ÉCOLE DU LOUVRE
LES MUSÉES À L’ÈRE DU NUMÉRIQUE : DIFFUSION DES COLLECTIONS SUR LE WEB
Violette Vauchelle
Sous la direction de Cécilia HurleyMembre du jury : Mathilde Ledur
2ème année de 2ème CycleDiplôme de Muséologie
Septembre 2013
REMERCIEMENTS
Je remercie tout d’abord Cécilia Hurley, pour m’avoir guidé dans mes
recherches et m’avoir donné la possibilité de traiter un sujet qui me tient à coeur. Je
remercie également Mathilde Ledur pour ses conseils avisés et sa disponibilité.
Je tiens à exprimer toute ma gratitude aux membres de l’Association Fra
Angelico, qui m’ont permis de mener ce travail de recherche dans des conditions
idéales.
Mes remerciements s’adressent également à Sébastien Magro et Omer Pesquer
qui ont pris le temps de m’accorder un entretien.
Enfin, je n'oublie pas ma famille et mes amis pour leur patience, leur
contribution et leur soutien indéfectible.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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Avant-propos
Ce mémoire de recherche a pour objet d’étude la présence et la visibilité des
collections muséales sur le Web. En tant qu’historienne de l’art et muséologue de
formation, les technologies numériques ne font pas partie de mon domaine d’expertise.
Il s’agit plutôt d’un centre d’intérêt personnel. J’ai choisi ce sujet par intérêt pour la
question donc, mais également dans un objectif de professionnalisation. Il s’agit d’une
première étape de spécialisation dans le champ des technologies numériques
appliquées au musées, dans l’espoir d’exercer dans ce domaine, et, éventuellement, de
continuer à mener des recherches dans cette discipline.
Afin de mener à bien ce travail de recherche, j’ai fait appel à des sources variées
et différentes méthodes de travail. J’ai tout d’abord entrepris un travail de veille sur le
Web à travers des alertes Google, des blogs traitant de mon sujet et d’abonnements
Twitter. La plate-forme Muzeonum m’a notamment été très utile. Je me suis, en outre,
appliquée à assister à des conférences et des tables rondes, dont les Rencontres
Nationales du Club Culture et Innovation(s). Le travail de constitution de bibliographie
s’est fait en deux temps. J’ai tout d’abord centré mon attention sur les sources
françaises, avant de me tourner vers la littérature anglo-saxonne, plus récente et plus
centrée sur le sujet. Je me suis également appuyée sur de nombreuses sources en ligne,
allant des notes de blogs aux articles de sites Web spécialisés. Bien qu’il soit peu
commun pour un mémoire de recherche de s’appuyer sur autant de sources
numériques, cette démarche est pertinente, étant donnée la nature de mon sujet.
Enfin, mon sujet traitant de visites virtuelles immersives et de reconstitution 3D,
j’ai créé un blog afin d’illustrer mon propos à l’aide de vidéos et d’enregistrements
d’écrans de ces études de cas. J’invite mes lecteurs à se rapporter à ce blog à l’adresse
suivante : http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/. En outre, en ce qui concerne les
termes spécifiques aux technologies numériques, un lexique est disponible à la fin de ce
mémoire.
J’espère que cette lecture sera le reflet évocateur d’un travail qui fut, à mes yeux,
formateur et enrichissant.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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Table des matières
Introduction 9
1. Le Web 17
1.1. Le Web : origines, définition, usages 18
1.1.1. La «démocratie Internet» 18
1.1.1.1. Les origines d’Internet 18
1.1.1.2. Révolution ou évolution numérique ? 19
1.1.1.3. La «fracture numérique» 21
1.1.2. Le Web : un outil de démocratisation culturelle 22
1.1.2.1. La démocratisation d’Internet 22
1.1.2.1.1. Équipements et usages d’Internet 22
1.1.2.1.2. Haut débit et très haut débit 24
1.1.2.2. Un nouveau public : Les «Digital Natives» et le «multitasking» 25
1.1.3. Le Web : un lieu de partage 26
1.1.3.1. Terminologie du Web participatif 271.1.3.2. Les applications du Web participatif 28
1.1.3.2.1. Google 28
1.1.3.2.2. Les blogs 29
1.1.3.2.3. Wikipédia, une communauté de pratiques ? 30
1.1.3.2.4. Les réseaux sociaux 31
1.2. Enjeux et défis du Web 33
1.2.1. Aspects juridiques 34
1.2.1.1. Cadre législatif 34
1.2.1.1.1. Loi de 1978 34
1.2.1.1.2. Circulaire du 26 mai 2011 35
1.2.1.2. L’Open Data 37
1.2.1.2.1. Définition de l’Open Data 37
1.2.1.2.2. L’Open Data pour le secteur culturel 38
1.2.1.3. Les licences ouvertes 39
1.2.1.3.1. Creative Commons 39
1.2.1.3.2. Les licences de l’Open Knowledge Foundation 411.2.1.4. Le domaine public 43
1.2.2. Aspects techniques 44
1.2.2.1. Design de la page Web : muséographie et scénographie en ligne 44
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1.2.2.1.1. Web design 441.2.2.1.2. Web mobile 47
1.2.2.2. Traitement de l’image 48
1.2.2.2.1. Formats et métadonnées 48
1.2.2.2.2. Image Haute Définition 50
2. Musées et virtualité 52
2.1. Appropriation des technologies numériques par les institutions culturelles :
des prémices à la notion d’espace virtuel 53
2.1.1. Prémices 53
2.1.1.1. L’informatisation des musées 53
2.1.1.2. L’arrivée du numérique au musée 55
2.1.1.3. Premiers pas sur le Web 56
2.1.2. L’espace muséal virtuel 57
2.1.2.1. Réflexions sur la notion de «musée virtuel» 57
2.1.2.2. L’espace virtuel : espace privé ou public ? 61
2.1.2.3. Authenticité et virtualité : de l’original à la copie 62
2.1.2.3.1. Réalité vs. virtualité : « the real thing » 62
2.1.2.3.2. Copies et reproductions 63
2.1.2.4. Médiation numérique et dématérialisation 64
2.2. Présence active des institutions culturelles sur la Toile 66
2.2.1. Sites Web de musées 66
2.2.1.1. De la vitrine à l’interactivité : nouvelles fonctions, nouveaux enjeux 66
2.2.1.2. Refontes de sites Web et nouvelle interactivité 68
2.2.1.3. De l’internaute visiteur à l’internaute contributeur : nouvelles stratégies
pour un nouvel utilisateur 70
2.2.1.3.1. L’internaute-visiteur 70
2.2.1.3.2. Nouvelles stratégies pour de nouveaux besoins 71
2.2.2. Usage et appropriation du Web social par les musées 73
2.2.2.1. Les réseaux sociaux numériques sont-ils attractifs pour les musées ? 74
2.2.2.2. Communautés de partage de photos 77
2.3. Mise en ligne des collections 79
2.3.1. Diffuser les collections du musée en ligne : une mission du musée 79
2.3.1.1. Mise en valeur et promotion des collections et de l’institution 80
2.3.1.2. Éducation : outil pour les étudiants et les chercheurs 812.3.1.3. Retrouver le patrimoine perdu 82
2.3.1.4. Un accès pour le handicap 82
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2.3.1.5. Un accès géographique 84
2.3.2. Numérisation des collections et bibliothèques numériques 85
2.3.2.1. Plans de numérisation : enjeux, intérêts et problématiques 85
2.3.2.2. La création des portails culturels 89
2.3.2.3. Les banques d’images de musées en ligne 90
2.3.2.4. Bibliothèques numériques inter-institutionnelles 91
2.3.2.4.1. La base Joconde 91
2.3.2.4.2. Culture.fr 92
2.3.2.4.3. Europeana 94
3. Perspectives 96
3.1. S’inspirer des offres numériques innovantes 97
3.1.1. Patrimoine en 2D 97
3.1.1.1. La visite virtuelle immersive 97
3.1.1.1.1. Qu’est-ce-qu’une visite virtuelle ? 97
3.1.1.1.2. Patrimoine culturel français en visite virtuelle 98
3.1.1.1.4. À l’étranger 1013.1.1.2. Les catalogues virtuels des collections : l’exemple du Rijksstudio 103
3.1.1.2.1. Contexte de la création 103
3.1.1.2.2. Fonctionnalités 106
3.1.1.2.3. Bilan 108
3.1.1.2.4. Réflexions sur le Rijksstudio 109
3.1.2. Patrimoine en 3D 110
3.1.2.1. La 3D : définitions et usages 110
3.1.2.2. Monuments en 3D 113
3.1.2.2.1. La 3D comme outil de valorisation du monument : l’exemple de
Versailles 3D 1133.1.2.2.2. La 3D comme outil de reconstitution d’un patrimoine perdu 115
3.1.2.2.3. Monuments virtuels 116
3.2. Faire confiance à l’expertise des entreprises du Web : Google et la mise en
ligne du patrimoine culturel 118
3.2.1. Sait-on vraiment qui est Google ? 118
3.2.2. Google Cultural Institute 120
3.2.2.1. Qu’est-ce-que le Google Cultural Institute ? 120
3.2.2.2. Les projets de l’Institut Culturel 121
3.2.2.2.1. Les expositions en ligne 121
3.2.2.2.2. World Wonders 121
3.2.2.2.3. Art Talks 122
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3.2.3. Le Google Art Project 122
3.2.3.1. Qu’est-ce-que le Google Art Project ? 122
3.2.3.1.1. Naissance du projet 122
3.2.3.1.2. Fonctionnement et types d’œuvres présentées 123
3.2.3.2. Mode d’emploi 123
Recherche et visualisation d’images 123
Visites virtuelles 124
My Collections 124
Outils de partage 124
Outil de comparaison 124
3.2.3.3. Technologies utilisées 125Street View 125
«Vue au microscope» 125
Images en haute résolution 125
Gigapixels 126
3.2.3.4. Images : droit et licences 126
3.2.3.5. Musées partenaires 127
3.2.3.6. Bilan 127
3.2.3.6.1. Le Google Art Project en chiffres 127
3.2.3.6.2. Répercussions sur les musées 128
3.2.3.7. Questionnements 1283.2.3.8. Avantages, inconvénients et intérêts du Google Art Project 130
3.2.3.8.1. Avantages 130
Pour le musée 130
Pour le public 130
Pour Google 130
3.2.3.8.2. Critiques 130
3.2.3.8.3. Analyse 131
3.3. Mesures à prendre : Formation, Financement, Stratégie 133
3.3.1. Se former au numérique 133
3.3.1.1. Se former au numérique : pour qui ? pourquoi ? 133
3.3.1.1.1. Former les professionnels de musée 133
3.3.1.1.2. Former les publics de musée 134
3.3.1.2. Se former au numérique : comment ? 135
3.3.1.2.1. Communautés de pratiques : l’exemple des muséogeeks 135
3.3.1.2.1.1. Qui sont les muséogeeks ? 135
3.3.1.2.1.1. Leurs initiatives 136#Muzeonum 136
#Museomix 137
1 Soir, 1 Musée, 1 Verre 138
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3.3.1.2.2. Conférences annuelles 139Les Rencontres Nationales Culture & Innovation, Club Culture &
Innovation France 140
Museums and the Web 141
3.3.1.2.3. Lieux d’innovations et d’expérimentations 142
Un programme de recherche universitaire : le programme Leden 142
Une initiative gouvernementale : Le Culture Lab du Ministère de la
Culture 143
3.3.2. Financements et mise en œuvre d’un projet de diffusion numérique des
collections 147
3.3.2.1. L’émergence d’un nouveau type de financement : le crowdfunding 147
3.3.2.2. Élaborer une stratégie de diffusion numérique des collections 151
3.3.2.2.1. Pourquoi mettre en place une stratégie numérique ? 151
3.3.2.2.2. Musées et logique marketing : deux concepts a priori
antagonistes 152
3.3.2.2.3. Proposition de méthode 153
Conclusion 159
Sources 165
Sources imprimées 165
Ouvrages 165
Articles 171
Thèses et mémoires 174
Sources en ligne 176
Articles 176
Conférences 177
Textes de loi 177
Rapports, enquêtes et textes officiels 178
Articles de blogs et de sites Web 180
Vidéos 184
Sites Web 185
Blogs 186
Lexique 187
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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Introduction Le numérique n’a rien d’une utopie, il est notre nouvelle
réalité, avec ses libertés et ses points noirs.1
Milad Doueihi (2009)
Nous traversons aujourd’hui une ère qui est celle du numérique. En
bouleversant les techniques d’information et de communication, Internet a provoqué
une véritable révolution numérique. Or, l’heure n’est plus à la révolution mais plutôt à
l’évolution. Le numérique est ancré dans notre culture et notre quotidien.
Le Web en fait désormais partie. Que l’on prévoit de visiter un musée, d’aller
dans un restaurant ou de partir en vacances, l’une des premières étapes du processus
est d’allumer un ordinateur et de lancer sa requête sur un moteur de recherche. Nous
utilisons tous Internet, tous âges et classes sociales confondus. Certains le maîtrisent
plus ou moins bien que d’autres, certains ne lui font pas confiance, d’autres s’en
désintéressent, cela n’empêche que le Web est ancré dans notre société.
Les révolutions techniques successives ont bouleversé les mœurs et inquiété
les esprits. Le numérique et Internet ont, comme toutes les autres innovations
technologiques du XXème siècle, reçu leur lot de désapprobation. Dès la fin des années
1950, Jacques Ellul, dans son ouvrage traitant de la culture de la technologie, mettait
l’accent sur les dangers de la Technique : «Nous avons la conviction qu’il n’est dans les
possibilités de personne au monde d’établir le bilan réel et détaillé de l’ensemble des
effets de l’ensemble des techniques.»2 L’environnement numérique se rapproche ici de
ce qu’Ellul nomme la «Technique». À l’instar de celle-ci, les technologies numériques
ont pour mission d’améliorer notre environnement et de donner des libertés plus
grandes, tout en apportant leur lot de difficultés et de problèmes3. En effet, elles
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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1 DOUEIHI M., La grande conversion numérique, Paris, Seuil, 2009, p.253.2 ELLUL J., La Technique ou l’Enjeu du siècle, Paris, Economica, 1990, p.V.3 DOUEIHI M., La grande conversion numérique, Paris, Seuil, 2009, p.24-25.
représentent, certes, une grande innovation et un outil de travail efficace, mais il arrive
régulièrement qu’un problème technique advienne et décourage l’utilisateur.
Internet est un monde qui offre de très nombreuses possibilités mais qui a aussi
«ses points noirs», le principal étant la protection de la vie privée et des données
personnelles. Si le Web inquiète, c’est parce qu’il représente un réseau immense, sur
lequel nous sommes vite amenés à partager nos données personnelles. Le Net, et
l’idée est rarement soulevée, est également un vecteur important de procrastination.
En effet, avec ses millions de pages Web, il représente une source de savoir et de
divertissement à la fois incroyable et dangereuse, pour le taux de productivité des
internautes. Simultanément, outil productif et source de distraction, Internet favorise
«l’essor d’un syndrome d’attention continuellement partielle et d’une addiction à la
connexion en ligne»4.
Néanmoins, le Net demeure une source de savoir et un réseau d’échange
d’information immense, sur lequel nous avons tout intérêt à développer notre présence
à l’aide d’outils innovants.
Les institutions culturelles et les professionnels de musées ont été, et parfois le
sont toujours, réticents face aux risques et aux difficultés qu’entraînent Internet. En
dépit de cela, les musées se sont emparés très tôt des technologies numériques et se
sont positionnés sur le Web.
L’histoire des musées et des technologies numériques est plus ancienne que ce
que l’on pourrait imaginer. Depuis plusieurs années déjà, les institutions muséales
jouent du champ de possibilité très large qu’offrent les nouvelles technologies. Depuis
les bornes interactives du musée d’Orsay en 1986, en passant par les premiers CD-
Roms interactifs «ludo-culturels», puis par la notion de «musée virtuel», qui apparaît
dans les années 2000, jusqu’à la création des bibliothèques numériques des
collections, l’histoire du numérique au musée est longue et dense. Le numérique au
musée ne constitue plus une révolution. Il est devenu une composante essentielle de la
pratique du musée. De nombreuses institutions culturelles proposent aujourd’hui un
large panel de dispositifs numériques et multimédias au sein de leurs collections. Le
Louvre, en partenariat avec Nintendo, a récemment lancé la Nintendo 3DS comme
nouvel audioguide. Cette dynamique n’est pas uniquement l’apanage des grands
musées, elle est aussi présente dans ceux de plus petite taille, comme le musée des
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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4 SCHERER É., La révolution numérique: glossaire, Paris, Dalloz, 2009, p.89.
Abattoirs de Toulouse, un des premiers à tirer profit du Web participatif. Les dispositifs
innovants se multiplient, qu’ils soient en ligne ou in-situ. En ligne, le musée a
longtemps pensé son site Web comme une vitrine servant à présenter ses activités, un
simple outil marketing. Aujourd’hui, beaucoup de musées français se lancent dans la
refonte complète de leur site Web, avec notamment le lancement du Centre Pompidou
Virtuel à l’automne 2012. Cela démontre la prise de conscience de ces institutions de
l’importance d’une présence dynamique sur le Web.
La mission de diffusion des collections des musées a été bouleversée par
l'arrivée des technologies numériques et d’Internet, et beaucoup ont su saisir cette
opportunité.
La première utilisation des technologies numériques au musée s’était traduite
par la gestion informatisée des collections. Dès le départ, ceux-ci ont vu la possibilité
offerte par le numérique, aussi bien en termes de valorisation des collections que
d’amélioration de la gestion de celles-ci. Très vite, les campagnes de numérisation des
collections ont été entreprises par les institutions culturelles afin de constituer des
bases de données. Ces banques de données ont d’abord été pensées pour un usage
interne. Elles ont ensuite été mises à la disposition du public en ligne, sous forme de
portails numériques. Des initiatives collectives ont vu le jour, comme la base de donnée
des musées de France, la base Joconde ou encore le portail Culture.fr, du Ministère de
la Culture et de la Communication.
En 2008, le lancement du prototype Europeana, qui proposait un accès
multilingue à 2 millions d’œuvres européennes, a marqué le début d’une nouvelle ère
dans l’utilisation du patrimoine numérisé. Il démontre la volonté et les efforts accomplis
par la commission européenne pour la promotion de la diversité culturelle et
linguistique. Christine Albanel, alors Ministre de la Culture et de la Communication, en
parle en ces termes : «Projet fondamentalement humaniste, par nature sans fin,
Europeana réalise et dépasse les rêves des Lumières comme le musée imaginaire de
Malraux.»5
Europeana a été conçue comme le musée virtuel du patrimoine culturel
européen. Le site rassemble un grand nombre de reproductions numériques d’œuvres
d’art, de livres, d’œuvres audiovisuelles et sonores.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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5 ALBANEL C., Avant-propos, Culture et Recherche, n°118-119, automne-hiver 2008-2009, p.5.
Les bibliothèques numériques des collections, créées pour la plupart entre 2005
et 2008, sont le reflet du Web 1.0, aujourd’hui dépassé. Or, le domaine des
technologies numériques est en constante évolution et la Toile actuelle prend une
nouvelle forme. Les problématiques d’ouverture des données, de Web 2.0, de Web
sémantique ou «Web des données», sont au cœur des discussions portant sur
l’environnement numérique. Le visage du Net change et les sites Web et portails de
collections des institutions doivent changer avec lui.
En termes techniques, le design de l’interface devient un critère fondamental
d’appréciation. D’un point de vue juridique, l’ouverture des données est un enjeu
majeur. De plus, les utilisateurs du Web, autrefois récepteurs, sont devenus émetteurs.
C’est l’une des plus importantes évolutions que connaît le Web d’aujourd’hui.
L’internaute-visiteur de musée demande désormais un accès ouvert, libre, illimité et
interactif aux collections muséales.
Les institutions culturelles sont aujourd’hui conscientes de la nécessité de se
construire une présence sur le Web, qui soit à la fois, un outil de promotion
institutionnelle et à la fois, un moyen de créer le dialogue avec son public. Mais qu’en
est-il de la diffusion des collections ? En dépit de leur esprit d’ouverture, les institutions
culturelles reculent face aux problématiques de diffusion numérique des collections sur
le Web. Les conservateurs craignent qu’une mise en ligne des collections trop
permissive et ouverte marque la fin de la venue des visiteurs au musée, en provoquant
ainsi la perte du contact direct avec l’œuvre. Outre cette peur, les problématiques de
droits d’auteur et de copie des images sont également au cœur des discussions
animées concernant la mise à disposition des collections muséales sur le Net.
La bonne visibilité, la présence des musées et de leurs collections sur la Toile
constituent des moyens de promotion, de communication et de diffusion très
performants. Il ne s’agit pas, alors, de voir Internet comme une menace pour le musée
mais de se demander s’il se pose en allié ou en concurrent. Selon Bernard Deloche, la
question du numérique au musée «ne peut pas sérieusement se poser en termes de
nocivité (se demander, par exemple, si les médias exercent ou non un effet nuisible sur
les institutions culturelles). En contrepartie, elle émerge aujourd’hui plus que jamais en
tant de concurrence. Reste à savoir de quel ordre est cette concurrence et ce qu’elle
menace réellement.»6 Internet est-il un allié ou un adversaire pour les musées ?
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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6 DELOCHE B., La nouvelle culture. La mutation des pratiques sociales ordinaires et l’avenir des institutions culturelles, Paris, L’Harmattan, 2007, p.165-166.
Ces dernières années, de nombreuses initiatives innovantes ont vu le jour sur le
Web concernant la visibilité et la diffusion du patrimoine culturel. En 2011, le Google
Cultural Institute a lancé Art Project. Le site a pour objet de proposer aux internautes
un accès aux musées du monde entier et aux œuvres d’art en haute résolution, depuis
un ordinateur connecté. Le visiteur peut se promener dans les salles des musées et
contempler des œuvres en très haute résolution. Les utilisateurs peuvent également se
créer leurs propres galeries personnelles, véritables studioli des temps modernes. Plus
récemment, le Rijksmuseum a lancé son Rijksstudio en ligne, un site dédié à ses
collections. Là aussi, les œuvres sont disponibles en très haute résolution et sur une
interface qui allie design et technologies innovantes. En outre, le Rijksstudio répond
aux enjeux du Web participatif en proposant, de façon très innovante, une
appropriation et une réutilisation des œuvres aux utilisateurs.
Ces projets remarquables de diffusion des collections muséales en ligne
présentent cependant des avantages et des inconvénients. Ils posent de nombreuses
questions sur le sujet du copyright et ouvrent la voie à un long et laborieux débat.
Depuis leur création, la plupart de leurs visiteurs s’amusent avec les possibilités qu’ils
offrent et adoptent cette manière originale d’appréhender la visite muséale. D’aucuns
sont inquiets, cela ne va-t-il pas sonner le glas de la visite du musée lui-même ? Le
musée va-t-il perdre en fréquentation ? Cela ne désacralise-t-il pas l’œuvre d’art ?
Afin de répondre à ces questions, il nous faut étudier la présence et la visibilité
du patrimoine culturel en ligne. Quelle visibilité les institutions culturelles offrent-elles à
leurs collections sur le Web ? De quelles expérimentations et innovations en matière
de diffusion du patrimoine culturel en ligne les musées peuvent-ils s’inspirer ? Les
musées mettent-ils en place des stratégies numériques ? Comment se positionnent-ils
sur le Net ? On parle fréquemment de «musée virtuel», à quoi ce concept fait-il
véritablement référence ? Que change la présence de l’écran dans la relation entre
l’œuvre et le public ?
Cette étude du patrimoine culturel et de sa diffusion numérique se situe au cœur
du contexte de la muséologie numérique. Le champ de recherche étudiant les
technologies numériques appliquées au patrimoine culturel, est particulièrement
complexe. Les américains parlent de «museums informatics», même si cette
appellation met plus l’accent sur les sciences de l’informatique que sur la muséologie
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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en tant que telle. Ross Parry parle, lui, de «cybermuséologie». Pour les francophones,
le préfixe -cyber faisant trop référence à une contre-culture des années 1990, nous lui
préfèrerons celui de «muséologie numérique».
On voit également l’acception «humanities computing» dans le monde
anglophone, ce que l’on retrouve en France dans l’expression «humanités
numériques»7 ainsi que dans «museum computing». Une discipline, donc, assez
difficile à définir, étant donnée sa transdisciplinarité. Cette dernière demande, d’ailleurs,
aux acteurs de ce champ d’étude, une certaine polyvalence, une flexibilité ainsi qu’un
esprit d’adaptabilité et de synthèse. Le contexte de cette recherche nécessite une
connaissance approfondie des technologies numériques, une bonne culture muséale et
un esprit humaniste mais également scientifique. Il n’existe pas de cadre préconçu
pour ce champ de recherche car il est, de fait, au centre de plusieurs disciplines.
La complexité de ce domaine demande alors de poser un cadre précis afin de
définir les objets d’études et d’établir les limites du sujet. Les anglophones le nomment
«digital heritage», en français nous parlons de «patrimoine numérique», au sens de la
version numérisée du patrimoine. Cette expression peut se référer à de nombreux
éléments distincts, rendant les confusions faciles, notamment avec l’art numérique.
Celui-ci est, en soi, un élément du patrimoine numérique au sens de la production
culturelle. Il est cependant distinct, ici, de notre objet d’étude, qui est le patrimoine
culturel dans sa version numérisée. L’expression patrimoine numérique est aussi
confondue avec la production publique et privée d’emails, de sites Internet, de blogs,
de documents divers ou de vidéos en ligne, dont nous n’aborderons pas le sujet. Il
s’agit, dans ces pages, d’étudier la présence des collections muséales sur le Web,
d’analyser leur présentation et de se demander si la diffusion numérique des
collections doit se penser de manière stratégique.
Des exemples de dispositifs numériques physiquement intégrés au sein du
musée seront mentionnés, à titre d’illustration. Ils ne constituent pas, toutefois, le cœur
de ce travail de recherche. Nous évoquerons notamment le développement
d’applications mobiles ou encore l’usage des réseaux sociaux par les musées, qui
s’imposent comme autant de problématiques incontournables, bien que celles-ci
dépassent notre objet d’étude.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
14
7 Cf DOUEIHI M., Pour un humanisme numérique, Paris, Seuil, 2011.
Par collection muséale, il faut entendre tout objet de musée, qu’il soit présenté
dans un musée d’art, d’histoire, de société ou de sciences. L’étude porte sur tous types
de musées, de collections ou de sites Web, mais a pour finalité de servir de cadre
contextuel à une réflexion destinée aux musées de beaux-arts. Nous traiterons le cas
d’institutions culturelles pour prendre en compte tous les types d’institutions mais nous
nous focalisons sur les musées essentiellement.
Nous étudions le patrimoine culturel dans son ensemble, architectural tout
autant que graphique, mais l’objet final de l’analyse demeure les collections muséales.
Ainsi, les techniques de restitution 3D pour les monuments notamment, peuvent faire
office de référence pour les objets de musée.
Les sources utilisées seront variées et originaires d’espaces géographiques
divers. Nous étudions des exemples de projets étrangers, mais ce qui nous intéresse
principalement est l’application que les musées français peuvent en faire. Ainsi, nous
verrons que beaucoup d’offres numériques innovantes en matière de visibilité et de
diffusion du patrimoine culturel, sont étrangères, et pour la plupart anglo-saxonnes. À
travers leur étude, les musées français sont invités à s’en inspirer.
Enfin, le sujet étant particulièrement large, il ne s’agit pas de faire une étude
exhaustive et typologique mais de dresser un panorama général.
Ce travail de recherche a pour finalité de répondre à plusieurs problématiques.
La diffusion numérique des collections représente-t-elle une désacralisation ou une
valorisation de l’œuvre d’art ? Les musées doivent-ils concevoir une stratégie de
diffusion de leur collections sur le Web, et si oui, quels sont les enjeux et les défis à
relever ? Et enfin, comment mettre en œuvre une telle stratégie et comment faire pour
qu’elle respecte les valeurs intrinsèques des collections ?
La première partie est destinée à présenter d’une manière simple et concise ce
qu’est le Web aujourd’hui. En commençant par revenir sur les origines d’Internet, nous
nous attacherons à comprendre ce que représente l’environnement numérique actuel,
et en quoi il est devenu un outil de démocratisation culturelle. Nous nous
concentrerons enfin sur les principaux enjeux et défis qu’il pose aux institutions
culturelles.
La seconde partie traite de la notion de virtualité au musée. Nous reviendrons
sur l’appropriation des technologies numériques et du Web par les institutions
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
15
culturelles, ainsi que sur la notion parfois incomprise de «musée virtuel». Nous
chercherons à comprendre ce que représente véritablement l’espace virtuel et ce qu’il
change dans la relation entre l’œuvre et le public. Et enfin, nous verrons en quoi la
diffusion numérique des collections sur le Net, fait partie intégrante des missions des
institutions culturelles.
La troisième et dernière partie s’adresse aux institutions et aux professionnels
de la culture. Elle présente ce que nous pensons être les points clés de la réussite d’un
projet de diffusion numérique des collections. Après avoir contextualisé le débat, défini
ce qu’était le Web et étudié les offres institutionnelles et privées, nous cherchons à
savoir quelles sont les mesures concrètes à entreprendre pour mettre en place une
stratégie innovante. Il s’agit, tout d’abord, de prendre exemple sur les offres
numériques innovantes qui existent, notamment pour le patrimoine architectural ; puis
d’envisager de faire confiance aux experts du Web comme Google, ou du moins de
s’inspirer de leurs projets ; de former ensuite le personnel et le public et enfin, de
trouver de nouveaux financements en pensant stratégiquement, afin de mettre en
œuvre un programme de diffusion numérique des collections réussi.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
16
1. Le Web
«Il n’est pas nécessaire d’être médiologue pour sentir que le tournant
numérique correspond à un bouleversement comparable à celui qu’introduisit
l’imprimerie. (...) Un homme numérique est en train d’émerger, comme il y eut
avec Gutenberg un homme typographique, puis avec Niépce et Daguerre un
homme photosensible et indiciel. Chacun sent bien qu’Internet, dans la plupart
des domaines de la culture, apporte ou provoque une coupure médiologique
majeure.»8
Daniel Bougnoux (philosophe, professeur émérite en sciences de la communication à
l’Université Stendhal de Grenoble, collabore régulièrement à la revue Médium)
Le Web est un espace bien vaste. Pour donner les clés de ce nouvel espace
de communication aux institutions culturelles, nous commencerons par définir
ce qu’est le Net, quels sont ses usages actuels et quels sont les enjeux et les
problématiques qu’il pose aux institutions culturelles souhaitant diffuser
numériquement leurs collections.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
17
8 BOUGNOUX D., «Quel tournant numérique ?», L’Observatoire, La revue des politiques culturelles, n°41, Hiver 2012, p.31-34.
1.1. Le Web : origines, définition, usages
1.1.1. La «démocratie Internet»
«Internet (...) élargit formidablement l’espace public et transforme la nature
même de la démocratie»9. Dominique Cardon décrit Internet comme un média hors du
commun, qui nous offre, certes, des possibilités révolutionnaires, mais qui présente
aussi ses limites. Pour saisir toutes les subtilités de cet hyper-média revenons sur son
histoire, sa création et son évolution au sein de notre société en abordant les
changements et bouleversements qu’il a provoqué.
1.1.1.1. Les origines d’Internet
Tout d’abord, bien que les deux termes s’emploient généralement, il ne faut pas
confondre Internet et le Web. Le Web (pour World Wide Web, «www.») ou «Toile»,
n’est qu’un fragment d’Internet. C’est un ensemble d’informations assemblées sous un
format plus lisible pour l’internaute. Tandis qu’Internet, surnommé parfois «le Net», est
une plate-forme de communication10.
Le Net est devenu un immense réseau d’échanges de données numériques en
temps réel entre individus situés à différents endroits de la planète. Notre mode de vie
actuel s’est vu ainsi réinventé, en plaçant cette capacité à communiquer au cœur de
notre activité quotidienne. Au-delà d’une simple innovation technique, Internet est une
véritable révolution. Le XXe siècle fut le siècle des innovations en matière de
technologies de télécommunication, notamment avec le développement d’outils de
communication comme la radio et de la télévision. Quant à lui, le XXIe siècle est celui
du numérique, la Toile permettant à chacun de jouir d’une liberté d’accès à l’information
instantanée, en étant simultanément émetteur et récepteur11.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
18
9 CARDON D., La démocratie Internet. Promesses et limites, Paris, Seuil, 2010, p.7.10 SCHERER É., La révolution numérique: glossaire, Paris, Dalloz, 2009, p.108.11 LE GUEN A. B., Les arts narratifs à l’heure d’Internet, mémoire de master II, Paris III, Sorbonne-Nouvelle, 2012, p.19.
La première section historique du Big Internet Museum12 nous présente Paul
Otlet, avocat et bibliothécaire belge, comme le père des sciences de l’information et le
précurseur de l’informatique13. L’histoire d’Internet commence véritablement avec le
lancement d’ARPAnet en 1969 par Robert William Taylor. Ce projet développé au
Pentagone dans le département ARPA (Advanced Research Projects Agency) avait
pour but de créer un réseau non centralisé pour les besoins de l’armée américaine14.
Quant au premier e-mail, il est envoyé par Ray Tomlinson en 197115.
Ce n’est qu’au début des années 90, que le Net prend la forme d’un système
public d’hyperliens, avec la création d’un nouveau langage, le HyperText Markup
Language ou HTML, format des pages Web. Ces dernières sont accessibles via une
URL et proposent des contenus connectés à d’autres contenus présents sur des sites
différents (liens hypertextes). Le World Wide Web est né. Bien qu’il s’agisse d’une
création collective, le crédit en revient au britannique Tim Berners-Lee pour son idée
d’associer les liens hypertextes avec les principes TCP et DNS16.
1.1.1.2. Révolution ou évolution numérique ?
Internet a été pensé comme un système de communication et d’information
entre individus. Les échanges sont facilités grâce à la gratuité de l’outil et à la
personnalisation qu’il offre. Tout le monde a la parole sur Internet, nous pouvons tous
commenter, hausser la voix, répondre, débattre, confronter nos idées. En outre,
l’information circule vite et de toute part. C’est en cela qu’Internet représente un outil
révolutionnaire. Mais il n’est pas étonnant que le Web inquiète. C’est la finesse de la
ligne séparant la sphère privée de la sphère publique qui fait planer les spectres de
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
19
12 <http://www.thebiginternetmuseum.com/> (consulté le 27 août 2013).13 The Big Internet Museum, Concept of the Web, <http://www.thebiginternetmuseum.com/wings/wing/id/14#concept-of-the-web> (consulté le 27 août 2013).14 The Big Internet Museum, ARPAnet, <http://www.thebiginternetmuseum.com/wings/wing/id/14#arpanet> (consulté le 27 août 2013).15 The Big Internet Museum, eMail, <http://www.thebiginternetmuseum.com/wings/wing/id/14#e-mail>. À voir aussi, une photo des machines qui ont servi à envoyer ce premier email : <http://openmap.bbn.com/~tomlinso/ray/ka10.html> (consulté le 27 août 2013).16 SCHERER É., La révolution numérique: glossaire, Paris, Dalloz, 2009, p.108.
198417 et du Meilleur des Mondes18. Selon Dominique Cardon, il s’agit d’une double
révolution, «d’une part, le droit de prendre la parole en public s’élargit à la société
entière ; d’autre part, une partie des conversations privées s’incorpore dans l’espace
public. L’espace public s’élargit de toutes parts et dans tous les sens.»19 On entend
beaucoup parler de révolution numérique, mais ne serait-ce pas plutôt une évolution ?
Notre société a connu bien des révolutions industrielles : l’arrivée de la photographie,
du cinéma, de la télévision, etc. Internet a été une véritable révolution à son arrivée,
aujourd’hui cependant, peut-on toujours parler d’un système révolutionnaire ? Toujours
est-il que ce qu’apporte Internet est un espace de liberté et de transparence de
l’information. Celle-ci n’est plus l’apanage des organismes mais bien des individus eux-
mêmes. De récepteur, le public devient émetteur. Le Net est ainsi devenu «le nouveau
média convergent du XXIe siècle, qui fonctionne en réseau et efface les frontières,
favorise la co-création de valeur, le développement communautaire «open-source»,
l’émergence d’une intelligence planétaire connective et collaborative.»20
L’évolution d’Internet en tant que média principal du XXIe siècle consacre l’écran
en tant que support privilégié de notre relation à la culture. En effet, comme l’évoque
Olivier Donnat dans son enquête sociologique, grâce au numérique et à la diversité de
ses supports «la plupart des pratiques culturelles convergent désormais vers les
écrans : visionnage d’images et écoute de musique bien entendu, mais aussi lecture
de textes ou pratiques en amateur, sans parler de la présence désormais banale des
écrans dans les bibliothèques, les lieux d’exposition et même parfois dans certains
lieux de spectacle vivant. Tout est désormais potentiellement visualisable sur un écran
et accessible par l’intermédiaire de l’Internet.»21 Le Web a significativement fait évoluer
nos pratiques culturelles. D’aucuns critiqueraient toutefois le risque d’effacement des
frontières entre culture et divertissement avec l’utilisation massive des technologies
numériques.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
20
17 ORWELL G., 1984, Paris, Gallimard, 1972.18 HUXLEY A., Le meilleur des mondes, Paris, Pocket, 2002.19 CARDON D., La démocratie Internet. Promesses et limites, Paris, Seuil, 2010, p.11.20 SCHERER É., La révolution numérique: glossaire, Paris, Dalloz, 2009, p.XVI.21 DONNAT O., «Les pratiques culturelles des Français à l'ère numérique», Éléments de synthèse 1997-2008, Culture Études, n°5, mai 2009, p.2.
Il s’agit donc d’un système aux multiples possibilités ayant toutefois son lot
d'inconvénients, dont l’un des principaux pour notre société est ce que l’on appelle la
«fracture numérique».
1.1.1.3. La «fracture numérique»
De manière générale, lorsque l’on parle de «fracture numérique», on fait
référence aux inégalités d’accès matériel aux outils informatiques et au Web. «L’écart
entre individus ou pays, ayant accès, ou pas, ou de manière très limitée, aux
technologies de l’information et aux outils numériques, est communément appelée la
fracture numérique.»22
Il s’agit plus concrètement d’un déséquilibre au niveau de l’accès au matériel
informatique et à la connaissance des outils numériques. Cela concerne le nombre
d’ordinateurs par individu, la qualité de la connexion Internet et le niveau d’éducation à
la culture numérique.
En France, l’accès à l’équipement informatique et à la connexion Internet se
développe de plus en plus, à tel point qu’il ne sera bientôt plus d’actualité de parler de
fracture numérique en ces termes. Le gouvernement travaille actuellement à réduire
cette fracture matérielle, notamment avec la diffusion de la fibre optique qui viendra
remplacer le cuivre. «La qualité des flux diffusés avec la fibre, contrairement au cuivre,
ne souffre pas des distances. La fracture numérique sera alors réellement résorbée
avec un rattrapage total des zones urbaines par les zones rurales»23. Parler de fracture
numérique dans le sens d’un déséquilibre dans l’équipement informatique des
ménages et dans leur connexion Internet sera bientôt obsolète dans l’hexagone.
Dans notre cas, le niveau d’éducation à la culture numérique semble être le
facteur le plus pertinent lorsque l’on parle de fracture numérique, car il entraîne une
différenciation des classes sociales au sein de la communauté numérique. Il y a d’un
côté, ceux qui maîtrisent les outils et deviennent ainsi créateurs et auteurs, et de
l’autre, ceux qui ne maîtrisent pas ou mal ces outils, devenant dépendants et en
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
21
22 SCHERER É., La révolution numérique: glossaire, Paris, Dalloz, 2009, p.89.23 La nouvelle stratégie gouvernementale pour le déploiement du Très Haut Débit sur l’ensemble du territoire, sous l’égide du Ministère du Redressement productif et du Ministère délégué chargé des Petites et Moyennes Entreprises, de l’Innovation et de l’Economie numérique, 20 février 2013, p.3, <http://www.gouvernement.fr/sites/default/files/fichiers_joints/plan_tres_haut_debit.pdf> (consulté le 27 août 2013).
quelque sorte, se retrouvant soumis aux premiers. Milad Doueihi le formule ainsi : «il y
a ceux qui sont des usagers et ceux qui sont des manipulateurs. Globalement les
usagers sont plutôt passifs. (...) Les premiers sont hésitants, manquent d’assurance et
se heurtent souvent à des problèmes qu’ils sont incapables de résoudre seuls. Les
manipulateurs, eux, sont à certains points de vue les créateurs du nouvel
environnement. Ce sont les nouveaux «auteurs», assez qualifiés pour ne pas se limiter
à recevoir, pour pouvoir aussi publier, au sens numérique du terme.»24 La formule de
Dominique Cardon affirmant qu’«Internet élargit formidablement l’espace public et
transforme la nature même de la démocratie»25 prend ici tout son sens. Cela nous
amène à penser qu’une familiarisation avec les outils numériques devient non
seulement utile, mais aussi nécessaire.
1.1.2. Le Web : un outil de démocratisation culturelle
1.1.2.1. La démocratisation d’Internet
Aujourd’hui, qu’il soit portable ou fixe, la grande majorité de la population
possède un ordinateur. D’ailleurs, se connecter à Internet fait désormais partie de nos
habitudes. Nous rentrons chez nous après une journée de travail, pour certains passée
d’ailleurs devant un ordinateur connecté à Internet, nous allumons notre propre
ordinateur et nous allons surfer sur le Web. Emails, réseaux sociaux, blogs, quotidiens
en ligne, sites de partage de vidéos... Internet offre un très large choix d’interactions
qui sont entrées dans nos mœurs, et parfois sans que l’on ne s’en rende vraiment
compte.
1.1.2.1.1. Équipements et usages d’Internet
Les études de l’Observatoire du numérique démontrent que l’usage régulier et
quotidien d’Internet n’a cessé d’augmenter en France au cours des dernières années.
En 2011, la France compte 62% d’internautes utilisant régulièrement Internet, se
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
22
24 DOUEIHI M., La Grande conversion numérique, Paris, Seuil, 2011, p.73.25 CARDON D., La démocratie Internet. Promesses et limites, Paris, Seuil, 2010, p.7.
positionnant ainsi au-dessus de la moyenne européenne à 56%. En 2012 en France, le
nombre de particuliers utilisant Internet chaque semaine atteint les 78%, plaçant ainsi
notre pays au 8ème rang au niveau de l’Allemagne 26. (Fig.1, p.5) L’utilisation fréquente
d’Internet s’est considérablement développée ces dernières années, les Français se
situent au 7ème rang européen au niveau de l’accès quotidien au Net, les Pays-Bas, la
Suède et le Danemark en tête.
Cette augmentation est due, en partie, à la démocratisation des outils
numériques dans les foyers. Il est aujourd’hui rare de rencontrer quelqu’un qui n’a pas
d’ordinateur chez lui. Et qui dit ordinateur, dit connexion Internet. «L’équipement des
ménages français en ordinateurs a longtemps été inférieur à celui de la majorité des
autres pays européens. Or, selon l’enquête TIC de 2010, plus des trois-quarts des
ménages disposent d’un ordinateur à domicile, alors que la moyenne européenne se
situe à 74%. Aux Pays-Bas, le taux d’équipement dépasse 90% et six autres pays de
l’Europe du Nord dépassent nettement 80%.»27 (Fig.2, p.5)
La démocratisation de l’usage de l’ordinateur entraîne, de fait, une baisse des
prix du matériel informatique. Il est donc plus facile de se procurer un ordinateur car de
moins en moins coûteux. Peu à peu, la connexion Internet se généralise également
dans les foyers. En 2010, l’Union européenne comptait 73% des ménages ayant une
connexion Internet, contre 49% en 2006. Quant aux français, «plus des trois quarts des
ménages sont connectés à Internet, contre 41% en 2006»28. Ces chiffres classe la
France au 10e rang européen (UE à 27), un taux légèrement bas en comparaison avec
certains pays d’Europe du nord, notamment les Pays-Bas, où plus de neuf foyers sur
dix sont connectés à Internet (Fig.3, p.6) 29 . En 2012, en France, 78% des particuliers
avaient un usage régulier d’Internet (au moins une fois par semaine, tous les jours
inclus) et 65% un usage fréquent (une fois par jour)30.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
23
26 Observatoire du numérique, Usages de l’Internet, grand public, <http://www.observatoire-du-numerique.fr/usages-2/grand-public/usages-internet> (consulté le 27 août 2013).27 Observatoire du numérique, Équipement du grand public, <http://www.observatoire-du-numerique.fr/usages-2/grand-public/equipement> (consulté le 27 août 2013).28 Id..29 Ibid.30 Observatoire du numérique, Chiffres clés 2013, <http://www.observatoire-du-numerique.fr/wp-content/uploads/2013/07/2013-07-chiffres-cles-observatoire-numerique.pdf> (consulté le 27 août 2013). Source : Eurostat, enquête communautaire sur les TIC 2012.
1.1.2.1.2. Haut débit et très haut débit
Mais nous l’avons vu plus haut, bien qu’Internet représente un espace illimité de
possibilités, il peut provoquer des écarts dans notre société. C’est la question soulevée
par très le haut débit. Un utilisateur surfant sur le Net avec un très haut débit
appréciera beaucoup plus son expérience en ligne que l’utilisateur qui ne bénéficie que
d’une connexion bas débit.
Qu’est-ce-que le très haut débit exactement ? Le débit pour commencer
représente la vitesse à laquelle les données peuvent être envoyées et reçues depuis
un ordinateur ou un autre terminal connecté à Internet. Le débit s’exprime en bit.
Existant depuis les années 2000, les technologies haut débit ont permis d’augmenter
significativement les débits disponibles. L’ADSL par exemple, permet de bénéficier de
débits allant de 512 kbit/s à 20 Mbit/s. Le très haut débit se caractérise par une
performance nettement supérieure à ce que peut offrir le haut débit31.
La question du très haut débit pour tous est soulevée par le gouvernement
actuel et en cours d’examen et de développement. Le très haut débit dans les
ménages permettrait une meilleure expérience du Web, par exemple une bonne qualité
d’appel en visioconférence permettrait de populariser ce moyen de communication
peut-être délaissé à cause des problèmes techniques qu’on lui reproche. Le très haut
débit ouvrirait ainsi de multiples possibilités en termes de nouveaux usages.
En 2011 dans l’Union européenne, on comptait 68% de ménages ayant une
connexion à haut débit, contre 61% en 2010 et 30% en 2006. «Par rapport à ce taux, la
France se situe au 10e rang, avec un taux de 70%, contre 67% en 2010 et 30% en
2006. La Suède, le Danemark et les Pays-Bas figurent en tête du taux de connexion à
haut débit» (Fig.3bis, p.6) 32 . On peut observer à la lumière de ces chiffres fournis par
l’Observatoire du numérique, une nette différence entre les pays du nord et du reste de
l’Union Européenne. La Suède, les Pays-Bas et le Danemark semblent toujours
prendre les premières places. Nous verrons par la suite qu’il s’agit d’une question de
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
24
31 La nouvelle stratégie gouvernementale pour le déploiement du Très Haut Débit sur l’ensemble du territoire, sous l’égide du Ministère du Redressement productif et du Ministère délégué chargé des Petites et Moyennes Entreprises, de l’Innovation et de l’Economie numérique, 20 février 2013, p.2. Disponible à cette adresse : <http://www.gouvernement.fr/sites/default/files/fichiers_joints/plan_tres_haut_debit.pdf> (consulté le 27 août 2013).32 Observatoire du numérique, Équipement du grand public, <http://www.observatoire-du-numerique.fr/usages-2/grand-public/equipement> (consulté le 27 août 2013).
culture et de mœurs, les pays nord-européens étant de manière générale assez
avancés en termes de présence muséale sur le Web par rapport à la France.
Le Net fait donc désormais partie intégrante de notre quotidien, il s’est
démocratisé. Aux musées d’intégrer cette notion et d’en tirer profit. Un des autres
éléments marquants qui font du Web d’aujourd’hui un outil de démocratisation
culturelle, est la présence sur la Toile d’un type d’usager que le musée se doit d’attirer
vers lui.
1.1.2.2. Un nouveau public : Les «Digital Natives» et le
«multitasking»
Le Web aujourd’hui est devenu une place publique sur laquelle les usagers
peuvent s’exprimer, et la génération qui s’en est emparée est la génération des «Digital
Natives».
On parle beaucoup de «génération Y» on peut aussi dire «génération Internet»,
«Digital Natives» ou encore «génération M» (multimédia, mobile et multitasking) 33 . Le
terme de «génération Y» fait référence aux personnes nées entre la fin des années
1970 et le milieu des années 1990, ils sont donc aujourd’hui âgés de 15 à 35 ans.
