evreux 1864 voyage

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Viagem de Evreux ao Maranhão

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YVESD'EVREUX

THE LIBRARY OFBROWN UNIVERSITY

THE CHURGH COLLECTIONThe Bequest of Colonel George Earl Church1835-1910

l'.IBLlOTIlECA

AMERICANACOLLECTION D'OUVRAGESINEDITS OU RARESSUR

L'AMRIQUE.

mr-U:

LEIPZIG & PARIS,

LIBRAIRIE

A.

FRANCK

1864.

VOYAGEDANS LE

NORD DU BRSILFAIT DURANT LES ANNES 1613 ET 1614l'Ai;

LE

rEE YVES D'YREUX.PUBLI D'APRS L'EXEMPLAIRE UNIQUE CONSERV

A LA BIBLIOTHQUE IMPRIALE DE PARIS.AVEC UNE INTRODUCTION ET DES NOTES

PAR

JI.

FERDINAND DEXIS,

conservateur la bibliothque sainte Genevive.

LEIPZIG

(i-

PARIS,

LIBRAIRIEAJ Jt^KKT l.

A.

FRANCK

herold.

1864.

a

(d

n

r

Livro digitalizado pelo Internet Archive. Disponvel para download na Biblioteca Digital Curt Nimuendaju: http://biblio.etnolinguistica.org/evreux_1864_voyage

^v

Le P. Yves d'Evreiixet les

premires missions du Maranham.

Au tempy de Louis XIII; le magnifique couvent des capucins de la rue St. Honor comptait parmi ses moines deux religieux portant le mme nom Le Le preP. Yves de Paris et le P. Yves d'Evreux. diseur; ardent a la dispute, mier; ancien avocat; beau imbu des ides de son sicle jouissait par la ville d'une haute rputation; et les biographies modernes constatent encore son clat effac; le second, ami secret de l'tude ; plus ami de l'humanit; esprit observateur; me passionne pour les beauts de la nature ; prt h marcher o l'appelait son zle, mais ne faisant nul cas de la curiosit que pouvait exciter sa personne fut compltement oubli et oubli de telle sortC; que malgr un mrite reconnu deux cent cinquante ans ont pass sur son humble tombe sans 'qu'une voix amie ait appel l'attention sur lui. Pour qu'il ft fait mention de ce moine obscur, il a fallu deux choses ; sur lesquelles on ne devait pas compter au temps o il vivait; la transformation en un puissant Empire des dserts qu'il avait parcourus et l'amour passionn de certains vieux livreS; qu'on rhabilite avec raison, parceque seuls, ils:

;

II

retracent des faits sans la connaissance desquels, la civilisation, croissante de certains pays, marcherait dans l'ignorance de ses origines. Le grand couvent de Paris, renfermait alors bien des hommes condamns un injuste oubli. Fond en 1575, par Catherine de Mdicis ^), il avait acquis en peu de temps une renomme de science thologique, de zle charitable dans les pidmies et d'abngation; qu'il conserva peu prs intacte durant tout le dix-septime sicle. C'tait l que le parti favorable aux religieux clotrs recrutait les esprits actifs qu'il opposait l'voque de Belley. C'tait sur ces vastes terrains, possds nagure par la maison de la Trmouille que s'levait cette immense officine, bien connue du corps mdical de Paris, o les habitus de la cour, aussi bien que les plus humbles bourgeois, venaient se munir de mdicaments difficiles se procurer autre part, ou qu'on prparait avec une incurie trange dans les autres quartiers de l'immense cit 2). Mais disons le promptement ce n'tait pas la science inconteste alors de ces religieux, ni les rsultats positifs de leur administration soigneuse, ni mme les bienfaits journaliers,

rendaient utiles aux classes ncessiteuses, qui leur valaient le crdit universel dont ils jouissaient dans Paris, ils le devaient surtout aux conversions clatantes, dont le grand monastre de la rue St. Honor avait t tout rcemment le thtre. C'tait dans ce couvent, qu'un des plus grands seigneurs du dernier rgne, le comte du Bouchage, plus connu sous le nom du P. Ange de

par

lesqviels ils se

28 novembre.

1) L'ordonnance qui constitue dfinitivement le monastre est du Ce lieu de retraite avait t concd l'anne prcdente,

par Catherine de Mdicisdi Frati minori.

des capucins venus d'Italie

;

la donation

fut confirme par Henri III le

24 septembre 1574. Voy. Boverio, Annalitrs curieuse de la vaste

^) Le Mercure Galant renferme une vueapothicairerie de ce couvent.

III

venu renoncer au faste de la cour, dmis volontairement de ses charges militaires pour vivre dans la plus troite pauvret. C'tait dans ce sombre asile qu'un des rejetons les plus illustres de la famille de Pembroke, avait abjur le Calvinisme et, renonant la plus brillante existence, avait accept les humbles fonctions qui ds la premire anne du sicle, il est vrai, s'taient changes pour lui contre les dignits de Tordre, et l'avaient mis mme de poursuivre sans relche, la mission qu'il s'tait volontairement impose. Il nous serait facile de multiplier ici les noms clbres, et d'tonner peut-tre, en mettant en relief ceux qu'on a si compltement oublis pour tre bref, nous nous maintiendrons strictement dans notreJoyeuse,^

tait

et s'tait

;

sujet

^).

Lela

P.

Yves d'Evreux

et

le

P.

apparurent comme nous l'avons dit, mme poque; mais la renomme toujours croissante de l'un, clipsa compltement le souvenir bien fugitif que l'autre avait laiss et de bons esprits ont pu mme un moment les confondre. Ils em'ent cependant, il faut le rpter, une destine bien diffrente. Yves d'Evreux, nous l'avons dit, s'loignait en gnral du bruit politique, et ne se mlait aux luttes du sicle que pour soulever quelque point de doctrine religieuse; le second, infiniment plus jeune dans l'ordre que son homonyme, toujours prt a prendre part aux combats que les ordi^es rguliers soutenaient parfois contre le pouvoir ecclsiastique, s'tait acquis par cela mme une immense renomme, dont se glorifiait le monastre. On le regardait comme un loquent orateur et comme l'un des hommes les plus diserts de son temps. L'hyperbole de l'loge monastiDs l'anne 1617, on ne comptait pas moins de 655 religieux deux custodes de Paris et de Eoueu, il y avait parmi eux 209 clercs. Vers 1685, il y avait en France 5681 capucins.1)

Yves de Paris peu prs vers

dans les

IV

jusqu' le considrer comme la tte Ce la plus forte qu'eut encore produite son ordre. fut donc lui qui occupa uniquement ses suprieurs, lui dont les livres multiple s , crits surtout en latin, furent opposs victorieusement aux crits violents lancs contre les ordres mendiants. Il avait garde, de son ancien tat d'avocat, la faconde embrouille de l'poque, il se mlait en outre d'astrologie judi-

quG; va

mme

ciaire, on lui attribuait en un mot le fatum mundi^ livre absurde, mais qui pendant un temps s'tait empar des esprits. Dclar l'unanimit Toracle de

son couvent, on n'eut pas- mme un moment l'ide de joindre dans un commun souvenir, un religieux qui s'appelait comme lui et qui ne savait que faire le sacrifice de son existence, pour amener quelques mes k Dieu! Qu'eut fait notre humble amant de la nature, devant ce personnage glorieux, devant ce phnix des thologiens franais, comme ou se plait le nommer ^)V ,1)

Xous n'inventous

rien:,

l'un de ses plus ardents admirateurs,

capucin

comme

lui

,

il

est vrai

parle de

sa personne en ces termes

:

Tarttanim sagefe scientiarum, factus

est clives nt

Galtlae Phoeuix Une

Voy. le vaste rpertoire de' jiostra aetate comnniniter sit appelatus. Denis de Gnes. Bibliotlieca scriptorum ordinis minoruin Sanctl FranWadding, plus modr, se contente d'appeler Yves cisci capucinonim. de Paris egregiius concinnator, iiislgnis Capucdnus. L'auteur anonyme des loges niss. des capucins de la ville de Paris, met moins de bornes son enthousiasme: ,,La nature a sembl vouloir s'puiser pour donner ce grand personnage tout ce qu'elle pouvait lui donner avec abondance de grandeur de plus rare et de plus surprenant!" N en 1590, Yves de Paris prit l'habit religieux le 27 septembre 1G2(), six ans aprs le retour d'Yves d'Evreux revenant malade du Brsil: il mourut Ce religieux a fait imprimer 28 ouvrages, dont le 14 octobre 1G78, nous reproduirons ici les titres princijiaux en suivant rdvdrr chronnlogiciue de leur publication: Les heureux succs de la pii ou Us triomplies de la vie religieuse sur le inonde et l'hrsie, 4me dit.Paris,

1G34, 2

1G40, in-8.

La

Astrologiae

in-I2. De l'indiffrence , 2me dit. Paris, thologie naturelle. Paris, 16401643, 4 T. in-4. novae methodus et fatum nniversi ohservatum, avols.

christiano. Paris, 1654. C'est ce livre, que le hardi et crdule capucin craignit cependant de publier sous son nom

Franc Allaeo Arabe

Mais qui songe maintenant au P. Yves de Paris?

Qui s'intresse mme aux discussions dont la vhmence, excita autour de lui une admiration si vive? Remettons ici les hommes aussi bien que les faits k Yves la place qu'ils doivent occuper rellement. d'Evreux a su contempler dans sa grandeur primitive une terre exubrante de vie et de jeunesse, deux sicles d'oubli ont pass sur son oeuvre et il.

jeune, plein de grce, ct de Lery, de Fernand Cardim, d'Anchieta, de toutes ces mes privilgies, qui unissaient la facult de l'obi^ervation au sentiment exquis des beauts de la natm^e, et qui ont salu, potes inconnus, l'aurore d'unbrille aujourd'hui,

grand Empire. Yves d'Evreux,

faut dire avec regret, a eu la destine de presque tous les historiens primitifs du nouveau monde sa biographie quelque peu dveloppe reste faire: malgr les plus minutieusesil

le

;

recherches multiplies en ces derniers temps, au-del de ce que l'on pourrait supposer, nous connaissons peine les circonstances les plus importantes de sa vie; on ne saurait mme rien de positif a ce sujet, sans quelques notes glanes a et l, dans les archives des vieux couvents. Comme son oeuvre, son histoire relle s'est teinte dans tous les souvenirs. Les crivains de son ordre pensent en avoir ditJus natu raie 1658, in-fol. Le Fatum mundi fut riniprini en 1G58 et Tanne d'aprs parut l'ouvrage suivant: Dissertatio de Ubro praecedentl ad amplissimos Diflros senatus Britanniae Armoricae. Parisiis, 1659, in-fol.ot

qu'on dsignait sous le nom de Fatum inundirehns creatis a Deu constitutum, etc. etc. Parisiis,,

'-.estum

3 vols, in-fol., rimp. avec des additions en 1661. Le Magistrat Chrtien mis Les /cisci Capvcinoruin, /rater Leotiardus parislensis ejusdem ordinis in Provincia- paiisiensi licet immeritus salutem in domino, i)i eo qui est noslra salas.'-''

