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1838-1903. Histoire dePhilippeville . Louis
Bertrand,...
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Bertrand, Louis (1866-19..). 1838-1903. Histoire de Philippeville . Louis Bertrand,.... 1903.
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1838-1903
Louis BERTRANDCONSERVATEUR DU MUSÉE
RECEVEUR MUNICIPAL, OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
PHILIPPEVILLE
IMPRIMERIE ADMINISTRATIVE ET COMMERCIALE MODERNE
18, Rue Théophile Réguis, 18
1903
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Tous droits réservés
1838-1903
Louis BERTRANDCONSERVATEUR DU MUSÉE
RECEVEUR MUNICIPAL, OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
PHILIPPEVILLE
IMPRIMERIE ADMINISTRATIVE ET COMMERCIALE MODERNE
18, Rue Théophile Réguis, 18
1903
MJ LECTEUR
Dans ce recueil de longues et patientes recherches, nous avons
voulu continuer et compléter les Histoires de Philippeville,d'Emmanuel-Vincent FENECH et de Charles FÉRAUD. Les docu-ments que nous mettons sous les yeux de nos concitoyens ontété recueillis par nous un peu partout, mais ils sont authentiqueset puisés à des sources certaines.
Ils permettront au lecteur de faire lui-même la comparaisonentre les jours heureux de notre cité et sa décadence actuelle.
Nous nous abstenons de toutes réflexions dans le cours de cet
ouvrage ; la brutalité des faits les fera tout naturellement affluer
au cerveau de tous ceux qui le liront avec attention.
Nous remercions M. Henri FEUILLE, qui a bien voulu mettreà notre disposition non seulement la collection entière du jour-nal le Zéramna, mais encore celles du Courrier de Philippevilleet du Saf-Saf, qui ont paru : le premier dès 1845 et l'autre en
1849.
Nous devons aussi notre reconnaissance à M. le Dr René
Ricoux, maire, qui nous a autorisé à compulser les archives
municipales, ainsi qu'à toutes les personnes qui ont répondu si
obligeamment à nos questionnaires.
Louis BERTRAND.
I
ORIGINES DE PHILIPPEVILLE
« Située au fond du Sinus Numidicus des Romains, plus spécia-lement appelé par Ptolémée : Sinus Olkachites et par nos géographes :
Golfe de Stora, Asthoret (Stora), le Mers Estera d'Edrisi, l'Istourad'El-Bekri, dont l'origine est tout au moins contemporaine des Phé-
niciens qui, avant le peuple-roi, y avaient établi des comptoirs,servait de port à Rusicade (Philippeville).
« Ces deux colonies romaines étaient tellement voisines et si entiè-
rement reliées entre elles par une série ininterrompue de villas et de
tombeaux qu'elles ne formaient réellement qu'une seule ville, fré-
quentée plus tard par les navigateurs Génois pour leurs échangesavec l'intérieur des terres africaines.
« De même, de nos temps, Stora a été, du 9 avril 1838 au 15 dé-
cembre 1870, époque où il fut érigé en commune, un village annexe
de Philippeville; il en resta même le port officiellement reconnu
jusqu'en 1872.
« A Stora, non plus qu'à Philippeville, on ne retrouve aucun
monument ni aucune trace de l'occupation arabe, qui pourtant a duré
plusieurs siècles.
« Les deux communes (Stora et Philippeville) sont séparées parl'Oued El-Kantara (la rivière du pont), qui, avant de se jeter dans
la mer, passe sous un ancien pont d'origine romaine, restauré par les
Français, à environ 180 mètres au Sud de l'endroit dit, d'après la
tradition arabe, la Baie des Pirates et où l'on voit encore quelques
importantes ruines.
« Rien n'empêche de supposer que la limite était déjà la même
pendant l'occupation romaine, car la nature impose cette limite,l'Oued El-Kantara étant le seul cours d'eau important entre Stora et
Philippeville (Asthoret et Rusicade).
2 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
« Sans entrer dans de trop profondes considérations historiques
pour rappeler les origines romaines des deux cités qui nous occupent,disons que les auteurs spéciaux (Salluste et Pline) s'accordent pour
assigner l'année 45 avant J.-C. à la fondation de Rusicade, laquellesuivit de très près l'établissement du port, abri ou refuge d'Asthoret.
On admet généralement que Rusicade n'existait plus en l'an 484 de
J.-C; elle a donc duré environ 450 ans.
« Rappelons aussi que le nom de la ville romaine était bien Rusi-
cade et non Rusicada, Russicada ou Russicade, comme on l'a sou-
vent écrit. Cela résulte, en effet, de l'inscription Genio Coloniae
Veneriae Rusicadis, actuellement déposée au musée du Louvre, et
d'une borne milliaire du musée de Philippeville, indiquant que,sous le règne de l'empereur Hadrien, la voie nouvelle A Cirta Ru-
sicadem fut réparée aux frais des habitants de Cirta (Constantine).« Ainsi que nous l'avons dit plus haut et en raison des trouvailles
faites à Stora et du commerce important de ce port avec l'intérieur
de la Numidie, Rusicade fut vraisemblablement bâtie sur l'empla-cement d'une ville phénicienne, Rousicada (cap du phare ou du
fanal). Les Romains lui conservèrent ce nom (Rusicade) et lui don-
nèrent, sous Commode, le titre de ColoniaVeneria (an 186 de J.-C).« Les Arabes appellent notre ville Skikda et le cap, situé entre
la ville actuelle et le Saf-Saf, Ras-Skikda. C'est à peu près, comme
consonnance, le Rousicada phénicien. (Jules Chabassière et Louis
Bertrand. Rusicade d'après ses ruines). »
« Après la prise de Constantine, la nécessité de mettre cette villeen communication avec la mer par la voie la plus courte se fit immé-
diatement sentir.« L'occupation d'un point rapproché, sur le littoral, avait donc
été résolue. Plusieurs reconnaissances avaient déjà été faites depuis1830 le long de la côte, mais très incomplètes, parce qu'on ne pou-vait l'observer qu'à distance ; néanmoins les marins ayant examiné
successivement le golfe de Stora et le port de Collo, signalaientcelui-ci comme offrant plus de sûreté et d'un mérite nautique plusréel. Diverses causes déterminèrent cependant à donner la préférenceà Stora.
« Une colonne mobile sous les ordres du général Négrier, forte de
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 3
1.200 hommes d'infanterie, de 250 chasseurs ou spahis et de 300
cavaliers de goum, partit le 7 avril 1838 de Constantine pour Stora.
Elle bivouaqua le soir aux Eulmas, le second jour à El-Arrouch, et
le troisième jour, le 9 avril, elle arrivait sur les ruines de Rusicade.
Le lendemain, après avoir exécuté des reconnaissances topographi-
ques et géodésiques sur Stora, on leva le camp à deux heures de
l'après-midi et on reprit la route de Constantine, où la colonne ren-
tra le 11.
« En octobre 1838, le Gouverneur Général Valée vint prendrelui-même le commandement des troupes pour les conduire vers Stora,où cinq mois auparavant le général Négrier avait accompli sa pre-mière reconnaissance. Le 7, le corps expéditionnaire, composé du 62e
de Ligne, d'un bataillon du 12e de Ligne, du 3e bataillon d'Afrique et
d'un détachement du 3e Chasseurs d'Afrique, en tout 4.000 hommes,vit s'ouvrir devant lui le vaste horizon de la Méditerranée et salua
le golfe de Numidie.
« Une tribu, dont le nom a été donné par quelques géographes à
une source qui descend sur la plage, les Beni-Melek, avait abrité
ses misérables gourbis dans le ravin où fut Rusicade. Les hommes
de cette tribu se présentèrent au camp et se contentèrent de deman-
der une indemnité pour l'abandon de leurs gourbis et de leurs jar-dins. Le maréchal donna l'ordre de leur payer les 150 francs aux-
quels ils bornaient leurs prétentions. Ils se retirèrent ravis de cette
justice débonnaire et s'applaudissant d'avoir vendu ce qu'ils ne pou-vaient empêcher de prendre.
« Le Moniteur du 17 novembre 1838 annonçait que le roi a décidé,sur la proposition du Ministre de la Guerre, que la ville qui s'élève
sous le Fort-de-France, rade de Stora, portera le nom de Philippevilleet que le mouillage situé à l'Ouest de la rade conservera le nom de
Port de Stora. (L.-Charles Féraud. Histoire des villes de la pro-vince de Constantine. Philippeville). »
Ainsi fut faite pacifiquement la conquête de notre cité.
II
ARMES DE LA VILLE
Le savant archéologue Stéphane Gsell dit dans son ouvrage inti-tulé Musée de Philippeville :
« Une petite stèle en grès, dont il ne reste que la partie supérieure,remonte peut-être à l'époque où Rusicade était un comptoir punique.Le sommet pointu constitue une sorte de fronton qui est séparé du
reste de la pierre par un bandeau saillant et qui est orné d'un crois-sant aux cornes montantes, surmonté d'un disque. Sous ce fronton
sont placés, à côté l'un de l'autre, un caducée et la figure symboliquede la divinité (cône tronqué, flanqué à sa partie supérieure de deux
branches recourbées en dehors et sommé d'un croissant retourné).« D'un autre côté, un petit bas-relief, sculpté sur une plaque de
marbre, offre l'image d'une femme vêtue à la grecque. Debout, elle
tient de sa main droite abaissée un caducée, de sa main gauche unecorne d'abondance et une longue hampe dont la partie supérieuresemble se terminer par un morceau d'étoffe quadrangulaire; ce seraitdonc une enseigne (vexillum). La couronne tourelée qui entoure la têtemontre que cette figure représente soit la Fortune protectrice d'unecité ou sa Tutela, soit la personnification même de cette ville ».
Si le comptoir phénicien de Rousicada et la colonie romaine deRusicade avaient gravé leur personnification l'un sur le grès, l'autresur le marbre, Philippeville ne pouvait moins faire que d'avoir sesarmoiries.
M. Jauffret, greffier en chef du Tribunal civil, présenta au Conseil
municipal, le 15 avril 1858, un projet d'écusson armoriai pour laville de Philippeville ; pris en considération dans la séance extraor-dinaire du 21 avril 1858, il fut définitivement adopté par délibéra-tion du 5 février 1859.
6 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Ce blason se décrit ainsi, en langage héraldique : « d'azur à une
clef d'argent en pal, surmontée d'une cigale d'or et accostée de deux
autres de même ».
« Philippeville ayant été édifiée sur les ruines romaines de l'an-
tique Rusicade (le pays des cigales, comme les archéologues la dési-
gnaient alors), le champ ou écu est en partie occupé par trois de ces
insectes, afin de révéler l'origine de notre cité.a Tous les faits, auxquels se rattachent naturellement l'existence
et l'avenir de Philippeville, sont sommairement figurés sur le blason.Dans le langage héraldique, la couronne murale dont il est surmonté
marque la dignité, l'autorité, la prépondérance; elle est aussi un
ornement que l'on regarde comme le symbole de la Victoire.« La croix, image de la civilisation chrétienne, domine l'orgueil-
leux croissant qui est isolé dans la partie inférieure de l'armoriai pourdonner, aux yeux de tous, une preuve vivante de notre puissance en
Algérie.« La clef d'argent fixée au coeur du tableau se lie essentiellement
à l'allégorie des cigales. Elle veut dire que, d'après la tradition et parsa position topographique, notre ville moderne est, comme l'était
jadis l'antique cité, la clef nécessaire et obligée de la province.« La couleur sympathique, adoptée pour les armes de Philippe-
ville, est l'azur ou bleu. Ce symbole du ciel d'Afrique forme, parconséquent, le fond de l'écu où se trouvent distribuées, suivant les
principes, la clef d'argent et les cigales d'or.« Cette couleur, qui est aussi celle de la France, détermine le titre
du blason et signale son existence, dans la gravure, par des raies
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 7
horizontales répétées d'une manière uniforme et peu sensible dans
toute l'étendue du champ.« Ainsi établies, ces armoiries constituent, dans leur ensemble,
un blason historique traduisant une vérité dont la clef consacre le
principe et les cigales donnent la physionomie d'armes parlantes
qu'elles empruntent, à juste titre, aux annales célèbres de l'anti-
quité.« Enfin une devise sur un ruban vert-espérance, festonné, flot-
tant à l'entour de la couronne, est inscrite en lettres d'or : Laborem
honoremque fati nostri pignora habemus. Le travail et l'honneur
sont les gages de notre avenir.
« Cette devise est tirée de Quinte-Curce (Rufus).« L'armoriai est orné à sa base par les attributs qui lui sont pro-
pres : une branche de laurier, signe de victoire, et une branche de
myrte fleuri, en souvenir des traditions antiques portant : « Rusi-
cade, fille de Vénus, déesse de la beauté, couronnée de myrte et de
roses ». Une inscription, aujourd'hui au Musée du Louvre, indique
que la cité de Rusicade était placée sous l'égide de Vénus : Genio
Coloniae Veneriae Rusicadis. Au Génie de la Colonie de Rusicade,consacrée à Vénus.
« Les couleurs des ornements sont :
« Couronne : couleur terne, analogue à la pierre de taille ;« Ecusson : acajou donnant sur le rouge ;« Croix et croissant : argent, en relief ;« Myrte et laurier : au naturel.
« Dans sa séance du 21 avril 1858, où le Conseil prit en considé-
ration le projet de M. Jauffret, étaient présents :
« MM. Wallet, maire; Delay, De Nobelly, Alby, adjoints; Gré-
milly, adjoint pour Stora; Chirac, Allaman, Primard, De Marqué,Cullerre, conseillers.
« Absents : MM. Arnold, adjoint ; Fabre, Nielli, Grech, conseil-
lers.
« Dans celle du 5 février 1859, où le projet fut définitivement
adopté, étaient présents :
« MM. Vallet, maire; Delay, De Nobelly, adjoints; De Marqué,Primard, Cullerre, Fabre, Grech, conseillers.