L’origine du terme s’expliquerait de trois façons. Il ferait simplement suite à celui de la
génération précédente, la génération X. Il ferait aussi référence aux écouteurs toujours
branchés à un lecteur mp3 et prenant la forme d’un y, ou encore à la prononciation
anglaise de la lettre «Y», «why?»34. Le terme de «Digital Natives» (traduit par «natifs
numériques» en français) aurait été employé pour la première fois par Marc Prensky et
désigne également cette génération35. Il s’agit de ceux qui ont grandi avec les
ordinateurs, Internet, les téléphones portables, les jeux vidéos, les mp3, la télévision à
la demande, les films en streaming et le téléchargement. Ils ont un accès illimité et à
toute heure à l’information, au savoir et à la culture mais aussi aux divertissements.
Ces usagers étaient suffisamment jeunes lors de la percée des nouvelles technologies
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
25
33 SCHERER É., La révolution numérique: glossaire, Paris, Dalloz, 2009, p.60-61.34 ROLLOT O., La Génération Y, PUF, Paris, France, 2012.35 Un programme de recherche sur les «Digital Natives» est actuellement dirigé par le Berkman Center for Internet & Society à Harvard et par le Research Center for Information Law à l’université de Saint-Gall en Suisse.
dans notre société pour les maîtriser parfaitement aujourd’hui (d’où le terme de «digital
natives») et n’ont pas peur de partager une partie de leur vie privée sur le Net.
Un des comportements caractéristiques de cette génération est ce qu’on appelle
le «multitasking» ou comportement «cross-media»36. Il s’agit de l’utilisation de plusieurs
supports en simultané, surfer sur le Web tout en écoutant de la musique, en regardant
la télévision du coin de l’œil, ou en communiquant avec son smartphone ou encore en
utilisant sa tablette tactile. La communication se fait par plusieurs biais : elle passe par
les réseaux sociaux comme Facebook, Twitter, par les emails ou encore par les
services de messagerie instantanée, aujourd’hui intégrés aux supports cités
précédemment.
En plus d’utiliser plusieurs outils en même temps, cette génération passe
beaucoup de temps à surfer sur la Toile (Fig.4, p.7). En 2008 déjà, selon l’enquête
d’Olivier Donnat, 91% des 15-19 ans ont utilisé Internet le mois précédent, parmi eux
57% l’ont utilisé tous les jours ou presque. Des chiffres qui sont sensiblement les
mêmes pour les 20-35 ans et qui ne baisse qu’à partir de la catégorie des 35-44 ans.
Parmi eux, 66% ont utilisé Internet au cours du dernier mois, dont 42% tous les jours
ou presque37. Selon une enquête Comscore, en 2013, 50% du temps passé sur le Web
l’est par des moins de 35 ans (Fig.5, p.7)38.
Ainsi, les «Digital Natives» accèdent à l’information et communiquent des
données en utilisant plusieurs supports à la fois et par le biais de différentes
applications. Encore un élément que les institutions culturelles doivent prendre en
compte lors de l’élaboration de leur stratégie numérique.
1.1.3. Le Web : un lieu de partage
Notre société a saisi l’importance du Web, c’est pourquoi la plupart des
entreprises et des institutions ont créé un site Internet pour répondre à une tendance
marketing incontournable. Les institutions culturelles et les musées se sont dotés de
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
26
36 BOURCIER N., PLOUGASTEL Y., «La révolution Internet sous l’angle de la sociologie, à l’heure de la convergence numérique», Le Monde 2, 18 novembre 2006, p.32.37 DONNAT Olivier, «Les pratiques culturelles des Français à l'ère numérique», Éléments de synthèse 1997-2008, Culture Études, n°5, mai 2009, p.2.38 COMSCORE, «France Digital Future in Focus, Tendances Clés du Digital en France et leur Impact pour l’Avenir, mars 2013, p.11 <http://www.audit-redac-web.com/IMG/pdf/comScore-2013-France-Digital-Future-in-Focus.pdf> (consultée le 27 août 2013).
sites «vitrines» pour leur promotion et leur diffusion. Le paysage numérique s’est élargi
afin de proposer des stratégies de numérisation des collections ciblant les désirs des
internautes. Les structures ne se contentent plus simplement d’être présentes mais
elles interagissent désormais avec leur public. Nous sommes entrés aujourd’hui dans
l’ère de l’interaction. «À l’ère du Web 2.0, il faut être un acteur sur la Toile, entrer dans
la grande conversation et inclure les internautes.»39
1.1.3.1. Terminologie du Web participatif
À partir de 2005, le Web devient ce que Tim O’Reilly40 a défini comme étant le
Web 2.041. Le terme «Web 2.0» a été popularisé en octobre 2004 avec le lancement de
la première conférence sur le sujet organisée par O’Reilly Media42. Le rapport écrit par
l’équipe du O’Reilly Radar en 2006 en donne la définition suivante : «Le Web 2.0 est
un ensemble de tendances économiques, sociales et technologiques qui,
collectivement, constituent la base de la prochaine génération d'Internet - un medium
plus mature, qui se caractérise par la participation des usagers, l'ouverture et les effets
de réseau.»43
Le Web 2.0 est finalement le terme «à la mode», ancré dans la connaissance
collective. Le «2.0» fait référence aux numéros utilisés dans les dénominations de
logiciels et programmes informatiques. C’est une nouvelle génération du Web. Cette
nouvelle version du Web que nous connaissons aujourd’hui porte pourtant d’autres
noms. On entend aussi les termes de «Web participatif» et de «Web social». Nous
préfèrerons ces acceptions, désignant de manière beaucoup plus claire les nouveaux
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27
39 CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.23.40 Tim O'Reilly est le fondateur et PDG de O'Reilly Media Inc. O'Reilly Media organise également des conférences traitant des technologies numériques, y compris la Convention O'Reilly Open Source, le Web 2.0 Summit, Strata: The Business of données, etc.41 Tim O’Reilly définit les champs du Web 2.0 dans son article datant de 2005 : O’REILLY Tim, What is Web 2.0 ? Design Patterns and Business Models for the Next Generation of Software, O’Reilly Media, 30 sept. 2005, <http://oreilly.com/web2/archive/what-is-web-20.html> (consulté le 27 août 2013).42 Une conférence qui continue d’avoir lieu chaque année, plus d’infos ici : <http://www.web2summit.com/web2011/public/content/about>. Le site Internet propose notamment une carte des réseaux et des acteurs du Web 2.0, “The Data Frame”, une carte interactive représentant les rouages de notre économie de réseau. Disponible à cette adresse : <http://map.web2summit.com/#t-34> (consultée le 27 août 2013).43 O’REILLY T., MUSSER J., Web 2.0 : Principles and Best Practices, Report, O’Reilly Radar, 2006, <http://oreilly.com/catalog/web2report/chapter/web20_report_excerpt.pdf> (consulté le 27 août 2013).
usages du Web d’aujourd’hui. Derrière les notions de Web social et de Web participatif
se cachent les concepts d’intelligence collective, de collaboration, de Web
communautaire, de contribution et de communauté de pratiques.
Le Web participatif est donc un espace régi par une dimension collaborative,
dans lequel l’internaute est au centre du processus et prend possession des contenus
publiés sur le Net pour les reproduire ou en produire de nouveaux. Cette dimension
s’articule autour d’un ensemble de pratiques (les blogs, les wikis, les réseaux sociaux)
qui permettent aux surfeurs du Net de relayer leurs opinions et de créer des contenus
(on parle de contenus générés par les utilisateurs, ou User Generated Contents,
UGC)44. Par cette appropriation des contenus, ils deviennent à leur tour producteurs de
contenus. Ainsi les écrivains, les journalistes et les éditeurs peuvent s’exprimer sur des
blogs, les musiciens peuvent mettre en ligne leurs podcasts, en utilisant le logiciel
iTunes par exemple, ou partager leur musique via MySpace. Ceux qui produisent des
vidéos peuvent les diffuser en toute liberté sur des plateformes comme YouTube et
Dailymotion. Les photographes peuvent partager leurs photos sur le site Flickr et se
créer un réseau professionnel, etc. Ce Web de la contribution s’illustre également avec
les plate-formes de commerce en ligne comme Amazon ou eBay, où les usagers
peuvent faire leurs achats et publier des commentaires sur ces derniers. Et enfin, ce
sont les wikis, sites collaboratifs comme l’encyclopédie libre Wikipédia, qui font partie
des plus grands succès d’Internet.
1.1.3.2. Les applications du Web participatif
1.1.3.2.1. Google
Lorsque l’on en vient à parler du Web participatif, la comparaison est souvent
faite entre le Web 1.0 et le Web 2.0. La grande différence entre les deux réside dans
l’usage de la page Web et l’orientation vers l’internaute. Avec le Web 1.0, ce dernier ne
pouvait que visionner le contenu, à l’image du minitel. Il était consommateur. Avec le
Web 2.0, il devient créateur de contenu et peut alors s’approprier et même créer son
propre contenu.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
28
44 DROUILLAT B., in APCI, designers interactifs, Le design des interfaces numériques en 170 mots-clés : Des interactions Homme-Machine au design interactif, Paris, Dunod, 2013.
Selon O’Reilly, la première et la plus populaire application du Web 2.0 est
Google. Le moteur de recherche Google constitue un service, pour lequel l’usager
payait indirectement (à travers sa connexion Internet), mais pas en tant que produit45.
Là réside la grande nouveauté. Google, que l’utilisateur connaît et pratique sous la
forme du moteur de recherche, n’est ni un serveur, ni un browser, il se situe entre les
deux. Il fait finalement office de «facilitateur ou d'intermédiaire entre l'utilisateur et son
expérience en ligne»46.
La plupart des services offerts par Google sont disponibles en Open Source.
Leur philosophie prône l’ouverture des données et la remixabilité47. Cette manière de
penser Internet en fait un espace de liberté et intègre l’internaute en tant que co-
développeur. Cette notion est particulièrement importante lorsque l’on parle de Web
participatif.
1.1.3.2.2. Les blogs
L’une des grandes innovations du Web participatif est la pratique du «blogging».
Le blog, en tant que page Web personnelle utilisée comme un journal de bord ou un
journal «intime», ne représente pas en soi une révolution. La grande nouveauté venue
avec le Web social est la possibilité pour l’internaute d’être tenu au courant des
contenus publiés sur les blogs qu’il a envie de suivre48. C’est ce qu’on appelle le flux
RSS (Real Simple Syndication49). «Un flux d’information ou flux RSS ou fil
d’information est un service vous permettant d’être tenu au courant des nouveautés
proposées par un site, un Blog ou tout autre média. Vous devez pour cela utiliser un
outil appelé agrégateur de news. Les flux RSS sont des fichiers au format XML. Il est
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
29
45 O’REILLY T., What is Web 2.0 ? Design Patterns and Business Models for the Next Generation of Software, O’Reilly Media, 30 sept. 2005, p.1, <http://oreilly.com/web2/archive/what-is-web-20.html> (consulté le 27 août 2013).46 Id.47 Nous verrons un peu plus loin ce que sont les notions d’Open Source et d’Open Data, et encore un peu plus loin ce qu’est et ce que propose Google.48 O’REILLY T., ibid.49 SCHERER É., La révolution numérique: glossaire, Paris, Dalloz, 2009, p.159.
également possible d’afficher sur son Blog ou son site Web les flux RSS proposés par
d’autres. Ce mécanisme est appelé agrégation de contenu.»50
Les blogs ont aujourd’hui gagné en importance, formant ainsi une communauté
que l’on nomme la blogosphère. Cette ensemble dynamique puise ses ressources au
sein même de ses membres, chacun communiquant avec les autres. Une communauté
qui aime aussi se rencontrer IRL, «In Real Life», pour communiquer de vive voix.
1.1.3.2.3. Wikipédia, une communauté de pratiques ?
L’intéressant ouvrage de Dan O’Sullivan sur Wikipédia présente les continuités
et discontinuités entre les communautés de pratiques de l’ère pré-Internet aux
communautés virtuelles d’aujourd’hui51. Il assimile ainsi l’encyclopédie libre Wikipédia à
une communauté de pratiques, dont le fonctionnement relève de la logique
participative, en argumentant sur les similitudes entre les communautés passées et
récentes.
Selon la définition donnée par Étienne Wenger, «les Communautés de Pratiques
sont des groupes de personnes qui partagent une préoccupation ou une passion pour
quelque chose et qui apprennent à le faire mieux en interagissant régulièrement.»52 Il
donne trois caractéristiques essentielles qui composent ces communautés de
pratiques : un centre d’intérêt partagé pour un domaine en particulier, une interaction
régulière entre les membres et l’expérience professionnelle et la pratique de l’activité
qui est au centre de la communauté. Le concept à l’origine de Wikipédia, compris en
tant que résultat d’une interaction au sein d’une communauté de pratiques, a donc été
pensé bien avant Internet. La bibliothèque d’Alexandrie a existé dans le but de réunir
toute la connaissance et le savoir du monde en un seul endroit. Les fondateurs de la
Royal Society étaient des amateurs qui ont transmis leur message sans aucune
motivation commerciale. L’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert avait pour mission de
diffuser des informations pratiques et pertinentes. Des bénévoles ont été employés
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50 ANDERRUTHY J.-N., Web 2.0 : (r)évolutions et nouveaux services d’Internet, Éditions ENI, 2007, p.118.51 O’SULLIVAN D., Wikipedia : A New Community of Practice ?, Ashgate Publishing Ltd., 2009.52 WENGER E., Communities Of Practice, A Brief Introduction, 2006, p.1, <http://wenger-trayner.com/wp-content/uploads/2012/01/06-Brief-introduction-to-communities-of-practice.pdf> (consulté le 27 août 2013).
pour la création du Oxford English Dictionary53 . Tous ces projets ont vu le jour au sein
d’une communauté d’amateurs réunis autour d’un même dessein.
Ces publications, qualifiées de «textes non-linéaires», selon la formule Dan
O’Sullivan, sont lues par bribes. Le lecteur va choisir les parties qui l’intéressent et
ignorer le reste. C’est le cas des dictionnaires, des encyclopédies et de tout ce qui est
de l’ordre de la littérature de référence. Chacune utilise différentes manières de
cataloguer et indexer leurs informations. Wikipédia, avec son système d’hyperliens, est
donc aujourd’hui l’application la plus récente et la plus efficace de ce genre de
système54.
L’encyclopédie libre Wikipédia constitue ainsi une des réalisations les plus
caractéristiques de la nouvelle logique de ce lieu de partage et de collaboration qu’est
le Web participatif.
1.1.3.2.4. Les réseaux sociaux
Les réseaux sociaux numériques se situent au cœur du Web social car ils
fonctionnent sur le principe de collaboration et d’interaction entre usagers. «Un réseau
social sur le web relie, via Internet, des personnes au sein de communautés qui
partagent des centres d’intérêt, des valeurs, activités, liens d’amitiés, passé commun,
lieu de travail... (...) Les critiques y voient une perte de temps mais ce sont autant
d’opportunités d’entrer en contact avec des connaissances, le savoir, l’expertise, des
idées, des opinions, etc.»55
Les plus connus et les plus populaires aujourd’hui sont Facebook, Twitter,
Google +, Tumblr, Flickr, Pinterest, LinkedIn, Viadeo, YouTube, Dailymotion, Vimeo, et
bien d’autres encore. Facebook est le plus populaire d’entre eux. Il a réussi, en moins
d’un an, à battre les records d’audience de la télévision, là où «pour atteindre 50
millions d’utilisateurs, la radio a mis trente-huit ans, la TV treize ans, Internet (n’a mis
que) quatre ans et Facebook moins de cinq mois.»56 Twitter, un autre réseau populaire,
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53 O’SULLIVAN D., Wikipedia : A New Community of Practice ?, Ashgate Publishing Ltd., 2009, p.2.54 Id.55 SCHERER É., La révolution numérique: glossaire, Paris, Dalloz, 2009, p.157-158.56 OUALIDI H., Les outils de la communication digitale : 10 clés pour maîtriser le web marketing, Paris, Eyrolles, 2013, p.80. Le lecteur intéressé par les réseaux sociaux numériques les plus populaires comme Facebook et Twitter, appréciera le guide pratique des usages de ces réseaux proposé par l’auteur.
est passé de simple outil de communication à plate-forme de gestion de sa présence
en ligne. Il est un réseau social «unique en ce qu’il restreint le volume de la
communication tout en permettant de partager largement des échanges issus de
sources très diverses.»57
Chaque réseau social a une particularité ou un domaine qui lui est propre, mais
leur fonctionnement reste assez similaire. Leurs fonctionnalités pourraient être listées
comme suit :
‣ un outil de création du profil, dans lequel l’usager entrera en général des
informations plus ou moins personnelles et téléchargera une photo de profil
‣ une liste de contacts
‣ la possibilité de partager des informations avec ses contacts (texte, image, vidéo,
son, lien hypertexte)
‣ la possibilité de commenter les publications de ses contacts
‣ les outils d’actualisation (RSS) pour se tenir au courant de l’actualité de ses
contacts.
On peut aussi entendre parfois le terme de «médias sociaux», traduction du
terme anglais social media. Le terme de média social, selon l’article de Wikipédia,
«recouvre les différentes activités qui intègrent la technologie, l’interaction sociale
(entre individus ou groupes d'individus), et la création de contenu.»58 Ces plate-formes
mettent donc à disposition l’ensemble des outils que les internautes utilisent pour
s’approprier des données numériques et les réutiliser pour créer du contenu sur le
Web. Les sites de partage de vidéo sont, par exemple, des médias sociaux. C’est le
cas de YouTube et Dailymotion pour ne citer que des plus connus.
Les réseaux sociaux sont ainsi des services Web qui permettent aux individus,
tout d’abord, de construire un profil public ou semi-public dans un système délimité, de
constituer ensuite une liste d'autres utilisateurs auxquels ils sont liés et enfin, de
pouvoir consulter et naviguer à travers leurs listes de contacts, ainsi que celles faites
par d'autres, au sein de ce même système59.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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57 DOUEIHI M., La Grande conversion numérique, Paris, Seuil, 2011, p.71.58 «Réseau social», article de Wikipédia, <http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9seau_social> (consulté le 27 août 2013).59 Boyd D. M. & ELLISON N. B., «Social network sites: Definition, history, and scholarship», Journal of Computer-Mediated Communication, 13(1), article 11, 2007, <http://jcmc.indiana.edu/vol13/issue1/boyd.ellison.html> (consulté le 27 août 2013).
Deux éléments font de ces plate-formes des outils particulièrement attractifs.
Premièrement, les réseaux sociaux permettent aux usagers d’interconnecter leur
réseau de connaissances et de rendre ce processus visible. C’est l’interaction sociale
qui est au cœur de ces réseaux et qui en fait des moyens de communication et de
développement social particulièrement attractif pour l’usager. Deuxièmement, c’est un
outil de marketing «communautaire», aussi appelé «marketing relationnel», très
efficace60. Le Community Manager est le professionnel chargé de ce type de
marketing. Ce dernier se base sur la valeur donnée aux échanges sur les réseaux
sociaux, favorisée par le développement des communautés virtuelles. Le marketing
communautaire consiste donc à identifier une communauté en particulier, identifier ses
besoins et son fonctionnement, pour proposer une offre adaptée.
Ainsi, les réseaux sociaux constituent non seulement des lieux d’interactions
entre internautes, où chacun s’inscrit dans une logique collaborative et participative,
mais ils permettent également à chacun de prendre la parole et d’être écoutés. C’est
un outil très performant à la fois pour l’utilisateur et pour les institutions souhaitant
toucher un nouveau public.
1.2. Enjeux et défis du Web
Selon Milad Doueihi, les enjeux du numérique pour les musées sont doubles, en
effet «le copyright et la propriété intellectuelle sont au cœur du débat et des
changements que vivent les institutions muséales : leurs principales difficultés
concernent la gestion des versions numériques des œuvres qu’ils possèdent et la
négociation d’une solution pragmatique et acceptable au problème du copyright et de
la propriété intellectuelle. (...) les musées et institutions culturelles de même ordre
doivent régler l’épineux problème de la conversion au numérique dans le respect de
leur mission publique.» L’enjeu principal sera donc, selon lui, de gérer «les paradigmes
du partage et de l’accessibilité de l’information et des produits culturels.»61
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60 PENTECOUTEAU J., Les musées et les réseaux sociaux numériques : une nouvelle relation avec les publics ?, Mémoire de Master 2 Recherche, Université Paris I - Panthéon-Sorbonne, sous la direction de Bernard DARRAS, 2011, p.32.61 DOUEIHI M., La Grande conversion numérique, Paris, Seuil, 2011, p.49.
1.2.1. Aspects juridiques
La démocratisation d’Internet et de ses usages, les problématiques soulevées
par le Web participatif et l’inclusion de l’internaute dans des logiques contributives, font
du partage des données numériques un phénomène particulièrement répandu. Le
nouveau visage du Web va donc demander aux institutions culturelles de redéfinir les
règles d’utilisation et de diffusion des reproductions des œuvres qu’elles conservent
sur la Toile.
1.2.1.1. Cadre législatif
1.2.1.1.1. Loi de 197862
En vertu de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 «portant diverses mesures
d'amélioration des relations entre l'Administration et le public et diverses dispositions
d'ordre administratif, social et fiscal»63, les informations publiques sont soumises à un
principe de libre diffusion et de réutilisation. Toutefois, le principe d’«exception
culturelle», défini à l’article 11, pose problème à la mise en pratique du concept
d’ouverture des données culturelles 64. En vertu de cet article, les institutions culturelles
bénéficient d’une dérogation au principe de libre diffusion et de réutilisation des
données et peuvent instaurer leurs propres restrictions.
Cette question reste particulièrement floue, malgré les essais de clarification
proposés, entre autres, par le rapport «Partager notre patrimoine culturel», remis en
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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62 Loi n°78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’Administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal, <http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000339241>63 Telle qu’elle a été modifiée par la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 « relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'Administration et le public » et l’ordonnance n° 2005-650 « relative à la liberté d’accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques » signée le 6 juin 2005.64 JEAN B., MAUREL L., DE FILIPPI P., CHARMET-ALIX A., Open GLAM groupe, Recommandations pour l’ouverture des données et des contenus culturels, rapport du groupe de travail «Open GLAM», <http://donneeslibres.info/openglamFR.pdf>.
201065. Cette «exception culturelle» représente un véritable frein au développement de
l’Open Data au sein du secteur culturel. Dans son rapport, le groupe de réflexion
OpenGLAM recommande «l’abolition de l’«exception culturelle», en réintégrant les
données culturelles dans le régime général de réutilisation des informations publiques,
ainsi qu’une réelle mise en place du droit à la réutilisation des informations publiques,
passant par une information claire sur les obligations des institutions culturelles».
1.2.1.1.2. Circulaire du 26 mai 201166
Destinée aux administrations centrales (ministères et établissements publics
sous tutelle), la circulaire du 26 mai 2011, prenant effet le 1er juillet 2012, autorise la
réutilisation gratuite de leurs données.67 Avec pour objectif de rendre les données
publiques accessibles, transparentes et réutilisables, cette circulaire s’inscrit dans un
processus de modernisation des politiques publiques. La création d’un portail unique
regroupant ces données «data.gouv.fr»68 fut décidée en juin 2010, suivie par la
création de la mission «Etalab»69, en 2011, chargée de la création de ce portail.
L’exception culturelle prévue dans la loi de 1978 ne concernait pas les
ministères. C’était le cas, par contre, des institutions et établissements placés sous leur
tutelle, ainsi que des collectivités territoriales. Les ministères se sont donc finalement
vus obligés de respecter la règle et de verser leurs données sur data.gouv.fr70.
Cependant, les établissements publics sont toujours exonérés de cette obligation grâce
au principe d’exception culturelle. En effet, la circulaire précise que : «L'article 11 de la
loi prévoit un régime dérogatoire pour les établissements et les institutions
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35
65 Ministère de la Culture et de la Communication, Partager notre patrimoine culturel, Propositions pour une charte de la diffusion et de la réutilisation des données publiques culturelles numériques, 2009, <http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/104000652/0000.pdf>.66 Circulaire du 26 mai 2011 relative à la création du portail unique des informations publiques de l'Etat « data.gouv.fr » par la mission « Etalab » et l'application des dispositions régissant le droit de réutilisation d e s i n f o r m a t i o n s p u b l i q u e s , < h t t p : / / w w w. l e g i f r a n c e . g o u v. f r / a f f i c h Te x t e . d o ?cidTexte=JORFTEXT000024072788&dateTexte=&categorieLien=id> (consultée le 27 août 2013).67 JEAN B., MAUREL L., DE FILIPPI P., CHARMET-ALIX A., Open GLAM groupe, Recommandations pour l’ouverture des données et des contenus culturels, rapport du groupe de travail «Open GLAM», <http://donneeslibres.info/openglamFR.pdf> (consulté le 27 août 2013).68 <http://www.data.gouv.fr/> (consulté le 27 août 2013).69 <http://www.etalab.gouv.fr/> (consulté le 27 août 2013).70 MAUREL L., «Des données culturelles à diffuser», owni.fr, 28 mars 2012, <http://owni.fr/2012/03/28/des-donnees-culturelles-a-diffuser-opendata-bnus/> (consulté le 27 août 2013).
d'enseignement et de recherche ainsi que pour les établissements, organismes ou
services culturels qui fixent, le cas échéant, leurs conditions de réutilisation de leurs
informations publiques. (...) Dans ce cas, une convention fixe les conditions de
réutilisation de ces informations.»71
Les établissements relevant du secteur culturel sont donc autorisés à soumettre
l’utilisation de leurs données publiques culturelles à des redevances. Ceci dit, cette
autorisation n’est possible que par le biais d’un décret72 et doit être «dûment justifiée
par des circonstances particulières»73. Cette exception explique le peu de données
culturelles présentes sur le portail «data.gouv.fr», mises à part celles versées par le
Ministère de la Culture74. En effet, la participation à «Etalab» étant facultative pour les
institutions culturelles ou de recherche, la liste de contributeurs est courte75. Seule la
Bibliothèque Nationale de France76 y contribue, et pour une partie de ses données
seulement77, en ayant cependant choisi volontairement de les placer sous la Licence
Ouverte d’Etalab78.
À la lumière de ces éléments, le groupe de réflexion OpenGLAM recommande
de modifier la circulaire du 26 mai 2011 dans le but de rendre obligatoire la mise à
disposition des données des établissements culturels sous tutelle de l’État, de
permettre la réutilisation gratuite de ces données et de «lui donner une portée
rétroactive pour soumettre à l’obligation de justifier devant le COEPIA de
«circonstances particulières» les redevances déjà instituées»79.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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71 Circulaire du 26 mai 2011 relative à la création du portail unique des informations publiques de l'Etat « data.gouv.fr » par la mission « Etalab » et l'application des dispositions régissant le droit de réutilisation d e s i n f o r m a t i o n s p u b l i q u e s , < h t t p : / / w w w. l e g i f r a n c e . g o u v. f r / a f f i c h Te x t e . d o ?cidTexte=JORFTEXT000024072788&dateTexte=&categorieLien=id> (consultée le 27 août 2013).72 Avis donné par le COEPIA (Conseil d'orientation de l'édition publique et de l'information administrative).73 Circulaire du 26 mai 2011.74 JEAN B., MAUREL L., DE FILIPPI P., CHARMET-ALIX A., Open GLAM groupe, Recommandations pour l’ouverture des données et des contenus culturels, rapport du groupe de travail «Open GLAM», <http://donneeslibres.info/openglamFR.pdf> (consulté le 27 août 2013).75 MAUREL L., «Des données culturelles à diffuser», owni.fr, 28 mars 2012, <http://owni.fr/2012/03/28/des-donnees-culturelles-a-diffuser-opendata-bnus/> (consulté le 27 août 2013).76 <http://www.data.gouv.fr/Producteurs/Bibliotheque-nationale-de-France> (consulté le 27 août 2013).77 <http://data.bnf.fr/> (consulté le 27 août 2013).78 JEAN B., MAUREL L., DE FILIPPI P., CHARMET-ALIX A., id.79 Id.
1.2.1.2. L’Open Data
Les institutions culturelles, bibliothèques, archives, et musées sont les
détenteurs du savoir de l’humanité et de notre patrimoine culturel. Internet leur offre la
possibilité de rendre accessible ce patrimoine culturel au monde entier en permettant
aux internautes, non seulement de profiter de ces trésors, mais aussi de se les
approprier, de les commenter et de les partager. En rendant leurs collections ouvertes
à travers le principe de l’Open Data, les institutions culturelles se peuvent se
positionner en tant que leaders d’un monde numérique, tourné vers le partage et le
libre accès, et ainsi, d’en tirer des bénéfices considérables.
1.2.1.2.1. Définition de l’Open Data80
Lorsque qu’une collection ou une oeuvre est dite «ouverte», cela signifie qu’elle
est conforme aux conditions établies par la définition du «Savoir Libre»81, proposée par
l’Open Knowledge Foundation82 : une donnée ou une œuvre est considérée comme
ouverte si n’importe qui est libre d’y accéder dans son intégralité, de préférence
gratuitement et sous un format ouvert, ne présentant pas d’obstacles techniques. Le
public est libre de l’utiliser, de la réutiliser et de la redistribuer, en autorisant les
modifications et les réalisations d’œuvres dérivées. L’attribution de l’œuvre doit être
explicitement spécifiée et son intégrité respectée. Cette licence ouverte ne peut en
aucun cas être discriminatoire, que ce soit envers un groupe de personnes, ou envers
un domaine en particulier. Enfin, la licence «ne peut être exclusivement attachée à un
ensemble ni restreindre la distribution d’autres œuvres que l’œuvre concernée».
L’Open Data est par conséquent «une démarche qui vise à rendre les données
publiques, accessibles et réutilisables par tous. Grâce à l’Open Data, des produits ou
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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80 Pour un guide pratique de ce qu’est l’Open Data, se référer au très complet Open Data Handbook, publié sur le site de l’Open Knowledge Foundation : <http://opendatahandbook.org/> (consulté le 27 août 2013).81 Texte complet de la «Définition du Savoir Libre» consultable sur le site de l’Open Knowledge Foundation à l’adresse suivante : <http://opendefinition.org/okd/francais/> (consulté le 27 août 2013).82 L'Open Knowledge Foundation est une association à but non lucratif de droit britannique promouvant la culture libre, en particulier les contenus libres et l'open data. Elle a été créée le 24 mai 2004 à Cambridge au Royaume-Uni : <http://okfn.org/> (consulté le 27 août 2013).
des services innovants peuvent être élaborés. C’est un vecteur de médiation, de
développement économique et de transformation de l’action publique»83.
L’Open Data est une notion qui est complexe, et il serait regrettable que la
problématique d’ouverture des contenus soit rejetée par la simple ignorance de ce
qu’elle représente. Clarifions donc la terminologie utilisée. Il faut faire une distinction
entre «données» et «contenus». Ce qui est du domaine de la donnée, comprend des
données «brutes et chiffrées (fréquentation d’une institution, statistiques diverses)». Ce
qui est du domaine du contenu, comprend le «contenu rédactionnel (dossiers
pédagogiques, notices d’œuvres, etc.) ou iconographie (numérisation ou photographies
d’œuvres)»84. C’est donc le terme de contenu qui prévaut pour notre étude de la
diffusion des collections muséales sur le Web.
1.2.1.2.2. L’Open Data pour le secteur culturel
L’Open Data, au sein du secteur culturel, s’entend comme la diffusion ouverte
des reproductions numériques des œuvres qui relèvent soit du domaine public, soit qui
appartient à une personne publique. Le groupe de réflexion OpenGLAM85, dans son
rapport, liste cinq points clés, identifiés comme étant les principaux enjeux qui se
posent dans le secteur culturel et qui nécessitent d’être pris en compte, clarifiés, et
d’être assimilés pour aller vers une redéfinition de la législation et des pratiques :
‣ «La méconnaissance des concepts et enjeux de l’Open Data au sein des
institutions culturelles
‣ Une volonté politique insuffisante, en France, en ce qui concerne la diffusion et de
la réutilisation des données culturelles sur Internet, à l’échelle internationale
‣ La complexité du cadre juridique relatif à la diffusion des données cultuelles
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83 Ministère de la Culture et de la Communication, Tutoriel de l'open data culture, Dailymotion, durée : 2’28, mise en ligne le 04.04.2013, <http://www.dailymotion.com/video/xyqrun_tutoriel-de-l-open-data-culture_news> (consulté le 27 août 2013).84 JEAN B., MAUREL L., DE FILIPPI P., CHARMET-ALIX A., Open GLAM groupe, Recommandations pour l’ouverture des données et des contenus culturels, rapport du groupe de travail «Open GLAM», <http://donneeslibres.info/openglamFR.pdf> (consulté le 27 août 2013).85 Le groupe OpenGLAM est un réseau informel de personnes et d’organisations cherchant à favoriser l’ouverture des contenus conservés ou produits par les institutions culturelles (GLAM : Galleries, Libraries, Archives, Museums – Bibliothèques, archives et musées). <http://openglam.org/france/> (consulté le 27 août 2013).
‣ L’importance d’une réaffirmation de la mission des institutions publiques dans la
diffusion et la réutilisation des données culturelles, a fortiori concernant les
œuvres du domaine public
‣ Les préoccupations économiques susceptibles d’entraver la diffusion et la
réutilisation des données culturelles»86
Les institutions culturelles sont ainsi invitées à faire appel à un usage innovant
d’Internet et des possibilités qu’il offre, en donnant la liberté aux utilisateurs de
s’approprier, d’utiliser et de réutiliser les contenus mis à leur disposition, en gardant à
l’esprit la notion d’interopérabilité.
«Il est important de garder à l’esprit qu’il ne suffit pas d’appliquer une licence
ouverte aux données et aux contenus. L’ouverture à la collaboration et à des nouvelles
formes de participation de l’utilisateur sont des problématiques incontournables à
prendre en compte si les institutions culturelles réalisent le potentiel d’Internet en
termes d’accès, d’innovation et de savoir numérique.»87
1.2.1.3. Les licences ouvertes
Un contenu initialement protégé par des droits de propriété littéraire ou artistique
(droits d’auteur ou droits voisins), placé sous une licence ouverte est mis à la
disposition de tous, sans restriction aucune. Il peut être réutilisable, reproductible et
redistribuable par tous88. Les licences ouvertes sont multiples et se développent de
plus en plus dans le paysage numérique actuel.
1.2.1.3.1. Creative Commons
Les licences Creative Commons sont, comme le formule Milad Doueihi, «un
produit de la culture juridique américaine et de sa confrontation avec l’ère numérique.
Ils reflètent la convergence de la pensée sur le domaine public (que l’on a tendance à
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86 JEAN B., MAUREL L., DE FILIPPI P., CHARMET-ALIX A., Open GLAM groupe, Recommandations pour l’ouverture des données et des contenus culturels, rapport du groupe de travail «Open GLAM», <http://donneeslibres.info/openglamFR.pdf> (consulté le 27 août 2013).87 OpenGLAM, Principles, <http://openglam.org/principles/> (consulté le 27 août 2013).88 Ministère de la Culture et de la Communication, “Licences ouvertes pour la mise à disposition des données culturelles”, CBlog, Le Labo du Numérique, 23 mai 2012, <http://cblog.culture.fr/2012/05/23/licences-ouvertes-pour-mise-a-disposition-donnees-culturelles> (consulté le 27 août 2013).
restreindre par des extensions abusives de la durée et des protections du copyright) et
des pratiques numériques émergentes.»89 L’intérêt de ces licences réside en ce
qu’elles ont été pensées au sein de la culture numérique car elles sont, de fait,
numériques. Elles permettent donc de repenser les problématiques de copyright en les
adaptant à l’environnement numérique actuel.
Le groupe Creative Commons90 a mis en place six licences originellement
conçues pour les œuvres de l’esprit protégées par le droit d’auteur. Elles se distinguent
entre elles par le niveau de liberté accordé aux usagers concernant la réutilisation de
l’œuvre :
Creative Commons - BY (Attribution) : l’œuvre peut être distribuée,
remixée, arrangée, et adaptée, y compris à des fins commerciales, à
condition que l’attribution de l’œuvre soit mentionnée. Il s’agit de la
licence la plus souple.
Creative Commons - BY - SA (Attribution - Partage dans les
Mêmes Conditions) : L’exploitation de l’œuvre est autorisée sous les
mêmes conditions que CC-BY. Elle peut être distribuée, remixée, arrangée, et adaptée,
y compris à des fins commerciales, à condition que l’attribution soit mentionnée et que
les œuvres dérivées soient soumises à la même licence que l’œuvre originale. Cette
licence est souvent comparée aux licences de logiciels libres, «open source» ou
«copyleft». C’est la licence utilisée par Wikipédia, elle est recommandée pour des
œuvres qui pourraient bénéficier de l’incorporation de contenu depuis Wikipédia et
d’autres projets sous licence similaire.
Creative Commons - BY-ND (Attribution - Pas de Modification) : La
redistribution est autorisée, à des fins commerciales ou non, à
condition que l’intégrité que l’œuvre soit respectée, et avec mention de l’attribution.
C’est la même licence que CC-BY, à la différence que la création d’œuvres dérivées
n’est pas autorisée.
Creative Commons-BY-NC (Attribution - Pas d’Utilisation
Commerciale) : L’exploitation de l’œuvre est autorisée sous les même
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89 DOUEIHI M., La Grande conversion numérique, Paris, Seuil, 2011, p.186.90 Voir une infographie créée à l’occasion des 10 ans de Creative Commons, traçant une chronologie des points clés de l’histoire du groupe : <http://owni.fr/2012/12/14/infographie%C2%A010-ans-de-creative-commons/> (consulté le 27 août 2013).
conditions que CC-BY. Elle peut être distribuée, remixée, arrangée, et adaptée, mais
uniquement pour des fins non commerciales.
Creative Commons - BY - NC - SA (Attribution - Pas d’Utilisation -
Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions) : L’exploitation
de l’œuvre est autorisée sous les même conditions que CC-BY-NC. Elle peut être
distribuée, remixée, arrangée, et adaptée, à des fins non commerciales, à condition
que l’attribution soit mentionnée et que les œuvres dérivées soient diffusées sous une
licence identique à l’œuvre originale.
Creative Commons - BY - NC - ND (Attribution - Pas d’Utilisation
Commerciale - Pas de Modification) : L’exploitation de l’œuvre est
autorisée sous les mêmes conditions que CC-BY-ND. Le téléchargement et le partage
est autorisé tant que l’attribution est mentionnée, mais seulement pour des fins non
commerciales. C’est la licence la plus restrictive des six licences principales.91
Une critique souvent formulée au sujet des licences Creatives Commons,
surtout au sujet de la dernière version (3.0), c’est le fait qu’elles ne gèrent que de façon
très limitée l’existence d’un droit sui generis pour les bases de données. Elles ne
permettent pas d’instaurer des restrictions ou des conditions supplémentaires (NC, ND
ou SA) concernant la réutilisation des bases de données placées sous une licence
Creative Commons, ou même des données contenues dans ces bases92.
1.2.1.3.2. Les licences de l’Open Knowledge Foundation
L’Open Knowledge Foundation a mis en place trois licences qui sont applicables
aux bases de données ainsi qu’aux données qu’elles contiennent :
1) Public Domain Dedication and License (PDDL)93 (Domaine public pour bases
de données et données): Les utilisateurs sont libres de partager (copier, distribuer
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91 Licences Creative Commons : <http://creativecommons.org/licenses/> (consulté le 27 août 2013).92 Ministère de la Culture et de la Communication, “Licences ouvertes pour la mise à disposition des données culturelles”, CBlog, Le Labo du Numérique, 23 mai 2012, <http://cblog.culture.fr/2012/05/23/licences-ouvertes-pour-mise-a-disposition-donnees-culturelles> (consulté le 27 août 2013).93 Guide d’utilisation de la licence ici : <http://opendatacommons.org/licenses/pddl/>, résumé ici : <http://opendatacommons.org/licenses/pddl/summary/>, texte complet ici : <http://opendatacommons.org/licenses/pddl/1.0/> (consulté le 27 août 2013).
et utiliser la base de données), de créer (produire de œuvres à partir de la base
de données) et d’adapter (modifier et transformer la base de données), sans
restriction aucune. Les données sont placées dans le domaine public avant la fin
de la période de protection régie par la loi. Les ayants-droits abandonnent leur
droit moral et rendent leurs données exploitables par le public sans aucune
restriction autre que celles spécifiées par la loi94.
2) Open Database Commons (ODC-by) (Attribution pour bases de données et
données)95 : Les utilisateurs sont libres de partager (copier, distribuer et utiliser la
base de données), de créer (produire de œuvres à partir de la base de données)
et d’adapter (modifier et transformer la base de données), à condition que
l’attribution soit mentionnée dans le cas d’une utilisation publique de la base de
données, ou d’œuvres crées à partir de la base de données, et que les œuvres
dérivées soient soumises à la même licence que l’œuvre originale.
3) Open Database License (ODC-ODbl) (Attribution et Partage aux Mêmes
Conditions)96 : Les utilisateurs sont libres de partager (copier, distribuer et utiliser
la base de données), de créer (produire de œuvres à partir de la base de
données) et d’adapter (modifier et transformer la base de données), à condition
que l’auteur de la base de données originale soit toujours mentionné et que toute
base de données dérivée soit mise à la disposition du public sous les mêmes
conditions établies par la licence originale.
Ces licences, qui reposent sur le modèle anglo-saxon du copyright, n’ont pas
pas été transposées en droit français. Elles peuvent toutefois être utilisées pour la
diffusion de données ou de bases de données, à conditions que ces dernières ne
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94 Ministère de la Culture et de la Communication, “Licences ouvertes pour la mise à disposition des données culturelles”, CBlog, Le Labo du Numérique, 23 mai 2012, <http://cblog.culture.fr/2012/05/23/licences-ouvertes-pour-mise-a-disposition-donnees-culturelles> (consulté le 27 août 2013).95 Guide d’utilisation de la licence ici : <http://opendatacommons.org/licenses/by/>, résumé ici : <http://opendatacommons.org/licenses/by/summary/> et texte complet ici : <http://opendatacommons.org/licenses/by/1.0/> (consulté le 27 août 2013).96 Guide pratique de la licence ici : <http://opendatacommons.org/licenses/odbl/>, résumé ici : <http://opendatacommons.org/licenses/odbl/summary/> et texte complet ici : <http://opendatacommons.org/licenses/odbl/1.0/> (consulté le 27 août 2013).
relèvent pas du droit moral. Les spécificités propres au droit français rendent toutefois
difficiles les transpositions de licences internationales97.
1.2.1.4. Le domaine public
«Le domaine public désigne l'ensemble des œuvres de l'esprit et des
connaissances dont l'usage n'est pas ou n'est plus restreint par la loi - soit qu’elles ne
sont pas couvertes par les droits de la propriété intellectuelle soit que ces droits ont
expiré (à l’exception des droits moraux qui sont imprescriptibles et inaliénables). Le
domaine public favorise ainsi la création d’œuvres nouvelles basées sur des œuvres
antérieures et facilite la préservation du patrimoine culturel pour les générations
futures : bibliothèques, musées, historiens, archivistes, enseignants - tous s’appuient
sur le domaine public pour recueillir, conserver et valoriser les œuvres du passé.»98 De
nombreuses institutions culturelles soumettent la diffusion et la réutilisation des œuvres
qu’elles conservent à des redevances. Cette restriction est une atteinte à l’intégrité du
domaine public en ce qu’elle surcharge l’œuvre d’une nouvelle protection juridique99.
La Commission européenne a déploré cette pratique qui va à l’encontre de documents
comme le Manifeste du Domaine public du réseau Communia100 ou encore la Charte
du Domaine Public d’Europeana101.
Si une institution souhaite instaurer des droits concernant une œuvre du
domaine public en respectant ces chartes, elle peut utiliser les outils suivants: le
Creative Commons Zero Public Domain, grâce auquel les données ne relèvent plus
d’aucun droit de propriété ou de reproduction et peuvent donc être utilisées par tous et
sans restrictions ; le Public Domain Mark (PDM), grâce auquel les œuvres peuvent être
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97 Ministère de la Culture et de la Communication, “Licences ouvertes pour la mise à disposition des données culturelles”, CBlog, Le Labo du Numérique, 23 mai 2012, <http://cblog.culture.fr/2012/05/23/licences-ouvertes-pour-mise-a-disposition-donnees-culturelles> (consulté le 27 août 2013).98 JEAN B., MAUREL L., DE FILIPPI P., CHARMET-ALIX A., Open GLAM groupe, Recommandations pour l’ouverture des données et des contenus culturels, rapport du groupe de travail «Open GLAM», <http://donneeslibres.info/openglamFR.pdf> (consulté le 27 août 2013).99 Id..100 Communia, Le Manifeste du Domaine Public, <http://www.publicdomainmanifesto.org/french>.101 Europeana, Charte du Domaine Public, avril 2010, <http://pro.europeana.eu/c/document_library/get_file?uuid=c1430394-0769-4434-ac58-52bbb5e1c816&groupId=10602>.
réutilisées par tous sans restriction aucune ; et enfin, les licences Creative Commons
placent, de fait, les œuvres sous domaine public102.
Le groupe OpenGLAM recommande aux organisations culturelles de «ne pas
soumettre la réutilisation d’oeuvres du domaine public numérisées à autorisation et à
redevance, y compris en cas d’usage commercial.»103 Quant à la Charte d’Europeana,
elle précise également que réclamer des droits de reproduction sur des œuvres
tombées dans le domaine public est une mauvaise stratégie104, et que pour aider les
institutions à déterminer si une œuvre fait partie du domaine public ou non, le
Kennisland Institute for Information Law et la Bibliothèque Nationale du Luxembourg
ont développé en collaboration un calculateur du domaine public105.
Ces exemples d’évolution des réglementations juridiques autour des
problématiques du domaine public et de l’ouverture des données montrent que le Web
d'aujourd'hui est placé sous le signe de l’ouverture. En ce qui concerne la diffusion des
œuvres numérisées, les musées devront prendre en compte ces nouvelles
problématiques et adapter leur politique sur la reproduction numérique des œuvres.
1.2.2. Aspects techniques
1.2.2.1. Design de la page Web : muséographie et
scénographie en ligne
1.2.2.1.1. Web design
Le site Web du musée est le premier endroit sur lequel le visiteur va aller
chercher des informations. Il doit être le reflet de ce qu’est l’institution, de ses valeurs
et des trésors qu’elle renferme. Si le musée est pensé en termes muséographiques, si
l’agencement de ses salles est conçu par des architectes et des scénographes, alors la
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102 Institute for Information Law, Bibliothèque nationale de Luxembourg, Kennisland & Europeana, The Europeana Licensing Framework, 03 July 2005, p.10, <http://pro.europeana.eu/documents/858566/7f14c82a-f76c-4f4f-b8a7-600d2168a73d> (consulté le 27 août 2013).103 JEAN B., MAUREL L., DE FILIPPI P., CHARMET-ALIX A., Open GLAM groupe, Recommandations pour l’ouverture des données et des contenus culturels, rapport du groupe de travail «Open GLAM», <http://donneeslibres.info/openglamFR.pdf> (consulté le 27 août 2013).104 Institute for Information Law, Bibliothèque nationale de Luxembourg, Kennisland & Europeana, Ibid.105 Ce calculateur de domaine public peut être utilisé à cette adresse : <www.outofcopyright.eu> (consulté le 27 août 2013).
page Web doit elle aussi être créée par des scénographes et des architectes du
Web106.
Le terme «Web design» est un anglicisme qui se compose de deux mots, le
«Web» qui se traduit littéralement par «toile» et le «design» qui signifie «conception».
Le Web design est donc l’action de «créer sur la toile». Plus largement, il s’agit
d’appliquer des notions de graphisme à la construction d’une page Web. L’art du
design se préoccupe de l’intégration harmonieuse des objets dans un environnement
et de leur utilisation, mêlant esthétique et ergonomie107. Le Web Design consiste donc
à concevoir une interface Web qui soit harmonieuse, ergonomique et utile.
La conception de sites Web se fait en respectant des normes de construction et
de rendu des pages Web, entre autres le HTML et le CSS, et d'autres technologies
pour les applications Web (les «WebApps»). Le HTML (Hypertext Markup Language) et
le CSS (Cascading Style Sheets) constituent les bases de la construction de la
structure et de l’agencement visuel d’une page Web108. Les standards Web sont
continuellement renouvelés et repensés par des communautés comme le W3C qui
publie ses recherches109.
