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Principes, respect et gestion
Yves Chaîné, avocatMartine Musau, avocate
Les droits acquis
w Principes à la base du développement duconcept des droits acquis
w (1) Principes de droit public:w - Non-rétroactivité des lois w - Non-atteinte aux situations constituées
(consacré également par l’article 12 de la Loid’interprétation, RLRQ, c. I-16)
Développement du concept des droits acquis
w (2) Contrepoids au pouvoir discrétionnairedes municipalités relatif à l’aménagement duterritoire : « compromis nécessairerestreignant d’une part l’aménagementrationnel du territoire, mais protégeantd’autre part l’équité quant aux propriétairesd’immeuble »
Développement du concept des droits acquis
w Loi sur l’aménagement et l’urbanisme : loi habilitante permettant aux municipalités de règlementer les droits acquis
w - Adoption: 1979 w Pas de définition claire des conditions de
naissance ou d’existence des droits acquis, mais 2 séries de critères souvent repris par la jurisprudence
Transition vers les droits acquis reconnus par le législateur
w A: Situation juridique du justiciable w (1) La situation juridique est individualisée et
concrète, et non générale et abstraite, et w (2) La situation juridique était constituée au
moment de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi
Transition vers les droits acquis reconnus par le législateur
w B: Critères spécifiques aux situations de droits acquis à l’usage dans un contexte municipal élaborés par la jurisprudence (Huot c. Municipalité de l’Ange-Gardien, 1992 CanLII 3267 (QC C.A.))
Transition vers les droits acquis reconnus par le législateur
w a) Les droits acquis n’existent que lorsque l’usage dérogatoire antérieur à l’entrée en vigueur des dispositions prohibant un tel usage était légal.
w b) L’usage existait en réalité puisque la seule intention du propriétaire ou de l’usager ne suffit pas.
Transition vers les droits acquis reconnus par le législateur
w c) Le même usage existe toujours ayant été continué sans interruption significative.
w d) Les droits acquis avantagent l’immeuble qui en tire profit. De tels droits ne sont pas personnels, mais cessibles, suivant l’immeuble dont ils sont l’accessoire.
Transition vers les droits acquis reconnus par le législateur
w e) Ils ne peuvent être modifiés quant à leur nature et parfois quant à leur étendue bien que les activités dérogatoires peuvent être intensifiées en certains cas.
w f) La seule qualité de propriétaire ne suffit pas quant aux droits acquis.
Transition vers les droits acquis reconnus par le législateur
w Application des principes de droits acquis, peu importe l’adoption de règlementation municipale à cet effet
w Distinction entre usage et construction dérogatoire
w - Distinction codifiée entre autres à l’article 113 LAU
Transition vers les droits acquis reconnus par le législateur
w Démonstration de l’existence d’un droit acquis
w Le fardeau revient à celui qui l’invoque w Une fois cette démonstration effectuée �
renversement du fardeau (il appartiendra à celui qui prétend que le droit acquis s’est perdu de démontrer cette perte)
Transition vers les droits acquis reconnus par le législateur
w La LAU divise en quatre grandes catégories les situations donnant ouverture à la perte de droits acquis à un usage ou une construction dérogatoire, soit :
w 1- L’abandon, la cessation ou l’interruption d’un usage dérogatoire (art. 113, al. 2 (18o) a) LAU);
La perte de droits acquis
w 2- Le remplacement d’un usage ou d’une construction dérogatoire (art. 113, al. 2 (18o) b) LAU);
w 3- L’extension ou modification d’un usage ou d’une construction dérogatoire (art. 113, al. 2 (18o) c) LAU);
w 4- La perte de la moitié de la valeur d’une construction dérogatoire (art. 118, al. 2 (3o) LAU).