Le Le Le

XIII

d'entre eux^ dejk fort avanc dans sa carrire, avait t diverses reprises revtu de certains emplois honorables qm attestaient la considration dont il Le P. Ambroise jouissait auprs de ses suprieui^s. s'tait d'ailleurs vou avec ardeur toutes les oeuvres de charit, durant les annes calamiteuses qui avaient pes sur la fin du sicle, et sa bont active tait si connue, ses prdications ferventes taient si

bien accueillies par le peuple qu'on l'avait surnomm V Aptre de la France ^). Les lettres d'Obdience dlivres au P. Yves d'Evreux par ses suprieurs sont dates du 12 aot 1611; et lui ordonnent d'aller s'embarquer a Cancale, o il sera reu a bord du vaisseau amiral command par le lieutenant du roi Razilly. Le rcit dtaill de la longue navigation qui devait conduire les. missionnaires au Brsil, la sparation force de la flottille, les pripties de ce voyage, qui dura prs de cinq mois, et qui s'effectue aujourd'hui a jour fixe en moins de 25 jours; tout cela a t dit en termes prcis et excellents par Claude d'Abbeville, dans la premire partie de la narration et nous ne saurions le rpter ici. Ce que;

1) Ses restes reposent au Brsil; ce fut le seul des quatre missionnaires qui ne revit pas l'Europe. Le P. Ambroise d'Amiens, avait d'excellentes tudes, et avait mme brill en Sorbonne, il allait prendre sa licence, pour se vouer la magistrature ou simplement au c'tait barreau, lorsqu'il se dcida en 1575 entrer chez les Capucins un des premiers frres qui eussent habit le couvent de la rue St. Honor et il y avait rempli diverses reprises l'office de gardien. 11 faut placer entre les annes 1584 et 1586, l'poque des courageux dvouements oii il braya les horreurs de la contagion pour secourir la population parisienne, qui lui dcerna, le surnom sous lequel on le connaissait. L'ge dj' avanc auquel il tait parvenu aurait d le faire exclure du voyage, l'issue duquel il succomba, mais il est certain qu'on ne put rsister ses instances et qu'il mit tout en oeuvre pour faire partie de la mission; il s'y rendit du reste d'une grande Voy. le ms. de la bibl. imp. intitul: Eloges historiques de utilit. tous les grands hommes et de tous les illustres religieux de la province de Paris, fonds St. Honor.fait;

,

XIV

nous pouvons affirmer c'est que le P. Yves n'eut pas seulement supporter les dsagrments d'un voyage maritime, dont nous ne saurions gure nous reprsenter maintenant les difficults, mais qu'aux soucisd'une installation dplorable, vinrent se joindre encore bien des fatigues imprvues et, une fois terre, bien des douleurs poignantes; telles que celles quelit ressentir par exemple, la mort du digne P. Ambroise, puis les vives attaques d'une maladie, qui se renouvela jusqu' son dpart, et auxquelles il faillit succomber. Tout cela a t racont, simplement, dignement, par le zl missionnaire beaucoup mieux que nous ne saurions le faire ici. Ce qu'il ne dit pas, le pauvre moine dont l'exquise sensibilit et la rsignation touchante se montrent en tant d'occasions, c'est le chagrin qu'il dut ressentir, quand il vit que le courage imprvoyant de M. de Pzieux, n'avait eu pour rsultat que la mort dplorable de cet ami, sans que la vaillance de M. de la Ravardire en put tirer nul avantage pour le maintien de la colonie; ce qu'il n'a pu nous raconter, c'est sa dchance des fonctions de suprieur de la mission, qu'il dut apprendre avant mme le triomphe des armes de Jeronymo de Albuquerque

lui

et l'expulsion dfinitive des Franais. Pour expliquer cette circonstance dont le digne religieux ne fait nulle mention, il est indispensable de dire ici un mot de la situation administrative, dans laquelle se trouvait le grand couvent de la rue St. Honor. En 1614, le pre Lonard, si renomm parmi ses frres, avait cess d'tre provincial et ne devait tre promu de nouveau ces hautes fonctions qu' la fin de l'anne 1615. C'tait le trs vnrable Honor de Champigny qui l'avait remplac *); et l'on vante bon droit les amliorations de toute nature,1) Le P. Honor de Champigny mourut en odeur de saintet dans courant de 1621.

le

XVsurtout dans la distribution des secours charitables j qui s'tait introduite sous son gouvernel'activit

ment

intrieur.

A

cette

poque

;

naire de l'Ecosse, et mille; fixait sur lui les regards de ses frres et l'on peut dire aussi ceux de la coui^ de France , le P. Archange de Pembroke, avait remplac en quelque Nomm provincial sorte le P. Ange de Joyeuse. en 1609; et n'ayant pas cess depuis ce temps de remplir des emplois importants; le capucin cossais avait t nomm aprs le dpart du P. Yves, directeur des missions/ dans les Indes orientales et occidentales. Les raisons qui firent abandonner plus tard l'expdition du Maranham se taisaient alors ou pour mieux dire n'existaient pas; Archange de Pembroke rsolut de se rendre lui-mme au Brsil et de donner une impulsion considrable la petite mission

un religieux tranger origiappartenant une grande fa^

emmene quelques mois auparavant par Franois deRazilly. Pour cela, sur le zle desquels

choix de onze religieux; fit devait compter, mais dont les noms sont rests dans l'oubli; et parmi lesquels *e trouvait un historien; aujourd'hui compltement perdu; dont il nous a t impossible de retrouver la Relation malgr les recherches les plus persvrantes continues durant plusieurs mois Paris, a Rouen et il il

Madrid

").

et

ne parat

1) L'indication de cet ouvrage nous a t conserye ensuite dans aucune bibliographie spciale.le

par Guibert

Bourdemare

publia ses observations sous

de Relatio de populis brasilienLon Pinello parle du Fr. J. Franois de sibus. Madrid, 1617, in-4. Burdemar (c'est l'orthographe dont il se sert), comme il i^arle d'Yves d'Evreux, probablement sur ou-dire. Le livre des loges affirme qu'il entreprit deux voyages en Amrique et qu'il vint mourir en qualit de forestier dans un couvent de son ordre en Espagne , un an environ aprs la publication de son livre. Nous supposons que l'expression dont se sert ici le biographe est purement et simplement la francation du mot espagnol for aster o, tranger.titre,

XVI

Le P. Franois de Bourdemare tait du nombre de ces gentilshommes opulents, qui aprs avoir joui de toutes les superfluits de la fortune , teignaient tout-a-coup dans un clotre ce que Ton appelait l'orgueil du sicle et les souvenirs mondains; veuf depuis quelques annes^ il avait abandonn ses richesses territoriales son fils et il tait venu ensevelir sa vie dans les monastres d'Orlans et de Rouen, d'o il tait pass au couvent de la rue St. Honor de Paris l il donnait, dit-on, des preuves journalires d'une humilit qui dpassait de beaucoup coup sr, ce que l'on exigeait des membres de la communaut. Gentilhomme renomm nagure par son lgance, k cette poque de faste qui prcda le faste de Louis XIV, il ne portait plus que des vtements rapics, il ajoutait encore par son abandon la pauvret de l'habit de capucin. Complter le martyre, se vouer la conversion des sauvages lui sembla la chose la plus naturelle et la plus enviable la fois; cet homme dont la socit avait t si recherche, et dont l'instruction tait si solide qu'il pouvait crire un long ouvrage en latin, regarda comme un bienfait des diiniteurs de l'ordre d'tre envoy dans une contre k peu prs dserte, o manquaient toutes les ressources de la vie lui et Archange de Pembroke, dont la vie avait t plus brillante encore que la sienne s'embarqurent le 28 mars 1614 avec dix autres moines, k bord du navire o commandait le brave de Pratz qui emmenait sur son navire 300 nouveaux colons et qui portait des secours la Ravardire, dont on prvoyait sans doute k Paris, la situation difficile. Combls des dons de ces seigneurs de la cour de Louis XIII, avec lesquels ils se trouvaient nagure en relations journalires, charms surtout de transmettre k l'humble couvent du Maranham, les beaux ornements auxquels la duchesse de Guise avait travaill de ses propres mains; ils partirent au Havre, et l'on peut dire que pour l'poque leur; ^ ;

XVIItraverse fut une sorte de phnomne, ils ne mirent que deux mois et 15 jours pom- parvenir a la cte nord du Brsil, mais une fois entrs dans la baie de Guaxanduba, ils apprirent en quel tat dplorable, *e trouvaient alors les affaires de la France dans ces contres. Les missionnaires n'ignoraient point que leur institution les mettait pour ainsi dire l'abri

de ces revirements politiques^ que le reste de l'expdition pouvait redouter (on ne pouvait les faire prisonniers par exemple); ils se rendirent en pompe au couvent de St. Louis^ ils y portrent les prsents de la duchesse de Guise, mais ils n'y trouvrent plus qu'un seul religieux, le P. Arsne de Paris ^), et encorePlus malade que son accabl de maladies. unique compagnon; sachant sans doute qu'il tait comme suprieur du remplac dans son ministre monastre naissant, Yves d'Evreux s'tait embarqu trs probablement k bord d'un des navires qui avait accompagn l'escadre; les documents que nous avon-s sous les yeux disent qu'en ce moment, il se trouvait rduit k l'inaction par une complte paralysie, suite probable des fatigues auxquelles l'avaient contraint ses travaux journaliers dans le fort. Pour expliquer l'invasion lente mais continue de cette triste maladie, il suffit de se reprsenter d'ailleurs ce qu'tait en ralit k ce moment la ville naisBien que cette riante capitale sante de San Luiz. soit considre aujourd'hui k bon droit comme une des villes les plus salubres de l'Empire Brsilien, elle;

tait-il

1)

Le P. Arsne de Paris, ne tarda pas lui-mmepourles

quitter

le

Brsil, mais son zle

missions n'tait point diminu, par la triste issue des affaires du Maranham; il passa au Canada, et prcha les Il fut mme supHurons, aprs avoir converti les Tupinambas. il vint rieur des missions de l'Amrique du Nord durant cinq ans mourir dans le grand couvent de Paris le 20 juin 1645, il comptait 46 ans de religion. Il est infiniment probable qu'il eut pour succes;

seur en Amrique le P. Ange de Luynes gardien de Xoyon que nous voyons commissaire et suprieur des missions du Canada en 1646.,

b

xviiisurgissait peine alors du sein des forts; les naiasmes dltres qui s'chappent toujours des lieux rcemment dfrichs Tabsence absolue de certains,

mdicaments nergiques au moyen desquels on combat aujourd'hui victorieusement les influences paludennes; tout concourt expliquer, comment le P. Yves d'Evreux ne put attendre l'issue de la guerre commence et dans quelle ncessit il se vit de regagner l'Europe ; pour ne pas devenir le fardeau de la mission, aprs en avoir t l'agent le plus actif et le soutien le plus dvou. Rien ne nous a t racont de la faon dont s'opra son voyage , et nous ne savons pas mme s'il se rendit k Paris, ou bien s'il alla demander un asile dans sa ville natale, au couvent de capucins *), que l'ordre y avait fond quelques mois seulement aprs son dpart. Les archives de la ville d'Evreux, se taisent absolument sur ce point et ne contiennent rien, qui ait trait a la mission brsilienne il faut dsormais attendre d'un hazard imprvu, des documents biographiques dont on ne peut pas mme soup;

onner l'existence. L'historique de la seconde mission des capucins franais au Maranham, compltement ignore de Berredo et des autres crivains portugais, ne nous laisse pas dans la mme incertitude au sujet des missionnaires qui succdrent Yves d'Evreux et ses compagnons-). Nous savons qu'arrivs ds le 15

qu'en

Le couvent des capucins de la ville d'Evreux ne fut rig 1612 ,, l'extrmit d'un faubourg de la ville du ct du midy, en j^artie par les soins et par la libralit de Jean le Jau,1)

l'anne

alors grand pnitencier et vicaire ^^nralcivileet

du diocse."p. 365.

ecclsiastique

du comt d'Evreux,

Voy. Histoire M. l'abb Le-

beurier, dont on connat les lumires et le zle arcliologique, a bien voulu faire toutes les recherches ncessaires sur le point qui nous occupe ici, elles ont t compltement infructueuses.2)

