer que
le premier coecient non nul dans le développement de Taylor de Lpf,s est un multiple du
deuxième coecient non nul. Plus précisésment, en écrivant
Lpf,s ams 1m am1s 1m1
où m est l'odre d'annulation de Lpf,s en s 1, on obtient
am1 1
2logp`Qe am.
Il s'agit du théorème 3.1.4 démontré par Bianchi [Bia19]. Au théorème 3.1.6, nous adaptons la
démonstration de Bianchi au cas des fonctions L p-adiques plus et moins dénies par Pollack
[Pol03]. Finalement, nous montrons que le µ-invariant et le λ-invariant de Lpf,ψ,s sont
inchangés par la substitution ψ ( ψ.
2
Chapitre 1
Notions préliminaires
1.1 Analyse p-adique
Cette section présente un bref résumé des notions d'analyse p-adique qui nous seront néces-
saires. Nous rappellerons la dénition des nombres p-adiques et nous verrons quelques proprié-
tés des fonctions p-adiques et des distributions p-adiques.
1.1.1 Nombres p-adiques
Pour motiver cette sous-section, nous rappelons la construction des nombres réels. On considère
la norme YY induite par la valeur absolue classique sur les nombres rationnels. C'est-à-dire,
pour x > Q, YxY SxS. L'espace des nombres rationnels muni de la métrique induite par YYn'étant pas complet, on peut le compléter on considérant l'ensemble des suites de Cauchy
modulo la relation d'équivalence an bn si et seulement si San bnS 0 lorsque n tend
vers l'inni. La complétion de Q par cette procédure donne l'ensemble des nombres réels R.
Les nombres p-adiques sont construits de façon similaire, mais en complétant Q par rapport
à une autre norme.
Dénition 1.1.1. Soit p un nombre premier. Pour n > Z0, on dénit la valuation p-adique
de n par la relation n pvpnm où p Ñm. On pose vp0 ª.
La valuation p-adique de n est donnée par la plus grande puissance de p divisant n. On étend
la dénition de vp aux nombres rationnels a~b > Q où a et b sont des entiers copremiers en
laissant vpa~b vpa vpb.Dénition 1.1.2. On dénit une norme sur Q par SxSp pvpx si x x 0 et SxSp 0 si x 0.
Proposition 1.1.3. S Sp est bel et bien une norme et satisfait l'inégalité ultramétrique
Sx ySp B maxSxSp,SySp
3
avec Sx ySp maxSxSp,SySp si SxSp x SySp.Démonstration. La preuve est donnée dans [Kob84, page 2]. Ì
Une norme qui satisfait l'inégalité ultramétrique s'appelle une norme non archimédienne.
Lemme 1.1.4. Soit xn b Q une suite. Alors, xn est une suite de Cauchy par rapport à
la norme p-adique si Sxn1 xnSp 0 lorsque nª.
Démonstration. Soit ε A 0. Alors il existe N tel que Sxn1 xnSp @ ε pour tout n C N . Soit
N @ n @m. Alors,
Sxm xnSp Sxm xm1 xm1 xm2 xn1 xnSpB maxSxm xm1Sp, Sxm1 xm2Sp, . . . ,Sxn1 xnSp@ ε
par l'inégalité ultramétrique. Ì
Comme c'était le cas pour la valeur absolue S S, Q muni de la métrique induite par S Sp n'estpas complet. En eet, supposons que p x 2,3 et considérons la suite xn ap
noù 1 @ a @ p 1
est xé. Alors, xn1 xn apn1 ap
n ap
napnp1 1. Or, par le petit théorème de Fermat,
apnp1 1 mod pn1. Ainsi, Sapnp1 1Sp B pn1 et la suite xn est donc une suite de
Cauchy. Supposons que xn x > Q. On remarque que xp x par la dénition de notre suite
xn. Il suit que x 1 ou 0. Puisque SxnSp 1 pour tout n, il suit que x ne peut pas être
égal à 0. De plus, comme apn a mod p et que a ~ 1 mod p, car 1 @ a @ p 1, il suit que
xn 1 ~ 0 mod p. Donc, x x 1. On conclut que x ¶ Q. Cet argument peut être adapté aux
cas où p 2 et p 3.
Nous supposerons dès maintenant que p est toujours un nombre premier impair xé. Cela aura
pour eet de simplier l'exposition puisque, lorsque p 2, l'énoncé de plusieurs théorèmes doit
être modié.
Dénition 1.1.5. On dénit le corps des nombres p-adiques Qp comme étant le complété de
Q par rapport à la norme p-adique. C'est-à-dire
Qp xn xn >Q et xn est une suite de Cauchy par rappport à S Sp~ où xn yn si et seulement si Sxn ynSp 0.
Le fait que Qp est un corps peut être montré en utilisant les propriétés générales du complété
d'un corps normé. Il existe une inclusion naturelle deQ dansQp donnée par x( x,x,x,x, . . ..On étend la norme à Qp en posant SxnSp limnª SxnSp. Cette limite existe et ne dépend
pas du choix de représentant (voir [Kob84, page 10]).
4
Dénition 1.1.6. L'anneau des entiers p-adiques est Zp x > Qp SxSp B 1 et les unités
p-adiques sont les éléments de l'ensemble Zp x > Zp SxSp 1.
Comme il n'est pas toujours évident de travailler avec cette dénition des nombres p-adiques,
la proposition suivante nous donne une manière plus concrète de visualiser ces nombres.
Proposition 1.1.7. Il existe une bijection entre Qp et l'ensemble
ª
Qim
aipi ai > 0,1, . . . ,p 1,m > Z¡ .
Sous cette bijection, les entiers p-adiques correspondent à
ª
Qi0
aipi ai > 0,1, . . . ,p 1¡ .
Démonstration. Voir [Kob84, page 11, Theorem 2] et la discussion qui s'ensuit. Ì
À partir de maintenant, nous verrons donc un élément x > Qp comme étant donné par une
somme en base p innie. Si x Pªim aip
i, alors la valuation de x est simplement donnée
par le premier indice non nul. Par exemple, pour x 4 53 2 54 56 dans Z5, on a que
v5x 3. Pour x,y > Zp, on écrira x y mod pn si xy > pnZp. Si x et y sont des entiers, cette
dénition correspond à la notion habituelle de congruence dans Z. De plus, Zp est donné par
l'ensemble des entiers p-adiques avec a0 x 0. Nous avons également l'application Zp Z~pnZde réduction modulo pn pour tout n en envoyant Pª
i0 aipi sur la somme partielle Pn1
i0 aipi.
Le but du reste de cette sous-section sera d'examiner plus en détail la structure de l'anneau
Zp. Pour y arriver, nous allons avoir besoin du lemme de Hensel. Ce résultat permet de trouver
des solutions aux équations polynomiales dans Zp en cherchant plutôt des solutions dans un
corps ni Fp.
Lemme 1.1.8 (de Hensel). Soit fx c0 c1x cnxn un polynôme dans Zpx et soit
f x c1 2c2x n 1cnxn1 sa dérivée formelle. Supposons qu'il existe a0 un entier p-
adique tel que fa0 0 mod p, mais que f a0 ~ 0 mod p. Alors, il existe un unique entier
p-adique a tel que fa 0 et a a0 mod p.
Démonstration. Il s'agit d'un argument similaire à la démonstration de l'algorithme de Newton
et est donné dans [Kob84, page 16, Theorem 3]. Ì
Un corollaire de ce lemme est que Zp contient les p 1-ième racines de l'unité. En eet, soit
fx xp1 1. Par le petit théorème de Fermat, pour a > 1,2, . . . ,p 1, on a que fa 0
mod p. Aussi, f a p1ap2 ~ 0 mod p. Par le lemme de Hensel, il existe un unique entier
5
p-adique satisfaisant xp1 1 et étant congru à a. Comme on avait p1 choix possibles pour
a, on conclut que toutes les p 1-ième racines de l'unité sont dans Zp. On note par µp1
l'ensemble des p 1-ième racines de l'unité.
On dénit le relèvement de Teichmüller Z~pZ µp1 ` Zp par l'application qui envoie
a > Z~pZ à l'unique racine p 1-ième congrue à a modulo p. On dénit aussi le caractère
de Teichmüller ω Zp µp1 ` Zp comme étant la composition de l'application de réduction
modulo p avec le relèvement de Teichmüller. C'est-à-dire, si a > Zp , on réduit a modulo p pour
obtenir un élément de Z~pZ puis on applique le relèvement. Pour toute unité p-adique a,
ωa est donc l'unique racine p 1-ième de l'unité avec la propriété que a ωa mod p.
Finalement, on dénit l'application `e Zp 1 pZp par `ae a
ωa .
Proposition 1.1.9. Les applications ω et `e sont des homomorphismes de groupes et induisent
l'isomorphisme
Zp Z~pZ 1 pZpa( a, a~ωa,
où a est la réduction de a modulo p.
Démonstration. Nous montrons d'abord que ω est un homomorphisme. Soit a,b > Zp . Alors,
ωab est l'unique élément de µp1 congru à ab modulo p. ωa et ωb sont respectivement
les racines congrues à a et b modulo p. Ainsi, ωaωb ab mod p ce qui implique que
ωaωb ωab mod p. Or, il y a une seule racine p 1-ième par classe de congruence
modulo p par le lemme de Hensel. On conclut que ωab ωaωb.Le fait que `e soit un homomorphisme suit directement du fait que ω l'est.
Supposons maintenant que a( 1,1. Cela implique que a 1 et aωa 1. La première égalité
nous dit que ωa 1 et donc a 1 par la deuxième égalité. Ainsi, l'application considérée
est injective. Pour la surjectivité, considérons l'élément a,b > Z~pZ 1 pZp. Nousarmons que ωab est une préimage pour cet élément. En eet, ωab a, car b 1 mod p
et ωabωωab
ωabωωaωb
ωabωa b. Donc, l'application est un isomorphisme. Ì
Dénition 1.1.10. Un groupe topologique G est dit topologiquement cyclique s'il existe γ > G
tel que la fermeture du sous-groupe engendré par γ est G. Un tel γ s'appelle un générateur
topologique de G.
Proposition 1.1.11. Le groupe des entiers p-adiques Zp, est topologiquement cyclique.
Démonstration. Nous montrons que 1 est un générateur topologique de Zp. D'abord, nous
avons que `1e Z. Pour montrer le résultat, il sut de montrer que Z est dense dans Zp.
Soit donc x Pªi0 aip
i > Zp. Alors, la suite d'entiers PNi0 aipiN>N
tend vers x et le résultat
suit. Ì
6
Il existe aussi une construction plus algébrique des nombres p-adiques que nous détaillons
ci-bas. Considérons le système dirigé Z~pnZ muni des applications de transition Z~pnZ Z~pn1Z données par la réduction modulo pn1. Alors, les entiers p-adiques Zp sont obtenus en
prenant la limite inverse limÐ
Z~pnZ. Sous cette construction, Zp limÐ
Z~pnZ. Finalement,
Qp est donné par le corps de fractions de Zp. Un groupe donné par une limite inverse de
groupes nis s'appelle un groupe proni.
1.1.2 Extensions de Qp
Dans les prochaines sections, nous allons nous intéresser à des solutions de certaines équations
polynomiales. Par exemple, nous allons considérer les racines du polynôme de Hecke fX X2 apX pk1 qui sera déni dans la section sur les symboles modulaires. Or, Qp n'est pas
algébriquement clos. Pour s'en convaincre, considérons le polynôme pX X2 n où n est
un entier tel que 0 @ n @ p et n n'est pas un carré modulo p. Un zéro de ce polynôme est
une racine carrée de n. Supposons qu'une telle racine existe. Nous pouvons supposer que cette
racine est dans Zp par le lemme de Gauss. Donc, n pm u2 pour un certain u > Zp et m C 0.
On remarque immédiatement que m 0, car sinon n 0 mod p ce qui contredit que 0 @ n @ p.
Donc,
n u2 a0 a1p a2p
2 . . .2> a2
0 pZp.
La réduction modulo p donne n a20 mod p ce qui contredit le fait que n n'est pas un carré
modulo p. On conlut que les racines de pX ne sont pas dans Qp. Cela nous amène vers
l'étude des extensions de Qp.
Proposition 1.1.12. Soit L~Qp une extension nie. Alors, il existe une unique norme non
archimédienne S S sur L qui étend la norme S Sp de Qp. De plus, pour α > L, celle-ci est donnée
par
SαS SNL~QpαSLQp
1
p .
Démonstration. Il s'agit de [Kob84, page 61]. Ì
Cela nous donne du même coup une valuation v sur L qui étend celle de Qp en posant
vα logp SαS. Ici, logp est le logarithme en base p à ne pas confondre avec le logarithme
p-adique de la prochaine section. Notons par n le degré de L~Qp. L'image de L sous v est
contenue dans 1nZ. Comme l'image de v est un sous-groupe additif non trivial de 1
nZ, l'image
est de la forme 1eZ pour un certain entier e qui divise n. Ce e est appelé l'indice de ramication
de L~Qp. Un élément π > L qui satisfait vπ 1e est appelé un uniformisant de L. L'anneau
des entiers de L est l'ensemble
OL x > L SxS B 1
7
et le corps résiduel de L est OL~π.Proposition 1.1.13 (Lemme de Hensel généralisé). Soit fX > OLX et supposons qu'il
existe k > OL~π tel que fk 0 mod π, mais f k x 0 mod π. Alors, il existe a > OL tel que
fa 0 et a k mod π.
Démonstration. Voir [Lan94, page 42 proposition 2]. Ì
Soit Qp une clôture algébrique de Qp. Comme Qp est l'union de toutes les extensions nies de
Qp, on a une unique norme sur Qp qui étend celle de Qp. Pour α >Qp, celle-ci est donnée par
SαS SNQpα~QpαSQpαQp
1
p .
Cependant, il est possible de montrer que Qp n'est pas complet.
Proposition 1.1.14. Le corps normé Qp n'est pas complet.
Démonstration. Soit α Pªn1 anp
n où an 1 si pSn et an ζn une racine n-ième primitive de
l'unité si p Ñ n. Alors,
SanpnS SpnS pn,car SζnSn 1 implique que SζnS 1 puisque S S est à valeurs dans Q. Donc, anpn 0 lorsque
n ª. Supposons que Qp est complet. Alors, α converge vers un élément de Qp (ce résultat
est démontré dans le lemme 1.1.15 de la section suivante). En particulier, α > L, une extension
nie de Qp. Soit π un uniformisant de L. On montre par récurrence que an > L pour tout n.
D'abord, a1 ζ1 1 > L, donc le cas de base est vérié. Supposons maintenant que an > L pour
tout n @ m. Sans perte de généralité, on suppose que p Ñ m, car sinon am 1 est clairement
dans L. On aura donc que
β pm α m1
Qn1
anpn > L.
Mais, β amPnAm anpnm. Donc, am ζm β mod pOL. Cela implique que βm 1 mod πOL.
Autrement dit, β mod π satisfait le polynôme fX Xm 1 mod π. De plus, f β mod π
mβm1 mod π x 0 mod π, car p Ñ m, donc π Ñ m. Par le lemme de Hensel généralisé, toutes
les racines de Xm 1 sont dans OL. Ainsi, ζm am > L. Par récurrence, an > L pour tout
n. C'est une contradiction, car si q est un nombre premier, le polynôme minimal de ζq est le
polynôme d'Eisenstein Xq1 Xq2 . . . X 1 et Qpζq est une extension de degré q 1.