8 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
«Absents: MM. Chirac, Nielli, en voyage, Grémilly, Arnold,Allaman.
« Le Conseil vota à l'unanimité des remerciements à M. Jauffret
pour le zèle et le dévouement qu'il avait apportés dans la rédaction
d'un travail aussi consciencieux. »
Ces renseignements sont extraits de l' Histoire de Philippeville, de
E.-V. Fenech (imprimerie Chevalier et Luth) et d'une petite brochure
que M. Jauffret fit paraître en 1859 ; éditeur : C. De Franceschi.
III
POPULATION, ETAT-CIVIL
Année 1841. Par suite de la distribution des terres autour de
Philippeville, les cultures commencent à naître, débutant par le
jardinage le plus ordinaire, comme il était naturel de s'y attendre.
Déjà, cependant, le marché aux légumes, qui suffit aux besoins de la
population civile, est approvisionné par les maraîchers du Saf-Saf.
Cette situation ne fait que s'améliorer.
Année 1842. Philippeville, dont les commencements, qui re-
montent à la fin de l'année 1839, ne consistèrent qu'en quelques
baraques de cantiniers, est aujourd'hui (1842) une ville couverte de
belles constructions et la plus européenne des villes de toute l'Al-
gérie, puisque sur 3.565 habitants il n'y existe que 300 indigènesmusulmans ou juifs. Jusqu'à présent cette population, dont on ne
saurait trop reconnaître l'énergie et l'activité, a concentré ses efforts
dans des constructions et l'établissement d'une zone de jardins autour
de la ville.
Année 1844. Un arrêté du 26 août crée trois villages dénommés :
l'un Damrémont, sur la rive gauche du Saf-Saf ; l'autre Valée, sur
la rive droite de cette rivière ; le troisième Saint-Antoine, dans la
vallée du Zéramna. Les circonscriptions de ces villages sont :
Pour Damrémont 450 hectares.
Pour Valée 550 —
Pour Saint-Antoine 600 —
y compris les terres de la ferme Brincard et du hameau qui sera créé
ultérieurement près du blockaus.
Les arrêtés déterminant la distribution, les alignements et les ni-
vellements de la ville et de la banlieue sont du :
3
10 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
14 décembre 1848, pour la ville.
24 décembre 1852, pour Valée.
8 mai 1854, pour Damrémont.
2 juin 1854, pour Saint-Antoine.
Un arrêté du 12 mars 1844 autorise toutes transactions relatives
aux biens immeubles situés dans Philippeville et sa banlieue.
Année 1846. La population au 31 décembre 1846 est de :
Français 2.520
Anglais 5
Anglo-Maltais 1.366
Espagnols . 226
Portugais 5
Italiens 676
Allemands 114
Polonais 13
Russes 3
Grec 1
Suisses 64
Belges ou Hollandais 10
TOTAL 5.003 habitants,
ainsi divisés :
Hommes 2.974
Femmes 978
Enfants 1.051
5.003
La moyenne des décès, y compris la banlieue, est de 5.53 %.La création de la banlieue ne date que du 19 novembre 1844. et
c'est par arrêté du 26 août précédent qu'ont été fondés les trois villa-
ges de Valée, Saint-Antoine et Damrémont. La situation des créditsn'a pas permis de commencer les travaux avant l'exercice 1845 et s'ilsne sont pas entièrement terminés dans les deux derniers centres,c'est par suite encore de l'insuffisance des ressources budgétaires.
Quoi qu'il en soit, la colonisation s'est franchement assise sur l'es-
pace qui lui a été livré en arrière de la ville ; mais, avant d'aller
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 11
plus loin, il convient de s'arrêter un moment à Philippeville pourconstater les progrès inattendus de son développement.
Fondée depuis huit ans à peine, elle compte déjà près de 6.000
habitants, sur lesquels 700 musulmans et 200 juifs. Le commerce de
transit avec Constantine, dont elle est l'entrepôt pour les marchan-
dises venant de France, est d'une grande importance. Le revenu des
Douanes, qui s'est élevé à 400.000 francs en 1844, monte à près de
500.000 francs en 1846. Une douane, un caravansérail, un phare, des
conduites d'eau, la reconstitution des anciennes citernes de Rusicade,une église, tels sont les établissements dont l'année 1846 aura doté
notre ville.
C'est là beaucoup sans doute, mais c'est encore trop peu pour les
besoins. Tous les services publics sont établis dans des maisons
louées par l'administration et dont la location grève sans profit le
budget de 50.000 francs par an. Il est nécessaire de les installer suc-
cessivement, d'une manière définitive et convenable, car les locaux
de tous sont insuffisants ou défectueux. Il faut construire un hôpitalcivil, un hôtel pour la Sous-Direction de l'Intérieur, un hôtel pourla Mairie, une maison pour la Police, un Tribunal, une maison d'ar-
rêt, un presbytère, des écoles, un corps de garde pour la milice,un dispensaire, deux casernes de gendarmerie (l'une en ville, l'autre
à Stora), un dépôt pour les ouvriers, un oratoire protestant et enfin
des maisons pour le bureau arabe, le Service des Domaines, celui des
Contributions diverses et celui de la Trésorerie et des Ports.
Le village Valée, situé à six kilomètres, est un des centres de colo-
nisation créé par l'Etat qui offre les plus heureux résultats. Le terri-
toire a été concédé à 49 familles, toutes françaises ; tous les lots sont
bâtis et les constructions sont estimées à 144.000 francs. La popula-tion, qui s'est accrue de 20 individus en 1846, est maintenant de 163
habitants, qui fournissent 60 miliciens. Les cultures ont été portéesde 122 à 226 hectares, champs labourés et prairies nettoyées. Dans
les jardins, des puits destinés à l'irrigation des cultures maraîchèresont été creusés; 14.000 arbres ont été plantés. Les troupeaux sont
évalués à plus de 18.000 francs. Enfin les récoltes faites pendantl'année représentent une valeur de 30.352 fr. ; moyenne par famille :
1.027 francs. Une route a été ouverte de ce village à Philippeville,mais elle n'a pu encore être empierrée que sur une partie de sa lon-
gueur.
Saint-Antoine, situé à 7 kilomètres, est beaucoup moins avancé que
12 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Valée et dans une situation moins saine. Sa population est néanmoins
de 112 habitants, dont 53 chefs de famille, y compris 4 individus
formant le noyau d'un petit hameau prévu dans le projet de création
de Saint-Antoine et placé près du blockaus, à l'entrée de la montagne,sur la route (quartier Brincard). Sur les 42 lots à bâtir dont se
compose Saint-Antoine, 12 constructions sont achevées et 14 en
cours d'exécution. Dans le hameau, qui comprend huit lots, deux sont
bâtis. La valeur totale de ces constructions est de 44.500 francs ; 137
hectares sont en rapport. Tout le territoire de Saint-Antoine, émi-
nemment propre à la culture du foin, et sur lequel des essais de trèfle
et de luzerne ont bien réussi, offre aux colons cet avantage qu'ils
peuvent fournir des bestiaux à la boucherie à l'époque où les arabes,
qui n'emmagasinent point de fourrages, ne peuvent plus en livrer.
Les plantations de mûriers et la culture du tabac leur ont déjà fourni
de beaux produits et la route de Constantine leur amènera chaquejour des éléments de prospérité.
Damrémont, primitivement alloti par le Domaine qui y faisait desconcessions à titre onéreux, vient, par prescription du Ministre de
la Guerre, d'être remis à la Direction de l'Intérieur et de la Coloni-
sation. Tous les acquéreurs ont été mis en demeure de bâtir et decultiver dans un bref délai, sous peine d'éviction. L'enceinte du vil-
lage est terminée, mais la situation des crédits n'a pas permis d'ache-ver les travaux de nivellement et d'alignement des rues. Un puitspublic est en construction ; le voisinage du Saf-Saf peut dispenserprovisoirement de lavoir et d'abreuvoir. Les constructions élevées
par les colons représentent une valeur de 74.000 francs; 102 hectaressont en culture.
Un fait remarquable qui se manifeste dans la banlieue de Philip-peville, c'est la plus-value toujours acquise par les exploitationsparticulières aussitôt que l'administration fonde auprès d'elles un
village. Depuis longtemps des concessions avaient été faites dans un
large rayon autour de la ville, mais, en général, les concessionnairesse bornaient à la récolte des foins. A peine Saint-Antoine a-t-il étécréé que des bâtisses, des plantations et des cultures ont animé lesbords des routes. On y compte 12 maisons de campagne ou d'exploi-tation, parmi lesquelles une véritablement importante et qui ne vaut
pas moins de 80 à 100.000 francs, terres et bâtisses.Autour et en arrière de Valée, l'existence du village a déterminé
la fondation de 4 fermes déjà considérables.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 13
Enfin la banlieue de Philippeville compte maintenant 111 exploi-tations particulières, évaluées à 439.000 francs et sur lesquelles exis-
tent 9.000 mûriers et 8.500 oliviers greffés. Le temps est venu de
reculer les limites du territoire affecté à la colonisation civile et de
lui livrer en majeure partie la riche vallée du Saf-Saf jusqu'à El-
Arrouch, en ayant soin de ménager les intérêts indigènes assis dans
cette contrée.
La tribu arabe des Beni-Mehenna, qui en occupe les 40.000 hec-
tares, ne se compose que de 369 tentes et de 556 gourbis et ne compte
que 2.272 individus, ce qui donne pour chacun une moyenne de 17
hectares. En cantonnant cette tribu sur la rive droite de l'Oued,
qu'elle occupe plus particulièrement, l'élément européen trouverait
place sur l'autre rive. Le Ministre de la Guerre vient de décider que12.000 hectares à prendre dans cette vallée, entre Philippeville et
El-Arrouch, principalement sur la rive gauche, seront immédiate-
ment livrés à la colonisation.
En 1846 il a été complanté : à Valée, 2 hectares en vignes et 150
oliviers greffés, 300 mûriers et 200 autres arbres de rapport; à Saint-
Antoine, 800 oliviers greffés, 150 mûriers et 300 arbres de rapport ;rien à Damrémont. Le matériel agricole se compose dans les trois vil-
lages et la banlieue de : 77 charrettes, 11 chariots, 55 tombereaux,41 charrues.
Le village de l'Oued-Zerga (aujourd'hui Saint-Charles), en cours
de fondation en 1846, est situé à moitié chemin de Philippeville à
El-Arrouch, au lieu dit la Grand'Halte; un crédit ayant pu être
alloué pour cette création, un bataillon du 43e de Ligne a commencé
le fossé d'enceinte. 5 maisons et quelques baraques y existent déjà au
31 décembre 1846 et plusieurs colons se préparent à s'y établir d'une
façon permanente. Il en est, parmi eux, plusieurs qui possèdent des
ressources importantes. L'allotissement du terrain affecté à ce village,et qui comprendra 1.200 hectares, a été fait dans des conditions telles
que la petite et la grande propriété s'y prêteront mutuellement secours.
Nombre d'animaux possédés par les colons de Valée, de Saint-
Antoine et de Damrémont, ainsi que de la banlieue au 31 décem-
bre 1846 :
Taureaux 2
Boeufs....... 16
Vaches 19
Veaux 8
Béliers 7
Moutons 650
Brebis 505
Agneaux 110
Etalons 39
14 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Juments 15
Chevaux 22
Poulains 42
Pouliches. 18
Anes 55
Mulets 138
Porcs 970
Chèvres 254
Poulets 1.699
Dindons 8
Pigeons 122
Oies 54
Canards 142
Soit pour 78.068 fr. 50 d'animaux divers.
Au 31 décembre 1846, il reste au dépôt des ouvriers, rue des Co-
lons, fondé depuis quelques mois seulement, 207 colons. On voit, en
1847, qu'il est entré dans ce dépôt, 5.282 ouvriers, soit avec les 207
de 1846, 5.489; il en est sorti, en 1847, 5.480; il ne reste à placerau 31 décembre 1847 que 9 colons.
Les entrées se répartissent ainsi : 2/5e venus de France, 1/5e venus
des différents points de l'Algérie et d'Alger principalement, et 2/5ese composant des convalescents et des ouvriers sans ouvrage rentrant
peu de temps après leur sortie.
Les Français sont pour les 2/3 dans ce nombre. Dans l'autre tiers,les Allemands sont pour les 6/10e, les Suisses pour 2/10e, les Italiens
pour l/10e et les Prussiens, les Espagnols et les Belges pour l'au-
tre 1/10e.La répartition par sexe est : 7/10e hommes, l/10e femmes, 2/10e
enfants de tous âges.Les prix de la journée des maîtres et des ouvriers à Philippeville
sont, en 1846, les suivants :
Maîtres maçons 5 fr.» tailleurs de pierres 6 »
» menuisiers, charpentiers .. 8 »
» forgerons, charrons 8 »
» carriers 6 »
Ouvriers maçons 5 fr.
» tailleurs de pierres 6 »
» menuisiers, charpentiers 5 »
» scieurs de long 6 25» forgerons, charrons 5 »
» peintres, vitriers 6 »
» ajusteurs 6 »
» frappeurs 2 50» ferblantiers 4 »
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 15
Ouvriers serruriers 5 fr.» mineurs 7 »» paveurs 5 »» terrassiers 2 50» manoeuvres européens 3 »
» » indigènes 2 »
» boulangers de 1re classe 5 »» » 2e classe 4 »
La dépense par mois est, en 1846, dans notre ville, pour les ouvriers :
Ouvrier garçon : logement 13 fr.
nourriture 50 »
entretien 14 »77 fr.
Ménage de quatre personnes, le père, la mère et deux enfants en
bas âges : logement 18 fr.
nourriture 75 »
entretien 15 »108 fr.
Récoltes en 1846 :
Foin : 31.810 quintaux métriques, vendus 5 fr. 70 à l'administra-
tion militaire.