Le ms. que nous avons sousdu

mairement

les yeux et qui rend compte somvoyage d'Archange de Pembroke ne laisse pas voir

XIXjuin devant Ja ville

chantaient le Te couvent rustique qu'avaient commenc difier leurs prdcesseurs; mais nous n'ignorons pas, non plus, qu'ils prvoyaient ds lors, la ruine de la mission. Nous ne savons point quels furent les actes du P. Archange, au couvent de !St. Louis; mais il est peu prs certain qu'il n'imita dans son zle ni le P. Yves d'Evreux, ui le P. Arsne de Paris; nous voyons

Deum

le

2^1

du

mme

naissante^ mois, dans

ils

le

chourent parceque la diviles choses de la colonie et sion que cela s'accrut encore avec l'arrive des Portugais, qui se rendirent matres du pays." Le pieux biographe dont la narration nous sert ici de guide, admet bien que le nouveau suprieur administra le baptme 650 Lidiens, mais il ajoute que sans doute ces pauvres sauvages ne restrent pas longtemps fidles la religion qu'ils avaient embrasse et qu'ils retournrent k leur idoltrie ,,le nombre des chrtiens sincre, ne s'levant pas au-del de soixante, auxquels il faut joindre une vingtaine d'enfants." Si l'on retrouvait une vie dtaille de l'aventureux moine cossais que signale le vieil crivain de l'ordre, en la taxant de fort exagre, on aurait probablement des renseignements plus dtaills sur sa mission en Amrique. Malheureusement ce livre, s'il existe dans quelque bibliothque ignore, est tout aussi rare que celui de Franois de Bourdemare et nous avonseffortss'tait

mme

que ses

mise,

parmi ,,

;

de la localit qui reut les missionnaires, pour reproduire, nous transcrivons nanmoins le soldats allrent terre et trouv,, Quelques rent divers obstacles qui ne nous pi'onostiqurent rien de bon, c'estoit quelques Portugais et un prestre sculier, qui animoient les Indiens contre les Franois: il y eut de la batterie et nos soldats apprirent que les Portugais avoient dessein de s'emparer de. la cte du Maragnan et y chasser les Franois, ce qui fit conjecturer nos pres qu'ils n'y feroient pas grand fruict." Ms. du fonds des capucins de la maison rue St. Honore.assez clairement ]e

nom

qae nous essayions de rcit du dbarquement:

le

b*

XXchou dans les recherches multiplies que nous en avons faites pour en offrir un extrait nos lecteurs *). Nous supposons toutefois^ que le P. Archange de Pembroke, laissant plusieurs de ses missionnaires dans le couvent des capucins rcemment difi, effectua son retour en France, ds la fin de 1614 et qu'il fut ramen en Europe, par ce capitaine de Pratz, qui conduisait Paris Gregorio Fragoso le propre neveu de Jeronymo de Albuquerque, charg lui-mmed'une mission diplomatique, qu'on allait discuter contradictoirement k Lisbonne. Rentr dans sa cellule du couvent de la rue St. Honor, le P. Archange y oublia promptement le Brsil-), il se mla aux affaires politiques de son temps, les dignits de l'ordre vinrent le trouver de nouveau et il vcut dans le grand monastre, jusqu'au moment o Richelieu atteignit l'apoge de sa puissance-). Les amateurs de vieux voyages, ceux qui scrutent encore avec intrt les souvenirs pars dont il faudrait composer l'histoire plus glorieuse qu'on ne le suppose de nos colonies, ne s'arrteront pas k ces dtails, ils voudront savoir comment le Maranham

chappa auxdire.

courageux du brave La RavarL'histoire gnrale du Brsil, publie en cesefforts

1) Forc de nous renfermer dans un cadre limit, nous ne pouvons donner que sommairement le rcit des vnements qui amenrent l'abandon du Maranham par les Franais. Tout fut dcid le 21 novembre 1614 aprs la bataille o prit l'infortun de Pzieux. Outre le grand mmoire publi au sujet de cette expdition par l'Acadmie des Sciences de Lisbonne on trouvera les renseignements les plus tendus sur cette priode de l'histoire du Maranham et sur ses missions par les Jsuites dans la vaste et prcieuse publication du docteur A. J. de Mello Moraes. Elle est intitule: Corographia, Historica, Chronologica, Genealogica, nobiliaria e politica do cmperio do Brasil. (Yoy. le T. 3, publ. en 1860.) 2) Sa mort est fixe dans les Obituaires de l'ordre, au 29 aot 1632; c'est--dire en l'anne o fut clbr le trait de Castelnaudary. 11 y avait alors 47 ans qu'il tait en religion on lui donne toujours la qualification de religieux cossais, mais en ralit il appartenait une,

famille galloise.

XXIderniers temps par l'exact Adolfo de Varnhagen; leur rpondra avec plus de prcision encore^ que le pote laurat Southey. C'est la qu'ils pourront voir comment des forces portugaises ayant t expdies ds le mois d'octobre 1G12? pour chasser les Franais de leur nouvel tablissement, dont la cour de Madrid prenait ombrage, le mois de mai 161 3 ne s'tait pastout-k-fait coule

tantres,

du Cear

s'tait

que Jeronymo de Albuquerque pardj concert avec Martini Soa-

pour faire russir l'expdition hrisse de diffiDes renforts cults dont il avait le commandement. venus de Pernambuco sont mis sa indispensables disposition et le 2o aot le blocus de l'tablissement franais est commenc; le 19 novembre La Ravardire k la tte de deux cents fantassins et de 1500 Indiens attaque rsolument ceux qui veulent le dloger de sa viJle naissante; le brave de Pzieux succombe dans une tentative imprudente, pour n'avoir pas excut les ordres d"un chef plus expriment que lui. Les Portugais prennent a leur tour l'offensive et bientt, malgr son habilet reconnue et sa valeur brillante, le chef de la nouvelle colonie se voit contraint de ngocier un arrangement, qui renvoie devant les cours de Madrid et de Paris les parties belligrantes. Avant d'en venir a cette extrmit, La Ravardire a perdu cent hommes et a vu neuf des siens prisonniers. On peut dire que si sa rsistance est celle d'un brave dont la renomme tait faite, la conduite de ses rivaux k tout le caractre chevaleresque qu'on dployait alors si souvent dans les combats singuliers. Pourquoi faut-il, qu'aprs des conventions librement consenties, et quand le 3 novembre 1515, La Ravardire a remis solennellement le fort de San Luiz k Alexandre de

Moura,

un acte dloyal

ternisse cette

campagne no-

La Ravardire, en effet, quitte ds lors le Maranham et suit Alexandre de Moura k Pernambuco, mais c'est bientt pour tre dirigblement termine.

XXIIsur Lisbonne, otivit troite quiil subit au fort de Belem une capne dure pas moins de trois ans *). voit par cet expos sommaire, la ville de

On

le

les plus riches

d'une des provinces cit d'origine absolument franaise et la chambre municipale l'a heureusement si bien compris, qu'elle a rcemment relev de leur ruine les modestes difices qui datent de cette poque: il y a la, k la fois, absence de paMais retriotisme troit et sentiment de bon got. venons au livre charmant, dont nous devons surtout nous occuper faisons connatre le sort bizarre qui l'attendait en France. Nous voquerons ensuite avec le bon moine, quelques souvenirs dont peut se colorer la posie. Moins malheureux en apparence, que ce Jean de Lery qu'on a si bien caractris, en l'appelant le Montaigne des 'vieux voyageurs-), Yves d'Evreux n'avait pas vu son manuscrit gar durant quinze ans, une msaventure plus complte, plus absolue l'avait frapp. Expdi aux suprieurs de l'ordre, ce livre, qui compltait celui de Claude d'Abbeyillela capitale florissante

San Luiz,

du;

Brsil, est

une

,

1)

D'ordinaire les historiens

taisent

cette

dernire

circonstance;

nous ne la voyons mme rappele sommairement et sans commentaires que dans la collection diplomatique (le quadro eiementar) du vicomte de Santai-em. La lettre autographe qui constate la captivit de la Ravardire existe la bibliothque de la rue de Richelieu, o nous en Elle contraste, il faut le dire, avec ce qui avons pris connaissance. dans le camp de Jeronymo de Albus'tait pass un an auparavant,,

querque. Cette lettre crite d'un style fort modr est adresse M. de Puysieux. (Voy. fonds franc. No. 228 15, p. 197.)

2) Je me plais rappeler ici une aimable expression du savant Auguste de St. Hilaire. Lery avait effectu comme on sait son voyage La Rio de Janeiro au temps de Villegagnon, c'est--dire en 1556.

premire dition de ce rcit charmant ne parut qu'en 1571. Notre Yves d'Evreux, qui a par le style tant de points de contact avec cet crivain avait -il lu son livi-e? Nous ne voyons rien en lui, qui puisse faire conclure pour l'affirmative. Les ditions du Voyage de Lery, se multiplirent cependant tel point qu'il y en eut une cinquime et dernire en 1611.,

XXIII

avant son apparition. Imprim chez Franois Huby dans les ateliers duquel s'tait dj dite la relation de son compagnon, il avait t compltement lacr. Franois Huby, nous le disons ici avec regret s'tait en cette occasion laiss sduire et, oubliant les devoirs imposs a sa profession, n'avait pas craint de devenir l'instrument d'une proccupation politique des plus mesquines. Selon toute probabilit, la raison qui faisait retenir La Ravardire au fort de Belem, conduisait les mains sacrilges qui dtruisaient rue St. Jacques, le volume prcieux dans lequel on exposait avec une si admirable sincrit, les avantages que devait produire la France l'expdition de 1G13. Mais entre l'impression du voyage de Claude d'Abbeville et celle du livre qui en est la suite ncessaire, un vnement d'une haute porte politique s'tait produit. Le mariage d'une princesse espagnole avec Louis XIII encore enfant avait t dfinitivement rsolu *) et tout un parti, dans la cour de France, avait un singulier intrt touffer ce qui pouvait porter quelque ombrage k la maison d'Espagne. Les projets de conqute dans l'Amrique du sud, cessaient tout-a-coup de trouver des partisans. Ds lors mme on dut employer tous les moyens pour faire oublier un projet de conqute, dont avec le temps l'Espagne s'tait inquite et la relation d'un style si modr, qui racontait simplement crite les incidents d'une mission lointaine, fut voue k un complet anantissement.fut dtruit;

:

tait

1) Ce projet d'une double alliance entre les deux couronnes, dadj de 1612, il fut annonc officiellement le 25 mars, de la

mme

anne

,

et

l'on sait qu'il

ne

s'effectua

que

trois

ans plus tard.

Le dpart des missionnaires avait eu lieu dj le 19 mars. Les fianailles du roi de France avec l'infante ne proccupaient pas encore les esprits comme ils les proccuprent par exemple en 1615. Tous les faits relatifs l'alliance des deux royaumes, sont consigns longuement dans le livre suivant: Inventaire gnerai de iliistoire de France 'par Jean de Serre, commenant Pharamond et finissant LouisXIII.Paris, Mathurin Henault, in-18.

(Voy.

le

f. VIII.)