Ainsi, pÑnQpζn est une extension de degré inni, mais L est de degré ni. On conclut que
α ¶ L et Qp n'est pas complet. Ì
8
Comme nous avons passé de Q à Qp, nous pouvons compléter Qp pour obtenir Cp, le corps des
nombres complexes p-adiques. Heureusement, il s'agit d'un corps algébriquement clos [Kob84,
page 72 theorem 13]. Si x xn >Cp, la norme de x est donnée par SxS limnª SxnS. On note
OCp x >Cp SxS B 1 l'anneau des entiers de Cp.
1.1.3 Fonctions et distributions p-adiques
Nous présentons d'abord deux lemmes qui nous serviront à étudier les fonctions d'une variable
p-adique.
Lemme 1.1.15. Soit an une suite dans Qp, ou plus généralement, dans un corps ultramé-
trique complet. Supposons que an 0. Alors, la série Pªn0 an converge.
Démonstration. Par dénition de la convergence de séries, nous devons montrer que la suite
des sommes partielles converge. Soit N AM . Par l'inégalité ultramétrique,
W NQn0
an M
Qn0
anWp
B maxSaN Sp, SaN1Sp, . . . , SaM1Sp 0,
car an 0. Ainsi, la série converge. Ì
Lemme 1.1.16. La valuation p-adique de n! est Pªk1 npk .
Démonstration. Il s'agit de compter tous les multiples de p entre 1 et n. On remarque également
que la somme est en fait une somme nie. Ì
Dénition 1.1.17. Le logarithme p-adique est déni par la série de puissances
logp1 x ª
Qn1
1n1xn
n.
Remarque 1.1.18. Attention de ne pas confondre logp avec le logarithme en base p. À partir
de maintenant, logp fera toujours référence au logarithme p-adique.
Proposition 1.1.19. logp1 x converge sur x > Zp SxSp @ 1.Démonstration. Soit x > Zp tel que SxSp @ 1. Donc, x est de la forme pa pour un certain a > Zp.
La valuation des termes de la suite est égale à
vp 1n1pann
n1 vpa vpn.Or, vpn croît comme logn ce qui nous donne que vp 1n1pan
n tend vers l'inni. Par le
lemme 1.1.15, logp1 x converge. Ì
9
Dénition 1.1.20. L'exponentielle p-adique est la série de puissances
exppx ª
Qn0
xn
n!.
Proposition 1.1.21. exppx converge sur x > Zp SxSp @ 1.
Démonstration. Soit x tel que dans l'énoncé, c'est-à-dire, x pa pour un certain a > Zp. Nous
avons
vppan~n! n1 vpa ª
Qk1
n~pk C n n1
p
1
p2 n n
p 1.
Par le lemme 1.1.15, expp converge sur l'ensemble voulu. Ì
Comme dans le cas réel, logp est l'inverse de expp et ces deux fonctions satisfont les propriétés
standards logpxy logpx logpy et exppxy exppx exppy. De plus, ces fonctionsinduisent un isomorphisme Zp, 1 pZp,. Pour a > 1 pZp, soit ax exppx logpa lafonction puissance.
L'espace métrique Qp possède une base d'ensembles ouverts de la forme a pnZp x > Qp
Sx aSp B 1~pn pour a > Qp et n > Z [Kob84, page 30]. Ces ensembles sont aussi fermés, car
leur complément est aa pnZp où a parcourt les éléments de Qp tels que a ¶ a pnZp.
Proposition 1.1.22. Zp est compact.
Démonstration. Comme nous travaillons dans un espace métrique, il sut de montrer que
toute suite de Zp possède une sous-suite convergente. Soit xn ` Zp avec
x1
ª
Qn0
a1,npn, x2
ª
Qn0
a2,npn, x3
ª
Qn0
a3,npn, . . .
Puisque ai,1 > 0,1, . . . ,p 1, il y a une valeur dans cet ensemble qui apparaîtra pour une
innité de ai,1, disons que cette valeur est a0. On choisit donc la sous-suite des éléments dont
le développement p-adique commence par a0. Par le même raisonnement, le deuxième terme
des membres de cette sous-suite ai,2 prendra une innité de fois la même valeur, disons a1. On
en extrait tous les termes qui prennent la valeur a2 au deuxième terme de leur développement
p-adique pour construire une sous-sous-suite. On construit ainsi par récurrence une sous-suite
de la suite originale qui converge vers l'entier p-adique a0 a1p . . .. Ì
On déduit que les ensembles de la forme a pnZp sont compacts, car les applications de
translation x ( a x et de multiplication x ( pnx sont continues. Finalement, toute réunion
nie 8aa pnZp est un ensemble compact.
10
Dénition 1.1.23. Une fonction f Zp Qp est dite localement constante si pour tout point
x > Zp, il existe un voisinage U de x tel que fU est un singleton. On note par LCZpl'ensemble des fonctions localement constantes sur Zp.
Les fonctions localement constantes joueront les mêmes rôles que le fonctions étagées pour
dénir l'intégration p-adique.
Dénition 1.1.24. Pour n C 0 et a > Zp, la fonction caractéristique de a pnZp est l'appli-
cation χapnZp Zp 0,1 donnée par χapnZpx 0 si x ¶ a pnZp et χapnZpx 1 si
x > a pnZp.
Proposition 1.1.25. Soit f Zp Qp une fonction localement constante. Alors, f est une
combinaison nie Qp-linéaire de fonctions caractéristiques.
Démonstration. Soit x > Zp. Puisque f est localement constante, il existe un voisinage apnZpde x tel que pour tout y > a pnZp, fy 1 c χapnZpy c pour une certaine constante
c > Qp. Considérons maintenant le recouvrement ouvert Vi ai pniZp de Zp où, pour
chaque xi > Zp, Vi est un voisinage de xi où f prend la valeur constante ci. Comme Zp est
compact, il existe un sous-recouvrement ni de ce recouvrement, disons UiNi1. Donc,
fx α1χU1x α2χU2x αNχUN xpour certaines constantes α1,α2, . . . αN . Ì
Dénition 1.1.26. Une distribution p-adique sur Zp est un homomorphisme Qp-linéaire de
l'espace LCZp vers Qp. Si f > LCZp et µ est une distribution p-adique, alors on écrit R fµpour la valeur de µ évalué en f .
De manière équivalente, on peut dénir une distribution p-adique µ comme étant une appli-
cation additive de l'ensemble des ensembles ouverts et compacts de Zp vers Qp. La propriété
d'être additive veut dire que si U est l'union disjointe de U1,U2, . . . Un, alors µU Pnk1 µUk.Étant donnée une distribution µ selon la première dénition, on obtient une application ad-
ditive en posant µU R χUµ. Réciproquement, étant donnée une application additive µ, on
obtient un homomorphisme Qp-linéaire sur LCZp en posant R χUµ µU.Proposition 1.1.27. Toute application µ de l'ensemble des compacts ouverts de X ` Zp vers
Qp qui satisfait la propriété
µa pnZp p1
Qb0
µa bpn pn1Zppour tout a pnZp `X s'étend uniquement à une distribution p-adique sur tout X.
11
Démonstration. Voir [Kob84, page 32]. Ì
Dénition 1.1.28. Une distribution p-adique µ sur X est une mesure s'il existe une constante
B >R telle que SµUSp B B pour tout ensemble ouvert et compact U `X.
L'avantage d'avoir une mesure est que l'intégrale d'une fonction continue peut être dénie à
l'aide des sommes de Riemann. Cela n'est pas toujours le cas pour les distributions p-adiques.
Soit f une fonction continue (la dénition de la continuité est par rapport à la norme p-adique)
et soit
Sn,xa,n Q0BaBpn
apnZp
S fxa,nχapnZpxa,nµ,où xa,n est choisi dans l'ensemble a pnZp.
Théorème 1.1.29. Les sommes de Riemann Sn,xa,n convergent vers une limite dans Qp qui
ne dépend pas des choix de xa,n.
Démonstration. Voir [Kob84, page 40]. Ì
Ce théorème motive la dénition suivante.
Dénition 1.1.30. Si f Zp Qp est une fonction continue et µ est une mesure, on dénit
R fµ comme la limite des sommes de Riemann Sn,xa,n .
Dénition 1.1.31. Soit U b Zp un ensemble ouvert. Une fonction f U Cp est dite
localement analytique s'il existe un recouvrement de U par des compacts ouverts Ui aipviZptel que, sur chaque Ui, f est donnée par une série de puissances convergente
fx QnC0
bnx ainà coecients dans Cp.
Par exemple, les fonctions localement constantes, la fonction logp et la fonction expp sont
localement analytiques. Nous verrons plus tard que les homomorphismes continus de Zp dans
Cp sont aussi des fonctions localement analytiques.
1.2 Formes modulaires
Dans cette section, nous résumons les résultats importants concernant les formes modulaires
en suivant le livre de Diamond-Shurman [DSS05]. Les formes modulaires sont des fonctions
du demi-plan complexe supérieur satisfaisant des propriétés d'invariances par rapport à un
sous-groupe de transformations matricielles.
12
1.2.1 Dénitions
Dénition 1.2.1. On dénit le groupe modulaire SL2Z comme étant le groupe des matrices
2 2 à coecients dans Z dont le déterminant est 1 :
SL2Z ¢¦¤<@@@@>a b
c d
=AAAA? a,b,c,d > Z, ad bc 1
£§¥ .
Dénition 1.2.2. On notera le demi-plan complexe supérieur par H z >C Imz A 0.
On dénit maintenant une action de SL2Z sur H par γz azbczd où γ
<@@@@>a b
c d
=AAAA?> SL2Z et
z > H. Il est possible de montrer que pour de tels z et γ, γz > H et l'action ainsi dénie est
une action de groupes.
Dénition 1.2.3. Soit k un nombre naturel. On dira qu'une fonction méromorphe f H C
est faiblement modulaire de poids k si
fγz cz dkfz
pour γ <@@@@>a b
c d
=AAAA?> SL2Z et z >H.
En particulier, comme la matrice<@@@@>1 1
0 1
=AAAA?est un élément de SL2Z, on a fz 1 fz
pour toute fonction f faiblement modulaire de n'importe quel poids. Ainsi, f possède un
développement de Fourier de la forme fz Pn>Z anqn où q e2πiz. Remarquons également
qu'il n'existe pas de fonction faiblement modulaire non nulle de poids impair. En eet, on a
fz 1kfz en considérant la matrice<@@@@>1 0
0 1
=AAAA?> SL2Z.
Dénition 1.2.4. On dira d'une fonction faiblement modulaire qu'elle est holomorphe à l'in-
ni si elle possède un développement de Fourier de la forme fz Pªn0 anq
n ou, de manière
équivalente, si limImzª fz existe (voir [DSS05, page 3]).
Dénition 1.2.5. Soit k un nombre naturel. Une fonction f H C est une forme modulaire
de poids k si
(1) f est holomorphe sur H,
(2) f est faiblement modulaire de poids k,
(3) f est holomorphe à l'inni.
On note MkSL2Z l'ensemble des formes modulaires de poids k par rapport à SL2Z.
13
Dénition 1.2.6. Une forme parabolique de poids k est une forme modulaire de poids k dont
le premier coecient de son développement de Fourier est nul :
fz ª
Qn1
anqn.
L'ensemble des formes paraboliques de poids k par rapport à SL2Z est noté SkSL2Z.
L'espace vectoriel SkSL2Z est un sous-espace vectoriel deMkSL2Z.Il peut être intéressant de considérer des fonctions qui sont faiblement modulaires par rapport
à un sous-groupe Γ de SL2Z. Comme Γ est inclu dans SL2Z, la condition d'être faiblement
modulaire par rapport à Γ est moins restrictive que la condition d'être faiblement modulaire
pour SL2Z. Ainsi, on aura plus de formes modulaires pour Γ. On donne maintenant la
dénition précise de cette idée.
Dénition 1.2.7. Soit N un nombre naturel. Le sous-groupe de congruence principal de niveau
N est
ΓN ¢¦¤<@@@@>a b
c d
=AAAA?> SL2Z
<@@@@>a b
c d
=AAAA?
<@@@@>1 0
0 1
=AAAA?mod N
£§¥où les congruences sont considérées entrée par entrée.
Dénition 1.2.8. Un sous-groupe Γ de SL2Z est un sous-groupe de congruence si ΓN b Γ
pour un certain N >N. Dans ce cas, on dit que Γ est un sous-groupe de niveau N .
Voici deux types de sous-groupes de congruence que nous allons rencontrer par la suite :
Γ0N ¢¦¤<@@@@>a b
c d
=AAAA?> SL2Z
<@@@@>a b
c d
=AAAA?
<@@@@>
0
=AAAA?mod N
£§¥ ,
Γ1N ¢¦¤<@@@@>a b
c d
=AAAA?> SL2Z
<@@@@>a b
c d
=AAAA?
<@@@@>1
0 1
=AAAA?mod N
£§¥ ,où désigne des entiers quelconques.
Dénition 1.2.9. Pour γ > SL2Z et n'importe quel entier k, on dénit l'opérateur de poids
k sur les fonctions f H C par
fγkz cz dkfγz, z >H.
Soit Γ un sous-groupe de congruence. Une fonction méromorphe f H C est donc faiblement
modulaire de poids k par rapport à Γ si fγk f pour tout γ > Γ.
14
Dénition 1.2.10. Soit Γ un sous-groupe de congruence et k un entier. Une fontion f H C
est une forme modulaire de poids k par rapport à Γ si
(1) f est holomorphe sur H,
(2) f est faiblement modulaire de poids k par rapport à Γ,
(3) fαk est holomorphe à l'inni pour tout α > SL2Z.Si de plus a0 0 dans le développement de Fourier de fαk pour tout α > SL2Z, alors f est
une forme parabolique par rapport à Γ.
On note l'ensemble des forme modulaires de poids k par rapport à Γ par MkΓ et l'ensemble
des formes modulaires paraboliques de poids k par rapport à Γ par SkΓ.1.2.2 Opérateurs de Hecke
Nous allons maintenant dénir des opérateurs qui agiront sur l'espace vectorielMkΓ1N.Le groupe Γ0N agit sur MkΓ1N via l'opérateur de poids k et son sous-groupe Γ1Nagit de façon triviale. On a donc une action de Γ0N~Γ1N Z~NZ sur MkΓ1N.L'isomorphisme est induit par l'application surjective Γ0N Z~NZ,
<@@@@>a b
c d
=AAAA?( d mod N
avec noyau Γ1N. Cette action nous donne une première famille d'opérateurs surMkΓ1N.Dénition 1.2.11. Soit d > Z~NZ. L'opérateur diamant
`de MkΓ1NMkΓ1Nest donné par `def fαk pour α
<@@@@>a b
c δ
=AAAA?> Γ0N avec δ d mod N .
Il est possible de montrer que la dénition de `de ne dépend pas du choix de α. Pour plus de
détails sur la dénition de l'opérateur diamant et les dénitions qui vont suivre, voir [DSS05,
section 5.2].
Soit ε un caractère de Dirichlet, c'est-à-dire, un homomorphisme de groupes ε Z~NZ C.