Paille : 185 quintaux métriques, vendus 4 fr. 43 à l'administration
militaire.
Bône et Philippeville sont les deux seules localités de la provincede Constantine où l'on ait récolté de la paille en 1846. Il existe dans
notre ville, en 1846, un moulin à vapeur à farine et, en projet, un
moulin à eau et un moulin à vent.
Notre pépinière est une des plus heureusement situées de l'Algérie;elle est complètement abritée de l'action des vents de l'Ouest par les
collines qui l'entourent. Son sol silico-argileux conserve longtempsl'humidité et convient à la généralité des arbres. Les châtaignierset les pins surtout y acquièrent une vigueur remarquable ; les arbres
forestiers y sont également fort beaux. Les nopals plantés en 1844
ont parfaitement réussi et pourront recevoir des mères-cochenilles
dans l'été prochain.Cette pépinière a une contenance de 11 hectares, 15 centiares.
Créée à la fin de 1843, elle possède déjà 213.000 arbres environ. Les
semis et boutures en ont produit, en outre, 68.000 en 1846. Les dé-
16 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
penses de toute nature, faites depuis sa création, s'élèvent à 59.000 fr.
Le prix de revient de chaque arbre obtenu est, en moyenne, de 23
centimes. Des bâtiments d'exploitation suffisants ont été construits ;
ils se composent d'une écurie, de hangars et d'une maison d'habi-
tation pour le directeur, et ils ont coûté 15.481 fr. 64.
Arbres plantés de 1843 à 1846 et existant dans la pépinière au 31
décembre 1846 :
Amandiers 6.093
Poiriers 2.758
Pruniers 4.670
Orangers 4.472
Pieds de vigne 1.304
Pommiers 7.970
Cognassiers 1.400
Abricotiers 2.080
Cerisiers 5.358
Mûriers blancs 61 277
Noyers 2.223
Multicaules 90
Châtaigniers 4.016
Thuyas 2 000
Cyprès. 800
Pins d'Alep 4.280
Saules. 4.797
Peupliers 14.000
Erables 2.030
Charmilles 100
Tilleuls 300
Chênes 1.650
Robiniers 10.223
Ormes..... 12.375
Micocouliers 750
Vernis du Japon 300
Bouleaux 1.550
Platanes 945
Féviers d'Amérique ... 5.332
Frênes 22.000
Mélia 15.000
Peupliers blancs 975
Peupliers de Virginie.. 6.000
Bella Sombra 200
Sterculiers 380
Acacias 1.300
Sophoras du Japon 340
Epines blanches ; 800
Au total 212.138 arbres, ainsi répartis
Arbres fruitiers 36.105» industriels 67 606
» verts ou résineux 7.080» forestiers. 98.327» d'agrément.... 3.020
Année 1847. L'administration s'occupe particulièrement de notreville. Le 20 décembre ont lieu les adjudications des travaux de six
égouts dans les rues Nemours, Marie-Amélie, Joinville, Damré-
mont, d'Orléans et Vaillant ; de trottoirs, de rigoles pavées et de
chaussées d'empierrement dans les rues des Numides, d'Orléans, des
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 17
Citernes, Galbois, et des places Constantine, Médéah, Jugurtha, Saint-
Augustin, Napoléon, du Cirque, du 62e de Ligne et du 3e Chasseurs
d'Afrique ; et enfin des travaux de construction de la route de Phi-
lippeville à Constantine par la vallée du Saf-Saf, sur une longueurde 7 kilomètres. L'appareil du phare et celui du feu de position deStora sont posés ; on répare le quai et on prépare encore l'adjudica-tion d'autres travaux non moins importants.
Année 1848. Recensement de la population :
Philippeville . 4.603 européens300 musulmans
80 juifs
TOTAL 4.983
Stora 245 européensValée 102 »
Saint-Antoine 90 »
Damrémont 46 »
Fermes et maisons isolées.... 212 D
Douars et villages 512 indigènes
TOTAL GÉNÉRAL 6.190
La moitié au moins des européens est de nationalité française.
Donnons maintenant la parole à M. L.-Charles Féraud, interprète
principal de l'armée, qui raconte ainsi les débuts de notre cité :
« Nous voici arrivés, en 1838, à l'époque où notre domination se
consolidant après divers faits d'armes, la colonisation européenne va
commencer à se développer autour de la nouvelle ville. Nous devons,avant d'aborder ce sujet, indiquer en quelques mots la configurationdu pays et faire connaître la population indigène qui l'habitait au
moment de la conquête; l'observateur pourra ainsi se rendre mieux
compte de la transformation qui s'est produite depuis.« La région que l'on a appelée d'abord le cercle de Philippeville
occupait le massif montagneux, dernière ramification des montagnesde la Kabylie orientale, qui vient aboutir à la plaine des Senhadja
18 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
et du lac Fezzara et dont les sommets s'élèvent de plus en plus vers
le Sud, jusqu'à ce qu'il atteigne les crêtes déterminées par le Segaou,le djebel Ouach au-dessus de Constantine et le djebel Taïa. Trois
vallées principales portent à là mer les eaux de ce massif. Ce sont :
l'oued Guebli, le Saf-Saf et l'oued Fendek. Les parties voisines de la
côte, vers les montagnes de TEdough ou vers celles de la Kabylieorientale, n'offrent, les vallées exceptées, que des dunes de sable ou
des crêtes couvertes de forêts. Les vallées importantes sont belles et
fertiles, les eaux y sont abondantes ; aussi y trouve-t-on de riches
vergers et de nombreuses plantations d'oliviers. D'après l'historien
Iben Khaldoun, toute la population berbère occupant les montagnesdu littoral depuis Bougie jusqu'à Bône appartenait à la grande familledes Ketama. Mais les indigènes habitant aujourd'hui cette contréesont un mélange d'Arabes et de Berbères dont il est impossible dedéterminer bien exactement l'origine, tant il s'est produit de boule-versements dans son sein depuis les temps les plus reculés.
« Lors de notre conquête, cette population se montrait, sur tousles points, divisée par tribus indépendantes entre elles. Chaque tribuelle-même se divisait en un nombre très varié de fractions chez les-
quelles il était difficile de dire exactement où se trouvait le pouvoirou l'influence qui régissait les intérêts généraux. Cela variait extrê-
mement, suivant les positions particulières des notables dans chaquefraction.
« Pour s'expliquer sur quelle base reposait ce pouvoir ou cetteinfluence et en quoi ils consistaient, il faut remarquer que la frac-tion se compose, en pays arabes, de tous les individus qui préten-dent descendre d'une même souche de famille. Or, chez les Kabylesde Collo et de Philippeville, chaque fraction est formée d'éléments
d'origines diverses. Chaque branche de famille se prétend égale auxautres et ne reconnaît pas une branche supérieure. Il n'y avait donc
pas de chef de tribu proprement dit. L'esprit d'indépendance, quiles séparait entre elles, agissait dans les subdivisions qui se formaientavec le temps et en produisait très fréquemment de nouvelles. C'estainsi que, lorsque le chef d'une nombreuse famille se trouvait endésaccord avec le chef de sa fraction, il s'en séparait avec tous lessiens et fondait une nouvelle fraction qui prenait son nom.
« Néanmoins, dans cet état d'indépendance entre elles, les diversesbranches d'une tribu se réunissaient avec un parfait accord, lorsquel'une d'elles était menacée par une autre tribu. Le même sentiment
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 19
les unissait dans ces circonstances, et, à plus forte raison, lorsquel'indépendance générale était menacée par des forces étrangères quienvahissaient le pays. Aussi, malgré la crainte qu'inspiraient les
Turcs, ils ne purent jamais gouverner la région montagneuse du
littoral, et toutes les fois qu'ils voulurent montrer des forces contrecette population, celle-ci leur opposa une vigoureuse résistance.
« Il n'y avait donc pas de pouvoir défini. On ne reconnaissait quele pouvoir de fait, qui appartenait naturellement à un chef de famille.
Lorsque le nombre des familles réunies sur le même point devenait
considérable, le pouvoir du cheik était extrêmement variable, sui-
vant sa force d'esprit et de corps. En général, le cheïk était toujourscontraint à consulter les notables et à suivre l'avis du plus grandnombre pour toute affaire importante. Il ne réglait guère de lui-
même que les discussions particulières peu graves. Au reste, il n'yavait aucun soin quelconque d'administration publique ; les affaires
générales reposaient toutes sur des querelles plus ou moins graves
qui compromettaient la tranquillité et obligeaient à prendre partid'un côté ou de l'autre. Rien dans les rapports de tribu à tribu et
dans le pouvoir des cheïks n'était réglé par des conventions ou des
lois écrites; toute règle à cet égard était dans la tradition et dans le
sentiment de chacun par l'usage. C'est assez dire que les kanouns ou
conventions écrites, comme il en existe chez les Kabyles du Jurjura,chez ceux du Babor, et même dans la vallée de l'Oued-el-Kebir,n'existaient point dans les tribus de Collo et de Philippeville.
« On doit pressentir le trouble et l'agitation qui régnaient conti-
nuellement dans une constitution sociale aussi faible. En effet, les
querelles et les guerres intestines qui s'en suivaient étaient presquesans interruption.
« Cependant deux influences existaient auprès de celle du cheïk :
l'une, toute morale et religieuse, était dirigée par les prétenduschérifs et les marabouts, descendants du prophète ou des saints venus
après lui ; l'autre, qu'on peut appeler celle du droit, appartenait.auxtaleb ou savants, c'est-à-dire à ceux qui avaient fait une étude par-ticulière de la loi du Koran.
« Les chérifs et les marabouts intervenaient presque toujours dans
toute affaire grave qui devait amener une querelle générale. C'étaient
des hommes de Dieu, auxquels on avait recours pour tout acte de
réparation ou de conciliation. Ils n'avaient point un pouvoir positifet ne commandaient pas, mais ils prononçaient de quel côté était la
20 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
justice et leurs avis avaient toujours une grande influence. Pour ne
pas se rendre à leurs conseils, il fallait leur opposer l'influence d'un
autre marabout et être bien appuyé par l'assentiment d'un grandnombre. L'influence religieuse était donc puissante ; cependant elle
cédait très souvent au sentiment général d'indépendance ; aussi
voyait-on parfois des marabouts, ayant peu de résolution dans l'es-
prit, chercher à se tenir neutres, lorsqu'ils craignaient de contrarier
les passions générales de la population.« Les taleb, lorsque leur savoir avait été éprouvé par un certain
nombre et inspirait confiance au public, prenaient d'eux-mêmes le
titre de kadi ou juge, emprunté aux fonctionnaires de ce nom institués
dans les villes par le gouvernement musulman.« Ces taleb kabyles jugeaient les différends dans les affaires par-
ticulières. Ils n'enregistraient aucun de leurs actes. Comme ils n'a-
vaient pas un pouvoir positif, établi par un titre émanant de l'auto-
rité reconnue, leurs jugements étaient plutôt des consultations quin'avaient de force qu'autant que la partie lésée ne pouvait leur oppo-ser la consultation d'un autre taleb. Ce n'était souvent qu'une ques-tion d'argent et de corruption, gain de cause étant donné au plusoffrant. De là l'origine de querelles particulières, qui produisaient
fréquemment des conflits plus graves.« Ainsi la constitution de cette population Kabyle pouvait être
considérée comme une agglomération de petites républiques fédéra-
tives, régies très grossièrement par l'influence de trois principes :
« 1° Celui du pouvoir de fait, qui appartenait à un chef de fa-
mille, pouvoir tempéré par l'influence des notables.
« 2° Le principe moral et religieux, dont disposaient les chérifs etles marabouts, avec une grande influence dans les affaires du pays.
« 3° Principe du droit écrit pour les intérêts privés seulement,
appliqué par les kadis d'après la loi musulmane.
« Les cheiks et les marabouts étaient donc les hommes politiquesdu pays ; mais ils n'exerçaient d'influence qu'en obéissant eux-mêmes aux passions générales de la population et ne pouvaient for-mer des entreprises bien considérables pour leur élévation particu-lière. Dans cette absence de tout pouvoir gouvernemental, la popu-lation de cette région n'étant en contact, depuis nombre de siècles,
qu'avec des voisins grossiers, était restée barbare, sauvage, igno-rante et fort misérable. Cependant lorsque ces Kabyles jouissaient
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 21
de quelques intervalles de repos, ils en profitaient, avec beaucoupd'ardeur dans le travail, pour se procurer quelques ressources. Lorsde la saison des récoltes, il y avait dans le pays beaucoup plus decalme qu'en temps ordinaire, tant parce que chacun avait besoin derester chez soi que par une sorte de convention tacite de ne pass'inquiéter pendant cette saison. Aussitôt les récoltes faites, les que-relles reprenaient leur cours et étaient encore excitées par l'enviede prendre à son voisin les biens qu'il avait récoltés. Dans tout ce
désordre, on conçoit les difficultés que devaient éprouver les rela-
tions de commerce. Cependant le besoin en était si général que ces
relations s'étaient établies par des conventions verbales de tribu à
tribu. Chacune d'elles tenait un marché un jour de la semaine et yrecevait les tribus avec lesquelles elle était en état de paix ou de
trêve. C'était habituellement dans ces marchés que se traitaienttoutes les affaires générales ou particulières. Les kadis s'y transpor-taient pour juger les différents sur les propriétés ou sur les conven-
tions de négoce. Les cheiks des environs y venaient toujours, tant
pour leurs propres affaires que pour maintenir l'ordre, autant que
possible, et protéger ceux qui dépendaient d'eux. Les marabouts yvenaient également, surtout lorsque l'on devait se concerter pour
quelque mesure générale.Ainsi, en même temps que l'extrême division et, pour bien dire,
l'absence de tout pouvoir général produisaient un trouble continuel
et empêchaient la sécurité, la loi religieuse, bien que faiblement
acceptée, répandait quelques éléments matériels de concorde en
consacrant la propriété.« Nous avons déjà dit que, lors de notre installation à Philippeville,
les tribus voisines, n'ayant pas de cohésion entre elles, ne nous op-
posèrent pas de sérieuse résistance. Cela tenait aussi à ce que celles
placées à l'Est de la route, habituées depuis longtemps à notre con-
tact, par suite de notre occupation déjà ancienne de Bône, ne virent
dans cette opération que la conséquence de la prise de Constantine.