XXIV

Au moment un seul homme

o cet acte arbitraire s'effectuaitr en France, porta un intrt rel l'oeuvre et k son auteur. Franois de Kazilly n'tait pas tomb heureusement dans la captivit qui paraon peut dire lysait tous les efforts de La Ravardire qu'il n'avait pas perdu de vue, un seul momme ment, les avantages que son pays pouvait tirer d'une colonie dont il avait dirig les premiers efforts. Sachant que le volume d au pre Yves d'Evreux allait tre dtruit compltement, bien qu'il ft imprim dans son intgrit il se transporta k l'imprimerie de Huby, pour s'y faire remettre un exemplaire du livre; soit qu'il n'et pas mis assez de promptitude dans ses dmarches, soit que la destruction de l'oeuvre ft; ;

commence,vrer,

les feuilles qu'il parvint k se faire dli-

ou qu'un de ses agents se procura par subtilz moyens, ne purent tre runies sans qu'on et k dplorer la perte de divers fragments; des lacunes assez, importantes, ne permirent point d'en former un exemplaire complet. L'amiral lit imprimer sa protestation, autre part, sans aucun doute que dans les ateliersde la rue St. Jacques, il la joignit au livre qu'il fit relier magnifiquement aux armes de la maison de France, et il alla le porter, non pas k Marie de Mdicis, Tancienne protectrice de la colonie du Maranham, mais k Louis XIIL Le roi enfant s'tait fort amus l'anne prcdente des trois pauvres Sauvages Tupinambas, dont il avait t le parrain, ses souvenirs mme taient assez vifs, pour qu'il crayonnt de temps a autre les ornements grotesques dont nosbrsiliens

prtendaient s'embellir*); il lut peut-tre quelques pages du beau volume que Razilly venait de lui offrir, mais k cela se borna sans doute, l'intrt

a pu voir, il y a quelques mois, chez un marchand de de la rue du petit Lion un dessin attribu Louis XIII enfant et qui reprsentait bien videmment la figure d'un Tupinamba orne de peintures bizarres.1)

On

curiosits

XXVRichelieu n'tait pas encore surqu'il lui accorda. intendant de sa marine, les projets de navigations lointaines sommeillaient la cour pour bien des annes. Le livre du P. Yves, accol a celui du P. Claude, dont il tait la suite, fut dpos sur les rayons de la bibliothque et tout le monde l'y laissa dormir. Ce fut l au temps du digne Van-Praet, au dbut de l'anne 1835, que l'auteur de cette notice eut le bonheur de le rencontrer. Il serait oiseux de raconter ici de quelle surprise fut frapp l'heureux dcouvreur la lecture de ce rcit aimable, si sincre dans ses moindres dtails, si prcieux par ses utiles renseignements. Pour faire comprendre sa valeur, il suffit de dire, que notre bon missionnaire tait demeur deux ans, o .son vnrable compagnon n'ava t vcu que quatre mois a peine. Yves d'Evreux iigura ds lors dans une srie d'articles, que publiait la Revue de Paris, sur les vieux voycujeurs francaisy et certes il parut sans dsavantage a ct de ce P. du Tertre, que Chateaubriand, a nomm d'une faon si juste, le Bernardin de 8t. Pierre du dix-septime^

sicle.le moindre dfaut sans doute dvelopp forma en la mme anne une mince brochure publie chez Techener et l^romptement puise. Yves d'Evreux ne fut plus ds lors compltement inconnu aux amateurs de vieux voyages, aux hommes de got mme, qui recherchent curieusement les crivains oublis, avant-coureurs du grand sicle. Proccup plus qu'on ne le croit en Europe de ses potiques traditions et de ses gloires naissantes, le Brsil salua le nom du vieux voyageur et lui donna un rang parmi les hommes trop peu connus qu'on doit interroger sur ses origines. L'empereur D. Pedro, qu'on doit ranger parmi les bibliophiles les plus clairs et dont on connat le got pour les rarets bibliographiques, qui jettent quelque jour sur les antiquits de son vaste empire, en lit

Cet

article,

dont

tait d'tre

trop peu

XXVIune copie, son exemple fut imit! L'unique exemplaire de la bibliothque impriale fut lu et relu une phalange d'crivains habiles et zls qui ont exhum du nant l'histoire de leur beau pays, l'appelrent en tmoignage de leurs assertions, Adolfo de Varnhagen, Pereira da Sylva, Lisboa, l'auteur du Timon, et en dernier lieu le savant Caetano da Sylva, le citrent parmi les meilleures autorits qu'on pt invoquer sur les croyances indiennes et contriburent singulirement le faire sortir de son obscurit. La France n'avait pas attendu ces tmoignages d'estime pour assigner au P. Yves d'Evreux, la place Si Boucher de la Richarderie n'avait qu'il mritait. pas mme prononc son nom en rehaussant de tout son pouvoir celui de Claude d'Abbeville, M. Henrifaire;

Ternaux Compans

l'avait destin a

augmenter sa pr-

cieuse collection des voyageurs qui ont fait connatre l'ancienne Amrique. M. d'Avezac le cite avec

honneur et fait ressortir ses qualits. Tous ces tmoignages d'admirationcrivain, qui sacrifia sans

poui' l'humble

murmure son

oeuvre, n'ont

malheureusement pas eu pour rsultat de faire sortir sa vie de l'obscurit qui la voile, et nous ne savons en vrit sur quelles autorits se fonde un savantbibliographe, quandil

le

fait vivre

jusqu'en l'annela

1650

1).

En

prsence d'un volumineux manuscrit de

1) La plus grande obscurit rgne en gnral sur la biogragraphie de ces vieux voyageurs devenus tout--coiip si importants au Le vnrable Eyris que nous citons parfois point de vue historique. est bien peu fond dans son assertion par exemple, lorsqu'il affirme que Claude d'Abbeville, poussa sa carrire jusqu'en 1632. Les mss. de la maison St. Honor le font mourir Eouen ds l'anne 1(316, aprs 23 Il n'est pas exact non plus de lui attribuer la vie ans de religion. Ce livre de la bienheureuse Colette vierge de l'ordre de Ste. Claire.

parut en 1616 in-12 et en 1628 in-8; les initiales qu'il porte au titre auraient pu faire viter cette mprise, peu importante, il est vrai. L'opuscule dont nous parlons se trouve la bibliothque de l'Arsenal, o nous avons t mme de l'examiner.

XXVIIbibliothque impriale nous avons pu croire une seule que tous nos doutes sur les points principaux de la biographie de notre crivain allaient tre enfin claircis^ il n'en a rien t. Les Eloges historiques de tous les grands hommes et tous les illustres religieux de la lyrovince de Paris ne renferment malheureusement que les notices relatives aux religieuxfois

Honor; de Picpus et de St. Jacques ^). 11 est dans le cours de l'ouvrage que le P. Pascal d'Abbeville -) ayant spar sa province de la province de Kormandie en 1629, il ne faut point chercher dansde8t.

dit

mme

ce recueil les noms des religieux qui n'habitrent pas Paris. C'est un fait que l'on a trop compltement mis en oubli, que l'excitation toute littraire qui se fit sentir en France deux reprises diverses, lors de l'arrive sur notre sol des Sauvages brsiliens qu'onsoit k Rouen, Ces apparitions successives d'Indiens, qui sont d'ailleurs suivies toujours de relations remarquables, provoquent videmment dans les esprits, un

vit a soixantesoit k Paris.

ans de distance dbarquer

beauts primitives de la nature, qui charme, ni sans grandeur. Notre Montaigne ne lui chappe pas, et il le tmoigne par quelques paroles pleines de grce, k propos d'une chanson brsilienne. Les deux plus grands potes de ces temps-lk, si divers et si rapprochs cependant, s'en meuvent au point de consacrer une attention toute particulire k ces habitants des grandes forts, mlsretoiu' vers lesn'est ni sans

1) Ce recueil vraimeat curieux, commenc le 18 novembre 1709, composait jadis de 3 vols. in-4. le T. 1^^ malheureusement gar contenait les Annales de la Province, sa perte nous a priv probablement de quelques dtails prcieux sur la mission du P. Yves il est inscrit sous ce numro: Capucins de la rue St. Honor 4 (Ter.).se,

2) Le P. Paschal d'Abbeville fut lu au couvent de la rue St. Honor Id^^ provincial; la division qu'il opra en 1629, eut lieu probablement par suite du nombre croissant des religieux dans lestrois couvents de Paris.

XXVIIIfortuitement aux gens de la cour de France et dont ils se prennent k envier les joies paisibles et surtout l'insoucieuse existence. Ronsard ne veut pas que ces hommes qui lui rappellent ce que fut le monde son origine, perdent rien de leur heureuse innocence, et il adjure mme ceux qui les vont visiter de ne point changer l'ignorance, o ils vivent conMalherbe en entre les soucis de la civilisation *). tretient longuement son tour le docte Peiresc; il en fait l'objet de plusieurs de ses lettres, c'est sur

1) On ne connat pas gnralement ces vers de Eonsard, Ils s'adressent au fondateur de la France antarctique ce changeant personnage, tour--tour huguenot et fervent catholique, dont Lery fuit les svrits excentriques, jusqu'au plus profond des forts: Docte Villegaignon tu fais une grand' faute,

vouloir rendre fine une gent si peu caute, ton Amriciue, oxi le peuple incognu Erre innocentement tout farouche et tout nud,

De

Comme

D'habits tout aussi nud, qu'il est nud de malice, Qu'il ne cognoist les noms des vertus ni des vices De Snat ny de Eoy, qui vit son plaisir, Port de l'apptit de son premier dsir: Et qui n'a dedans l'me ainsi que nous emprainte La frayeur de la loy qui nous fait vivre en plainte: Mais suivant sa nature est seul maistre de soy, Soy mesme est sa Loy, son Snat et son Eoy. Qui de contres trenchans la terre n'importune Laquelle comme l'air chacun est commune Et comme l'eau d'un fleuve est commun tout leur bien Sans procez engendrer de^ce mot tie)i et mien. Pour ce laisse les l ne romis plus (ie te prie) Le tranquille repos de leur premire vie.(ie te prie) si piti te remord tourmente plus et t'enfui de leur bord. Las! Si tu leur apprends limiter la terre. Pour agrandir leurs champs, ils te feront la guerre Les procez auront lieu, l'amiti dfaudra Et l'aspre ambition tourmenter les viendra Comme elle fait ici, nous autres pauvres liommes

Laisse les

Ne

les

Ils vivent

Qui par trop de raisons trop misrables sommes: maintenant en leur ge dor."finit

Le pote, en continuant ses conseils seau Je voudrois vicre ain.sy.

par dire

:

comme Rous-

XXIXfaut chercher la paix et la joie. Leurs danses ont inspir les raffins de la cour, et l'un des plus habiles artistes de Paris a fait sur leursleurs traces,qu'il

airs une sarabande d'un g'ot merveilleux, dont le pote envoie une copie *). Kous pourrions encore citer d'autres exemples de ce subit engouement pour l'indpendance des pauvres Indiens et surtout pour le Selon ces potes, magnifique pays qu'ils habitent. c'est a en tte desquels il faut mettre du Bartas -) cette source vivifiante, que peut se renouveler par des comparaisons nouvelles, une verve prte a tarir. Sans aucun doute, tous ces vieux voyageurs trop compltement oublis durant un sicle, exercrent une relle influence sur leur temps et plus tard, comme on peut s'en convaincre en relisant Chateaula fracheur de briand la navet de leurs rcits lem-s peintures, inspirrent les grands crivains qui songeaient dj dans leurs descriptions sortir des types convenus et a mouvoir par la vrit. Yves d'Evreux n'est pas seulement un peintre habile, un conteur naf, c'est un observateur clairvoyant des moeurs d'une race pour ainsi dire teinte, qu'on ne saurait trop souvent consulter. Pour ne choisir qu'un exemple parmi ceux qu'il ofi^re en si,,,

1) Voy. la Correspondance et la Collection Peiresc.

la premire

2) Cet crivain aimable en donne une preuve, dans son pome de semaine qui ne fut imprim qu'en 1610 bien que l'auteur fut dj mort en 1599.