L’esthétique du site consistera donc à mettre en place une certaine harmonie en
atteignant plusieurs objectifs :
‣ Équilibrer les espaces et les textes
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45
106 Pour le professionnel de la culture qui souhaite en apprendre plus sur l’intérêt d’une interface numérique design il existe plusieurs organismes et associations de professionnels qui organisent des cycles de conférences et des formations. Il existe entre autre *designers interactifs*, une organisation professionnelle créée en 2006, regroupant 750 professionnels travaillant dans le champ du design interactif en France et à l’International (www.designersinteractifs.org). Ainsi que l’APCI, association créée en 1983 dont la mission est de valoriser et faire connaître les métiers du design et leur évolution. Elle accompagne les entreprises dans leur stratégie d’innovation, conseille les organismes publics, promeut le design et l’innovation française à l’international, et bien d’autres activités (www.apci.asso.fr). Source : APCI, designers interactifs, Le design des interfaces numériques en 170 mots-clés : Des interactions Homme-Machine au design interactif, Paris, Dunod, 2013.107 Encyclopédie Larousse.108 Web Design Standards, HTML & CSS, W3, <http://www.w3.org/standards/webdesign/htmlcss> (consulté le 27 août 2013).109 Le World Wide Web Consortium (W3C) est une communauté internationale au sein de laquelle les membres, une équipe à plein temps et le public, travaillent ensemble au développement de standards Web. Dirigé par l'inventeur du Web, Tim Berners-Lee et le chef de la direction Jeffrey Jaffe, la mission du W3C est de mener le Web à son plein potentiel. About W3C : <http://www.w3.org/Consortium/> (consulté le 27 août 2013).
‣ Instaurer une cohérence entre les couleurs et la typographie110
‣ Intégrer une iconographie qui soit pertinente
‣ Hiérarchiser l’information.
L’amélioration de l’expérience vécue par l’utilisateur dépend de la réalisation de ces
objectifs111.
L’esthétique et l’ergonomie de la page Web va ainsi permettre à l’internaute
d’apprécier la navigation sur l’interface. La facilité d’utilisation de la page Web sera
favorisée par le choix des couleurs, de la typographie et de la hiérarchisation de
l’information. Ainsi, le message passera mieux avec un design interactif et agréable.
Des collections muséales présentées sur une interface qui allie design simple et fluidité
auront une valeur ajoutée, et transmettront ainsi une image positive et engageante de
l’institution. Le design de la page Web a un impact immédiat sur la perception que le
visiteur va avoir de l’institution. Un Web design soigné permettra de gagner la
confiance de l’utilisateur ainsi que sa fidélité. Il est donc essentiel que les institutions
culturelles qui souhaitent diffuser leurs collections sur le Web, le fassent par
l’intermédiaire d’une interface au design irréprochable, qui respecte aussi la
muséographie et la scénographie in-situ, pour assurer une cohérence dans leur
stratégie numérique112.
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110 Steeve Jobs a donné un discours en 2005 lors de la cérémonie de remise des diplômes à l’université de Stanford dans lequel il revient sur son parcours et où il parle justement de typographie. Il en parle en ces termes «Reed College at that time offered perhaps the best calligraphy instruction in the country. Throughout the campus every poster, every label on every drawer, was beautifully hand calligraphed. Because I had dropped out and didn't have to take the normal classes, I decided to take a calligraphy class to learn how to do this. I learned about serif and san serif typefaces, about varying the amount of space between different letter combinations, about what makes great typography great. It was beautiful, historical, artistically subtle in a way that science can't capture, and I found it fascinating.». La transcription complète et la vidéo de son inspirant discours sont consultables ici : <http://news.stanford.edu/news/2005/june15/jobs-061505.html> (consulté le 27 août 2013).111 BOCQUILLON J., «Le webdesign, définition et objectifs», Blog du Webdesign, magazine collaboratif des créatifs, 30 novembre 2010, <http://www.blogduwebdesign.com/tendance/le-webdesign-definition-et-objectifs/270> (consulté le 27 août 2013).112 Le site Web Design Inspiration recense des sites Web au design inspirant par catégories d’industries, de types, de couleurs et de styles : <http://www.webdesign-inspiration.com/web-designs/industry/culture>. Deux sites de musées sont donnés en exemple dans la catégorie culture : le site de l’Austrian Museum of Applied Arts, <http://www.mak.at/en/mak_now> et le Mint Museum, NC, <http://www.mintmuseum.org/> (consultés le 27 août 2013).
1.2.2.1.2. Web mobile
Le Web, nous l’avons vu, est en constante évolution et revêt aujourd’hui un
visage nouveau, que ce soit en termes de stratégie centrée sur l’utilisateur ou de
design. Les pages Web doivent donc s’adapter aux nouvelles tendances et aux
nouveaux usages. Une des tendances essentielles d’aujourd’hui est l’utilisation des
supports mobiles, smartphones et tablettes, pour se connecter au Web. Selon une
étude statistique de Comscore, les usagers utilisant un support mobile sont au nombre
de 240 millions en Europe des cinq (France, Allemagne, Royaume-Uni, Italie et
Espagne)113 (Fig.6, p.8). En outre, on compte qu’un tiers des usagers utilisant un
terminal mobile ont moins de 35 ans. En France, 53% des résidents ont un
smartphone. Ils sont 66% en Espagne, 64% au Royaume-Uni, 51% en Allemagne et
53% en Italie114 (Fig.7, p.8). Ethan Marcotte, Web designer et développeur115, auteur
d’un ouvrage sur le Responsive Web design, nous dit qu’«on estime que les appareils
à petit écran seront la forme prédominante d’accès au Web d’ici quelques années (...).
Ces derniers temps, les tablettes ont de plus en plus la cote et sont un mode d’accès
au Web qui n’est ni complètement «mobile» ni complètement «bureau», mais quelque
part entre les deux. (...) Nous devons nous adapter à plus d’appareils, de modes de
saisie, de résolutions que jamais. Le Web a quitté le bureau, et il n’est pas près d’y
retourner.»116
Ces dernières années, le W3C a développé un certain nombre de technologies
Web qui prennent en compte les spécificités et les besoins des supports mobiles :
‣ Le CSS Mobile, une version du CSS qui répond aux besoins des auteurs de
pages Web mobiles.
‣ Le SVG Tiny, un format de graphiques vectoriels pour le Web adapté aux
capacités des appareils mobiles.
‣ Le XHTML pour mobile, qui définit un sous-ensemble de XHTML pour le mobile.
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113 COMSCORE, «France Digital Future in Focus, Tendances Clés du Digital en France et leur Impact pour l’Avenir, mars 2013, p.13, <http://www.audit-redac-web.com/IMG/pdf/comScore-2013-France-Digital-Future-in-Focus.pdf> (consultée le 27 août 2013).114 Id.115 Profil en ligne d’Ethan Marcotte : <http://ethanmarcotte.com> COMSCORE, «France Digital Future in Focus, Tendances Clés du Digital en France et leur Impact pour l’Avenir, mars 2013, <http://www.audit-redac-web.com/IMG/pdf/comScore-2013-France-Digital-Future-in-Focus.pdf> (consulté le 27 août 2013).116 MARCOTTE E., Responsive Web design, Paris, Eyrolles, 2011, p.6.
La dernière génération de navigateurs mobiles utilisent les technologies Web les plus
avancées, y compris des fonctionnalités comme le HTML5, le CSS 2.1 et 3117.
Lors d’une visite au musée, il n’est plus étonnant d’utiliser son smartphone ou sa
tablette, que ce soit pour vérifier une information manquante sur Wikipédia ou pour
utiliser les réseaux sociaux afin de rendre compte de sa visite. Les appareils mobiles
sont devenus une composante essentielle de notre quotidien et il en va de même pour
la visite muséale. L’institution culturelle aura tout intérêt à s’adapter à ces nouvelles
pratiques. Il est particulièrement désagréable pour l’utilisateur de naviguer sur un site
Web non adapté en version mobile. Les textes sont à peine lisibles, les images
s’affichent très mal et il faut utiliser son zoom pour pouvoir déchiffrer les informations.
La recherche de données est donc beaucoup plus longue et laborieuse. L’utilisateur se
désintéresse de sa recherche et l’abandonne. Un site Web adapté en Responsive Web
design permettra à l’internaute de naviguer sur la page de façon optimale, sans avoir à
utiliser les outils de défilement et de zoom118.
Les institutions culturelles auront donc compris la nécessité d’adapter leur site
Web actuel et toutes les pages Web qui leur sont liées, à l’utilisation des supports
mobiles pour naviguer sur le Web.
1.2.2.2. Traitement de l’image
1.2.2.2.1. Formats et métadonnées
Les institutions culturelles souhaitant mettre en place un projet de diffusion de
leurs collections en ligne doivent être conscientes des enjeux techniques à respecter
en termes de traitement de l’image et notamment ceux concernant les questions de
formats et de métadonnées.
Nous savons que le numérique est un domaine en constante évolution et que la
question des formats est toujours remise en cause. Les professionnels des musées se
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117 W3, Mobile Web, <http://www.w3.org/standards/webdesign/mobilweb> (consulté le 27 août 2013).118 On peut voir ici des exemples de sites Web refaits en Responsive Web design lors de la responsive Museum Week (Fig.8, p.8). Source : <http://responsivemuseum.com/fr/index.html>. L’initiative Responsive Museum Week : Geoffrey Dorne et Julien Dorra, deux technophiles et visiteurs de musées tristes de voir des sites de musées récents qui ne fonctionnent pas sur mobile, ont mis en place l’initiative Responsive Museum Week. Ils ont eu l’idée d’organiser une semaine pendant laquelle les utilisateurs de musées refont le web design des sites de musée, pour les rendre plus r»esponsive», plus mobiles, plus CSS3. Selon eux, «repenser les musées, c’est *aussi* remixer leurs sites web.»
rappelleront certainement du passage de la disquette au CD-Rom. Cependant, les
données stockées sur ces CD-Roms ne seront plus lisibles au bout d’une dizaine
d’années. Or, les institutions culturelles ont tendance à rechercher des supports
pérennes et fiables. Il est nécessaire de se rendre à l’évidence que les supports
numériques ne proposeront jamais ce genre de garanties, car ils sont de fait, matériels.
Cependant, l’arrivée du cloud computing et du Peer To Peer, garantie la conservation
des données de façon nouvelle et sécuritaire, de part la très forte redondance qu’ils
garantissent. Mais au sein d’un l’établissement, la question demeure de savoir
comment convertir les œuvres numériques pour qu’elles soient accessibles malgré la
rapidité des changements de systèmes et de formats, ou encore, comment élaborer un
procédé de dénomination qui restera cohérent à travers les archives et les réseaux.119
Au mieux donc, en termes de formats, il faudra en privilégier un qui soit d’abord ouvert.
Ce type de format fait appel à des logiciels relevant de licences ouvertes120 et dont la
documentation et le partage sont librement et gratuitement disponibles. Les formats
recommandés et utilisés largement par un grand nombre de personnes, sont
normalisés si possible, et indépendants (notamment des autres formats et des plate-
formes)121.
Un autre élément à prendre en compte dans le traitement des données
culturelles est l’absence d’informations sur les métadonnées. Celles-ci sont à la base
des techniques du Web sémantique. Elles sont définies dans le cadre du modèle
Resource Description Framework (RDF)122. La définition la plus répandue est la
suivante : une métadonnée est une donnée qui définit et décrit une autre donnée. Le
terme est assez récent mais la pratique existe depuis longtemps, notamment dans les
bibliothèques, avec les fiches et notices documentaires123.
Par exemple, ce sont les informations jointes à une photographie : les
caractéristiques techniques, le lieu où la photo a été prise, etc. Ces informations sont
donc d’une grande importance pour pouvoir référencer une œuvre numérique sur le
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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119 DOUEIHI M., La Grande conversion numérique, Paris, Seuil, 2011, p.237.120 Cf. 1.2.1.3. Les licences ouvertes, p.39.121 MOUFFLETJ.-F., Introduction au module Technologies Numériques, Institut National du Patrimoine, Module Technologies Numériques, 24 janvier 2013.122 Wikipédia, Métadonnée, <http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9tadonn%C3%A9e> (consulté le 27 août 2013).123 Archives de France, rubrique gérer les archives > Normes et standards > Métadonnées, <http://www.archivesdefrance.culture.gouv.fr/gerer/archives-electroniques/standard/metadonnees/> (consulté le 27 août 2013).
Net. Si une médatonnée n’a pas été archivée avec l’œuvre correspondante, nous
risquons de ne pas la retrouver et donc de ne pas pouvoir la lire ou la comprendre. Il
existe déjà des normes et des standards de gestion des métadonnées, notamment le
METS124 et le PREMIS125.
L’institution culturelle ayant pour projet de diffuser des reproductions de ses
collections sur le Web aura donc tout intérêt à respecter ces normes et standards de
formats et le traitement des métadonnées pour assurer le succès et la pérennité de son
projet.
1.2.2.2.2. Image Haute Définition
Il faut garder à l’esprit qu’une œuvre a le dessein d’être montrée, vue, admirée,
regardée. Le médium qui nous intéresse ici est la reproduction numérique d’une image.
Si l’on veut respecter la «raison d’être» de l’œuvre, il faut réussir à mettre à disposition
sa reproduction dans les meilleures conditions possibles. Cela implique de respecter
une qualité d’image qui soit optimale. Peu importe le support de présentation de
l’œuvre, il y aura toujours des éléments qui viendront perturber sa présentation. Même
sur les murs d’une salle de musée, la perception de l’œuvre sera nécessairement
modifiée par l’éclairage. Ce qui nous intéresse ici, ce sont les éléments qui pourraient
perturber la perception de l’œuvre à travers un écran.
En ce qui concerne la qualité de l’image, la haute définition (HD) est au centre
des problématiques technologiques d’aujourd’hui. La haute définition est de plus en
plus utilisée avec les matériels de tournage, de montage, de diffusion et de lecture,
même destinés aux non-professionnels126.
Il faudra donc être particulièrement attentif au traitement de l’image, au
contraste, à la colorimétrie, la netteté, au grain, etc. Attention donc à la compression
qui dégrade la qualité de l’image.
Il est donc recommandé aux institutions détentrices des œuvres de tenir compte
des problématiques techniques du Web, et de conserver leurs reproductions
numériques en très haute résolution et dans un format non-compressé (Fig.9, p.8).
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124 Cf. Lexique. Archives de France, rubrique gérer les archives > Normes et standards > Métadonnées, <http://www.archivesdefrance.culture.gouv.fr/gerer/archives-electroniques/standard/metadonnees/> (consulté le 27 août 2013).125 Id.126 DALBÉRA J.-P., «Institutions culturelles et technologies numériques», in Culture et Numérique, Actes du 5e colloque interdisciplinair Icône-Image, Musée de Sens, Obsidiane, Sens, 2009, p.74.
Le Web d’aujourd’hui, espace de liberté et de création, est en pleine expansion.
Les anciens usagers deviennent des créateurs qui communiquent entre eux et se
partagent des informations. La maîtrise des outils numériques se développe, et bientôt
nous ne parlerons plus de cette fameuse «fracture numérique». Plusieurs
problématiques majeures s’impose aux institutions culturelles vis à vis du Web
d’aujourd’hui. Les principales concernant le domaine public et l’ouverture des données.
Dans le cadre de la diffusion numérique de leurs collections, les établissements doivent
saisir l’importance des nouvelles pratiques du Web pour les intégrer à la conception de
leur stratégie numérique.
Les musées ne sont pas étrangers aux technologies numériques pour autant, ils
ont d’ailleurs, une longue histoire en commun. Celle-ci s’illustre dans la conception de
sites Web de musées et de bases de données des collections. Le musée a donc déjà
expérimenté et continue d’expérimenter l’environnement virtuel. Mais alors, quel a été
et quel est leur usage ? Quelles leçons en tirent-ils ?
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2. Musées et
virtualité Les musées et les technologies numériques ne sont pas deux entités si
étrangères l’une de l’autre. Bien au contraire, dès l’arrivée du numérique, le
musée a cherché, lui aussi, à faire partie de ce nouvel environnement. Des bornes
multimédia, en passant par les CD-Roms jusqu’au site Internet, les musées ont
expérimenté le numérique. Cette appropriation a néanmoins été lente et difficile.
Aujourd’hui les musées se tournent vers une présence active sur le Web et une
diffusion numérique de leurs collections. Mais qu’est-ce-qu’implique une
présence sur le Web ? Qu’en est-il de la dématérialisation de la médiation et de
l’espace virtuel ? Comment le musée se positionne-t-il dans cet espace ? Quid de
son utilisation du Web participatif ? Et enfin, de quelles manières les collections
sont-elles présentes en ligne ? Cette deuxième partie s’attachera à répondre à ces
questions afin d’avoir une vision claire de la présence des collections et des
musées sur la Toile, et pour tenter de l’améliorer.
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2.1. Appropriation des technologies numériques par les
institutions culturelles : des prémices à la notion d’espace
virtuel
2.1.1. Prémices
2.1.1.1. L’informatisation des musées
La genèse de l’appropriation des technologies numériques par les musées
commence par leur informatisation, avec l’arrivée des premiers ordinateurs dans
l’organisation du travail, et notamment dans la gestion des collections.
Les années 1960 ont été marquées par la montée d’un sentiment patrimonialiste
et de redécouverte de la culture127. Les musées ont donc été touchés par ce
mouvement et ont dû répondre vite et efficacement à une demande d’accès au
patrimoine culturel. En outre, les musées devaient également faire face à un nouveau
genre de public, celui qui découvrait la télévision. Cette génération avait désormais
besoin d’accéder à l’information de manière rapide et présentée d’une façon moderne,
les musées devait eux aussi s’inscrire dans l’air du temps. Ils étaient vus comme les
garants du patrimoine culturel universel et avaient ainsi un devoir de responsabilité
envers leur public en termes de gestion de l’information et de la communication. Devoir
qui n’était alors pas raisonnablement atteignable, au vu des moyens matériels qui leurs
étaient alloués.
Les premiers essais d’informatisation des musées furent entrepris aux États-
Unis dans les années 1960. L’informatique coûtant très cher à l’époque, la tendance
voulait que seuls les grands musées pouvaient justifier de l’utilisation d’ordinateurs, et il
est assez amusant de noter que cette même croyance reste ancrée au XXIe siècle. En
effet, les premiers ordinateurs utilisés dans des institutions culturelles étaient assez
encombrants, coûteux, et nécessitaient l’intervention des meilleurs programmeurs et
ingénieurs128. Aussi laborieuse et compliquée qu’était leur utilisation, ces ordinateurs
étaient tout de même perçus comme des outils révolutionnaires voire même magiques.
Les employés du musée voyaient les ordinateurs comme des «cornes d’abondance
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127 WILLIAMS D., «A brief history of museum computerization», in Ross PARRY, Museums in a Digital Age, London, Routledge, 2010, p.16.128 Id., p.17.
électroniques, regorgeant de remèdes pour tous les maux du musée.»129 Outre les
opérations administratives et financières, les premiers programmes informatiques
furent conçus et utilisés en masse pour la gestion et l’inventaire des collections. Cette
première informatisation des musées fut un succès en termes d’efficacité et de gain de
temps dans la gestion des collections, pour les musées qui pouvaient financièrement
se permettre d’entreprendre de tels projets.
Dans les années 1970, une nouvelle génération de mini-ordinateurs fit son
apparition130. Moins coûteux et plus faciles d’utilisation, ils permirent aux plus petits
musées d’entrer dans l’ère informatique. Ils demeuraient cependant des outils qui
nécessitaient une certaine maîtrise de l’informatique et beaucoup de musées ont vu
leurs projets échouer par manque de maîtrise de ces outils. Tous les projets n’ont
cependant pas échoué, les programmes de gestion et d’inventaire de collections
s’étaient améliorés et certains musées commençaient à intégrer des outils
informatiques dans leurs expositions. Durant cette période, des publications sur la
gestion informatisée des collections ainsi que des conférences organisées par les
musées eux-mêmes se multiplient, ces dernières étant bien souvent fréquentées par
ceux impliqués dans des projets d’informatisation131.
Les années 1980 furent celles de la prolifération des micro-ordinateurs, encore
plus simples d’utilisation et moins coûteux que les deux précédents types
d’ordinateurs. Cette nouvelle génération ne nécessitait pas l’intervention de
programmeurs de très haut niveau. Avec la possibilité pour tous les musées de se
doter de ces outils, les institutions culturelles entraient donc bel et bien dans l’ère
informatique132.
Au départ perçu comme un simple outil de travail, l’outil informatique va devenir
un outil numérique de communication et de médiation.
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129 WILLIAMS D., «A brief history of museum computerization», in Ross PARRY, Museums in a Digital Age, London, Routledge, 2010, p.17.130 Id., p.18.131 Ibid., p.19.132 Ibid., p.20.
2.1.1.2. L’arrivée du numérique au musée
L’arrivée de la technologie multimédia au musée s’est traduite par l’utilisation de
CD-Roms et d’audioguides ainsi que par l’installation de bornes interactives dans les
années 1980-1990. Gill décrit la notion de multimédia comme un programme
informatique pour l’éducation et/ou le divertissement qui autorise une navigation non
linéaire et interactive à travers le contenu et comprend au moins trois de ces éléments :
du texte, des images fixes, des images animées, du son et de la vidéo133. Bien que la
relation culture et nouvelles technologies ait été mouvementée et difficile, les musées
français ont été très réactifs à l’arrivée du numérique, avec notamment l’arrivée des
bornes interactives au musée d’Orsay en 1986. Ces bornes seront d’ailleurs un échec
pour le musée qui aura du mal à refaire confiance au numérique. L’arrivée du
multimédia n’est pas particulièrement saluée par la communauté muséale et bien des
ouvrages contesteront son usage. Cette critique est notamment formulée dans
l’ouvrage collectif publié par André Gob et Noémie Drouguet134. L’argument avancé est
que musées et écrans ne font pas bon ménage.
En France le musée d’Orsay et la Cité des Sciences et de l’Industrie furent les
pionniers avec la mise à disposition pour les visiteurs de bornes interactives et de
banques de données135. Quant à la production de CD-Rom, la RMN mena la marche
en devenant éditeur de CD-Roms, avec par exemple, la co-production du CD-Rom
«Peintures et Palais» du Louvre et des éditions Montparnasse Multimédia en 1994136.
Avec le genre ludo-culturel, qui connut une grande notoriété dans les années 1990 en
France, les musées développèrent des jeux de mystère et d’aventure sur CD-Roms.
C’était le cas, par exemple, des CD-Roms en co-édition avec la Réunion des Musées
Nationaux «Versailles, complot à la cour du Roi Soleil», ainsi que «l’Égypte, 1156 avant
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133 GILL T., "What is multimedia?", MDA Fact Sheet 42, Multimedia, Cambridge, Museums Documentation Association, 1995, pp1-7. Cité dans : SABIN Richard, «Museums and their Websites: An Examination and Assessment of How Museums are Coping with the Challenge of the World Wide Web», Journal of Conservation and Museum Studies, 2:6-10, 1997, <http://dx.doi.org/10.5334/jcms.2972>134 GOB A., DROUGUET N., La muséologie. Histoire, développements, enjeux actuels, Paris, A. Colin, 2006.135 ALCAUD D., ARMAOS G., BENITO L., et al, Politique et musées, Paris, l'Harmattan, 2002, p.240.136 Id.
Jésus-Christ, l’énigme de la tombe royale», ou encore la collection «Artus» produite
par la Réunion des Musées Nationaux137 .
Passé le temps des CD-Roms interactifs, les musées s’emparèrent du World
Wide Web.
2.1.1.3. Premiers pas sur le Web
Les premiers sites Web de musées apparaissent dans les années 1994-1995.
«Vitrines de leurs activités», ils ne proposent que quelques renseignements et une aide
à la visite, accès, horaires, tarifs, œuvres phares, etc. Ils étaient donc pensés comme
des «plateformes de publication», des «brochures virtuelles»138. C’était par exemple le
cas de la Tate dont le site a été lancé en 1998. John Stack, le directeur de la Tate
Online explique lors d’une interview que les premiers sites Internet étaient créés par les
services numériques des musées, et ces derniers étant quelque peu livrés à eux-
mêmes, les sites souffraient d’un manque crucial de contenu interactif139.
Toutefois, dès la fin des années 1990, les sites Web des musées devinrent plus
interactifs, en proposant des parcours thématiques et des visites 140. Déjà en 1994, le
site Web du Ministère de la Culture montre l’exemple. Le musée des Arts et Métiers se
positionne également en tant que précurseur, avec la mise en ligne du catalogue des
collections. «Le site dépasse déjà la simple vitrine. La dimension pédagogique est
pleinement intégrée, à l’image des débuts sur le Web de bien des musées des
sciences et techniques ensuite.»141
Geneviève Vidal écrivait en 2006 que, malgré les efforts fournis par les musées
pour créer une présence en ligne qui soit interactive, «l’expérience de musée virtuel
n’est pas encore convaincante et plus globalement l’ensemble de l’offre en ligne du
secteur muséal est en deçà de ce que l’on pourrait attendre de l’apport des
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137 VIDAL G., Contribution à l’étude de l’interactivité, les usages du multimédia au musée, Presses Universitaires de Bordeaux, 2006, p.68-69.138 CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.35.139 Id., p.36. John Stack, directeur de la Tate online, explique son point de vue lors d’une interview accordée à Rui Guerra d'INTK en avril 2012, interview à voir à cette adresse : http://www.intk.com/.140 ALCAUD D., ARMAOS G., BENITO L., et al, Politique et musées, Paris, l'Harmattan, 2002, p.240.141 SCHAFER V., THIERRY B., COUILLARD N., «Les musées, acteurs sur le Web», La Lettre de l’Ocim, n°142, “Les musées et Internet”, juillet-août 2012, p.7.
technologies multimédias interactives.»142 En matière d’interactivité, les musées font
des efforts en proposant des visites virtuelles, qui n’étaient en fait formées que
d’images fixes et de textes. Il y a quelques années encore, les sites Web des musées
ne proposaient pas non plus de sons ou de musique143. Pourtant «l’interactivité, sans
être pour autant primordiale, participe néanmoins indirectement à la mission de service
public de diffusion du patrimoine et des connaissances»144.
Loin de ces tribulations initiales, le Net est désormais devenu une réalité du
musée, une condition sine qua non. Le site Web d’un musée est sa vitrine, c’est la
première chose qu’un visiteur recherche et les musées l’ont bien compris. Pour donner
un exemple récent, avant même que les portes du Louvre-Lens soient ouvertes au
public, son site Internet, lui, mettait à jour l’actualité du musée et l’avancée du chantier.
Si le musée a pris du temps pour s’approprier le Web comme nouvel espace de
représentation, c’est aussi parce que l’espace virtuel est difficile à cerner du fait de son
aspect éthéré. Intéressons-nous alors à ce fameux espace virtuel, et à ce qu’il
implique.
2.1.2. L’espace muséal virtuel
2.1.2.1. Réflexions sur la notion de «musée virtuel»
Lorsque l’on mène des recherches sur les musées et la virtualité, un terme
devient récurrent, celui de «musée virtuel». Quel est véritablement le sens de ce terme
et représente-t-il une menace pour le musée «réel» ?
Selon Bernard Deloche, la notion de musée virtuel est souvent détournée, «la
question du musée virtuel est généralement comprise comme étant celle de la
concurrence faite aux musées institutionnels par les nouvelles technologies de
l’information et de la communication». Il ne faut pas confondre musée virtuel et
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
57
142 VIDAL G., Contribution à l’étude de l’interactivité, les usages du multimédia au musée, Presses Universitaires de Bordeaux, 2006, p.37.143 Id., p.65.144 Ibid., p.66.
concurrence des nouveaux médias, il faut définir clairement ce qu’on entend par
virtuel145.
Le musée virtuel ne manque pas de synonymes, il peut être tour à tour musée
en ligne, musée électronique, hypermusée, musée numérique, cybermusée ou musée
sur la Toile selon l’environnement du professionnel ou du chercheur œuvrant dans ce
domaine146. L’exploitation par le musée dans les années 1990 des ressources
multimédias, CD-Roms, DVD, Internet, a conduit à l’appellation de «cybermusée»,
terme cependant non adéquat. «Cybermusée signifie en effet musée cybernétique ou
musée existant par le relais des machines à information»147. Cette acception désignait
alors les «musées virtuels» sur CD-Roms, conçus dans les années 1990. Les CD-
Roms se multiplièrent, proposant des visites virtuelles de musées existants tels que le
Louvre ou encore le musée de l’Ermitage. Ces CD-Roms n’avaient pas pour but de
simuler en 3D l’espace physique de ces musées, à l’exception du CD-Rom du musée
d’Orsay. Ils mettaient plutôt l’accent sur une sélection de chefs-d’œuvres de la
collection, tout en proposant des informations sur leur contexte148.
Les termes de musée électronique ou d’hypermusée sont plutôt dépassés alors
que le plus employé reste celui de musée virtuel, il s’agit bien ici du «musée en ligne».
Le mot «virtuel» ne désigne pas nécessairement un univers numérique, c’est un terme
bien plus ancien que la création du Web. Du latin virtualis, qui signifie «qui n’est qu’en
puissance», issu lui-même du latin virtus, ce qui est virtuel désigne ce «qui possède,
contient toutes les conditions essentielles à son actualisation»149. «Ainsi compris, le
virtuel ne désigne ni l’irréel, ni le numérique, ni l’image de synthèse. Il n’est que du réel
«en puissance d’être actualisé» (...). On qualifiera aussi de virtuel, le halo des solutions
parallèles apportées à un problème donné. S’il est naturellement possible d’appliquer
ce concept au musée, il apparaît à l’évidence qu’il ne se superpose en aucun cas à
l’idée d’un musée qui reposerait sur des supports numériques»150. Le virtuel n’est donc
pas en soi un terme désignant l’univers numérique, mais simplement une reproduction
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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145 DELOCHE B., La nouvelle culture. La mutation des pratiques sociales ordinaires et l’avenir des institutions culturelles, Paris, L’Harmattan, 2007, p.160-161.146 SCHWEIBENZ W., «L’évolution du musée virtuel», Les Nouvelles de l’ICOM, n° 3, 2004, p.3.147 DELOCHE B., Op. cit., 2007, p.161.148 HUHTAMO E., «On the Origins of the Virtual Museum», in R. Parry, Museums in a digital age, London, Routledge, 2010, p.122.149 Portail lexical du CNRTL, définition de «virtuel», http://www.cnrtl.fr/definition/virtuel.150 DELOCHE B., Op. cit, 2007, p.162.
de l’univers réel. En ce sens, le musée virtuel ne représente pas une menace pour le
musée réel mais simplement une version décuplée et actualisable de celui-ci. Il
apparaît finalement comme une solution à la préservation d’une mémoire et d’un
patrimoine collectifs.
Cette réflexion nous rapproche de l’entreprise célèbre de Malraux à propos de
son musée imaginaire présentée en 1947151. Le questionnement de Malraux sur le rôle
traditionnel de l’institution muséale reposait sur le développement de la photographie.
Les reproductions photographiques d’œuvres d’art ont en effet rendu ces dernières
accessibles à un public qui ne se serait jamais déplacé au musée. L’idée de musée
«hors les murs» de Malraux privilégiait plutôt un support papier, en représentant
symboliquement les trois fonctions principales du musée : la collection d’originaux, le
bâtiment dédié et la structure institutionnelle152. On retrouve également cette idée dans
le théâtre de mémoire de Samuel Quiccheberg ou de Giulio Camillo (XVIe s.). Ces
projets sont finalement des musées virtuels avant l’heure.
Tout cela nous amène donc à penser que l’institution muséale, percevant le
musée virtuel comme un concurrent, ne puisse voir qu’en réalité celui-ci l’a
probablement précédée. Surtout lorsque l’on sait que le musée tel qu’on le connaît
aujourd’hui n’existe, après tout, que depuis deux siècles environ. Comme le formule
Bernard Deloche, «le musée institutionnel n’est donc pas le premier, ni sans doute le
dernier, il n’est probablement qu’une solution parmi d’autres au problème de la
mémoire collective. (...) Ainsi, loin d’être le fruit des nouvelles technologies, le musée
virtuel apparaît plutôt comme le cadre général dans lequel doit s’inscrire toute réflexion
en muséologie»153.
Dans son chapitre traitant des origines du musée virtuel, Erkki Huhtamo soutient
que les questions posées autour de la notion de musée virtuel se retrouvent dans les
réflexions menées par les mouvements d’avant-garde du début du XXe siècle,
notamment avec des artistes-designers comme László Moholy-Nagy, El Lissitzky,
Herbert Bayer et Frederick Kiesler154. Ces artistes ont dû réagir aux nouveaux enjeux
posés par les nouvelles technologies comme la photographie, le cinéma et
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
59
151 MALRAUX A., Le musée imaginaire, Paris, Gallimard, 1965 (3ème édition).152 DELOCHE B., La nouvelle culture. La mutation des pratiques sociales ordinaires et l’avenir des institutions culturelles, Paris, L’Harmattan, 2007, p.164.153 Id., p.164.154 HUHTAMO E., “On the Origins of the Virtual Museum”, in R. Parry, Museums in a digital age, London, Routledge, 2010, p.123.
l’enregistrement phonographique. Conscients de la nécessité de repenser les relations
entre espace d’exposition et visiteurs-spectateurs, l’idée de galerie d’image personnelle
fut soulevée et exploitée. Étudier ces questions permet de se rendre compte des
enjeux auxquels devront faire face les concepteurs d’espaces muséaux virtuels155.
Des artistes-designers comme Moholoy-Nagy et Kiesler ont en effet cherché de
nouvelles façons de présenter et de consommer des images chez soi, cherchant ainsi
à remplir la partie manquante des missions du musée virtuel : consommer de l’art tout
en restant chez soi156. Le huitième volume du célèbre livre du Bauhaus écrit par
Moholy-Nagy, Peinture, Photographie, Film, en 1925, comprend justement un chapitre
intitulé «Pinacothèque privée», qui explore l’idée d’une galerie d’images qui ne seraient
pas toutes présentées telles des décorations sur les murs mais plutôt rangées dans
des sortes de «bases de données» et visionnées à la demande. Moholy-Nagy avait
aussi anticipé la télévision, ou plutôt ce qu’il appelait le «service d’images radio» qu’il
voyait comme une future chaîne d’informations visuelles à usage domestique157.
Le musée virtuel a donc été pensé depuis bien longtemps et nous ne pouvons
pas donner de date fixe à cette notion. Elle s’est développée à travers les siècles et à
travers les innovations scientifiques et techniques. Elle s’est tout particulièrement
révélée au long du XIXe et au début du XXe siècle, période marquée par le progrès
technique, avec la naissance de la photographie, de la radio, de la télévision et des
sciences de l’information et de la communication. Ces discussions historiques sur la
notion de musée virtuel nous conduisent à formuler les enjeux auxquels vont devoir
faire face les concepteurs d’espaces virtuels. Quelle doit être la relation entre le musée
in-situ et le musée virtuel ? Est-ce qu’un musée virtuel doit être une réplique parfaite de
l’institution physique ou être radicalement différent ? Quid de l’interactivité ? Est-ce-
qu’un musée virtuel doit, de fait, proposer un parcours interactif ? Pouvons-nous
réduire l’importance de l’interactivité ou est-ce une condition sine qua non ?
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
60
155 Une étude plus poussée des réflexions menées par ces artistes est proposée par Erkki Huhtamo dans son chapitre dédié au musée virtuel aux pages 123 à 128. Je ne reproduirai pas ici son étude mais elle est néanmoins particulièrement intéressante car elle explore des notions de scénarisation et d’interactivité, qui sont des notions que j’explorerai moi-même plus loin dans ce travail, lorsque j’aborderai les enjeux auxquels devront faire face les chefs de projets développant des sites interactifs dédiés aux collections.156 HUHTAMO E., «On the Origins of the Virtual Museum», in R. Parry, Museums in a digital age, London, Routledge, 2010, p.128.157 Id.
2.1.2.2. L’espace virtuel : espace privé ou public ?
L’environnement muséal virtuel se superpose sur le musée réel, évitant les
contraintes physiques de temps et d’espace158. Contrairement au musée in-situ,
l’espace virtuel crée un dispositif de présentation en deux dimensions que l’on peut
comparer au film ou à la télévision. L’expérience physique et sociale de cet espace est
réduite à une intimité entre l’utilisateur et l’objet virtuel. C’est un endroit intime et isolé,
que l’on peut comparer à la lecture d’un livre, auquel on accède toutefois depuis
n’importe quel ordinateur dans le monde, à condition qu’il soit connecté159. Cela en fait
donc un espace à la fois intime et personnel, puisqu’il n’engage que l’utilisateur et
l’objet, via un ordinateur, et à la fois un espace social de partage, car il est disponible
via un réseau, sur lequel d’autres utilisateurs sont connectés.
L’une des principales caractéristiques du musée est qu’il est un lieu de
sociabilité. En revanche, les environnements virtuels sont souvent perçus comme
isolés et ne permettant pas le contact social. Dans l’espace physique du musée, il est
pourtant par moments difficile de créer du lien social, surtout entre étrangers. Lorsque
l’on vient visiter le musée en groupe, entre amis ou en famille, il y a bien évidemment
une interaction qui se crée. Mais cette interaction existe au sein d’un groupe de
personnes se connaissant déjà. Prenez deux personnes étrangères l’une à l’autre,
visitant chacune la même exposition de leur côté, avec l’aide d’un audioguide, d’une
application sur leur smartphone ou simplement de la lecture des cartels, et placez-les
dans un environnement virtuel. Ces deux personnes vont naviguer à travers
l’exposition virtuelle et vont ensuite engager une conversation via un dispositif de
commentaire sur la page Web parcourue. Ou même partager cette expérience via un
réseau social. Les visiteurs en ligne peuvent ainsi engager une conversation de
manière beaucoup plus simple, plus libre, étant donné que toutes les barrières
physiques disparaissent sur le Net160.
Les projets de mise à disposition du patrimoine numérisé sur des bibliothèques
numériques ont permis de stocker des images de tous types d’objets, provenant de
collections variées, et de les montrer aux internautes. En dépit d’efforts évidents de
numérisation et de diffusion, encore trop peu de musées ont véritablement saisi les
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
61
158 BANDELLI A., «Virtual Spaces and Museums», in R. PARRY,, 2010, p.149.159 MÜLLER K., «Museums and Virtuality», in R. PARRY, 2010, p.301.160 BANDELLI A., Op. cit., 2010, p.151.
multiples possibilités d’avoir un espace illimité de présentation et de communication161.
Cela s’explique par les débats qui existent entre la virtualité de l’objet et sa réalité,
entre les «vraies choses» et leurs reproductions.
2.1.2.3. Authenticité et virtualité : de l’original à la copie
2.1.2.3.1. Réalité vs. virtualité : « the real thing » 162
Si on définit la numérisation par le fait de transférer l’information existante et la
reproduction d’objets physiques dans une forme électronique, le virtuel apparaît ainsi
comme l’opposé du réel. Mais est-ce-que les reproductions virtuelles sont le reflet
exact de l’original dont elles découlent ? La numérisation est bien plus qu’une simple
technique de reproduction. Virtuel vient du latin virtus, qui a plusieurs significations, y
compris l’excellence, la puissance et la force. «Dans ce sens, les objets virtuels
peuvent être vus comme illuminant la signification potentielle de l’art et d’autres objets.
Les expositions virtuelles et les environnement muséaux numériques contextualisent
les objets à travers des liens et une narration. Ainsi, la virtualité devrait être comprise
en tant qu'interprétation complexe d’objets nous forçant à repenser la tangibilité et
l’intangibilité des traces de notre histoire.»163
Dans un monde où les expériences sont de plus en plus produites, traduites, ou
formées par les médias, le musée semble souvent être le seul endroit où l’on peut
trouver l’«authentique», les «vraies choses» 164. En langage muséal, les vraies choses
(the real things) sont «des choses que nous présentons telles qu’elles sont et non
comme des modèles, des images ou des représentations»165. Les gens viennent au
musée pour voir ces «real things». Cependant, l’intégration d’objets dans les
collections de musée les retirent de leur contexte authentique et les replacent dans un
nouveau cadre muséal «virtuel». De nouvelles significations sont apposées sur l’objet,
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
62
161 MÜLLER K., «Museums and Virtuality», in R. PARRY, 2010, p.295.162 Selon l’expression de S. Pearce.163 MÜLLER K., «Museums and Virtuality», Op. cit., p.296.164 Id., p.297.165 CAMERON D., «Viewpoint : the museum as a communication system», Curator, 1968.
en fonction de son cartel, de la salle dans lequel il est exposé ou encore de la manière
dont il est présenté166.
La présence physique de l’objet au sein de son nouvel environnement muséal
est la base de l’expérience vécue par les visiteurs, pourtant cette expérience est
tronquée. Peut-on alors vraiment parler d’authenticité ?
Il y a, bien entendu, une différence entre l’objet physique présenté in-situ et sa
représentation numérique dans un environnement virtuel. Mais le fait de placer une
reproduction numérique d’un objet sur un site Web revient à enlever un objet de son
milieu originel pour le présenter dans un musée. De la même manière que le
déplacement d’un objet de son contexte originel dans une salle de musée change la
perception qu’on en a ainsi que sa fonction première, l’environnement virtuel change le
cadre référentiel de l’objet. Finalement, les musées sont habitués à ce déplacement
contextuel de l’objet dans des environnements nouveaux, le Web ne devrait donc pas
leur paraître si étranger que cela, car il ne constitue qu’un nouvel environnement de
plus167.
2.1.2.3.2. Copies et reproductions
La question de la reproduction numérique d’une œuvre pose la question de son
changement de valeur. La reproductibilité numérique d’une œuvre la valorise ou la
dévalorise-t-elle ?
Les débats actuels sur les reproductions virtuelles d’œuvres d’art font écho à
ceux concernant les technologies de reproduction du début du XXe siècle. Walter
Benjamin disait de la reproduction qu’elle rend possible la rencontre entre l’œuvre
originale et le récepteur, sous forme d’une photographie ou d’un disque168. Il ajoute que
«l’œuvre d’art reproduite devient, de plus en plus, la reproduction d’une œuvre d’art
destinée à être reproduite»169. Benjamin continue en affirmant que grâce au grand
nombre de méthodes de reproduction technique de l’œuvre d’art, sa possibilité d’être
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
63
166 MÜLLER K., «Museums and Virtuality», in R. PARRY, 2010, p.297.167 Id.168 BENJAMIN W., L’oeuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique, Paris, Éditions Allia, 2007, p.20.169 Id., p.29.
exposée s’est accrue de manière considérable170. Ce qui change avec les
reproductions numériques d’œuvres d’art, ce sont leur nature, mais pas leur valeur
culturelle. Benjamin explorait finalement l’impact de la reproduction de masse dans
notre perception de l’art. La numérisation des objets et leur accessibilité mondiale à
travers le Web altère cette perception, dans le sens où elle ne propose qu’une copie de
l’original. Il faut rappeler que la plupart des choses que nous savons sur la culture
grecque nous vient de reproductions romaines171. Cela est vrai aussi pour les artistes
de la Renaissance qui ont copié les œuvres d’art et les monuments de l’Antiquité.
Selon Klaus Müller, ce n’est pas la qualité de la reproduction qui constitue le défi
de la numérisation mais sa quantité. Les musées peuvent être capable d’assurer
l’accès aux bases de données de milliers ou millions d’images, mais comment aident-
ils leurs visiteurs en ligne à naviguer à travers une telle proportion de données ?172
2.1.2.4. Médiation numérique et dématérialisation
Le développement des sites Internet de musées en sites interactifs, proposant
des animations multimédia et un accès plus facile à leurs collections, ainsi que le
développement de ce qu’on a appelé pendant longtemps «musées virtuels» que l’on
qualifierait plutôt de catalogues des collections en ligne et de tous les sites dédiés au
patrimoine numérique, changent le visage de la médiation muséale. Via le Web, la
médiation se fait numérique et la culture se dématérialise.
Ce qu’on appelle la dématérialisation est en fait une «technique permettant de
stocker dans des volumes toujours plus faibles des quantités considérables de signes
et d’informations grâce à ses procédés de nature informatique, mais aussi de pouvoir
reproduire et de diffuser à l’échelle planétaire avec une très grande facilité et rapidité
les contenus ainsi numérisés»173. François de Bernard distingue cinq niveaux au sein
de la notion de dématérialisation. Tout d’abord la numérisation du patrimoine culturel,
matériel ou immatériel, dans le but de le sauvegarder et de le diffuser ; les biens
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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170 BENJAMIN W., L’oeuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique, Paris, Éditions Allia, 2007, p.35.171 MÜLLER K., «Museums and Virtuality», in R. PARRY, 2010, p.299.172 Id., p.300.173 BERNARD F. De, «La dématérialisation des politiques culturelles, problématique et paradoxes de la culture numérique», in Culture et Numérique, Actes du 5e colloque interdisciplinaire Icône-Image, Musée de Sens, Obsidiane, Sens, 2009, p.13.
culturels transcrits sur un support numérique dans une démarche marchande et
économique (traduire un livre imprimé en livre numérique pour répondre à un besoin du
marché) ; les arts numériques en ce qu’ils sont des œuvres culturelles immatérielles (et
non dématérialisées car cela impliquerait qu’elles aient été matière avant d’être
devenues numériques, ce qui n’est pas le cas) ; la culture numérique qui vit au sein
même de l’environnement numérique ; et enfin, la dématérialisation est le processus
qui enlève de la matière à des objets dans le but de lui donner une forme plus
légère174.
La dématérialisation de la culture entraîne de fait une dématérialisation de la
médiation qui devient ainsi numérique. La transmission d’un message, via un médium,
en l’occurrence ici le Web, est réceptionnée en ligne. L’espace virtuel induit donc une
nouvelle expérience muséale et une nouvelle manière de penser la médiation
culturelle.
Le visiteur en ligne expérimente ainsi une nouvelle manière de voir le musée.
Parcourir les œuvres du musée se fait de façon beaucoup plus rapide et facile. «La
place du creux de la main, généralement en permanence sur la souris, facilite les
répétitions par simples clics de souris sur les images, les noms des artistes, les thèmes
et sur le bouton «retour» de la barre de navigation. Sans bouger, par des subterfuges
via les dispositifs techniques, l’usager vit cette posture interactive et l’immédiateté de
l’accès comme une «récréation sans sortir», pour se délecter des contenus muséaux
sur ce nouveau support socialement valorisé et pour retrouver des sensations
porteuses de significations dans la vie des usagers»175. En se dégageant des
contraintes liées aux déplacements vers et dans le musée, les visiteurs en ligne
gagnent du temps, mais gagnent aussi en originalité de l’expérience. Celle-ci sera plus
agréable et, par conséquent, le travail de médiation sera accompli.
Il ne s’agit pas de considérer la médiation numérique comme la finalité de la
médiation mais comme une discipline sœur, choisissant un terrain de jeux parallèle,
voire même complémentaire. Le processus de médiation numérique est véritable et la
dématérialisation de la culture n’implique pas nécessairement une dématérialisation de
la médiation. En effet, l’outil numérique sera toujours, non pas ennemi du musée, mais
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
65
174 BERNARD F. De, «La dématérialisation des politiques culturelles, problématique et paradoxes de la culture numérique», in Culture et Numérique, Actes du 5e colloque interdisciplinair Icône-Image, Musée de Sens, Obsidiane, Sens, 2009, p.13-14.175 VIDAL G., Contribution à l’étude de l’interactivité, les usages du multimédia au musée, Presses Universitaires de Bordeaux, 2006, p.86-87.
simplement d’un autre monde. Et pour instaurer un dialogue, il faudra bien faire appel à
un intermédiaire.
2.2. Présence active des institutions culturelles sur la Toile
2.2.1. Sites Web de musées
Après l’appropriation de la technologie numérique et leurs premiers pas sur le
Web, les musées ont aujourd’hui atteint un tournant décisif. Ils sont désormais entrés
dans l’ère du numérique et en ont, pour la plupart, saisi l’importance. Malgré quelques
réticences encore présentes, quelques freins au développement de projets numériques
en ligne (par faute de budget ou de personnel), les institutions muséales se tournent
vers ce nouveau Web participatif et interactif, en essayant d’en saisir tous les enjeux et
d’en relever les défis. Qu’en est-il de leur présence en ligne et de leur virtualité ? Qu’en
est-il des actions entreprises pour la diffusion numérique de leurs collections et de leur
interaction avec les visiteurs internautes ?
2.2.1.1. De la vitrine à l’interactivité : nouvelles fonctions,
nouveaux enjeux
Il y a quelques années Geneviève Vidal distinguait parmi les premiers sites Web
de musées, trois catégories allant de l’offre éditoriale en ligne la plus simple à l’offre la
plus interactive : les sites vitrines, les sites de ressources en ligne et les musées
virtuels.