Dénition 1.2.12. On note parMkΓ1N,ε le ε-espace propre pour les opérateurs diamant,
MkΓ1N,ε f >MkΓ1N `def εdf ¦d > Z~NZ.Nous pouvons montrer que l'espaceMkΓ1N admet la décomposition
MkΓ1N ?εMkΓ1N,ε
lorsque ε parcourt tous les caractères de Dirichlet modulo N . Pour une forme modulaire f de
l'espaceMkΓ1N,ε, l'action de α
<@@@@>a b
c d
=AAAA?> Γ0N est donné par fαk `def εdf par
15
dénition du ε-espace propre et de la dénition de l'opérateur diamant. C'est pourquoi une
telle forme est parfois appelée forme pour Γ0N avec caractère ε en raison qu'elle satisfait
la propriété d'invariance pour Γ0N à ε près,fαz εdcz dkfz.
L'ensemble des ces formes modulaires est parfois notéMkΓ0N,ε.Dénition 1.2.13. Soit f >MkΓ1N,ε et soit p un nombre premier. Le p-ième opérateur
de Hecke Tp est déni par la formule suivante :
Tpfz ª
Qn0
anpfqn εppk1ª
Qn0
anfqnp.Théorème 1.2.14. Les opérateurs Tp préserve l'espaceMkΓ1N,ε. De plus, Tp envoie lesformes paraboliques sur des formes paraboliques.
Démonstration. Voir [DSS05, section 5.2] Ì
Proposition 1.2.15. Soit d,e > Z~NZ et p,q des nombres premiers. Alors,
1. Tp`de `deTp,
2. `de`ee `ee`de `dee,
3. TpTq TqTp.
Démonstration. [DSS05, Proposition 5.2.4] Ì
Nous allons maintenant étendre les dénitions de `de et Tp pour tout n naturel. On pose
`ne `de où d n mod N et `ne 0 si N Sn. Pour dénir Tn, on pose T1 1 et on dénit
récursivement
Tpr TpTpr1 pk1`peTpr2
pour les puissances de premiers. Finalement, si n Lpeii , on laisse Tn LTpeii . Par dénition,les nouveaux opérateurs Tn et `ne satisfont aussi la proposition 1.2.15.
Notre prochaine tâche est de décomposer l'espace des formes paraboliques SkΓ1N. Nousy parviendrons en dénissant un produit scalaire sur cet espace.
Dénition 1.2.16. On dénit la mesure hyperbolique sur H par dµz dxdyy2
, z x iy >H.
16
Soit D z > H Rez B 1~2, SzS C 1 8 ª. Le domaine D est appelé domaine fondamental
pour SL2Z. Soit αj des représentants du groupe quotient SL2Z~IΓ1N où I dé-
note la matrice identité. En d'autres mots, SL2Z jIΓ1Nαj . Posons XΓ1N j αjD. La notation XΓ1N provient du fait que j αjD peut être identié avec la
courbe modulaire XΓ1N, mais nous n'enterons pas plus dans les détails.
Dénition 1.2.17. Le produit scalaire de Petersson, `, e SkΓ1N SkΓ1N C, est
donné par la formule
`f,ge 1
VΓ1NSXΓ1N
fzgzImzkdµz,où la quantité VΓ1N est donnée par RXΓ1N dµz.Nous résumons quelques propriétés de ce produit scalaire dans la proposition suivante :
Proposition 1.2.18. L'intégrale dénissant le produit scalaire de Petersson converge et est
bien dénie. De plus, `, e est un produit scalaire hermitien.
Démonstration. Cela suit de la discussion de [DSS05, Section 5.4]. Ì
Si M SN , il n'est pas dicile de voir que SkΓ1M ` SkΓ1N. Une autre façon de voir
SkΓ1M comme inclu dans SkΓ1N est par l'application de multiplication par d où d
est un facteur de N~M . Pour un tel d, on laisse
αd
<@@@@>d 0
0 1
=AAAA?.
Il est possible de montrer que l'application αdk est injective et envoie SkΓ1M sur un
sous-ensemble de SkΓ1N.Dénition 1.2.19. Pour tout diviseur d de N , soit id l'application
id SkΓ1Nd12 SkΓ1N
donnée par f,g ( f gαdk. L'ensemble des formes non primitives de niveau N est donné
par
SkΓ1Nold QpSN
ipSkΓ1Nd12où la somme est prise sur les diviseurs premiers de N .
L'espace des formes non primitives correspond aux formes de niveau N provenant de formes
de niveaux inférieurs.
17
Dénition 1.2.20. L'espace des formes primitives de niveau N est le complément orthogonal
des formes non primitives par rapport au produit scalaire de Petersson,
SkΓ1Nnew SkΓ1NoldÙ.Dénition 1.2.21. Une forme modulaire non nulle f >MkΓ1N qui est une forme propre
pour les opérateurs de Hecke Tn et `ne pour tout n > Z est appelée une forme propre. Une
forme propre f > SkΓ1N est dite normalisée si a1f 1. Une forme primitive est une
forme propre normalisée dans SkΓ1Nnew.Théorème 1.2.22. L'espace SkΓ1Nnew possède une base orthogonale de formes primi-
tives. Toute telle forme primitive est dans un sous-espace propre SkΓ1n,ε et satisfait
Tnf anff pour tout n > Z.
Démonstration. Il s'agit de [DSS05, Theorem 5.8.2]. Ì
L'existence de formes propres pour tous les opérateurs de Hecke peut paraître surprenante,
mais le théorème précédent montre que l'espace des formes primitives possède en fait une base
de formes modulaires qui sont simultanément des formes propres pour tous les opérateurs de
Hecke.
Soit f Pªn1 anfqn une forme propre normalisée. On considère l'extension Qanf~Q
engendrée par les coecients de Fourier de f .
Théorème 1.2.23. Soit f > SkΓ1N une forme propre normalisée pour les opérateurs de
Hecke. Alors, les valeurs propres anf sont des entiers algébriques. De plus, Qanf estune extension nie de Q.
Démonstration. Voir les notes de Milne sur les formes modulaires [Mil, Proposition 5.27]. Ì
Il est même possible d'en dire un peu plus sur les coecients de Fourier des éléments de
S2Γ1N.Théorème 1.2.24. L'espace S2Γ1N admet une base de formes modulaires à coecients
entiers.
Démonstration. Voir [DSS05, Corollary 6.5.6]. Ì
Nous venons de voir que les coecients anf d'une forme propre normalisée de poids k pour
Γ1N se trouvent dans l'anneau des entiers OKf du corps de nombres Kf Qanf. Kf
est appelé le corps de nombres associé à f . L'algébricité des coecients permet de dénir la
notion de congruence entre deux formes modulaires.
18
Dénition 1.2.25. Soit f Pªn1 anfqn et g Pª
n1 angqn deux formes propres normali-
sées de SkΓ1N. Soit K le plus petit corps de nombres contenant les coecients de f et g
et soit p un idéal de OK . Alors, f est congrue à g modulo p si anf ang > p pour tout n.
Dans ce cas, on écrit f g mod p.
1.3 Caractères de Dirichlet
Nous avons déjà déni un caractère de Dirichlet comme étant un homomorphisme de groupes
multiplicatifs Z~NZ C. Dans cette sous-section, nous allons étudier plus en détail les
propriétés de ces caractères en suivant l'exposition du chapitre 4 des notes de cours d'Evertse
[Eve16].
Si χ est un caractère modulo N , c'est-à-dire χ Z~NZ C, alors χ induit un caractère
modulo M pour tout N SM . En eet, χ Z~MZ C déni par la composition de χ avec
la projection naturelle Z~MZ Z~NZ est un caractère modulo M .
Pour un caractère χ, on notera par χa le conjugué complexe de χa > C. De manière
équivalente, χa χa1.
Dénition 1.3.1. Soit χ un caractère de Dirichlet. Le N minimal tel que χ est déni modulo
N est appelé le conducteur de χ et est noté condχ. Si χ est un caractère modulo N avec
condχ N , alors χ est dit un caractère primitif modulo N .
Un caractère primitif est un caractère qui n'est pas induit par un autre caractère de modulo
inférieur.
Lemme 1.3.2. Soit χ un caractère modulo N et d un diviseur de N . Alors les énoncés suivants
sont équivalents :
1. χc 1 pour tout c > Z avec c 1 mod d et pgcdc,N 1,
2. χ est induit par un caractère modulo d.
Démonstration. La preuve peut être consultée dans [Eve16, Chapter 4, Lemma 4.15]. Ì
Dénition 1.3.3. Soit χ un caractère de Dirichlet modulo N . Les sommes de Gauss sont
dénies par τχ,m Pa mod N χae2πima~N pour m > Z. On pose τχ τχ,1.Proposition 1.3.4. Soit χ un caractère de Dirichlet modulo N avec N C 2. Soit b > Z. Alors,
1. τχ,b χbτχ,1 si b,N 1,
19
2. si pgcdb,N A 1 et χ est primitif, alors τχ,b χbτχ,1 0.
Démonstration. Nous suivons [Eve16, chapter 4, theorem 4.21].
1. On remarque d'abord que l'hypothèse b,N 1 implique que lorsque a parcourt un système
complet de résidus modulo N , ab parcourt également un système complet de résidus modulo
N . Posons y ab. Alors, χa χbχy et on calcule que
τχ,b Qa mod N
χae2πiba~N Qy mod N
χbχye2πiy~N χbτχ,1.
2. Par le lemme 1.3.2, pour tout q1 diviseur de N , il existe un c > Z tel que c 1 mod q1,
pgcdc,N 1 et χc x 1. Si ce n'était pas le cas, cela contredirait le fait que χ est primitif.
Soit d pgcdb,N, b1 b~d et q1 N~d. On choisit un c respectant les propriétés provenant
du lemme 1.3.2 par rapport au diviseur q1. Alors,
χcτχ,b Qx mod N
χcxe2πibx~N .
On remarque que y cx parcourt également un système complet de résidus moduloN . Puisque
c 1 mod q1,
e2πixb~N e2πixb1~q1 e2πicxb1~q1 e2πiyb~N .
Il suit que
χcτχ,b Qy mod N
χye2πiyb~N τχ,b.
Or, χc x 1 d'où il suit que τχ,b 0. Ì
Proposition 1.3.5. Soit χ un caractère primitif de conducteur N C 2. Alors, τχτχ N .
Démonstration. On calcule directement que
τχτχ Qa mod N
χae2πia~Nτχ Qa mod N
e2πia~Nτχ,a
Qa mod N
e2πia~N Qy mod N
χye2πiay~N Qa mod N
Qy mod N
χye2πiay1~N Qy mod N
χy Qa mod N
e2πiay1~N .
20
La deuxième égalité suit de la proposition 1.3.4. Si y 1 mod N , e2πiay1~N 1 et donc
Py mod N 1 N . Si y ~ 1 mod N ,
Qa mod N
e2πiay1~N
e2πiy1 1
e2πiay1~N 1 0.
Ainsi, τχτχ χ1N ce qui montre le résultat. Ì
Ces résultats sur les caractères de Dirichlet nous seront utiles par la suite lorsque nous étudie-
rons les propriétés d'interpolation des fonctions L p-adiques. En eet, les sommes de Gauss
apparaissent dans les formules reliant la fonction L p-adique à la fonction L complexe. Nous
tournons maintenant notre attention sur la manière d'exprimer la fonction caractéristique
χapnZp comme une somme de caractères.
Lemme 1.3.6. Soit ψ Z~pnZ C un caractère de Dirichlet. Pour tout x > Z~pnZ,ψx est une racine p 1pn1 ième de l'unité.
Démonstration. Comme SZ~pnZS p 1pn1, xp1pn1 1 pour tout x > Z~pnZ.Puisque ψ est un homomorphisme, on doit avoir ψxp1pn1 1. Ì
Notons par Xn l'ensemble des caractères modulo pn.
Lemme 1.3.7. Le cardinal de Xn est p 1pn1.
Démonstration. Le groupe Z~pnZ est cyclique. Soit donc g un générateur. Alors, ψ > Xn
est entièrement déterminé par la valeur ψg. Il y a p 1pn1 choix de racines de l'unité
possible pour l'image de g sous ψ. Chaque choix correspond à un caractère diérent. Ì
Lemme 1.3.8. Si x > Z~pnZ tel que x x 1, alors il existe ψ > Xn avec la propriété ψx x 1.
Démonstration. Comme dans la preuve du dernier lemme, soit g un générateur de Z~pnZ.Alors, x gn pour un certain 0 @ n B p 1pn1 1. Choisissons ζ une racine primitive
p1pn1-ième de l'unité et considérons le caractère ψ déterminé par ψg ζ. Alors, ψx ψgn ζn x 1, car 0 @ n B p 1pn1 1 et ζ est primitive. Ì
L'ensemble Xn forme un groupe sous l'opération ψχx ψxχx. L'inverse d'un caractère
est donné par son conjugué complexe et l'élément neutre est le caractère trivial déni par
ψtrivx 1 pour tout x.
21
Proposition 1.3.9. Soit x > Z~pnZ. Alors,
Qψ>Xn
ψx ¢¦¤p 1pn1 si x 1,
0 sinon.
Démonstration. Si x 1, Pψ>Xn ψ1 p 1pn1, car il y a p 1pn1 caractère modulo pn
par le lemme 1.3.7. Si x x 1, soit ψ0 > Xn tel que ψ0x x 1. Ce caractère existe par le lemme
1.3.8. Lorsque ψ parcourt l'ensemble des caractères modulo pn, ψ0ψ aussi. Ainsi,
ψ0x Qψ>Xn
ψx Qψ>Xn
ψ0xψx Qψ>Xn
ψ0ψx Qψ>Xn
ψx.Il suit que Pψ>Xn ψx 0, car ψ0x x 1. Ì
Soit ψ un caractère modulo pn. Après avoir xé un plongement Q 0 Cp, celui-ci induit un
homomorphisme Zp C
p de la façon suivante :
Zp Z~pnZ C
0Cp .
La première èche est l'application de réduction modulo pn et la deuxième est l'application
donnée par ψ.
Proposition 1.3.10. Pour a,p 1, la fonction caractéristique de a pnZp est donnée par
χapnZpx 1
p 1pn1 Qψ>Xn
ψa1ψx.
Démonstration. Supposons d'abord que x > a pnZp. Alors, ψx ψa pour tout ψ > Xn et
Qψ>Xn
ψa1ψa Qψ>Xn
ψ1 p 1pn1
par la proposition 1.3.9. Supposons maintenant que x ¶ a pnZp. Alors, a1x ¶ 1 pnZp et il
suit que la projection de a1x dans Z~pnZ n'est pas 1. La proposition 1.3.9 donne
Qψ>Xn
ψa1ψx Qψ>Xn
ψa1x 0.
Ì
22
1.4 Fonctions L complexes
Soit f une forme modulaire de MkΓ1N que nous écrivons selon son développement de
Fourier fz Pªn0 anq
n. Pour un caractère de Dirichlet χ, la convolution de f par χ, notée
fχ, est fχ Pªn0 χnanqn. La fonction fχ ainsi dénie est une forme modulaire de même
poids que f [Shi71, Proposition 3.64].