Les tribus de l'Ouest, bien que plus hostiles, ne se crurent pas suffi-
samment menacées dans leur indépendance, ou furent arrêtées par le
souvenir des pertes dans les engagements qu'elles avaient soutenus
contre les troupes de la colonne Négrier pendant la reconnaissance
de l'année précédente.« Nous allons entrer maintenant dans d'autres détails, en indiquant
séparément ce qui concerne chacune des tribus de cette région. Celles
22 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
du Cercle de Collo étaient, dans le principe, placées sous l'autorité
du commandant supérieur de Philippeville. »
RÉGION DE PHILIPPEVILLE
« Radjata. Le territoire de cette tribu s'étendait jadis de la pointedu Filfila aux approches du lac Fezzara, par une large zone s'ap-
puyant au Nord et à l'Est sur les Guerbès et les Senhadja, au Sud
sur les Zerdaza, et comprenait à l'Ouest tout le bassin du Fendek.« Au XVIIe siècle, une première atteinte fut portée aux possessions
des Radjata par une immigration formidable de la famille, des Ouï-
chaoua, originaire des montagnes de Collo, qui s'échelonna en trois
groupes : celui de l'Edough, l'autre autour du lac Fezzara et le troi-
sième au Filfila.« Mais après une période de 60 à 80 ans, une nouvelle immigration
se produisit. Les Béni Mehenna de Collo, encouragés sans doute parle peu de résistance qu'avaient éprouvé leurs prédécesseurs, enva-
hirent le territoire de Skikda et vinrent s'y implanter, après avoir
chassé les populations qui l'occupaient. Ces dernières, pourchasséesen avant, arrivèrent à Fendek, et séduites par l'aspect et l'immensité
de la plaine, installèrent leurs gourbis sur ce point par le droit des
armes. Il y avait d'ailleurs place pour tous et l'accroissement de cette
population ne causa pas grands dommages aux Radjata. Ce fut le
principe de l'établissement des Arb Skikda sur les ruines de l'an-
tique Rusicade. Mais, plus tard, la population dite Arb Skikda, quioccupait sur le bord de la mer tout le bassin du port de Stora et leRas Skikda jusqu'à Ras-el-Madj dans la vallée du Saf-Saf, fut refoulée
peu à peu par les Beni Mehenna et alla s'installer aussi dans la
plaine de l'oued Fendek.« Chez les Radjata existe la Zaoula des descendants du marabout
Sidi Ahmed ben Ali, qui se prétendent originaires des Chérifs deFez.
« La population de cette tribu est d'environ un millier d'âmes.Les prélèvements sur son territoire, pour la création des centres de
Jemmapes, Ahmed ben Ali, Sidi Nacer et Gastu, ainsi que pourdiverses concessions isolées, l'ont restreint à ses proportions actuel-les, très suffisantes du reste pour la population qui y réside. »
« Béni Mehenna. L'origine de cette tribu est l'objet de traditions
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 23
diverses. Celle que lui assignent les habitants du pays est la suivante.Un certain Mehenna, natif des montagnes aux environs de Bougie,vint s'établir dans la région de Collo, qui porte encore le nom deBled Beni Mehenna. Il eut quatre fils : Bechiri, El-Khezeri, Naimiet Masselaouî. Ces jeunes gens, tous quatre guerriers redoutés, éten-dirent rapidement leur influence dans la montagne; leurs famillesdevinrent puissantes et nombreuses ; elles combattaient avec succèsles tribus environnantes et, après avoir refoulé les Béni Toufout, lesBeni Salah, les Beni Tsahak et les Beni Oualban, s'établirent solide-ment entre Collo, l'oued Guebli, le djebel Bou-Mejout, le Saf-Saf etla mer.
« Pendant de longues années, les Beni-Mehenna occupèrent ceterritoire conquis par les armes. Les quatre fractions qui les compo-saient, portant le nom de leurs anciens chefs, fils de Mehenna : Beni
Bechir, Oulad Khezer, Oulad Naïm et Messelaouia, y maintinrent
leur indépendance, au milieu de luttes continuelles avec les tribus
Kabyles qu'elles avaient dépossédés.« Sous le règne de Salah-bey, époque à laquelle l'histoire de la
tribu atteint la phase contemporaine, les Beni Mehenna, érigés en
tribus Makhezen, furent d'un utile concours au gouvernement des
Turcs, et, à la suite de razzias qu'ils exécutèrent par ordre du beysur les Arb Skikda et autres populations du bord de la mer, agran-dirent leur territoire de celui qu'occupaient ces tribus de la zone
maritime. Le bey, en récompense de leurs services, ratifia cette prisede possession et, jusqu'à l'arrivée des Français, les Beni Mehenna
demeurèrent tranquilles possesseurs du pays dont nous avons indi-
qué les limites. Dès l'arrivée des Français, les Beni Mehenna se divi-
sèrent en deux camps : les Souhaita, habitants de la plaine et dis-
posés à la soumission, et les Djebaïlia qui, forts de leurs montagnes,se préparaient avec énergie à la résistance.
« Après un seul combat, lors de la première reconnaissance du
général Négrier en 1838, les premiers demandèrent l'aman par la
voix de leur kaïd Saoudi ben Inal, qui reçut le burnous d'investi-
ture chez les Souhalia. Ce chef fut dès ce moment l'instrument dont
se servit l'autorité française pour achever la soumission de la tribu.
Soit par intrigue, soit par intimidation, Saoudi détermina le cheikh
Bou Roubi des Beni Mehenna Djebaïlia à se soumettre également.Ces bonnes dispositions furent mises à profit et les centres européens
de Gastonville, Saint-Charles, Valée, Damrémont, furent successive-
24 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
ment créés sur le territoire des Béni Mehenna. Nous aurons à repar-ler plus tard des services que nous ont encore rendus les kaïds
Saoudi ben Inal et Bou Roubi depuis la conquête.
« Quelques personnes ont cru retrouver, dans les Béni Mehenna
de Philippeville, les descendants du personnage du même nom dont
il est question dans l'historien arabe Iben Khaldoun. Ce Mehenna,allié à la tribu des Béni Taï, a une généalogie qui remonte à Semia,nièce du khalife Haroun el Rechid; dans ce cas, son origine serait
des plus illustres parmi le peuple arabe. Cependant, nous savons
par la tradition locale que les Mehenna de Philippeville, frères de
la famille des Ou Rabah de la vallée de l'oued Sahel, près Bougie,sont de purs Berbères, originaires de la tribu Kabyle des Ait Mel-
loul.
« Il existe, chez les Béni Mehenna, une fraction dite les oulad
Sandal, qui prétend descendre d'une émigration de Maures chassés
d'Espagne et débarqués à Collo vers le XVe siècle.
« Comme curiosités, on trouve aux environs de Tamalous de
nombreux dolmens, qui rappellent l'époque druidique, comme j'enai vu souvent sur d'autres points de l'Algérie. Les tombeaux de ma-
rabouts, objets d'un respect superstitieux, sont également nombreux;
je citerai entre autres celui de Bou Argaba, où allaient se prêter les
serments. L'accusé, auquel on avait donné la faculté de jurer, oignait
préalablement ses genoux et ses yeux avec de l'huile, puis s'age-nouillait et, se tournant vers l'Est, prononçait cette formule : Par
Sidi Argaba, je jure...« D'après une tradition très accréditée, tout individu, qui se par-
jurait sur la tombe du marabout, était puni de cécité ou par quel-
que autre châtiment céleste dans l'intervalle de huit jours.« C'est sur les territoires des Beni Mehenna qu'ont été successi-
vement créés les centres de Philippeville, de Valée, de Damrémont,de Saint-Charles, de Gastonville, avec les vastes et nombreuses con-
cessions qui en dépendent. A la suite de ces prélèvements pour la
colonisation, les indigènes de cette tribu furent resserrés sur la rive
droite du Saf-Saf, et on résolut alors, pour leur assurer la tranquillepossession de ce qui leur restait, de constituer chez eux la propriétéindividuelle. »
« Beni Oualban. Ce territoire, situé à 25 kilomètres environ au
Sud-Est de Philippeville, occupe le versant Nord du djebel Sidi
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 25
Dris et se compose de plusieurs petits bassins dont les eaux se réu-nissent à l'oued Guebli. Par suite de cette disposition topographique,les terres du Nord, situées en plaine, sont propres à la culture descéréales et habitées en hiver ; au printemps, la population émigrédans la partie montagneuse, où elle trouve des eaux abondantes etoù sont situés ses jardins.
« Cette tribu se divise en quatre fractions : Oulad Saâd, Oulad
Amar, Zerada, Bagherich. Les trois premières sont de race Kabyle.Quant aux Bagherich, ils s'attribuent une origine illustre. Leur aïeul,disent-ils, n'était rien moins que Sidi Embarek, fils de MouleyYacoub el Mansour, empereur du Maroc. Cet empereur, saisi d'unaccès de dévotion extraordinaire, abandonna son trône pour ne s'oc-
cuper que du service de Dieu et traversa l'Afrique pour aller mouriren terre sainte. Son fils Embarek vint, après sa mort, se fixer à
l'endroit nommé Abbassa, près de Mila ; il y possédait de magni-fiques jardins, qui sont encore entre les mains de ses descendants. Ce
Sidi Embarek était, à la fois, un grand marabout et un savant remar-
quable. Il eut deux fils : Sidi Ali et Sidi Mohamed. Sidi Ali quittale pays où était son père, pour venir demeurer à Aïn el Ahmra, et
Sidi Mohamed se fixa à Zeguerama. Ces deux familles ont continué
à former des hommes religieux et des savants. L'un d'eux fut long-
temps professeur de théologie à Constantine, avant notre occupation.Au temps des Turcs, la Zaouïa des Ben Bagherich jouissait de droit
d'asile; mais en maintes circonstances on s'y livra aussi à des in-
trigues politiques, notamment lors de la grande révolte de 1804, quiavait pour but de renverser la domination turque.
« Une autre famille, de caractère religieux également, est établie
à Sidi Dris, dans le Segaou. Ses prétentions sont fort élevées ; elle
fait remonter son origine à Sidi Dris (Idris), descendant du prophète.Aziza bey, femme de Redjeb bey, qui gouvernait Constantine en
1666, fit bâtir une mosquée en l'honneur de Sidi Dris, afin d'accom-
plir un voeu formé par elle. Salah bey fit réparer, un siècle plus
tard, cet édifice qui renferme le corps de plusieurs saints person-
nages, entre autres un Sidi Bou Hammam, de la famille des mara-
bouts de Sidi Okba du Sahara.
« Les Zaouïa de Ben Bagherich et de Sidi Dris ont été longtemps
un foyer de vols; on y recelait les objets pris dans les environs pardes malfaiteurs avec lesquels les Tolba ou religieux de ces Zaouïa
se mettaient en relations. »
26 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Il existe aux Beni-Oualban des ruines importantes de l'ancienne
cité romaine de Celtiane, colonie celtique.
« Zéramna. En l'absence de tout document historique concernant
la tribu des Zéramna, c'est la tradition seule qui nous a fourni les
quelques renseignements que nous pouvons donner, mais cela sans
que les époques puissent être indiquées avec la moindre approxima-tion.
« D'après cette tradition les habitants du Zéramna auraient eu
pour premiers ancêtres, sur ce territoire, cinq familles venues de
cinq pays différents et à peu près vers la même époque, savoir :
« 1° Celle d'El Aïfat, originaire d'El Oudja, de la tribu des Beni
Toufout, dont quelques habitants quittèrent alors leur pays et se
rendirent, les Aïfat au Zéramna et les autres dans l'oued Guebli ;« 2° La famille des Messakher, originaire des Beni Fergan, où des
indigènes de ce nom existent encore ;« 3° Celle des Ganadla, originaires de la Kabylie du Jurjura. Ils se
disent frères des Ben Gana, actuellement à Biskra, et avoir été mis
en possession de terres dans le Zéramna sous le gouvernement d'Ah-
med dit el Colli, bey de Constantine en 1755, qui avait épousé une
fille de Ben Gana de Mila, du temps qu'il n'était encore que janis-saire de la garnison de Collo ;
« 4° Celle des Kherabech, venue des Oulad Aouat ;« 5° Enfin, les Oulad Temer, venus de l'Edough, près de Bône.
« Les Oulad el Aïfat occupent la portion désignée sous le nom de
Dar el Hadjer, à peu de distance du point de rencontre des deux
routes conduisant à Philippeville, l'une passant par Sidi Zerzour et
l'autre par le village de Saint-Antoine. Les Ganadla ont donné leur
nom à la vallée qu'ils occupent, appelée aujourd'hui oued Ganadel.
