exérèse difficile des prothèses fémorales sans ciment

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Page 1: Exérèse difficile des prothèses fémorales sans ciment

3S150 TABLE RONDE — SOFCOT 2006

pour leur caractère difficilement extirpable : macrostructu-res et porométal (tiges de Judet, Lord, etc.) ou spires de vis(tige de Bousquet) et leur reprise devra être réfléchie et pla-nifiée.

Les localisations des traitements et effets de surface nesont pas toujours complets et peuvent être limités en géné-ral en zone métaphysaire (tige de Harris avec fibre-meshmétaphysaire) ce qui peut faciliter l’extraction. Dans ce cas,il est logique de proposer une technique endofémorale.En cas de tiges entièrement revêtues et solidement fixées, ilest moins risqué de réaliser d’emblée une fémorotomie.En effet, les risques de perforations voire de fractures fémo-rales sont importants dans le cas d’une extraction endofé-morale.

La géométrie de l’implant doit être appréciée en fonctionde celle du fémur et notamment du grand trochanter. Unecourbure régulière en sabre facilite l’extraction alors qu’unépaulement peut entraîner une fracture du trochanter déjàfragilisé par une ostéolyse. Il faut alors anticiper cette diffi-culté en réalisant un nettoyage de la région trochantériennedes parties molles ou osseuses voire réaliser une trochanté-rotomie [Masri et al. (36)].

Le cas des tiges non cimentées

Dans le cas des tiges non cimentées, des artifices ont étédéveloppés afin de limiter la perte osseuse iatrogène lors del’ablation de l’implant. L’utilisation, après trochantérotomieétendue, d’une scie de Gigli [De Thomasson et al. (44)] oud’une petite scie sagittale [Kim et al. (45)] s’avère utilepour l’ablation de tiges non cimentées et non descellées,surtout avec un effet de surface réhabité. Paprosky et al.(37) ont décrit une technique associant une trochantéroto-mie étendue suivie d’une libération grâce à une scie deGigli, puis la tige est sectionnée au niveau du trait transver-sal de la trochantérotomie. La partie distale de la tige estensuite extraite à l’aide d’une tréphine légèrement surdi-mensionnée par rapport à la tige.

Cas particulier des implants fracturés

Cette situation est aujourd’hui rare. Elle offre peu deplace à la réflexion tant une fémorotomie semble obliga-toire. En effet, la rupture de l’implant se fait à la jonction dela partie proximale descellée et de la partie distale de la tigeencore bien fixée [Masri et al. (36)].

Exérèse difficile des prothèses fémorales sans ciment

J.-P. LEVAI *, M.-H. FESSY **

LES PROTHÈSES FÉMORALES FIXÉES SANS CIMENT

Les prothèses fémorales fixées sans ciment posent qua-tre types de problèmes : comment évaluer le degré de fixa-tion de la prothèse et la difficulté de son ablation ?(critères d’extirpabilité) ; quelles sont les raisons qui nouspoussent à retirer une prothèse parfaitement fixée ? (indi-cation d’ablation) ; que faut-il faire en préopératoire ?(précautions préopératoires) ; comment faire en peropéra-toire ? (tactique chirurgicale).

Les critères d’inextirpabilité

Reconnaître qu’une prothèse va être difficilement extir-pable repose sur 2 critères opposés : les critères de migra-tion et les critères de fixation et de stabilité.

Pour la migration, une méthode manuelle est suffisante,la méthode de Sutherland ou de Freeman. Une migrationsupérieure à 5 mm est nécessaire pour affirmer son carac-tère pathologique. Toutefois, une migration précoce est pos-sible avec un recalage secondaire de la prothèse. Il est donc

nécessaire pour affirmer une migration de disposer d’unminimum de 3 clichés successifs visualisant cette mobilisa-tion.