Dj l'ardent Cocuyes es Espagnes nouvelles, Porte deux feux au front et deux feux sous les ailes L'aiguille du brodeur aux rais de ces flambeaux Souuent d'un lit royal chamai-re les rideaux Au rais de ces brandons, durant la nuit plus noire L'ingnieux tourneur polit en rond l'yvoire, A ces rais l'usuiier recompte son trsor, A ces rais l'escrivain conduit sa plume d'or. Le lampyre que les indiens des Antilles nommaient Cocuijg fut partout comme on voit la grande merveille du XYIi^^*^ sicle. Le P. du:

Tertre lui a consacr quelques lignes charmantes.

XXXgrand nombre il est le seul qui nous dcrive de vritables idoles modeles en cire par les Indiens ou Hans Staden, Thevet, Lery sculptes dans le bois. et mme Gabriel Soares si explicites sur le culte du Maraca, se taisent sur celui qu'on rendait alors ces statuettes grossirement faonnes, sans doute, par les habitans nomades des grandes forts, mais qui n'en constitue pas moins un commencement dans la pratique naissante de l'art; il dit de la faon la plus prcise comme on le pourra voir aisment: Cette perverse coustume prenoit accroissement et s'enharPuis il dissoit es villages proches de Juniparan." ajoute, que son compagnon le R. P. Arsne, trouvait au destour des bois de ces idoles .... Or, on peut tirer de ce passage une induction curieuse et qui n'est pas sans importance pour l'archologie future,

d'un grand empire, c'est qu'au dbut du XVIP sicle un changement notable s'tait opr dj dans les ides religieuses du grand peuple de la cte. Sans doute a cette poque les Piayes avaient vu des statues dans les glises qu'on difiait de toutes parts sur le littoral avec la merveilleuse facilit d'imitation que posssicle, ils dent les Indiens, dj a la lin du avaient personnifi quelques-uns des nombreux gnies dont ils peuplaient leurs forts. Ces premires ido:

XVP

les,

furent malheureusement tailles dans le bois; nulle d'entre elles que nous sachions n'a t conser-

par les muses ethnographiques du nouveau monde, qui de toutes parts, commencent a se fonder elles existaient cependant en assez grend nombre. Arrivs dans le voisinage du fleuve des Amazones, les Tupinambas taient entrs en relation d'ides avecvedes peuples indignes infiniment plus civiliss qu'eux; la puissante nation des Omaguas par exemple, dont les tribus venaient des rgions pruviennes, Ipouvait avoir exerc son influence sur l'art grossier, dont on trouva parmi eux de si curieux spcimen. Il est remarquer que ces faits importants, sont en gnral

XXXIabsolument ngligs par les historiens portugais. Ce une gloire mdiocre pour notre \deille littrature, que d'avoir produit des crivains assez observateurs pour en faire l'objet d'une tude attentive. Parmi ceux qui se mlrent ces nations malheureuses au dbut du XVIP sicle, nous ne connaissons k vrai dire qu'un seul voyageur portugais, dont les rcits charmants doivent ti^e placs ct de ceux de Jean de Lery et du P. Yves d'Evreux ^). C'est ce Fernand Oardim, qui tait encore suprieur des jsuites en 1609 et qui visita les Indiens du sud, aprs avoir longtemps administr les Aides d'Ilheos et de Bahia. Bien que ce missionnaire ne puisse nullement se comparer pour l'importance des documents qu'il renferme k Gabriel kSoares -) auquel il faudra toujours recom'ir ds que l'on prtendra avoir une ide exacte des nationalits indiennes et de la migration des tribus, il est surtout par son style, de la parent de notre vieil crivain; il a comme lui un abandon de prjugs, qui lui fait aimer les Sauvages et un charme d'expression qui peint admirablement l'Indien dans son Aide, en nous rvlant surtout la grandeur nave de son caractre. La relation du P. Yves d'Evreux, n'ajoute pas seulement, un document d'une importance relle k l'histoire du Brsil, elle n'est pas uniquement destine k constater les faits qui succdrent a la fondationn'est pas, ,

1) Narrativa epistolar de uma Viagem e misso jesnitka pela Bahia, Porto Scguro, Pernambiico, Espirito Sancto, Rio de Janeiro etc. Escripta em duas Cartas ao Padre Provincial em Portugal. Lisboa, 1847, m-8. 2) Tratado descriptivo do Brasil em 1587 etc. Eio de Janeiro, 1851 in-8. Ces deux ouvrages ont t exhums par M. Adolfo de Varnliagen, l'iiistorien si connu du Brsil. Ce' dernier ouvrage dont,

.un

nis. se trouve la bibliothque' impriale de Paris est reproduit galement par son habile diteur, dans la Revisla trimensal. Gabriel Soares, prit en 1591 sur une cte inhospitalire, la suite d'un dplorable naufrage, c'est presque, comme on le voit, un contemporain d'Yves d'Evreux.

XXXII

de San Luiz^ aux yeux des Franais, elle doit avoir encore un autre genre de mrite. Par la navet lgante de sa diction, par la couleur habilement mnage de son style, par la finesse de ses observations, on pourrait dire aussi par le sentiment exquis des beauts de la nature qu'elle rvle chez son auteur, elle appartient la srie des crivains franais, qui continuent l'poque de Montaigne et qui font prsager le grand sicle. Yves d'Evreux, si on eut t mme de le lire, eut exerc sur son temps, l'influence qu'avait eue quelques annes auparavant Jean de Lery, qui dcrivait des scnes analogues k celles qu'on le voit si bien peindre. Moins habile crivain que lui, Claude d'Abbeville continua cette influencelittraire.

Si dans la retraite qu'il s'tait choisie, et que nous supposons, non sans quelque raison, avoir t ou Rouen ou Evreux, ou mme le bourg de St. Eloi,le

P. Yves apprit quel avait t dfinitivement le sort de ses chers indiens; son me en dut tre profondment contriste. Aprs l'expulsion des Franais, Jeronymo de Albuquerque avait t nomm

Capito mr du Para, tandisque Francisco Caldeira Castello Branco tait dsign pour continuer les dcouvertes et les conqutes vers les rgions du Para. Ce fut des efforts combins de ces deux officiers que rsulta la fondation dfinitive de la riante cit de

de Belem. Ces deux villes s'levrent pacifiquement et sans que les Indiens missent d'opposition a leur construction. Bien loin de la, ils prtrent leur concours aux travaux considrables qu'elles exigeaient, et plusieurset

San Luiz

dans

le

mme temps

celle

d'entre

eux accompagnrent mme un officier nomm Bento Maciel sur les rives du Rio Pindar, a la recherche des immenses richesses mtalliques qu'onsupposait a tort exister sur ses bords; expdition fatale, qui n'eut pas d'autre rsultat que l'anantissement des Guajajaras.

XXXIII

Les Tiipinambas ne commettaient plus sans doutecontre les Portugais et ils vivaient sous la direction de Mathias d'Albuquerque^ le fils du gouverneur , mais ils n'en regrettaient pas moins vivement leurs anciens allis. Ils n'occupaient plus le voisinage immdiat de la cit nouvelle ^ c'tait dans le district de Cum que se groupaient leurs nombreuses Aides. Un jour que le chef europen qui les surveillait, s'tait absent pour rejoindre son pre qui l'avait mand auprs de sa personne, quelques Indiens arrivs du Para passrent par TapuytaIls taient porteurs de lettres qui devaient pera. tre remises au Capito mr de San Luiz. Un Tupinamba converti au Christianisme et que Ton appelait Amaro, profita du passage de ses compatriotes pour mettre excution un pouvantable projet. S'emparant de Tune des lettres, que portait l'un de ses compatriotes, il la dploya et feignit de la lire^), puis s'adressant aux chefs, il leur dclara que le contenu de ce message n'tait autre chose qu'une abominable trahison ourdie par les Portugais, ceux-ci avaient rsolu, osa-t-il aftirmer, de les rendre tous esclaves. Un pouvantable massacre durant lequel prii'ent sans exception tous les blancs fut le rsultat de cette ruse indienne que les vnements prcdents ne rendaient que trop facile a raliser. Le bruit d'un incident pareil gagna bientt le littoral. Mathias d'Albuquerque se porta rsolument sur les lieux et vengea ses compatriotes en exterminant sans piti les Tupid'hostilits

nambas.un ami dvou des Franmieux inform, nous rvle le nom de ce terrible sauvage, il s'appelait Amaro, et il aT.ait t lev dans les missions du sud. Par consquent il ne pouvait y avoir contract une grande tendresse pour les Franais. Pour ourdir son affreux1) Berredo affirme que cet Indien taitais.

Mais

le

Jornal de Timon

stratagme, il suffisait bien de la haine conue par certains Indiens contre ceux qui asservissaient leur pays, il n'tait pas ncessaire d'tre originaire de Rouen ou bien de la Roclielle.c

XXXIVAlors les tribus loignes s'excitent entre elles^ ^ former une alliance indissoluble; un esprit implacable de vengeance anime maintenant ces sauvages nagure si paisibles et si disposs k embrasser la foi nouvelle, que leur avait prche Yves d'Evreux. Les Aides lointaines se soulvent spontanment. Jeronymo d'Albuquerque expdie des troupes aguerries contre les Indiens, la mort et Fincendie remplacent les ftes auxquelles on s'tait livr nagure avec tant d'abandon. Trois ans s'taient couls peine cependant depuis le dpart des capucins franais on tait arriv au commencement de 1617. La ville de San Luiz do Maranham btie avec activit, commenait prendre l'aspect d'une cit europenne. Cet accroissement rapide ne pouvait manquer d'inquiter les sauvages, ils taient devenus clairvoyants: contraints abandonner le sud du Brsil, pour trouver les grandes forts au sein desquelles ils avaient espr recouvrer leur indpendance, ils n'avaient plus maintenant qu'une pense, c'tait la destruction complte d'une race envahissante que leurs anctres n'auraient pu chasser. Les chefs Tupinambas formrent une ligue des bords solitaires du Cum ceux de l'Amazone on allait marcher secrtement vers la colonie nouvelle et, a un jour convenu, tous les habitans devaient en tre extermins. Il n'y avait plus gure -d'Indien, alors, qui ne bravt sans terreur les dcharges de la mousqueterie. Pendant que ce projet s'ourdissait et que l'on songeait a en poursuivre l'excution, Mathias d'Albuquerque tait sans dfiance Tapuytapera, avec un petit nombre de soldats; c'en tait fait de lui et des liommes qu'il commandait, lorsqu'il se trouva un le complot des chefs fut tratre parmi les indignes dcouvert au commandant portugais, celui-ci ne se laissa pas intimider par le nombre des ennemis redoutables qu'il avait a combattre, il leur livra une premire bataille et les repoussa k cinquante^lieues;;

I

fI

;

XXXVdeaid dans cette action audacieuse par plein ,de bravoure que Ton nommait Pirez.l^

cier

un offiManuel

L'antagoniste de Eazilly et de La Ravardire vivait encore^ mais il tait bien prs a cette poque definir sa carrire; fix k San Luiz dans la cit naissante^ il put aider son fils de ses avis et des forces qu'il tenait en rserve. Mathias d'Albuquerque ne se laissa pas efi'rayer par les difficults de tout genre que rencontrait sa petite arme dans ces immenses solitudes et le il battit partiellemement les Indiens 3 fvrier 1617^ il remporta sur eux une victoire compltC; ils furent repousss dans la profondeur des forts. Alors seulement;, le vieux gnral rentra k San Luiz , les tribus ; les plus redoutables venaient d'tre extermines et ce qu'il venait d'accomplir dans ces dserts, Francisco Caldeira le faisait k son tour dans les solitudes du Para, o s'levait la cit; :

de Belem.