« A l'arrivée des familles dont il est ci-dessus parlé, la tribu du
Zéramna était une vaste forêt où ces indigènes, au moyen de débrous-
saillements, se préparèrent les terrains de culture nécessaires à leur
existence, terrains qui augmentèrent au fur et à mesure des besoins,en prenant sans cesse sur la forêt qui était presque en entier peu-
plée de chênes-liège.« La tradition nous apprend encore qu'à partir du moment de leur
installation au Zéramna, les immigrants furent souvent en guerreavec leurs voisins les Maâssela, Taâbna, Beni Bechir et Beni bouNaïm ; mais grâce à la bonne entente qu'ils surent établir entre eux,
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 27
quoique venant de différents pays, grâce aux armes et aux muni-tions que les beys mirent souvent à la disposition de leurs protégésles Ganadla, ils purent toujours résister aux attaques de leurs adver-saires et garder leur nouveau pays dont les difficultés de configura-tion facilitaient la défense. Cet état de chose ne cessa complètementqu'avec la soumission à la France, qui ne souffrit, de la part destribus, aucune de ces anciennes guerres de représailles si fréquentesautrefois. »
Plus loin Féraud dit dans son Histoire des Villes de la Provincede Constantine :
« La province d'Alger était, en 1842, le théâtre de tels événements
qu'elle absorbait toute l'attention du Gouverneur général et attiraittous les regards. Le général Bugeaud y poursuivait cette opiniâtrecampagne qui devait s'illustrer de tant d'épisodes sanglants, depuisl'héroïque combat de Beni-Mered jusqu'à la prise de la Smala. Denotre côté, quelques escarmouches autour de Bougie et les agitations
éphémères de Si Zerdoude pouvaient être considérées seulement
comme des nuages dans la sérénité de notre ciel. Nos relations avec
les indigènes étaient étendues et sûres. Les provinces du centre et
de l'Ouest étaient, au contraire, ravagées par la guerre. Il fallait avoir
recours à celle de l'Est pour la nourriture de la population et de
l'armée. Le général Bugeaud permit alors l'exportation des bestiaux,
par arrêté du 29 juin, et, dans les six mois qui suivirent, les Arabes
conduisirent sur le marché de Philippeville 33.867 boeufs.
« Les autres objets de consommations arrivaient aussi à Philip-
peville en abondance. Les tribus voisines venaient d'un rayon de
40 kilomètres. Par suite, la vie matérielle était à bon marché, bien
que le prix de la journée fut encore très élevé. Par leurs économies,
des ouvriers devenaient alors chefs d'ateliers ou propriétaires et la
prospérité publique se traduisait par de nouvelles constructions à
l'intérieur et à l'extérieur.
« C'est à l'extrémité de la vallée du Zéramna et sous la protectiondu blockhaus dit de la Plaine, qui en surveillait, à la sortie du
défilé d'Eddis, les approches, que se formait un hameau sous le nom
de Saint-Antoine. Il avait suffi d'une simple autorisation du capitaine
Brincard, chef du Génie, chargé des concessions, pour que les colons
eussent hasardé leurs pénates à six kilomètres de la ville. Ils eurent
constamment à s'y tenir en garde contre les attaques des maraudeurs.
28 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
C'est là que se réalisait à la lettre le principe qu'aimait à émettre leGouverneur général, c'est-à-dire qu'en Algérie il fallait labourer lefusil à la main; mais là encore l'ennemi le plus redoutable ne fut pas
l'indigène, ce fut la fièvre. Ce malheureux village changea souvent
d'habitants.
« Plus près de la ville, la zone des jardins s'étendait et se fertili-sait rapidement et l'on se montrait impatient de franchir le Zéramnaet d'aborder une plus large culture.
« Des négociations furent entamées avec les tribus voisines pourl'abandon d'un territoire de colonisation. Ce territoire, tracé dans lesdeux vallées, comprenait les rives du Zéramna jusqu'au pont de la
gorge d'Eddis, et, à l'Est, toute la partie du Saf-Saf jusqu'aux dunesdu rivage : première délimitation qui enserrait environ dix mille
hectares, dont six mille propres à la culture et le reste en bois etbroussailles.
« La large plaine du Saf-Saf était couverte d'excellent fourrage.Chaque année, au printemps, des brigades de faucheurs y recueil-
laient, pour le service de l'armée, les vingt ou trente mille quintauxde fourrages nécessaires aux escadrons de la garnison.
« Ces terres fertiles devaient être les témoins des premiers effortsde la colonisation. Des concessions étaient demandées, mais le Gou-verneur regardait comme une imprudence de laisser s'y établir des
colons, avant que des centres agricoles bien peuplés et fortifiés n'en
protégeassent les abords. On désigna dès lors, pour emplacement deces futurs villages, sur la rive droite du Saf-Saf, la colline isolée oùs'est assis Valée, et sur la rive gauche, à la même hauteur, Damré-mont. C'était marquer ainsi les étapes prochaines de la colonisation.Nous dirons plus tard quel fut le système suivi pour le peuplementde ces premiers centres agricoles.
« A l'intérieur de la ville, les industries naissaient avec les néces-sités de l'agglomération. Les débits de boissons, nombreux d'abord,fermaient leurs portes et des professions plus utiles les remplaçaient.Les commerçants tenaient le premier rang par le nombre et l'im-
portance. Les travaux civils, bien que ralentis en 1842, ouvraientleurs chantiers aux travailleurs qui arrivaient de l'Algérie et des
ports de la Méditerranée. Les rues nécessitaient un entretien inces-sant pour le charroi intérieur. Les transports extérieurs étaient faits
par les muletiers ou chameliers indigènes. Les prolonges de l'armée
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 29
transportaient continuellement, de Stora ou de la plage, les approvi-sionnements de la province.
« Le colonel Brice exerçait alors le commandement supérieur à
Philippeville. Deux opérations militaires du mois d'avril 1842 vontnous faire connaître cet officier sous deux faces également hono-rables.
« Au commencement d'avril, des troubles étaient survenus dans latribu des Radjata, montagnards faisant partie du cercle de Philip-peville. Le kaïd que nous y avions installé, El Hadj ben Khalifa,rencontrait une vive opposition ; un parti, qui avait juré sa perte,le dénonça au général Négrier et comptait sur une de ces promptesdécisions qui étaient dans ses habitudes; mais cette fois le généralprescrivit préalablement une enquête sérieuse et en chargea le colo-nel Brice.
« Le commandant supérieur voulut voir de ses yeux, avant defaire justice. Mander les plaignants devant lui, c'était se livrer à
quelque intrigue concertée ; il avait trop de droiture d'esprit pourdonner dans cette chance d'erreur. Le 17, la garnison de Philip-peville fut rassemblée; la garde des postes étant remise à la milice,le colonel sortit avec une colonne de huit cents hommes d'infan-
terie, deux pièces de montagne et cent cavaliers. Cet appareil mili-taire devait seulement rehausser et au besoin confirmer l'acte de
justice qui allait se faire au nom de la France. Les intentions du
colonel étaient loyales et pacifiques. Il avait indiqué aux Radjata,sans craindre leur nombre et leurs embûches, un rendez-vous géné-ral, pour le 18 avril, dans le vallon de l'oued Mezaria, point central
de leur contrée. Ce même jour 18, au matin, la petite colonne, quiavait couché la veille au milieu des tribus, où elle avait été accueillie
avec les dispositions les plus amicales, arriva au lieu du rendez-
vous. Elle avait fait dix lieues dans ce pays accidenté et boisé, sans
recevoir un coup de fusil, tant était respecté l'esprit de justice et de
fermeté du colonel. Un immense rassemblement de Kabyles et
d'Arabes occupait la vallée et attendait son arrivée. La colonne fran-
çaise placée dans une bonne position, son chef fit laisser libre, parun cordon de sentinelles, l'enceinte où devaient être introduits les
principaux des Radjata, appela autour de lui les officiers qui l'avaient
accompagné et fit traduire aux assistants une allocution bienveillante :
« La justice que je vous apporte, leur dit-il, est celle de la France ;« ce n'est pas celle des Turcs ; il n'y a pas de chaouch coupe-tête
30 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
« dans mon état-major. Vous trouverez auprès de moi protection« pour vos personnes et pour vos biens ; approchez sans crainte,« parlez sans détour; je ne suis redoutable qu'aux traîtres et aux« méchants.» Ces paroles furent accueillies par des protestationschaleureuses de fidélité au pouvoir si bien représenté. La plus grandeliberté régna dans la discussion; ces montagnards parlèrent avecassurance. Le colonel écouta tour à tour, avec une égale bienveil-
lance, les partisans du kaïd et ses adversaires. Il lui parut que El
Hadj ben Khalifa était seulement poursuivi par des ambitions subal-ternes et qu'il était resté digne de son commandement. Sa convictionarrêtée à cet égard, il la fit pénétrer dans l'assemblée, à la grandeconfusion de quelques meneurs convaincus d'imposture, et l'on se
sépara avec de grands témoignages de joie et de reconnaissance pourle chef français, qui mettait ainsi, par sa parole, un terme aux dis-cussions intestines.
« Mais le colonel ne voulut pas se retirer sans utiliser sa sortie etles bonnes dispositions des Radjata. Il voulut explorer le pays pourtracer la route qui devait relier Philippeville et Bône. Il se mit enmarche le 19 ; ses dispositions pacifiques étaient connues ; les ren-
seignements les plus exacts lui étaient apportés de tous côtés. Les
populations assistaient tranquillement à sa marche pacifique. Les
troupes arrivèrent ainsi à Bône le 21 et en repartirent le 23, pourrentrer dans leur garnison le 25.
« Cette petite expédition fut du meilleur effet ; elle rétablit l'ordrechez les Radjata.
« Nous venons de voir le colonel Brice, administrateur, apaisantpar sa parole et son ascendant les troubles des tribus soumises. Il semontre tout autre aux prises avec Si Zerdoude. L'occasion est pro-chaine ; c'est aux premiers jours de mai.
« Si Zerdoude avait reparu dans la vallée de l'oued Guebli, à
quelques lieues à l'Ouest du blockhaus d'Eddis. Continuant ses ma-
noeuvres, ce fanatique s'était fait proclamer sultan par les Kabyles;il avait nommé des aghas et des khalifas. En exploitant la haine des
montagnards contre les chrétiens et leur crédulité pour tout ce quis'adressait à leur instinct religieux, il était parvenu à soulever lesBéni Toufout, les Beni Mehenna, les Beni Isahak, les Beni Salah, lesOulad el Hadj, les Beni Oualban et les Zerdaza. Chez ces derniers, ilavait pris son khalifa, Sidi Mohamed ben Abd-er-Rhaman. Il avaitintéressé à sa cause les tribus Kabyles jusqu'à Gigelli. Pendant tout
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 31
l'hiver de 1842, des partis n'avaient cessé d'inquiéter la route entreSmendou et Philippeville. Les environs de ce dernier point étaientsurtout infectés par ces bandes. On était assassiné sous les murs etdans l'intérieur même de l'enceinte. Pour appuyer tous ces actes
d'aggression, Zerdoude avait formé un rassemblement au Souk Tleta,marché des Beni Isahak.
« Placé ainsi au pied des montagnes de la Kabylie, il appelaitles fanatiques au djiad, guerre sainte, et tous les aventuriers au pil-lage.
« Des vallées profondes et boisées où il s'était, pour ainsi dire,
embusqué, il inquiétait la route et pouvait, si les contingents, qu'ilattendait de toutes parts, répondaient à son appel, tenter quelquesérieuse entreprise sur le poste d'Eddis ou le camp d'El-Arrouch etmenacer Philippeville. Ce fanatique annonçait déjà qu'il était suscitédu Dieu des Croyants pour reprendre Constantine aux Français.
« On ne pouvait le laisser se maintenir dans cette position sans
danger pour nos communications et sans que la soumission ne fûtébranlée chez nos tribus alliées. Le colonel Brice reçut l'ordre d'allers'établir à Aïn-Derdara avec environ deux mille hommes, d'où il
pouvait observer les mouvements de l'ennemi ; le 3 mai, il se porta
jusqu'au Souk-Tleta, où était le camp de Zerdoude. Les rassemble-
ments Kabyles se dissipèrent à son approche.« Le colonel avait préparé une sortie et non une expédition ; il ne
pouvait s'engager, sans convoi, plus avant dans ce pays inconnu.
La colonne séjourna depuis le matin jusqu'à une heure sur ce pointdécouvert et lorsqu'il parut bien évident que Si Zerdoude, provoquéainsi au combat, déclinait la lutte aux yeux de populations qu'ilavait soulevées, le colonel, ne pouvant prolonger cette démonstration
et craignant quelque coup de main sur la banlieue de Philippeville,
qu'il avait laissée loin derrière lui, donna l'ordre du départ. Les
troupes s'engagent de nouveau dans les pentes boisées qu'elles ve-
naient de parcourir; mais Si Zerdoude, qui restait caché, n'était pasloin. Il attend que l'armée ait quitté sa position, puis, par des che-
mins couverts, il amène à l'attaque près de trois mille hommes.
« Les difficultés du terrain étaient si grandes qu'engagé avec
sang-froid et un ordre parfait, le combat ne peut être longtempsune action régulièrement conduite et devient une mêlée générale.Les ravins et les massifs de broussailles cachaient des luttes indivi-
duelles. Nos soldats disputaient le terrain pied à pied. A neuf heures
32 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
du soir, cette attaque acharnée, mais impuissante, parut se lasser et
le colonel fit arrêter sur un plateau pour rallier les combattants et
panser les blessés. Sur ces entrefaites, la nuit s'obscurcit et la sur-veillance devint difficile, entouré que l'on était de broussailles épaisseset de ravins inconnus.
« Les assaillants s'étaient retirés, mais, profitant des avantages du
pays, dont ils savaient les chemins cachés, ils revinrent et se glis-sèrent entre les premières lignes jusqu'à l'ambulance où se trouvaient,en ce moment, les officiers supérieurs veillant au bien-être des bles-
sés, qu'ils faisaient placer sur les cacolets. Tout-à-coup une déchargeà bout portant illumine la nuit de lueurs et montre un rassemble-ment Kabyle au milieu des rangs. Tout était perdu peut-être si nos
jeunes soldats eussent répondu par le feu en face de l'ennemi ; mais,sans hésiter une seconde, les colonels Brice et Latour du Pin se
jettent, le sabre au poing, au-devant des plus hardis et les officiersles suivent. Les cris : « A la baïonnette ! Ne tirez pas ! » électrisentles conscrits du 19e Léger, devenu 94e de Ligne, et les Africains du3e bataillon ; on se précipite à corps perdu sur les montagnards qui,vivement poussés et poursuivis, renoncent à leur tentative... C'étaitle contingent de Gigelli qui venait de faire avec rage cette dernière
attaque pour s'indemniser d'être arrivé trop tard au combat.« On plaça sur les cacolets et sur les chevaux des officiers cin-
quante-six blessés. Neuf soldats étaient restés sur le champ de batailleou venaient de mourir à l'ambulance. Cette double surprise, qui setermina ainsi au milieu de la nuit, coûta aux Kabyles cent cinquantede leurs plus hardis guerriers, presque tous tués à la baïonnette. Leterrain n'avait permis ni les feux de ligne, ni l'emploi des obusiers.