Les critères de fixation et de stabilité sont au nombrede 2 : score de Engh et al. (42) et score ARA d’Epinette etGeesink (43) qui permettent de conclure à une interface sta-ble en fonction de l’existence ou non de liseré, d’atrophieou d’hypertrophie du calcar, de l’existence ou non d’un pié-destal…

Les indications

L’indication d’ablation d’une prothèse fixée sans cimentet parfaitement stable doit toujours être discutée. Pour undescellement unipolaire acétabulaire de prothèse totale dehanche avec un fémur fixé sans ciment, il faut toujours évo-quer la conservation de la prothèse fémorale. Deux pointssont en effet essentiels : ne pas aggraver les dégâts osseux etne pas faire de surenchère prothétique.

La seule indication absolue de reprise fémorale est larupture de la tige ou du col.

Lors d’une rupture de tête en céramique avec cône morsealtéré, il est conseillé de réviser l’implant fémoral [Allainet al. (46)], mais certains fabricants proposent un manchonpour le col permettant alors de remettre en place une nou-velle tête céramique.

* Service d’orthopédie, Hôpital Saint-Jacques, 63000 Clermont-Ferrand.** Service de chirurgie orthopédique, centre hospitalier Lyon-sud, bâtiment 3A, 69495 Pierre-Bénite Cedex.

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EXTRACTION DES TIGES FÉMORALES DIFFICILEMENT EXTIRPABLES 3S151

Lors d’un sepsis, l’ablation de la prothèse sera à discuteren concertation avec 1’infectiologue en fonction du germe(sa virulence et sa sensibilité aux antibiotiques), du terrainet du délai depuis l’implantation de la prothèse.

Une instabilité avec luxation récidivante peut être en rap-port avec une malposition prothétique ou un offset fémoralinsuffisant. Pour une malposition prothétique mise en évi-dence par une mesure d’antéversion du col (bilan tomoden-sitométrique), certains discutent l’ablation de la prothèse ouune ostéotomie fémorale de dérotation. Si l’offset est insuf-fisant, il est possible de proposer une retension des fessierspar une trochantérotomie.

En fait, « l’imprévu » est la principale indication denécessité d’ablation d’une prothèse bien fixée : il avait étéprévu de conserver la prothèse fémorale mais cela s’avèreen peropératoire impossible du fait du cône morse ou d’unetête modulaire inenlevable. Dans la majorité des implantsactuels, le cône morse est de diamètre 8/10 ou 12/14, alorsque les implants fournis avant 1990 étaient souvent propo-sés avec un cône 14/16. Une autre situation « imprévue »est le fait des têtes fémorales en titane, proposées dans lesannées 90 qui peuvent fusionner avec la tige titane transfor-mant l’implant modulaire en prothèse monobloc.

Précautions préopératoires

Reconnaître l’implant est indispensable pour prévoir lesdifficultés opératoires. En effet, les difficultés d’ablation dela prothèse seront fonction en particulier de sa forme dansle plan sagittal et de son revêtement partiel ou total. Il estdonc indispensable d’obtenir le compte rendu opératoire etle nom du fabricant qui pourra de plus nous renseigner surles moyens d’extraction et l’existence ou non d’instrumen-tation spécifique pour enlever la prothèse.

Le patient doit être averti des difficultés opératoires etsavoir que le chirurgien est dans l’impossibilité d’exprimeravec certitude le déroulement des suites opératoires. Eneffet, lors de l’ablation d’une prothèse fixée sans ciment, descomplications peuvent survenir et les suites d’une telle inter-vention ne peuvent pas être celles d’une prothèse de pre-mière intention. C’est dire l’importance de discuter avec lepatient du classique rapport bénéfices/risques et d’évoqueravec lui en particulier les abords osseux potentiellementnécessaires (ostéotomies, fémorotomie, trochantérotomie,etc.) ainsi que les risques fracturaires.

La planification préopératoire doit être double. En parti-culier si l’on prévoit une extraction simple par voie endomé-dullaire, cela peut s’avérer en peropératoire impossible et ilfaut donc prévoir une extension potentielle de la voied’abord. Cette extension est le plus souvent une fémoroto-mie et il faut également prévoir un implant compatible aveccette fémorotomie. Par exemple pour une prothèse ver-rouillée : le calcul de la sécurité par rapport à la première visde verrouillage. Ailleurs, s’il s’agit d’une prothèse press-fit,c’est la mesure de la zone de fixation qui permet d’assurerune bonne stabilité.