Les sites «vitrines des musées réels»176 proposaient des informations
concernant les activités du musée accompagnées d’illustrations, des horaires, des
tarifs, des conditions d’accès, etc ; des rubriques dédiées aux expositions temporaires
ainsi qu’une adresse électronique pour plus de renseignements. Dans cette première
catégorie les images n’étaient que des illustrations.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
66
176 VIDAL G., Contribution à l’étude de l’interactivité, les usages du multimédia au musée, Presses Universitaires de Bordeaux, 2006, p.20.
Les sites de «ressources en ligne»177 proposaient des parcours
hypermédiatiques, des dossiers scientifiques et pédagogiques, et des bases de
données servant à mener des recherches plus en profondeur. Ces contenus allaient
plus loin que la visite du musée et permettaient au public d’obtenir plus d’informations
sur les objets du musée et/ou le contexte social, culturel, économique et politique les
entourant et d’approfondir ses connaissances. Ces sites avaient également la
particularité de proposer des jeux en ligne et parfois des forums. Ils offraient donc plus
d’interactivité que les premiers.
Les «musées virtuels», quant à eux, présentaient des expositions d’images et
de textes, enrichies d’animations multimédia interactives, qui n’existaient qu’en ligne et
pas dans le musée in situ178. Ces sites proposaient des visites virtuelles de leurs salles,
en utilisant des logiciels comme Quicktime et dont la qualité était assez «médiocre
(étant donnée la répartition de la connexion haut débit)»179.
Aujourd’hui, le site Web de musée migre de la simple fonction de vitrine, voire
de vitrine améliorée, à une approche plus globale de l’interactivité et des utilisateurs.
La première fonction d’un site Web de musée est de servir d’outil marketing de
communication. En effet, en tant que moyen d’accès aux collections, un site Web
apparaît véritablement comme un outil de diffusion et de médiation au service de
l’institution et des œuvres qu’elle conserve. «En médiatisant les contenus de musées,
les concepteurs de sites fournissent une forme de médiation grâce aux liens
hypermédiatiques, à des modes de navigation programmée et aux choix de
contenus.»180 Cette médiation doit toutefois être proposée sur des bases techniques
faciles d’utilisation. Ainsi, l’interface Web du musée devra faire appel aux
développements récents du Web, comme le HTML5 et le CSS3, des outils facilitant la
navigation sur le Web et permettant ainsi une meilleure expérience en ligne. Le site
Web reste donc un moyen pour l’internaute d’avoir des informations sur ses activités,
sa programmation culturelle et ses collections.
Néanmoins, plus qu’un simple outil de communication, «le site Web doit devenir
un outil d’incitation à la visite, de fidélisation des visiteurs et d’attractivité pour tous
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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177 VIDAL G., Contribution à l’étude de l’interactivité, les usages du multimédia au musée, Presses Universitaires de Bordeaux, 2006, p.20.178 Id.179 Ibid.180 Ibid., p.39.
ceux qui habitent loin du musée ou à l’étranger.»181 Cela implique de diffuser des
ressources numériques et des catalogues de collections simplifiés, et que ces
ressources soient destinées à un public en particulier.
Pas uniquement un moyen de donner envie aux internautes de visiter le musée,
le site Internet doit également proposer une interface interactive, en appliquant les
principes actuels du Web design et du responsive Web design. «L’interactivité, sans
être pourtant primordiale, participe néanmoins indirectement à la mission de service
public de diffusion du patrimoine et des connaissances.»182
Enfin, le site Web du musée est la vitrine officielle de l’institution, il est donc le
garant officiel de ses données et se doit de véhiculer les valeurs et les principes de
l’institution.
2.2.1.2. Refontes de sites Web et nouvelle interactivité
Ces dernières années, les sites Web de musées vivent une période de
transition, en effet, beaucoup de musées se lancent dans le délicat travail de refonte de
leur site. Le Centre Pompidou a notamment lancé son Centre Pompidou Virtuel à
l’automne 2012. Aujourd’hui, d’autres sites Web de musées sont en cours de refonte,
notamment ceux du musée de Cluny et celui du musée du quai Branly.
La refonte d’un site Web constitue pour le musée l’occasion de repenser sa
stratégie numérique en prenant en compte les nouveaux enjeux et défis du Web
d’aujourd’hui. Il s’agit de prendre en considération les évolutions des usages du Web
sur les terminaux mobiles, de tenir compte du processus de démocratisation des
technologies numériques de manière générale et d’Internet en particulier, de prendre
aussi en considération les pratiques collaboratives du Web social, sans oublier la
présence quasi intrusive des réseaux sociaux dans les pratiques en ligne, etc.
Lors de sa sortie en octobre 2012, le Centre Pompidou Virtuel183 (Fig.10, p.10) a
fait couler beaucoup d’«encre virtuelle» parmi la communauté de blogueurs et
blogueuses musées et numérique. Des critiques ont été formulées quant au budget
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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181 DALBÉRA J.-P., «Institutions culturelles et technologies numériques», in Culture et Numérique, Actes du 5e colloque interdisciplinaire Icône-Image, Musée de Sens, Obsidiane, Sens, 2009, p.78.182 VIDAL G., Contribution à l’étude de l’interactivité, les usages du multimédia au musée, Presses Universitaires de Bordeaux, 2006, p.66.183 <http://www.centrepompidou.fr> (consulté le 27 août 2013).
faramineux déployé par le musée, à son Web design, à l’absence de version mobile,
etc. Le designer graphique Geoffrey Dorne salue son design «plutôt réussi», mais
déplore l’utilisation d’une typographie peu lisible184. (Fig.11, p.10) En ce qui concerne la
licence ouverte, le site se base sur des logiciels Open Source et c’est un bon point185.
Cependant, le Centre refuse de donner accès au code source du site, sauf demande
très sérieuse. Selon certains, l’ensemble du code pourrait être mis sur GitHub pour
favoriser le partage et l’amélioration continue, comme le fait la BBC186. Le budget
alloué à la construction du site a également fait soulever des sourcils. Agnès Saal,
directrice générale du Centre Pompidou, nous apprend que le site aurait coûté 12
millions d’euros, répartis en un tiers de subventions, un tiers de prêt auprès de la
Caisse des dépôts et consignations et enfin un dernier tiers de mécénat de
compétences et de financements directs 187. Enfin, un site qui se dit «virtuel» mais qui
ne l’est peut-être pas tant que cela. À la question «est-ce un musée virtuel ?», Alain
Seban, le président, a répondu. «Pas du tout. Le Centre Pompidou Virtuel ne consiste
pas à reproduire ce qui est visible mais à révéler ce qui est caché. Rien ne remplacera
le contact avec les œuvres, c’est et cela restera La Vocation d’un musée.»188 Comme
l’écrit Sébastien Magro dans son blog, le Centre Pompidou Virtuel est une réponse
ferme au Google Art Project, et il «refuse de proposer une exploration 3D réaliste du
musée, pour y préférer le projet ambitieux de la mise en ligne de la totalité des
contenus entourant les collections - textes, photos, vidéo, multimédia.»189 Néanmoins,
et comme le met en valeur Geoffrey Dorne, le Centre Pompidou Virtuel a cela
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184 DORNE G., «Le site du musée du Centre Pompidou a coûté 12 millions… mais !», Graphisme et interactivité, 9 octobre 2012, <http://graphism.fr/le-site-du-muse-du-centre-pompidou-cot-12-millions-mais/> (consulté le 27 août 2013).185 DORRA J., «5 obstacles à franchir pour le nouveau site du Centre Pompidou», ils.sont.là, 12 octobre 2012, <http://ils.sont.la/post/5-obstacles-a-franchir-nouveau-site-centre-pompidou> (consulté le 27 août 2013).186 Voir la conversation Twitter : <https://twitter.com/romainneutron/status/255664311949725697> (consulté le 27 août 2013).187 MATHEY A., «Lancement du Centre Pompidou Virtuel : beaucoup de bruit pour rien ?», Culture & Communication, 4 octobre, 2012, <http://culture-communication.fr/lancement-du-centre-pompidou-virtuel-beaucoup-de-bruit-pour-rien/> (consulté le 27 août 2013).188 LOCHON P.-Y., «Le Centre Pompidou Virtuel mise sur la diffusion de ressources numériques, le web sémantique et les produits dérivés», Club Innovation Culture France, 5 octobre 2012, <http://www.club-innovation-culture.fr/le-nouveau-centrepompidou-fr-mise-sur-la-diffusion-de-ressources-numeriques-le-web-semantique-et-les-produits-derives/> (consulté le 27 août 2013).189 MAGRO S., «Le délicat exercice de la refonte d’un site Web pour une institution culturelle», DASM, 22 octobre 2012, <http://dasm.wordpress.com/2012/10/22/le-delicat-exercice-de-la-refonte-dun-site-web-pour-une-institution-culturelle/> (consulté le 27 août 2013).
d’innovant qu’il intègre une véritable démarche de main tendue vers le visiteur pour
l’inciter à collaborer et participer.
D’autres sites Web de musées sont actuellement en cours de refonte, nous
pourrons étudier dans quelques mois d’autres exemples qui nourriront le débat sur la
compréhension par les musées des enjeux du Web. L’un des principaux enjeux,
d’ailleurs, réside dans une stratégie tournée vers l’utilisateur.
2.2.1.3. De l’internaute visiteur à l’internaute contributeur :
nouvelles stratégies pour un nouvel utilisateur
2.2.1.3.1. L’internaute-visiteur
Mais qui est donc ce nouveau visiteur du musée en ligne ? Pour la plupart, ces
usagers ne sont pas si nouveaux que cela car ils sont déjà des visiteurs de musées in
situ. Ils effectuent des «parcours et navigations, singuliers selon l’expérience
personnelle, la formation et la profession, fondés sur leur connaissance du musée
émetteur.»190 Cela implique donc qu’ils aient une véritable connaissance des
technologies du Web.
En effet, «la complémentarité entre Internet et la visite de monuments s’explique
en partie par l’appétence des amateurs de lieux culturels pour le web»191. Cela
s’explique déjà par le fait que les visiteurs habitués sont plus équipés que les non
visiteurs (84% disposent d’Internet chez eux contre 63% des non-visiteurs). Le rapport
Crédoc de 2012 nous indique qu’Internet est de plus en plus utilisé dans l’organisation
de sorties culturelles à caractère patrimonial. Au total, 35% des personnes interrogées
utilisent Internet en lien avec la visite d’un musée, d’une exposition ou d’un monument :
28% recherchent des informations pratiques (horaires, tarifs), 16% ont effectué une
visite virtuelle d’une exposition, d’un musée ou d’un monument, 10% ont réservé ou
acheté un billet sur Internet, 6% ont parlé sur un réseau social, un blog ou un forum
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190 VIDAL G., Contribution à l’étude de l’interactivité, les usages du multimédia au musée, Presses Universitaires de Bordeaux, 2006, p.93.191 HÜBE S., «Rapport Crédoc (Juin 2012) : Utiliser Internet avant, pendant et après la visite», Club Innovation Culture France, 05 novembre 2012, <http://www.club-innovation-culture.fr/author/simon/> (consulté le 27 août 2013).
d’une visite patrimoniale et 5% ont téléchargé des commentaires sur les œuvres
exposées ou à propos du monument visité192. (Fig.12, p.11)
En outre, la visite en ligne n’est pas synonyme de désertion des institutions
culturelles mais est justement complémentaire d’une augmentation de la fréquentation
in situ. Les chiffres nous montrent que 88% des personnes ayant visité virtuellement
des sites patrimoniaux l’ont fait dans le but de préparer leur visite sur place.
Cependant, parmi eux, 12% n’ont visité aucun lieu patrimonial au cours de l’année193.
Les visiteurs-internautes constituent un public particulier. La visite en ligne leur
étant facilitée, leur rapport aux œuvres et aux informations changent. Ils se sentent
plus libres et plus à même d’accéder à leur patrimoine culturel. Ils représentent donc
une nouvelle cible à prendre en compte par le musée dans sa stratégie numérique. La
problématique se concentre ainsi sur l’usager, il s’agit d’«envisager le site comme un
véritable outil au service des publics, à le sortir d’une logique de vitrine pour partir à la
recherche de la richesse fonctionnelle, penser la préparation de la visite, proche ou
lointaine, pratique ou davantage tournée vers le souci de susciter le désir, de manière
dynamique.»194
2.2.1.3.2. Nouvelles stratégies pour de nouveaux besoins
Un des objectifs du musée est d’éduquer le public et de partager les témoins de
la connaissance qu’il conserve en ses salles. Les sites Web de musée ont donc pour
objectif de comprendre et de servir les besoins de l’internaute pour accéder à sa
recherche d’éducation culturelle195. Les études de publics ont toujours été très utiles et
pratiquées par les musées. De nombreux chercheurs ont démontré, il y a quelques
années déjà, que ces études devaient nécessairement être conduites depuis un point
de vue centré sur l’utilisateur196. Elles ont permis de déterminer quels sont les
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
71
192 HÜBE S., «Rapport Crédoc (Juin 2012) : Utiliser Internet avant, pendant et après la visite», Club Innovation Culture France, 05 novembre 2012, <http://www.club-innovation-culture.fr/rapport-credoc-2012-utiliser-internet-avant-pendant-et-apres-la-visite//> (consulté le 31 août 2013).193 Id.194 SCHAFER V., THIERRY B., COUILLARD N., «Les musées, acteurs sur le Web», La Lettre de l’Ocim, n°142, juillet-août 2012, «Les musées et Internet», p.10.195 MARTY P. F., «Museum websites and museum visitors : digital museum resources and their use», Museum Management and Curatorship, 2008, n°1, vol.23, p.82.196 Hertzum (1998), Jörgensen (2004) et Marty (2007).
nouveaux besoins et attentes des visiteurs-internautes et comment accéder à leurs
requêtes.
Avec la démocratisation d’Internet et des pratiques numériques, les besoins et
les attentes des utilisateurs changent :
Les visiteurs demandent un accès libre et illimité aux collections.
Désormais, les utilisateurs ne sont plus satisfaits de l’accès limité aux collections
muséales et beaucoup souhaitent un accès permanent aux données du musée, peu
importe leur localisation et leur agencement197.
Les visiteurs attendent une libre mise à disposition des contenus. L’accès
aux informations concernant les œuvres et aux images numériques étant de plus en
plus facile, les utilisateurs se voient maintenant capables de s’approprier et de
manipuler ces ressources. Ils veulent emporter avec eux, échanger, partager et
réutiliser ce qui est visible sur le site Internet198. Les professionnels de musées doivent
trouver un moyen de répondre aux besoins changeants de leurs visiteurs 199.
Les visiteurs attendent de l’offre qu’elle soit personnalisable. Les
utilisateurs souhaitent accéder aux sites Internet à travers leur portail personnalisé200.
Des musées se lancent dans ce type d’interaction avec l’usager. C’est le cas du site
Web du Museum of the Moving Image à New York. Lors de son redéploiement dans de
nouveaux locaux dans l’Astoria de New York, le Museum Of the Moving Image a
repensé l’interactivité de son site Web (Fig. 13, p.11). Le site internet du musée
reprend ainsi la programmation ciblée pour les jeunes et centrée sur les médias, et
exploite la fonction de compte personnalisé. L’internaute peut se créer un compte et
être tenu au courant de la programmation du musée. Cela traduit l’intention du musée
de devenir un lieu d’interaction avec son public201.
Les visiteurs veulent collaborer. Avec le développement du Web participatif,
l’utilisateur veut désormais collaborer avec le musée en ligne et participer. Il souhaite
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
72
197 MARTY P. F., «Museum websites and museum visitors : digital museum resources and their use», Museum Management and Curatorship, 2008, n°1, vol.23, p.83.198 AILLAGON T., «Internet et les musées, des nouvelles offres pour de nouveaux usages», Culture et Recherche, n°118-119, automne-hiver 2008-2009.199 MARTY P. F., Op. cit., p.83.200 AILLAGON T., «Internet et les musées, des nouvelles offres pour de nouveaux usages», Culture et Recherche, n°118-119, automne-hiver 2008-2009.201 Club Culture & Innovation(s), «Tour du monde des nouveaux musées et de leurs dispositifs numériques», 22 février 2011, <http://www.club-innovation-culture.fr/la-fondation-calouste-gulbenkian-chouchoutte-ses-visiteurs-sur-internet/>.
que sa voix soit entendue. Le Brooklyn Museum a lancé une expérience en 2011,
intitulée Split Second. Il s’agissait de comprendre ce qui influençait les goûts et les
jugements des visiteurs. Il a été demandé aux visiteurs-internautes de s’exprimer sur
une exposition de peinture indienne classique (XVe au XIXe siècle). Le processus était
le suivant :
‣ 1er tour : dire spontanément quelle était sa peinture préférée, les peintures étant
présentées par deux et de manière aléatoire;
‣ 2ème tour : regarder chaque œuvre aussi longtemps qu'on le souhaite et dire
ensuite si on l'aime ou non ;
‣ 3ème tour : les participants devaient réaliser des activités en lien avec chaque
peinture (l’écriture d’un texte par exemple), puis la placer sur une échelle allant de
«je n'aime pas du tout» à «j'aime beaucoup» ;
‣ 4ème tour : évaluer l'oeuvre, toujours avec la même échelle, mais après avoir
emmagasiné des informations et des textes analytiques sur l’œuvre.
L'activité s'est déroulée entièrement en ligne entre février et avril 2011. Chaque
tour a été enregistré et toutes les données ont ensuite été mises à disposition sur le
site. Les internautes pouvaient donc voir quelles étaient les œuvres les plus et les
moins appréciées. De juillet 2011 à janvier 2012, une partie des oeuvres, ayant
provoquée le plus grand nombre de commentaires ou les commentaires les plus
divergents, a été sélectionnée pour être présentée au public, dans le musée202.
Ainsi, l’une des grandes problématiques auxquelles le musée doit faire face lors
de l’élaboration de sa stratégie numérique est l’étude de son public en ligne, la prise en
compte de ses besoins et et de ses attentes, ainsi que la mise en place de dispositifs
adaptés à ces derniers, et donc d’une stratégie globalement centrée sur l’utilisateur.
2.2.2. Usage et appropriation du Web social par les musées
La notion de Web participatif, nous l’avons vu, est au centre des problématiques
de l’environnement numérique aujourd’hui, bien qu’elle apparaisse dès 2005. Comme
l’écrit déjà Geneviève Vidal, on a vu apparaître une volonté de l’utilisateur de
s’exprimer et d’être entendu. En effet, «ces derniers revendiquent un pouvoir, celui de
confirmer leur activité, voire de devenir émetteurs et, dans l’Internet muséal, de
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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202 VAUFREY C., «De la visite à la participation, le nouvel usager du musée», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.23.
transformer les relations avec les contenus muséaux en ligne».203 Les réseaux sociaux
numériques sont des places publiques sur lesquelles les usagers prennent la parole.
Quel est donc l’emploi que font les musées des réseaux sociaux numériques et sont-ils
adaptés aux besoins du musée ?
2.2.2.1. Les réseaux sociaux numériques sont-ils attractifs
pour les musées ?
Les réseaux sociaux numériques offrent la possibilité à l’utilisateur de pouvoir
participer et de collaborer avec les musées. Outre un champ de possibilités multiples
pour l’internaute, le Web social est aussi un outil présentant de nombreuses options
pour les musées. Il permet au musée d’interagir avec son public, de s’ouvrir à de
nouvelles audiences comme les 25-45 ans et les étrangers204, de valoriser ses
collections et son image institutionnelle et enfin de constituer des outils de marketing et
de communication particulièrement efficaces. Néanmoins, les réseaux sociaux ne sont
pas forcément tous adaptés aux besoins du musée et de son public, et ne sont pas non
plus tous perçus de la même manière.
La renommée des réseaux sociaux permet aux musées de créer un lien
nouveau avec l’usager. En France, l’arrivée des musées sur les réseaux sociaux s’est
faite par vagues, bien après le Canada et les États-Unis. En 2008, les Abattoirs de
Toulouse, le muséum d’Histoire naturelle de Toulouse et la Cité des Sciences et de
l’Industrie sont les premiers à se positionner sur les réseaux sociaux. Du fait de leur
domaine d’intervention (sciences et art contemporain), ils ont été sensibles très tôt aux
problématiques posées par les technologies numériques. Vers 2010, c’est le tour des
musées d’histoire, d’ethnographie, de civilisations et de beaux-arts d’embrasser le Web
social205. Le rapport 2012 du CLIC France206 nous apprend que sur le nombre de
musées interrogés, 43,5% annoncent leur présence sur les réseaux sociaux, contre
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203 VIDAL G., Contribution à l’étude de l’interactivité, les usages du multimédia au musée, Presses Universitaires de Bordeaux, 2006, p.73.204 SCHAFER V., THIERRY B., COUILLARD N., «Les musées, acteurs sur le Web», La Lettre de l’Ocim, n°142, juillet-août 2012, «Les musées et Internet», p.12.205 Id.206 LOCHON P.-Y., Étude du CLIC France : «150 musées et lieux culturels français face aux innovations technologiques», d’après une étude réalisée en décembre 2011 et janvier 2012 par les étudiants de l’EAC, Paris, 2012, <http://www.club-innovation-culture.fr/wp-content/uploads/RNCI-2012-CONDUCTEUR-PRESP-150.pdf> (consulté le 27 août 2013).
42% en 2011. Ce nombre n’a cessé d’augmenté depuis 2010. Facebook et Twitter
restent toutefois les plus populaires. Ils sont 67% à être sur Facebook, et 38.7 % sur
Twitter (Fig.14-16, p.12-13).
Mais la question reste de savoir s’il suffit d’être présent sur ces réseaux pour
que le public suive. Cela dépend de la stratégie adoptée. Une simple présence ne suffit
bien évidemment pas, il faut aussi être présent activement. En tête des deux réseaux
les plus populaires, on constate que les grands musées sont ceux qui ont le plus de
«fans», le musée du Louvre et le centre Pompidou au premier rang (Fig.15 et 16, p.
12-13). La présence sur les réseaux sociaux a entraîné une compétition basée sur une
logique du chiffre, dont l’objectif est de battre le nombre de «fans» ou de «followers» et
battre des records. Dans l’éclairant article écrit par Sébatien Magro et Omer Pesquer
sur le sujet207, les deux muséogeeks critiquent cette logique du chiffre en rappelant que
le nombre de fans ou de followers ne reflète pas la réalité. Les fans sur Facebook sont
ceux qui aiment l’image du musée mais cela ne veut pas forcément dire qu’il existe une
interaction entre eux. Ils déplorent également l’absence de grille d’analyse pertinente
pour mesurer l’impact de la présence des musées sur les réseaux sociaux numériques.
Cette étude propose la constitution d’un outil statistique qui soit propre aux institutions
culturelles et qui réponde à leur problématique et à leurs enjeux. Il s’agit du projet du
«NOS», le Nouvel Outil Statistique, actuellement en cours. Un des éléments
stratégiques qui semble essentiel sur les réseaux sociaux numériques est de
considérer les visiteurs en ligne de la même façon que les visiteurs physiques du
musée, et c’est justement ce que s’applique à faire Sébastien Magro au musée du quai
Branly208.
La page Facebook du musée est donc plus un outil marketing et de promotion
qu’un véritable outil de dialogue. Il est d’ailleurs ici plutôt question d’image de marque.
Du point de vue de l’internaute, il est de bon ton d’«aimer» la page Facebook du
musée du Louvre pour montrer à tous ses amis que l’on est cultivé. Bien qu’efficace en
termes de communication et de promotion, la présence des musées sur Facebook
semble être de l’ordre de l'ostentation plutôt que d’une véritable interaction au sens du
Web participatif.
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207 MAGRO S., PESQUER O., «Les musées sur les réseaux sociaux, la guerre des chiffres n’aura pas lieu», DASM, 9 novembre 2011, <http://dasm.wordpress.com/2011/11/09/les-musees-sur-les-reseaux-sociaux-la-guerre-des-chiffres-naura-pas-lieu/> (consulté le 27 août 2013).208 Entretien Sébastien Magro, Annexes, p.55.
En ce qui concerne Twitter, il «devient un espace d'échange, d'ouverture et de
rapprochement avec le public des musées.»209 Ce réseau constitue en effet une plate-
forme de communication et de valorisation de l’institution efficace. Le musée fait part
de sa programmation et des évènements qui ont lieu, des messages d’informations
pratiques ou encore des promotions sur les expositions ou sa boutique. Le système
des tweets en 140 caractères maximum en fait un outil clair et concis. On retrouve
donc sur Twitter ce que l’on peut voir sur le site Internet mais de façon plus rapide, plus
immédiate, plus claire et plus concise. «Si le site Internet du musée en est la porte
principale, imposante, voire figée, son compte Twitter serait plutôt l'entrée de derrière,
jamais verrouillée, la porte de service moins intimidante, où on nous accueille de
manière plus détendue et avec moins de décorum.»210 À travers le compte Twitter du
musée, le dialogue s’instaure entre l’usager et le musée (Fig.17, p.14). Sur Twitter
l’utilisation du Hashtag permet aux utilisateurs de tweetter sur un sujet qui rassemble
un grand nombre de personnes211. Des initiatives comme #jourdefermeture212 ou
#askacurator213 démocratisent le monde muséal214.
Les musées sont aussi très présents sur les blogs et tendent la main aux
acteurs du Web social. L’association du Château de Versailles avec Wikipédia l’illustre
bien. En 2011, le Château de Versailles s’associe à Wikipédia pour un projet de 6 mois.
Un «wikipédien» s’installe au château avec pour mission de faire découvrir
l’encyclopédie au personnel215.
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209 CLÉMENT F., «Les musées expérimentent avec Twitter», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.44.210 Id.211 Cf. ALLEN-GREIL A., «Museums related Hastags», Engaging Museums, May 28th, 2013, <http://danamus.es/2013/05/28/glossary-of-museum-related-hashtags/> (consulté le 27 août 2013).212 #jourdefermeture est une initiative entreprise à l’origine par le Musée de Cluny, du Quai Branly et le Musée-Château de Boulogne- sur-Mer, le jour de fermeture des musées, généralement tous les lundis et mardis. C’est l’occasion pour les Community Managers de faire pénétrer leurs followers dans les coulisses du musée : prendre des photos de l’installation d’une exposition ou d’emballage d’œuvres en partance pour une exposition dans un autre musée, etc. C’est une manière pour les followers d’entrer en contact avec le personnel du musée <https://twitter.com/search?q=%23jourdefermeture&src=typd>.213 #askacurator : le hashtag a été lancé par l’organisme askacurator.com et permet au public de s’adresser directement aux conservateurs des musées participants pour leur poser des questions, et ces d e r n i e r s r é p o n d e n t à l ' a i d e d u m ê m e h a s h t a g < h t t p s : / / t w i t t e r. c o m / s e a r c h ? q =%23askacurator&mode=relevance&src=typd>.214 CLÉMENT F., «Les musées expérimentent avec Twitter», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.46.215 SCHAFER V., THIERRY B., COUILLARD N., «Les musées, acteurs sur le Web», La Lettre de l’Ocim, n°142, juillet-août 2012, «Les musées et Internet», p.12.
Les réseaux sociaux de partage d’images et de vidéos se présentent comme
autant de bons vecteurs participatifs. Les musées sont également présents sur ce type
de plate-formes, mais comme le montrent les chiffres du rapport CLIC France 2012,
cette présence est nettement moins importante que sur les leaders que sont Facebook
et Twitter.
2.2.2.2. Communautés de partage de photos
Que sont les réseaux de partage de photos et quel est leur intérêt ? Comment
les musées les utilisent-ils ? Les plus populaires des réseaux de partage de photos
sont Instagram, Flickr, Pinterest et Pictify.
Les musées commencent à se créer un compte Instagram, c’est le cas par
exemple du Brooklyn Museum of Art216 (Fig.18, p.15) et du San Francisco Museum of
Modern Art217(Fig.19, p.16). Les deux institutions utilisent Instagram pour partager les
photos prises lors d'événements, des photos de leurs bâtiments, des photos des
mécènes profitant des expositions, des photos des installations d’expositions par les
artistes ou les manutentionnaires, etc218. L’utilisation d’Instagram nous fait penser à
celle de Twitter en ce qu’elle permet d’ouvrir les portes des coulisses du musée. Non
seulement Instagram permet de le faire via des images, mais cela permet aussi de
partager et de diffuser les collections du musée. En outre, les musées sur Instagram
diffusent également les photos de leurs collections prises par les utilisateurs eux-
mêmes. Cet exemple illustre parfaitement l’appropriation du Web participatif par les
musées. Ce genre d’initiative a été entrepris par le Columbus Museum of Art, qui a
invité son public à lui soumettre des photos via Instagram. Ce projet a été plutôt bien
reçu par le public et les utilisateurs d’Instagram et au final, trente huit œuvres ont été
retenues et présentées au musée219.
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216 <http://instagram.com/brooklynmuseum> (consulté le 27 août 2013).217 <http://instagram.com/sfmoma> (consulté le 27 août 2013).218 Article du blog Instagram : ‘Museums on Instagram’ <http://blog.instagram.com/post/12572881296/museums> (consulté le 27 août 2013).219 Réseau Canadien d’informations sur le patrimoine, «Les musées invitent les utilisateurs d’Instagram à participer aux expositions», 12 juin 2013, <http://www.rcip-chin.gc.ca/application/nouvelles-news/francais-french/?p=5039> cité in MATHEY A., «Les musées invitent les utilisateurs d’Instagram à participer aux expositions», Culture & Communication, 18 avril 2013, <http://culture-communication.fr/les-musees-invitent-les-utilisateurs-dinstagram-a-participer-aux-expositions/> (consulté le 27 août 2013).
Beaucoup d’institutions utilisent également Pinterest et Pictify, deux plate-formes
de bookmarking visuel220. Pictify, à la différence de Pinterest qui est à vocation plus
commerciale, est un service dédié au partage de photos artistiques. Il permet aux
utilisateurs de partager les images de leurs œuvres préférées, de les commenter et de
construire leur propre collection. Comme l’explique leur rubrique «à propos»221, l’intérêt
pour un musée ou une galerie de se créer une page Pictify est de pouvoir présenter les
artistes et les œuvres qui constituent leurs collections, de diffuser des œuvres d’art, de
prévisualiser une exposition à venir et de transmettre un maximum d’informations sur
les collections aux membres de Pictify. Nous voyons bien l’intérêt et l’attractivité que
représente un tel réseau pour les musées.
Une critique cependant, on remarque que les musées présents sur Pictify sont
suivis mais ne suivent personne. Quelques musées français présents sur Pictify222 : le
musée Rodin, le musée d’Orsay, le musée du Louvre et le musée d’Art moderne de la
Ville de Paris223. En jetant un oeil à leurs pages d’accueil (Fig.20-23, p.17-18), ils n’ont
en effet pas d’abonnements à d’autres pages Pictify. Nous pouvons donc penser qu’il
n’y a pas de véritable interaction et que l’usage de ce réseau, pensé pour être social,
ne l’est pas véritablement dans le cas des musées.
Sur Pinterest, les images «épinglées» peuvent être classées en catégories, c’est
ce qui fait la différence avec Pictify, qui représente plutôt un «mur d’images». Quelques
musées sur Pinterest224 : le musée du Louvre, le musée du quai Branly (qui n’a pas
encore créé de tableau), le musée Maillol, le musée des Beaux-Arts de Lyon, le musée
des Augustins de Toulouse, le Muséum de Toulouse, et bien d’autres225 (Fig. 24 à 29,
p.19-21).
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220 NOBIS P., «Des réseaux sociaux sur mesure pour les musées», in CLÉMENT Francine, Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.48-50.221 <http://pictify.com/about/what-is-pictify/> (consulté le 27 août 2013).222 HIREL S., «Pinterest, Pictify et les musées français», Muséologique, 30 septembre 2012, <http://www.museologique.fr/2012/09/pinterest-pictify-et-les-musees-francais.html> (consulté le 27 août 2013).223 Musée Rodin <http://pictify.com/user/MuseeRodin>. Musée d’Orsay <http://pictify.com/user/MuseedOrsay>. Musée du Louvre <http://pictify.com/user/MuseeduLouvre>. Musée d’Art moderne de la Ville de Paris <http://pictify.com/user/MAMparis> (consulté le 27 août 2013).224 HIREL S., Op. cit.225 Musée du Louvre <http://pinterest.com/museedulouvre/>. Musée du quai Branly (qui n’a pas encore créé de tableau) <http://pinterest.com/quaibranly/?d>. Musée Maillol <http://pinterest.com/museemaillol/>. Musée des Beaux-Arts de Lyon <http://pinterest.com/mbalyon/?d>. Musée des Augustins de Toulouse <http://pinterest.com/augustins/>. Muséum de Toulouse <http://pinterest.com/museumtoulouse/> (consulté le 27 août 2013).
Il est tout de même nécessaire de noter que la présence de ces musées sur ces
réseaux de partage d’images peut, comme le rappelle Soizic Hirel dans son blog,
sembler contradictoire. En effet, la simple présence des musées sur ces réseaux
indique qu’ils sont dans une logique de partage de photos de leurs collections. Or, des
musées comme le musée d’Orsay interdisent la prise de photos dans leurs murs,
pourquoi alors être présent sur Pinterest ou Pictify ? Il faut d’ailleurs savoir que les
images des collections du Louvre sont accompagnées d’un copyright226. Cette question
relance le débat des restrictions d’utilisation apposées sur les images d’œuvres
relevant pourtant du domaine public.
Les réseaux Pinterest et Pictify constituent ainsi un «moyen supplémentaire
pour générer la discussion entre les musées et leurs visiteurs, qu’ils soient réels ou
virtuels, potentiels ou fidèles.»227 Certaines institutions utilisent mêmes ces réseaux, et
surtout Pinterest avec les musées américains, pour développer leur politique de
promotion commerciale.
Les musées ont ainsi investi l’espace virtuel en créant leur site Web, et certains
se sont appropriés les médias sociaux. Il y a toutefois une différence entre créer son
site Web, créer sa page Facebook et fonder une véritable présence sur le Web. Le
public souhaite accéder aux collections, à toute heure et à tout moment, le musée doit
donc intégrer la diffusion numérique de ses collections dans ses missions.
2.3. Mise en ligne des collections
2.3.1. Diffuser les collections du musée en ligne : une mission
du musée
Selon les statuts de l’ICOM, adoptés lors de la 21e Conférence générale à
Vienne en 2007 : «Un musée est une institution permanente sans but lucratif au
service de la société et de son développement ouverte au public, qui acquiert,
conserve, étudie, expose et transmet le patrimoine matériel et immatériel de l’humanité
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226 HIREL S., «Pinterest, Pictify et les musées français», Muséologique, 30 septembre 2012, <http://www.museologique.fr/2012/09/pinterest-pictify-et-les-musees-francais.html> (consulté le 27 août 2013).227 NOBIS P., «Des réseaux sociaux sur mesure pour les musées», in CLÉMENT Francine, Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.48-50.
et de son environnement à des fins d'études, d'éducation et de délectation.»228 Si le
musée a donc pour mission de transmettre le patrimoine dans le cadre d’un service
public, et que cette transmission doit avoir pour objectifs l’éducation et la délectation,
alors le Web semble être le lieu adéquat d’une telle transmission. Les bénéfices que
peuvent tirer les musées d’une mise en ligne de leurs collections et d’un accès libre et
ouvert aux œuvres sont nombreux. En voici une sélection.
2.3.1.1. Mise en valeur et promotion des collections et de
l’institution
Les projets de mise en ligne de catalogues des collections ou de visite virtuelle
d’un musée représentent un moyen pour l’institution de mettre en valeur ses collections
et de les promouvoir à un niveau mondial. L’abréviation «Web» tire son nom du World
Wide Web, littéralement la «toile d’araignée mondiale». Il est aujourd’hui difficile de
déterminer précisément le nombre de pages Web créées ou le nombre d’utilisateurs de
manière exacte. Il s’agit du plus grand réseau de communication et d’échanges
d’information jamais créé. Quoi de plus promotteur et valorisant que d’être présent sur
cette Toile gigantesque ?
La charte de partage numérique de notre patrimoine culturel recommande aux
institutions de «maximiser la présence, la fréquentation et l'appropriation des données
publiques culturelles sur les réseaux.»229 Il est également recommandé aux acteurs
culturels de se rendre à l’évidence qu’une telle diffusion aura a forciori pour effet
d'accroître la notoriété des œuvres originales, la fréquentation des lieux et des
événements culturels publics, ainsi que de leur rayonnement au niveau international.
Ils devraient enfin comprendre à quel point la «contemplation des œuvres peut prendre
la forme de l’appropriation, de la transformation et de la circulation qui caractérisent les
usages actuels de l'internet»230, et de faire la paix avec l’envie de monopoliser l’accès
aux ressources culturelles en acceptant qu’elles soient aussi diffusées sur des sites
tiers ou n’ayant pas d’ancrage dans le secteur culturel.
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228 <http://icom.museum/la-vision/definition-du-musee/L/2/> (consulté le 27 août 2013).229 Ministère de la Culture et de la Communication, Partager notre patrimoine culturel, Propositions pour une charte de la diffusion et de la réutilisation des données publiques culturelles numériques, 2009.230 Id.
Mettre en ligne ses collections, sur un site Web institutionnel ou dédié aux
collections, proposant une interface qui soit interactive et au design dynamique, ainsi
que des animations 2D et 3D, représentera ainsi un bénéfice à long-terme à la fois
pour leurs collections, mais aussi pour l’image de leur institution.
2.3.1.2. Éducation : outil pour les étudiants et les chercheurs
Avoir un accès rapide et à toute heure aux reproductions numériques des
œuvres ou encore aux visites virtuelles des institutions est une source d’informations
inouïe pour les étudiants et les chercheurs.
Pensons, par exemple, aux étudiants en histoire de l’art et en muséologie,
inscrits dans des universités de province. L’accès aux ressources n’est pas aussi
facilité qu’à Paris, et les enseignements s’appuient sur des reproductions numériques
des œuvres. La centralisation de la culture dans la capitale est un phénomène très
parisien et très français. Les étudiants en histoire de l’art et en muséologie sont
finalement ceux qui font des collections accessibles en ligne une utilisation des plus
approfondie et véritablement utile.
Ainsi, un étudiant faisant des recherches pour un devoir à rendre, va voir son
travail facilité par la présence de ressources documentaires et iconographiques en
ligne. Bien entendu, les étudiants fréquentent les musées et cherchent l’information
directement à la source. Cependant ce n’est le cas que lorsque l’on est proche d’un
musée. Donner accès aux collections, dans leur globalité, sur le Web est donc un
formidable outil de recherche. Je n’évoque ici que l’exemple de l’étudiant rédigeant une
dissertation ou un mémoire mais il en va de même pour le chercheur qui rédige sa
thèse ou intervient lors d’une conférence, d’une table-ronde ou d’un colloque, pour
l’enseignant qui prépare un cours pour sa classe ou encore pour le professionnel de la
culture qui cherche à renforcer ses connaissances.
Tout le monde s’est retrouvé dans la situation de devoir trouver des informations
dans l’immédiat, le Web permet cette immédiateté de l’accès aux données culturelles.
D’autant plus que cela sera effectué dans le respect de leur mission de transmission du
patrimoine à des fins d’éducation.
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2.3.1.3. Retrouver le patrimoine perdu
Diffuser le patrimoine culturel sur la Web c’est aussi permettre un accès
imaginaire au patrimoine perdu. Les guerres, les catastrophes climatiques ou
simplement le temps sont des facteurs de destruction ou de disparition de notre
patrimoine culturel. Cela concerne principalement le patrimoine architectural, les
abbayes médiévales, les châteaux, et tout autre type de monument aujourd’hui détruit
ou en ruines.
On trouve sur Internet des essais de reconstitution du patrimoine en 3D. Ces
essais, souvent basés sur des recherches scientifiques, proposent une vision de ce
qu’aurait pu être le monument ou les parties du monument aujourd’hui détruites. C’est
une solution qui a été appliquée pour beaucoup de témoins de notre patrimoine
architectural depuis longtemps. C’est le cas de l’abbaye de Cluny, dont un extrait du
film de sa reconstitution 3D «Maior Ecclesia» est mis en ligne sur le site du centre des
Monuments nationaux231. Ce film est décrit comme plus qu’un film, «une expérience
visuelle unique qui permet de découvrir l’immense église abbatiale du temps de sa
splendeur».
Toutefois, cet exemple n’est pas un véritable exemple de diffusion libre et
ouverte à tous sur le Web puisqu’il s’agit d’une prévisualisation d’un film disponible en
DVD, donc payant. Il est intéressant de relever le commentaire d’un internaute
demandant à ce que l’intégralité du film soit disponible sur le Web. Si ce type de
reconstitution était disponible sur le site Web de l’institution directement il est évident
qu’il trouverait un accueil chaleureux de la part des visiteurs-internautes.
2.3.1.4. Un accès pour le handicap
La réflexion sur le handicap et les musées s’est élaborée dans les musée dès la
fin des années 1940, notamment avec le public handicapé visuel. L’idée de rendre le
bâtiment physiquement accessible a émergé dans les années 1960 et dès 1975 une loi
fut votée pour l’orientation des personnes handicapées. Des cellules spécialisées sont
instituées dans les années 1970 au sein du ministère de la Culture et de la
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231 L’extrait en question est mis en ligne sur le site du CMN à cette adresse : <http://cluny.monuments-nationaux.fr/> et également disponible sur YouTube : <https://www.youtube.com/watch?v=LZICn_PlCFg> (consulté le 27 août 2013). Annexe sur blog : <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/cluny-numerique-extrait-du-film-maior-ecclesia-2010/> (consulté le 3 septembre 2013).
Communication, ainsi qu’au sein même des grands musées232. L’ICOM a bien
évidemment joué un rôle important dans la prise en compte des publics handicapés en
organisant plusieurs colloques internationaux233. Les musées ont été actifs dans leurs
propositions, avec notamment les visites tactiles proposées au Louvre234.
Parmi les handicaps, le handicap moteur est celui qui est le plus pris en charge
dans les musées grâce à des normes précises que ces derniers doivent respecter.
Parallèlement à ces normes d’accès, certains musées ont fait appel aux nombreuses
possibilités qu’offre le numérique pour permettre aux handicapés un accès à leurs
collections. C’est le cas au musée national du château de Malmaison qui a développé
une visite virtuelle de ses étages et des collections qui y sont présentées235 (Fig.30, p.
22 et annexe sur blog236). En effet, ce projet est parti de l’impossibilité pour le musée
de disposer d’ascenseurs (comme souvent dans les anciennes demeures et châteaux)
et de la volonté de permettre tout de même aux visiteurs handicapés moteur de pouvoir
profiter d’une façon ou d’une autre des collections. La visite virtuelle, rapidement
trouvée sur le site Web est disponible en ligne et également en tant qu’application pour
iPhone et iPad disponible sur iTunes237. Sur leur site Internet, le visiteur pourra
découvrir dans la section «Visite» un onglet «Handicap» dans lequel sont expliqués les
dispositifs conçus pour les handicapés moteurs notamment. Il est expliqué que tous les
espaces du rez-de-chaussée sont accessibles aux personnes à mobilité réduite, mais
que, en revanche, les étages étant inaccessibles faute d’ascenseurs, une application
de visite virtuelle est disponible gratuitement sur l’AppStore et le musée prête
gratuitement des iPads aux visiteurs ne disposant pas de leur propre terminal238.
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232 Une cellule d’accessibilité fut créée à la Villette en 1979.233 Colloques de 1988 et de 1995.234 O’NEILL M.-C., «Du public aux publics : analyse, ciblage et étude scientifique des visiteurs de musées», Introduction à la médiation culturelle, 1ère année de 2 ème cycle de l’École du Louvre, novembre-décembre 2012.235 Visite virtuelle en ligne : <http://www.chateau-malmaison.fr/visitevirtuelle> (consulté le 27 août 2013).236 <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/visite-virtuelle-du-musee-national-du-chateau-de-malmaison/> (consulté le 3 septembre 2013).237 Liste des applications disponibles : <http://www.chateau-malmaison.fr/fr/taxonomy/term/82>. Application iPad : <https://itunes.apple.com/fr/app/chateau-malmaison-fr-tablette/id503869570?mt=8> et application iPhone : <https://itunes.apple.com/fr/app/chateau-malmaison-fr-smartphone/id503872748?mt=8> (consulté le 27 août 2013).238 <http://www.chateau-malmaison.fr/fr/taxonomy/term/52> (consulté le 27 août 2013).
Ce type de dispositif est à prendre en exemple en ce qui concerne la mise à
disposition des collections de musées, qu’elles soient physiquement accessibles ou
non au sein des bâtiments, pour les visiteurs à mobilité réduite.
Outre le handicap moteur, les musées seront avisés de prendre en compte
d’autres handicaps et de suivre les directives édictées notamment par la Web
Accessibility Initiative (WAI), qui fait partie du W3C, et qui offrent des conseils aux
institutions pour s’assurer que les environnements numériques ne créent pas de
barrières pour les personnes avec un handicap. Des interfaces en braille, des
transcriptions audio et vidéo des contenus, des mécanismes de navigation adaptés, un
design clair utilisant des icônes, des chartes graphiques simples et des augmentateurs
d’écrans sont des exemples d’amélioration de l’environnement numérique adéquats à
certains handicaps239.
2.3.1.5. Un accès géographique
Enfin, le Web permet de réduire le fossé géographique entre le visiteur et le
musée. Il est vrai qu’en ce XXIe siècle, les transports, qu’ils soient aériens, ferrés ou
maritimes, facilitent nettement nos déplacements et nos voyages. Il est devenu
également beaucoup moins coûteux de voyager. Il n’empêche que tout curieux et
cultivé que l’on puisse être, nous ne pourrons pas visiter chaque musée ou institution
culturelle du monde. Le Web constitue l’un des moyens les plus adaptés à la mise à
disposition des collections muséales pour tous.
Une initiative comme le Google Art Project, par exemple, permet à un visiteur
lambda, vivant à l’étranger, dans un pays situé à une grande distance d’un musée qu’il
aimerait visiter, de pouvoir en parcourir les salles240. La distance géographique est un
des motifs de non visite des musées, ainsi, en mettant à disposition des internautes
des reproductions 2D ou 3D de leurs œuvres sur leur site Web ou sur un site dédié,
l’institution touche ce public de non-visiteurs. Ainsi, le musée pourrait tirer profit dans la
mise en ligne d’une visite virtuelle ou d’une visite 2D de ses collections. Comme le dit
Sébastien Magro, «cela donne la possibilité de pouvoir visiter le musée même si l’on
est à l’étranger» ou de visiter des musées situés dans des villes dans lesquelles nous
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
84
239 MÜLLER K., «Museums and Virtuality», in R. PARRY, 2010, p.302.240 Cf. 3.2.3. Le Google Art Project, p.123.
n’irions peut-être jamais parce qu’on «ne voyage pas partout dans le monde comme on
le souhaiterait»241. C’est également un moyen pour l’étudiant ou le chercheur de
trouver facilement des ressources, sans avoir à se déplacer.
2.3.2. Numérisation des collections et bibliothèques
numériques
«L’accès aux données numérisées, qu’il s’agisse de publications électroniques,
d’inventaire ou de patrimoine numérisé, est longtemps resté restrictif à des fins
scientifiques et de recherche. (...) Aujourd’hui, et tandis que les initiatives se multiplient
pour fédérer des accès à des ressources numériques, l’accès à l’ensemble des
données culturelles commence à faire l’objet d’une démarche coordonnée pour créer
des modes d’accès nouveaux et pour la promotion de ces ressources auprès du grand
public. Le nombre de bases pilotes mises en ligne croît rapidement»242.
2.3.2.1. Plans de numérisation : enjeux, intérêts et
problématiques
Les musées ont entrepris des campagnes de numérisation des collections
depuis plusieurs années. Par numérisation, il faut entendre «la mise en œuvre d’un
procédé visant à convertir un objet physique ou un support analogique, par un procédé
de reproduction photographique, en objet numérique, qui devient une copie de
substitution pour l’usage et la consultation»243. La numérisation en 2D est une
reproduction photographique des documents, tandis que la numérisation en 3D est une
reconstitution virtuelle d’un objet ou d’un monument244. La numérisation est un moyen
de sauvegarder le patrimoine matériel menacé d’être perdu ou fragile, mais c’est aussi
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
85
241 Entretien Sébastien Magro, Annexes, p.60.242 GREFFE X., SONNAC N., (dir.), Culture Web, création, contenus, économie numérique, Paris, Dalloz, 2008, p.559-600.243 MOUFFLET J.-F., Introduction au module Technologies Numériques, Institut National du Patrimoine, 24 janvier 2013.244 MOUFFLET J.-F., Table-ronde sur la numérisation du patrimoine culturel : principes et pratiques dans les différents secteurs patrimoniaux, Institut National du Patrimoine, Module Technologies Numériques, février 2013.
un excellent moyen de partager et diffuser les savoirs et les contenus de manière
efficace et rapide. «C’est un moyen de promouvoir la diversité culturelle et de la rendre
plus accessible.»245
Les campagnes de numérisation ont d’abord été l’apanage des bibliothèques.