Dénition 1.4.1. Soit s une variable complexe et χ un caractère de Dirichlet. La fonction L
associée à la convolution de f par χ est
Lf,χ,s Lfχ,s ª
Qn0
χnanns
.
Proposition 1.4.2. La somme dénissant Lf,χ,s converge absolument pour Res A k. Sif est une forme parabolique, alors Lf,χ,s converge absolument pour Res A k~2 1.
Démonstration. Voir [DSS05, Proposition 5.9.1]. Ì
Comme pour la fonction zêta de Riemann, la fonction L de f possède un produit d'Euler dans
son domaine de convergence si f est une forme propre normalisée.
Théorème 1.4.3. Soit f >MkΓ1N,ε. La forme modulaire f est une forme propre nor-
malisée si et seulement si Lf,s admet un développement en produit d'Euler
Lf,s Mp
1 apfps εppk12s1
où le produit est pris sur tous les nombres premiers.
Démonstration. Il s'agit du théorème [DSS05, Theorem 5.9.2]. Ì
Dénition 1.4.4. La fonction L complétée associée à f est donnée par
Λf,s ºN
2πs
ΓsLf,soù N est le niveau de f et Γs est la fonction gamma.
Théorème 1.4.5. Soit f > SkΓ1N. Alors, Λf,s admet un prolongement holomorphe à
tout le plan complexe.
Démonstration. La preuve est donnée dans [Mil, Theorem 9.3]. Ì
23
Lorsque f est une forme parabolique, la fonction L de f peut aussi être dénie par la trans-
formée de Mellin de f
Lf,s 2πsΓs S
ª
0fittsdt
t.
Il est possible de montrer que cette dénition est en fait équivalente à la dénition précédente
[DSS05, proposition 5.10.1].
24
Chapitre 2
Fonctions L p-adiques
Le but de ce chapitre est de donner un aperçu de la construction de la fonction L p-adique
associée à une forme modulaire et de donner quelques propriétés importantes de cette fonction.
La fonction L p-adique Lpf,s attachée à une forme modulaire f de poids k est une fonction p-
adique analytique en s > Zp caractérisée par la propriété qu'elle interpole les valeurs Lf,χ,mlorsque χ est un caractère de Dirichlet etm est un entier critique (nous donnerons un sens précis
à cette armation plus loin dans le texte). Elle a d'abord été construite par Amice-Vélu [AV75]
et Vi²ik [Vi²76] comme solution à un problème d'interpolation p-adique. Dans ce mémoire, nous
suivrons l'exposition de Mazur, Tate et Teitelbaum [MTT86] pour dénir Lpf,s. L'objectifest de construire une distribution µf sur Z
p qui, lorsque évaluée sur une classe appropriée de
fonctions p-adiques, interpole les valeurs Lf,χ,m pour tout χ et 1 Bm B k 2.
2.1 Symboles modulaires
2.1.1 Dénition
La première étape consiste à dénir les symboles modulaires. Pour ce faire, soit GL2R le
sous-groupe des matrices avec déterminant positif de GL2R. Si A
<@@@@>a b
c d
=AAAA?> GL2R, on
pose
ρA detA1~2
cz d.
Tout comme SL2Z, GL2R agit sur la sphère de Riemann par Az azbczd et Aª a~c.
Fixons k C 2 un entier. Pour N un entier plus grand ou égal à 1 et ε un caractère de Dirichlet
sur Z~NZ, on considère l'espace de toutes les formes paraboliques de poids k pour Γ1Npour un certain N
Sk QN,ε
SkΓ0N,ε QN
SkΓ1N.
25
On note PkC C`Cz ` . . .`Czk2 l'espace des polynômes de degré plus petit ou égal à
k 2 avec coecients complexes. On dénit des actions de GL2R sur Sk et PkC de la
façon suivante :
f SAz ρAkfAz pour f > Sk,
P SAz ρA2kP Az pour P > PkC.Soit P1Q Q 8 ª le plan projectif rationnel.
Dénition 2.1.1. On dénit une application
φ Sk PkC P1QC
par la formule
φf,P,r 2πiSr
ªfzP zdz
¢¦¤
2π R ª
0 fr itP r itdt si r >Q,
0 si r ª.
L'application φ est appelée une intégrale modulaire.
Les intégrales modulaires satisfont les deux propriétés suivantes :
a) φf,P,r est C-bilinéaire en f et P pour r xé,
b) φf SA,P SA,r φf,P,Ar φf,P,Aª.La propriété b) peut être déduite en intégrant l'identité
f SAzP SAzdz fAzP AzdAzde ª à r et en utilisant le théorème de Cauchy sur le triangle de sommets ª,Aª,Ar.Pour χ un caractère de Dirichlet, notons par Zχ le sous-anneau de C généré par les valeurs
de χ. Pour f > SkΓ0N,ε xé, l'image de PkZ P1Q sous l'application φ est un Zε-module. Nous décrirons ici sa structure. Soit Aj > SL2Z un ensemble de représentants pour
les classes d'équivalence modulo Γ0N,SL2Z +
j>R
Γ0N Ajoù R est un ensemble ni d'indices. La nitude de R découle du fait que l'indice de Γ0Ndans SL2Z est ni [DSS05, Exercise 1.2.3(e)]. Soit Lf le Z-module généré par l'image de
PkZ P1Q sous l'application φ.Proposition 2.1.2. Lf est le Zε-module généré par les éléments
φf,zi,Ajª φf,zi,Aj0 0 B i B k 2, j >R. (2.1)
26
Démonstration. Pour A
<@@@@>a b
c d
=AAAA?> Γ0N, on pose εA εd. Alors, f SA εAf puisque
f est une forme modulaire pour Γ0N avec caractère ε. Par la C-bilinéarité de φ et par la
propriété b) des intégrales modulaires,
εAφf,P,r φf,P SA1,Ar φf,P SA1,Aª.Puisque le degré de P est d'au plus k 2, P SA1 cz ak2P dzb
cza est aussi un élément
de PkZ. De là, il suit que Lf est un Zε-module où l'action de εd est donnée par mul-
tiplication de εA comme ci-haut. Soit maintenant L0f b Lf le Zε-module généré par les
valeurs (2.1). Soit a,m > Z avec m C 0 et a relativement premier à m. Le but est de montrer
que φf,P,a~m > L0f par induction sur m an d'obtenir l'inclusion Lf b L0
f . Si m 0, alors
φf,P,a~m 0 > L0f par dénition. Supposons donc que m A 0. Soit m l'entier tel que am 1
mod m et 0 B m @ m. Posons a am 1~m et A
<@@@@>a a
m m
=AAAA?> SL2Z. Comme les classes
d'équivalence de Γ0N partitionnent SL2Z, il existe B > Γ0N et j >R tels que A B Aj .
Alors,
φf,P,a~m φf,P,a~m φf,P,Aª φf,P,A0 φf,P,BAjª φf,P,BAj0 εB φf,P SB,Ajª φf,P SB,Aj0 .
Donc, φf,P,a~m > L0f , car φf,P,a~m > L0
f par induction. Ì
Dénition 2.1.3. Pour a,m >Q avec m A 0, on dénit le symbole modulaire λ par
λf,P ;a,m φf,P mz a, am .
Il est immédiat que, pour f xé, λf,P ;a,m prend ses valeurs dans Lf .
Proposition 2.1.4. Nous avons les égalités
λf,P ;a,m 1 m
k21φ
f,P W
<@@@@>m a
0 1
=AAAA?,
a
m
2 m
k21φ
f W
<@@@@>1 a
0 m
=AAAA?,P,0
.
Démonstration. Commençons par montrer l'égalité (1). Notons par A la matrice<@@@@>m a
0 1
=AAAA?.
Alors,
P mz a ρAk2P SA detA1~2k2P SA m
k21P SA.
27
Cela implique que φf,P mz a, am m
k21φf,P SA, a
m par la linéarité de φ. Pour
montrer l'égalité (2), on note par B la matrice<@@@@>1 a
0 m
=AAAA?et on utilise la propriété b) des
intégrales modulaires pour obtenir
φf SB,P,0 φf,P SA,A10 φf,P SA,A1ª φf,P SA,a~m φf,P SA,ª.
Mais φf,P SA,ª 0, ce qui montre le résultat. Ì
Remarque 2.1.5. Pour f et P xés, la valeur de λf,P ;a,m ne dépend que de a modulo m.
En eet, puisque f W<@@@@>1 1
0 1
=AAAA? f et
<@@@@>1 1
0 1
=AAAA?n <@@@@>
1 a
0 m
=AAAA?
<@@@@>1 a mn
0 m
=AAAA?, la proposition précédente
montre que λf,P ;a,m λf,P ;a mn,m pour tout n > Z.
Les symboles modulaires sont reliés aux valeurs de la fonction L de f via la transformée de
Mellin de f par la formule
λf,zn; 0,1 2πiSiª
0fzzndz in
n!
2πnLf,n 1pour 0 B n B k2. Une première tentative pour construire la distribution µf associée à f serait
de dénir
µfzn, a pnZp λf,zn;a,pnoù λf,zn;a,pn est vu comme un élément d'un Cp-espace vectoriel après avoir choisi un
plongement C 0 Cp. De cette façon, on aurait la propriété d'interpolation voulue RZp µf
in n!2πnLf,n1. Le problème est que µf n'est pas une distribution. En eet, elle ne respecte
pas la propriété d'additivité
µfzn, a pnZp p1
Qb0
µfzn, a bpn pn1Zp.Il faudra donc modier µf . Cela sera possible en prenant en compte l'action des opérateurs
de Hecke sur f .
2.1.2 Action des opérateurs de Hecke
Puisque nous considérons des actions de matrices sur des formes paraboliques, il est plus facile
de travailler avec une dénition alternative des opérateurs de Hecke.
Dénition 2.1.6 (Opérateurs de Hecke, prise 2). Soit f > SkΓ0N,ε. Pour tout nombre
premier l, le l-ième opérateur de Hecke est déni par
Tlf lk21
l1
Qu0
f W<@@@@>1 u
0 l
=AAAA? εlf W
<@@@@>l 0
0 1
=AAAA? .
28
La démonstration que les deux dénitions que nous avons données pour les opérateurs de
Hecke sont équivalentes peut être trouvée dans [DSS05, Proposition 5.2.1 et proposition 5.2.2].
Proposition 2.1.7. La propriété de transformation des symboles modulaires sous f ( Tlf est
donnée par
λTlf,P ;a,m l1
Qu0
λf,P ;a um,lm εllk2λf,P ;a,m~l.
Démonstration. Par la proposition 2.1.4, on obtient que
λTlf,P ;a,m m k21φ
TlfW
<@@@@>1 a
0 m
=AAAA?,P,0
.
Le reste de la démonstration s'obtient en appliquant les dénitions et la C-linéarité de φ
comme suit :
λTlf,P ;a,m m k21φ
l
k21
l1
Qu0
f W<@@@@>1 a um
0 lm
=AAAA? εlf W
<@@@@>l al
0 m
=AAAA? ,P,0
lm k21l1
Qu0
φf W
<@@@@>1 a um
0 lm
=AAAA?,P,0
lm k21εlφf W
<@@@@>l al
0 m
=AAAA?,P,0
l1
Qu0
λf,P ;a um,lm m~l k21lk2εlφf W<@@@@>l 0
0 l
=AAAA?<@@@@>1 a
0 m~l=AAAA?,P,0
l1
Qu0
λf,P ;a um,lm lk2εlλf,P ;a,m~l
où la dernière égalité est obtenue en remarquant que f W<@@@@>l 0
0 l
=AAAA? f . Ì
La proposition implique que LTlf b Lf .
On introduit un nouvel opérateur wQ, appelé opérateur d'Atkin-Lehner, qui agit sur les formes
modulaires. Ce dernier sera utilisé pour déduire l'équation fonctionnelle de Lpf,s. Rappelonsque l'entier positif N dénote le niveau de f . Choisissons une factorisation N QQ où Q et Q
sont relativement premiers. Le théorème des restes chinois permet de décomposer le caractère
ε en ε εQ εQ où εQ (resp. εQ) est un caractère modulo Q (resp. Q). Si f > SkΓ0N,ε etx,y,z,t > Z sont tels que QxtQyz 1, alors l'action de wQ sur f est wQf εQyεQxf SWQ
où WQ
<@@@@>Qx y
Nz Qt
=AAAA?. Pour plus de détails sur l'opérateur wQ, en particulier sur le fait que
wQf est une forme parabolique de niveau N et caractère ε1Q εQ , le lecteur peut consulter
[AL78, proposition 1.1]. Dans loc. cit., il est également montré que wQ ne dépend pas du choix
de x,y,z,t > Z. De plus, il est possible de montrer que LwQf Lf .
29
Proposition 2.1.8. Soit a et m relativement premiers tels que m A 0, m,Q 1 et QSm.
Soit a un entier tel que aaQ 1 mod m. Alors, l'équation fonctionnelle pour λ est
λf,P ;a,m εQmε1QaλwQf,P W
<@@@@>0 1
Q 0
=AAAA?;a,m
pour tout P > PkC.Démonstration. On pose b Qaa 1~m de telle sorte que Qaamb 1. Alors, ε1
Q b εQm et on pose WQ
<@@@@>Qa b
Qm Qa
=AAAA?. Le côté droit de l'équation à montrer est donc donné
en utilisant la dénition de wQf et la proposition 2.1.4 par
λf SWQ, P W
<@@@@>0 1
Q 0
=AAAA?;a,m
m
k21φ
f SWQ
<@@@@>1 a
0 m
=AAAA?,P W
<@@@@>0 1
Q 0
=AAAA?,0 .
En utilisant la propriété b) des intégrales modulaires avec r 0,A
<@@@@>0 1
Q 0
=AAAA?, f f SWQ
<@@@@>0 1
Q 0
=AAAA?et P P SA, on obtient
φf SWQ
<@@@@>1 a
0 m
=AAAA?A,P SA2,0
φ
f SWQ
<@@@@>1 a
0 m
=AAAA?, P SA,0 .
Or, WQ
<@@@@>1 a
0 m
=AAAA?A Q
<@@@@>1 a
0 m
=AAAA?et A2 Q
<@@@@>1 0
0 1
=AAAA?. Cela donne
φf SWQ
<@@@@>1 a
0 m
=AAAA?A,P SA2,0
φ
f W Q
<@@@@>1 a
0 m
=AAAA?, P W Q
<@@@@>1 0
0 1
=AAAA?,0 .
Mais
f W Q<@@@@>1 a
0 m
=AAAA? m1~2kf z a
m f W
<@@@@>1 a
0 m
=AAAA?et P W Q
<@@@@>1 0
0 1
=AAAA? P.
Finalement,
λf,P ;a,m εQmε1QaλwQf,P W
<@@@@>0 1
Q 0
=AAAA?;a,m
comme voulu. Ì
2.1.3 Convolutions
Comme nous nous intéressons à interpoler les convolutions de Lf,s par des caractères de Di-richlet χ, nous aurons besoin de trouver une expression pour la convolution de λ. Comme dans
la section 1.4, si f Pªn1 anq
n est une forme parabolique, alors on laisse fχ Pªn1 χnanqn
pour χ un caractère de Dirichlet de conducteur m.