« La contenance de nos troupes, aux prises pendant neuf heuresavec l'ennemi, avait été si ferme sur ce terrain, où la tactique ne
pouvait leur donner la supériorité, et l'attaque nocturne avait été si
énergiquement repoussée que la colonne ne fut pas inquiétée dans saretraite sur la première position d'Eddis plus découverte. Le colonel
ayant fait reposer son monde sur le djebel Haïeb, où il avait prisposition, se remit en route à six heures du matin pour Philippeville,où il arriva dans la soirée.
« Le combat du 3 mai, loin d'améliorer les affaires, ne fit que les
aggraver; il donna une nouvelle force à Zerdoude, qui sut l'exploiterhabilement en montrant comme trophée les cadavres de trois de nosmalheureux soldats, restés entre les mains des Kabyles pendant l'at-
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 33
taque de nuit. Zerdoude répandit immédiatement le bruit de sa vic-toire et convoqua les contingents de toutes les tribus jusqu'à Gigelli.Elles se trouvèrent exactement au rendez-vous assigné et furentrejointes par les Eulmas et les Beni Mehenna, toutes deux tribus sou-mises depuis l'occupation de Philippeville.
« Seulement Zerdoude avait rabattu de ses projets sur Constan-tine, au point de ne leur donner pour but que la prise d'El-Arrouch.
« Le 30 juin, Zerdoude ordonna deux attaques simultanées sur lecamp d'El-Arrouch et sur le blockhaus d'Eddis. Il envoya environdeux mille Kabyles sur ce dernier point et marcha de sa personne surle camp avec quatre à cinq mille combattants.
« Le colonel Brice avait eu soin de mettre au blockhaus deux
compagnies, qui, au premier moment de l'attaque, s'enfermèrentderrière le parapet et firent ensuite plusieurs mouvements offensifssous la protection du blockhaus et d'un petit obusier dont il étaitarmé. L'attaque, extrêmement vive, fut repoussée avec énergie par le
capitaine Hascouet, du 19e Léger.« Du côté d'El-Arrouch, l'affaire était plus sérieuse. La garnison
du camp était composée du 3e bataillon d'Afrique, d'un bataillon du22e de Ligne, sous les ordres du colonel Lebreton, et de cent chevaux,chasseurs et spahis.
« Dès le matin, les montagnes voisines s'étaient couvertes de Ka-
byles tant à pied qu'à cheval, à qui le pillage du camp avait été pro-mis par Si Zerdoude. Dans l'après-midi, ils s'approchèrent avec réso-
lution, dirigeant un feu très nourri sur les parapets. Par ordre ducolonel Lebreton, on les laissa arriver jusque sur les glacis sans leur
opposer aucune résistance et sans se montrer. Mais arrivés sur ce
point, la cavalerie, aux ordres du capitaine de Rougemont, composéede soixante-dix Chasseurs d'Afrique, de trente soldats du train et
de quarante gendarmes maures, sortit tout-à-coup et entama, tête
baissée, sur les rassemblements Kabyles, une charge furibonde. Cinq
compagnies d'infanterie au pas de course appuyaient ce mouvement
offensif. L'ennemi, sabré et atteint par la mitraille, s'enfuit dans la
plus complète déroute, laissant plus de cent cadavres dans les prai-ries encore sur pied qui entouraient le camp. Chose étrange et quimérite d'être signalée, c'est l'apparition d'un nouveau marabout, au
milieu des contingents Kabyles, qui, peut être plus que si Zerdoude,
détermina l'attaque du camp d'El-Arrouch. C'était un inconnu,.6
34 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
presque adolescent et qui portait le nom de Ould el Résala (le fils
de la gazelle).« L'insuccès de cette attaque démontra à Zerdoude l'inutilité de
ses efforts et aurait pu ouvrir les yeux aux tribus qui s'étaient laissées
entraîner par les impostures grossières au moyen desquelles il les
avait fanatisées. Il ne tenta plus d'attaque directe ; il se borna à
inquiéter nos routes, à enlever nos correspondances et à tendre ses
embuscades aux environs.« Le commandant supérieur rentra, après avoir laissé des troupes
au blockhaus de la Plaine, et se tint prêt à courir sus au chérif, s'il
venait à sortir du pays difficile où il se tenait.
« La population s'émut peu du voisinage de la guerre. Philippevillen'était alors que fort peu vulnérable dans sa banlieue et certes on
ne faisait pas à Si Zerdoude l'honneur de le redouter. »
Les extraits ci-dessus du livre de l'historien militaire Féraud paraî-tront peut-être un peu longs, mais ils intéresseront certainement nos
concitoyens. Nous regrettons bien vivement de n'avoir pu nous pro-curer l'ouvrage de l'historien Philippevillois Fenech. Nous en avonslu autrefois plusieurs fascicules, dont nous aurions cité volontiers
quelques pages ; ils n'existent plus aujourd'hui qu'incomplets et c'estvraiment dommage.
Les lecteurs ont vu plus haut le récit des combats des 3 mai et 30
juin 1842, qui ont fait couler tant de sang généreux. Les blessés du19e Léger et du 3e bataillon d'Afrique furent transportés à l'hôpitalmilitaire. On enterra les morts du 19e Léger au cimetière, dans unefosse où les cercueils furent placés côte à côte et au-dessus de
laquelle on dressa une colonne romaine en marbre; on y grava l'ins-
cription suivante :
A LA MEMOIRE DES BRAVES DU 19e LEGERMORTS AU CHAMP D'HONNEUR EN COMBATTANT CONTRE LES KABYLES
LE 3 MAI ET LE 30 JUIN 1842
LEPELLETIER, BARTHÉLEMY-CHARLES-HIPPOLYTE,Chirurgien-major ;SCHOTI, Louis, Lieutenant ;
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 35
COQUILLOT, JOSEPH, Sergent-major ;
COMPANS, JEAN, Sergent-major ;
ROBERT, FRANÇOIS, Sergent-fourrier ;
SELLET, THÉOPHILE, Chasseur ;ALLARD, HIPPOLYTE, Chasseur ;
COCARD, HENRI, Chasseur ;
TILLIER, JOSEPH, Chasseur ;
GROS, JEAN, Voltigeur ;
CHAMBON, Carabinier.De Profundis.
Au revers de la colonne, il a été ajouté il y a quelques années :
19e LÉGER .
SOUVENIR FRANÇAIS
Cette tombe est, en effet, entretenue par les soins de la Société duSouvenir Français.
Un autre monument en forme de pyramide, porte l'inscriptionsuivante :
(61e)LE 61° DE LIGNE A SES FRÈRES D'ARMES MORTS EN AFRIQUE
1837-1843
Les Officiers de l'Etat-Civil qui ont reçu les déclarations d'actes
de naissances et de décès et célébré les mariages depuis la fondation
de notre ville, sont :
23 décembre 1838. M. Batsalle, lieutenant-colonel du 61e de Ligne ;9 janvier 1839. M. Lefebvre, adjoint de 1re classe à l'Intendance
militaire ;15 mai 1839. M. Lapique, sous-intendant militaire ;3 juin 1839. M. Codron, adjoint de lre classe à l'Intendance ;21 juin 1839. M. Lefebvre, id.
19 juillet 1839. M. Codron, id.
2 juin 1840. M. Fenech, Emmanuel-Antoine, commissaire-civil.
17 février 1842, M. Lapaine, secrétaire, faisant fonctions de commis-
saire civil.
36 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
20 juin 1842, Fenech, Emmanuel-Antoine, chevalier de l'ordre
royal et militaire des Saints Maurice et Lazare.
8 mars 1843. Peschart, baron d'Ambly, maire.
7 février 1844. Archambault de la Motte-Langon, secrétaire de la
sous-direction de l'Intérieur (intérim).8 mai 1844. Chirac, Joseph, adjoint au maire (intérim).Nous relaterons quelques-uns des premiers actes de l'Etat-Civil et
nous en citerons d'autres, soit pour l'originalité de leur rédaction,soit pour les faits qu'ils rappellent.
Le premier acte est du 23 décembre 1838. C'est le décès du nommé
Lahore, François, mécanicien, natif de Saint-Gaudens (Haute-Ga-
ronne), patenté sous le n° 62, décédé la veille. Les témoins de l'acte,au nombre de trois, sont :.Vincent, Claude, cantinier au 3e Chasseurs
d'Afrique, patenté sous le n° 13 ; Robba, Antoine, marchand de
comestibles et de vins, patenté sous le n° 49; Berthet, Bénine, me-
nuisier, patenté sous le n° 79.' L'acte a été reçu par M. Batsalle, Da-
niel-Joseph, lieutenant-colonel du 61e de Ligne, commandant la
place, faisant fonctions de sous-intendant militaire.2e acte : décès de Rouquette, Joseph, maître au cabotage, comman-
dant le brick-goëlette français l'Amelin, ancré dans le port de Stora,décédé à son bord, le 8 janvier 1839, par suite de fièvre pernicieuse.
3e acte : décès de Madame Ringembach, 27 février 1839.4e acte : décès de l'enfant Golzené, né à Philippeville, le 20 mars
1839. Témoins : MM. Brincard et Chariot, capitaines au 3e régimentdu Génie.
5e acte : décès, le 2 avril 1839, d'une espagnole, âgée de 18 ans,
domestique à l'Hôtel du Lion d'Or.
6e acte : décès, le 14 mai 1839, d'un enfant français, âgé d'un an,né à Marseille.
7e acte : décès, le 16 mai 1839, d'une enfant espagnole, née le 29avril 1838 à Bougie. Témoins : MM. Pingat, Laurent; Blanchet,Claude, négociant; Ricoux, Louis-Toussaint, courtier maritime.
9e acte : décès, le 1er juin 1839, d'une enfant française, née à Bône
(Afrique), le 3 octobre 1837.10e acte : décès, le 26 juillet 1839, d'une enfant française, née à
Philippeville, le 25 mars 1839. Un des témoins est M.Victor Rouchas,22 ans, négociant.
11e acte : décès, le 28 juillet 1839, de Madame Boue, propriétaire,française.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 37
15e acte : décès, le 15 août 1839, d'une espagnole, domestique chezM. Aubin, négociant. Témoins : MM. Farge, Léoni et Bertin, Alexan-
dre, tous trois propriétaires.
28e acte : décès, le 24 septembre 1839, d'une femme juive, épousedu sieur Moatti, Jacob, interprète de l'administration.
29e acte : c'est sous ce numéro que figure la première naissance
enregistrée à Philippeville, celle de l'enfant Golzené, décédé, commeon l'a vu plus haut, le 28 mars 1839, âgé de 7 jours. Il était le pre-mier enfant né dans notre ville et son décès a été enregistré avant
qu'on ait pensé à dresser son acte de naissance.
77e acte : à cette date, 29 août 1839, est inscrit le premier mariagecélébré ici. Epoux : Vincent, menuisier, et demoiselle Lanteaume.
Madame veuve Vincent, âgée aujourd'hui de 80 ans, habite toujours
parmi nous et nous lui souhaitons encore de longs jours de bonheur
et de santé.
13 septembre 1842. Décès, au blockaus du camp d'El-Diss, d'un
enfant français, âgé d'un an, mort par suite de maladie. Officier del'état-civil : (Illisible), lieutenant au 19e régiment d'Infanterie Légère,commandant le blockaus d'El-Diss.
Naufrage de la corvette de charge La Marne : 5 mars 1841. Acte
de décès de 11 individus trouvés morts sur la plage, le 28 janvier :
Olivier, matelot. Legolf, matelot. Masse, maître d'hôtel des officiers.
Arène, quartier-maître calfat. Coudray, matelot.Vial, maître canon-
nier. Ponier, docteur, chirurgien auxiliaire de 2e classe. Le boulangerde la dite corvette. Ahmed ben Saad, biskri. Deux inconnus. 5 mars
1841. Acte de décès de 18 individus trouvés morts sur la plage le
1er février : Carrière, matelot. Duchesne, matelot de cuisine.Coudroyer,matelot. Laporte, mousse. Serre, capitaine d'armes, Rouère, Serre,
Cordier, mousses. Renoux, 2e maître de timonerie. Buteau, gabier.8 inconnus. 5 mars 1841. Acte de décès de 2 individus trouvés morts
sur la plage de Stora, le 5 février, inconnus. 5 mars 1841. Acte de
décès de l'individu trouvé mort sur la plage de Stora, le 6 février,
Lanusse, matelot. 47 mars 1841. Acte de décès d'un inconnu trouvé
mort le 1er mars sur la plage de Stora.
17 mars 1840. 2e mariage célébré à Philippeville. Un des témoins
est M. Chanu, restaurateur.
Nous relevons, jusqu'à la fin de l'année 1839, parmi les témoins
les noms de :
38 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Louis Cassar, vermicellier. (M. Louis Cassai père de M. Charles
Cassar, est venu ici pour la première fois en 1835, avant l'occupation,faire du commerce avec les indigènes. Il est reparti presque aussitôt,
puis il est revenu en 1838. En 1855, il créa, dans notre ville, l'in-
dustrie dite vermicellière, qui fut longtemps prospère). Toussaint
Ricoux, Courtier maritime, arrivé le 20 octobre 1838 ; il n'y avait alors
que 12 européens dans notre cité. Lavoûte, Auguste, boulanger.Charrier, Joseph, négociant. (M. Charrier mourut chef de bureau de
l'Etat-Civil en rétraite). Michel Schembri. Cassagne, Joseph, négo-ciant. Blain, Alexis, maître tailleur. Rosello, François, jardinier,
Ringembach, boulanger. Branthomme, négociant. Claris, Philippe,
négociant, Marius Riquier. Joachim Campi. Baptiste Savona.