La perte de droits acquis
w 113. Le conseil d’une municipalité peut adopter un règlement de zonage pour l’ensemble ou partie de son territoire.
w Ce règlement peut contenir des dispositions portant sur un ou plusieurs des objets suivants:
ABANDON, CESSATION OU INTERRUPTION D’UN
USAGE DÉROGATOIRE
w 18° régir, par zone ou pour l’ensemble du territoire, les constructions et les usages dérogatoires protégés par les droits acquis:
w a) en exigeant que cesse un usage dérogatoire protégé par droits acquis si cet usage a été abandonné, a cessé ou a été interrompu pour une période de temps qu’il définit et qui doit être raisonnable compte tenu de la nature de l’usage mais qui dans aucun cas ne doit être inférieure à six mois;
ABANDON, CESSATION OU INTERRUPTION D’UN
USAGE DÉROGATOIRE
w Caractère distinct des termes : w Cessation et abandon permanence w Interruption temporaire w Recherche de l’intention du bénéficiaire d’un
droit acquis:
ABANDON, CESSATION OU INTERRUPTION D’UN
USAGE DÉROGATOIRE
w Saint-Laurent (Ville) c. 2426-4640 Québec inc., 1999 CanLII 13887 (QC C.A.) et Ste-Anne-de-Bellevue (Ville) c. Papachronis, [2000] RJQ 1977 (C.A.)
w - Des gestes concrets doivent démontrer l’intention
w - Il doit exister une expectative réaliste et légitime à poursuivre l’usage dans un délai raisonnable
Distinction entre l’abandon, la cessation et
l’interruption
w Interaction entre les principes d’abandon, de cessation et d’interruption (art. 113, al. 2 (18o) a)) et le remplacement d’un usage dérogatoire (art. 113, al. 2 (18o) c))
Le remplacement d’un usage dérogatoire par un usage
conforme à la réglementation
w Ville de Montréal c. Bijouterie Lucien Gervais Inc., J.E. 80-522 (QC C.A.)
w Décision phare quant à l’étendue d’un changement d’usage
w Interprétation restrictive de la notion de changement d’usage
Le remplacement d’un usage dérogatoire par un usage
conforme à la réglementation
w Immeubles Desaubec (2002), s.e.n.c. c. Granby (Ville de), 2014 QCCA 1768
w Perte immédiate d’un droit acquis lors du remplacement d’un usage protégé par droit acquis par un usage conforme à la réglementation
Le remplacement d’un usage dérogatoire par un usage
conforme à la réglementation
w Confusion quant à la question de l’intention du bénéficiaire d’un droit acquis
w - Bousquet c. Montréal (Ville de), 2015 QCCS 170w - La simple intention ne suffit pas : le
bénéficiaire d’un droit acquis doit démontrer un haut degré de diligence et poser des gestes d’une envergure suffisante pour démontrer une intention concrète
w - Interprétation restrictive des principes de droits acquis
Intention et gestes positif et concret manifestant cette
intention
w Pour conserver des droits acquis, une activité doit continuer d’être exercée dans une ampleur suffisante:
w - Ste-Julie (Ville de) c. 9090-5647 Québec inc., 2016 QCCA 737: activité minime ou marginale
w - Ste-Anne-des-Plaines (Ville de) c. Lacombe, 2014 QCCS 5010: l’activité doit continuer d’être exercée de manière plus ou moins constante dans son intensité, tout en permettant que se produise une réduction normale de l’intensité de l’activité
La réduction de l’intensité des activités
w La jurisprudence récente semble flexible quant à l’envergure de la réduction des activités bénéficiant de droits acquis qui demeurent légitimes:
w - À moins que l’usage ne devienne marginal ou que la diminution de celui-ci ne dénature l’usage dérogatoire, les tribunaux auront tendance à préférer préserver les droits acquis.