Aujourd’hui encore, elles sont plus avancées dans le domaine des livres que dans celui
des collections muséales246. Les premières campagnes de numérisation de livres
conservés dans des bibliothèques publiques datent de 1971, avec le lancement du
projet Gutenberg initié par Michael Hart, alors étudiant à l’université de l’Illinois. En
2012, le site comptaient plus de 20 000 livres dans plus de 50 langues.247 Dès 1994,
Google entame son projet de numérisation et de mise en ligne de livres en partenariat
avec les bibliothèques américaines (la New York Public Library et les bibliothèques des
universités de Harvard, de Stanford et du Michigan) et européennes (la Bodleian
Library d’Oxford et, ultérieurement, les bibliothèques de Madrid et de Lyon). En 2011,
Google affirmait avoir numérisé 15 millions de livres provenant de 35000 éditeurs et de
40 bibliothèques en 400 langues et dans une centaine de pays. Google disposait d’une
avance considérable par rapport aux bibliothèques et aux éditeurs, mais ayant
numérisé des œuvres sous droits sans l’accord des ayant-droits, l’opposition avec les
acteurs du monde du livre fut houleuse. Les institutions françaises, cherchant à
prendre le contre-pied du géant américain, ont voulu construire leur propre stratégie de
numérisation. D’où le lancement, par la BnF, du portail Gallica, une «réponse “à la
française” à la stratégie de Google»248.
La numérisation des collections muséales a débuté dès l’arrivée des
technologies numériques au musée, pour répondre à un besoin d’informatisation des
collections dans des objectifs d’optimisation du travail. D’abord un outil pour gérer les
collections des musées donc, les images numériques des œuvres étaient utiles à
l’impression, à la documentation, à la recherche et le plus souvent donc pour la gestion
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
86
245 BERNARD F. De, «La dématérialisation des politiques culturelles, problématique et paradoxes de la culture numérique», in Culture et Numérique, Actes du 5e colloque interdisciplinair Icône-Image, Musée de Sens, Obsidiane, Sens, 2009, p.14.246 BENHAMOU F., Économie du patrimoine culturel, Paris, La Découverte, 2012, p.56.247 Id.248 Ibid.
des collections, la préparation de catalogues et la promotion d’expositions ou d’autres
activités propres au musée.249
L’intérêt principal de la numérisation des collections est de rendre le patrimoine
culturel plus facilement accessible à tous. Ainsi, les œuvres les plus fragiles, et donc
moins présentées au public, peuvent être visibles grâce à leur reproduction numérique.
Outre une meilleure gestion des collections, leur numérisation représente un moyen de
conserver et de préserver les œuvres les plus fragiles. De ce fait, la numérisation est
un élément clé des stratégies de conservation et de préservation des musées, étant
donné qu’une fois numérisées, les œuvres originales restent à l’abri des
manipulations250.
En permettant un accès plus facile aux collections, la numérisation permet ainsi
de démocratiser l’accès au savoir. En rassemblant les œuvres numérisées, le musée
contribue au bon déroulement de la recherche et de l’enseignement du patrimoine
culturel. Le numérique apparaît ainsi comme un «outil d’initiation et de compréhension
des œuvres, des cultures des peuples et des civilisations»251.
L’inconvénient majeur pour les institutions menant des plans de numérisation
reste tout de même la question du coût. Il est conseillé aux institutions culturelles de
prendre en compte tous les aspects d’un projet de numérisation et notamment le
traitement de l’image numérique. Les données numériques requièrent une attention
particulière. Nous savons que les supports numériques ont une durée de vie réduite, et
que les technologies numériques sont en constante évolution. Au coût global de la
numérisation s’ajoute donc le coût de la mise à jour des programmes et des logiciels.
Les musées doivent donc porter une attention des plus méticuleuses au bon
déroulement de leur projet de numérisation et de son adéquation avec la mission
centrale de l’institution252.
Numériser ses collections est un projet coûteux, mais il faut considérer cela
comme un «investissement à long terme susceptible de procurer des bénéfices
importants à un établissement.» Le temps, les moyens humains, matériels et
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
87
249 Réseau canadien d’information sur le patrimoine, Numérisez vos collections, Guide à l’intention des gestionnaires chargés de la planification et de la mise en œuvre de projets d’informatisation, Ottawa, 2000, p.3.250 Id., p.4.251 GREFFE X., SONNAC N., (dir.), Culture Web, création, contenus, économie numérique, Paris, Dalloz, 2008, p.600.252 Réseau canadien d’information sur le patrimoine, Op. cit., p.4.
économiques employés à la numérisation des collections auront des répercussions
nécessairement bénéfiques sur le déploiement de ressources pour d’autres activités et
d’autres projets. En outre, le coût d’un projet de numérisation et de mise à disposition
des collections peut être compensé par des «services offerts et des bénéfices obtenus
sur d'autres plans :
‣ obtention de ressources propres non plus sur les contenus et données mais sur
les services liés,
‣ prise en compte de l'ensemble des ressources apportées par l'ouverture, y
compris les gains indirects (image et visibilité de l'institution, conséquences sur la
fréquentation),
‣ importance de la présence des institutions françaises et de leur rayonnement
dans le monde,
‣ mutualisation et rationalisation des institutions, partage et réutilisation des
données entre institutions,
‣ production d'externalités positives : par l'activité économique engendrée par
l'ouverture des données et des contenus, rentrée d'impôts et de cotisations.»253
La numérisation des collections, bien qu’elle engage des frais, ne représente
pas une source de dépense au sens propre, si l’on s’attache à prendre en compte les
bénéfices futurs.
La finalité d’une opération de numérisation des collections est de donner accès
à ces dernières sur le Web. À travers les opérations de numérisation il s’agit de
répondre à une demande et un besoin formulé par les chercheurs, la communauté
scientifique, les professionnels, les étudiants et le public au sens large, d’accéder, sans
restrictions, au patrimoine culturel. Qu’en est-il donc de la gestion des collections
numérisées par le musée ? Quelles types de plate-formes existent ? Les initiatives
sont-elles privées ou publiques ? Comment les institutions compensent les frais
engendrés par les opérations de numérisation ? L’accès aux collections numérisées
peut-il être payant ?
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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253 JEAN B., MAUREL L., DE FILIPPI P., CHARMET-ALIX A., Open GLAM groupe, Recommandations pour l’ouverture des données et des contenus culturels, rapport du groupe de travail «Open GLAM», p.12, <http://donneeslibres.info/openglamFR.pdf> (consulté le 28 août 2013).
2.3.2.2. La création des portails culturels
Le rapport remis par le comité des Sages donne aux institutions des
recommandations quant à la gestion du patrimoine numérisé. Il est d’abord
recommandé que les œuvres relevant du domaine public, numérisées grâce à l'argent
public, doivent être librement accessibles à tous. Cette condition devrait, selon eux,
être sine qua non dans l’accord de financement pour la numérisation des œuvres du
domaine public en Europe254. En outre, il est recommandé aux institutions, dans leur
objectif de génération de bénéfices, d’envisager de nouvelles sources de revenus,
comme le sponsoring, les partenariats, la publicité et/ou des services liés à l'utilisation
du matériel culturel, plutôt que d’appliquer des tarifs à la consultation en ligne des
œuvres relevant du domaine public255.
Une fois les campagnes de numérisation lancées, il est vite apparu nécessaire
aux institutions, aux collectivités et à l’État de donner un accès en ligne sous forme de
banques d’images. Les collections numérisées ont donc été rassemblées en portails
culturels ou, autrement appelées, bibliothèques numériques. Ces banques d’images
avaient la lourde responsabilité de refléter les principes fondateurs des institutions tout
en donnant accès aux objets patrimoniaux.
Bien qu’ils aient été une composante essentielle du patrimoine numérique, ces
portails culturels se présentent sous des formes uniquement accessibles au public
averti de chercheurs, d’étudiants et de professionnels de la culture. Il est tout de même
difficile de manipuler et d’apprécier la consultation de fiches de description des
œuvres, mises en page de manière aussi scientifique, lorsque l’on n’est pas
connaisseur256. Et pour la plupart développés dans les années 2000, ils font appel à
des technologies qui ne sont plus adéquates avec les enjeux et les défis posés par le
Web d’aujourd’hui257.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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254 The New Renaissance, Report by the ‘Comité des Sages’, Reflection Group on Bringin Europe’s Cultural Heritage Online, 10 january 2011, Article 4.3.1., <http://ec.europa.eu/information_society/activities/digital_libraries/doc/refgroup/final_report_cds.pdf> (consulté le 28 août 2013).255 Id..256 VIDAL G., Contribution à l’étude de l’interactivité, les usages du multimédia au musée, Presses Universitaires de Bordeaux, 2006, p.40.257 BRÉBION P., TEXIER B., «La culture monte au portail», Archimag, n°220, décembre 2008-janvier 2009, p.21.
Les bibliothèques numériques de collections doivent s’adapter aux nouvelles
problématiques du Web social et de la portabilité. Il serait souhaitable qu’elles soient
accessibles au grand public.
2.3.2.3. Les banques d’images de musées en ligne
Les musées ont démontré leur volonté de donner un accès le plus large possible
à leurs collections, en mettant en ligne leur propres bases de données. Ainsi, cette
pratique illustre la volonté des musées d’enrichir leur offre Internet, au moins en terme
quantitatif258.
Cela a été le cas du musée du Louvre qui a mis en ligne en 2005 son nouveau
site Internet, et sur lequel ont été mises à disposition du public des bases de données
regroupant 172 000 œuvres ainsi que des outils multimédias, dénommés «œuvres à la
loupe» permettant de mettre en valeur une œuvre (Fig.31, p.22) 259.
Le musée du quai Branly a récemment lancé sa base de données en ligne en
donnant accès à quelques 300 000 œuvres. Le musée a choisi de donner accès à une
base plutôt destinée aux chercheurs, étudiants et professionnels et une autre plus
simplifiée, plutôt ciblée pour le grand public (Fig.32a et b, p.23-24).
Ces banques de données de musées diffèrent les unes des autres, en fonction
de leur ergonomie, de leur Web design, du nombre d’œuvres présentées, etc.
La banque de données de la Smithsonian Institution260, avec une esthétique
particulièrement attrayante, propose 860 477 images, vidéos, fichiers audio, podcasts,
blogs et revues électroniques. C’est un catalogue en ligne regroupant les plus grandes
collections de musées, archives, bibliothèques et centres de recherche (Fig.33, p.
25)261. La recherche parmi les objets de ces collections, d’ailleurs expliquée en
détail262, aboutit à l’affichage des objets de plusieurs manières, en diaporama ou en
liste prête à être imprimée, pour pouvoir ensuite être partagés directement sur les
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258 SCHAFER V., THIERRY B., COUILLARD N., «Les musées, acteurs sur le Web», La Lettre de l’Ocim, n°142, juillet-août 2012, «Les musées et Internet», p.11.259 GREFFE X., SONNAC N., (dir.), Culture Web, création, contenus, économie numérique, Paris, Dalloz, 2008, p.600. <http://www.louvre.fr/oal> (consulté le 31 août 2013). 260 <http://collections.si.edu/search/> (consulté le 28 août 2013).261 Rubrique «About Us» <http://collections.si.edu/search/about.htm> (consulté le 28 août 2013). Voir la liste des institutions partenaires. 262 <http://collections.si.edu/search/about.htm> (consulté le 28 août 2013).
réseaux sociaux numériques263. Cette plate-forme de recherche documentaire, au
contenu riche et au dynamisme novateur font de la Smithsonian Institution une
institution culturelle qui se démarque par sa présence en ligne innovante264.
Les bases de données de musées, français tout du moins, sont encore trop
pensées comme des bases de données destinées aux scientifiques, aux chercheurs et
aux étudiants. Les musées seraient avisés de prévoir la mise en ligne d’une autre base
de donnée, cette fois adaptée au grand public grâce à une mise en page ergonomique.
Une solution qui leur est offerte pour pallier aux difficultés de la mise en œuvre de
telles bases de données, est de mettre leurs efforts en commun. Des bases de
données inter-institutionnelles existent mais sont, dans l’ensemble, des initiatives
uniquement gouvernementales.
2.3.2.4. Bibliothèques numériques inter-institutionnelles
Les bibliothèques numériques existent sous plusieurs formes et ont été initiées
par différents organismes. Nous allons ici étudier le fonctionnement de trois
bibliothèques numériques différentes, la base Joconde, base des musées de
France ; le portail Culture.fr, une initiative du Ministère français de la Culture et
Europeana ; la bibliothèque numérique regroupant le patrimoine numérique européen.
2.3.2.4.1. La base Joconde
Réunie en une base unique en 2004, la base Joconde265, portail des collections
des musées de France, «s'inscrit dans une tradition éducative et humaniste assumée
par les musées depuis leur création à la fin du 18e siècle»266. Elle propose un demi-
million de notices documentaires et des parcours thématiques de recherche sur
différents sujets267 (Fig.34a, p.26). Les musées qui numérisent et informatisent leurs
collections, alimentent directement la base Joconde de leur collection.
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91
263 CLÉMENT F., «Collections en ligne : documentation et délectation à distance», in F. CLÉMENT, Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.75.264 Id., p.75-76.265 <http://www.culture.gouv.fr/documentation/joconde/fr/pres.htm> (consulté le 28 août 2013).266 Rubrique «À propos» : <http://www.culture.gouv.fr/documentation/joconde/fr/apropos/presentation-joconde.htm> (consulté le 28 août 2013).267 CLÉMENT F., Op. cit., p.76.
La base propose également plusieurs ressources intéressantes. Une liste des
catalogues en ligne de musées268, des expositions virtuelles par catégories269 ainsi que
des ressources générales sur le patrimoine culturel. En 2011, la base a reçu près d'un
million de visites par des visiteurs en provenance du monde entier270. La base propose
également un espace pour les professionnels, où sont donnés des informations et des
guides pratiques concernant la numérisation et la documentation des collections 271.
En ce qui concerne la recherche d’image, elle a les fonctionnalités classiques
d’une base de donnée, la possibilité de mener une recherche simple ou avancée, et
propose un guide d’utilisation pour l’usager. Les résultats de la recherche sont affichés
sous forme de liste, une icône pour l’image sur la gauche et un texte résumé sur la
droite et un hyperlien conduisant vers la notice détaillée. La fiche œuvre qui s’affiche
pourrait être plus attrayante que ce qu’elle n’est. Elle donne des informations très
détaillées mais difficilement compréhensibles lorsque l’on n’est pas habitué (Fig.34b, p.
26). L’image peut être téléchargée, c’est un atout considérable, malheureusement la
qualité est très simple.
La base Joconde est donc un outil d’enseignement et de recherche, plutôt
destiné aux professionnels de musée, aux enseignants, aux chercheurs et aux
étudiants. Mais une interface comme celle-ci n’est pas destinée au grand public.
2.3.2.4.2. Culture.fr272
La base Culture.fr, lancée par le ministère de la Culture et de Communication en
2007, regroupe les collections muséales françaises (Fig.35a, p.27). Les données
numériques partagées sur la base Joconde font partie des données partagées sur
Culture.fr. L’objectif de cette base était de «rendre plus lisible la richesse de l'offre
culturelle en ligne du Ministère» et de «participer à l'émergence d'un véritable service
public culturel de l'information et du numérique qui rend accessible des contenus
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92
268 <http://www.culture.gouv.fr/documentation/joconde/fr/partenaires/catalogues.htm> (consulté le 28 août 2013).269 <http://www.culture.gouv.fr/documentation/joconde/fr/partenaires/expos.htm> (consulté le 28 août 2013).270 CLÉMENT F., «Collections en ligne : documentation et délectation à distance», in F. CLÉMENT, Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.76.271 <http://www.culture.gouv.fr/documentation/joconde/fr/partenaires/AIDEMUSEES/aide-musees.htm> (consulté le 28 août 2013).272 <http://www.culture.fr/> (consulté le 28 août 2013).
culturels de grande qualité et labellisés scientifiquement produits et/ou détenus par le
Ministère, ses établissements publics sous tutelle et ses partenaires ; des services
culturels innovants ; des données publiques librement réutilisables, des API et
widgets ; des informations pratiques sur les événements culturels sur l'ensemble du
territoire»273.
La rubrique de présentation de la base la décrit comme un «outil de
démocratisation culturelle, {qui} propose un accès à plusieurs millions de références
sur le patrimoine culturel, intégrées dans une cinquantaine de bases de données
thématiques, validées par des spécialistes et experts dans ces domaines : œuvres de
musées, documents patrimoniaux de bibliothèques, fonds d'archives, patrimoine
monumental et mobilier, sites archéologiques... Plusieurs millions de ces références
sont notamment illustrées par des fonds numérisés directement accessibles.»274
Le site propose ainsi un accès fédéré à plus de 3 millions de références sur le
patrimoine culturel français et parfois étranger, bien que son champ d’action se limite
plutôt à la France étant donné le statut gouvernemental du projet. Le plan national de
numérisation, porté par le Ministère de la Culture, a permis de mettre en place ce
portail regroupant des œuvres muséales, des documents provenant de bibliothèques,
de fonds d’archives, de sites archéologique, etc...275
Plusieurs fonctionnalités sont proposées à l’usager, la possibilité de se
constituer un panier comme on le ferait sur les sites de commerce en ligne, la
possibilité de recevoir une newsletter mensuelle par email ou encore de connaître
l’actualité culturelle en France. Le site propose trois rubriques, une pour les
professionnels, une pour l’enseignement et une pour les jeunes. Le moteur de
recherche, appelé «Collections» (Fig.35b, 28), permet à l’usager d’être redéployé vers
les bases de données rassemblées dans la base Culture.fr. Au niveau du design de
l’interface, rien de nouveau ici donc. Un point positif est que le site recense toutes les
offres patrimoniales en ligne, concernant toutes sortes de patrimoines sous toutes
sortes de formes (visites virtuelles, reconstitutions 3D, etc) (Fig.35c, 29). C’est donc un
point de rassemblement immense du patrimoine culturel français dans son ensemble.
En cela, le site Culture.fr est particulièrement utile et pertinent.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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273 Rubrique «À propos» : <http://www.culture.fr/A-propos> (consulté le 28 août 2013).274 Id..275 MEURISSE J., «Le portail français culture.fr/collections», Culture et Recherche, n°118-119, automne-hiver 2008-2009, p.12.
Les statistiques démontre l’engouement pour le portail car depuis l’ouverture,
près de 1 million de pages ont été parcourues par 170 000 visiteurs276.
2.3.2.4.3. Europeana277
La bibliothèque numérique Europeana est née de la volonté de la Commission
européenne de garantir la disponibilité du patrimoine culturel et scientifique européen,
en le rendant accessible en ligne, sur tablettes, smartphones et API278. Europeana est
une plate-forme regroupant le patrimoine culturel européen provenant de collections
muséales, d’archives, de bibliothèques et d'archives audiovisuelles d'Europe (Fig.36, p.
30-31)279. Elle est financée par le Commission Européenne et les Ministères de la
Culture de vingt-et-un États membres280.
À travers une interface multilingue, l’usager peut effectuer ses recherches par
mots clés, en recherche simple ou avancée, parcourir les contenus thématiques etc., et
consulter plus de 25 millions de documents. Plus de 2 200 institutions 281 contribuent à
Europeana et garantissent l’authenticité des informations. En 2012, environ 4 millions
d’utilisateurs, provenant de 214 pays différents, ont consulté Europeana. La plate-
forme compte quatre fois plus de consultation à partir de supports mobiles
(smartphones et tablettes) en un an. Dans le contexte d’une utilisation libre et ouverte
des données culturelles, Europeana est placée sous licence Creative Commons CC0,
ce qui veut dire que ses métadonnées peuvent être librement réutilisées282.
Europeana utilise les médias sociaux à bon escient (Fig.36b, 30), un blog sur le
site est le lieu de diffusion d'un projet de crowd-sourcing, de collecte d'informations
auprès du public sur la guerre de 1914-1918283. En effet, les particuliers peuvent
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276 GREFFE X., SONNAC N., (dir.), Culture Web, création, contenus, économie numérique, Paris, Dalloz, 2008, p.600.277 <http://www.europeana.eu/> (consulté le 28 août 2013).278 COUSINS J., «Europeana, une vision devenue réalité», Culture et Recherche, n°118-119, automne-hiver 2008-2009.279 CLÉMENT F., «Collections en ligne : documentation et délectation à distance», in F. CLÉMENT, Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.76.280 Europeana, faits et chiffres, mars 2013.281 Parmi elles le Rijksmuseum d’Amsterdam, le Kunsthistorisches Museum de Vienne...282 Europeana, faits et chiffres, mars 2013.283 <http://www.europeana1914-1918.eu/fr> (consulté le 31 août 2013).
télécharger leurs propres documents numérisés sur le site284. L’exposition virtuelle
1914-1918 est une initiative de l'université d'Oxford : «les participants sont invités à
déposer des images et à partager leur histoire en lien avec ce conflit et les informations
sont par la suite accessibles à tous les internautes.»285 La plate-forme est ainsi ancrée
dans le Web social en permettant également à ses utilisateurs de partager les
contenus découverts sur les réseaux sociaux et de s’approprier les contenus en se
créant son espace personnel (My Europeana) (Fig.36c, p.31).
Au cours de l’année 2013, Europeana s’est offert un lifting et est passée d’une
interface sans design particulièrement attractif à un design soigné, respectant les
avancées technologiques en la matière. Elle s’est transformée en plate-forme
désormais beaucoup plus accessible au grand public.
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284 Europeana, faits et chiffres, mars 2013.285 CLÉMENT F., «Collections en ligne : documentation et délectation à distance», in F. CLÉMENT, Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.76-77.
3. Perspectives Nous avons commencé par évoquer dans les grandes lignes ce que
représente le Web d’aujourd’hui avec ses enjeux et les défis qu’il pose aux
musées. Nous avons ensuite évoqué l’appropriation du numérique par les
musées dans le passé, et la façon dont ils se situent sur l’environnement virtuel
actuel, les efforts accomplis en termes de diffusion du patrimoine culturel sur le
Web et les raisons de cette diffusion, si importante pour les musées aujourd’hui.
Après avoir étudié autant de sujets épineux, une question nous taraude.
Et maintenant, que fait-on ? À la lumière de cette étude, cette troisième partie
sera donc dédiée aux perspectives et aux actions à entreprendre. En premier lieu,
les institutions culturelles sont invitées à s’inspirer d’exemples innovants en
terme de visibilité du patrimoine culturel en ligne, sous toutes ses formes ;
ensuite, à savoir tendre la main aux entreprises du Web et notamment au géant
Google ; et enfin, à entreprendre des actions concernant la formation du
personnel et du public au numérique, en vue de mettre en place une stratégie.
Cette troisième et dernière partie proposera enfin une méthode de stratégie de
diffusion numérique des collections.
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3.1. S’inspirer des offres numériques innovantes
Sur le Web aujourd’hui, un visiteur souhaitant se renseigner sur un musée, un
monument ou une œuvre en particulier, trouvera un grand nombre d’offres numériques
innovantes. Les choix sont multiples, du site dédié aux collections pensé comme un
catalogue numérique interactif, en passant par la visite virtuelle panoramique jusqu’à la
3D. Chacune de ces offres a son objectif et ses fonctions propres, et chacune
représente un exemple d’innovation que la communauté muséale se doit de connaître
pour tenter de se l’approprier. Nous allons aborder cette question sous l’angle de la
typologie : tout d’abord le patrimoine en 2D, c’est-à-dire les reproductions
photograhiques 360° transposées en visites immersives et les catalogues interactifs de
collections en ligne ; ensuite, le patrimoine en 3D, avec les reconstitutions de
monuments et la présence virtuelle de ces derniers sur les jeux vidéos en ligne.
3.1.1. Patrimoine en 2D
3.1.1.1. La visite virtuelle immersive286
3.1.1.1.1. Qu’est-ce-qu’une visite virtuelle ?
L’acception «visite virtuelle» peut désigner plusieurs objets d’étude. Il peut s’agir
d’une visite virtuelle en photographie panoramique à 360°, d’une visite virtuelle en 3D
ou d’une visite virtuelle en 3D temps réel.
La visite virtuelle en en photographie panoramique à 360° est une visite
composée grâce à la prise de vue à 360° d’images d’un site. Cette technique est
utilisée dans beaucoup de musées, de monuments, de sites touristiques ou encore de
villes, mais également dans le secteur économique et commercial pour mettre en
valeur son entreprise sur le Web.
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97
286 Il ne s’agit pas ici d’une étude exhaustive, pour des raisons évidentes de temps et de limites de sujet, je n’ai pas recensé toutes les offres de visites immersives françaises et internationales. Pour plus d’exemples de visites virtuelles, voir : HEULIN C., «Visites virtuelles des musées et des lieux culturels», CLIC France, 29 mai 2013, <http://www.club-innovation-culture.fr/visites-virtuelles-des-musees-et-des-lieux-culturels/> (consulté le 28 août 2013).
Selon la définition de l’agence Mosquito287, «il s’agit d’une ou plusieurs prises de
vues reliées par une interface graphique, restituant un panorama à 360 degrés
permettant de visualiser toute une salle y compris le sol et le plafond. Ces scènes
panoramiques donnent la possibilité de découvrir les bâtiments, les salles de musée,
les expositions temporaires. Ces panoramas rendus interactifs permettent, d’un simple
clic, d’accéder à des notices d’oeuvres ou à des descriptions architecturales…»288 La
conception d’une visite virtuelle de ce type requiert la prestation d’un photographe
spécialisé en photographie interactive (panoramas et objets 3D) et en reproduction
d’oeuvres d’art (sculptures, tableaux, architecture).
La technique de la visite virtuelle à 360° appliquée au musée permet ainsi au
visiteur de naviguer à travers les salles du musée via Internet, en intérieur et/ou en
extérieur, à l’aide de son curseur. Il peut se déplacer horizontalement de gauche à
droite et verticalement de haut en bas.
Dans un sens, la visite virtuelle permet de répondre à la problématique de
l’accessibilité aux sites culturels, pour tous et de n’importe quel endroit. La visite
virtuelle de sites patrimoniaux classés permet de proposer aux visiteurs de naviguer à
travers un site qui n’est pas, ou difficilement, praticable dans la réalité pour des raisons
de fragilité, tout en proposant un divertissement éducatif289.
3.1.1.1.2. Patrimoine culturel français en visite virtuelle
Le site Web du musée du Louvre propose quelques visites virtuelles, qu’il
regroupe dans la rubrique «visites en lignes»290 : les antiquités égyptiennes, le Louvre
médiéval et la galerie Apollon.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
98
287 L’agence Mosquito est spécialisée dans la production de portails et de sites Internet institutionnels et culturels. Spécialiste du design interactif et des nouvelles technologies, Mosquito propose aux différents acteurs de la Culture une réalisation soignée, garante du respect de leur image dans l’univers multimédia, de sites institutionnels, scientifiques ou évènementiels. L’agence propose également une gamme de produits multimédias et d’applications modulaires allant des visites virtuelles interactives (musée Guimet, Musée des Arts Décoratifs, Musée de l’Orangerie...), aux boutiques électroniques, jusqu’aux audioguides adaptés en applications mobiles.288 <http://www.mosquito.fr/expertise/article/visites-virtuelles> (consulté le 28 août 2013).289 LEASK A., FYALL A., Managing World Heritage Sites, London, Routledge, 2012, p.135.290 <http://www.louvre.fr/visites-en-ligne> (consulté le 28 août 2013).
Prenons la visite virtuelle de la galerie Apollon pour exemple (Fig.37, p.31 et
annexes blog291). Lorsque l’on clique sur le lien, nous sommes renvoyés vers une page
Web proposant plusieurs rubriques : une histoire de la galerie Apollon, une
présentation de sa restauration, une visite virtuelle, des informations complémentaires
sur les trésors des rois de France, un plan, une rubrique sur son mécénat et d’autres
encore. En sélectionnant la rubrique «visite virtuelle», nous nous retrouvons face à un
encadré assez petit, proposant une visite panoramique du plafond de la galerie de
manière horizontale.
La visite virtuelle du Louvre médiéval est quant à elle plus ressemblante à ce
que l’on attend d’une visite virtuelle (Fig.38, p.32 et annexe blog292). Le visiteur se
retrouve devant un encadré au centre de l’écran, il peut naviguer de salles en salles
grâce à un plan interactif et cliquer sur une icône «i» pour avoir plus d’informations. Le
visiteur peut en apprendre plus sur les œuvres visibles dans la visite en cliquant sur
l’image. Une photo de l’œuvre apparaît alors, de qualité moyenne, ainsi qu’un cartel
donnant les informations basiques dans la partie inférieure de l’écran (Fig.38b, p.32).
Deux remarques cependant, le Web design pourrait être amélioré et la visite manque
d’une navigation verticale293.
La visite virtuelle des antiquités égyptiennes est similaire. L’effort apporté pour
proposer aux visiteurs une visite virtuelle interactive se ressent, cependant le Web
design et la conception de la visite virtuelle demanderaient à être améliorés pour
répondre aux besoins actuels. Des panoramas de salles ou d’objets phares sont
proposés, notamment la terrasse sur laquelle se trouve la Victoire de Samothrace,
l’encadré est toutefois de trop petite taille294 (Fig.39, p.33).
L’institut du Monde Arabe a lancé sa visite virtuelle immersive, lors de sa
fermeture pour travaux en 2010295 (Fig.40, p.33 et annexe blog296). Le projet de visite
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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291 <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/visite-en-ligne-de-la-galerie-dapollon-au-musee-du-louvre/> (consulté le 3 septembre 2013).292 <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/visite-en-ligne-du-louvre-medieval/> (consulté le 3 septembre 2013).293 <http://musee.louvre.fr/visite-louvre/index.html?defaultView=entresol.s489.p01&lang=FRA> (consulté le 1er septembre 2013).294 <http://www.louvre.fr/rooms/palier-de-la-victoire-de-samothrace-0> (consulté le 28 août 2013).295 <http://www.imarabe.org/sites/default/files/visite-vituelle-arts-islam-exposition/visite-virtuelle-ima-exposition-khalili.htm>. Cette visite virtuelle a été conçue par l’agence Show Around : <http://www.visites-virtuelles-showaround.com/>. (consultés le 28 août 2013).296 <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/visite-immersive-de-lexposition-temporaire-foi-sagesse-destinee-a-linstitut-du-monde-arabe/> (consulté le 3 septembre 2013).
virtuelle a été pensé comme un outil marketing «pour faire revivre ses expositions et
attirer de nouveaux publics»297. On retrouve les mêmes fonctionnalités que les
précédentes mais avec plus d’interactivité. La navigation est possible sous tous les
angles. Le visiteur peut zoomer sans toutefois avoir une qualité d’image exceptionnelle,
il peut se repérer sur un plan et consulter le guide de navigation en cas de besoin. Le
point fort de la visite virtuelle de l’Institut du Monde Arabe, est la possibilité qu’a le
visiteur d’écouter un commentaire audio correspondant à la salle visitée, tout en
naviguant dans celle-ci.
Le musée du quai Branly a été un des premiers musées français à lancer des
projets de visites virtuelles pour un évènement ou un lieu spécifique. Une visite virtuelle
interactive de son jardin est disponible sur son site Web (Fig.41, p.34). Elle est guidée
par son concepteur, Gilles Clément, conçue autour de huit séquences298.
Le Grand Palais a également proposé ce type de visite à l’occasion de
l’exposition «Bohèmes», qui s’est tenue du 26 Septembre 2012 au 14 Janvier 2013299.
Le visiteur est guidé par une conférencière du Grand Palais au travers d’une visite
virtuelle interactive aux fonctionnalités classiques. Le visiteur navigue de salle en salle,
soit à l’aide du plan interactif, soit à l’aide des flèches stylisées (Fig.42, p.35).
Les visites immersives de musées existent bien mais gagneraient à être plus
interactives et conçues dans un design attractif. Elles gagneraient également à
proposer une meilleure qualité d’image, permettant ainsi au visiteur de voir l’œuvre de
plus près, ce qui est, finalement, un des atouts les plus essentiels d’une visite virtuelle.
Elles sont aussi très répandues dans le patrimoine bâti. Les châteaux font partie
des institutions culturelles proposant systématiquement une visite virtuelle de leurs
bâtiments. C’est le cas par exemple du château de Blois (Fig.43, p.36)300. La visite est
possible sous tous les angles, le visiteur retrouve les fonctionnalités classiques d’une
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100
297 HÜBE S., «L’Institut du Monde Arabe invente la post-exposition virtuelle en haute définition», Club Culture & Innovation(s), 13/09/2010, <http://www.club-innovation-culture.fr/linstitut-du-monde-arabe-invente-la-post-exposition-virtuelle-en-haute-definition/> (consulté le 1er septembre 2013).
298 Entretien Sébastien Magro, Annexes, p.55. Annexe blog : <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/visite-immersive-du-jardin-du-musee-du-quai-branly-guidee-par-les-commentaires-de-gilles-clement-son-concepteur/> (consulté le 3 septembre 2013). <http://www.quaibranly.fr/fr/musee/espaces/le-jardin.html> (consulté le 28 août 2013). 299 Annexe blog : <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/visite-a-360-de-lexposition-bohemes-au-grand-palais/> (consulté le 3 septembre 2013). <http://www.grandpalais.fr/bohemes360/bohemes_360_web/tour.html> (consulté le 28 août 2013).300 Annexe blog : <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/visite-a-360-du-chateau-de-blois/> (consulté le 3 septembre 2013). <http://www.chateaudeblois.fr/?Vue-a-360o&lang=fr> (consulté le 28 août 2013).
visite virtuelle, qui est ici assez minimale. Il s’agit d’une vue à 360° de la cour du
château, l’intérieur n’est pas visible. Des icônes «i» pour «information» permettent au
visiteur de savoir de quel endroit ou de quelle salle il s’agit, mais il n’y a ni plus ni
moins que le nom. La visite a été conçue par HD média, dont on retrouve d’ailleurs la
mention sous forme d’une pastille qui serait comme collée au sol301. On pourrait
d’ailleurs déplorer ici la présence un peu «tape à l’oeil» d’une image de marque qui
ressemble plus à de la publicité qu’à un copyright et qui pourrait gâcher la visite
virtuelle.
Les extérieurs du château de Chambord peuvent également être visités sous
tous les angles (Fig.44, p.36) 302 . Les prises de vues ont été effectuées entre 2008 et
2009 et la visite virtuelle fut disponible sur le site quelques mois plus tard303. Ici, les
informations supplémentaires fournies au visiteur sont rassemblées dans un texte
introductif qui présente le château. La visite virtuelle reprend les caractéristiques
classiques d’une visite virtuelle, mais n’intègre pas d’informations au sein du parcours.
Ces exemples nous montrent que les musées français font preuve d’un esprit
créatif dans leurs projets numériques et qu’ils ont une matière riche à explorer. Des cas
étrangers pourraient leur servir de source d’inspiration.
3.1.1.1.4. À l’étranger
Il semblerait qu’à l’étranger la visite immersive interactive soit tout aussi
répandue dans les musées que dans les monuments. C’est le cas du museum
d’histoire naturelle de la Smithsonian Institution (Fig.45, p.37-38) 304 . On retrouve ici
encore toutes les fonctionnalités d’une visite virtuelle interactive avec en prime une très
bonne qualité d’image. En cliquant sur une icône représentant un appareil photo, le
visiteur peut admirer une photographie en haute résolution de l’objet (Fig.45c, p.38).
Pas de présence, toutefois, d’informations sur les objets. Cet exemple est, il faut le
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101
301 <http://www.hdmedia.fr/visite-virtuelle/hd/cbpzdpc5d-fr-evelyne-allard-chateau-royal-de-blois-.html> (consulté le 28 août 2013).302 Annexe blog : <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/visite-virtuelle-du-chateau-de-chambord/> (consulté le 3 septembre 2013).303 <http://www.podibus.com/Chambord_VR/#1> (consulté le 31 août 2013).304 Annexe blog : <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/visite-virtuelle-du-museum-dhistoire-naturelle-de-la-smithsonian-institution/> (consulté le 3 septembre 2013). <http://www.mnh.si.edu/vtp/1-desktop/> (consulté le 28 août 2013).
préciser, tiré d’un museum d’histoire naturelle, qui s’inscrit dans une catégorie des plus
avant-gardistes en ce qui concerne les technologies numériques.
La Frick Collection, quant à elle, nous montre qu’une visite virtuelle interactive
peut aussi exister dans les musées de beaux-arts, mais là encore la navigation est
linéaire (Fig.46, p.38)305. La qualité de celle-ci est par contre ce qui fait l’intérêt de
l’expérience. Non seulement le visiteur peut zoomer sur les tableaux et se retrouver
face à une image de très bonne qualité, mais en outre, il lui est donné la possibilité, en
cliquant, d’être renvoyé grâce à un système d’hyperliens vers la fiche œuvre du site
Internet. En outre, le visiteur peut écouter, ou non, un commentaire audio donnant des
informations sur la salle visitée ainsi que sur les œuvres présentées, et ce en plusieurs
langues.
Depuis plusieurs années les étudiants de la Villanova University (Pennsylvanie)
participant au programme en collaboration avec le Vatican, ont conçu de nombreuses
visites virtuelles des lieux du Vatican, notamment celle de la chapelle Sixtine (Fig.47, p.
39) 306 . La visite, créée à partir de prises de vue à 360° permet au visiteur de pénétrer
au sein de la chapelle et d’admirer les fresques de Michel-Ange sans avoir à se tordre
le cou307. Les peintures sont visibles en haute résolution comme jamais le visiteur ne
pourrait les contempler en réalité. Ce type de visite virtuelle illustre à la fois une
initiative institutionnelle de valorisation et de diffusion du patrimoine, et à la fois le choix
de s’associer avec des chercheurs pour effectuer un travail collaboratif.
Ainsi, on s’aperçoit que la visite immersive interactive est plus répandue dans le
milieu du patrimoine architectural, monuments, châteaux, villes, etc. Et cela paraît
finalement assez logique, étant donné que c’est un patrimoine qui demande à être vu
sous tous les angles possibles. Cela n’empêche que ce type de visite étant largement
apprécié par les internautes, il serait avisé de la part des musées de concevoir des
visites immersives interactives ou, du moins, d’améliorer celles qui existent déjà.
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102
305 Annexe blog : <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/visite-virtuelle-de-la-frick-collection/> (consulté le 3 septembre 2013). <http://www.frick.org/visit/virtual_tour/west_gallery> (consulté le 28 août 2013).306 <http://www1.villanova.edu/villanova/media/pressreleases/2010/0806.html> (Consulté le 31 août 2013).307 <http://www.vatican.va/various/cappelle/sistina_vr/index.html> (Consulté le 31 août 2013).
3.1.1.2. Les catalogues virtuels des collections : l’exemple du
Rijksstudio
3.1.1.2.1. Contexte de la création
Le 13 avril dernier, le Rijskmuseum d’Amsterdam a réouvert après près de 10
ans de rénovation. Pour anticiper sa réouverture, un nouveau site Web a été lancé le
31 octobre 2012, avec un nouveau concept des plus innovants : le Rijksstudio308.
Lors de l’édition 2013 des Rencontres Nationales Culture & Innovation309,
Martinj Pronk, responsable des publications au Rijksmuseum, a présenté ce projet. Le
Rijksstudio propose 525 000 objets d’art dont 125 000 images en haute résolution,
disponibles en ligne gratuitement et à portée de tous310. Ce projet est né de plusieurs
réflexions menées sur les enjeux du Web et des usages du numérique, ainsi que sur
les bilans de l’ancien site Web du Rijksmuseum.
La conception du Rijksstudio a été pensée dans le contexte de la mise en ligne
des collections et de leurs images. De nombreux musées ont numérisé une grande
partie de leurs collections, mais bien que riches en contenu, les «musées virtuels»,
selon l’expression consacrée, ne prennent la forme que d'une base de données,
pensée plus en termes administratif d’accès aux données culturelles, qu’en termes de
plaisir esthétique.
Bien souvent les images sont présentées sous forme de vignettes. Elles peuvent
être parfois agrandies, mais sont soumises à diverses restrictions techniques qui
empêchent de vivre une expérience de manière conviviale. À l’inverse, le Rijsksstudio
propose au visiteur une expérience nouvelle et conviviale de visualisation et de
manipulation des collections du Rijksmuseum311.
Taco Dibbits, directeur des collections du Rijksmuseum, raconte dans une
inteview qu’il perçoit Internet comme un «formidable et dynamique outil de partage des
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
103
308 GORGELS P., «Rijksstudio: Make Your Own Masterpiece!», Museums an the Web 2013, April 17-20, 2013, Portland, OR, USA, <http://mw2013.museumsandtheweb.com/paper/rijksstudio-make-your-own-masterpiece/>. Le Rijksstudio : <https://www.rijksmuseum.nl/en/rijksstudio>. (consultés le 28 août 2013).309 Rencontres Nationales Culture & Innovation (RNCI), «Mobilité, communauté et virtualité : les musées, lieux de patrimoine et de science face aux nouveaux enjeux du numérique», Paris, Cité des Sciences et de l’Industrie, vendredi 1er février 2013, <http://www.club-innovation-culture.fr/rencontres-culture-innovations/rnci-13-presentation/> (consulté le 28 août 2013).310 PRONK M., «Rijkmuseum: premier bilan du Rijksstudio», RNCI 2013.311 GORGELS P., Op.cit.
images et du savoir, un outil libérateur grâce auquel on peut se rapprocher et toucher
aux images, les agrandir et les réduire par le biais des écrans tactiles»312. Selon lui, le
principal attrait d'Internet réside dans sa capacité à «donner accès aux images et aux
informations sur les collections partout et à toute heure».
En effet, Martinj Pronk évoquait justement la masse d’images disponibles sur le
Net, disant que des sites comme Pinterest permettaient en quelque sorte de mettre de
l’ordre dans toute cette masse, et que son équipe s’était justement beaucoup inspirée
de Pinterest pour la conception du projet313. Selon lui, il y a plusieurs enjeux à prendre
en compte. Tout d’abord, il faut proposer des «matériaux libres de droits sous forme de
contenus réellement libre». Les musées, qui sont peu nombreux à proposer des
contenus libres, gèrent pourtant des matériaux qui le sont de droit. Les musées doivent
prendre en compte le changement de la notion même de copyright et aborder cette
question avec plus de flexibilité, en se tournant vers des actions comme celles
entreprises par le mouvement Creative Commons314.
Il faut ensuite prendre en compte l’émergence d’un «design libre». À l’ère d’une
nouvelle révolution industrielle, les internautes retravaillent les images par leurs
propres moyens, aujourd’hui «il suffit d’installer photoshop pour être un artiste»315.
L’utilisation d’Internet par le public est également un nouvel enjeu du Web, «ce
n’est plus l’appareil qui est au centre mais la demande de l’utilisateur». L’utilisateur
faisant appel à de nouveaux supports comme les smartphones et les tablettes, «un bon
site Web doit être mobile»316. Selon l’éditeur et responsable du Rijksstudio, l’année
2013 sera celle des sites mobiles.
Les applications ou «apps» constituent un autre facteur de changement. Elles
sont simples d’utilisation, utiles et conviviales. Elles sont toutefois difficilement
trouvables, ont une durée de vie limitée et demandent constamment des mises à jour.
Elles prennent aussi de la place sur les terminaux mobiles des usagers. Un site Web,
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104
312 «Leading visions on the future of Internet 2012», série de courts entretiens sur l'avenir du Web produite en 2012 par Frommees à l'occasion de la conférence The Next Web, <http://vimeopro.com/hitenrun/leading-internet-visions-2012> (consulté le 28 août 2013).313 PRONK M., «Rijkmuseum: premier bilan du Rijkstudio», RNCI 2013.314 BALLADE NOÉ H., «RNCI 2013 / Intervention Martinj Pronk : « Rijkmuseum: premier bilan du Rijkstudio » / Retranscription», Club Innovation & Culture France, 18 février 2013, <http://www.club-innovation-culture.fr/rnci-2013-intervention-martinj-pronk-rijkmuseum-premier-bilan-du-rijkstudio-retranscription/> (consulté le 28 août 2013).315 PRONK M., Op.cit.316 Id.
lui, ne présente pas ces désavantages, il n’a pas besoin d’être installé et fonctionne sur
tous les systèmes d’exploitation, alors qu’une app est développée pour un système
spécifique317.
Enfin, la présence et la visibilité des collections du Rijksmuseum ont été
repensées. Dès l’arrivée du Google Art Project, le musée s’est lancé dans l’aventure.
Ils ont en effet un objectif en commun : mettre les collections facilement à la portée du
plus grand nombre. Quant à leur site Internet, mise en ligne en 2004, il était devenu,
comme beaucoup avec le temps, une «immense base de données»318. Il comprenait
une collection en ligne d’images de petit format et une base de données éducative.
L’information était fragmentée et trop d'options étaient proposées sans que la
navigation à travers les pages soit claire. Sa structure était basée sur la structure du
musée in-situ. Dans l’ensemble, il était donc complexe et lourd.
Ainsi, la rénovation du Rijksmuseum a été l’occasion de définir une stratégie
numérique réfléchie. Cette e-stratégie, conçue par Peter Gorgels, le gestionnaire des
communications numériques au Rijksmuseum319, a été pensée pour un public en
particulier, ce qu’on appelle les «culture snackers». Le «culture snacker» vit dans une
société de l’image. Il partage un nombre considérable d’images sur les réseaux
sociaux avec ses amis et veut se créer ses propres banques d’images320.
Enfin, cette stratégie repose sur quelques éléments clés :
‣ simplicité (le site ressemble à une app)
‣ une conception «responsive» (le site s’adapte au support mobile)
‣ un contenu libre et à partager (le site propose une API et permet aux utilisateurs
de partager les contenus via les réseaux sociaux notamment)
‣ surprendre et séduire321
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
105
317 BALLADE NOÉ H., «RNCI 2013 / Intervention Martinj Pronk : « Rijkmuseum: premier bilan du Rijksstudio » / Retranscription», Club Innovation & Culture France, 18 février 2013, <http://www.club-innovation-culture.fr/rnci-2013-intervention-martinj-pronk-rijkmuseum-premier-bilan-du-rijkstudio-retranscription/> (consulté le 28 août 2013). En effet, une app peut être développée pour Apple, Android, Windows Phone ou Blackberry, les deux premiers étant les leaders du marché.318 GORGELS P., «Rijksstudio: Make Your Own Masterpiece!», Museums an the Web 2013, April 17-20, 2013, Portland, OR, USA, <http://mw2013.museumsandtheweb.com/paper/rijksstudio-make-your-own-masterpiece/> (consulté le 28 août 2013).319 CLÉMENT F., «L’art de l’ouverture au Rijksmuseum», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.32.320 GORGELS P., Op.cit.321 PRONK M., «Rijkmuseum: premier bilan du Rijksstudio», RNCI 2013.
Deux termes à retenir donc, pour définir la stratégie numérique du Rijksstudio :
simplicité et clarté.
3.1.1.2.2. Fonctionnalités
Le site propose plusieurs fonctionnalités. Il est tout d’abord disponible en
néerlandais et en anglais. La structure et le graphisme, épurés et clairs, font écho aux
applications mobiles innovantes (Fig.48a, p.39). Le site fonctionne grâce à trois onglets
principaux : la planification des visites (expositions, informations pratiques, etc), le
musée lui-même (mission, organisation, administration, etc) et les collections322.
Le Rijksmuseum croit en la force des images elles-mêmes, qui servent à
proposer une expérience esthétique en ligne attractive pour l’utilisateur. Comme le
formule Taco Dibbits lors du lancement du Rijksstudio, «nous croyons en la force de
nos chefs d’œuvres. Nous croyons aussi qu’ils appartiennent à tous et qu’il y a un
artiste dans chacun de nous»323.
Les images sont disponibles en haute résolution324 ce qui représente une réelle
valeur ajoutée pour l'utilisateur. Les 125 000 reproductions numériques de haute
qualité, peuvent être réutilisées gratuitement, sans aucune limitation. Ce ne sont pas
des «vignettes», et il n'y a pas de filigranes ou des restrictions de partage325.
Grâce au Rijksstudio, l’utilisateur est invité à aller au plus près de l’œuvre en la
«touchant» à travers l’écran de sa tablette mobile (Fig.48b, p.40). Les possibilités
d’appropriation des œuvres génèrent un véritable lien d’intimité avec le public.