Ce n'tait pas a coup sr ce qu'avaient rvs Yves d'Evreux et ses trois compagnons, pour le Maranham ils en avaient fait en leur me le sjom- d'une socit nouvelle, o tous ces coeurs simples allaient se runir k eux, pom- clbrer un Dieu de paix. Des ordres de massacre remplaaient les jom's de prire: une solitude effrayante s'tait faite autour des colons II j am-ait cependant une sorte d'injustice k le taire les religieux qu'avaient amens avec lui Jeronymo d'Albu:

:

querque, avaient continu l'oeuvre des missionnairesfranais.

Comme Yves

Claude d'Abbeville, F.

comme Cosme de San Damiand'Evreuxet

le

P.

et

P.

Manoel da Piedade, appartenaient k

l'ordre des ca-

pucins ds l'anne 1617, c'est-k-dire au moment o svissait la guerre et quand Bourdemare publiait son livre; ils demandaient k la cour de Madrid des religieux infatigables, endurcis k toutes les fatigues et capables de les aider. Le 22 juillet quatre nouveaux religieux arrivaient dans ces rgions, mais ce

XXXVIpas au petit couvent de San Luiz qu'ils taient ils restrent aux environs de Belem et commencrent les conversions du Para *). Il est toutefois bien incertain, que ces faits historiques ^ auxquels il faut accorder dsormais une place si importante dans les annales du Brsil, soient jamais parvenus aux oreilles des missionnaires dvous qui avaient brav tant de fatigues pour convertir les Indiens pendant plus de deux sicles, l'Europe y demeura compltement indiffrente, et ce ne fut mme qu'une vingtaine d'annes aprs leur accomplissement qu'on vit les capucins du grand couvent de Paris reprendre courageusement l'oeuvre de leurs prdcesseurs 2) cette poque, Yves d'Evreux tait bien prs d'avoir accompli sa carrire si^ pour lui dj, ce dur plerinage n'tait fini. Tout tait consomm d'ailleurs pour les peuples un moment nos allis fidles, auxquels il avait tent de porter les lumires de l'Evangile. Dj ils s'taient retirs sur les bords dserts du Xing, du Tocantins et de l'Araguaya. Et c'est l, bien loin des colons europens qu'ils se sont perptus sous les noms connus peine des Ainacas^ des GSj des MundurucuSy si redouts jadis , si peu craints aujourd'hui et d'ailleurs favoriss par une administration humaine ^). Ces possesseurs primitifs du Brsil parlent encore dans sa puret l'idiome des Tupis, dont le P. Yves nous a conserv quelques vestiges comme Thevet et surtoutn'tait

destins^

;

:

Aimaes hlstoricos do Maranham voy. galeJornal de Timon (M. Lisboa). Lisbonne, 1858, No. 11 et 12. Cet crivain fixe Tpoque de la mort de Jeronymo de Albuquerque, l'anne 1618; son fils Antonio de Albuquerque, lui succda dans le gouvernement de la province. 2) En 1635 des missionnaires de Tordre des capucins partent pour la Guyane. Leurs travaux sont consigns dans les mss. lgus par le grand couvent de Paris. 3) Voy. sur ces peuples, la rapide visite qui leur a t faite par M. de Castelnau on 1851 Expdition scientifique dans les ijarties centrales de C Amrique du sud. T. 2. p. 316.1) Voy. Berredo,,

ment

:

^

XXXVII

w

l'avaient fait avant qu'il ne rassemblt laborieusement les lments de son livre. C'est sur les bords de ces grands fleuves que nous avons nomms que tant de tribus dcimes ont t observes il y a quarante ans par l'illustre Martius, Mais le savant voyageur ne se plaindrait plus aujourd'hui que nul ne soit all recueillir les souvenirs expirants dont ces Indiens sont demeurs les dpositaires. Lorsque le gouvernement brsilien eut la pense, en ces derniers temps, d'instituer une commission scientifique compose de savants nationaux, et charge de visiter les points les plus reculs de cet immense empire qui ne renferme pas moins de 36^ d'orient en occident, ce fut le Cear, le Maranham, le Para et mme le Rio Negro, qu'il voulut qu'on explort. Il avait parfaitement compris que s'il y avait dans ces terres vierges, d'admirables productions naturelles recueillir, il y avait aussi toute une mythologie, toute une srie de traditions historiques prserver de l'oubli. Aussi tandis que les Freyre Alleman, les Capanema, les Gabagia, runissaient les prcieux matriaux sur l'histoire naturelle sur la gographie et sur la mtorologie, dont ils ont commenc une vaste publication*), un pote historien, aim de son pays, s'en allait rsolument dans ces solitudes inexplores pour s'initier aux secrets de la vie indienne. Antonio (ionalvez Dias, n lui-mme dans l'intrieur du Maranham, familiaris ds l'enfance avec les lgendes amricaines, parlant la Ungoa grai j se chargeait en quelque sorte d'excuter le programme trac par Martius. Bientt les lgendes amricaines, nous n'oserions dire les mythes religieux des grands peuples "du littoral, nous apparatront, tels qu'ils se sont perptus dans l'intrieur (grce k l'exil peut-tre) et ce sera alors, quand le moment des srieuses tudes,

Jean de Lery

1) Voy. Trabalhos da Commisso scientifica de exploraco. Hio de Janeiro, TypograpMa universal de Laeraraert, 1862, in-4.

wtoute Ja

XXXVIII

ethnographiques sera arriv ^ que l'on comprendra valeur des rcits nafs de Lery, de Hans Staden et d'Yves d'Evreux. injustice k Il y aurait cependant une trange nier les anciennes tentatives faites par les religieux portugais pour oprer la conversion des peuples sauvages dans le voisinage de l'Amazonie ce fut, grce eux, que l'exploration du Maranham commena vers l'anne 1607, par ces voyages qu'accomplissaient avec tant de courage les missionnaires partis des couvents de Pernambuco: tentatives qui ne furent point perdues pour la gographie, mais qui, au profit de l'oeuvre chrtienne, n'aboutirent d'abord qu' un martyre inutile. Plus tard, sans doute l'oeuvre des Figueira et des Pinto porta ses fruits et de grands travaux vangliques adoucirent la position des Indiens du Maranham ^). C'est encore un crivain franais, a peu prs ignor et contemporain de no& bons missionnaires, qui a retrac avec le plus de zle et on pourrait dire avec un soin vraiment pieux, l'itinraire suivi par ces hommes courageux, contemporains du P. Yves qu'il a connu sans doute,^ mais dont il ne possde ni la grce, ni la navet 2).;

1) On trouvera les renseignements les plus dtaills sur les missions jsuitiques et sur l'administration des Indiens au Maranhamla Corografia historica clxroCet crivain a soin de rappeler ds le dbut de son Tome 3, les immenses secours qu'il a tirs des dons faits l'institut historique de Kio de Janeiro par le conseiller Antonio Vasconcellos de Drummond e Menezes. Dans le cours de ses longs voyages, le diplomate aucjuel on doit de si prcieux renseignements sur l'Afrique, ne s'tait pas born ces recherches et il avait runi touchant le Brsil d'innombrables manuscrits sur lesquels aujourd'hui s'appuie l'historien. Priv depuis plusieurs annes de la vue, il en a fait hommage son pays.

(choses

si

peu connues en France) danse

nographica du Dr. Moraes

Mello.

pour

2) Trois ans environ, avant le dpart de la mission des capucins le Maranham, le P. du Jarric ddiait au roi enfant, le livre suivant: Seconde partie de lliistoire des choses plus mmorables adve-

nves tant ez Indes orientales, que avtres pays de la deseouverte des Portugais en l estblissement et progrez de la foi Chrtienne et Ca-

XXXIXPierre du Jarric nous apprend comment les vastes, rgions intrieures d'un pays que convoitait la France^ furent parcourues par deux religieux de son ordre^ peu prs au temps o La Ravardire pour la premire fois en explorait le littoral. Francisco Pinto et Luiz Figueira avaient toutefois^ a cette poque, un grand avantage moral sur les Franais, ils savaient admirablement la langue des peuples qu'ils tentaient de convertir. Bien plus jeune que son compagnon/ destin succomber dans son apostolat, "le P. Luiz Figueira s'initia alors plus que jamais aux secrets d'une langue dj visiblement altre sur le bord de la mer, et qui se conservait dans sa puret Cinq ans aprs l'imprimitive au sein des forts. du volume qu'on devait au P. Yves, il pupression blia son Arte de Grammatica et pour la premire fois sicle, on eut depuis les essais incomplets du que parlait encore un les principes d'une langue peuple courageux destin bientt a prir *). Revenons a notre pieux voyageur. S'il vivait encore, comme cela est assez probable^

XVP

tholique et principalement de ce que les religieux de la Compagnie de Jsus y ont faict et endvr povr la mesme fin depvis qu'ils y sont entrez, iusqu' Vanne 1600, par le P. Pierre du Jamc, Tolosain de la mesme compagnie, Boyrdeavs, Simon Mellange, 1610, in-4. Tout ce qui est relatif au Brsil, se trouve contenu dans ce vaste recueil entre les pages 248 et 359. Mais c'est dans le livre V de ce que l'auteur appelle l'Histoire des Indes. Orientales, part. 3, p. 490^ qu'il faut chercher les faits curieux signals dans cette notice.1) Cette premire dition, publie en 1621, est devenue pour ainsi dire introuvable, la seconde que nous avons sous les yeux est intitule:

Arte de ^Vieologo da

Grammatica da lingua hrasilica do P. Luis Figueira, Companhia de Jsus. Lisboa, Miguel Deslande, anna

Le savant bibliographe portugais M. Innocencio da 1687, pet. in-12. Sylva ne reproduit pas exactement ce titre, mais il signale une dition faite Bahia en 1851 , par M. Joo Joaquim da Sylva Guimaraens le titre en est fort dvelopp. La Grammaire d'Anchieta, Arte da Grammatica da lingoa mais usada na Costa do Brazil, parut Combre en 1595, in-8. On n'en connait en Portugal qu'un seul:

exemplaire.

XLbien au-del de l'poque qu'on assigne ces vnements, en 1619, par exemple, Yves d'Evreux ne faisait plus partie certainement du vaste monastre dont il tait sorti jadis pour se rendre dans le nouveau monde. On peut supposer que son homonyme de Paris, commenait l'clipser et qu'il se tenait loin de la grande communaut; s'il eut habit le couvent de la rue St. Honor, il n'est pas probable qu'on l'eut compltement oubli dans les courtes biographies qu'on accorde si libralement a des religieux qui n'avaient rien crit, tel est entre autres cet Yves de Corbeil, simple frre lai mort en 1623, et que recommandait uniquement dans l'ordre son

dvouement a l'humanit. Nous en avons d'ailleurs la certitude, c'tait dans un humble couvent de sa province natale que le P. Yves s'tait retir nous le trouvons en 1620 k St. Eloy ^) et nous supposons qu'il avait choisi cette rsidence parce qu'il s'y trouvait dans le voisinage du:

,

couvent des Andelys.

Dansle

ces

fertiles

gnie du Poussin, encore sans doute des loisirs suffisants pour admirer la riante nature et la fracheur des paysages. Peuttre en d'autres temps eut-il t mme de retracer ces fines observations qui en font parfois un incomparable naturaliste; mais aprs l'motion qu'avait imprime a sa pense la majestueuse solitude des forts sculaires du Brsil, il ne se laissa plus captiver que par les ardentes disputes de la thologie. Un livre encore introuvable (car nous nous heurtons chaque moment ici, a des rarets presque aussi

campagnes, o s'tait veill notre bon missionnaire avait

1) St. Eloi prs Gisors, dans le dpartement de l'Eure, est une l)Ourgade de 384 habitans 25 kil. des Andelys; il y a galement Nous St. Eloi de Fourques village de l'Eure 25 kil. de Bernay. inclinons croire que ce fut dans la premire de ces bourgades, que demeura notre missionnaire.,

XLI rencontrer que le voyage), nous prouve que pour son repos il ne sut pas rsister l'esprit du sicle. N'ayant plus convertir les Indiens ildifficiles^ ^

se prit discuter avec les protestants^ et chose assez tizarre, ce fut un de ses compatriotes ^ personnage essentiellement estim de ses coreligionaires qu'il attaqua ou peut-tre auquel il rpondit seulement.