30
Lemme 2.1.9 (Lemme de Birch). Supposons que χ est un caractère primitif modulo m. Alors,
fχz 1
τχ Qa mod m
χaf z a
m .
Démonstration. Par la proposition 1.3.4,
fχz ª
Qn1
τχ,nτχ ane
2πinz
1
τχª
Qn1
Qa mod m
χae2πina~mane2πinz
1
τχ Qa mod m
χa ª
Qn1
ane2πinza~m
1
τχ Qa mod m
χaf z a
m .
Ì
Cela nous donne une expression pour la convolution d'une intégrale modulaire
φfχ,P,r 1
τχ Qa mod m
χaφf W<@@@@>1 a~m0 1
=AAAA?,P,r
1
τχ Qa mod m
χaφf,P W<@@@@>1 a~m0 1
=AAAA?, r
a
m
si χ est un caractère primitif. Toujours sous l'hypothèse que χ est primitif, nous avons pour
les symboles modulaires
λfχ, P mz; b,n φfχ,P nmz bm, b~n
1
τχ Qa mod m
χaφf,P nmz bmW<@@@@>1 a~m0 1
=AAAA?,b~n a~m
1
τχ Qa mod m
χaλf,P ; bm an,nm.
Les valeurs spéciales de Lfψ,j pour 0 B j B k 2 sont liées aux symboles modulaires par la
formule j!mj1
2πijτψLfψ,j 1 Qa mod m
ψaλf,zj ;a,m, (2.2)
voir par exemple [AV75, page 119].
31
2.2 Construction de Lpf,s
Nous sommes maintenant prêt à donner la dénition de la distribution qui sera utilisée pour
dénir la fonction L p-adique de f . On suppose que f > SkΓ0N,ε est une forme propre
pour l'opérateur Tp avec valeur propre ap qui est un entier algébrique par le théorème 1.2.23.
On suppose de plus que le polynôme X2 apX εppk1 possède au moins une racine non
nulle α. C'est équivalent à supposer que p Ñ N et ap x 0. On remarque que si α et β sont les
deux racines de X2 apX εppk1, alors α β ap et αβ εppk1.
Dénition 2.2.1. Pour a,m > Z avec m A 0, on dénit
µf,αP ;a,m 1
αvpmλf,P a,m εppk2
αvpm1λf,P a,m~p
où λf,P a,m λf,P ;a,m dénote que f et P sont vus comme constants.
Proposition 2.2.2. Pour a,m > Z avec m A 0, µf,α satisfait la propriété de distribution
µf,αP ;a,m Qbamodmbmod pm
µf,αP ; b,pm.
Démonstration. Le côté droit de l'équation est
Qbamodmbmod pm
µf,αP ; b,pm Qbamodmbmod pm
1
αvppmλf,P b,mp εppk2
αvppm1λf,P b,m .
Puisque que λf,P b,m ne dépend que de b modulo m, on obtient que
Qbamodmbmod pm
εppk2
αvppm1λf,P b,m p εppk2
αvppm1λf,P a,m.
On additionne puis soustrait le terme εppk2
αvpm1λf,P a,m~p pour faire apparaître l'action de
l'opérateur Tp
Qbamodmbmod pm
µf,αP ; b,pm 1
αvpm1
Qbamodmbmod pm
λf,P b,mp εppk2λf,P a,m~p
εppk2λf,P a,m~p εppk1
αλf,P a,m
1
αvpm1λTpf,P ;a,m εppk2λf,P a,m~p εppk1
αλf,P a,m .
32
L'hypothèse que f est une forme propre pour Tp avec valeur propre ap et le fait que α2apα
εppk1 0 implique que
Qbamodmbmod pm
µf,αP ; b,pm 1
αvpm1ap εppk1
αλf,P a,m εppk2λf,P a,m~p
1
αvpmλf,P a,m εppk2
αvpm1λf,P a,m~p
µf,αP ;a,m.Ì
Comme pour les symboles modulaires, nous avons une formule pour les convolutions de µ.
Proposition 2.2.3. Soit ψ un caractère de Dirichlet de conducteur M relativement premier
à p. Alors, pour n copremier à M ,
µfψ,αψpP Mz; b,n ψpvpn
τψ Qa mod M
ψaµf,αP,Mb na,Mn.
Démonstration. Observons d'abord que
Qa mod M
ψaψpλf,P Mb na~p,Mn~p Qa mod M
ψa~pλf,P Mb na~p,Mn~p Qy mod M
ψyλf,P Mb ny,mn~pen posant y a~p. Comme M,p 1, p est inversible modulo M et a~p parcourt également
un système complet de résidus lorsque a parcourt un tel système. Ainsi, en utilisant la formule
pour la convolution de λ, on obtient
µfψ,αψpP Mz; b,n
ψpvpnτψ Q
a mod M
ψa 1
αvpnλf,P Mb na,Mn εppk2
αvpn1λf,P Mb na,Mn~p
ψpvpnτψ Q
a mod M
ψaµf,αP ;Mb na,Mn.Ì
Pour M un entier plus grand que 0 et copremier à p, on pose
Zp,M limÐ
v
Z~pvMZ Zp Z~MZ,Zp,M lim
Ð
v
Z~pvMZ Zp Z~MZ.
33
Zp,M est l'union des disques ouverts Da,v a pvMZp,M ` Z
p,M indicés par les entiers
naturels a relativement premiers à pM et les entiers naturels v plus grands ou égaux à 1.
On note par Q une clôture algébrique de Q dans C et on xe un plongement Q Cp. Ce
plongement provient du fait que C Cp en tant que corps puisque les deux ont le même degré
de transcendance sur Q. Notons que Cp n'est pas isomorphe à C comme espaces topologiques,
le premier étant totalement non connexe. Soit v la valuation sur Cp qui étend vp normalisée de
telle sorte que vp 1. Soit Op `Cp l'anneau des entiers deCp et soit Op x >Cp vx 0
le sous-anneau des unités. On xe une forme modulaire f > SkΓ0N,ε comme dans la sous-
section précédente et on considère le Cp-espace vectoriel de dimension nie Vf Cp@QLfQ
ainsi que le Op-réseau Ωf ` Vf généré par Lf . Nous prenons maintenant quelques lignes pour
expliquer la motivation derrière l'espace Vf . D'abord, on munit Lf de la structure d'un Q-
espace vectoriel en considérant les générateurs de Lf comme une base libre pour cet espace
que l'on note LfQ. On remarque que µf,αP ;a,m prend ses valeurs dans LfQ. Le but étant
de considérer µf,α comme une distribution (une mesure possiblement non bornée) sur Zp,M ,
on étend les dénitions de φ, λ et µ pour P > PkCp de telle sorte que µf,αP ;a,m prend
maintenant ses valeurs dans Vf . Le réseau Ωf nous donnera une structure entière pour les
valeurs de µf,α.
Notons par x( xp la projection de Zp,M sur Zp. Comme pour les fonctions localement analy-
tiques sur Zp, on dénit de manière analogue les fonctions localement analytiques sur Zp,M .
Dénition 2.2.4. Soit U b Zp,M un ensemble ouvert. Une fonction F U Cp est dite
localement analytique s'il existe un recouvrement de U par des disque Dai,vi tels que, sur
chaque disque, F est donnée par une série de puissances convergente
F x QnC0
bnx ainpà coecients dans Cp. On note par LAU l'ensemble des fonctions localement analytiques
sur U .
Puisque la distribution µf,α n'est pas nécessairement bornée, nous ne pouvons pas utiliser
l'approche des sommes de Riemann (voir la dénition 1.1.30) pour intégrer les fonctions loca-
lement analytiques contre cette distribution. Le théorème suivant nous permet tout de même
de dénir une intégrale à partir de µf,α.
Théorème 2.2.5 ([AV75]). Fixons un entier h tel que 1 B h B k1. Supposons que le polynôme
X2 apX εppk1 possède une racine α > Cp telle que vα @ h. Fixons une telle racine α.
Alors, il existe une unique intégrale U LAU Vf , U,F ( RU F qui satisfait les propriétés
suivantes (v C 1 et a > Z) :
34
1. Cette intégrale est Cp-linéaire en F et additive en U .
2. RDa,v xjp µf,αzj ;a,pvM pour 0 B j @ h.
3. Pour tout n C 0, RDa,vx anp > pnα v α1Ωf .
4. Si F Pªn0 cnx anp converge sur le disque Da,v, alors
SDa,v
F
ª
Qn0
cnSDa,v
x anp .
Lorsque α est une racine de X2apX εppk1 avec vα @ k1, on dira que α est une racine
p-admissible et on écrira RU Fdµf,α pour l'intégrale correspondante. Si la forme modulaire f de
niveau N est telle que p Ñ ap avec p Ñ N et que l'on note α et β les deux racines du polynôme
de Hecke ordonnées de telle sorte que vα B vβ, alors vα 0 et vβ k 1. On déduit
que lorsque p Ñ ap, il y a une unique racine p-admissible et on omettra d'y faire référence en
notant l'intégrale correspondante par RU Fdµf . Lorsque f est telle que pSap et p Ñ N , alors les
deux racines sont p-admissibles et il existe deux intégrales RU Fdµf,α et RU Fdµf,β . Le cas pSNest plus dicile à traiter, mais nous supposerons la plupart du temps que p Ñ N .
Dénition 2.2.6. Un caractère p-adique est un homomorphisme de groupes continu χ
Zp,M C
p pour un certain M .
Si M1SM , Zp,M1
est un quotient de Zp,M et on peut identier les caractères de Z
p,M1avec
certains caractères de Zp,M . On dira qu'un caractère p-adique χ sur Z
p,M est primitif s'il ne
se factorise pas de la façon suivante
Zp,M Z
p,M1C
p
pour M1 un certain diviseur propre de M . Pour tout caractère p-adique χ, il existe un unique
M tel que χ est primitif sur Zp,M . Ce M est un entier plus grand ou égal à 1 copremier à
p qui est appelé le p-conducteur de χ. De plus, tout caractère de Dirichlet primitif modulo
pvM peut être vu comme un caractère de p-conducteur M en le composant avec l'application
de réduction modulo pvM . Par exemple, les deux homomorphismes de la sous-section 1.1.1
x ( ωx et x ( `xe sont des caractères p-adiques de p-conducteur 1. Un autre exemple de
caractères p-adiques est les caractères de la forme χx xjpψx où j est un entier et ψ est
un caractère d'ordre ni. Les caractères de cette forme sont appelés caractères spéciaux.
Dénition 2.2.7. Soit α une racine p-admissible de f et χ un caractère p-adique de p-
conducteur M . La fonction L p-adique de f en χ est donnée par
Lpf,α,χ SZ
p,M
χdµf,α.
35
Si le p-conducteur de χ est M et que M1SM , alors on pourrait croire que RZ
p,Mχdµf,α
RZ
p,M1
χdµf,α, mais ce n'est pas le cas en général. Ainsi, la dénition n'est valide que pour les
caractères primitifs sur Zp,M .
Cela a du sens d'intégrer les caractères p-adiques, car ceux-ci sont localement analytiques.
Un caractère χ Zp,M C
p peut être uniquement factorisé comme un produit de la forme
χ χ0χ1 où χ0 Z~pMZ Cp et χ1 1 pZp C
p . Le relèvement de χ0 à Zp,M est
une fonction localement constante. Le groupe 1 pZp est topologiquement cyclique. Soit γ un
générateur topologique de 1 pZp `γe. Soit a un élément quelconque de 1 pZp. Alors, on
peut écrire a γs pour un certain s > Zp. La continuité de χ1 implique que χ1a χ1γs exps logχ1γ est localement analytique en s. Finalement, le produit χx χ0xχ1`xeest exprimé comme une série de puissances sur chaque disque a pMZp,M .
La condition 2 du théorème 2.2.5 nous dit que µf,α est uniquement déterminée par ses valeurs
évaluée en xjp, 0 B j @ k 2, sur les disques Da,v pourvu qu'elle respecte les conditions 1,3
et 4. Soit Xn HomcontZp,M ,C
ptors l'ensemble des caractères p-adiques d'ordre ni. Alors,
la condition 2 est équivalente à connaître les valeurs RZ
p,Mψxxjpµf,α pour 0 B j @ k 2 et
tout caractère de Xn. En eet, supposons que la condition 2 tient et soit ψ un caractère de
conducteur pvM . Le fait que ψ soit localement constant sur a MpvZp,M donne
SZ
p,M
ψxxjpµf,α Qamod pvMa,pM1
ψaSDa,v
xjpµf,α.
Réciproquement, supposons que la valeur de RZ
p,Mψxxjpµf,α est connue pour tout caractère
d'ordre ni et 0 B j @ k 2. Nous voulons déterminer l'intégrale de xjp sur un disque Da,v,a,pM 1. Remarquons d'abord que
SDa,v
xjpµf,α SZ
p,M
χapvMZp,M xxjpµf,α.Par la proposition 1.3.10, nous pouvons décomposer la fonction caractéristique comme une
somme de caractères. Posons Xn,v l'ensemble des caractères de conducteur pvM . Alors,
SZ
p,M
χapvMZp,M xxjpµf,α SZ
p,M
1
φMp 1pn1 Qψ>Xn,v
ψa1ψxxjpµf,α
1
φMp 1pn1 Qψ>Xn
ψa1SZ
p,M
ψxxjpµf,α.Dénition 2.2.8. Pour s > Zp, soit χsx le caractère p-adique déni par la formule
χsx `xpes expps logp`xpe.On note Lpf,α,χ,s Lpf,α,χχs1 RZ
p,Mχx`xpes1dµf,αx.
36
Remarque 2.2.9. La normalisation que nous donnons ici de la fonction L p-adique n'est pas
tout à fait la même que celle donnée dans [MTT86]. Dans loc. cit., Lpf,α,χ,s est dénie
en intégrant plutôt χx`xpes. Il s'agit d'un choix purement esthétique. Avec notre choix de
normalisation, l'axe de symétrie pour l'équation fonctionnelle de Lpf,α,χ,s sera en s 1
tout comme l'axe de symétrie pour la fonction L complexe de f est en s 1.
Proposition 2.2.10. La fonction Lpf,α,χ,s est localement analytique en s et est dénie
pour s > Zp.
Démonstration. Voir le théorème [Vi²76, page 254]. Ì
Dénition 2.2.11. Un groupe de Lie p-adique G sur Cp est une variété sur Cp qui possède
une structure de groupe telle que l'application de multiplication est une fonction localement
analytique.
L'ensemble des caractères p-adiques HomcontZp,M ,C
p admet une structure de groupe de Lie
p-adique. Nous dirons qu'un caractère est modéré s'il est trivial sur 1pZp et nous dirons qu'il
est sauvage s'il est trivial sur Z~pMZ. Comme nous l'avons déjà remarqué, chaque caractère
sur Zp,M peut être décomposé uniquement comme le produit d'un caractère modéré et d'un
caractère sauvage. Pour u >Cp avec Su 1S @ 1, on dénit un caractère sauvage particulier par
χu Zp,M Z
p 1 pZp Cp
où les deux premières èches sont les surjections naturelles et la troisième èche envoie un
choix de générateur topologique γ de 1 pZp sur u. Soit χ1 un caractère sauvage quelconque.