Que ce soit le «culture snacker», l’amateur d’art ou le professionnel, tous y
trouvent une sélection attrayante d’œuvres d'art dans la section «Explore the
collection» (Fig.48c, p.40). L’idée est de faire une sélection. Les informations données
ne sont pas exhaustives, on y trouve seulement les plus essentielles pour introduire
l’histoire de l'art à un large public. Une grande partie de l'information «encyclopédique»
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
106
322 CLÉMENT F., «L’art de l’ouverture au Rijksmuseum», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.32.323 GORGELS P., «Rijksstudio: Make Your Own Masterpiece!», Museums an the Web 2013, April 17-20, 2013, Portland, OR, USA, <http://mw2013.museumsandtheweb.com/paper/rijksstudio-make-your-own-masterpiece/> (consulté le 28 août 2013).324 2500 x 2500 pixels, 300 dpi.325 GORGELS P., Op. cit.
qui figurait sur l'ancien site du Rijksmuseum peut être retrouvée ailleurs, sur des sites
comme Wikipédia326.
Pour une recherche spécifique, l’utilisateur peut se tourner vers la rubrique
«Search the collection» (Fig.48d, p.41), reprenant les caractéristiques classique d’une
recherche avancée dans les bases de données. Il est d’ailleurs possible d'effectuer une
recherche par couleur prédominante (Fig.48e, p.41).
Dans la rubrique «collections» on peut s’amuser et même créer avec les
œuvres. Les utilisateurs peuvent les «aimer», les partager et les utiliser de plusieurs
manières. Des icônes extrêmement simples (des ciseaux, un cœur, etc.) rendent les
possibilités d’utilisation des images très claires (Fig.48f, p.42)327.
L’utilisateur peut par exemple, avec la fonctionnalité «Get to work with your
Rijksstudio», télécharger l’image en entier ou la rogner pour n'en prendre qu'un détail
(Fig.48f-48g, p.42). Il peut également zoomer, et avoir accès aux métadonnées (en
néerlandais uniquement). Et enfin, conserver ses images dans sa propre galerie
virtuelle créée sur le site328 (Fig.48h, p.43).
Le concept de galerie personnelle fait écho au tableau Pinterest, dont le
Rijksstudio s’est inspiré. Ici, «chaque visiteur est le directeur de son propre musée»329.
Tous les studios créés sont d’ailleurs publics et on peut créer autant de collections
qu’on le souhaite.
Les images ou des parties d’images peuvent être imprimées en carte postale ou
sur tout type de support (tissu, métal, plexiglas) pour décorer son intérieur (Fig.48i, p.
43). Elles peuvent être téléchargées en haute résolution pour des créations de toutes
sortes : des tee-shirts, une nappe, un foulard, ou même encore une voiture. Les
commandes pour des produits spécifiques sont traitées par la société Peecho, une
start-up néerlandaise, qui a installé une API sur le site renvoyant vers diverses sociétés
d'impression à la demande330.
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326 GORGELS P., «Rijksstudio: Make Your Own Masterpiece!», Museums an the Web 2013, April 17-20, 2013, Portland, OR, USA, <http://mw2013.museumsandtheweb.com/paper/rijksstudio-make-your-own-masterpiece/> (consulté le 28 août 2013).327 CLÉMENT F., «L’art de l’ouverture au Rijksmuseum», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.32.328 Id.329 PRONK M., «Rijkmuseum: premier bilan du Rijksstudio», RNCI 2013.330 GORGELS P., Op.cit.
Des artistes et designers de renom ont été contactés pour produire des œuvres
inspirées de la collection du Rijksmuseum. Rachel Harding du Studio Droog a conçu un
remarquable tatouage inspiré d’une nature morte du peintre dix-septièmiste Jan de
Heem Davidszoon (Fig.48j, p.44). Christian Borstlap a quant à lui produit une animation
vidéo dans laquelle il donne vie à diverses copies de la collection. Le Rijksstudio reste
le «petit-frère» du site Web du musée, où il est toujours possible d’aller voir les
collections331.
3.1.1.2.3. Bilan
Les résultats du projet ont dépassé de loin les attentes du Rijksmuseum. Le
concept a été très bien reçu aux Pays-Bas et à l'étranger, la presse en parle comme
d’un projet «révolutionnaire»332.
La conception du site, élaborée durant les dix années de rénovation du musée,
a nécessité un budget de 1,115 millions d’euros. 700 000€ ont été alloués à sa
conception pure, une partie a été financée par un don de la loterie néerlandaise, et
500 000€ ont été réservés à la campagne marketing accompagnant le lancement. En
2012, le musée a compté 1 million de visiteurs physiques contre 3 millions de visiteurs
sur le site Web. Depuis le lancement du nouveau site le 30 octobre 2012, 1 million de
visiteurs se sont connectés au Rijksstudio, 32 000 studios ont été créés, 10 000
images téléchargées pour un usage privé, 25% de connexions via un support mobile
(dont la moitié étant des iPads), la durée moyenne de visite du site est estimée à
10,5 min (via un ordinateur de bureau) et 15,8 min (via une tablette)333.
L’utilisation du site et la création de studios par les internautes sont très diverses
et assez étonnantes. Certains sauvegardent leurs favoris, d’autres créent des
collections thématiques, et d’autres encore sont particulièrement créatifs. C’est le cas
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331 PRONK M., «Rijkmuseum: premier bilan du Rijksstudio», RNCI 2013.332 GORGELS P., «Rijksstudio: Make Your Own Masterpiece!», Museums an the Web 2013, April 17-20, 2013, Portland, OR, USA, <http://mw2013.museumsandtheweb.com/paper/rijksstudio-make-your-own-masterpiece/> (consulté le 28 août 2013).333 BALLADE NOÉ H., «RNCI 2013 / Intervention Martinj Pronk : « Rijkmuseum: premier bilan du Rijkstudio » / Retranscription», Club Innovation & Culture France, 18 février 2013, <http://www.club-innovation-culture.fr/rnci-2013-intervention-martinj-pronk-rijkmuseum-premier-bilan-du-rijkstudio-retranscription/> (consulté le 28 août 2013).
du studio intitulé «Bottom Left» créé par Mark Creegan, qui recueille seulement les
parties inférieures gauches des tableaux (Fig.48k, p.44)334.
Seul les commandes de produits ne sont pas conformes aux attentes de
l’institution, leur processus est quelque peu complexe et c’est ce qui repousse les
utilisateurs.
Le site a reçu le prix «Best of the Web» pour le site «innovatif et expérimental»
de l’édition 2013 de la conférence Museums and The Web. Le jury a notamment salué
le courage, l’ouverture et l’investissement du projet335.
3.1.1.2.4. Réflexions sur le Rijksstudio
Le Rijksstudio est un exemple unique en son genre de mise en ligne des
collections sur une interface qui allie participation du visiteur, interactivité et simplicité,
le tout conçu dans Web design attrayant. La fluidité de la navigation à travers le site
donne envie non seulement d’y rester mais d’y retourner. Le musée fidélise ainsi son
public336. Grâce à cette interface innovante, la version mobile du site permet un
rapprochement de l’utilisateur avec les œuvres. Celui-ci peut se les approprier en les
touchant via l’écran tactile, contrairement au musée physique dans lequel il ne peut
bien évidemment pas entrer en contact physique avec les œuvres. La possibilité de se
créer son propre studio nous rappelle les fondements des premiers studioli et cabinets
de curiosités. Ici les studios peuvent être visibles de tous ou rester dans la sphère
privée.
La grande innovation réside dans la possibilité de télécharger les images en
haute résolution gratuitement, dans les limites d’une utilisation personnelle, éducative
ou simplement non commerciale. Innovation qui pose toutefois des questions de
copyright que tous les musées ne sont pas près à se poser, loin de là.
Le Rijksstudio interroge aussi la question de l’aura de l’œuvre, pour reprendre la
formulation de Walter Benjamin. Cet accès aussi libre et permissif ne va-t-il pas
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334 GORGELS P., «Rijksstudio: Make Your Own Masterpiece!», Museums an the Web 2013, April 17-20, 2013, Portland, OR, USA, <http://mw2013.museumsandtheweb.com/paper/rijksstudio-make-your-own-masterpiece/> (consulté le 28 août 2013).335 Museums and the Web 2013, Best of the Web Winners, <http://mw2013.museumsandtheweb.com/best-of-the-web-winners/> (consulté le 28 août 2013).336 CLÉMENT F., «L’art de l’ouverture au Rijksmuseum», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.32.
provoquer une baisse de la fréquentation du musée ? Le Rijksmuseum est convaincu
que la visite du musée ne va pas en pâtir. Le fait de voir ces collections en ligne est en
réalité un instrument marketing de promotion muséale.
Le Rijksstudio permet aux utilisateurs de s’approprier et de manipuler
directement les œuvres d’art, c’est un point qui soulève bien des sourcils dans la
communauté muséale mais qui, selon le Rijksmuseum, permet d'améliorer l'aura de
l'œuvre originale, et non pas lui nuire337.
Pour ma part, je ne pense pas que l’utilisation de l’œuvre permise par le
Rijksstudio soit dégradante, elle est bien au contraire valorisante, et plus encore, elle
est une formidable expérience proposée à l’usager. Les collections sont préservées et
valorisées, dans le but final d’être présentées au public. Le Rijksstudio est un moyen
fascinant pour le public d’être au plus près de son patrimoine culturel, de se
l’approprier, de l’emporter avec lui et de le partager. Avec son projet innovant de
diffusion numérique de ses collections, le Rijksmuseum propose ainsi une réponse
exemplaire aux grands principes et enjeux posés par l’environnement virtuel actuel.
3.1.2. Patrimoine en 3D
3.1.2.1. La 3D : définitions et usages
Les images en 3D sont des «images reproduites en relief dans des animations
ou des mondes virtuels»338. Les techniques 3D ont été utilisées dans de nombreux
champs d’activités depuis un certain temps, mais c’est dans les jeux vidéos qu’elle
s’est faite connaître du grand public, et aujourd’hui dans le cinéma339. Dans le secteur
culturel on fait appel aux techniques 3D depuis de nombreuses années pour des
opérations de conservation-restauration par exemple. Les modélisations 3D d’objets
permettent par exemple de mieux comprendre leur fonctionnement pour optimiser leur
restauration340.
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337 GORGELS P., «Rijksstudio: Make Your Own Masterpiece!», Museums an the Web 2013, April 17-20, 2013, Portland, OR, USA, <http://mw2013.museumsandtheweb.com/paper/rijksstudio-make-your-own-masterpiece/> (consulté le 28 août 2013).338 SCHERER É., La révolution numérique: glossaire, Paris, Dalloz, 2009, p.171.339 Avec des blockbusters comme Avatar de James Cameron (2009).340 Site du C2RMF, «La restauration du mobilier», <http://www.technologies.c2rmf.fr/3D/mobilier>.
On parle également de 3D haute définition, dans ce cas «la définition de l’image
est déterminée par le nombre de points captés par cm2. Elle se conjugue à la précision,
qui dépend des caméras et de la distance à laquelle l’objet est numérisé»341.
Il existe aussi ce que l’on nomme «3D temps réel». Il s’agit d’une 3D
manipulable, dans laquelle on peut se déplacer son avatar et le faire interagir, afficher
sur un écran les images d’un environnement en 3D, ajoutant à la sensation de
profondeur une possibilité d’interaction en temps réel342.
La 3D est souvent confondue avec la réalité virtuelle, qui est un dispositif
comportant un visio-casque qui invite à pénétrer à l’intérieur d’un espace virtuel. «La
réalité virtuelle (RV) est un concept rendu possible par un système capable de
permettre à l'utilisateur de s'extraire de la réalité physique pour changer virtuellement
de temps, de lieu et (ou) de type d'interaction : interaction avec un environnement
simulant la réalité ou interaction avec un monde imaginaire ou symbolique»343.
On entend également parler de réalité augmentée dans les disposititfs
numériques innovants utilisés par les institutions culturelles. «La réalité augmentée
(RA) est un concept rendu possible par un système capable de faire coexister
spatialement et temporellement un monde virtuel avec l'environnement réel. Cette
coexistence a pour objectif l'enrichissement de la perception de l'utilisateur de son
environnement réel par des augmentations visuelles, sonores ou haptiques.
L'environnement peut être d’intérieur (indoor) ou d'extérieur (outdoor). L'utilisateur peut
être présent dans l'environnement réel (réalité augmentée en vision directe sur site) ou
peut le percevoir à distance (réalité augmentée en vision indirecte généralement hors
site).»344 Un dispositif de réalité augmentée, les bornes «ray-on», a récemment été
installé à l’abbaye de Cluny345.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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341 Site du C2RMF, «L’imagerie 3D», <http://www.technologies.c2rmf.fr/3D>.342 LECLERCQ C., Patrimoine et conversion numérique, 1ère année de 2ème cycle, École du Louvre, 2012.343 FUCHS et MALLEM, 2009.344 FUCHS et MALLEM, 2009.345 <http://www.cluny-numerique.fr/fr/projets-en-cours/bornes-ray-on>. Le projet Culture Clic est un autre exemple de dispositif de réalité augmentée, projet qui a fait l’objet d’un suivi du Ministère de la Culture et de la Communication. Il se présente comme une application à télécharger via iTunes, qui comprend 850 œuvres géolocalisées, accessibles en réalité augmentée. Il semblerait que le projet ait été mis en suspens. <http://www.cultureclic.fr/>.
Leonard Steinbach recommande aux musées de proposer une expérience 3D
de leurs collections pour plusieurs raisons346 :
‣ La visualisation d’un objet ou d’un espace en 3D est de fait plus captivant ;
‣ Les musées peuvent choisir d’utiliser la 3D pour des projets éducatifs ou
scientifiques, la 3D n’a pas à se cantonner au simple but de donner envie ;
‣ Les outils et les techniques pour créer et présenter une imagerie 3D s’améliorent,
sont moins coûteux et plus faciles d’utilisation ;
‣ L’utilisation de la 3D est une manière de croiser des capacités et des
expérimentations qui sont de l’ordre du théâtre, de la galerie, des environnements
immersifs, et de la présence sur le Web ;
‣ Que les musées présentent ou non leurs collections en 3D, le public le fera lui-
même étant donnée la facilité d’accès à ce type d’outils aujourd’hui ;
‣ Proposer de la 3D sera un moyen de toucher un public plus jeune ;
Les musées peuvent s’emparer des nombreuses possibilités offertes par la 3D
pour un grand nombre de projets : un objet fragile qui doit être examiné de l’intérieur,
comme une momie par exemple, permettre l’accès à un autre objet trop fragile pour
être transporté, ou encore les nouvelles possibilités offertes par le développement des
imprimantes 3D pour créer des répliques. Les captures 3D donnent la documentation
la plus complète existante concernant un objet en 3 dimensions 347.
Beaucoup de musées se sont lancés dans la numérisation 3D d’une partie de
leurs objets. C’est le cas de la Smithsonian qui expérimente la numérisation 3D depuis
un certain temps maintenant, en utilisant des outils tels que les scanners laser pour
cartographier les modèles de fossiles de baleines et d'autres objets anciens.
Aujourd’hui, le musée fait appel aux technologies numériques pour préserver sa
collection pour la postérité. Vince Rossi et Adam Metallo travaillent sur cette opération,
dans le cadre d'un projet de numérisation de 14 millions d'objets348.
Le musée Rodin a mis à la disposition du public sur son site Web une
numérisation 3D du Sommeil dans ses trois versions, en terre cuite, en plâtre et en
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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346 STEINBACH L., «3D or Not 3D ? Is that a Question ?», Curator, vol. 54, n°1, «Focus on 3D / Digital» (pp.35-69), January 2011, p.52.347 METALLO A., ROSSI V., «The Future of Three-Dimensional Imaging and Museum Applications», Curator, vol. 54, n°1, «Focus on 3D / Digital», January 2011, p.68.348 HEATER B., «The Smithsonian is 3D-scanning its collection for future generations», Engadget, 14 mai 2013, <http://www.engadget.com/2013/05/14/smithsonian-3d-scan/> (consulté le 28 août 2013). Voir la vidéo accompagnant l’article sur les coulisses de ce projet de numérisation 3D des collections.
marbre (Fig.49, p.45) 349. Le musée justifie le projet de modélisation de cette sculpture
en 3D par le fait que l’œuvre étant fragile, le modèle 3D effectué en photogramétrie
permet d’en conserver une image de haute qualité350.
La 3D, qu’elle soit une numérisation ou une reconstitution, est un des multiples
moyens à la disposition du musée pour valoriser ses collections en ligne. La mise à
disposition d’images en haute résolution sur les sites Web de musées a, jusqu’à
maintenant, permis d’attirer et de familiariser de nouveaux publics avec les collections.
Cela permet, d’une part, de donner envie à ce public de venir plus souvent au musée
et, d’autre part, de faciliter le mission de diffusion du patrimoine culturel, même à ceux
qui ne peuvent se déplacer. Les images 3D d’objets de musées, des collections
entières ou même des salles d’expositions, devraient avoir le même effet, car elle est la
documentation la plus complète qu’il existe concernant un objet en trois dimensions.
3.1.2.2. Monuments en 3D
L’utilisation de techniques de confection de maquettes numériques et de
modélisation 3D, pour restituer des monuments dans une version virtuelle, répond à un
besoin de visualisation du monument dans son ensemble. Il est toujours difficile de se
faire une image de la globalité des monuments. La 3D est une solution pour pallier à
cette difficulté.
3.1.2.2.1. La 3D comme outil de valorisation du monument :
l’exemple de Versailles 3D
Le domaine et château de Versailles a fait partie des premières institutions
françaises à se tourner vers les innovations technologiques. Il a créé notamment en
1996 l’un des premiers jeux ludo-culturel, «Versailles, le complot», et est l’un des
premiers à avoir lancé son site Internet351. Il n’était donc pas étonnant que Versailles se
lance dans l’un des plus grands chantiers numériques de son histoire.
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349 Annexe blog : <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/modelisation-3d-du-sommeil-de-rodin/> (consulté le 3 septembre 2013). <http://www.musee-rodin.fr/fr/focus> (consulté le 28 août 2013).350 <http://www.musee-rodin.fr/fr/focus> (consulté le 28 août 2013).351 Dossier «Lieux culturels et nouvelles pratiques numériques», Culture et Recherche, n°112, été 2007, p.12.
Le programme «Grand Versailles numérique» a été initié en 2004 par le
Ministère de la Culture et de la Communication et l’Établissement Public de
Versailles352. L’objectif de ce projet était de tester et de déployer de nouveaux outils
numériques destinés à enrichir la visite du château et du domaine353. En ligne, le site
vitrine de présentation du projet est lancé : http://www.gvn.chateauversailles.fr, site qui
recevra d’ailleurs le prix Möbius international354. Le site Grand Versailles Numérique
propose des visites 3D355, des visites à 360°356 ainsi que des animations et des
vidéos357, tout cela n’étant disponible pour le visiteur qu’en téléchargeant un plug-in358.
Pour explorer véritablement l’histoire architecturale du château en 3D, Versailles
s’est associé à l’équipe du Google Cultural Institute. On peut désormais découvrir les
reconstitutions 3D en ligne et sur place. Une aile du château a été dédiée à l’histoire de
celui-ci et on peut y découvrir les projections des reconstitutions 3D.
La visite virtuelle historique du château s’intitule «Chaos to Perfection» (Fig.50a,
p.45). Elle entraîne le visiteur du grand Canal à la chambre du Roi en passant par
l’Orangerie, la galerie des Glaces ou le bosquet de la Colonnade, au son d’une
chanson de Phoenix359, groupe d’origine versaillaise360.
Un jeu interactif est également proposé, «Pagaille à Versailles : Aide Louis XIV
à construire son Château !»361 (Fig.50b, p.46). Une application permettant de
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
114
352 GREFFE X., SONNAC N., (dir.), Culture Web, création, contenus, économie numérique, Paris, Dalloz, 2008, p.604.353 LOCHON P.-Y., «Grand Versailles numérique : Internet, 3D, podcasting, réalité virtuelle, Wi-Fi, terminaux interactifs… Versailles prépare sa révolution numérique», Culture & Recherche, n°109, été 2006, p.5.354 GREFFE X., SONNAC N., (dir.), Op.cit. p.604.355 De quelques décors sculptés, de la restauration de l’horloge, des dorures sur les toitures, de la restitution de la Grille Royale, du déplacement de la statue équestre de Louis XIV.356 Du Bosquet des Rocailles, de Bosquet des Trois Fontaines et de la Cour de Marbre.357 Autour du grand Trianon, des parterres d’eau, une frise chronologique dynamique, des animations sur les premiers travaux de construction entrepris sous Louis XIV et du domaine de Marie-Antoinette.358 <http://www.gvn.chateauversailles.fr/en/vitrine.html> (consulté le 28 août 2013).359 Phoenix, «Love like a sunset», Wolfgang Amadeus Phoenix, Mai 2009.360 Annexe blog : <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/versailles-3d-from-chaos-to-perfection-la-galerie-des-glaces/> (consulté le 3 septembre 2013). <http://www.versailles3d.com/fr/les-projets-versailles-3d/chaos-to-perfection.html> (consulté le 28 août 2013).361 <http://www.versailles3d.com/fr/les-projets-versailles-3d/pagaille-a-versailles.html> (consulté le 28 août 2013).
s’immerger dans les maquettes 3D est en cours de développement, toujours en
collaboration avec le Google Cultural Institute362.
Les maquettes 3D sont classées par dates, de 1624 à 2012, le visiteur peut
explorer les différentes facettes du château à travers son histoire (Fig.50c, p.46). Les
fonctionnalités sont assez simples, la maquette 3D est disponible sur grand écran, la
navigation se fait verticalement et horizontalement et les informations sont recueillies
dans le texte accompagnant la visite virtuelle. Une visite de cette maquette 3D sur
Google Earth est également disponible. Pour pouvoir l’explorer le visiteur est invité à
télécharger le plug-in (Fig.50d, p.47).
Les images 3D sont dans l’ensemble très minimales, très simples et ne
proposent pas une attractivité et une interactivité avancées. En outre, les maquettes
3D sont très lentes à charger et l’obligation de télécharger le plug-in peut être mal
perçue par le visiteur. Dans l’ensemble toutefois le site est conçu dans un Web design
attrayant et le concept est innovant. Il faut savoir passer outre les petits problèmes
techniques pour apprécier cette visite. Le problème étant que les personnes non
habituées aux technologies numériques ne seraient pas les plus enclines à passer
outre ces problèmes.
3.1.2.2.2. La 3D comme outil de reconstitution d’un
patrimoine perdu
Une certaine partie de notre patrimoine culturel architectural est en partie détruit
ou en ruines. Cet état est dû à divers facteurs, guerres, climat, conservation, etc… La
reconstitution de monuments en 3D permet de se faire une idée du monument dans sa
globalité, et d’imaginer comment fonctionnait l’ensemble.
À l’abbaye de Cluny, un projet de reconstitution en 3D s’est imposé de lui-
même, les ruines offrant un «domaine applicatif privilégié pour le multimédia (nécessité
de visualiser des éléments disparus, avec leurs hypothèses restitutives)»363. En effet,
depuis la Révolution française, le seul vestige restant est le bras sud du grand
transept. En outre, la proximité avec l’École nationale supérieure d’arts et métiers
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
115
362 <http://www.versailles3d.com/fr/les-projets-versailles-3d/les-maquettes-3d-sur-mobile.html> (consulté le 28 août 2013).363 Dossier «Lieux culturels et nouvelles pratiques numériques», Culture et Recherche, n°112, été 2007, p.16.
a favorisé la collaboration entre le Centre des Monuments nationaux et la société On
Situ implantée au sein de l’école, pour réaliser une application multimédia spécifique.
L’application a été intégrée dans le parcours de visite sous forme d’un film projeté en
stéréoscopie. La qualité et le réalisme de la visite virtuelle permettent au visiteur de
déambuler dans ce monument médiéval. Un dispositif de réalité augmentée est
également disponible pour les visiteurs souhaitant voir simultanément les vestiges et la
restitution de la nef (bornes ray-on)364.
Ce type de projet existe notamment pour les sites archéologiques antiques.
C’est le cas par exemple de la reconstitution du forum romain de Bavay. Depuis 2004,
la reconstitution du forum tel qu’il aurait pu être en 150 ap. J.-C. existe sous forme d’un
film 3D intitulé «Retour à Bagacum», projeté dans une salle dédiée365.
3.1.2.2.3. Monuments virtuels
La 3D a été connue du grand public principalement à travers les jeux vidéos.
Aujourd’hui, les jeux vidéos et les univers virtuels de jeu en ligne représentent
désormais un nouvel espace de visibilité pour les musées.
Certains musées et monuments sont notamment présents sur l’univers virtuel
Second Life. En effet, Second Life permet de visiter des expositions d’arts visuels, de
participer à des conférences ou autres activités que l’on retrouve dans un musée
traditionnel. On peut même y trouver un Louvre virtuel (Fig.51a, p.47), qui s’y nomme
le «Second Louvre Museum». Il se situe sur l’île de Thompson et a été construit à
l’initiative de Kharis Forti. Autant l’extérieur est semblable à l’original, autant l’intérieur
est totalement différent. Ce musée s’étend sur trois niveaux, les collections présentées
sont très variées et bien réalisées. Le grand Hall est dominé par «Achille», une
immense sculpture de l’artiste Starax Statosky366.
D’autres lieux culturels sont également présents, comme le site maya de
Chichen Itza, les haïkus de DanteOsaka, le musée Vincent Van Gogh «Virtual Starry
Night», la basilique Saint François d’Assise et récemment le Mont-Saint-Michel (Fig.
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364 <http://www.cluny-numerique.fr/fr/projets-en-cours/bornes-ray-on> (consulté le 28 août 2013).365 MARIE V., «Le forum romain de Bavay reocnstitué», Dossier «Lieux culturels et nouvelles pratiques numériques», Culture et Recherche, n°112, été 2007, p.20. <http://www.youtube.com/watch?v=ZZ3mFggjNoc>.366 «Des lieux culturels dans Second Life», Le Blog du Leden, 22 novembre 2007, <http://leden.wordpress.com/2007/11/22/lieux-culturels-dans-second-life/> (consulté le 28 août 2013).
51b, p.48), la Gemäldegalerie Alte Meister, le musée des grands ou vieux maîtres de
Dresde367. Ce type d’expérience de monde 3D offre de nouvelles voies pour aller à la
rencontre du musée et de ses publics en combinant réel et virtuel368.
L’intérêt de Second Life réside dans le fait que ce sont les habitants de cette
communauté virtuelle qui créent eux-mêmes leurs espaces, leurs avatars et décident
de leurs activités. Il s’agit de se créer une autre identité, une identité virtuelle, dans un
monde virtuel. Le travail de rendu réaliste de ces monuments est parfois très
appréciable, notamment dans le travail sur la lumière, les textures et parfois le son.
Dans le cas d’édifices religieux, «le traitement des vitraux est fondamental car la
lumière qu’ils diffusent est à considérer comme sacrée et génératrice d’une ambiance
propice au recueillement. Le souhait de rendre réaliste les jeux de la lumière
changeante sous les voûtes de pierre est un véritable défi pour rendre à l’édifice
culturel virtuel sa dimension spirituelle»369. Ce travail sur le réalisme des rendus dans
les univers virtuels et sur l’interactivité participe à l’immersion mentale de l’utilisateur. Il
est le résultat d’une réflexion à la fois humaniste et technologique : «si les ordinateurs
permettent de simuler des mondes virtuels, l’interaction de l’homme avec ceux-ci n’est
possible qu’au travers de logiciels, des interfaces matérielles et des processus cognitifs
adéquats» (Fuchs et Moreau, 2003)370.
La visibilité des musées et des monuments dans les univers virtuels est due aux
usagers. Elle n’est pas qu’une initiative institutionnelle. La relation entre le musée et les
univers virtuels pourrait pourtant être plus productive. On peut prédire un scepticisme
compréhensible vis à vis de l’intérêt pour l’institution de s’emparer de ce domaine, mais
elle aurait tort de tourner le dos à cette grande opportunité. Les univers virtuels
constituent un espace au potentiel important en termes d’interactivité et de sociabilité,
ils peuvent être utilisés à des fins d’éducation et de recherche. Les institutions n’ont
plus qu’à s’emparer de cette belle opportunité.
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117
367 MATHEY A., «Le musée des grands maîtres de Dresde présent sur Second Life», Culture & Communication, 11 septembre 2007, <http://culture-communication.fr/le-musee-des-grands-maitres-de-dresde-present-sur-second-life/> (consulté le 28 août 2013).368 GREFFE Xavier, SONNAC Nathalie, (dir.), Culture Web, création, contenus, économie numérique, Paris, Dalloz, 2008, p.604.369 VARANO S., Proposition d’un espace de navigation hypermédia fondé sur des parcours heuristiques comme aide à la compréhension du patrimoine culturel bâti, Thèse, Institut national polytechnique de Loraine, école doctorale IAEM Lorraine, et École Nationale Supérieure d’Architecture de Nancy, sep tembre 2010 , p .20 -21 , <h t tp : / / t e l . a rch i ves -ouver tes . f r / docs /00 /54 /74 /75 /PDF/TheseSandroVARANO.pdf> (consulté le 28 août 2013).370 Id.
3.2. Faire confiance à l’expertise des entreprises du Web :
Google et la mise en ligne du patrimoine culturel
Les musées doivent penser stratégiquement sur cet échiquier mondial des
nouvelles technologies appliquées aux institutions culturelles. Ils doivent prendre en
compte les nouvelles facettes du Web, les comprendre et les intégrer dans leur
stratégie. Aujourd’hui, de plus en plus d’individus maîtrisent les technologies du Web et
ces ingénieurs et penseurs du Web sont des atouts considérables pour les institutions
culturelles. Les «geeks», les «technos», quelle que soit leur appellation, ces acteurs du
numérique sont les mieux placés pour établir des stratégies numériques et se faire une
place sur les réseaux. Les «gens du numérique» ont toujours pris grand soin des
visiteurs de sites Internet de musées. Laissons les nous guider vers le futur numérique
des musées, et faisons leur confiance371.
Google, ce géant du Web que beaucoup d’institutions taxent de vouloir
s’emparer de la numérisation du patrimoine, n’est-il finalement pas tout simplement un
expert dans son domaine ? Sans toutefois lui donner les rennes de la gestion du
patrimoine culturel, les institutions culturelles peuvent apprendre qui est vraiment
Google, ce qu’il fait, et éventuellement s’inspirer de ses projets ou même lui tendre la
main.
3.2.1. Sait-on vraiment qui est Google ?
Le moteur de recherche Google a été créé dans un garage en Californie par
Larry Page et Sergeï Brin, tous deux âgés de 25 ans372. À l’époque de sa création,
Google est concurrencé par des logiciels de recherche documentaire comme Yahoo!.
La différence va se faire dans les services proposés. Google va très vite se positionner
en tant que leader du marché avec des services comme Maps ou Google Earth. En
2003, la révolution Google commence avec le lancement de Google Print, le futur
Google Search Book, projet de numérisation et d’indexation de livres.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
118
371 TASICH T., «Let digital folk lead the way from digital to physical and back», Tate Blogs, 25 March 2013, <http://www.tate.org.uk/context-comment/blogs/let-digital-folk-lead-way-digital-physical-and-back> (consulté le 28 août 2013).372 Pour l’anecdote le nom Google est tiré du terme mathématique « googol » ou gogol en français, qui désigne 10100, c'est-à-dire un nombre commençant par 1 suivi de cent zéros, et symbolise l’objectif de l’entreprise qui est d’«organiser l'immense volume d'information disponible sur le Web et dans le monde». <http://fr.wikipedia.org/wiki/Google> (consulté le 28 août 2013).
Google vit de ses revenus publicitaires, soit 99% de ses revenus, qui s’élevaient
à 22 milliards de dollards en 2007373. Il rachète notamment cette même année la régie
de publicité en ligne DoubleClick. Avant cela, il avait racheté le site de vidéos en ligne
YouTube.
Google est tout d’abord un moteur de recherche documentaire et
iconographique, mais propose aussi de nombreux services à ses utilisateurs. Gmail
(lancé en 2004), son service de messagerie électronique, délivre et stocke du courrier
électronique. Google offre aussi la possibilité de strocker des données, documents,
images, sons, etc, dans le Google Drive, propose une suite de logiciels de traitement
de texte, tableur et présentation : le service Google Docs, des services de cartographie
avec Google Earth et de calcul d’itinéraires avec Google Maps, ausculte et décortique
le trafic des sites Internet avec Google Analytics, compile la presse avec Google
Actualités, gère des agendas en ligne avec Google calendar, édite des blogs sur
l’interface Blogger, indexe la littérature savante dans Google Scholar, stocke des
albums photos sur Picasa, et des vidéos sur YouTube, Google scanne et conserve des
livres dans Google Books et propose un service de traduction, Google Traduction374.
En dehors de ces services, Google a également développé des services Web comme
le navigateur Web Chrome et un système d’exploitation pour mobile, Android375.
Google c’est aussi «Google +», le réseau social créé en 2011.
Google est implanté partout dans le monde, son siège social étant basé à
Montain View en Californie. L’entreprise compte aujourd’hui environ 30 000 employés
et est réputée pour son environnement de travail détendu et décontracté, mais aussi
par l’excellence de ses ingénieurs et la qualité de leur production376.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
119
373 GREFFE X., SONNAC N., (dir.), Culture Web, création, contenus, économie numérique, Paris, Dalloz, 2008, p.94.374 «Peut-on tout confier à Google?», Le Monde 2, 15 novembre 2008, p.36.375 SCHERER É., La révolution numérique: glossaire, Paris, Dalloz, 2009, p.94.376 <http://www.google.fr/about/company/> (consulté le 28 août 2013).
3.2.2. Google Cultural Institute
3.2.2.1. Qu’est-ce-que le Google Cultural Institute ?
L’équipe du Google Cultural Institute a été formée pour mettre au point des
«outils qui permettent aux acteurs du secteur culturel d'afficher en ligne les divers
héritages culturels et de les rendre ainsi accessibles à tous.»377 L’Institut Culturel s’est
ainsi associé à de nombreuses autres institutions culturelles, des musées et des
centres d’archives, pour mettre en place des projets de numérisation et diffusion du
patrimoine. Grâce à l’expertise de Google dans le domaine des technologies combiné
au savoir et à l’expertise des musées dans le domaine du patrimoine culturel, nombre
d’œuvres d’art et de témoins de l’histoire du monde sont disponibles en ligne.
Poursuivant son objectif d’«organiser l'immense volume d'information disponible
sur le Web et dans le monde», l’Institut Culturel a été créé pour donner un accès global
et immédiat à notre patrimoine. Ce projet est particulièrement utile à des fins
d’éducation et de recherche, mais il représente aussi et tout simplement un outil
d’apprentissage pour tous. L'ancien architecte des nouvelles technologies au château
de Versailles, Laurent Gaveau, recruté pour mener à bien ce projet entouré d'une
équipe de 30 personnes, décrit l’Institut Culturel comme un espace «qui ne sera pas un
musée mais un lieu d'échanges et de débats»378.
L’Institut Culturel de Google a pour objectif de mener des projets de valorisation
et de préservation du patrimoine culturel en ligne. Pour cela, il conduit plusieurs
projets, un projet d’expositions historiques en ligne, le projet World Wonders, la
numérisation des manuscrits de la mer morte ou encore le Art Project.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
120
377 <http://www.google.fr/intl/fr/culturalinstitute/about/> (consulté le 28 août 2013).378 «Google lance un institut culturel à Paris», Le Monde.fr avec AFP, 15 août 2013, <http://www. lemonde. f r / techno log ies /ar t i c le /2013/08/15 /goog le- lance-un- ins t i tu t -cu l tu re l -a -paris_3461979_651865.html> (consulté le 28 août 2013).
3.2.2.2. Les projets de l’Institut Culturel
3.2.2.2.1. Les expositions en ligne
Les expositions historiques en ligne ont pour but de diffuser des fonds
d’archives extrêmement riches. Cela a conduit à la mise en ligne de 6 millions
d’archives sur l’histoire du XXe siècle. Ce grand projet a été monté en partenariat avec
17 musées et instituts du monde entier, parmi eux, la Maison d’Anne Frank, la Mairie
de Paris, l’Institut Luce Cinecitta, le Centre Neslon Mandela, etc. Le projet est né de la
collaboration des ingénieurs techniques de Google avec des historiens et des
chercheurs. Le résultat est regroupé dans des expositions thématiques en ligne379.
Mark Yoshitaka, le chef de projet explique que le site est structuré par thèmes,
pour faciliter la découverte. Le site propose quarante-deux sujets, liste qui devrait
s’agrandir pour compléter ce projet en évolution. Selon lui, «le but est d’associer le
savoir-faire informatique de Google et les archives des prestigieuses institutions
culturelles»380.
Dernièrement c’est la Tour Eiffel qui a fait l’objet d’une exposition en ligne ainsi
que d’une visite virtuelle à 360° (Fig.52, p.48-49)381. C'est la première fois que Google
applique sa technique de vue panoramique Street View à un monument382.
3.2.2.2.2. World Wonders383
Le projet Google World Wonders est une plate-forme en ligne sur laquelle les
sites du patrimoine mondial des époques moderne et antique sont visibles, grâce à la
technologie Street View, à la modélisation 3D et à d'autres technologies Google (Fig.
53, p.49). Sur le site de présentation du Google Cultural Institute, le projet World
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379 SUTTON E., «Google Cultural Institute, quand Google devient prof d’histoire», IdBoox, 13 octobre 2012, <http://www.idboox.com/actu-web/google-cultural-institute-quand-google-devient-prof-d-histoire/> (consulté le 28 août 2013).380 DORNE G., «Google irrigue la culture en ligne», Owni, 12 Octobre 2012, <http://owni.fr/2012/10/12/google-culture-cultural-institute/> (consulté le 28 août 2013).381 Annexe blog : <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/tour-eiffel-a-360/> (consulté le 3 septembre 2013).382 ERA N., «Le Google Cultural Institute s'associe avec la Tour Eiffel», Cnet, 16 juillet 2013, <http://www.cnetfrance.fr/news/le-google-cultural-institute-s-associe-avec-la-tour-eiffel-39792467.htm> (consulté le 28 août 2013).383 <http://www.google.com/intl/fr/culturalinstitute/worldwonders/> (consulté le 28 août 2013).
Wonders est décrit comme une interface permettant de «découvrir ces merveilles du
monde depuis votre fauteuil, comme si vous y étiez.»384
3.2.2.2.3. Art Talks385
Outre ces projets, Google montre son intérêt pour la diffusion de la culture en
lançant ses «Google Art Talks» une série de visites guidées et de conférences sur
l’histoire de l’art animées par des professionnels issus de prestigieuses institutions
internationales386 (Fig.54, p.50).
Parmi tous les projets innovants développés par Google et son Institut Culturel,
le plus étonnant reste son Google Art Project.
3.2.3. Le Google Art Project
3.2.3.1. Qu’est-ce-que le Google Art Project ?
L'Art Project est une expérience artistique en ligne née de la collaboration entre
la technologie Google et de 250 partenaires artistiques renommés de plus de 40 pays
différents387. Les utilisateurs peuvent explorer un large éventail d'œuvres d'art (plus de
40 000), jusqu’au détail des coups de pinceau, visiter virtuellement un musée et même
concevoir leurs propres collections388.
3.2.3.1.1. Naissance du projet
L’idée du Google Art Project est intervenue dans le cadre des 20% de temps
libre des employés de Google. Leurs ingénieurs ont la possibilité de consacrer un jour
sur cinq à un projet privé. L’idée est venue d’une employée du service marketing de
Google Espagne. Passionnée par le musée du Prado, elle a voulu mettre en place un
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384 <http://www.google.fr/intl/fr/culturalinstitute/about/> (consulté le 28 août 2013).385 <http://tinyurl.com/pq4mo9q> (consulté le 28 août 2013).386 «Google lance ses conférences sur l’histoire de l’art accessibles en ligne : les Google Art Talks», Club Culture & Innovation France, 20 mars 2013, <http://www.club-innovation-culture.fr/google-lance-ses-conferences-sur-lhistoire-de-lart-accessibles-en-ligne-les-google-art-talks/> (consulté le 28 août 2013).387 <http://www.google.com/culturalinstitute/project/art-project?hl=fr> (consulté le 31 août 2013).388 <https://sites.google.com/a/pressatgoogle.com/art-project/faqs> (consulté le 28 août 2013).
projet pour rendre ces œuvres accessibles à tous. C’est en en discutant à un ingénieur
et d’autres employés que l’équipe s’est lancée dans la construction d’une plate-forme
qui permettrait de démocratiser l’accès aux œuvres d’art, en proposant des visites
virtuelles dans les musées et offrir une expérience de découverte immersive en très
haute résolution389.
3.2.3.1.2. Fonctionnement et types d’œuvres présentées
Chaque musée a choisi le nombre de galeries, d'œuvres d'art et d'informations
qu'il souhaite proposer. L'ensemble du contenu et des informations qui accompagnent
les œuvres d'art et les objets sont également fournis par les musées eux-mêmes390.
Les œuvres d’art et objets historiques présentés sont des peintures, des
dessins, des sculptures, des objets historiques et religieux, des photographies, ainsi
que de précieux manuscrits. La visite est agrémentée de vidéos commentées,
d’audioguides, de notes, d’informations détaillées, de cartes, et bien d’autres encore391.
3.2.3.2. Mode d’emploi392
Recherche et visualisation d’images
Trois rubriques principales permettent d’effectuer une recherche par artistes,
œuvres d’art ou lieux. Les œuvres sont zoomables, en haute ou très haute définition et,
pour certaines, en gigapixels (Fig.55b, p.51). Les lieux sont nommés «collections», en
cliquant dessus, le visiteur est invité à explorer les collections à travers leurs photos ou
via une visite virtuelle.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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389 CHAVEROU É., «Le patrimoine à l'ère du numérique», interview d’Anne-Gabrielle Dauba-Pantanacce, la directrice de la communication de Google France pour l’émission Pixel, France Culture, 23.11.2012 - 07:12, <http://www.franceculture.fr/emission-pixel-le-patrimoine-a-l-ere-du-numerique-2012-11-23> (consulté le 28 août 2013).390 <http://www.google.fr/intl/fr/culturalinstitute/about/> (consulté le 28 août 2013).391 <http://www.google.fr/intl/fr/culturalinstitute/about/> (consulté le 28 août 2013).392 Voir la vidéo explicative : Art Project - How to use the site <http://www.youtube.com/watch?v=qVpqTd2ndYY> (consulté le 28 août 2013).
Visites virtuelles
Les musées peuvent être explorés grâce à la technologie Street View393. Les
visites virtuelles sont accessibles via l’icône bien connu d’un personnage jaune. Les
utilisateurs peuvent ainsi se promener dans les salles, passant d’étage en étage, et de
musées en musées, par un simple clic (Fig.55c, p.52).
My Collections
Les utilisateurs peuvent créer leurs propres galeries dans la section «My
Collections». Comme le formule Amit Sood, le chef de projet, «n’importe lequel d’entre
vous, peu importe que vous soyez riche ou pauvre, ou que vous ayez une belle
maison, vous pouvez y aller et créer votre propre musée en ligne, créer votre propre
collection avec toutes ces images.» (Fig.55d, p.52) 394
Outils de partage
Les utilisateurs peuvent partager leur expérience, par exemple pour travailler sur
un projet d'art avec des amis ou des camarades, ou leurs découvertes avec leurs amis
et leur famille. Pour cela ils peuvent partager les liens via les réseaux sociaux ou par
email. Ils peuvent également utiliser les Hangouts de Google + et ainsi communiquer
directement via cette plate-forme de messagerie instantanée et d’appel vidéos 395.
Outil de comparaison
Les utilisateurs peuvent faire appel à l’outil de comparaison pour examiner deux
objets en même temps et les comparer. Ils peuvent alors se rendre compte de
l’évolution de la technique de l'artiste, comparer un travail préparatoire avec la copie
terminée ou encore évaluer les différences de style d’un mouvement artistique à un
autre396.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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393 Visite du château de Versailles : Annexe blog : <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/09/03/visite-street-view-du-chateau-de-versailles-sur-le-google-art-project/> (consulté le 3 septembre 2013).394 SOOD A., «Construire un musée des musées sur la Toile», Ted Talks, Mars 2011, <http://www.ted.com/talks/amit_sood_building_a_museum_of_museums_on_the_web.html> (consulté le 28 août 2013).395 <https://sites.google.com/a/pressatgoogle.com/art-project/faqs> (consulté le 28 août 2013).396 <https://sites.google.com/a/pressatgoogle.com/art-project/faqs> (consulté le 28 août 2013).
3.2.3.3. Technologies utilisées397
Street View
C’est la première fois que la technologie Street View est utilisée à l’intérieur d’un
bâtiment398. Une technologie qu’il a fallut adapter comme nous l’apprend Wendy Bairos
Rozeluk, chargée des communications mondiales et des affaires publiques à Google
Canada : «cela a posé de nombreux défis. Nous en avons tiré des enseignements qui
nous serviront dans le futur. Par exemple, les conditions d’éclairage varient dans les
musées, ce qui crée des variations dans les effets et la qualité des images. Au fil du
développement du projet, nous cherchions également à accélérer la prise et le
traitement des photos, car le processus est actuellement très long et techniquement
complexe.»399
«Vue au microscope»
Les œuvres peuvent être vues de plus près grâce à la «vue au microscope»
qu’utilise Picasa pour rendre des images en haute résolution. Le public peut zoomer
pour voir des détails que seuls les restaurateurs d’œuvres d’art pouvaient voir jusqu’à
présent. Il peut alors en apprendre plus sur l'œuvre d'art en cliquant sur le bouton
«Détails», pour lire les informations sur l'œuvre fournie par le musée et, dans certains
cas, écouter des enregistrements audio et vidéo400.
Images en haute résolution
La numérisation en 3D des œuvres permet à l’internaute de les voir en haute,
voire très haute définition. «La qualité des images est absolument époustouflante et
c'est le principal intérêt de ce service. La pâte de la peinture, le grain du papier, la
densité du bois ou du tissage... vous sautent aux yeux.»401 (Fig.55f, p.53)
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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397 Voir la vidéo des coulisses des technologies utilisées par Google : «Art Project - Behind the scenes» <http://www.youtube.com/watch?v=aYXdEUB0VgQ> (consulté le 28 août 2013).398 BAILEY J. LM, «Le Google Art Project : un allié ou un adversaire ?» (“Google Art Project : Friend or Foe ?”), Muse, may/june 2011, p.27.399 BAILEY J. LM, «Le Google Art Project : un allié ou un adversaire ?» (“Google Art Project : Friend or Foe ?”), Muse, may/june 2011, p.27.400 <https://sites.google.com/a/pressatgoogle.com/art-project/technology-behind-the-art-project> (consulté le 28 août 2013).401 CHANDRAN C., «Google Art Project, la galerie numérique du monde», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.87-89.
Gigapixels
Certains musées ont choisi de faire figurer une œuvre en «gigapixels». Les
images en gigapixels contiennent environ 7 milliards de pixels, c'est environ 1000 fois
plus détaillé que sur un appareil photo numérique classique. Le visiteur peut, par
exemple, contempler La Tour de Babel de Brueghel, jusqu’au moindre petit détail402.
Pour prendre une telle image en photo, l'équipe utilise des appareils photo
professionnels et des unités de mouvement multisynchronisés reliées à des systèmes
informatiques. Les images sont ensuite assemblées et hébergées sur Picasa. Puis,
elles sont découpées en plus petits éléments pour permettre une visualisation en ligne
qui soit efficace et facilite les outils de zoom sur les peintures (Fig.55g, p.54)403.
3.2.3.4. Images : droit et licences
Certaines œuvres étant sous droits d’auteur, les musées ont demandé à ce
qu’elles soient floutées404. Les images haute résolution des œuvres d'art affichées sur
le site appartiennent aux musées. Elles peuvent faire l'objet de plusieurs
réglementations relatives aux droits d'auteur à travers le monde. Les images Street
View appartiennent, elles, à Google.