Dans tous les cas, il faut également prévoir des moyensd’ostéosynthèse (c’est-à-dire plaque à crochets, cerclagesmétalliques, etc.) en cas de complications peropératoiresmais aussi penser aux comblements osseux (greffe, subsi-tuts, etc.).

Tactique chirurgicale

Dans tous les cas des instruments spécifiques sont àconseiller : ciseaux fins, broches, scie de Gigli sans dent(fil métallique torsadé). Il faut garder la tête modulaire oules pièces modulaires de la prothèse car parfois il faudrasavoir terminer une opération lorsqu’une tige s’avère finale-ment inextirpable en utilisant les implants retirés.

La voie d’abord endomédullaire peut être proposée deprincipe pour les tiges fémorales droites centrées et les pro-thèses vissées. Dans tous les cas, il faut se fixer un tempsd’essai pour l’ablation mais ne pas s’acharner si l’extractions’avère impossible. Il faut alors recourir à une extension dela voie d’abord et appliquer la technique du « sarcophage »de Doré ou pratiquer une fémorotomie. Il faut insister surdeux points techniques importants : garder un volet fémoralpédiculé pour éviter sa résorption secondaire et mettre enplace sur la diaphyse fémorale à la partie distale du volet undavier ou un cerclage afin de prévenir une fracture initiée àla limite du volet.

La fémorotomie s’adresse alors : aux échecs de la voieendomédullaire ; aux fémurs varisés et on pourra associerune ostéotomie fémorale de correction ; aux prothèses ana-tomiques — le volet peut être alors arrêté à la portion droitede la prothèse ; à certaines prothèses à revêtement complet.

Dans tous les cas, le but est de rompre les ponts osseuxentre fémur et prothèse en faisant le tour de la prothèse avecdes ciseaux, des broches et éventuellement une scie deGigli. En cas de prothèses titane à ailettes (tige de Wagner,par exemple), une encoche dans une ailette peut arrêter laprogression de la scie.

Pour les prothèses anatomiques, il a été proposé une sec-tion de l’implant fémoral avec une fraise à métaux et la réa-lisation d’une tréphine sur mesure pour enlever la partiedistale, cette technique est très peu utilisée en France, ced’autant que la fémorotomie jusqu’à l’extrémité distale dela tige permet son exérèse.

Synthèse

Dans tous les cas de reprise de tiges fémorales fixéessans ciment, il ne faut pas aggraver les défects osseux et selaisser entraîner à une surenchère prothétique. Les 4 pointsessentiels sont : reconnaître l’implant et le fabricant pourconnaître les caractéristiques de la tige et l’existence éven-tuelle d’une instrumentation spécifique pour l’ablation ;garder stériles les pièces modulaires de la prothèse, « au casoù… » ; prévoir le pire avec une planification permettantune extension de la voie d’abord, et une prothèse compati-ble avec cette extension ; avertir le patient des difficultés dece type de reprise.

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Le chapitre suivant (M.-H. Fessy) montre avec plus dedétails la tactique d’ablation d’une tige sans ciment. Mêmes’il s’agit d’un cas particulier, le principe et les repèresdemeurent le mêmes pour la plupart des tiges sans ciment.

EXTRACTION D’UNE TIGE DROITE SANS CIMENT

(M.-H. Fessy, J. Chouteau et le groupe ARTRO)Dans les années 1970, tous les défenseurs du sans ciment