Nous savons que γ 1 mod p, donc Âγ limnª γpn 1. De plus,
Æχ1γ χ1 limnª
γpn 1
car χ1 est un homomorphisme continu. Donc,
limnª
χ1γ 1pn limnª
pn
Qi0
pniχ1γi1pni 0,
car les termes centraux 0 @ i @ pn tendent vers 0 et χ1γpn tend vers 1. Ainsi, Sχ1γ 1S @1 et χ1γ > u > Cp Su 1S @ 1. Il suit que tout caractère sauvage est donné par χupour un certain u. Notons que cette représentation de χ1 dépend du choix d'un générateur
topologique. Pour ψ un caractère modéré, l'application u ( ψχu identie le disque u > Cp
Su1S @ 1 avec l'ensemble des caractères sur Zp,M dont la partie modérée est égale à ψ. Donc,
HomcontZp,M ,C
p est une union nie et disjointe de disques unités ouverts de Cp en posant
T u1. De plus, l'application de multiplication des caractères χ1T χ1X 1T 1X
37
est localement analytique. Nous avons donc la paramétrisation T ( χ1T , χ1T γa 1T a.Avec cette coordonnée locale,
Lpf,α,ψ,T SZ
p,M
ψxχ1T xµf,αx SZ
p,M
ψx1 T axµf,αx
où, pour un x xé, a est tel que `xe γa. Donc, ax logp`xe
logp γ. Finalement,
Lpf,α,ψ,T SZ
p,M
ψx1 T logp`xe
logp γ µf,αx.
En écrivant 1 T logp`xe
logp γ comme une somme de coecients binomiaux, nous voyons que
Lpf,α,ψ,T ª
Qn0
TnSZ
p,M
ψx log`xelog γ
nµf,αx
est localement analytique en T . Le changement de l'ordre de sommation et d'intégration se
fait en utilisant la partie 4 du théorème 2.2.5. Le passage d'une coordonnée à l'autre se fait
en posant T γs1 1.
Les caractères p-adiques ψxxjp avec partie modérée égale à ψ0 correspondent à T ζn γj1 où
ζn est un racine pn-ième de l'unité. Ainsi la condition 2 du théorème 2.2.5 peut être reformulée
en disant que Lpf,α,ψ0,T est uniquement déterminée par ses valeurs en T ζn γj 1 pour
toute racine pn-ième de l'unité et 0 B j @ k 2.
2.3 Équation fonctionnelle
La fonction zêta de Riemann satisfait l'équation fonctionnelle
ζs 2sπs1 sinπs~2Γ1 sζ1 soù Γs est la fonction gamma. La fonction L p-adique dénie dans la section précédente
satisfait elle aussi une équation fonctionnelle reliant sa valeur en s et 2s. Le premier résultat
vers l'équation fonctionnelle de Lpf,α,χ,s est donnée dans la proposition suivante.
Proposition 2.3.1. Supposons que ψ est un caractère de Dirichlet de conducteurM copremier
à p. Alors, pour tout caractère p-adique χ avec p-conducteur Mχ copremier à M , nous avons
Lpf,α,χψ χMψMχτψLpfψ,αψp,χ.En particulier, pour j > Z et s > Zp,
Lpf,α,ψxjp,s M j`Mesψ1τψLpfψ,αψp,xjp,s.
38
Démonstration. Soit n pvM et P z un polynôme de degré plus petit ou égal à k 2. La
proposition 2.2.3 donne
SDb,v
P Mzµfψ,ψpαz µf
ψ,ψpαP Mz; b,n
ψpvτψ Q
a mod M
ψaµf,αP ;Mb na,Mnψpvτψ Q
a mod M
ψaSDMbna,v
P zµf,αz
1
τψψ 1
Mχ Qa mod M
SDMbna,v
ψapvMχP zµf,αz
1
τψψ 1
Mχ Qa mod M
SDMbna,v
ψzP zµf,αzcar ψ est constant sur le disque DMb na,v. Il suit que
τψψMχSZ
p,Mχ
P Mzµfψ,ψpαz S
Z
p,MχM
ψzP zµf,αz.Puisque ces intégrales sont entièrement déterminées par leur valeur sur les polynômes de degré
plus petit ou égal à k 2 sur les disques Db,v, l'équation tient aussi pour χ un caractère
p-adique et dans ce cas,
τψψMχχMLpfψ,ψpα,χ Lpf,α,ψχ.Ì
Remarque 2.3.2. Pour la convolution de f par le caractère ψ, la valeur propre en p de fψdevient ψp apf et le polynôme de Hecke associé est X2 ψpapfX εpψ2ppk1
(voir [Kob93, Proposition III.3.17] ). Donc, si α est une racine p-admissible pour f , ψpαsera une racine p-admissible pour fψ.
Comme dans la section 2.1, on xe un entier M copremier à p et on dénit Q comme étant
le plus grand diviseur positif de N copremier à pM . On écrit N QQ et ε εQεQ comme
avant. On suppose que Q divise pvM pour v assez grand et on voit εQ comme un caractère
sur Zp,M . On considère Q comme un élément de Z
p,M . On note ε εQε1Q et f ( f
wQf . Si f est une forme propre pour Tl (l Ñ Q) avec valeur propre al, alors f sera une
forme propre pour Tl avec valeur propre alε1Q l [AL78, Proposition 1.2]. Ainsi, si α est une
racine p-admissible de X2 apX εppk1, α ε1Q pα sera une racine p-admissible de
X2 apε1Q pX εpε2
Q ppk1.
Pour U un sous-ensemble ouvert et compact de Zp,M , on laisse U dénoter l'image de U
sous l'application x ( 1Qx . Ainsi, Da,v Da,v où a est n'importe quel entier tel que
39
aaQ 1 mod pvM . Si F x est une fonction localement analytique sur l'ouvert U , on pose
F la fonction localement analytique sur U donnée par F x Qk2~2xk2p F 1~Qx.
Remarquons que
P P W
<@@@@>0 1
Q 0
=AAAA?.
Proposition 2.3.3. Supposons que v C 1 est assez grand de telle sorte que Q divise pv1M .
Alors, pour a comme ci-haut,
µf,α,P ;a,pvM εQMε1Qaµf,α,P ;a,pvM.
Démonstration. Il s'agit de la proposition 2.1.8 écrite pour la distribution µ avec la notation
introduite dans cette section. Ì
Corollaire 2.3.4. Pour F une fonction localement analytique sur un sous-ensemble ouvert et
compact U ` Zp,M , on a
SUFdµf,α εQMεQQS
U
εQF dµf,α .
Démonstration. Le résultat suit en montrant l'égalité pour U Da,v pour v susamment
grand et pour F P > PkCp [MTT86, Corollary 1, page 24]. Ì
En prenant F χ un caractère p-adique, on obtient l'équation fonctionnelle pour la fonction
L p-adique.
Corollaire 2.3.5. Si χ et ε1Qχ sont primitifs sur Z
p,M , alors
Lpf,α,χ,s εQMεQQQk2~2χ1Q`Qe1sLpf,α, εQxk2p χ1,2 s.
Soit ψ un caractère de Dirichlet et M le p-conducteur de ψ. Posons
ηpψ,j 1j1εQMεQQQk2~2jψQ.Alors, pour χ xjpψ, l'équation fonctionnelle devient
Lpf,α,ψxjp,s ηpψ,j`Qe1sLpf,α,εQxk2jp ψ1,2 s
si εQψ1 a le même p-conducteur que ψ. L'équation fonctionnelle peut être simpliée en
imposant des hypothèses supplémentaires. Ainsi, supposons de plus que le caractère ε de f
est trivial et que f est une forme primitive de poids pair. Sous ces conditions, f est une forme
propre pour l'opérateur wQ avec valeur propre cQ 1. Supposons que j k 2~2, alors,Lpf,α,ψxk2~2
p ,2 s 1k~2cQ`Qes1ψQLpf,α,ψxk2~2p ,s.
40
Dénition 2.3.6. On dénit le signe p-adique de f et ψ par signpf,ψ 1k~2cQψQ.Si on utilise la variable T , l'équation fonctionnelle prend la forme
Lpf,α,ψ, 1
1 T 1 1k~2cQ1 T
logp`Qe
logp γ ψQLpf,α,ψ,T . (2.3)
2.4 Périodes et valeurs d'interpolation
Nous allons maintenant rendre explicite le lien entre Lpf,α,ψ,s et Lf,ψ,s.Dénition 2.4.1. Si χx xjp ψx est un caractère spécial avec condψ pvM , alors le
multiplicateur p-adique est déni par la formule
epα,χ epα,j,ψ 1
αv1
ψpεppk3j
α1
ψppj1
α .
Si p divise le conducteur de ψ, i.e. si v A 0, alors le multiplicateur est simplement 1αv .
Proposition 2.4.2. Si χ est comme dans la dénition du multiplicateur, alors
Lpf,α,χ epα,χ mj1
τψ λfψ,zj ; 0,1 epα,χ mj1
2πij j!τψ Lf,ψ,j 1.
Démonstration. Pour a relativement premier à pM et v C 1, soit
Da,v a pvMZp,M ` Zp,M .
La preuve se fait en deux étapes. Supposons d'abord que v A 0. On utilise les dénitions et la
partie 2 du théorème 2.2.5 pour calculer la valeur de Lpf,α,χ,Lpf,α,χ S
Z
p,M
ψxxjpµf,αx Qa mod pvM
ψaSDa,v
xjpµf,αx Qa mod pvM
ψaµf,αzj ;a,pvM Qa mod pvM
ψa 1
αvλfzj ;a,pvM εppk2
αv1λfzj ;a,pv1M
1
αvj!pvMj1
2πijτψLf,ψ,j 1.
41
Le terme Pa mod pvM ψa 1αvλfzj ;a,pvM est égal à 1
αvj!pvMj1
2πijτψLf,ψ,j 1 par la formule
2.2. Remarquons que
Qamod pvM
abmod pv1M
ψaλfzj ;a,pv1M λfzj ; b,pv1M Qamod pvM
abmod pv1M
ψa
car λfzj ;a,pv1M ne dépend que de la valeur de a modulo pv1M . Notons par ζpvM une
racine primitive pvM -ième de l'unité et notons par ζp une racine primitive p-ième de l'unité.
Alors,
Qamod pvM
abmod pv1M
ψa p1
Ql0
ζblpv1M
pvM
ζbpvM
p1
Ql0
ζ lpv1M
pvM
ζbpvM
p1
Ql0
ζ lp
0.
Il suit que
Qa mod pvM
ψaεppk2
αv1λfzj ;a,pv1M
Qb mod p
Qamod pvM
abmod pv1M
ψaεppk2
αv1λfzj ;a,pv1M 0.
Pour le cas v 0, les calculs sont eectués dans la démontration de la proposition de la section
14 de [MTT86]. Ì
En raison de leur rôle dans la formule d'interpolation de Lpf,α,χ, les multiplicateurs epα,χsont parfois appelés facteurs d'interpolation.
L'application ι Lf Lf , φf,P mz a, a~m ( φf,P mz a,a~m induit une involu-
tion sur l'espace vectoriel Vf Cp@LfQ. Pour les symboles modulaires, ιλf,P ;a,m
λf,P ;a,m. On peut donc décomposer Vf en -espaces propres par rapport à cette involu-
tion, disons Vf V f >V
f . Par un théorème de Shimura [GS94, Theorem 3.5.4], les espaces
V f sont de dimensions 1 et il existe donc deux nombres complexes non nuls Ω
f tels que
V f CpΩ
f . Les nombres Ω
f sont appelés périodes de f .
Proposition 2.4.3. Soit sgnχ χ1 le signe du caractère p-adique χ. Alors, Lpf,α,χest un élément de V sgnχ
f .
42
Démonstration. Supposons que χ1 1 et écrivons
Lpf,α,χ Lpf,α,χ Ω
f Lpf,α,χ Ω
f
selon sa décomposition dans l'espace V f >V
f . Nous voulons montrer que Lpf,α,χ est nul.
Soit ψ la partie modérée du caractère χ. Alors, nous pouvons paramétrer les caractères p-
adiques avec partie modérée égale à ψ par la variable T de la façon suivante : ψ ( ψχ1T .
Sur ce disque, Lpf,α,ψ,T est uniquement déterminée par ses valeurs en T ζn γj 1 où
ζn est une racine pn-ième de l'unité et 0 B j B k 2. Alors la propriété d'interpolation pour
Lpf,α,ψ, ζn γj 1 donne, en utilisant la formule 2.2,
Lpf,α,ψ, ζn γj 1 epα,ψ mj1
τψ j!
2πij Lfψ,j 1 epα,ψ Q
a mod m
ψaλf,zj ;a,m.Étudions de plus près la somme dans cette dernière égalité. Pour ce faire, posons
λf,zj ,a,m λf,zj ;a,m λf,zj ;a,m2
.
Il suit que λf,zj ;a,m > V f . Remarquons que 1 > Z~pMZ, donc le signe de χ est
déterminé par le signe de ψ. Puisque ψa ψa par hypothèse,Q
a mod m
ψaλf,zj ;a,m Qa mod m
ψaλf,zj ;a,m ψaλf,zj ;a,m2
Qa mod m
ψaλf,zj ;a,m.Il suit que Lpf,α,ψ, ζn γj 1 > V
f et donc que Lpf,α,ψ, ζn γj 1 Lpf,α,ψ, ζn γj 1Ω
f
pour ces valeurs spéciales. Or, Lpf,α,ψ,T est uniquement déterminée par ces valeurs d'où il
suit que
Lpf,α,ψ,T Lpf,α,ψ,T Ω
f > Vf .
Puisque le caractère χ est donné par le caractère ψχ1T0 pour un certain T0 > OCp , Lpf,α,χ >V f comme voulu. Si le signe du caractère ψ est plutôt 1, on peut utiliser le même argument
avec
λf,zj ,a,m λf,zj ;a,m λf,zj ;a,m2
pour montrer que Lpf,α,χ > V f . Ì
Ainsi, pour ψ un caractère modéré xé, on verra Lpf,α,ψ,s comme prenant ses valeurs dans
Cp Ωsgnψf . Il est important de remarquer que les périodes Ω
f données par le théorème de
Shimura ne sont pas uniques et que l'obtention d'une fonction L p-adique à valeurs dans Cp
dépend du choix de ces périodes.
43
Remarque 2.4.4. Soit E une courbe elliptique sur Q. Par le théorème de modularité [DSS05,
Theorem 8.8.3], il est possible d'associer à E une forme primitive fE > S2Γ0N pour un
certain N et on dénit la fonction L p-adique de E comme étant la fonction LpfE ,α,χ.Dans ce cas, les périodes peuvent être déterminées à un signe près en choisissant les périodes
de Néron [Pol03, section 5.2.1]. Si f est une forme primitive et satisfait en plus des conditions
techniques, Vatsal [Vat99] a construit des périodes canoniques pour f .
Il est possible d'être plus précis quant à l'image de Lpf,α,ψ,s. Rappelons que Kf est le corps
obtenu en ajoutant à Q les coecients de Fourier de f . Soit K la complétion de Kf en v où
v est l'unique premier de Kf au-dessus de p qui tombe dans x >Cp vx A 0.Dénition 2.4.5. Soit ψ un caractère de Dirichlet de conducteur M . On dénit
Kψ Kψ1,ψ2, . . . ,ψM 1le corps obtenu à partir de K en ajoutant les valeurs de ψ et Oψ son anneau d'entiers. Fina-
lement, on pose Λψ OψJT K.