La réduction de l’intensité des activités
w Aucune déférence à accorder à la décision d’un fonctionnaire municipal en matière de droit acquis
w - Shiller c. Bousquet, 2017 QCCA 276
w Dans certaines circonstances, une municipalité peut être liée par une affirmation relative aux droits acquis
w - Mansonville Rifle Association inc. c. Potton(Municipalité du Canton de), 2016 QCCS 33
Reconnaissance d’un droit acquis
w Un usage dérogatoire est lié à l’immeuble qui en bénéficie et non à son propriétaire
w Un usage dérogatoire bénéficiant d’un droit acquis ne peut pas être déménagé
w 9128-1683 Québec inc. c. Procureure générale du Québec, 2017 QCCA 1942
Déménagement d’un usage
w Construction et usage dérogatoire sont traités de manière distincte par la législation et la jurisprudence
w Certaines constructions et usages dérogatoires sont toutefois interreliés
w - Mateo c. Montréal (Ville de), (arrondissement d’Outremont), 2015 QCCS 2419
Interrelation entre construction et usage
w 113. Le conseil d’une municipalité peut adopter un règlement de zonage pour l’ensemble ou partie de son territoire.
w Ce règlement peut contenir des dispositions portant sur un ou plusieurs des objets suivants:
w 18° régir, par zone ou pour l’ensemble du territoire, les constructions et les usages dérogatoires protégés par les droits acquis:
REMPLACEMENT OU MODIFICATION D’UN USAGE OU
D’UNE CONSTRUCTION DÉROGATOIRE
w b) en stipulant qu’un usage ou construction dérogatoire protégé par droits acquis ne peut être remplacé par un autre usage ou construction dérogatoire;
w c) en interdisant l’extension ou la modification d’un usage ou une construction dérogatoire protégé par droits acquis ou en établissant les conditions en vertu desquelles un usage ou une construction dérogatoire protégé par droits acquis peut être étendu ou modifié;
REMPLACEMENT OU MODIFICATION D’UN USAGE OU
D’UNE CONSTRUCTION DÉROGATOIRE
w Règle générale le droit acquis à un usage dérogatoire est limité à la poursuite de ce même usage
w Ajout ou modification d’une activité w Saint-Romuald (Ville) c. Olivier, 2001 CSC 57 w - Fin de l’approche catégorielle w - Méthode d’analyse subjective en 2 points: w (1) degré de proximité entre la nature de l’usage
préexistant et la nouvelle activité w (2) les nouveaux effets ou l’aggravation des effets sur
le voisinage
Le remplacement ou la modification d’un usage
dérogatoire
w Flexibilité dans la définition de l’usage permettant une évolution naturelle
w - Activités qui constituent le prolongement normal et logique d’un usage dérogatoire
Le remplacement ou la modification d’un usage
dérogatoire
w Intensification d’un usage w - En théorie, un usage ne peut pas être limité
quantitativement ou dans son intensité w Toutefois, il y a perte des droits acquis si l’intensification est à
ce point importante qu’il faut constater une modification de l’usage
w Pépin c. Brissette, 2008 QCCA 829w - Limite physique à l’extension d’un usage
Le remplacement ou la modification d’un usage
dérogatoire
w Règle générale perte des droits acquis à une construction dérogatoire si celle-ci est remplacée par une nouvelle construction
w Problématique rénovation d’un bâtiment dérogatoire w - Test à appliquer : déterminer s’il s’agit ou non d’une
nouvelle entitéw - Application relativement stricte de ce test:w - Francheville (MRC) c. Sauvé, [1991] R.J.Q. 2889 (C.S.): w - Rénovation remise à neuf (refonte, un rajeunissement,
un changement en mieux) w - Impossible de remettre à neuf quelque chose qui n’existe
plus
Le remplacement ou la modification d’une construction
dérogatoire
w - Municipalité d’Hébertville-Station c. St-Germain, 2017 QCCS 3700, Morris c. Municipalité de Saint-Damien, 2018 QCCS 441:
w - La conservation de certains éléments structuraux ne suffit généralement pas pour se conformer à la notion de rénovation
Le remplacement ou la modification d’une construction
dérogatoire
w 118. Le conseil d’une municipalité peut adopter un règlement de construction pour l’ensemble ou une partie de son territoire.
w Ce règlement de construction peut contenir des dispositions sur un ou plusieurs des objets suivants:
w […]w 3° ordonner que la reconstruction ou la réfection de tout
bâtiment détruit ou devenu dangereux ou ayant perdu au moins la moitié de sa valeur par suite d’un incendie ou de quelque autre cause soit effectuée en conformité avec les règlements en vigueur au moment de cette reconstruction ou réfection.