Nous ignorons le titre du premier opuscule ; qu'il lana son adversaii'e, mais un savant bibliographe de la Normandie^ M. Frre^ nous a fourni le second c'est pour nous une sorte de rvlation. Ce livret est intitul: Supplment ncessoive a Tescript que le capucin Yves, a fait imprimer touchant les confrences entre lui et Jean Maxiniilien Delangle. Eouen, David Jeuffroy, 1618, in-8. *). Cet crit que le docte bibliographe attribue k notre missionnaire, pommait ne pas tre man directement de sa plume, mais il prouve l'existence d'un -autre ouvrage plus tendu, et dmontre qu'il y avait eu entre lui et les dissidents de srieuses discussions Mieux lui eussent valu, sans doute, les naves orales. discussions qu'il avait nagure avec Japi Ouassou en l'le du Maranham ou les prdications si rarement interrompues qu'il faisait nagure au Fort St. Louis t qu'interrompait si rarement la grave assemble des Indiens, auxquels une svre politesse enjoint d'couter l'orateur tant qu'il lui plat de garder pour lui la parole; circonstance qui (pour le dire en passant) a bien pu tromper en mainte circonstance un ardent missionnaire, sur le succs qu'il obtenait. Yves d'Evreux, cette fois, avait affaire l'un des;

1) ^'oy. la Bibliographie Normande- Nous nous sommes adress directement la docte obligeance de M. Frre pour obtenir la communication du supplment ncessaire; malgr des recherches persvTantes, il s'est vu dans l'impossibilit de nous fournir d'autre renseignement que celui dont on peut prendre connaissance dans son excellent ouTrase.

XLII

hommes

les

pluset

fermes etl'crit

les protestants

les plus estims parmi du religieux fut dfr au

parlement.

Jean Maximilien de Baux^ seigneur de Langle^ un jeune ministre plein d'ardeur originaire d'Evreux comme le P. Yves, et demeurant alors au grand Quevilly^ petite ville de quinze seize cents habitans une bien faible distance de Rouen ^). Nous ne savons point quel tait l'objet en discussion: quelque diligence que nous ayons faite, aucune des pices du procs n'est venue notre connaissance; mais il est certain que le dernier crit, dont M. Frre nous a rvl l'existence, excita d'une manire fcheuse l'attention de l'autorit, car un arrt du parlement, en date du 8 avril 1620, intervint tait^

son sujet,livres

et

condamna David JeufFroypour avoirdit

d'amende

incrimin-). teint pas notre missionnaire on le voit, elle s'applique uniquement l'imprimeur qu'il avait choisi, mai& elle implique en soi un blme indirect qui atteint le livre, et l'on peut supposer que notre bon missionnaire s'tait laiss emporter par l'ardem- de la polmique, des personnalits regrettables. On tait cependant assez peu scrupuleux sur ce point en 1618, et il ne parait pas qu'en dfinitive, la carrire du jeune ministre auquel s'attaquait le P. Yves, en ait t suspendue dans sa marche bien loin de l, nous le voyons ds l'anne 1623 dput par ses coreligionaires au synode national de Charenton, puis il faitle livre;

pralable,

a cinquante sans permission Cette dcision n'at-

Le grand ^Juevilly, Clavilleum, bourgade de la Seine infrieure 6 kil. de Eouen seulement, et fait partie du canton de GrandCouronne. 2) Maximilien de Baux fut appel plus tard desservir l'glise du culte rform Eouen. Il poussa sa carrire jusqu' l'ge de 84 ans et mourut en 1674; il laissa aprs lui la rputation d'un homme dont l'me tait droite et les moeurs singulirement austres. Yoy. les frres Haag, La France protestante.1)est

XLllI

partie ; quatre ans plus tard, de celui qui se tient alors en Normandie , dans Ja ville d'Alenon. partir de l'anne 1620; nous perdons toute Cependant plusieurs trace du P. Yves d'Evreux. crivains ecclsiastiques bien postrieurs k cette date^ enregistrent son nom dans leurs vastes ncropoles, en midtipliant de telles erreurs son sujet, qu'on acquiert la certitude qu'ils n'avaient jamais vu son

A

Boverio da Salluzo^), Marcellino de Pise^)^ le P. Denys de dtails gnraux fort approximatifs sur son oeuvre sans en spcifier la date, ou altrent grossirement le millsime de l'anne d'impression. Ce dernier, par exemple, le fixe 1654, erreur bien vidente, procdant d'une premire faute d'impression et que rptent a l'envi Masseville ^) et mme le Moreri Normand^). Le P.livre.

Wadding^), d'ordinaire si exact, Gnes ^) ou ne donnent que des,

1)

duction italienne:

Capucinorum Annales, Lugduni, 1632, in-fol. Annali di Frati minori Cappucini

,

puis la traetc.

Yenetia,

1643, in-4.2) Annales seu sacraram Idstoriarum ordinis minorum Sancti Lugduni, 1676, in-fol. Francisci qui Capucini nuncupantur etc.3) Annales ordinis minorum, 2me dit., Romae, 1731. puis les Scriptores ordinis minorum, 1650, in-fol du mme. 4) Bibliotheca Scriptorum ordinis minorum. Genuae, 1680, in-4., rimp. en 1691 pet. in-fol. Ce dernier, aprs quelques lignes sur les mrites du P. Ivo Ehroycencis vulgo d'Evreux donne ainsi l'Indication de son livre scripsit gallic Relaiionem siii itineris et Navigationis Sociorum que Capucinorum ad regnum Marangani : eut etiam adjunxit liistoriam de morihus illarum nationum. Rothomagi, 1654. Yoy. T. 1 in-4. Masseville prouve T. VI, p. 414. 5) Histoire de ISormandie. videmment qu'il s'est content de traduire le P. Denys de Gnes, puisque il dit, que notre missionnaire ,, donna une Relation gographique des rgions o il avait pntr et particulirement du pays de Marangani'' Regni Marangani a dit son prdcesseur. Une bibliothque 6) Voy. ce prcieux ms. la bibl. de Caen. amricaine, compos par le colonel Antoine de Alcedo, Madrid, 1791, 2 vol. in-8. ne mentionne pas le P. Yves: mais cette omission nous laisse peu de regrets, son compagnon, le P. Claude d'Abbeville, y est reprsent convertissant avec un zle infatigable les Sauvages du Canada!:

,

XLIVFranc. Martin, de l'ordre des CordelierS; dont on conserve le manuscrit Caen la change seul de son autorit prive et la porte 1659, en donnant toujours comme lieu d'impression la ville de Rouen. UEiJitonie de la bibliotheca oriental y occidental de Lon Pinelo, livre qui fut redit comme on sait par Barcia au XVIIP sicle, est le seul ouvrage en ce tems o soit mentionn le voyage que nous rimprimons, avec une certaine exactitude, mais la encore, le titre de la relation publie par notre pauvre missionnaire se trouve si singulirement altr par le bibliographe espagnol, qu'on voit dans cette indication errone l'influence de Denis de Gnes, il est difficile de reconnatre sous un pareil dguisement l'habile continuateui'

du P. Claude d'Abbevillela

*).

Nous en avons peu prs

certitude,

par

les

manuscrits que nous a lgus le grand couvent de la rue St. Honor, Yves d'Evreux vcut au-del de l'anne 1629, mais il ne revint pas Paris, tout indique mme, qu'il devait tre tomb dans une sorte de dfaveur, parceque l'on avait sans doute k coeur de faire oublier au roi d'Espagne les tentatives qui Cela avaient t faites nagure sur le Maranham. est si vrai, que les anciens chefs de l'expdition ne purent renouer une vaste entreprise, dans laquelle Malgr la taient engags leurs plus chers intrts. faveur dont il semble avoir joui la cour, l'amiral de Razilly choua compltement dans ses tentatives sur ce point, et lorsqu'il fut rendu k la libert, aprs

supprime par ordre de ne porte sur son titre grav, qui iixe la date de l'impression du livre 1629, que les noms d'' Antonio Il n'y est fait nulle mention de Lon, celui de Pinelo est omis. d'Yves d'Evreux (ce livre fait partie de la bibl. Ste Genevive), l'dition donne en 3 vols. pet. in-fol. par Barcia travestt ainsi le titre de notre livre: Fr. Yvon de Evreux capuchino. Relacion d" su viage al Reino de Marangano, con sus companeros: historia de las Cos1)

La premireet

dition

de

VEpitnme,

l'inquisition

devenue rai^issime,

,

iumbres de aquellas naciones.

Irap.

1654, in-4. frances.

XLVsa captivit dans le chteau de

Belem,

le

brave

La

RavardirC; ne retourna jamais dans TAmrique du Ces deux noms paraissent encore une fois sud. i); et ils apparaisdans l'histoire de notre marine sent glorieusement, mais c'est en Afrique, sur ces ctes inhospitalires, o de hardis pirates devaient tre chtis de temps autre, pour que toute scui'it ne fut pas enleve notre commerce. La Ravardire employa glorieusement et, nous le voyons, d'une faon toute chrtienne, les dernires annes d'une vie active, consacre entirement a la gloire de son pays; le temps lui manqua pour tracer le rcit de ses voyages dans l'Amrique du Nous savons de science certaine que, par sessud. ordres, une relation dtaille de son expdition sur les bords de l'Amazone avait d tre dresse enCette espce de journal, qui claircirait tant 1614. de choses, ne nous est pas parvenu, il ne serait pas sans intrt a coup sr, de la comparer aux documents qui nous ont t transmis vers le mme temp& par un autre Franais, dont les voyages ont eu les

honneurs d'une rimpression. Dix ans auparavant^ en effet, le garde des curiosits de Henri iV et de Louis XIII, Jean Mocquet avait parcouru les rives de l'Amazone, vers le milieu de l'anne 1604, et s'tait efforc de faire connatre le grand fleuve a Malheureusement, ce pauvre chises compatriotes. rurgien de campagne, avait plus de zle que de lumires et ses observations ne pourraient se comparer a celles d'un homme aussi connu par son instruction que par sa loyaut. Le voyage de La Ravardire

lem,

chevalier de Tordre de St. Jean de Jrusade TAmiraut de France, chef d'Escadre des vaisseaux du roi en la province de Bretagne, est nomm amiral de la il flotte royale qu'on expdie sur les ctes de la Barbarie en 1630 et la mme anne nous le trous'adjointLa Eavardire le 3 septembre de1) Isaac de Eazilly,

premier capitaine

:

vons devant Safy, o

il

s'occupe du rachat des captifs.

XLVIsur l'Amazone et dans le Maranham^ doit tre aussi dcrit minutieusement dans la grande chronique manuscrite des pres de la compagnie qui existe encore Evora. En consultant les savants travaux bibliographiques de M. Rivara^ nous en avons acquis la certitudc; le chapitre 111 de ce vaste recueil est consacr entirement au sjour des Franais dans ces rgions. Nous n'avons pas t mme de l'examiner. Grrce k l'esprit d'investigation^ qui s'est empar de tant de savants historiens^ on ne saurait donc dsesprer compltement de retrouver l'crit que nous signalons. Le Brsil fait chaque jour les plus louables efforts pour runir en corps de doctrine les docuindits qui constituent ses origines historiques; si jamais le voyage de La Ravardire tait dcouvert dans quelque bibliothque ignore^ ce serait avec Claude d'Abbeville et Yves d'Evreux le guide le plus sr qu'on pt consulter sur ces provinces du nord dont on connat peine les splendides solitudes et dont notre missionnaire rvle pour ainsi

ments

dire le pass.