se heurtent à l’insuffisance de fiabilité de la fixation de laprothèse à l’os. Au début des années 1980, cette fiabilité estdésormais acquise. L’ostéointégration assure une fixationsecondaire de l’implant à l’os de façon constante, durable etdéfinitive. Cette ostéointégration est tellement efficace quele sans ciment devient rapidement synonyme d’inextractibi-lité des implants. Cette difficulté est alors un reprocheessentiel fait à la méthode. Il est vrai que cette ostéointégra-tion est solide par l’intermédiaire de ponts osseux qui unis-sent l’inerte au vivant sans aucune interposition, comme leprouvent de nombreuses études histologiques. La difficultéd’extraction apparaît alors comme la rançon d’une ostéoin-tégration très performante. En cas de reprise septique ouaseptique, l’approche par la voie transfémorale est proposéesouvent de façon systématique pour explanter une prothèsesans ciment. La technique, bien codifiée, est facile à réalisermais agressive. Cette voie reste très efficace ; elle a desavantages, mais elle possède également une morbidité pro-pre. Elle impose souvent un appui différé afin de permettrela consolidation osseuse, de même souvent qu’une escaladeprothétique. Pour éviter ce recours systématique à la voietransfémorale, le groupe ARTRO a mené une réflexionpour extraire une tige Corail™ à foyer fermé.

Technique d’extraction

Le principe de cette technique repose sur l’explantationde la tige par une ostéotomie endofémorale guidée par lecorps prothétique lui-même.

Tout commence par une planification : la longueur de latige pour sélectionner les ciseaux et choisir l’implant dereprise ; le contact de la tige avec les corticales. Plus lescontacts seront intimes, plus l’extraction s’avérera difficile :l’état de l’os receveur, l’épaisseur des corticales et l’ostéo-pénie éventuelle, terrain de fracture fémorale, en casd’impossibilité d’extraction par voie haute, il faut planifierle recours éventuel au volet fémoral et définir la taille deson implant.

Il faut disposer d’un matériel spécifique. Un jeu de lamessouples a été développé par le groupe, à la manière deMoreland, avec des largeurs et des longueurs croissantes

permettant d’atteindre l’extrémité distale de la tige. Il fautégalement disposer de broches de Kirschner à monter surun moteur. Nous insisterons sur la nécessité d’un extracteur,solidarisé à la tige par le col ou par un pas de vis fixé sur lecorps prothétique. Ce système doit réaliser une connexionsolide sur le corps prothétique sans aucun mouvement para-site. Une masse coulissante volumineuse permet de déve-lopper une force d’extraction efficace.

La première étape consiste à introduire entre l’os et lecorps prothétique les lames souples sur les quatre faces del’implant, mais surtout sur la face antérieure et sur la facepostérieure. Les lames utilisées seront d’abord larges etcourtes, puis progressivement, on choisira des lames pluslongues et éventuellement plus étroites pour s’approcher dusommet de la tige. Si cela est nécessaire, on utilise ensuitedes broches de Kirschner introduites le long du corps pro-thétique et guidées par les rainures verticales de la tigeCorail™ afin de rompre les attaches osseuses.

La dernière étape est l’extraction de la tige, grâce àl’extracteur solidaire de la tige, par des mouvements alter-natifs d’impaction et d’extraction pour finir de rompre lesdernières attaches osseuses. L’implant est retiré, et l’analysede la pièce montre, si cela est nécessaire la qualité del’ostéointégration.

Résultats

La méthode est efficace. Elle a été utilisée 34 fois dansle groupe ARTRO. L’extraction à foyer fermé a été possi-ble dans 95 % des cas. La durée moyenne de la procédurea été en moyenne de 20 minutes. Nous déplorons 2 échecs,sur de petits fémurs, avec une prothèse au contact intimeavec la corticale. Sur les 32 cas de pivots explantés parvoie haute, nous avons pu utiliser 28 fois pour la reprise unimplant standard qui était de même taille dans la moitiédes cas et d’une taille supérieure dans l’autre moitié descas. Dans seulement 4 cas, pour optimiser la fixation pri-maire, nous avons opté pour une tige plus longue de typeKAR™.

Conclusion

La stratégie développée ici est adaptée à l’extraction parvoie haute de toute tige droite, même avec un traitement desurface sur toute sa hauteur. La méthode est simple, repro-ductible et fiable, à condition de disposer des instruments etd’un ancillaire spécifique. Cette extraction par voie hautepermet d’éviter une escalade prothétique au résultat fonc-tionnel incertain. Cette méthode n’est toutefois pas univer-selle, et il est difficile d’extrapoler cette technique auximplants vissés et aux implants anatomiques.