PERTE DE LA MOITIÉ DE LA VALEUR D’UNE
CONSTRUCTION DÉROGATOIRE
w Méthode d’évaluation de la valeur des bâtimentsw Valeur portée au rôle d’évaluation avant 1993 w Valeur réelle après 1993w Suppression de la mention « portée au rôle d’évaluation » dans la loiw Pas d’indication sur la méthode à utiliserw Valeur de l’ensemble des bâtiments d’une unité d’évaluation ou
valeur d’une construction particulière?w Valeur de l’ensemble des bâtiments implantés sur le lot St-Joachim
(Corp. municipale de) c. Racine, 1991 CanLII 3091 (QC C.A.) w Modification législative en 1993 un indice qu’une construction faisant
partie d’un ensemble de bâtiment d’une même unité d’évaluation peut constituer, à elle seule, la base sur laquelle la valeur doit être calculée?
Les éléments factuels à analyser pour déterminer s’il y
a perte de 50% de la valeur du bâtiment
w Ville de Vaudreuil-Dorion c. 9160-4850 Québec inc., 2018 QCCA 1107 (demande d’autorisation d’appel déposée à la Cour suprême)
w L’obligation de reconstruire « en conformité avec les règlements en vigueur au moment de cette reconstruction ou réfection » emporte-t-elle l’obligation de respecter les règlements de construction et de zonage en vigueur?
Étendue de la réglementation municipale applicable
w Décision w - Il n’y a pas de raison d’interpréter restrictivement la
réglementation municipale en excluant les normes relatives à l’usage
w Dissidencew - Lorsqu’un règlement est ambigu, il doit s’interpréter de
manière à préserver les droits acquis
Étendue de la réglementation municipale applicable
w Article 412 para 29 de la Loi sur les cités et villes (maintenant abrogé)
w - Pratiquement identique à l’article 118, al. 2 (3o) LAU
w Structure de la LAUw - Choix du législateur de placer cet article dans la section
« règlement de construction » w - Ce choix pourrait restreindre la portée aux seuls
règlements de construction (excluant les règlements de zonage et de lotissement)
Étendue de la réglementation municipale applicable
w Perte de plus 50% et plus de la valeur d’un bâtiment
w Interrelation entre la destruction d’une construction dérogatoire dans l’objectif de le remplacer par une nouvelle construction (113, al. 2 (18o) b) LAU) et la perte de 50% de la valeur d’un immeuble (118, al. 2 (3o) LAU)
Relation entre la destruction d’un bâtiment et la perte
de valeur de 50%
w Recours pris en vertu de l’article 227 LAU: pouvoir discrétionnaire attribué aux tribunaux
w 1) Arrêt phare Montréal (Ville) c. Chapdelaine, [2003] RJQ 1417 (C.A.)
w 2) « Cette discrétion est très limitée et ne doit s’exercer que dans des circonstances exceptionnelles » (Cloutier c. St-Sauveur (Ville de), 2011 QCCA 780)
DISCRÉTION JUDICIAIRE
w 3) Trois catégories de critères permettant d’user de la discrétion nécessaire pour permettre la continuité d’un usage dérogatoire qui ne serait pas, en théorie, correctement formé ou qui aurait été perdu :
w les agissements de la municipalité w les agissements de la personne en contravention w les effets du maintien de la situation dérogatoire
DISCRÉTION JUDICIAIRE
Principes, respect et gestion
Yves Chaîné, avocatMartine Musau, avocate
Les droits acquis