Rachel V. Browne, avocate déléguée générale de la Smithsonian Institution, et
membre du comité pour les affaires juridiques du Conseil International des musées,
nous l’explique ainsi : «En vertu de la plupart des lois nationales, le détenteur d’un droit
d’auteur possède les droits exclusifs relatifs à une œuvre d’art, y compris le droit de
reproduire, vendre, distribuer et exposer l’œuvre (...). Les droits du droit d’auteur
appartiennent au créateur de l’œuvre, à moins qu’il ne les ait cédés. Sans la
permission du détenteur du droit d’auteur ou une exemption prévue par la loi, bien des
utilisations numériques d’œuvres assujetties au droit d’auteur peuvent être illégales,
parce qu’elles enfreignent un ou plusieurs droits exclusifs aux détenteurs du droit
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402 <http://patrimoinevirtuel.wordpress.com/2013/08/03/peter-brueghel-lancien-la-tour-de-babel-1563-kunsthistorisches-museum-de-vienne-en-gigapixels-2/> (consulté le 3 septembre 2013).403 <https://sites.google.com/a/pressatgoogle.com/art-project/technology-behind-the-art-project>. Les images gigapixels des nouveaux participants sont visibles ici : <https://sites.google.com/a/pressatgoogle.com/art-project/generic-video-footage/images> (consulté le 28 août 2013).404 <http://www.google.fr/intl/fr/culturalinstitute/about/> (consulté le 28 août 2013).
d’auteur.»405 Ce sont les musées participants qui ont décidé de la visibilité de leurs
œuvres. La plupart des œuvres zoomables ressortent du domaine public, ce faisant il
n’y a donc aucune infraction au droit d’auteur car les autres œuvres pouvant relever
d’un droit d’auteur sont floutées.
3.2.3.5. Musées partenaires
Au lancement du projet en 2011, le site comptait dix-sept musées partenaires.
Parmi eux, la seule institution française à se lancer dans l’aventure est le château de
Versailles. Bientôt suivie par six autres musées français : le musée de l’Orangerie, le
musée d’Orsay, celui du quai Branly, ainsi que les châteaux de Fontainebleau et ce
Chantilly en 2012406.
Le nombre de musées partenaires continue d’augmenter. En ce milieu d’année
2013, une vingtaine d’institutions de plus ont rejoint les rangs du Google Art Project.
Le musée du Louvre ne fait pas partie des musées partenaires de l’Art Project.
Un porte-parole du Louvre indiquait à l'AFP en avril dernier qu’il «n'y a pas de refus de
principe, mais nous avons choisi en priorité cette année d'enrichir notre propre site
Internet»407.
3.2.3.6. Bilan
3.2.3.6.1. Le Google Art Project en chiffres
La Nuit Étoilée de Van Gogh est l’œuvre la plus regardée à la fois sur
l’ensemble des 40 000 œuvres présentes sur le site et sur l’ensemble des œuvres en
gigapixels408.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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405 BAILEY J. LM, «Le Google Art Project : un allié ou un adversaire ?» (“Google Art Project : Friend or Foe ?”), Muse, may/june 2011, p.33.406 LEGRAND F., «Google Art Project : 151 musées à portée de clics !», Les Numériques, 8 mai 2012, <http://www.lesnumeriques.com/google-art-project-151-musees-a-portee-clics-n24300.html> (consulté le 28 août 2013).407 Id.408 PROVOST L., «Google Art Project : un internaute passe 3 fois plus de temps devant un tableau en ligne que dans un musée», Le HuffPost, 15 avril 2013, <http://www.huffingtonpost.fr/2013/04/12/infographie-le-google-art-project_n_3070720.html> (consulté le 28 août 2013). Voir dans cet article un diaporama des 10 œuvres les plus vues dans le Google Art Project.
Claude Monet est l’artiste le plus recherché par les internautes français. Les
utilisateurs passent en moyenne une minute à regarder une peinture en ligne contre 20
secondes dans un musée409.
Depuis sa création, le site a accueilli 10 millions de visiteurs et plus de 90000
utilisateurs ont créé leur propre collection à partir de la fonction «My Collections»410.
3.2.3.6.2. Répercussions sur les musées
La château de Versailles a notamment vu ses visites in-situ tripler après son
entrée sur l’Art Project. Des outils analytiques ont permis de voir qui étaient les
internautes qui se connectaient au site du château de Versailles après une visite sur
l’Art Project. C’est donc un outil de visibilité de marketing, extrêmement utile et
complémentaire. Cela permet de donner envie à l’utilisateur de concrétiser une visite
au musée411.
Le musée Van Gogh à Amsterdam a vu le nombre de visiteurs sur son site Web
doubler dès la première semaine suivant son entrée sur l’Art Project412.
Le directeur des activités culturelles du Musée Reina Sofia à Madrid, Chema
Gonzàlez, nous apprend également que le nombre de visiteurs sur leur site Web ainsi
que celui des personnes qui suivent leur compte Twitter est en nette hausse depuis
leur participation au projet413.
3.2.3.7. Questionnements
Le Google Art Project pose des questions cruciales pour l’avenir des musées au
sein de l’environnement numérique. Représente-t-il l’avenir ou le déclin des musées ?
Quels sont les bénéfices et les limites du projet ? Cela ne risque-t-il pas de remplacer
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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409 PROVOST L., «Google Art Project : un internaute passe 3 fois plus de temps devant un tableau en ligne que dans un musée», Le HuffPost, 15 avril 2013, <http://www.huffingtonpost.fr/2013/04/12/infographie-le-google-art-project_n_3070720.html> (consulté le 28 août 2013).410 BAILEY J. LM, «Le Google Art Project : un allié ou un adversaire ?» (“Google Art Project : Friend or Foe ?”), Muse, may/june 2011, p.27.411 CHAVEROU É., «Le patrimoine à l'ère du numérique», interview d’Anne-Gabrielle Dauba-Pantanacce, la directrice de la communication de Google France pour l’émission Pixel, France Culture, 23.11.2012 - 07:12, <http://www.franceculture.fr/emission-pixel-le-patrimoine-a-l-ere-du-numerique-2012-11-23> (consulté le 28 août 2013).412 BAILEY J. LM, Op. cit., p.29.413 Id., p.31.
la visite du musée ? Les participants au projet et leurs concepteurs répondent à ces
problématiques.
Selon Nathalie Bondil, directrice et conservatrice en chef du musée des beaux-
arts de Montréal, le «Google Art Project ne remplacera jamais une visite au musée, car
l’expérience sensorielle est unique. Le musée offre une émotion incomparable à ses
visiteurs en leur permettant de ressentir une œuvre d’art in vivo. Google Art est par
contre un excellent outil complémentaire, pour préparer ou poursuivre la visite au
musée.»414
Julian Raby, directeur de la Freer Gallery à Washington décrit la technique des
gigapixels comme une expérience qui nous amène au plus près de l’essence de
l’artiste, à travers des détails qui ne peuvent tout simplement pas être perçus dans un
musée. À son sens, «Loin de mettre de côté la nécessité de voir les œuvres d’art en
vrai, l’Art Project approfondit notre désir de rechercher la vraie chose (the real
thing).»415
Directeur de ce projet, Amit Sood, explique qu’il souhaite que celui-ci «permette
une interaction innovante [du public] avec l’art et espère qu’il l’incitera à aller visiter
réellement les lieux»416. La question qu’on lui pose le plus : «avez-vous fait cela pour
reproduire l’expérience de visiter un musée ?» et sa réponse est «non, c’est pour
compléter l’expérience»417.
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414 BAILEY J. LM, «Le Google Art Project : un allié ou un adversaire ?» (“Google Art Project : Friend or Foe ?”), Muse, may/june 2011, p.33.415 «Far from eliminating the necessity of seeing artworks in person, Art Project deepens our desire to go i n s e a r c h o f t h e r e a l t h i n g . » < h t t p : / / w w w . t e d . c o m / t a l k s /amit_sood_building_a_museum_of_museums_on_the_web.html> (consulté le 28 août 2013).416 CHANDRAN C., «Google Art Project, la galerie numérique du monde», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.87-89.417 SOOD A., «Construire un musée des musées sur la Toile», Ted Talks, Mars 2011, <http://www.ted.com/talks/amit_sood_building_a_museum_of_museums_on_the_web.html> (consulté le 28 août 2013).
3.2.3.8. Avantages, inconvénients et intérêts du Google Art
Project
3.2.3.8.1. Avantages
Pour le musée
‣ «Joindre un nouveau public grâce à l’expertise et aux techniques de Google»418
‣ Donner accès aux collections provenant de plusieurs musées au monde en une
seule plate-forme
‣ Donner de la visibilité au musée, Google étant le leader des moteurs de
recherche
‣ Permettre une hausse de la fréquentation du musée in-situ et de son site Internet
Pour le public
‣ Le Google Art Project est une nouvelle façon amusante et ludique d’appréhender
l’histoire de l’art
‣ Le visiteur peut véritablement s’approprier les œuvres en ayant la possibilité de
créer sa propre galerie personnelle, son propre «musée virtuel»
‣ Le visiteur peut facilement partager ses découvertes avec ses amis, sa famille et
tous ses contact d’une manière générale
Pour Google
‣ L’entreprise bénéficie de l’aura et de la réputation des institutions culturelles,
garantes des témoins de l’histoire du monde
‣ Le moteur de recherche gagne en visibilité dans le domaine du patrimoine culturel
‣ Google conserve les droits sur les images en Street View
3.2.3.8.2. Critiques
‣ L’outil Street View n’est pas vraiment facile d’utilisation
‣ L’art contemporain, pour des raisons de législation complexe, n’est pas présent
sur le Google Art Project
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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418 BAILEY J. LM, «Le Google Art Project : un allié ou un adversaire ?» (“Google Art Project : Friend or Foe ?”), Muse, may/june 2011, p.29.
‣ Les artistes sont classés par leur prénom ce qui n’est pas facile lorsque l’on ne
connaît pas le prénom de l’artiste que l’on cherche
‣ Il n’y a pas, pour l’instant, d’application mobile
3.2.3.8.3. Analyse
Selon Amit Sood, avec le Google Art Project «la chose la plus essentielle, est
que tout ce contenu fascinant ne vient pas vraiment de Google, ça ne vient même pas,
à mon avis, des musées, (...) cela vient vraiment des artistes.»419 L’Art Project est donc
un outil formidable pour l’amateur d’art pour entrer en contact avec ses artistes favoris.
Edith Schreurs, du service des communications numériques du musée Van
Gogh à Amsterdam, nous apprend que le musée a perçu son entrée dans l’Art Project
comme une occasion de remplir deux objectifs : «joindre un public qui ne connaissait
pas encore notre site Web, et qui s’intéressait beaucoup à l’art» ainsi qu’une «occasion
de partager une plate-forme artistique en ligne avec des musées mondialement
reconnus»420. Le directeur des activités culturelles du Musée Reina Sofia à Madrid,
Chema Gonzàlez, décrit quant à lui l’Art Project comme une «expérience
remarquable». Jusqu’à présent, «Google a utilisé les œuvres avec beaucoup de
respect et les a présentées avec élégance et raffinement. J’encourage tous les musées
du monde à participer à ce projet s’ils en ont l’occasion.»421 Les musées participants
sont tous emballés par les possibilités qu’offre le Google Art Project que ce soit pour le
bénéfice de l’institution, de ses collections ou du public.
Les oeuvres reproduites dans l’Art project appartiennent déjà au domaine public.
Celui-ci ne connaît pas encore le même sort que le projet Google Books, largement
critiqué. Cependant, il n’en est qu’à un stade initial et les critiques s’élèveront le jour où
l’on voudra utiliser les images, protégées par le copyright même si les œuvres
ressortent du domaine public422.
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419 SOOD A., «Construire un musée des musées sur la Toile», Ted Talks, Mars 2011, <http://www.ted.com/talks/amit_sood_building_a_museum_of_museums_on_the_web.html> (consulté le 28 août 2013).420 BAILEY J. LM, «Le Google Art Project : un allié ou un adversaire ?» (“Google Art Project : Friend or Foe ?”), Muse, may/june 2011, p.29.421 Id., p.31.422 CHANDRAN C., «Google Art Project, la galerie numérique du monde», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.87-89.
Il faut aussi savoir que Google ne tire absolument aucun bénéfice financier de
l’Art Project. Comme le rappelle Anne-Gabrielle Dauba-Pantanacce, la directrice de la
communication de Google France, il n’y a pas de bénéfice financier direct, les
bénéfices résident dans l’enrichissement de la connaissance, la découverte
d’informations et une approche plus globale de la pertinence du moteur de recherche,
dont la mission est de démocratiser l’accès à l’information et notamment la culture qui
est une information, selon ses termes «premium»423.
La grande innovation que permet le Google Art Project réside dans la possibilité
pour le visiteur de s’immerger dans un musée, voir l’œuvre d’art en elle-même, sans
connaître les inconvénients que peut entraîner la visite réelle de musée. Google offre
une visite virtuelle avec possibilité de zoomer sur les œuvres, les visiteurs peuvent
ainsi profiter des collections depuis chez eux, sans avoir à braver les files d’attentes
des premiers dimanches du mois ou des Journées du Patrimoine. La «fatigue
muséale» est un mal bien connu des acteurs culturels, qu’elle soit due à un éclairage
trop faible, une taille de textes trop petite sur les cartels ou un temps d’attente trop long
à l’entrée du musée. Elle est souvent la cause de la démotivation du public et pousse
au désintérêt.
La visite virtuelle des musées proposée par l’interface créée par Google est en
quelque sorte une alternative à la visite réelle du musée. Non seulement cette interface
permet au visiteur de découvrir des musées qu’il n’aurait peut-être pas l’occasion de
visiter, mais en plus de cela celui-ci peut interagir avec les œuvres, se les approprier
en créant sa propre collection en ligne. Il faut, par conséquent, voir le Google Art
Project comme un outil d’accès au patrimoine culturel particulièrement innovant, et non
pas comme une menace pour les musées.
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423 CHAVEROU É., «Le patrimoine à l'ère du numérique», interview d’Anne-Gabrielle Dauba-Pantanacce, la directrice de la communication de Google France pour l’émission Pixel, France Culture, 23.11.2012 - 07:12, <http://www.franceculture.fr/emission-pixel-le-patrimoine-a-l-ere-du-numerique-2012-11-23> (consulté le 28 août 2013).
3.3. Mesures à prendre : Formation, Financement, Stratégie
Après avoir étudié des exemples de créations innovantes en termes de diffusion
numérique des collections, issues à la fois d’initiatives institutionnelles,
gouvernementales ou privées, nous aurons à cœur de savoir quelles sont les
prochaines étapes dans notre travail de diffusion. Tous les exemples étudiés sont des
projets qui ont demandé du temps, de l’argent et de l’organisation. Pour terminer notre
étude, établissons donc les mesures à prendre par les institutions culturelles souhaitant
mettre en place un projet innovant de diffusion numérique des collections. La première
démarche sera de se former au numérique, de trouver des nouveaux modes de
financement pour pallier aux difficultés économiques que vivent les institutions et enfin
de suivre une méthode claire de mise en œuvre d’une stratégie.
3.3.1. Se former au numérique
3.3.1.1. Se former au numérique : pour qui ? pourquoi ?
3.3.1.1.1. Former les professionnels de musée
Les professionnels de musée étaient il y a quelques années peu conscients de
l’importance de la culture informatique et multimédia. Désormais, les mentalités ont
changé et les musées ont saisi l’importance des technologies numériques appliquées
au monde muséal. Mais en comprendre l’importance et les maîtriser sont deux choses
différentes.
Les professionnels de musées ne sont pas tous des adeptes du Web, du virtuel
et des réseaux sociaux. Il y a un réel besoin de formation au numérique. Et pas
uniquement pour ceux qui auront de près ou de loin à gérer un projet numérique mais
pour toutes les professions du musée. Beaucoup d’employés de musées pour qui le
numérique ne fait pas vraiment partie de leur fiche de poste, savent tout de même à
quel point il est important de le maîtriser et il leur manque simplement les outils et le
savoir-faire. «Avant de parler de formation on peut parler d’initiation, de
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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dédramatisation. Il y a un besoin d’expliquer ce qu’on fait, ce qui se fait, ce qui se
passe sur Internet.»424
Des possibilités de formation informelle existent à travers des conférences, des
évènements spéciaux, des communautés, mais qui sont, semble-t-il, connues
uniquement du cercle restreint de leurs habitués. Ces communautés et groupes de
réflexion gagnent pourtant à être connus et médiatisés. Au-delà de ces communautés,
et en revenant au sein même du musée il est essentiel que les différents départements
et directions communiquent dans un esprit collaboratif. Comme le formule Geneviève
Vidal, les «expositions en ligne sont le fruit d’un travail mariant connaissances
techniques, scientifiques et mission de diffusion des savoirs.»425 Tout projet nait de la
collaboration de domaines d’expertise variés, il doit en être de même dans
l’appréhension de projets numériques par le musée.
3.3.1.1.2. Former les publics de musée
Se former au numérique n’est pas un objectif propre aux professionnels, les
publics de musée aussi doivent se familiariser avec cet outil. Non seulement au sens
premier, si les publics ne sont pas familiers du numérique et des usages du Web, mais
également d’une manière plus concentrée sur la sphère muséale, si ces mêmes
publics ne sont tout simplement pas habitués au numérique et aux usages du Web au
sein même de l’institution. Pour certains visiteurs, l’arrivée des audioguides, des écrans
multimédias, des bornes interactives et plus récemment de dispositifs comme les
visites guidées sur smartphone et tablette, sont des dispositifs perçus comme
dégradants et dévalorisant pour l’institution et ses collections. À ces visiteurs je dirais
que bien évidemment, une visite sur smartphone n’a rien à voir avec une visite guidée
par un conférencier qui vous parle droit dans les yeux. La visite d’un musée avec son
smartphone est une mise à l’écart, certes, mais c’est aussi une autre manière
d’expérimenter le musée. Les dispositifs numériques au musée ne sont pas là pour
écraser le socle traditionnel muséal, ils sont là pour proposer une alternative innovante
et amusante. Il en va de même pour la création de «musées virtuels», ils n’ont pas
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424 Entretien Sébastien Magro, Annexes, p.67.425 VIDAL G., Contribution à l’étude de l’interactivité, les usages du multimédia au musée, Presses Universitaires de Bordeaux, 2006, p.66.
pour but de remplacer le musée réel. On ne peut pas remplacer un musée, en
revanche on peut le compléter avec d’autres outils.
Les mentalités doivent encore évoluer, et pour ce faire, les publics de musée
doivent être, eux aussi, formés au numérique et aux usages du Web. Comme le dit
Omer Pesquer, c’est au musée de faire l’éducation de son public au numérique426.
C’est lui qui est le gardien des témoins de notre histoire et qui a pour mission de
transmettre ce patrimoine au plus grand nombre. Pour remplir sa mission d’éducation,
il incombe donc au musée d’inciter ses publics à tendre la main au numérique. Si
l’information vient du musée, alors la valeur de l’institution suffira à gagner la confiance
du public.
3.3.1.2. Se former au numérique : comment ?
Plusieurs moyens s’offre à celui, professionnel ou amateur, qui veut se
familiariser avec la culture numérique et les outils du Web. Il existe tout d’abord de
nombreuses communautés de pratiques à travers le monde, les muséogeeks en sont
un exemple français. Il existe ensuite de nombreuses conférences organisées chaque
année sur le sujet, conférences qui sont, pour la plupart, ouvertes à tous. Enfin, de plus
en plus de lieux d’expérimentation naissent au fur et à mesure du développement du
domaine du numérique appliqué au musée, des laboratoires de recherche rattachés à
des universités, des musées qui créent leurs propres laboratoires, ou des sociétés
privées. Les possibilités sont multiples pour se former au numérique, il suffit
simplement de les connaître et d’oser se lancer.
3.3.1.2.1. Communautés de pratiques : l’exemple des
muséogeeks
3.3.1.2.1.1. Qui sont les muséogeeks ?
Pour en faire une défiinition colloquiale, le nom de «museogeeks», mélange du
«musée» et de «geek», désigne un groupe de personnes dont les centres d’intérêts
convergent vers les musées et le numérique. Le terme aurait été inventé lors d’un
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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426 Entretien Omer Pesquer, Annexes, p.
«pique-nique numérique» qui s’est tenu en juillet 2011. Il est aujourd’hui adopté sous
forme d’un Hashtag utilisé sur Twitter : #museogeeks, qui leur permet d’échanger des
informations427. Après des échanges sur Twitter, c’est lors de conférences que les
muséogeeks ont commencé à se rencontrer IRL dès 2010, lors notamment, des
Rencontres Wikimédia de décembre 2010 ou encore des Rencontres numériques,
organisées par le Ministère de la Culture les 3 et 4 mai 2011 à la Gaîté Lyrique428. Les
muséogeeks forment aujourd’hui une «communauté informelle» dynamique de
professionnels et d’étudiants de tous domaines, ayant tous pour objectif de repenser le
musée numérique. Selon Sébastien Magro, lui-même muséogeek, «ce sont des gens
qui ont porté des choses aussi et fait émerger les nouveaux usages, les nouvelles
pratiques, qui porte une sorte de «bonne parole».»429
3.3.1.2.1.1. Leurs initiatives
#Muzeonum
La communauté des Muséogeeks se regroupe sur une plate-forme qui se trouve
être un wiki, appelé Muzeonum, créé par Omer Pesquer en 2011. Cette plate-forme
propose des ressources concernant le domaine du numérique et des musées430. En
plus du wiki, la communauté s’est dotée d’une page Facebook431, d’un compte
Pinterest432 collaboratif, d’un compte Twitter433 et d’un groupe LinkedIn434. Sur toutes
ces plate-formes, les informations fourmillent, les commentaires foisonnent, les notes
de blogs tournent, des conseils et des avis s’échangent, le tout pour nourrir la
connaissance et l’expérimentation de la culture numérique au musée. Muzeonum se
construit aussi lors des rencontres IRL de la communauté, se déroulant environ tous
les deux mois à Paris435.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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427 MAGRO S., «Qui sont les #Muséogeeks ?», DASM, 15 avril 2013, <http://dasm.wordpress.com/2013/04/15/qui-sont-les-museogeeks/> (consulté le 28 août 2013).428 Id.429 Entretien Sébastien Magro, Annexes, p.62.430 <http://www.muzeonum.org/wiki/doku.php?id=muzeonum> (consulté le 28 août 2013).431 <https://www.facebook.com/groups/muzeonum/> (consulté le 28 août 2013).432 <http://pinterest.com/muzeonum/> (consulté le 28 août 2013).433 <https://twitter.com/MuzeoNum> (consulté le 28 août 2013).434 <http://www.linkedin.com/groups/Muzeonum-4868162/about> (consulté le 28 août 2013).435 Le comité d’organisation est composé d’Omer Pesquer, de Gonzague Gauthier, de Clélia Dehon, de Coline Aunis, d’Audrey Defretin et de Sébastien Magro. (consulté le 28 août 2013)
#Museomix
L’initiative Museomix436 a vu le jour grâce à Diane Drubay, fondatrice de
l’agence de conseil en communication et stratégie numérique pour la culture
Buzzeum437, Samuel Bausson438, webmaster au muséum d’histoire naturelle de
Toulouse, Nod-A439 , agence qui conseille les entreprises dans des pratiques
innovantes et collaboratives, Érasme440, le living lab du Département du Rhône, Julien
Dorra441, graphiste et hacktiviste ainsi que Knowtex442, la communauté qui explore la
science, la technologie, le design et l’innovation. L’idée : Trois jours pour remixer le
musée. Le principe : des workshops composés de non-professionnels travaillant sur
des projets de dispositifs innovants à intégrer dans un musée.
Durant ces trois jours donc, «les participants co-créent et testent de nouvelles
façons d’approcher les expositions.» Les participants sont sélectionnés sur leurs
compétences, champs d’activités et intérêts. Ce sont des professionnels de musées
(muséographes, historiens de l’art, médiateurs, etc), des créateurs (des graphistes, des
bricoleurs, des designers, etc), des professionnels du numérique (développeur, Web
designer, techniciens, etc), des amateurs d’art et de sciences et des passionnés
d’éducation, de médiation et de culture. Museomix est une vision d’un musée plus
ouvert et inclusif, où chacun peut trouver « sa » place, en réseau et connecté avec
diverses communautés de visiteurs en ligne et sur place, et «un laboratoire vivant qui
évolue avec ses utilisateurs»443.
Comme le formule Gonzague Gauthier, c’est l’expérience ponctuelle qui prime.
Les dispositifs n’étant pas destinés à intégrer l’ensemble des dispositifs prévus par
l’institution sur le long terme, il s’agit plus d’une expérience humaine que d’une réelle
remise en cause de l’institution dans sa manière de fonctionner et son rapport aux
cultures numériques. Selon ses mots toujours, le but de Muséomix «n’est en fait pas de
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436 <http://www.museomix.com/> (consulté le 28 août 2013).437 <http://www.buzzeum.com/> (consulté le 28 août 2013).438 <https://twitter.com/samuelbausson (consulté le 28 août 2013) >.439 <http://nod-a.com/> (consulté le 28 août 2013).440 <http://www.erasme.org/> (consulté le 28 août 2013).441 <http://juliendorra.com/> (consulté le 28 août 2013).442 <http://www.knowtex.com/> (consulté le 28 août 2013).443 <http://www.museomix.com/> (consulté le 28 août 2013).
repenser l’institution, mais de la court-circuiter.»444 Dans une autre note de blog,
Gonzague Gauthier soulève le problème de l’objectif réel de Museomix, qui, bien qu’il
ait pour slogan de «remixer» le musée, ne fait que reproduire le cadre organisationnel
de l’institution445. Il s’agit de savoir ici, si l’objectif est de secouer l’institution tout entière
ou non. Difficile d’atteindre un tel objectif en trois jours. Basé sur le modèle des
hackathons, Museomix a, il me semble, pour mission de regrouper des «têtes
penseuses» sur un même thème. Les trois jours ne sont qu’une contrainte d’emploi du
temps et une manière de se donner un objectif de rapidité (en réponse aux institutions
muséales au sein des quelles la mise en place d’un projet prend toujours beaucoup de
temps). Il s’agit en fait d’un «musée-laboratoire où on peut expérimenter à loisir, en très
peu de temps.»446
L’idée reste tout de même de concevoir un projet innovant, en mariant les
expertises de chacun (design, Web design, développement, bricolage, dessin, photo,
histoire de l’art, etc) dans une période de temps donnée. Et le concept est innovant,
mais il n’en est qu’à ses débuts. Comme tout concept, il demande du temps, de la
réflexion et du travail447.
1 Soir, 1 Musée, 1 Verre
Le «groupe SMV» c’est l’abréviation de «1 Soir, 1 Musée, 1 Verre». Initié en
août 2011 par Kristel Fauconnet et Laurent Albaret, ce groupe a pour mission de se
réunir un soir par semaine pour visiter un musée et profiter d’un verre ensemble après
la visite pour en discuter448.
L’objectif du groupe SMV est aussi de permettre à la communauté des
muséogeeks (mais pas seulement) de se retrouver IRL, et d’élargir cette
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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444 GAUTHIER G., «L’itération ou la grande messe ? Questions de stratégie.», Véculture, 22 janvier 2013, <http://gonzagauthier.wordpress.com/2013/01/22/literation-ou-la-grand-messe-questions-de-strategies-numeriques/> (consulté le 28 août 2013).445 Id.446 CLÉMENT F., «Samuel Bausson, ou la médiation en réseau», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.21.447 Muséomix 2013 se déroulera les 8, 9 et 10 novembre, simultanément dans plusieurs musées, dans plusieurs pays : Le Château des Ducs de Bretagne à Nantes, le Louvre-Lens, le Musée Dauphinois à Grenoble, l’Ironbridge Gorge Museum à Shropshire, le Musée de la Civilisation à Québec et le Musée des Arts Décoratifs à Paris.448 MAGRO S., «Qui sont les #Muséogeeks ?», DASM, 15 avril 2013, <http://dasm.wordpress.com/2013/04/15/qui-sont-les-museogeeks/> (consulté le 28 août 2013).
communauté449. C’est un évènement qui s’adresse à tout le monde, aux professionnels
comme aux amateurs, et c’est une occasion exceptionnelle de pouvoir échanger,
découvrir et se rencontrer. Le groupe SMV a notamment été accueilli par le musée du
quai Branly à l’occasion de l’exposition «Les maîtres du désordre». Les participants
avaient été invités à jouer à un jeu sur Twitter, organisé par le Community Manager du
musée, Sébastien Magro450. C’est aussi une communauté qui amène ce type de projet
participatif et collaboratif.
Le groupe SMV c’est une page Facebook451, un compte Twitter452, et un
Tumblr453, autant de plate-formes sur lesquelles les évènements sont annoncés et les
participants peuvent communiquer.
En bref, c’est une autre communauté informelle, conviviale, qui a pour but de
faire se rencontrer des passionnés, leur permettre de discuter autour d’une œuvre,
d’une exposition, d’un musée, et finalement, d’un verre.
3.3.1.2.2. Conférences annuelles
De nombreuses conférences sont organisées annuellement sur le thème des
institutions culturelles et des technologies numériques, partout dans le monde. Elles
présentent des occasions pour les professionnels et les amateurs de découvrir les
nouveaux projets innovants, de présenter les leurs pour promouvoir leur institution, de
se créer un réseau, d’échanger, d’apprendre, de se tenir au courant de l’actualité et de
se former. En voici deux exemples réputés, l’un français, l’autre international454.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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449 <http://legroupesmv.tumblr.com/> (consulté le 28 août 2013).450 Entretien Sébastien Magro, Annexes, p.55.451 <https://www.facebook.com/LegroupeSMV> (consulté le 28 août 2013).452 <https://twitter.com/legroupeSMV> (consulté le 28 août 2013).453 <http://legroupesmv.tumblr.com/> (consulté le 28 août 2013).454 Il en existe bien évidemment beaucoup d’autres qui gagneraient à être connues, pour des raisons pratiques de temps et de limitation de pages, je n’en ferai pas la liste exhaustive ici.
Les Rencontres Nationales Culture & Innovation, Club Culture & Innovation
France455
Créé en octobre 2008, le Club Innovation & Culture (CLIC France) «réunit les
musées, lieux de patrimoine et lieux de culture scientifique français sensibilisés aux
problématiques des nouvelles technologies numériques et de leurs usages. Le club
bénéficie du soutien du Ministère de la Culture et de la Communication»456. Depuis sa
création, le CLIC France a organisé 32 évènements et a accueilli plus de 500
professionnels et experts de la culture et des technologies numériques. C’est un
réseau dynamique et vivant, qui combine à la fois le domaine de la culture et des
technologies. Le CLIC est ainsi devenu un réseau unique en France, au carrefour de la
culture et de l’innovation technologique.
Le CLIC France est un site Internet proposant un grand nombre de ressources
et d’articles de fond sur des sujets consacrés aux nouvelles technologies et aux
musées, dans le monde entier.
Le groupe a souhaité créer un évènement annuel, espace de rencontres,
d’échanges et de partage entre les professionnels des lieux culturels et les experts,
d’où la création des Rencontres Nationales Culture & Innovation. Ces Rencontres
Nationales sont organisées chaque année par le CLIC France, depuis 2010. Elle se
déroulent généralement la dernière semaine du mois de janvier457. Le blog de
Buzzeum les décrit comme une occasion d’écouter des experts donner leur point de
vue sur les dernières innovations dans le secteur culturel, de découvrir des projets
présentés par leurs concepteurs, d’assister à des tables rondes avec des responsables
de musées autour de thèmes d’actualités tels que la 3D, les dispositifs in-situ
innovants, les nouveaux outils en ligne ou mobile458.
L’édition 2013 a eu lieu le 1er février à la Cité des Sciences et de l’Industrie, sur
le thème «Mobilité, communauté et virtualité : les musées, lieux de patrimoine et de
science face aux nouveaux enjeux du numérique»459.
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455<http://www.club-innovation-culture.fr/rencontres-culture-innovations/> (consulté le 28 août 2013).456 <http://www.club-innovation-culture.fr/club/presentation/> (consulté le 28 août 2013).457 <http://www.club-innovation-culture.fr/club/presentation/> (consulté le 28 août 2013).458 <http://www.buzzeum.com/2010/01/05/rencontres-nationales-culture-innovations/> (consulté le 28 août 2013).459 <http://www.club-innovation-culture.fr/rencontres-culture-innovations/rnci-13-presentation/> (consulté le 28 août 2013).
Ces journées sont ouvertes à tous mais uniquement sur inscription. Elles
regroupent chaque année plus de 300 participants, représentant plus de 150
entreprises et institutions.
Museums and the Web460
La conférence Museums and the Web (MW) est organisée par la société nord-
américaine Archives & Museum Informatics depuis 1997. L’édition 2013 a eu lieu à
Portland, du 17 au 20 avril dernier461. C’est une occasion pour les chercheurs,
étudiants et professionnels des technologies numériques de se réunir autour d’un sujet
qui leur est commun, centré, comme son nom l’indique, sur les musées et le Web. La
conférence a été organisée dans le but de fédérer la communauté muséale avec celle
des développeurs Web, pour que chacune apprennent l’une de l’autre, et qu’elles
grandissent et échangent des informations462.
Les conférences organisées ont pour but «d’étudier la présence des musées sur
le Web et les différentes façons de tirer le meilleur parti des nouvelles technologies
pour optimiser les interactions avec le public - qu'elles soient réelles ou virtuelles»463.
Les participants tentent de répondre aux problématiques qui se posent, dans une
optique d’optimisation de la visite de musée mais aussi d’expansion du musée hors de
ses murs.
Les participants viennent de tous les corps de métiers et du monde entier, des
webmasters, des développeurs, des programmeurs, des commissaires d’exposition,
des libraire, des éditeurs, des designers, des managers, des directeurs, des
enseignants, des consultants indépendants et bien d’autres encore464.
La programmation comporte des présentations des derniers projets entrepris par
les institutions, des conférences ouvertes, des activités, des débats, des ateliers, et
enfin la remise du prix Best of the Web. Ce prix est attribué par un jury de
professionnels, après la présentation des différents projets classés par catégories. Les
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460 <http://www.museumsandtheweb.com/> (consulté le 28 août 2013).461 CHANDRAN Cécile, «Muséologie et innovation chez Museums and the Web», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.105.462 <http://www.archimuse.com/conferences/mw.html> (consulté le 28 août 2013).463 CHANDRAN C., «Muséologie et innovation chez Museums and the Web», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.105.464 <http://www.digitalmeetsculture.net/article/17th-annual-museums-and-the-web-conference/> (consulté le 28 août 2013).
prix peuvent récompenser différents types de projets, les projets audio, éducatifs,
innovants et expérimentaux, mobiles ; des projets d’expositions virtuelles, de réseaux
sociaux, de collections en ligne, de musées professionnels ou encore des projets à
long terme465. Le prix Best of the Web 2013 a été attribué au Rijksstudio qui a été
largement acclamé pour son innovation, son pari audacieux et son investissement466.
La conférence Museums and the Web dispose d’une page Facebook467 et d’un
compte Twitter468. Les interventions sélectionnées sont compilées et publiées chaque
année en ligne, moyennant finance. Elles sont aussi disponibles dans de nombreuses
bibliothèques et centres de documentation.
3.3.1.2.3. Lieux d’innovations et d’expérimentations
Plus le domaine des technologies numériques et de la culture se fédère en
discipline, plus l’on voit naître de nouveaux lieux d’innovations et d’expérimentations.
Ce sont des communautés qui permettent de mener à bien des projets originaux. Les
institutions culturelles auront à cœur de les connaître et de s’en rapprocher pour
assurer leur propre pérennité.
Un programme de recherche universitaire : le programme Leden
Le programme de recherche universitaire LEDEN a été créé en 2004 par
Ghislaine Azémard, qui est aujourd’hui sa directrice scientifique469. Le LEDEN a signé
une Convention en partenariat avec la Mission Recherche et Technologie du Ministère
de la Culture, il a été créé pour développer un centre de recherche sur la «diffusion et
la valorisation scientifique et culturelle sur supports numériques»470.
Les participants de ce programme ont pour mission de mener des recherches
sur les enjeux majeurs des Nouvelles Technologies de l’Information et de la
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142
465 CHANDRAN C., «Muséologie et innovation chez Museums and the Web», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.106.466 <http://mw2013.museumsandtheweb.com/best-of-the-web-winners/> (consulté le 28 août 2013).467 <https://www.facebook.com/museweb> (consulté le 28 août 2013).468 <https://twitter.com/museweb> (consulté le 28 août 2013).469 <http://leden.org/lequipe/> (consulté le 28 août 2013). Ghislaine AZEMARD, est professeure en Sciences de l’Information Communication à l’Université Paris 8, Directrice de l’équipe «Ecritures et Hypermédiations Numériques» du Laboratoire Paragraphe. Elle est responsable du master «Création, Innovation, Information Numériques» Université Paris 8 / Université Paris 13.470 <http://leden.wordpress.com/qui-sommes-nous/> (consulté le 28 août 2013).
Communication au sein du musée et de la médiation. Le LEDEN développe ses
actions et projets de produits éditoriaux innovants sur des recherches ergonomiques,
sémantiques, esthétiques de représentation et de médiation numériques471.
Il s’agit de travailler sur des projets de médiation pédagogique, scientifique
(création et optimisation du site www.mariecurie.science.gouv.fr), territoriale
(participation au projet Terra Numerica), et culturelle (veille et prospective sur le
numérique appliqué au patrimoine)472.
Les expérimentations sont développées selon deux axes :
‣ Un axe théorique selon lequel les recherches entreprises ont pour but d’étudier et
de trouver des solutions à des problématiques d’usages interactifs, d’élaborer des
modèles d’organisation multimédia et de mener des recherches sur des sujets en
particulier comme l’utilisation de la 3D.
‣ Un axe pratique selon lequel l’équipe réalise des projets multimédias, mêlant une
démarche innovante à des contenus scientifiquement et culturellement valides 473.
Sur les médias sociaux, le programme Leden c’est : une page Facebook 474, un
compte Twitter475, un compte Dailymotion476, un compte YouTube477 et un blog 478.
Une initiative gouvernementale : Le Culture Lab du Ministère de la Culture
La plate-forme Culture Labs479 est une plate-forme d’expérimentation de
services culturels numériques innovants qui présente les projets soutenus par le
ministère de la Culture et de la Communication dans le cadre d’appels à projets lancés
en 2010 et 2012. Le Ministère français de la Culture et de la Communication s’est
engagé dans une démarche de soutien des projets numériques innovants et des
projets de développement des usages culturels en lien avec les nouveaux enjeux du
numérique. Il a à cœur de favoriser la naissance de partenariats et de collaboration
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471 <http://leden.org/programme-leden/> (consulté le 28 août 2013).472 <http://leden.wordpress.com/programme-de-recherche-et-de-creation-leden/> (consulté le 28 août 2013).473 <http://leden.org/programme-leden/> (consulté le 28 août 2013).474 <https://www.facebook.com/ProgrammeLEDEN?ref=ts> (consulté le 28 août 2013)475 <https://twitter.com/ProgrammeLEDEN> (consulté le 28 août 2013).476 <http://www.dailymotion.com/labo_leden#video=xler1> (consulté le 28 août 2013).477 <http://www.youtube.com/user/Leden08> (consulté le 28 août 2013).478 <http://leden.wordpress.com/> (consulté le 28 août 2013).479 <http://culturelabs.culture.fr/index.html> (consulté le 28 août 2013).
entre établissements publics, services de l’État, collectivités locales, partenaires privés
et laboratoires de recherche, dans la mise en œuvre de tels projets480.
En ce sens, et doté d’un fonds d’1,5 millions d’euros, Culture Lab a pour mission
de soutenir des projets innovants de tous types :
‣ Des services pour la visite, la découverte et la connaissance (musées, œuvres,
sites, monuments, territoires, etc)
‣ Des interfaces à destination du grand public, innovantes dans leurs contenus et
leur visualisation
‣ Des services de diffusion de contenus sur les plate-formes collaboratives et les
réseaux sociaux
‣ Des services de réutilisation de données publiques culturelles
‣ Des services d’indexation et de classification collaborative des contenus en ligne
‣ Des services ludiques basés sur contenus culturels
‣ Des services numériques pour l’éducation artistique et culturelle
‣ Des plate-formes d’édition innovante pour des contenus thématiques
‣ Des services de personnalisation (familles, enfants, groupes, multilinguisme, e-
accessibilité, e-inclusion...)
‣ Des services de médiation numérique pour le spectacle vivant : «spectacle
enrichi», espaces critiques et collaboratifs, diffusion innovante de contenus…
Les projets sont retenus dans le cadre d’un appel à projet «services numériques
culturels innovants», ils gagnent en visibilité et le Culture Lab crée ainsi une dynamique
de réseau et d’échange entre le public et les institutions 481.
La plate-forme en ligne a pour but de rassembler non seulement les projets afin
de leur donner une certaine visibilité, mais aussi servir de réseau dynamique. Ainsi, les
différents laboratoires d’expérimentations sont listés482, les projets cartographiés 483, et
les utilisateurs peuvent retrouver tous les projets et leur présentation484.
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480 Ministère de la Culture et de la Communication, “Culture lab”, CBlog, 9 juillet 2013 , <http://cblog.culture.fr/projet/2013/07/09/culture-lab> (consulté le 28 août 2013).481 <http://culturelabs.culture.fr/objetifs.html> (consulté le 28 août 2013).482 <http://culturelabs.culture.fr/autres_labs.html> (consulté le 28 août 2013).483 <http://culturelabs.culture.fr/carte.html> (consulté le 28 août 2013).484 <http://culturelabs.culture.fr/projets.html> (consulté le 28 août 2013).
Un laboratoire dans un musée : le Museum Lab du Louvre485
Né de la volonté d’expérimenter de nouvelles approches muséographiques,
Museum Lab est le résultat d’une collaboration, entre les équipes de Dai Nippon
Printing (DNP) et celles du musée du Louvre, qui a vu le jour en 2006486. La
collaboration entre le musée du Louvre et DNP avait déjà commencé avec le soutien
du groupe DNP dans la création du CyberLouvre, un espace de documentation
multimédia situé dans l’allée du Grand Louvre487. Henri Loyrette, alors directeur du
Louvre disait du Museum Lab qu’il était une façon de «réfléchir sur ce que pourront
devenir les musées de demain»488. Le principe est de tester un nouvel outil de
médiation numérique en se basant sur une œuvre. Grâce à diverses méthodes et
technologies, ces expérimentations ont pour objectif d’explorer différentes façons de
regarder une œuvre d'art et de l'apprécier489. Le musée gère et élabore le contenu
scientifique et pédagogique, et DNP met à l’œuvre ses compétences et son expertise
dans la maîtrise des outils technologiques de pointe. Les projets réalisés sont des
dispositifs multimédias disponibles en français, en japonais et en anglais490.
Ces derniers sont implantés dans les salles d’exposition permanentes du
musée. Une implantation a eu lieu en juin 2011 dans le département des objets d'art.
En 2012, ils étaient présents dans le département des Antiquités égyptiennes, suivis en
2013 par le département des Peintures et en 2014, par le département des Antiquités
grecques, étrusques et romaines.
Conçus comme des outils d'aide à la visite, ces dispositifs multimédia ont été
intégrés de la manière la plus harmonieuse possible avec l’espace d’exposition, afin de
ne pas gêner l'appréciation des œuvres et la circulation des visiteurs491.
Les expérimentations sont diverses. Par exemple, afin d’appréhender au mieux
l’iconographie des vases de la Grèce antique, un dispositif immersif de
contextualisation de l’univers des productions de vases antiques a été installé. Le
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485 <http://museumlab.fr/> (consulté le 28 août 2013).486 «Lieux culturels et nouvelles pratiques numériques», Culture et Recherche, n°112, été 2007, p.21.487 Id.488 «Museum Lab au musée du Louvre», Message du président-directeur Henri Loyrette, <http://museumlab.fr/greeting/message/index.html> (consulté le 28 août 2013).489 <http://museumlab.fr/greeting/theme/index.html> (consulté le 28 août 2013).490 «Lieux culturels et nouvelles pratiques numériques», Culture et Recherche, n°112, été 2007, p.21.491 <http://museumlab.fr/exhibition/10/development.html> (consulté le 28 août 2013).
dispositif repose sur une présentation immersive sonore et visuelle, disponible en
plusieurs langues. La mise en scène reprend des représentations de personnages et
d'objets peints sur les céramiques, qui sont transposées à l'échelle réelle, afin de
permettre au visiteur d'appréhender la réalité d'une scène de banquet dans le monde
grec492. Toujours dans les salles d’Antiquité grecque, un dispositif propose aux visiteurs
d’expérimenter les représentations du corps masculin dans l'art grec de la période
archaïque à la période hellénistique. Un dispositif comprenant une interface gestuelle
permet d’appréhender les différentes postures. Le visiteur peut, in fine, immortaliser
une posture aux côtés d’Héraclès, et rapporter le cliché chez lui493.
Le fruit des expériences conduites au sein du Museum Lab est ainsi destiné à
enrichir la présentation de nos collections au sein du musée et profitera peut-être à
d’autres musées494. Le Museum Lab a en effet pour objectif global de diffuser les
résultats de ses recherches auprès de musées, d'institutions culturelles ou
d'établissements pédagogiques japonais, français ou étrangers, dans une volonté de
susciter la rencontre du public avec les œuvres d'art495. Un panorama des
expérimentations effectuées a été mis en ligne496.
Les laboratoires d’expérimentation de nouvelles pratiques et de nouveaux
usages du numérique et du Web au musée se développent de plus en plus. D’autres
lieux d’innovations existent, tous ne sont pas listés ici. Je pense notamment au récent
Google Cultural Institute, qui présente un bon exemple du mariage de la culture et du
numérique, cette fois spécifiquement appliqué au Web. Ce sont pour l’instant des
initiatives écartées, assez distinctes dans l’ensemble. Tout musée et institution
culturelle gagnerait à se rapprocher de ce type d’initiative ou d’essayer de les
développer eux-mêmes. Du moins, ils seraient avisés, dans un objectif d’évolution et
de formation, de se tenir au courant de l’actualité de ces expérimentations.
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492 <http://museumlab.fr/exhibition/10/development.html> (consulté le 28 août 2013).493 <http://museumlab.fr/exhibition/10/PV/souvenir/index.html> (consulté le 28 août 2013).494 «Museum Lab au musée du Louvre», Message du président-directeur Henri Loyrette, <http://museumlab.fr/greeting/message/index.html> (consulté le 28 août 2013).495 <http://museumlab.fr/greeting/theme/index.html> (consulté le 28 août 2013).496 <http://museumlab.fr/mls/index.html> (consulté le 28 août 2013).
3.3.2. Financements et mise en œuvre d’un projet de
diffusion numérique des collections
3.3.2.1. L’émergence d’un nouveau type de financement :
le crowdfunding
Nous ne pouvons parler de mettre en place une stratégie numérique sans
répondre à la question du financement. Les institutions culturelles du monde entier
souffrent d’un manque de budget pour réaliser leurs projets, à part peut-être quelques
grandes exceptions, et encore. Il ne s’agit pas ici de discourir sur les tensions amenées
par une conjoncture économique en baisse. Il me semble que quelque soit la situation
économique, il est toujours difficile pour une institution culturelle de trouver des
financements pour ses projets.
Le numérique et le Web sont des nouveaux facteurs de changement des
habitudes de mécénat et sponsoring culturels. De même que l’espace virtuel du Web
est aujourd’hui sous le signe de la participation, il en est de même pour le financement.
En France, le mécénat d’entreprise permet aux institutions de mener à bien
leurs projets. Dans les pays anglo-saxons, de culture philanthropique, les dons de
particuliers est monnaie courante. Dans un paysage économique difficile pour les
musées, le crowdfunding «pourrait bien être la solution de sauvetage de la culture»497.
Un grand changement s’annonce donc dans le paysage du mécénat culturel, l’arrivée
du simple contribuable, passionné de culture, et prêt à dépenser quelques euros pour
participer à la sauvegarde et à la préservation de son patrimoine.
Le système du crowdfunding repose sur le financement dit «participatif».
«Crowd» désigne la foule et «funding» les donations, ce sont donc des dons qui
proviennent de la foule, du «grand public». Selon la définition qu’en donne le ministère
des finances, il s’agit «d’un mécanisme de financement innovant qui permet de récolter
des fonds auprès d’un large public en vue de financer un projet créatif ou
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497 «Le crowdfunding va-t-il sauver la culture ?», Let’s Act, 18 décembre 2012, <http://letusactnow.wordpress.com/2012/12/18/le-crowdfunding-va-t-il-sauver-la-culture/> (consulté le 28 août 2013).
entrepreneurial qui fonctionne le plus souvent via Internet.»498 Le plus célèbre exemple
de crowdfunding est la dernière campagne de Barak Obama, financée par le grand
public à hauteur de 150 millions de dollars499.
Son efficacité a été prouvée dans de nombreux domaines déjà, notamment celui
de la musique, et elle commence à l’être dans le secteur muséal. Cette solution ne
connaît pas cependant un succès immédiat. Il n’est pas évident pour les institutions
culturelles de s’emparer de ce nouveau modèle. Un musée, par définition, est une
structure qui demande du temps et de la réflexion, c’est peut-être la raison pour
laquelle l’appel au crowdfunding n’est pas encore entré dans les moeurs muséales500.