Et parmi les comparants dans les actes de 1840 à 1845 :
Cuirassier, charpentier. Termignon, serrurier. Payan, serrurier.
Tracqui, serrurier. Peschart d'Ambly, baron de Lavallée et de Le-
voncourt, propriétaire, 1er maire de notre ville. Pompidou, menuisier.
Foucou, négociant. Louis Nielli, pharmacien. Léon de Marqué, capi-taine de corvette. Griosel, maçon. Héon, serrurier. Charles Vias,marchand. Guérin-Toudouze, interprète. Sutter, Philippe, brasseur.
Lanteaume, Honoré, boulanger. Roch Tonna, boucher. DominiqueCauro, maçon. Théophile Réguis, débitant de tabacs. Eustache Rou-
chas, négociant. Ange Doria, commissaire-priseur. Kraft, brasseur.
Jean-Baptiste Mourre, maçon. Boutinet, propriétaire. Grimaud, for-
geron. Antoine Ferrero, cultivateur. Pierre Hurlin, employé del'administration civile. François Delahaye, notaire. De Martimprey,chef de bataillon au 61e. Paban, Bruno, entrepreneur. Louis-François,voiturier. Pierre Riquier, directeur de la pépinière. Raphaël Scogna-miglio, négociant. Devalloné, charpentier. Gaétan Picon, distillateur.
Augustin Barbaroux, marchand. Joseph Ollivier, boulanger. Fortuné
Germain, maçon. Louis Gassier, épicier. Simorre, employé aux four-
rages. Toulouse, menuisier. Ducorps, Antoine, médecin. Faustin
Praget, entrepreneur. Léon Abadie, négociant. Eyssautier, maçon.Galzen, menuisier. Dominique Bonsignour, maçon. Bordes, maçon.Paul Ricord, négociant. Henri Escoffier, négociant. Pierre Clayette,boulanger. Tavera et Carbone, marins à Stora. Salichon, armurier.Emmanuel Lauro, tailleur. Quasso, cafetier. Alexis Moreau et de
Manas, docteurs en médecine. Péraldo, maçon. Rousseau, pharma-cien. Sierzputowski, dessinateur. Ferdinand Pégat, négociant. Mon-
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 39
don, propriétaire. Battandier, quincaillier. Adèle Legris, sage-femme.Purpan, greffier de la justice de paix. François Mariconé, briquetier.Delestrade, propriétaire. Honoré Peisson, serrurier. Paul Saccomant,
négociant. Dalas, maréchal-ferrant. Achille Delay, propriétaire. Jayet,carrier. Tron, boulanger. Chêne, tailleur. Teissier, avocat-défenseur.
Nel, docteur en médecine. Accoyer, propriétaire. Joseph Héraud,
entrepreneur. René Catherineau, cafetier. Lafont, Pierre, colon. De-
cugis, boulanger. Barthélémy Peisson, chapelier. Lapaine, avocat.
Jalouzeau, serrurier. David Lyanna, commis. Pierre Césarini, maçon.De Nobelly, négociant. Friquet et Maribaud, menuisiers.
RELEVÉ DES NAISSANCES ET DES DÉCÈS DE 1838 A 1902
ANNÉES NAISSANCES DÉCÈS ANNÉES NAISSANCES DÉCÈS
1838 0 1 1871 431 6861839 18 46 1872 425 5021840 57 56 1873 477 4341841 105 178 1874 493 5041842 112 171 1875 505 7471843 121 170 1876 537 5201844 164 168 1877 498 4721845 161 300 1878 524 4561846 197 500 1879 481 445
1847 229 464 1880 578 5861848 222 376 1881 574 681
1849 271 1.615 1882 590 567
1850 227 490 1883 590 601
1851 276 392 1884 625 610
1852 267 422 1885 642 693
1853 279 429 1886 675 804
1854 293 860 1887 643 729
1855 298 588 1888 625 665
1856 284 502 1889 672 626
1857 362 380 1890 594 629
1858 382 347 1891 650 575
1859 389 495 4892 614 4731860 402 412 1893 620 5931861 413 442 1894 599 521
1862 462 402 1895 553 597
1863 382 461 1896 531 581
1864 402 414 1897 645 413
1865 431 523 1898 563 451
1866 437 497 1899 525 530
1867 409 608 1900 552 577
1868 453 742 1901 586 518
1869 439 571 1902 547 465
1870 453 590
40 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Les années 1849 et 1854 ont été marquées par de violentes épidé-mies de choléra.
La population de notre commune est, d'après le recensement de
1901, ainsi répartie :
Français nés en France 2.424
Français nés en Algérie 4.593
Etrangers naturalisés . . 1.273Israélites 158
Indigènes musulmans 7.145Italiens 3.566Maltais et autres nationalités 2.303
TOTAL 21.462 habitants.
IV
ADMINISTRATION CIVILE
Une ordonnace royale du 10 décembre 1842 crée, à la résidencede Philippeville, une sous-direction de l'Intérieur. La ville de Cons-tantine ressort, en tout ce qui a rapport à l'administration civile, dela sous-direction de l'Intérieur de notre ville. Par suite, le commis-sariat civil est supprimé par arrêté du 21 décembre de la mêmeannée.
M. Fissont, sous-directeur, meurt le 7 janvier 1848. Son enter-rement fut une véritable manifestation de respect et de sympathie.En tête du convoi marchent les tambours de la Ligne et de la Milice,
puis la musique du 19e Léger. Les coins du poêle sont tenus par M.
Marion, président du Tribunal de lre instance, M. le Baron d'Ambly,maire, M. de Nobelly, président de la Chambre de Commerce, M. le
Colonel Barthélémy, commandant du cercle, et M. Auguste Fenech,faisant fonctions de sous-directeur par intérim.
On éleva un monument au cimetière, par souscription publique,sur la tombe de M. Fissont. Ce monument, assez bien conservé encore,est en forme d'autel ; on y lit sur une face :
Ici repose Maurice, Benoît, Antoine Fissont, sous-directeur des affaires civiles,né à Paris, le 18 décembre 1785, décédé à Philippeville, le 7 janvier 1848. Requiescatin pacc.
Sur l'autre face :
Hoc monumentum nonnulli ex Rusicadensibus novi more veterum optimoviro Antonio Fissont hujus-ce coloniae rcnasecntis rectori aere collato posue-runt anno D (ei) P (ost) C (hristum) 1848.
Le 20 janver 1849, une pétition des habitants est adressée à M. Fer-
dinand Barrot, représentant du peuple à l'Assemblée Nationale, en
vue d'établir le siège de la Préfecture, actuellement à Constantine, à
Philippeville et non à Bône, comme le demande le journal La Sey bouse.
42 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le 20 août de la même année, le journal Philippevillois Le Saf-Safdit apprendre de source certaine que notre procès est aujourd'huipresque gagné et que les bureaux d'Alger n'ont pas trouvé d'objec-tions sérieuses au transfèrement dans notre ville du siège de la Pré-
fecture, qui est un résultat naturel de notre position géographique etde la prochaine délimitation des départements. L'opposition ne pour-rait venir que des bureaux de Paris. Le Saf-Saf rappelle, à ce sujet,l'opinion émise, en 1847, par les auteurs du Mémoire au Roi et aux
Chambres, hommes désintéressés dans la question et qui remplis-saient des fonctions administratives, celles de délégués de l'Algérie :
1° L'Algérie formera, à l'avenir, trois départements et trois divi-sions militaires.
2° Le chef-lieu de l'un des départements est Alger ; de l'autre, Oran ;du troisième, Philippeville.
3° Le chef-lieu des trois divisions militaires est Médéah, Mascaraet Constantine.
Le 20 octobre suivant, le même journal fait connaître que deslettres dignes de foi signalent que la nouvelle officielle du transfère-ment de la Préfecture de Constantine dans notre ville est arrivée à
Alger.Le 28 décembre 1849, M. Chaumont, secrétaire de la Sous-Préfec-
ture, meurt du choléra à l'hôpital militaire. Le 11 décembre 1867,la mort frappe un des anciens de Philippeville, un de ceux qui ontassisté à son développement, M. E.-V. Fenech, ancien rédacteur enchef du Saf-Saf et, en dernier lieu, ancien secrétaire de la Sous-Préfecture. Il était à peine âgé de 51 ans et aurait pu rendre encorede nombreux services à la cause de la République, à laquelle il est
toujours resté fidèle.Les représentants de l'Etat dans notre ville sont cités ci-après :
COMMISSAIRE CIVIL
17 février 1840. M. Emmanuel-Antoine Fenech, maire de Bône.
SOUS-DIRECTEURS
31 décembre 1842. MM. Dussert.1er mars 1846. Fissont.15 mai 1848. Béquet.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 43
SOUS-PREFETS
8 février 1849. MM. Démanche.9 décembre 1849. Zoepffel.2 août 1850. Temblaire.31 octobre 1851. Calendini.12 mai 1852. de Lormel.1er novembre 1853. Otten.
8 mars 1856. Vicomte de Gantès.
26 février 1857. Calendini (2e fois).2 mai 1860. Vicomte de Gantès (2e fois).14 décembre 1861. Nouvion.
7 février 1871. Emile Delmarès.
1er avril 1871. Toutain.
4 mars 1875. Etienne Choisnet.
12 juin 1877. Bellot des Minières.
13 février 1880. Adolphe Gagé.9 juillet 1883. Prosper Dimier.
2 mai 1888. François Gautier.
10 mai 1896. Alphonse Julienne.
M. Temblaire laisse de si bons souvenirs à Mostaganem, où il
fut nommé en quittant notre ville, que les habitants lui firent frapperune médaille d'or à Paris. Déjà, à Philippeville, la population civile
avait offert un bal très brillant, par souscription, à ce sympathique
fonctionnaire, avant son départ.M. Emile Delmarès a été nommé directeur de l'hôpital civil d'Oran
et sous-préfet honoraire le 20 février 1894.
V
MUNICIPALITÉ, CONSEIL MUNICIPAL, ÉVÉNEMENTS
POLITIQUES
Par arrêté du Ministre de la Guerre du 9 février 1843, une Mairieest instituée à la résidence de Philippeville; cet arrêté fixe le traite-ment du Maire à 3.000 fr. par an. Le titulaire est le baron Peschart
d'Ambly.Notre ville est érigée en commune le 31 janvier 1848. Le nombre
des adjoints est fixé à 4, dont 2 pour la ville, 1 à Saint-Antoine et 1à Dam rémont.
Depuis la connaissance des premiers bruits de la révolution quis'opérait à Paris, Philippeville était dans une impatience extraordi-
naire; la foule, avide de nouvelles, se pressait sur la place de laMarine. Enfin, le 6 mars, au matin, le brick marchand La Jeune
Cléanthe, parti de Toulon le 3, apportait le journal Le Toulonnafs.
L'autorité fit aussitôt publier l'extrait suivant :
« La République française a été proclamée par le Gouvernement
provisoire.« Louis-Philippe et sa famille se sont embarqués aujourd'hui au
Tréport pour l'Angleterre.« Le général Cavaignac est Gouverneur général de l'Algérie. »
Dans la journée du lendemain, 7, le Cercle du Commerce arbora
le drapeau républicain. Le 15, au point du jour, le canon annonçait
que le drapeau de la République française flottait sur tous les édifices
publics.A midi et demi, les autorités étaient réunies près de la rampe de
la place Hélène; la Milice, représentée par deux compagnies, les
Pompiers et la première de Grenadiers, les deux seules qu'on ait puarmer momentanément, était placée au bas de la rampe. L'armée
46 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
était massée, avec ses nouveaux drapeaux, dans une partie de larue Royale et occupait complètement la place de la Marine.
Au roulement des tambours de la Milice, le canon commence sessalves. M. Auguste Fenech, sous-directeur par intérim des affaires
civiles, harangue la population et crie : Vive la République! Tousles fronts se découvrent et ce cri est unanimement répété. La mu-
sique entonne alors La Marseillaise.Puis M. le Colonel Barthélémy, commandant supérieur du cercle,
fait battre un ban et proclame la République devant le front des
troupes.Un banquet républicain avait été décidé et, le 13 mars, les sous-
cripteurs avaient ainsi élu le comité définitif :
Président, le citoyen Serpantié.Secrétaire, le citoyen Emmanuel-Vincent Fenech, colon-proprié-
taire, commis principal des Douanes.
Membres, les citoyens: Blanchet, négociant; Barneau, négociant;Raymond, colon; Decanis, tailleur; Rivoire, négociant; Changarnier,menuisier ; Réguis, marchand de tabac ; Olivier, marchand ; Valette,propriétaire ; Germain, charpentier ; Vaille, cafetier.
Le 19, un service funèbre est célébré pour ceux qui sont mortsdans les trois journées de février et le curé prononce une courteallocution glorifiant, au nom de la religion qui bénit tous les sacri-
fices, les nouveaux martyrs d'une sainte cause.Les rues sont pavoisées de drapeaux tricolores. A deux heures,
toute la population, en habits de fête, se presse sur la place de laMarine et chaque souscripteur prend place au lieu que lui indiquele hasard. A trois heures commence le banquet, auquel s'étaientfait excuser l'armée et la magistrature. Trois tables, chacune de cent
couverts, sont rangées sous le hangar de la Douane. Après une allo-cution de M. le Sous-Directeur des affaires civiles, les toasts sont
appelés dans l'ordre suivant :
Les citoyens : Debétous : Salut au réveil du peuple!Garcin : Au Gouvernement provisoire !