Voyage au Brsilexcut dans les annesparle

1G12

et

1G13,

]P.

Yves

d'Evreu^s:,

religieux capuciu,

2)ubli

avec une introductionpar

et

des Notes

M, Ferdinand Denis^conservateur la bibliothque sainte Genevive.

SVITTE DE

L'HISTOIREDES CHOSES PLUS

UENUES EX MARAGNAN ESANNEES1613

&

1614.

SECOND TRAITE

A PARISDE L'IMPRIMERIE DE FRANOISIIIBY,

RIE SAIM JACOIES A LA

BIBLE D OR & EX SA BOUTIQUE AU PALAIS EX LA GALERIE DES PRISOXXIERS.

MDCXV.

AY ROY.SIRE.

du

liure

Voicy ce que i'ay peu par subtils moyens recouurir du R. P. Yues d'Eureux supprim par fraude

et impit,

entrei'offre

movennant certaine somme de deniers, les mains de Franois Hubv, Imprimeur, Que maintent a V. M. deux ans & demj aprs sa

premire naissance aussi tost estoufFee qu'elle auoit veu le iour. Afin que V. M. & la Royne sa Mre pour lors Rgente, ne voyant point vne vrit si claire que* celle -cy, fust plus aisment persuade, par faux rapports, a laisser prir cotre leurs sainctes, et bonnes intentions, la plus pieuse & honorable entreprise qui se pouuoit faire dans le nouueau monde. Comme il se verra tant par THistoire du R. P Claude Dableuille, que ceste prsente laquelle il ne manque que la plus grand part de la Prface, & quelques Chapitres sur la fin que ie n'ay peu recouurir. Cela s'est faict encor' a dessein pour faire perdre insensiblement a V. M. le tiltre de Roy Tres-Chrestien. Luy faisant abandner les sacrifices et sacrements exercez sur les nouueaux Chrestiens, la rputation de ses armes, & bandieres, Tvtilit qui pouuoit luy arriuer,

& a ses subiects, d'vn si riche c fertile pays, et la retraicte du tout importante, d'vn port fauorable pour la nauigation de lg cours, auiourd'huy ruine faute d'auoir conseru ce que i'auois auec tant de soins,

&

s'est

de despenses acquis. Pour quoy paruenir, l'on seruy de deux impostures trop recogneus de1

2personnes qui ont bon iugemt, Lvne,estoit infertile^

que

le

pays

produisoit aucune richesse, contre la vrit, que i'ay tousiours constamment maintenue, et qui ne paroist auiourd'huy que trop vritable, L'autre, que les Indiens estoient incapables du Christianisme contre la parole de Dieu, & la doctrine vniuerselle de TEglise. Voila comment^ SIRE, ceste belle action" si bien commence s'est esuanoilye, tant par la fraude & malice de ceux qui pour couurir leurs fautes & manquement les ont reiettez sur ceux du pays, Qui par la ngligence des mauuais Franois, qui n'ayant autre but que leur proiit & interest particulier, se sont peu souciez, de celuy de V. M. & empescher vne si signale perte, qui sert auiourd'huy de fables a toutes les nations estrangeres, de mespris de vostre authorit Koyale toute l'Em-ope, & de douleur a tous vos bons subiects. Desquelles illusions, quand il plaira a V. M. s'en relouer par les salutaires aduis de personnages d'honneur, recogneu.pour estre zelez a l'accroissement de la gloire de Dieu, & celuy de vostre Royaume, ie luy offre encor' ma vie, celle de mes frres. Et ce peu de pratique & exprience qui est en nous pour faire recognoistre par tous les coins de ce nouueau monde, qu'il n'y a point en la Chrestient vn si grand et puissant monarque qu'vn

&ne

Roy de France. Quand il veut employer, ie ne diray pas sa puissance, mais seulement son authorit. C'est, SIRE, Tout ce que peut vn de vos plus humbles subiects, au([uel tous les mauuais traiteriiens, pertes de biens & de fortune, que contre la foy publique que i'ay soufferts durant la minorit de V. M. n'ont point faict encor' perdre le courage de la seruir glorieusemt. aura mes seruices pour ]\rassurant qu'elle agrables, & le vu solemnel que ie fais d'estre le reste de ma vie,son tres-humble et trs obissant seruiteuret subiect,

FRANOIS DE RASILLY.

AV ROY.SIRE,principale raison qu'eurent les Anciens deentre les Dieux la plus - part de leurs Empereurs j fut la piet la Religion qu'ils auoient recogneu en iceux pendant leur vie. Et c'est chose bien notable que nous trouuons par les Histoires, qu'encore que quelques-vns des Empereiu's esleuez de bas lieU;, au sommet de rEmpire, se soient mstrez cruels et sanguinaires vers lem^s subiects, nonobstant ils n'ont pas laiss d'obtenir aprs leur mort le nom de Dieux, auoir des Temples et des Autels, des Sacrifices et des Prostrs, establis et ordonnez par le Snat, et ce en considration de la Piet et Religion qu'ils auoient conseruee inuiolablement au milieu de plusieurs autres imperfections. Ces Monarques grands en domination, petits en la cognoissance du vray Dieu, estoient poussez d'vne inclination emprainte naturellement dans leur cur, de la Maiest Diuine, de laquelle tous Monarques sont le vif Image, et partant eux appar-

La

canoniser

tient

de dilater le Royaume de Dieu , comme les Lieutenans de sa Majest souueraine. A ceste fin,, ils parsemoient leurs arcs et trophes, leurs colonnesstatues des enseignes de la Religion, et laissoient a la postrit des plaques et planches des mtaux plus incorruptibles, ainsi que sont la Bronze, Or et Argent, grauees de leurs Images, et des vestiges de leur piet, a ce que le temps n'en oifuscast laet

mmoire. AntoninC'estoit

le Pieux, laissa sur la Bronze et l'argent, sa Piet et Religion Burine en ceste sorte.

estoit

vne Dame vestu en Desse, deuant laquelle^ vn Autel charg d'vn feu continuellement bruslant, & entre ses mains elle tenoit vn Vase pleiiiL1*

de bonnes odeurssacrifice

qu'elle iettoit

clans ce feu.

signifiant

chasque heure en par l la Piet et

qu'il portoit aux Dieux. Si l'inclination naturelle priuee de grce et de auoit tant de puissance au lumire surnaturelle cur de ces Monarques ^ que pouuons-nous dire^

Religion

.

uoire que pouuons-nous penser, combien Dieu agite intrieurement les coeurs des Rois illustrez et enrichis de la vraye Religion? LouYS quatriesme Empereur, Prince vertueux et chery de tous, preferoit a toutes ses affaires celles de la Religion: & pour exciter tous ses.subiects h son imitation, auoit marqu sa monnoye d'vn Temple trauerse d'vne Croix, & tout autour estoit

Christ iana Religio. Celuy qui a emport le prix, Sire, par sus tous les Monarques du Monde , en faict de Piet & Religion a est sainct Louys, l'honneur des Franois,, duquel vous hritez le Sang, le Sceptre, le nom, et l'imitation de ses vertus: car non seulement, il a employ ses thresors, sa noblesse, ains aussi sa propre personne, passant les Mers, (Mers qui ne respectent, non plus que la mort aucune cpialit de personnes, pour les enuelopper dans ses ondes) afin de restaurer la Piet & Religion abatu par les cruautez des Infidelles, & y est mort pour ceinscrit,

subiect.

de Roy n'eust tant de conuenance de ce bon Roy sainct Louys, qu'a le vostre, Sire, & laissant a part ce qui ne faict mon propos, ie prendray seulement ce beau subiect, que fouuerture vous est fjiicte d'imiter sa Piet & Religion enuers ces panures Saunages, qui dsirent extrmement cognoistre Dieu, et uiure soubs l'ombre de vos Lys non pas seulement les habitans de

Jamaisle

sicle

auec

sicle

,

Maragnan, Tapouytapere, Comma, Cayetez, Para, T ab a a r e s L 5 g s c h e u e u x ains aussi plui,:

sieurs

autres

Nations,

lesquelles

souhaittent

s"ap-

oproclier des Peres^ ainsi que ie diraysiiiuant Discours.

amplement au

A'ous seul; Sire, pouuez tout ce bien, par ce qu'ils ayment naturellement les Franois & hayssent les Portugais, tout ce que peuuent nos Religieux, c'est d'exposer leur vie la poursuitte de la conuersion de ces panures gens: chose de peu de dure, si vostre Royale piet n'y met la main.Cest' affaire n'est pas tant difficile,

comme Tonchargeet

pourroit

s"imaginer,

ny

de

si

grande

despence que l'on estimeroit: il n'y faut des cinquante, ou des cent mille escus, ains vne libralit mdiocre fidellement administre (pour l'entretien des Sminaires, o seront admis les enfans des Saunages, vnique esprance de l'establissement ferme de la Religion en ces pays la,) sera suffisante. Si vostre Maiest, Sire, se rsout a cela, ie m'asseure qu' vostre imitation, plusieurs de nos

& Princesses, Seigneurs & Dames, s'exciteront a contribuer quelque chose, pour l'augmentation de la Foy en ces quartiers l. Et afin que ie ne sois fcheux vostre Maiest par vne prolixit malsante, ie finiray auec cest^Princes

panure Chananee rpute pour chienne, laquelle ne demandoit pour la deliurance de sa lille possde du Diable que les miettes tombantes de la table Royale du Rdempteur: Ceste nation des Saunages est isslie d'vn mesme Pre que ceste Chananee, ses enfans sont possdez des Dmons par l'infidlit: Elle ne demande ny vos thresors ny grande somme de deniers, ains seulement les miettes superflues qui tombent de, del, de vostre Rovale o-randeur. Parquoy, Sire, ie vous supplie tres-hinnblement de regarder de bon il ceste panure Xation, & receuoir de bon cur ce petit Discours des choses plus mmorables arriuees pendant les deux ans que i'ay pratiqu auec eux, suiuant le commandementhistoire

Euangelique de

la

,

,

6

de la Royne vostre mere^ faict nos Reuerends duquel nous nous sommes aquitez le plus Pres fidlement quil nous a est possible, ainsi que uerrez en ce Traitt, lequel quand vostre Maiest aura eu pour agrable auec le contenu d'iceluy, ie m'estimeraj trs-bien recompens de ce que i'en prtons receuoir en ce Monde auquel tant quil plaira a Dieu me faire uiure, ce sera pour m'employer auec toute la fidlit a moy possible, au seruice de vostre Maiest,; ,

comme

celuy qui est

&

sera iamais d'icelle,

Trs -humbleF,

&

fidle suject

YVES D'EVREVXCAPVCIX.

ADVEETISSEMENTau Lecteur.

Amy lecteur, vous serez aduerty, que ie ne feray aucune rptition des choses que le Reuerend Pre Claude a escrit en son histoire seulement i'adiousteray ce que l'exprience m'a donn plus quk luV; n'ayant est que quatre mois dans Maragnan et moy deux ans entiers: vous trouuerez ceste vrit, quand vous confrerez nos deux escrits ensemble j d'autant que l'addition que l'en feray, supposera ce qul en aura escrit de mesme matire.,

PREFACE

SVr,

les

cl

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