Si le modèle du crowdfunding n’est pas ancré dans notre culture c’est tout
simplement parce qu’il n’est pas issu de la culture française, mais qu’il nous vient des
États-Unis. L’Association des professionnels du crowdfunding en France a récemment
publié la réglementation liée au financement participatif. Il y est stipulé que le
crowfunding n’existe pas dans la réglementation française et qu’il n’y a pas encore été
introduit comme il l’est aux États-Unis. Le droit français, positif, contrairement à la soft
law anglo-saxonne ne donne pas de statut protecteur à la jurisprudence. Ce qui ne
ressort pas d’un texte de loi peut donc être soumis à un risque de requalification
juridique501.
En résumé, le crowdfunding ne rentre dans aucune catégorie réglementée par le
droit français et cela pose problème au législateur. Difficile donc de développer un
concept qui ne fait partie d’aucun cadre juridique. À ce sujet, le gouvernement a
annoncé l’établissement d’un cadre juridique sécurisé pour le déploiement de la
finance participative en France. Des propositions seront faites dès septembre 2013
pour favoriser ce nouveau type de financement dans un cadre législatif clair. En
attendant, l’AMF et l’ACP ont mis à disposition du public deux guides donnant
précisément, à droit constant, les règlementations qui s’appliquent aujourd’hui en
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498 Ministère de l’économie et des finances, «Mise en ligne d’un guide du financement participatif («Crowdfunding»)», Site du Ministère, 16 mai 2013, <http://www.economie.gouv.fr/mise-en-ligne-dun-guide-financement-participatif-crowdfunding> (consulté le 28 août 2013).499 <http://www.kisskissbankbank.com/fr/pages/faq/basics> (consulté le 28 août 2013).500 «Le crowdfunding va-t-il sauver la culture ?», Let’s Act, 18 décembre 2012, <http://letusactnow.wordpress.com/2012/12/18/le-crowdfunding-va-t-il-sauver-la-culture/> (consulté le 28 août 2013).501 <https://fpfrance.wordpress.com/2013/02/11/reglementation-du-crowdfunding-en-france/#more-56> (consulté le 28 août 2013)
fonction des modalités choisies. L’un est destiné au grand public, l’autre aux porteurs
de projets et aux sites de financement participatif502.
Les sites de financement participatifs sont nombreux, deux sont particulièrement
connus des acteurs culturels, My Major Company503 et Kiss Kiss Bank Bank. My Major
Company fonctionne ainsi : chaque concepteur de projet décide du montant maximum
dont il a besoin pour la réalisation de son projet, et la durée de la collecte (elle peut
être de 6 mois maximum). Le concepteur de projet présente son projet aux internautes
pour les convaincre de le soutenir et il y fixe les contreparties qu’il offrira à ses
contributeurs si l’objectif de collecte est atteint. En cas de non réussite de la collecte
dans le temps imparti, les contributeurs récupèrent leur participation (par
remboursement direct ou remise en jeu de leur crédit pour un autre projet). Tant qu’un
projet n'a pas atteint son objectif de collecte (les 100% de sa jauge), ses contributeurs
peuvent à tout moment annuler leur participation. Les contreparties peuvent être
financières, si cela est précisé dans la présentation du projet (les projets qui en
proposent sont indiqués par un bandeau orange «Retour financier»)504. Le site précise
toutefois que le financement participatif ne doit pas être perçu comme un moyen de
s’enrichir, mais de contribuer et soutenir des projets qui tiennent à cœur505. L’intérêt de
faire appel à My Major Company selon son directeur général Stéphane Bittoun c’est de
pouvoir toucher un nouveau public et d’être connecté aux médias sociaux506.
Le Centre des monuments nationaux et My Major Company se sont associés en
2012 pour lancer une campagne de crowdfunding pour la restauration de quatre
monuments nationaux, l’abbaye du Mont-Saint-Michel, le Panthéon, le domaine
national de Saint-Cloud ainsi que le château et remparts de la cité de Carcassonne. La
campagne s’est achevée le 1er mai 2013 et a permis de récolter 123 219 euros, soit 3
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
149
502 Ministère de l’économie et des finances, «Mise en ligne d’un guide du financement participatif («Crowdfunding»)» , Site du Ministère, 16 mai 2013, <http://www.economie.gouv.fr/mise-en-ligne-dun-guide-financement-participatif-crowdfunding> (consulté le 28 août 2013)503 My Major Company est une équipe d'une quinzaine de salariés basée à Paris, 70 000 internautes contributeurs, 340 000 membres, dont 200 000 abonnés à a newsletter et 13 millions d’euros de participation réunis en tout depuis le lancement de la plateforme. (<http://www.mymajorcompany.com/about>).504 Seuls des projets portés par MyMajorCompany ou ses partenaires peuvent en offrir afin que les contributeurs soient garantis du bon calcul et du bon versement de leurs droits.505 <http://www.mymajorcompany.com/about> (consulté le 28 août 2013).506 BITTOUN S., Présentation de ‘My Major Company’, RNCI 2013.
fois l’objectif annoncé507. Au-delà des retombées financières qui ont permis de lancer
les chantiers de restauration, la campagne de crowdfunding a également eu des
retombées médiatiques bénéfiques pour les institutions.
KissKissBankBank est, elle aussi, une plate-forme de financement participatif
dédiée à la créativité, à l’innovation et à la culture. Elle accueille des créateurs, artistes,
humanistes, inventeurs, explorateurs, cinéastes, journalistes, designers, athlètes,
écologistes, etc508. Le fonctionnement est le même que pour My Major Company, les
porteurs de projet annoncent leur projet, leurs besoins, et les contreparties attribuées
aux contributeurs. En tant que service de mise en relation entre les créateurs de
projets et les internautes, KissKissBankBank perçoit une commission de 5% sur les
collectes de fonds réussies. Cette commission est facturée aux créateurs de projets.
En revanche, KissKissBankBank ne perçoit rien sur les collectes de fonds qui
échouent.
Les plate-formes de financement participatif constituent à la fois des outils de
financement, de communication et de sociabilité. Pour les contributeurs, ce qui les
motive c’est à la fois le plaisir de faire exister les idées ou les projets qui ont du sens,
de vivre de l’intérieur la vie de ces projets et de profiter des contreparties fixées par les
créateurs de projets afin de concrétiser immédiatement l’effort financier consenti509.
Pour les créateurs de projet, outre une source de financement, c’est un moyen de se
faire connaître et de rencontrer son public, voire même de rencontrer un nouveau
public.
Les institutions culturelles à la recherche de sources de financement pour mener
à bien un projet numérique ou solidifier une stratégie numérique auront donc compris
l’intérêt et l’importance de faire appel au financement participatif.
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507 «MyMajorCompany récolte plus de 120 000 euros pour restaurer 4 monuments du CMN», CLIC France, 25 mai 2013, <http://www.club-innovation-culture.fr/mymajorcompany-recolte-plus-de-120-000-euros-pour-restaurer-4-monuments-du-cmn/> (consulté le 29 août 2013).508 <http://www.kisskissbankbank.com/fr/pages/faq/basics> (consulté le 29 août 2013).509 <http://www.kisskissbankbank.com/fr/pages/faq/basics> (consulté le 29 août 2013).
3.3.2.2. Élaborer une stratégie de diffusion numérique des
collections
À la lumière de l’étude des différents enjeux du Web d’aujourd’hui, des
questionnements que posent le numérique au musée et de ce qui existe en terme
d’offre numérique innovante sur le toile, il est désormais temps d’élaborer une stratégie
de diffusion numérique des collections.
Les institutions culturelles souhaitant mettre en ligne leurs collections sur une
interface dédiée, à la construction et au design dynamiques et novateurs, pourront se
tourner vers des sources d’idées variées. Beaucoup d’institutions anglo-saxonnes ont
mis en ligne leur stratégie numérique, je pense notamment à la Tate et à la
Smithsonian Institution. J’invite les musées français à étudier ces stratégies et à s’en
inspirer. Ils pourront également se tourner vers des études d’économie et de marketing.
Bien que ces termes semblent interférer avec la logique muséale, ils sont pourtant
nécessaires à l’accomplissement des missions des musées.
3.3.2.2.1. Pourquoi mettre en place une stratégie
numérique ?
L’acception «stratégie» fait référence au vocabulaire économique et commercial,
aux entreprises privées. On ne l’aurait pas immédiatement appliqué au musée.
Pourtant, il est essentiel que les musées se dote d’une stratégie et tout
particulièrement d’une stratégie numérique. «Une stratégie permet d'abord de faire
reconnaître l'importance des nouveaux outils virtuels, pour tous les personnels du
musée, l'allocation des ressources et la nécessaire réorganisation du travail découlent
de cette reconnaissance.»510
C’est une réflexion qui s’est déjà amorcée dans certains musées. C’est le cas
par exemple des musées de la Smithsonian Institution. La stratégie numérique définie
par la Smithsonian Institution repose sur une conception hybride de l'apprentissage, à
la fois formel et informel, voire autodidacte. Les outils virtuels et le développement des
communautés en ligne sont compris comme des pièces essentielles à la construction
de la mission éducative de l'institution. Au cœur de sa stratégie, l'usage du numérique
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
151
510 «Le numérique c’est stratégique», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.10.
est considéré comme un moyen d'améliorer les connaissances, de diffuser les savoirs
et les objets, et de maintenir à long terme un lien direct avec ses publics511.
La Smithsonian Institution a mis en place un wiki consacré à sa stratégie
numérique512. On peut y lire que «l'autonomie et l'innovation doivent demeurer
possibles au sein de la structure organisationnelle centrale dont le rôle sera de définir
des normes, de fournir des équipements et des services partagés par tous les
employés.»513 La Smithsonian n’est pas la seule à mettre sa stratégie numérique en
ligne, la Tate le fait également514. Le document de la Tate, quoique moins fourni que le
wiki de la Smithsonian, propose une version concise de leur stratégie numérique.
3.3.2.2.2. Musées et logique marketing : deux concepts a
priori antagonistes
Le marketing, le «marché», est un terme qui ne semble pas adapté au monde
muséal et ses finalités non lucratives. Mais le marketing n’a pas forcément un
caractère commercial. L’objectif du marketing n’est pas nécessairement de faire
augmenter les recettes ou la fréquentation, il est de faire en sorte que les missions de
l’institution soient remplies. Le marché en tant que rencontre de l’offre et de la
demande n’induit pas nécessairement une notion économique et commerciale. Il faut
voir la logique marketing comme une logique de travail qui consiste à aider les
responsables d’une institution à mener à bien un projet auquel les publics visés
adhèrent, et à en étudier les conditions de mise en œuvre ainsi qu’à élaborer les outils
analytiques de son efficacité. Ainsi, une stratégie marketing bien maîtrisée sera au
service de la réalisation d’un projet culturel515.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
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511 «Le numérique c’est stratégique», in CLÉMENT F., Musées et patrimoines numériques, livre blanc, Thot Cursus, 2013, p.10-11.512 Smithsonian Institution, Web and New Media Strategy Wiki, <http://smithsonian-webstrategy.wikispaces.com/> (consulté le 28 août 2013).513 Id.514 STACK J., «Tate Digital Strategy 2013–15: Digital as a Dimension of Everything», Reports and Strategies, Tate, 24 April 2013, <http://tinyurl.com/qgyvgmo> (consulté le 28 août 2013).515 TOBELEM J.-M., Enjeux contemporains dans la gestion des musées, 1ère année de 2ème cycle, École du Louvre, 2012.
3.3.2.2.3. Proposition de méthode
Je propose ici une méthode stratégique, inspirée de sources diverses et
élaborée à partir de plusieurs modèles516. Ce plan stratégique, que j’ai voulu court et
concis, présente un modèle des plus personnels, conçu au fur et à mesure de mes
recherches. Sa présentation n’intervient ici qu’à titre d’exemple.
Diagnostic stratégiqueÉvaluation interne : l’institution
Il est essentiel de partir de l’institution, de ses collections, de ses dispositifs et
de sa politique, avant de mettre en œuvre un projet. Il faudra, de fait, se poser
les questions suivantes :
‣ Missions, objectifs et principes : Quels sont les éléments clés définis
dans le projet scientifique et culturel ? Quelles sont les missions de
l’institution ? Quels objectifs s’est-elle fixée ? Quelles sont les principes et
les valeurs que l’institution défend? Quelle est sa politique de diffusion des
collections ?
‣ Contenus et atouts : Que propose l’institution en termes de dispositifs de
médiation numérique ? Quelles informations fournit-elle ? Quels sont les
atouts de ses collections ? Que présente-t-elle en ligne ? À quoi ressemble
son site Internet ? Quels éléments pourraient être améliorés ?
‣ Publics : Quels types de publics sont familiers avec l’institution ? Comment
ces publics réagissent-ils aux informations fournies par celle-ci ? Que
demandent-ils ? Quels sont leurs besoins ? Les publics de l’institution sont-
ils familiers d’Internet ? Quels publics peut-on toucher sur Internet ? Si des
études de publics ont été menées, les consulter pour clarifier ces questions.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
153
516 Sources : ELLIS (2011), SORENSON (2008), RICHARDSON & VISSER (2012), STACK (2013) ainsi que les stratégies numériques publiées par la Smithsonian Institution et la Tate.
Évaluation externe : Le contexte numérique actuel
Établir une grille d’analyse SWOT : Forces / Faiblesses /
Opportunités / Menaces517
Cette première analyse prend ses sources dans le modèle SWOT, bien connu
du monde du marketing. Ce modèle est essentiel en tant que point de départ
d’un diagnostic stratégique.
Analyse de l’offre : Qui, quoi et où ?
‣ Le Web : qu’est-ce-que le Web aujourd’hui ? Quels enjeux et
problématiques pose-t-il ? À qui s’adresse-t-il ? Qui l’utilise ? Qui le
maîtrise ? Quels sont ses faiblesses ? Quelles sont ses forces ?
‣ Les collections en ligne : quels musées ont mis en ligne leurs collections ?
Pourquoi ? Quels étaient leurs objectifs ? Comment ? Par quels moyens
matériels / humains / financiers ? À quoi ressemblent leurs interfaces ? Ont-
elles du succès ?
Analyse de la demande : Qui et quoi ?
‣ Trouver les collections en ligne : est-ce un besoin ou une envie ? Quels
sont les besoins actuels en terme de numérisation et diffusion des
collections en ligne ? Qui en a besoin ? Pourquoi ? Qui en a envie ?
Pourquoi ? Que demandent les internautes ? Que critiquent-ils ? Que ne
veulent-ils pas ?
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
154
517 Annexes, Fig.56, p.55.
Élaboration de la stratégie de diffusion numérique des collections
Après avoir élaboré son diagnostic stratégique à l’aide du modèle SWOT, il
faudra aborder les questions du pourquoi de l’élaboration d’une telle stratégie
(objectifs, principes et politiques), du quoi (atouts et contenus, ciblage,
positionnement, promotion) et enfin du comment mettre en œuvre un tel projet
(moyens humains, financiers, etc).
Pourquoi ?‣ Objectifs
Ne pas oublier de se fixer des objectifs est crucial. Ceux-ci doivent être réalisables et
spécifiques. Des mesures devraient être mises en œuvre pour qu’un nombre précis
d’objectifs soit atteint dans un temps imparti. Il est donc conseillé de rester attentif à la
faisabilité de ces derniers.
‣ Principes et politiqueQuels principes veut-on défendre ? Quelles conditions de diffusion de nos collections
souhaite-t-on établir ? Il est préférable d’établir une liste courte, concise et claire des
valeurs que l’on veut défendre en mettant une collection en ligne. Cette liste de
principes doit être scindée en rubriques, en fonction des différentes catégories dans
lesquelles entrent ces valeurs. Par exemple, quelle est la politique concernant la
diffusion des messages sur les médias sociaux ? Quelle est celle qui concerne l’Open
Data ?
Quoi ?‣ Atouts et contenus
Le principal atout de l’institution est sa collection. Il semble nécessaire de se poser les
questions relatives aux éléments clés de cette collection. Si l’on devait faire une
sélection des objets que l’on voudrait exposer en ligne, lesquels seraient-ce ? Quels
sont les contenus disponibles (métadonnées et œuvres numérisées) ? Sont-ils prêts à
être mis en ligne ? Si non, que faut-il mettre en place pour permettre leur mise en
ligne ?
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
155
‣ Ciblage
Quels publics veut-on cibler ? Quels publics souhaite-t-on cibler aujourd’hui comme
dans un futur proche ou lointain ? Comment voulons-nous les aborder ? Avec quels
outils ? Qu’allons-nous leur proposer et en fonction de quoi ? Comment segmenter
notre offre ? En fonction de leur âge, sexe, situation géographique, classe sociale ?
‣ PositionnementQuelle place souhaitons-nous occuper ? Comment voulons-nous être perçus ? Quel
message voulons-nous faire passer ? Que ce soit au sein de notre communauté
professionnelle ou au sein de notre public.
‣ Promotion en ligne et hors ligne
Quelles vont être nos stratégies de communication et de promotion de notre projet ?
Comment allez-nous en parler ? Par quels biais ? Les médias numériques sont
nombreux : blogs, réseaux sociaux, newsletter, etc...
Comment ? Mise en œuvre du projet
‣ Constitution de l’équipe Composition : Il est souhaitable que l’équipe compte au minimum 5 à 10
membres maximum. Chacun devrait avoir une compétence qui lui est propre, plus l’on
varie les compétences plus le rendement sera productif. Un conservateur, un
médiateur, un chargé d’exposition, un comptable, etc, et, bien sûr, un chef de projet. Il
serait avisé d’avoir dans l’équipe un membre du conseil d’administration. Il est
souhaitable de varier les postes (mêler chefs de services et employés), les âges, et
bien sûr, de varier les sexes. Il serait également préférable que le musée se dote de
son propre service numérique (Community Manager, Webmaster…)
Planning et organisation : Il est nécessaire de définir un temps et de mettre en
place un rétro-planning. Il faudrait se fixer des rendez-vous à intervalles régulières, une
fois par semaine ou une fois par mois, en fonction du temps que l’on peut accorder au
projet.
Budget : Après avoir analysé les ressources et les besoins de l’institution, il
s’agit de définir le budget nécessaire et la méthode de financement. Les institutions
auront tout intérêt à se tourner vers le crowdfunding.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
156
‣ Conception
Résumé analytique : une fois que les forces et les faiblesses, les opportunités
et les menaces, ont été évaluées, il faudra certainement rédiger un résumé de cette
analyse.
Résumé du projet : les contenus, les objectifs, le publics visés, les directives
techniques. Que la structure fasse appel à une entreprise privée ou qu’elle ait sa
propre équipe, faire un résumé du projet aidera à le clarifier.
Présentation du projet : au conseil administratif ou à la société prestataire.
Suivi du projet : il est important de suivre chaque étape de la création du projet
et de son lancement en collaboration avec l’équipe technique. Il serait souhaitable de
prévoir des réunions régulières.
Lancement : Il est conseillé de mettre en place une campagne de
communication à l’avance.
‣ Éléments clés d’une interface numérique de présentation des
collections Présentation de la collection : une présentation détaillée serait préférable, une
démarche clairement expliquée ainsi que la perception de cette collection par
l’institution elle-même également.
Sélection d’images «stars» de la collection : toutes les images des
collections ne pourront être mises en ligne, il faudrait alors choisir une sélection d’une
centaine d’œuvres phares qui auront droit à un traitement de faveur (haute résolution,
zoom, etc).
Métadonnées et informations complémentaires : leur présentation et leur
conservation devraient être soignées.
Collections organisées : une collection en ligne ordonnée sera mieux
appréciée du public, il est donc conseillé de soigner son classement et son
organisation sur le site.
Interactivité et participation de l’utilisateur : les visiteurs apprécieront
nettement plus leur expérience si elle se déroule sur une interface interactive et si des
possibilités de participation et de partage leur sont données. Il s’agira de possibilités
telles que se créer un compte, sa propre galerie, de pouvoir partager, s’amuser,
contribuer, etc.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
157
«Design Thinking»: des domaines comme le visual merchandising étudient
l’importance des couleurs et des symboles pour améliorer l’expérience de l’utilisateur.
Nous pourrions nous inspirer de ce type d’études, basées sur une façon de penser liée
au design, afin de créer des interfaces au design soigné.
Outils de recherche simples : Ies outils de recherche devraient être simples
d’utilisation. Il faut donner les clés de la collection au grand public non connaisseur.
Ouverture : Le Web d’aujourd’hui se caractérise par les notions d’ouverture et
de partage, les institutions auront tout intérêt à prendre en compte ces notions.
Et après ?
➡ Analyser ses résultats
Outils d’analyses et résultat : Il sera souhaitable de mettre en place un document
d’analyse, sur des logiciels de tabulation (Excel, Numbers ou les logiciels libres de
Google). Des outils d’analyses et de statistiques Web comme Google Analytics,
permettent aux institutions de gérer l’impact de leur projet.
➡ Se tenir informéL’actualité de l’environnement numérique est un domaine qui est en constante
évolution et il serait préjudiciable d’être mis à l’écart. Pour prévenir cela il est essentiel
de toujours se tenir informé. Un bon moyen de se tenir au courant est de mettre en
place une alerte Google en ciblant des termes clés. Elle permet de maintenir une veille
sur l’information qui circule. Les médias sociaux comme les blogs ou Twitter
représentent des sources d’informations très riches.
➡ Réadapter sa stratégieUne stratégie numérique de mise en ligne des collections doit être revisitée et
repensée chaque année. C’est un travail qui est certes fastidieux, mais encore une
fois, l’environnement numérique et ses problématiques sont en constante évolution. De
fait, une stratégie numérique, l’est aussi.
➡ Innover Les américains diraient «Think outside the box!». Cette expression, le plus souvent
entendue dans le milieu du consulting et du marketing, invite à penser différemment,
au-delà des conventions et des perspectives traditionnelles. Il s’agira de réfléchir
autrement, de faire appel à un esprit créatif et d’être audacieux. Les projets les plus
novateurs sont des projets audacieux.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
158
Conclusion
Le défi du numérique pour le secteur culturel est considérable, pas uniquement
en terme de participation et d’adaptation, mais aussi parce qu’il nécessite de revisiter
les notions d’authenticité, de responsabilité et de préservation, qui sont au cœur des
institutions518.
Les musées conservent en leur murs le patrimoine de l’humanité, les témoins de
notre histoire et ont pour mission de préserver, présenter, transmettre et diffuser ce
patrimoine. Dans le cadre de leur mission de diffusion, la diffusion numérique de leurs
collections sur une interface virtuelle n’est plus une option mais une nécessité.
La question du musée virtuel n’est pas récente. En 1951, André Malraux
théorisait le musée imaginaire en tant que musée qui se construit dans notre esprit,
indépendant de toute réalité spatio-temporelle, à laquelle le musée dans son
acceptation architecturale est subordonné. «Là où l’œuvre d’art n’a plus d’autres
fonctions que d’être œuvre d’art, à une époque où l’exploration artistique du monde se
poursuit, la réunion de tant de chefs d’œuvre, mais d’où tant de chefs d’œuvres sont
absents, convoque dans l’esprit tous les chefs d’œuvre. Comment ce possible mutilé
n’appellerait pas tout le possible ?»519 Il voyait en la photographie le moyen d’avoir à
notre disposition les œuvres de toutes les civilisations et de les confronter, les
comparer, les entrecroiser, finalement les virtualiser. L’arrivée des reproductions
photographiques au musée a soulevé des questions d’authenticité et de virtualité, de
relation entre l’œuvre originale et la copie. Débat que décrit Walter Benjamin dans son
essai écrit en 1935. Il disait de la reproduction qu’elle rendait possible la rencontre
entre l’œuvre originale et le récepteur, sous forme d’une photographie ou d’un disque.
Néanmoins, les techniques de reproduction provoquaient selon lui la perte de l’aura de
l’œuvre.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
159
518 KNELL S. J., «Museums in the technological landscape», in R. PARRY, p.437-438.519 MALRAUX A., Le Musée Imaginaire, 1951.
À l’instar de la photographie et des techniques de reproduction de masse du
XIXe s., la numérisation associée à Internet constituent un nouvel outil de virtualisation
des collections des musées.
Ceux-ci ont saisi l’importance de se construire une présence sur le Web et de
diffuser numériquement leurs collections. Néanmoins, nous avons pu constater
qu’Internet est un réseau en constante évolution qui demande maintenant à être
réévalué.
L’une des spécificités du Web aujourd’hui est qu’il est devenu un espace de
collaboration, de co-création, de contribution et de partage. Nina Simon, auteure de
The Participatory Museum, rêve d’un lieu participatif :
«Je rêve d'une future institution similaire {«similaire à celles qui utilisent
l’engagement interactif comme un véhicule fondamental pour promouvoir
l’apprentissage du visiteur, sa délectation et son exploration»} qui soit
entièrement participative, une qui utilise engagement participatif comme
véhicule de l'expérience des visiteurs. Imaginez un endroit où les visiteurs et le
personnel du musée partagent leurs centres d’intérêts et leurs savoirs-faire
respectifs. Un endroit où les initiatives de chacun sont mises en relation avec
celles des autres, dans un ensemble cumulatif et mouvant afin de le présenter,
de le partager et de le remixer. Un endroit où les gens discutent des objets
présentés avec des amis et des inconnus, en partageant leurs histoires
diverses et variées ainsi que leurs interprétations. Un endroit où les gens sont
invités continuellement à contribuer, à collaborer, à créer ensemble et à
sélectionner des expériences et du contenu au sein d’un environnement
intentionnel. Un endroit où les communautés et les membres du personnel
peuvent mesurer l'impact ensemble. Un lieu qui s'améliore au fur et à mesure
que les gens l'utilisent.»520
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
160
520 «I dream of a comparable* future institution that is wholly participatory, one that uses participatory engagement as the vehicle for visitor experiences. Imagine a place where visitors and staff members share their personal interests and skills with each other. A place where each person’s actions are networked with those of others into cumulative and shifting content for display, sharing, and remix. A place where people discuss the objects on display with friends and strangers, sharing diverse stories and interpretations. A place where people are invited on an ongoing basis to contribute, to collaborate, to co-create, and to co-opt the experiences and content in a designed, intentional environment.» communities and staff members measure impact together. A place that gets better the more people use it.» (*«Comparable to the ones that use interactive engagement as the fundamental vehicle to promote visitor learning, recreation, and exploration.» SIMON Nina, The Participatory Museum, «What’s Next? Imagining the Participatory Museum», <http://www.participatorymuseum.org/imagining/> (consulté le 30 août 2013).
Le Web participatif offre aux musées une véritable opportunité de générer un
dialogue avec leurs publics. Dans l’ensemble, l’usage et l’appropriation des médias
sociaux numériques par les institutions culturelles françaises montrent qu’elles en ont
saisi l’importance. Cependant, le Web participatif ne se résume pas à créer sa page
Facebook et son compte Twitter. Le véritable objectif est d’établir un dialogue avec son
public, de lui permettre ainsi de s’approprier le musée et éventuellement les œuvres
qu’ils conservent.
Au sein de ce Web social, l’utilisateur, autrefois uniquement récepteur, est aussi
devenu émetteur. Il maîtrise les technologies du Web et les utilise au quotidien. En
outre, vivant au cœur d’une société de l’image, il demande désormais un accès libre et
illimité aux reproductions numériques de son patrimoine culturel : il est devenu
collectionneur d’images. Il souhaite pouvoir, non seulement les partager, mais aussi les
réutiliser. Les collections muséales sont chargées de cette «aura» qui en fait des
trésors inestimables. Il n’est donc pas étonnant que l’utilisateur veuille se les
approprier.
Ainsi, les institutions se retrouvent face à la problématique d’ouverture des
données de leurs collections. Nous avons étudié les questions de licences ouvertes et
de domaine public, et nous en avons conclu que tout tend vers une ouverture. Les
redevances et les restrictions apposées aux images d’oeuvres relevant du domaine
public par les institutions culturelles sont déplorées par la commission européenne. Le
temps de la restriction est en passe de disparaître, les musées et les institutions
culturelles doivent prendre en compte les nouveaux défis posés par l’environnement
numérique actuel et repenser leur conception de la diffusion numérique des collections.
D’un point de vue technique, le Net est un espace en constante évolution. Le
langage Web et de Web design notamment connaissent des développements que les
institutions culturelles seraient avisées de prendre en compte. L’environnement
numérique et l’usage que l’on en fait aujourd’hui est aussi mobile. Par conséquent, les
sites Web doivent être adaptés pour tous les supports.
Nous savons que les technologies numériques et les musées ne sont pas
étrangers l’un à l’autre. En effet, nous avons pu constater que les bases de collections
muséales apparaissent tôt sur le Web. Des initiatives gouvernementales comme les
bases Joconde, Culture.fr ou encore Europeana, illustrent une volonté institutionnelle
de diffusion des collections. Les musées eux-mêmes ont, eux aussi assez tôt, mis en
ligne leurs bases de données. Ainsi, ils rendaient leurs collections accessibles au plus
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
161
grand nombre. En dépit de cet effort d’accessibilité, les premières bibliothèques
numériques sont conçues sous un langage Web désormais obsolète.
Le passage au numérique n’est évidemment pas aisé pour les musées.
L’espace virtuel induit une dématérialisation de la culture, qui, pour les non-habitués
aux technologies numériques peut dérouter. La réflexion sur le musée virtuel apparaît
dans les années 2000, en lien avec la numérisation du patrimoine culturel. La mise en
ligne des collections inquiète principalement du fait de sa dématérialisation. En effet, le
passage au virtuel fait craindre à certains une perte de l’aura de l’oeuvre et de sa
signification. La virtualisation des collections n’est qu’un moyen de diffuser les oeuvres
au plus grand nombre, mais elle ne représente pas un facteur de désacralisation de
l’oeuvre. Présenter ses collections en ligne est un facteur de facilitation de l’expérience
muséale pour les visiteurs ne pouvant se déplacer pour des raisons diverses. Cela ne
remplace en aucun cas la visite du musée réel. Par ailleurs, la visualisation d’une
oeuvre à travers un écran est ludique mais elle ne peut pas être comparée à l’émotion
ressentie face à l’oeuvre originelle.
La diffusion numérique des collections demeure néanmoins une composante
essentielle de la pratique du musée et doit être intégrée en tant que mission de
l’institution.
Les offres numériques innovantes en matière de visibilité du patrimoine culturel
sur le Web, initiées par les institutions mères ou les gouvernements, existent. Elles
représentent néanmoins des initiatives isolées. Le patrimoine architectural est mis en
ligne depuis déjà plusieurs années en version virtuelle. Que ce soit une visite à 360°,
une visite se basant sur la technique de la photogramétrie ou une reconstitution 3D, le
panorama des visites virtuelles de monument est assez large. En ce qui concerne les
beaux-arts, l’exemple le plus éloquent est la visite virtuelle de la Chapelle Sixtine. Le
visiteur en ligne peut zoomer sur des détails qu’il ne pourrait pas remarquer lors d’une
visite physique. Cet exemple illustre parfaitement l’intérêt de la virtualisation du
patrimoine culturel pour l’apprentissage du visiteur en tant que processus ludique et
agréable. Il est désormais possible de profiter de ces chefs d’œuvre sans avoir à
affronter la foule. Cela représente également un moyen d’abolir les frontières et les
distances, géographiques comme sociales. Tout le monde n’a pas la possibilité de
voyager comme il pourrait, avoir accès au patrimoine en ligne permet à ces personnes-
là de pouvoir tout de même en profiter. Les musées peuvent s’inspirer d’exemples tirés
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
162
du patrimoine architectural ou archéologique, pour lesquels l’utilisation des
technologies de numérisation et de reconstitution 3D sont assez répandues.
Espace propice à l’innovation, de nombreuses entreprises spécialisées
émergent sur le Web. Qu’elles soient spécialisées en consulting, en conception d’outils
numériques, en confection d’applications mobiles ou de sites Web, ces entreprises
sont porteuses d’idées novatrices et peuvent servir de référence aux musées. Le
Google Cultural Institute, bien que détracté par beaucoup de professionnels de
musées, demeure une entreprise dynamique et innovante. Son Art Project reste un
exemple significatif d’opération de diffusion du patrimoine culturel. Néanmoins, une
entreprise aussi vaste que Google inquiète. Selon Milad Doueihi, qui reprend la formule
de Michel Rocard, «nous ne devons pas laisser à Google le monopole de la
numérisation de notre mémoire et de notre histoire. Il est important aussi de garder à
l’esprit toutes les questions d’interopérabilité ou les problèmes liés à l’Internet et aux
libertés que peut faire peser Google s’il est seul à gérer la numérisation»521 Il ne s’agit
pas de laisser le monopole de la diffusion numérique du patrimoine à Google mais de
lui tendre la main et de tirer profit de son importance sur le réseau. Il existe sans aucun
doute une relation de bénéfice mutuel entre ceux qui souhaitent développer de
nouvelles solutions technologiques et les institutions garantes du contenu qui
souhaitent interagir avec de nouveaux publics522. La coopération entre les institutions
culturelles et les entreprises du Web, y compris Google, est un point essentiel de la
mise en oeuvre d’une stratégie numérique.
Afin de mettre en oeuvre une stratégie numérique de diffusion des collections, il
serait souhaitable que les musées commencent par former leur personnel et leur public
au numérique. Nous avons évoqué dans notre dernière partie les communautés, les
conférences annuelles ainsi que les laboratoires d’expérimentations, comme autant de
lieux d’innovations pouvant faire office de référence. Enfin, nous avons vu que des
solutions participatives en ce qui concerne les problématiques de financement
émergent sur le Net.
Dans l’ensemble, les institutions culturelles ont saisi l’importance de mettre en
place une présence sur la Toile qui soit dynamique. Néanmoins, les initiatives de
diffusion numérique des collections demeurent des initiatives isolées, quelque fois sous
forme d’un travail collaboratif, mais souvent manquant de cohérence au sein de
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
163
521 DOUEIHI M., La grande conversion numérique, Paris, Seuil, 2009, p.226.522 KNELL Simon J., «Museums in the technological landscape», in R. Parry, 2010, p.441.
l’institution. Ainsi, il serait souhaitable de revoir la stratégie numérique de l’institution
pour y intégrer les nouvelles problématiques du Web, instaurer une cohérence, et
mettre en avant la diffusion des collections, véritable atout stratégique.
Il s’agit donc de construire ensemble : chercheurs, historiens, scientifiques,
conservateurs, publics, étudiants, techniciens, ingénieurs, designers, créateurs,
philosophes ; le musée du futur.
En février dernier, Joël de Rosnay concluait les rencontres du Club Culture &
Innovation(s) sur sa vision du musée du futur523. Il racontait l’histoire d’une famille, en
2028, se déplaçant à la Cité des Sens, ancienne Cité des Sciences, pour visiter le
cybermusée. Des écrans holographiques en 3D, en passant par la voiture autoguidée
et les «MHBG», «mutants hybrides bio numériques géolocalisés», jusqu’aux «IGM»,
«Interfaces Gestuelles Mettables», de Minority Report, Joël de Rosnay imaginait alors
la version future du musée.
Loin de ces considérations divinatoires, quoique divertissantes, les musées
doivent anticiper leur avenir. Celui de notre société est placé sous le signe du digital,
celui des musées l’est également. Il incombe aux musées de s’emparer du numérique
et de l’enrichir de leur savoir-faire. Il n’est pas question de subir le numérique, ni de le
surmonter ou le combattre, le numérique n’est pas un adversaire, ni un concurrent, il
est en définitive un allié. Il est donc question de lui tendre la main et de puiser dans les
possibilités et les ressources qu’il a à offrir pour construire le musée de demain.
Viole&e Vauchelle -‐ Les musées à l’ère du numérique -‐ Mémoire de recherche -‐ École du Louvre -‐ 2013
164
523 DE ROSNAY Joël, «Une cyber-visite dans le musée du futur», Intervention lors des Rencontres Nationales Culture & Innovation(s), 13 février 2013, <http://www.carrefour-du-futur.com/articles/unecyber-visite-dans-le-mus%C3%A9e-du-futur/>. Voir la vidéo accompagnant la restranscription de son intervention.
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Sites Web
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http://openglam.org/france/
http://paper.li/museummedia
http://responsivemuseum.com/fr/index.html
http://smithsonian-webstrategy.wikispaces.com/
http://web.iri.centrepompidou.fr/
http://www.archimuse.com/
http://www.c2rmf.fr/
http://www.club-innovation-culture.fr/
http://www.communicatingthemuseum.com/
http://www.culturemobile.net/
http://www.google.com/culturalinstitute/project/art-project?hl=fr
http://www.google.com/intl/fr/culturalinstitute/worldwonders/
http://www.histoire-image.org/
http://www.museum-analytics.org/
http://www.museumnext.org/
http://www.museumsandtheweb.com/
http://www.muzeonum.org/wiki/doku.php
http://www.ocim.fr/
http://www.panoramadelart.com/
http://www.pratiquesculturelles.culture.gouv.fr/
http://www.w3.org
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Blogs
http://ctmuseum11.tumblr.com/
http://gonzagauthier.wordpress.com/
http://leden.wordpress.com/
http://museumnerd.wordpress.com/
http://museumtwo.blogspot.fr/
http://nod-a.com/
http://omer.mobi/notes/
http://www.buzzeum.com/#blog
http://www.culture-communication.fr/
http://www.knowtex.com/blog/tag/musee/
http://www.mixeum.net/
http://www.museologique.fr/
http://www.museonet2.com/
http://www.museumstrategyblog.com/museum_strategies/
http://www.sebastienmagro.fr/#a51/wordpress
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186
LexiqueACP : Autorité de Contrôle Prudentiel <http://www.acpr.banque-france.fr/
accueil.html>
ADSL : «Asymmetric Digital Subscriber Line» : technique de communication de
données numériques utilisant les lignes téléphoniques et étant plus performante que
la connexion par modem. L’ADSL a révolutionné l’accès au haut débit mais
présentent aujourd’hui certains inconvénients, comme la lenteur de la bande
passante, qui devraient être améliorés avec l’installation de la fibre optique.
AMF : Autorité des Marchés Financiers <http://www.amf-france.org/>
API : Une «Application Programming Interface» est une interface de programmation
qui rassemble des protocoles, des structures de données, disponibles pour les
programmes informatiques. Les API ouvertes permettent de réutiliser des structures
déjà développées, c’est une façon novatrice de travailler sur Internet.
ARPANet : acronyme anglais de «Advanced Research Projects Agency Network»,
est le premier réseau à transfert de paquets développé aux États-Unis par la
DARPA, le projet fut lancé en 1967 et la première démonstration officielle date
d'octobre 1972. Il est le prédécesseur de l'Internet.
Avatar : un avatar est la représentation virtuelle de l’internaute, c’est son profil en
ligne. Un avatar peut être un personnage dans un univers virtuel ou dans un jeu
vidéo, ou simplement l’image illustrant le profil sur un blog.
BandCamp : réseau social à destination des artistes musiciens afin de promouvoir
leur musique. (Voir BandCamp)
Blog : le blog est un type de site Web sur lequel un internaute tient une chronique
personnelle ou consacrée à un sujet particulier.
Blogosphère : on parle aujourd’hui de la blogosphère pour désigner l’ensemble
des blogs de la planète.
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Browser : un browser ou navigateur Web est une application logicielle permettant
d’accéder aux pages Web. Les navigateurs les plus utilisés sont Chrome de
Google, Mozilla de la Fondation Firefox, Safari d’Apple et Internet Explorer de
Microsoft.
Cloud computing : décentralisation des fichiers des utilisateurs en les plaçant dans
le «nuage», c’est-à-dire sur des serveurs très puissants entreposés dans des
complexes cachés, afin de rendre ces dernières accessibles via n’importe quel
appareil connectable.
Creative Commons : licences crées par le juriste Lawrence Lessig. Il existe 6 types
de licences creative commons, permettant à l’auteur de choisir le degré de liberté
qu’il souhaite accorder à son œuvre
Cross-media ou «multitasking» : se dit des comportements caractéristiques des
«digital natives». C’est le fait d’utiliser plusieurs supports en simultané : surfer sur le
Web tout en écoutant de la musique, en regardant la télévision du coin de l’oeil, en
communiquant avec son smartphone ou encore en utilisant sa tablette.
Crowdsourcing : Les opérations de crowdsourcing se caractérise par la
coopération de plusieurs personnes mettant en commun leur savoir-faire et leur
intelligence collective.
CSS : «Cascading Style Sheets» est un langage Web utilisé pour structurer
l’agencement visuel d’une page Web. Il sert à décrire la présentation des
documents HTML et XML.
DailyMotion : de création française, DailyMotion est un site d’hébergement et de
partage de vidéos, créé en 2005.
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Digital natives : terme anglo-saxon consacré désignant les jeunes de la génération
Y, nés entre 1980 et 2000, soulignant leur aisance d’utilisation des technologies
actuelles, la navigation Internet particulièrement, puisqu’ils sont «nés avec». Le
terme de “génération Y” serait issu de la forme de y que prennent les écouteurs
reliés à leur lecteurs mp3, ou encore à la prononciation anglaise du “Why?”. Cette
génération, suivant chronologiquement et alphabétiquement la génération X, est
décrite comme moins idéaliste et ayant un bon esprit de synthèse, mais aussi
comme immature et ne pouvant exécuter une tâche avant qu’on ne lui en ait
expliqué la raison.
Espace Virtuel : ce sont des environnements créés artificiellement par un logiciel
informatique. L’imagination d’un espace virtuel n’a pas de limites : il peut refléter la
vie réelle ou créer un tout nouveau monde. Les Espaces Virtuels peuvent être
utilisés comme jeu vidéo mais aussi comme un outil de communication
complémentaire afin de présenter par exemple son entreprise de manière ludique et
innovante.
Flickr : réseau de partage de photos en ligne créé en 2004 et racheté par Yahoo!
en 2005. En 2011, le site revendiquait l’hébergement de plus de 6 milliards de
photos.
Flux RSS («Real Simple Syndication») : le flux RSS est un mécanisme qui permet à
l’internaute de s’abonner aux contenus d’un site ou d’un blog.
Génération X : la Génération X désigne, selon la classification de William Strauss
et Neil Howe, la génération sociologique des Occidentaux nés entre 1960 et 1979.
Cette génération est intercalée entre celle des baby-boomers et la génération Y.
Génération Y : Cf. “Digital Natives”
Hackathon : évènement réunissant des développeurs sur plusieurs jours
consécutifs dans le but de faire de la programmation informatique collaborative.
HTML : «Hypertext Markup Language» est un langage permettant, comme son nom
l’indique, d’écrire de l’hypertexte. Il est conçu pour structurer les pages Web
sémantiquement.
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Instagram : Instagram a été cofondé par Kevin Systrom et Mike Krieger. L’idée est
de capturer des moments de vie avec l’appareil photo de son smartphone (photos
ou vidéos) et de les partager avec ses amis. L’application est gratuite et disponible
sur l’Appstore et Google Play. Le nom Instagram est une combinaison des termes
«instantanné» et «télégramme», qui, pour les co-fondateurs, était représentatifs des
clichés qu’ils s’amusaient à prendre étant enfant. Les photos sont partagées par
défaut en mode public, mais il est possible de ne les partager qu’en mode privé. À
ce moment-là seuls les utilisateurs abonnés à votre compte pourront les voir. L’une
des valeurs ajoutées d’Instagram est sa fonction de filtres que l’usager peut utiliser
pour retoucher sa photo. Et comme beaucoup de réseaux sociaux, les usagers ont
la possibilité de commenter les posts.
Internaute : utilisateur d’Internet
Internet : (abréviation de INTERnational NETwork, réseau international) Réseau
télématique international, qui résulte de l'interconnexion des ordinateurs du monde
entier utilisant un protocole commun d'échanges de données (baptisé IP pour
Internet Protocol et spécifié par l'Internet Society, ou ISOC) afin de dialoguer entre
eux via les lignes de télécommunication (lignes téléphoniques, liaisons numériques,
câble)
Interopérabilité : capacité d’un produit, d’un logiciel ou d’un système de pouvoir
communiquer et fonctionner avec d’autres.
IRL «In Real Life» : littéralement «dans la vraie vie», cette expression est
employée sur Internet pour faire référence à la vie hors-ligne, dans le monde réel.
Une rencontre IRL fait référence au fait de rencontrer quelqu’un initialement
rencontré sur Internet dans la vraie vie.
iTunes : Magasin de musique en ligne développé par la société Apple compatibles
sur ordinateur et supports mobiles.
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Média : procédé permettant la distribution, la diffusion ou la communication
d'œuvres, de documents, ou de messages sonores ou audiovisuels (presse,
cinéma, affiche, radiodiffusion, télédiffusion, vidéographie, télédistribution,
télématique, télécommunication). [On trouve aussi médium ou medium au singulier,
et media, nom masculin invariable.]
METS (Metadata Encoding and Transmission Standard) : Le METS est un standard
définissant un format d'empaquetage, c'est-à-dire un format permettant d'organiser
un ensemble d'informations liées de manière explicite. Ce standard définit un
schéma XML qui est utilisé dans des systèmes d'archivage électronique pour
donner une forme aux paquets d'informations, en particulier pour l'AIP (le paquet
qui est conservé au sein du système). Le schéma permet d'encapsuler et de placer
dans des catégories distinctes des métadonnées d'usage divers telles que des
métadonnées EAD, Dublin-core ou encore PREMIS.
Moteur de recherche : application Web permettant de retrouver des ressources
associées à des mots clés.
Multitasking : voir cross-media
MySpace : Fondé en 2003, le réseau social MySpace est essentiellement fréquenté
par les musiciens, leur permettant de se créer un profil en ligne où ils peuvent
partager leur musique. Le réseau est aujourd’hui dépassé, et est lentement
remplacé par le réseau BandCamp.
Navigateur Web : voir browser
Net : voir Internet
Open Data : l’Open Data fait référence à l’ouverture des données. Une donnée est
considérée comme ouverte si n’importe qui est libre d’y accéder intégralement et
gratuitement, sous un format ouvert, de la réutiliser et de la redistribuer librement.
Open source : s'applique aux logiciels dont la licence respecte des critères
précisément établis par l'Open Source Initiative, c'est-à-dire la possibilité de libre
redistribution, d'accès au code source et aux travaux dérivés.
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Peer to Peer (P2P) : technologie permettant l’échange direct de données entre
ordinateurs reliés à Internet, sans passer par un serveur central. (On dit aussi poste
à poste ou pair à pair)
Pictify : Pictify est une plateforme de bookmarking visuel réservé aux
photographies et images artistiques. Les utilisateurs ont la possibilité de partager
leurs oeuvres préférées, de voir les œuvres préférées d'autres gens, créer des
albums d’images, d’ajouter des commentaires et de construire leur propre collection
de tableaux, sculptures, photographies, dessins ou tout autre moyen d'expression
artistique.
Pinterest : Pinterest est un réseau social de partage de photos créé en 2010 par
Paul Sciarra, Evan Sharp et Ben Silbermann. Les utilisateurs peuvent créer leurs
“tableaux” en fonction de ses centres d’intérêts, “épingler” des photographies
d’autres utilisateurs qui les interpellent, etc. Le nom est issu de la combinaison entre
le verbe “pin” qui signifie épingler, et “interest”, “intérêt”
Plug-in : paquet complétant un logiciel hôte pour lui apporter de nouvelles
fonctionnalités.
PREMIS (PREservation Metadata Implementation Strategies) : Le PREMIS est un
standard pour l'expression des métadonnées de préservation. Ce modèle concerne
autant ceux qui conservent que ceux qui transmettent de l'information à conserver. Il
définit principalement un dictionnaire de données utile pour décrire les
métadonnées de préservation. Il est possible d'être conforme à PREMIS si on
utilise le vocabulaire pour exprimer les métadonnées même si on n'utilise pas le
schéma XML qui en est proposé. Il est possible d'utiliser PREMIS dans le cadre de
METS ce que font déjà quelques éditeurs de systèmes d'archivage électronique.
Tout comme le METS, ce standard est hébergé et maintenu par la Bibliothèque
du Congrès.
Réseau : ensemble d'ordinateurs ou de terminaux interconnectés par des
télécommunications généralement permanentes.
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Responsive Web design : conception de la page Web comme une structure offrant
au visiteur une expérience de consultation optimale, facilitant la lecture et la
navigation. L’utilisateur peut notamment naviguer dans une page Web sans avoir à
zoomer et dézoomer sur les textes, ceux-ci sont adaptés à la taille du support et du
browser.
Second Life : d’origine américaine cet univers virtuel en 3D, qui n’est pas un jeu
vidéo, fut créé en 2003 par la firme Linden Lab. Les internautes, à travers leurs
avatars, vivent au sein de cet univers et ont la possibilité de voyager, d’utiliser une
monnaie, de communiquer entre eux, de construire des bâtiments, d’acheter des
terrains, de monter des expositions, etc.
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