Proposition 2.4.6. La fonction Lpf,α,ψ,s prend ses valeurs dans Kψα Ωsgnψf .
Démonstration. Voir la discussion [Pol03, page 531]. Ì
Soit k le corps résiduel deK. Lorsque vpap 0, il y a une unique racine α p-admissible pour le
polynôme X2apXεppk1 qui est nécessairement une unité p-adique. En eet, le polynôme
X2 apX > kX possède une racine simple α x 0. Par le lemme de Hensel généralisé, il existe
un relèvement α > OK de α. Ainsi, α > K et Lpf,α,ψ,s prend ses valeurs dans Oψ Ωsgnψf
par la partie 3 du théorème 2.2.5. Lorsque vpap A 0, les deux racines α et β du polynôme
X2 apX εppk1 sont p-admissibles avec valuations plus grandes ou égales à 1. Dans ce
cas-ci, on ne peut donc rien dire de plus sur les valeurs de la fonction L p-adique.
Une conséquence de la discussion précédente est que, lorsque vpap 0, la fonction Lpf,ψ,T
Ωsgnψf
est un élément de Λψ. Lorsque pSap, les coecients de Lpf,α,ψ,T
Ωsgnψf
> KψαJT K ne sont plus
entiers. On aura même en général que Lpf,α,ψ,T
Ωsgnψf
~> Λψ@Kψα.
2.5 Le cas pSap
Lorsque pSap, µf,α n'est pas une mesure et les coecients de Lpf,α,ψ,T ne sont pas entiers.Cela cause problème quand nous voulons étudier des questions de congruences entre les co-
ecients des fonctions L p-adiques. Pour pallier à ce problème, Pollack [Pol03] a déni une
44
paire de fonctions L p-adiques associée à une forme modulaire f et racine α. Cette paire de
fonctions Lp , appelées fonctions L p-adiques plus et moins, satisfait la relation
Lpf,α,ψ,T logpT Lpf,α,ψ,T logpT L
pf,α,ψ,T α.De plus, les coecients des fonctions L
pf,α,ψ,T sont entiers. Dans cette section, nous don-nons la dénition des fonctions L plus et moins et nous présentons leur équation fonctionnelle.
Par la suite, nous discutons brièvement d'une généralistion de ces fonctions due à Sprung
[Spr17].
Soit f une forme modulaire primitive de poids k, niveau N et caractère ε. On supposera
toujours que p,N 1. Soit K, Kψ, Oψ et Λψ comme dans la sous-section précédente. Soit
ΦnT Pp1t0 T
pn1t le pn-ième polynôme cyclotomique, soit ζn une racine primitive pn-ième
de l'unité et soit γ un générateur topologique de 1 pZp.
Dénition 2.5.1. Pour n'importe quel entier j, on dénit
logp,jT 1
p
ª
Mn1
Φ2nγj1 T p
,
logp,jT 1
p
ª
Mn1
Φ2n1γj1 T p
.
Proposition 2.5.2. Les séries de puissances logp,jT >QpJT K convergent sur le disque unité
ouvert x > Cp SxS @ 1. De plus, les zéros de logp,jT (resp. logp,jT ) sont précisément
γj ζ2n 1 (resp. γj ζ2n1 1) pour n A 0 et ces zéros sont tous simples.
Démonstration. Voir [Pol03, lemma 4.1]. Ì
Corollaire 2.5.3. Les séries de puissances
logpT k2
Mj0
logp,jT ,
logpT k2
Mj0
logp,jT dans QpJT K convergent sur le disque unité ouvert.
Soit µ une distribution sur Zp. La transformation d'Amice µ ( RZp1 T xµx induit un
isomorphisme d'espaces de Fréchet entre l'ensemble des distributions sur Zp à valeurs dans Qp
et l'ensemble des fonctions analytiques sur OCp à coecients dans Qp. Les fonctions logpT sont analytiques, donc elles peuvent être exprimées comme des distributions par la transfor-
mation d'Amice inverse. Dans le cas k 2, ces distributions ont été entièrement caractérisées
dans [DL17].
45
Remarque 2.5.4. Les demi-logarithmes plus et moins logpT dépendent de k, le poids de f ,et du choix d'un générateur topologique γ. L'appellation demi-logarithme provient du fait qu'il
est possible de montrer que
p2 logp,jT logp,jT logpγj1 T γj 1 T 1
.
Lorsque f est une forme modulaire de poids k 2, les séries de puissances logpT satisfontune équation fonctionnelle par rapport au changement de variable T ( 1
1T 1. Pour mon-
trer ce résultat, nous avons d'abord besoin d'un lemme sur le comportement des polynômes
cyclotomiques lorsque l'on procède au changement de variable.
Lemme 2.5.5. Les polynômes cyclotomiques satisfont l'équation fonctionnelle
Φn1~1 T Φn1 T 1 T pn1p1.
Démonstration. Par dénition,
Φn1~1 T p1
Qt0
1
1 Tp
n1t
1 T pn1p1p1
Qt0
1 T pn1t 1 T pn1p1Φn1 T .
Ì
Proposition 2.5.6. Soit
W 1 T ª
Mk1
1 T p2k1p1,
W 1 T ª
Mk1
1 T p2k2p1.
Alors, les demi-logarithmes plus et moins satisfont l'équation fonctionnelle
logp 1
1 T 1 logpT W 1 T .
Démonstration. Nous suivons la démonstration faite dans [Pol03, Lemma 4.6]. Par dénition,
logp 1
1 T 1 1
p
ª
Mk1
Φ2k1~1 T p
1
p
ª
Mk1
Φ2k1 T 1 T p2k1p1
p
logpT W 1 T .Un argument similaire s'applique pour montrer l'équation fonctionnelle pour logpT . Ì
46
Nous énonçons maintenant le théorème clé de [Pol03]. Ce théorème nous donne une factori-
sation de la fonction L p-adique de f en deux fonctions L p-adiques, appelées fonctions L
p-adiques plus et moins.
Théorème 2.5.7. Soit f une forme modulaire de poids k. Si p est impair et ap 0, alors
Lpf,α,ψ,T Ωsgnψf
Lpf,ψ,T logpT L
pf,ψ,T logpT α,où L
pf,ψ,T > Λψ@Kψ.
Démonstration. Voir [Pol03, Theorem 5.1]. Ì
Comme les fonctions Lpf,α,T et Lpf,β,T , les fonctions Lp satisfont une équation fonction-
nelle. Dans [Pol03], le résultat est énoncé pour les fonctions associées à une courbe elliptique.
Nous donnons une démonstration un peu plus générale pour les fonctions associées à une
forme modulaire de poids 2.
Théorème 2.5.8. Soit f une forme primitive de poids 2 avec caractère ε trivial. Soit Lpf,ψ,T
comme dans le théorème 2.5.7. Supposons que l'indice de ramication e de Kψ~Qp est impair.
Alors,
Lpf,ψ,T cQ1 T
logp`Qe
logp γ ψQW 1 T Lp f,ψ, 1
1 T 1 .
Démonstration. Fixons une racine p-admissible α du polynôme de Hecke X2 apX εpp X2 p. Rappelons l'équation fonctionnelle pour Lpf,α,ψ,T :
Lpf,α,ψ,T cQ1 T logp`Qe
logp γ ψQLp f,α,ψ, 1
1 T 1 . (2.4)
Par le théorème 2.5.7, le côté gauche de l'équation est
Lpf,ψ,T logpT L
pf,ψ,T logpT α.De manière analogue, le côté droit est
cQ1 T logp`Qe
logp γ ψQ Lp f,ψ, 1
1 T 1 logp 1
1 T 1
Lp f,ψ, 1
1 T 1 logp 1
1 T 1 α .
En utilisant l'équation fonctionnelle 2.5.6 pour logp et en réarrangeant l'égalité 2.4 de telle
sorte que tous les termes soient d'un côté et tous les termes de l'autre, on obtient
que
logpT Lpf,ψ,T cQ1 T
logp`Qe
logp γ ψQW 1 T Lp f,ψ, 1
1 T 1
47
doit être égal à
α logpT Lpf,ψ,T cQ1 T
logp`Qe
logp γ ψQW 1 T Lp f,ψ, 1
1 T 1 .
Soit v la valuation sur Kψ normalisée de telle sorte que vp 1. Alors, les coecients non nuls
du côté gauche de l'équation ont tous une valuation de n~e pour certains n > Z, alors que les
coecients non nuls du côté droit ont tous une valuation de 2me2e pour certains entiers m > Z
à cause du facteur α qui est dans une extension quadratique de Kψ et qui a une valuation de
1~2. Or, il est impossible qu'un coecient non nul ait une valuation avec dénominateur pair
et impair en même temps. Cela force les deux termes de l'égalité à être nuls. Donc,
logpT Lpf,ψ,T cQ1 T
logp`Qe
logp γ ψQW 1 T Lp f,ψ, 1
1 T 1 0.
Puisque logpT x 0, il suit que
Lpf,ψ,T cQ1 T
logp`Qe
logp γ ψQW 1 T Lp f,ψ, 1
1 T 1
si l'on suppose que Λψ@Kψ est un domaine intègre. Mais cela suit du fait queKψ est un corps
et que Oψ est un domaine intègre (si x,y > Oψ sont tels que xy 0, alors vxy vxvy v0 ª. Ce qui implique que vx ª ou vy ª, donc x 0 ou y 0.) et cela complète
la démonstration. Ì
Finalement, nous discutons du cas plus général où pSap (ap n'est pas nécessairement nul). Dans
cette situation, il est encore possible de factoriser les fonctions Lpf,α,ψ,T et Lpf,β,ψ,T .Théorème 2.5.9. Fixons un caractère modéré ψ. Supposons que pSap, alors il existe une pairede fonctions L®
p, L¬p telle que
Lpf,α,ψ,T
Ωsgnψf
,Lpf,β,ψ,T
Ωsgnψf
L®pf,ψ,T , L¬
pf,ψ,T Logα,β1 T
où L®pf,ψ,T ,L¬
pf,ψ,T > Λψ et Logα,β1T est une matrice 22 explicite qui converge sur
le disque unité ouvert de Cp.
Démonstration. Voir [Spr17, Theorem 2.14]. Ì
Remarque 2.5.10. Dans [Spr17], les fonctions ® ~ ¬ sont dénotées ÂL® ~ ¬p et la matrice de Log
est notée ÄLog. Nous avons décidé d'omettre les chapeaux pour alléger la notation.
Les fonctions ® ~ ¬ généralisent les fonctions de Pollack. En eet, lorsque ap 0, L®p L
p à
une unité près. Il en est de même pour L¬p.
48
Théorème 2.5.11. Les fonctions ® ~ ¬ satisfont l'équation fonctionnelle
L® ~ ¬p f,ψ,T cQ1 T
logp`Qe
logp γ ψQL® ~ ¬p f,ψ, 1
1 T 1 .
Démonstration. Voir [Spr17, Theorem 5.19]. Ì
49
Chapitre 3
Conséquences de l'équation
fonctionnelle
Ce chapitre comporte des résultats sur les coecients des fonctions L p-adiques. Nous pre-
nons quelques lignes pour motiver l'étude de ces coecients. Comme nous avons vu, la fonc-
tion Lpf,α,s (resp. Lpf,α,T ) est une fonction localement analytique par rapport à la
variable s > Zp (resp. T > OCp). Il est donc possible d'écrire cette fonction comme une
série de puissances et d'étudier les coecients qui apparaissent dans ce développement. Si
Lpf,α,s Pªn0 ans 1n et que f est une forme modulaire qui correspond à une courbe
elliptique E par le théorème de modularité, alors il est conjecturé que le premier coecient
non nul de Lpf,α,s est étroitement lié à des invariants arithmétiques de E. Pour rendre
cette conjecture un peu plus précise, nous énonçons quelques résultats de base sur les courbes
elliptiques.
Dénition 3.0.12. Une courbe elliptique sur Q est une courbe algébrique dénie par une
équation de la forme
E y2 x3 ax b
où a,b >Q et fx x3axb ne possède pas de racine multiple. On note par EQ l'ensemble
des points rationnels sur la courbe E, c'est-à-dire,
EQ x,y >Q2 y2 x3 ax b.
Si l'on ajoute un point à l'inni aux nombres rationnels, donc si l'on considère E comme
une courbe projective sur le plan projectif P1Q, alors il est possible de munir EQ de la
structure d'un groupe abélien ([Kob93, Chapter 1, section 7] pour plus de détails). Un résultat
classique démontré par Mordell est que le groupe EQ est de type ni.
50
Théorème 3.0.13 (Mordell). Le groupe abélien EQ est de type ni. En particulier,
EQ Zr?∆
où ∆ est un groupe ni.
La quantité r >N du théorème est appelé le rang de E et correspond au nombre de générateurs
d'ordre inni de EQ. En général, il est dicile de déterminer le rang d'une courbe elliptique
donnée.
La conjecture de Birch et Swinnerton-Dyer (BSD) prédit un lien entre le premier coecient
non nul du développement de Taylor de la fonction L complexe de E et le rang de E.
Conjecture 3.0.14 (Conjecture faible de BSD). Soit ords1LE,s l'ordre d'annulation de la
fonction LE,s en s 1. Nous avons l'égalité ords1LE,s r.En utilisant la formule d'interpolation de LpE,α,s, il est possible d'obtenir un analogue
p-adique de cette conjecture.
Conjecture 3.0.15 (Conjecture faible de BSD p-adique). Supposons que α x 1, alors nous
avons l'égalité ords1LpE,α,s r. Si α 1, alors ords1LpE,α,s r 1.
La condition imposée sur α provient du fait que, si α x 1, alors le multiplicateur p-adique epαest non nul et l'ordre d'annulation en s 1 de LpE,α,s est le même que celui de LE,s. Siα 1, alors epα 0 et il est conjecturé dans [MTT86] que l'ordre d'annulation de LpE,α,sdevrait être un de plus que l'ordre d'annulation de LE,s. Cette conjecture (sur les ordres
d'annulation, pas BSD) a été démontrée par Greenberg-Stevens [GS94].
Remarque 3.0.16. Il existe aussi une conjecture forte de BSD. Celle-ci prédit que le premier
coecient non nul de LE,s peut être exprimé en fonction d'invariants de la courbe elliptique.
Cette version de la conjecture est l'un des problèmes du millénaire de l'Institut Clay.
3.1 Coecients directeurs et sous-directeurs
Dénition 3.1.1. Soit gX une fonction complexe ou p-adique et supposons qu'elle est don-
née par une série de la forme gX Pªnm anX
n. Alors, le premier coecient non nul amest appelé le coecient directeur de gX et le second coecient non nul am1 est appelé le
coecient sous-directeur de gX.Puisque le coecient directeur de LE,s encode plusieurs informations de nature arithmétique
par la conjecture BSD, il est possible de se demander si le coecient sous-directeur de LE,s
51
pourrait également nous apporter de nouvelles informations sur la structure de E. La réponse
est non puisqu'un résultat de Wuthrich [Wut17] montre que le coecient sous-directeur n'est
qu'un multiple du coecient directeur.
Théorème 3.1.2. Soit E une courbe elliptique sur Q. Soit LE,s ars 1r ar1s 1r1 le développement de Taylor de LE,s autour de s 1. Alors,
ar1 γ log2π 1
2logNar
où γ est la constante d'Euler et N est le conducteur de E.
Démonstration. Le résultat est obtenu en dérivant l'équation fonctionnelle pour LE,s. Nousferons la preuve en détail pour le cas de la fonction L p-adique. Pour la fonction L complexe,
le lecteur peut consulter [Wut17]. Ì
Puisque la démonstration de ce résultat n'utilise que l'équation fonctionnelle de LE,s, Wu-
thrich fait la remarque qu'un résultat similaire peut être obtenu pour n'importe quelle fonction
L satisfaisant une équation fonctionnelle similaire à celle de LE,s. Suivant cette philosophie,Bianchi a démontré qu'un résultat de même nature peut en eet être obtenu pour la fonction L
p-adique d'une forme modulaire de poids 2. Bien que le résultat soit démontré pour une forme
modulaire de poids 2 dans [Bia19], le même argument peut être appliqué sans modication
pour une forme primitive de poids 2k. Nous aurons d'abord besoin d'un lemme.
Pour le restant de cette section, f sera une forme primitive de poids 2k, caractère trivial et
niveau N où p,N 1. Soit α une racine p-admissible pour f .
Lemme 3.1.3. Soit ψ un caractère de Dirichlet tel que ψ ψ. Alors,
cQ ψQ 1ords1Lpf,α,ψ,s.Démonstration. Posons Λpf,α,ψ,s `Qes~2Lpf,α,ψ,s. Alors, Λp satisfait l'équation fonc-
tionnelle
Λpf,α,ψ,2 s 1k~2cQψQΛpf,α,ψ,s. (3.1)
Posons m ords1Lpf,α,ψ,s. En dérivant l'équation (3.1) et en évaluant en s 1, on obtient
1m 1k~2cQψQ dm
dsmΛpf,α,ψ,sU
s1 0.
Maisdm
dsmΛpf,α,ψ,sU
s1 `Qe1~2 dm
dsmLpf,α,ψ,sU
s1x 0
par la dénition de m. Il suit que 1k~2cQψQ doit être égal à 1m. Ì
52
Théorème 3.1.4 (Bianchi). Soit ψ un caractère de Dirichlet tel que ψ ψ. Posons m
ords1Lpf,α,ψ,s. Alors,Lpf,α,ψ,s ams 1m am1s 1m1
avec am1 12 logp`Qe am.
Démonstration. On suit la preuve faite dans [Bia19, Theorem 3.3]. Par le lemme précédent,
on a que Λpf,α,ψ,2 s 1mΛpf,α,ψ,s. Ainsi, lorsque i m 1 mod 2, on aura que
di
dsiΛpf,α,ψ,sU
s1 0.
En prenant i m 1 et en posant hs `Qes~2, cela donne
0 dm1
dsm1Λpf,α,ψ,sU
s1
dm1
dsm1hsLpf,α,ψ,s U
s1
m1
Ql0
m 1
l dm1l
dsm1lhs dl
dslLpf,α,ψ,s U
s1
m 1hs dm
dsmLpf,α,ψ,s hs dm1
dsm1Lpf,α,ψ,s U
s1
m 1!h1 am h1 am1.Il suit que am1
h1h1 am 1
2 logp`Qeam. Ì
Il y a un résultat similaire si l'on utilise la variable T à la place.
Théorème 3.1.5 (Bianchi). Soit f une forme modulaire comme en début de section et ψ un
caractère tel que ψ ψ. Alors,
Lpf,α,ψ,T cmTm cm1Tm1
avec
cm1 cm2 logp`Qe
logpγ m .
Démonstration. On prouve ce théorème de la même façon que l'on a montré le théorème 3.1.4.
Pour plus de détails, voir [Bia19, Theorem 4.1]. Ì
Nous adaptons cette idée au cas des fonctions de Pollack. Pour simplier, on suppose que
les coecients de f sont rationnels, c'est-à-dire, K Qp. De cette façon, Lpf,ψ,T > ΛO.
53
Remarquons que l'indice de ramication de Qp~Qp est impair et donc les hypothèses du
théorème 2.5.8 sont satisfaites. Cette situation se produit par exemple lorsque f est une forme
modulaire associée à une courbe elliptique par le théorème de modularité.
Théorème 3.1.6. Soit f telle que K Qp. Supposons que ap 0 et que ψ ψ. Alors,
Lpf,ψ,T am
Tm bmT 1m ,
Lpf,ψ,T am
Tm bmT 1m
avec
bm
am
2 logp`Qe
logp γ
p
1 pm ,
bm
am
2 logp`Qe
logp γ
1
1 pm .
Démonstration. Nous montrons le résultat pour la fonction plus. La démonstration pour Lp
est similaire. Soit m m l'ordre d'annulation de Lpf,ψ,T en T 0. On dérive m fois
l'équation fonctionnelle (2.4) et on évalue en T 0 pour obtenir
dmT
dTmLpf,ψ,T U
T0 1k~2ψQcQh01mdmT
dTmLpf,ψ,T U
T0
où nous avons posé hT 1 T logp`Qe
logp γ W 1 T . Cela nous donne
dmT
dTmLpf,ψ,T U
T01 1k~2ψQW 11m 0.
Mais W 1 1 et par hypothèse, dmTdTmL
pf,ψ,T U
T0x 0. Donc, 1k~2cQψQ 1m.
Maintenant, on dérive m 1 fois le côté gauche de l'équation fonctionnelle pour obtenir
dm1T
dTm1Lpf,ψ,T U
T0 m 1!bm
.
Dériver m1 fois le côté droit est un peu plus complexe. On pose gT 11T 1. On utilisera
la formule de Faà di Bruno qui est une généralisation de la formule de dérivation en chaîne
54
pour les dérivées d'ordres supérieures.
1mhT Lpf, gT m1 W
T0
1mm1
Qk0
m 1
kL
pf,gT khT m1kWT0
1m m 1
mL
pf,gT mhT 1 m 1
m 1L
pf,gT m1hT WT0
1m m 1Lmp f,gT g1T m h1T
Lmp f,gT m 1mg1T m1 g
2T 2!
Lm1p f,gT g1T m1hT W
T0
1m m 1m!am1mh10 m!am
m 1m1m1 m 1!bm1m1
m 1!amh10 mam
bm
m 1! amh10 m bm
.En égalant la dérivée m 1-ième du côté gauche et du côté droit, on trouve
bm
am
2hT ST0 m.
Posons ξ logp`Qe
logp γ. Mais,
hT ST0 1 T ξ ST0 QkC1
p2k1p 1MkC1
1 T p2k1p11ST0
ξ1 T ξ1ST0 W1 T ST0
ξ p
p 1.
Cela montre le résultat. Ì
Corollaire 3.1.7. Sous les mêmes hypothèses que celles du théorème 3.1.6, l'ordre d'annula-
tion de Lpf,ψ,T et l'ordre d'annulation de L
pf,ψ,T ont la même parité.
Démonstration. Soit m ordT0Lpf,ψ,T et m ordT0L
pf,ψ,T . Dans la preuve du
théorème 3.1.6, nous avons montré que 1m 1k~2cQψQ. Puisque Lpf,ψ,T satis-
fait une équation fonctionnelle similaire à celle de Lpf,ψ,T , il est possible de montrer que
1m 1k~2cQψQ. Il suit que m m mod 2. Ì
Corollaire 3.1.8. Soit p un premier tel que pSap. Soit α et β les deux racines p-admissibles
du polynôme de Hecke de f . Alors, l'ordre d'annulation de Lpf,ψ,α,T et l'ordre d'annulationde Lpf,β,ψ,T ont la même parité.
Démonstration. On reproduit le même argument que l'on a utilisé pour Lp . Ì
55
3.2 Invariants d'Iwasawa
Bianchi a également étudié les invariants d'Iwasawa associés à une courbe elliptique E. Soit
F une extension nie de Qp, O son anneau d'entiers et π un uniformisant de F . On rappelle
que l'algèbre d'Iwasawa est ΛO OJT K. Les invariants d'Iwasawa sont dénis en général pour
tout élément de l'algèbre d'Iwasawa via le théorème suivant.
Théorème 3.2.1 (préparation de Weierstrass p-adique). Soit gT > ΛO un élément non nul.
On peut écrire de manière unique
gT πµP T UT où µ est un entier non négatif, UT > Λ
O OJT K est une unité et P T Tn an1T
n1
. . . a0 est un polynôme tel que πSai pour 0 B i B n 1.
Démonstration. Voir [Was12, Theorem 7.3]. Ì
Dénition 3.2.2. Soit gT > ΛO un élément non nul. Écrivons gT πµUT P T à
l'aide du théorème de préparation de Weierstrass p-adique. Le µ-invariant de gT , µgT ,est déni comme étant l'entier µ et le λ-invariant de gT , λgT , est degP T .Le µ-invariant correspond à la plus grande puissance de π divisant tous les coecients de gT ,alors que le λ-invariant correspond au nombre de zéros de gT dans le disque T >Cp ST S @ 1.Lorsque E est une courbe elliptique sur Q avec réduction ordinaire en p, il est possible de
montrer que LpE,ψ,T > ZpψJT K. Soit π un uniformisant de Zpψ. Alors le théorème de
préparation appliqué à cette situation nous permet d'écrire LpE,ψ,T πµUT P T et dedénir les invariants d'Iwasawa de LpE,ψ,T .Théorème 3.2.3 (Bianchi). Soit E une courbe elliptique sur Q avec réduction ordinaire
semistable en p. Soit ψ un caractère de Dirichlet de conducteur pkM . Alors, le µ-invariant de
LpE,ψ,T est égal au µ-invariant de LpE,ψ,T .Démonstration. Voir [Bia19, Theorem 4.2]. Ì
Une question naturelle est de se demander si les λ-invariants sont aussi les mêmes. Pour
répondre à cette question, nous démontrons des lemmes généraux sur les séries de puissances.
Ces résultats proviennent d'un travail conjoint avec Florian Sprung [DS19].
Lemme 3.2.4. Supposons que fT et gT > ΛO sont reliés par
gT uT f 1
1 T 1
où uT > ΛO. Alors, µf µg.
56
Démonstration. L'idée pour cette démonstration et la suivante nous a été proposée par un
arbitre anonyme. La clé de l'argument est de constater que α T ( 11T 1 est une involution.
Remarquons de plus que, pour f > ΛO, πµf divise f XαT fT T 2 . . .. Donc, µf Bµf Xα. En appliquant le même argument à f Xα, on trouve que µf B µf Xα B µf Xα2et le résultat suit. Ì
Lemme 3.2.5. Supposons que fT et gT > ΛO sont reliés par
gT uT f 1
1 T 1
où uT > ΛO. Alors, λf λg.
Démonstration. Nous devons montrer que fT et gT ont le même nombre de zéros dans
U T > Cp ST S @ 1 en comptant les multiplicités. Soit ζ > U un zéro de fT . Alors, ζ1ζ
est un zéro de gT dans U . En eet,
U ζ
1 ζU Sζ S
S1 ζ S Sζ S @ 1,
car Sζ 1S maxSζ S,S1S 1 puisque Sζ S x S1S. Comme αT a une dérivée non nulle αT > ΛO
pour tout T > U , il suit que la multiplicité du zéro g ζ1ζ gαζ est la même que la
multiplicité du zéro fζ. Puisque α nous donne une bijection entre l'ensemble des zéros de
fT et l'ensemble des zéros de gT qui préserve la multiplicité, on conclut que λfT λgT . Ì
Proposition 3.2.6. Soit ψ un caractère de Dirichlet et p tel que p Ñ ap. Les invariants
d'Iwasawa de Lpf,α,ψ,T restent les mêmes sous la substitution ψ ( ψ. En d'autres mots,
µLpf,α,ψ,T µLpf,α,ψ,T λLpf,α,ψ,T λLpf,α,ψ,T .
Démonstration. Par l'équation fonctionnelle 2.3, Lpf,α,ψ,T et Lp f,α,ψ, 11T 1 ne dif-
fèrent que par un élément de la forme 1k~2cQ 1T logp`Qe
logp γ ψQ. Mais, 1k~2cQ ψQest une unité de Cp et 1T
logp`Qe
logp γ est une unité dans l'algèbre ΛO. Le résultat suit alors du
lemme 3.2.4 et du lemme 3.2.5. Ì
Remarque 3.2.7. Dans le cas de la fonction L p-adique associée à une courbe elliptique avec
bonne réduction semistable en p, on retrouve le résultat de Bianchi pour la µ-invariance.
Puisque les lemmes 3.2.4 et 3.2.5 peuvent être appliqués à n'importe quelle série de puissances
dans une algèbre d'Iwasawa, on obtient les corollaires suivants.
57
Corollaire 3.2.8. Soit p tel que pSap. Posonsµ® µL®
pf,ψ,T , µ® µL®pf,ψ,T
µ¬ µL¬pf,ψ,T , µ¬ µL¬
pf,ψ,T .On dénit λ®, λ®, λ¬ et λ¬ de façon similaire. Alors, µ® µ®, µ¬ µ¬, λ® λ® et λ¬ λ¬.
Démonstration. Puisque les fonctions L® ~ ¬p f,ψ,T ont des coecients entiers et satisfont la
même équation fonctionnelle que Lpf,α,ψ,T , on peut appliquer les lemmes de la même
façon. Ì
Corollaire 3.2.9. Soit p tel que ap 0. Supposons de plus que K Q an que Lpf,ψ,T > Λψ
dans la notation de 2.5. Posons
µ µLpf,ψ,T , µ µL
pf,ψ,T µ µL
pf,ψ,T , µ µLpf,ψ,T .
Alors, µ µ et µ µ. De même, λ λ et λ λ où les λ-invariants sont dénis de la
même façon.
Démonstration. L'argument est le même que celui du précédent corollaire. Ì
58
Conclusion
Pour une forme parabolique f > SkΓ1N, nous avons vu qu'il est possible de construire
une distribution p-adique µf avec la propriété que Lpf,ψxj RZ
p,Mψxxjdµf interpole les
valeurs Lf,ψ,j 1 de la fonction L complexe. De plus, l'équation fonctionnelle de Lpf,χnous a permis d'étudier les coecients du développement de Lpf,χ en série de puissances.
Finalement, nous avons étudié le µ-invariant ainsi que le λ-invariant de la fonction L p-adique.
Une future piste à explorer dans l'étude des fonctions L p-adiques serait les congruences entre
les valeurs spéciales des fonctions L. Soit f et g deux formes modulaires telles que f g mod p.
Alors, Vatsal [Vat99] a démontré, sous quelques conditions techniques, que les valeurs spéciales
Lf,j et Lg,j sont elles aussi congrues modulo p. Supposons que le signe dans l'équation
fonctionnelle de Lf,s est 1. Cela implique que Lf,1 0. Alors, Jochnowitz [Joc94] a prédit
qu'il devrait exister une certaine relation de congruence entre Lf,1 et Lg,1. Est-ce que lethéorème de Wuthrich reliant Lg,1 à Lg,1 nous permettrait de faire un lien entre Lg,1et Lf,1 ? Nous espérons trouver une réponse à cette question dans des travaux futurs.
59
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