Réguis : A la réforme !E.-V. Fenech : A la République française!Dambly : A la réunion de l'Algérie à la France !
Denobelly : A l'assimiliation de l'Algérie et de laFrance !
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 47
Les citoyens : Olivier : Aux peuples étrangers !
Prod'hom : La Suisse au peuple français !Nielli et Pellas : L'Italie au peuple français !Strezelecki : La Pologne au peuple français !
Gregh : La population Maltaise au peuple français !
Changarnier : A la régénération des travailleurs !de Fontaine : A M. le Sous-Directeur !
On remarquera, dans le cours de cette histoire, que les nobles
ont, pour la plupart, caché soigneusement, suivant les circonstances,leur particule en la confondant avec leur nom : Debétous, Dambly,Denobelly, etc., et qu'ils ne l'ont reprise ostensiblement qu'à une
époque où l'on ne craignait plus d'être noble.
Nous avons respecté, dans toutes nos citations, l'orthographe desnoms tels qu'ils figurent dans les documents officiels que nous avons
compulsés.Une collecte faite par le curé et les commissaires produisit une
somme de 509 fr. pour les pauvres, auxquels furent distribués du
pain par brassées et les restes du banquet.Deux clubs se forment sous les noms de Club Electoral et de Club
des Amis du Peuple. Le dimanche, 9 avril, les électeurs, au nombre
de 1.290, sont convoqués à l'effet d'élire leurs représentants. Le 16
du même mois, le Club des Amis du Peuple plante un arbre de la Li-
berté sur la place du Puits. Les autorités civiles et militaires assistent
à la cérémonie. Le curé, accompagné de tout le clergé, bénit l'arbre.
Les chants de la religion se mêlent aux airs patriotiques joués parla musique du 19e Léger (94e de Ligne). La place du Puits était
l'emplacement actuel du Tribanal; il y avait là le seul puits public,sur lequel on a depuis longtemps installé une pompe.
Les habitants du village Valée ayant voulu, à l'exemple des habi-
tants de Dellys, constituer une municipalité sans la participation de
l'autorité compétente, ces faits, comme à Dellys, furent réprimés.La première réunion du Conseil municipal a lieu le 3 juin 1848.
Par suite de l'arrêté du 1er de ce mois, cette assemblée, composéedes citoyens dont les noms suivent, est convoquée, pour son instal-
lation, par M. le Directeur des affaires civiles de la province de
Constantine. Les citoyens :
Dambly, Peschart, maire; Privé, André, notaire, adjoint; Rivoire,
François, négociant, adjoint ; Vincens de Gourgas, propriétaire,
48 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
adjoint de Saint-Antoine ; Moine, Léon, cultivateur, adjoint de Valéeet de Dàmrémont; Auffau, tanneur; Barneau, négociant; Changar-nier, menuisier ; Chapelant, forgeron ; Coggia, cultivateur ; Delay,cultivateur ; Denobelly, négociant; Fenech, cultivateur; Feauroux.
négociant ; Fremont, négociant ; Lionnet, ingénieur ; Teissier, avocat-défenseur.
Tous sont présents, à l'exception des citoyens de Gourgas et Chan-garnier. Ce dernier adresse une lettre de démission, dont le citoyendirecteur donne lecture. Le citoyen Changarnier regarde la constitu-tion du Conseil municipal comme devant être le résultat de l'élection
et s'abstient pour ce motif. Le citoyen directeur fait observer que laconstitution du Conseil municipal est toute provisoire et que ce n'est,
pour le moment, que l'application de l'ordonnance royale du 28 sep-tembre 1847, qui accorde le bénéfice des institutions municipalesaux villes de l'Algérie.
Après l'acceptation de cette démission et l'installation du Conseil,le citoyen Fenech est désigné à l'unanimité comme conseiller secré-taire et le citoyen Figlia en remplacement du citoyen Changarnier.
Le Maire donne ensuite quelques notions sur le budget de 1848,afin de préparer le Conseil municipal aux discussions que va souleverle vote du budget de 1849. Le registre des délibérations constate
que ces longs renseignements sont religieusement écoutés et conve-blement commentés par les membres du Conseil. Le Conseil consacreensuite treize séances, du 20 juillet au 17 août 1848, pour arrêter le
budget de 1849, dont voici quelques extraits :
Traitement du maire 3.000Frais de représentation 1.000
Bureaux de la mairie :
1 secrétaire .... 2.2001 comptable . . . 1.8001 concierge, tambour de ville 2401 chaouch 600
4.840
2 gardes-champêtres à Valée et Saint-Antoine. 1.4401 » à Philippeville 960Matériel et imprimés 2.850
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 49
Personnel et matériel des marchés 2.750» de l'abattoir 3.410
» de la halle aux grains. 2.250
Police :
1 secrétaire 1.5001 inspecteur de lre classe 1.8001 » de 2e classe . . . . . . 1.5002 agents de lre classe à 1.200 fr 2.4003 » de 2e classe à 1.000 fr 3.000
2 » indigènes de lre classe à 900 fr 1.8002 » » 2e classe à 840 fr 1.6801 vétérinaire inspecteur des viandes 600
Habillement des agents 1.100
Matériel et frais divers 1.500
16.880
Sapeurs-pompiers :
1 tambour 360
Matériel et habillement 1.800
Loyer du magasin des pompes 400
2.560
Milice
Indemnité à l'adjudant-major 1.200— au secrétaire 800
Solde des 6 tambours à 25 fr. et d'un trom-
pette à 30 fr 2.520
Solde d'un tambour maître 600
Habillement de l'adjudant sous-officier et des
tambours et trompette 1 •050
Matériel et frais de bureau 2.500
8.670
8
50 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Assistance publique :
1 médecin des hospices 1.800
1 médecin pour la banlieue 1.200
Subvention pour un cheval 500
1 élève interne 600
1 soeur-économe 600
2 soeurs (lingère et cuisinière) 720
Traitement des malades 25.000
Matériel, chauffage et location de l'immeuble. 7.500
TOTAL 37.920, dont
la moitié seulement à la charge de la commune.
Subvention à l'établissement des orphelins.. 2.000
Dispensaire :
1 économe 1.2001 cuisinière 400
1 infirmière 360Traitement des malades. 12.000
Matériel, chauffage et location de l'immeuble. 3.100
17.060
Instruction publique :
Ecole communale des garçons :
3 frères dont 1 directeur, 1 instituteur adjointet 1 servant, à 750 fr 2.250
Ecole communale des filles :
1 soeur pour l'école 1.2001 soeur pour la salle d'asile. 1.2001 soeur servante 300 2.700Matériel des écoles des frères et des soeurs.. 7.500Subvention et indemnité de logement à l'insti-
tution payante des filles (pensionnat) 1.100
13.550
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 51
Cultes (matériel et location d'immeubles) :
Catholique 5.000Protestant 2.900
Musulman 1.000 8.900
Entretien de tous les bâtiments communauxen ville. 4.000
Les recettes furent votées après les dépenses.Voici les principales
Part dans l'impôt des patentes 1.800Halles et marchés 6.600
Abattoir .. 30.700
Stationnements 1 100
Halle aux grains 4.000
Droits de voirie 1.000
Concessions au cimetière 400
Actes de l'état-civil 60
Amendes de police 1.300
Recettes diverses 1.240
Taxe sur les chiens (rejetée par le Conseil)... »
Le Conseil reprend alors la discussion des dépenses :
Voirie :
1 piqueur 1.300
1 dessinateur 1 •200
2 employés à 1.500 3.000
1 employé 1.200
Matériel et divers 2.000
8.700
Entretien des chemins vicinaux 7.000
» rues 10 000
» égouts et fontaines 6.000
» bâtiments des villages 6.000
Travaux neufs de distribution d'eaux. 100.000
Construction de l'abattoir 110.000
Entretien de l'horloge 300
Eclairage de la ville 18.000
52 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Nettoiement des rues 15.000Frais d'inhumation des indigents 2.000Entretien de la crèche 3.500
Pas d'autres mentions du budget de 1849 sur le registre de déli-
bérations, mais nous trouvons, à la séance du 16 août 1849, le compteadministratif de l'exercice 1848, se soldant ainsi :
En recettes 136.560 fr. 75En dépenses 134.129 » 34
Excédents des recettes.. 2.431 » 41
Le dimanche, 9 juillet 1848, un arbre de la Liberté est planté àStora.
Un arrêté du 9 octobre 1848 fixe à 12 le nombre des conseillers
municipaux à élire. Le 25 janvier 1849, M. le Sous-Directeur desaffaires civiles de l'arrondissement procède à l'installation du nouveauConseil, élu le 30 octobre 1848 :
MM. Peschart Dambly, Alexandre, propriétaire ; Degourgas,Vin-cent, chef de bataillon en retraite ; Moine, Léon, propriétaire ; Bar-neau, Jean-Baptiste, négociant; Denobelly, Adolphe, négociant;Feauroux, Adolphe, négociant ; Bon, Eudoxe, juge d'instruction ;Dobignard, Théodore, limonadier ; Meurs, Clément, inspecteur prin-cipal des bâtiments civils ; Ellul, Jean-Baptiste, négociant ; Nielli,Louis, pharmacien ; Grech, Calcedonio, propriétaire ; Privé, André,notaire ; Ri voire, François, négociant ; Cauro, Dominique, maçon.
M. le Sous-Directeur donne lecture de l'article 6 de l'arrêté duprésident du Conseil chargé du pouvoir exécutif, en date du 19 dé-cembre 1848, qui nomme :
Maire, le citoyen Peschart Dambly.Adjoints pour la section urbaine, les citoyens Privé et Rivoire.
Adjoint pour Saint-Antoine, le citoyen Degourgas.Et pour les territoires de Damrémont et de Valée, le citoyen Moine.
En installant le nouveau Conseil, le sous-directeur prononce letrès intéressant discours suivant :
M. le Directeur des affaires civiles de cette province m'a ordonné de procédersans délai à l'installation du Conseil municipal de Philippeville. Aucun acte nepouvait être exécuté par moi avec une satisfaction plus vive, avec un empresse-ment plus sincère, puisqu'il me donne pour mission spéciale de confirmer dans
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 53
les fonctions municipales ceux-là même qui les remplissaient précédemment etque j'oserai, dès à présent, compter parmi mes amis. N'est-ce pas d'ailleurs pourmoi un juste sujet d'orgueil d'être compris parmi ceux qui ont mission d'inau-gurer sur la terre d'Afrique l'une de nos libertés les plus précieuses, celle quiexerce peut-être l'influence la plus salutaire sur le bonheur des familles, sur lamoralité des individus ?
Aussi, Messieurs, au moment où le Conseil municipal de Philippeville, réguliè-rement constitué, librement élu, va prendre dans l'administration des affaires dela cité le rôle qui lui appartient, j'ai pensé qu'il serait convenable et utile de vous
présenter dans un court exposé le tableau exact de la situation des choses ; de telsretours vers le passé ne peuvent manquer d'éclairer l'avenir.
Reportez-vous, Messieurs, à une époque peu éloignée et qui vit encore dans lesouvenir personnel de plusieurs d'entre vous, celle du 7 octobre 1838, où M. leMaréchal Valée, alors gouverneur général de l'Algérie, venait établir ses bivouacssur les hauteurs qui dominent le cap Skikda. C'était alors une plage déserte, oùse trouvaient seulement, épars au milieu des broussailles et des ruines de l'an-cienne Rusicade, quelques misérables gourbis arabes que le chef de l'Etat-majorde la division paya 150 fr. à leurs propriétaires.
Mais tout aussitôt on se met à l'oeuvre. L'armée et la populatiou, qui arrivaità la suite, déployèrent une activité incomparable. Des établissements militairesde toute nature furent créés ; vous les connaissez tous et il serait superflu d'endonner ici la description. Presqu'en même temps que l'on travaillait à ces édifices,le génie militaire traçait la route qui relie la ville au mouillage de Stora et ouvraitla grande route de Constantine, sans laquelle l'occupation permanente de cette
place eut été sinon impossible, du moins bien difficile.
D'un autre côté, les colons commençaient à construire la ville qui leur étaitouverte et des documents officiels constatent que, dans la seule année 1841, lavaleur totale des constructions s'élevait à plus de 1.200.000 fr. Ce mouvementcontinua ainsi pendant les années suivantes ; il s'est ralenti dans ces dernières
années.
Enfin les progrès furent assez rapides pour que l'administration pût y être or-
ganisée dès 1840. Trois ans après, une sous-direction remplaçait le Commissariat
civil ; avec elle nous avons vu s'établir les services des Ponts-et-Chaussées et des
Bâtiments civils, qui s'associaient à ce mouvement. Vous en avez la preuve au-
jourd'hui dans les travaux considérables qui ont été exécutés ou entrepris depuiscette époque : routes, ponts, égouts, travaux de grande et de petite voirie, phares,
bâtiments des douanes, église, mosquée, poudrière, abattoir.
La population est aujourd'hui de 5.762 habitants en ville, savoir : 4.916 euro-
péens, 756 musulmans, 90 israëlites. Quelques mots sur la population musulma-
ne : son accroissement, son installation sont des objets qui méritent d'attirer
l'attention du Conseil municipal. C'est autour de la mosquée qu'il semble naturel
de chercher à former un quartier, qui serait spécialement habité par les musul-
mans. Beaucoup d'industries, que les arabes de la campagne réclament et dont ils
vont chercher les produits à Constantine et même à Bône, pourraient ainsi se lo-
caliser et attirer dans notre ville un commerce profitable à tous.
Quelques services publics réclament de promptes améliorations. Je citerai, par
54 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
exemple, votre mairie, qui ne peut rester telle qu'elle est aujourd'hui. Le tribunalde lre instance exigeant des agrandissements nécessaires, il devient impossiblede conserver dans ce même local le prétoire de la justice de paix. L'hôpital civildes femmes ne comprend encore que 40 lits ; un projet de bail le porte à 60.
Je ne doute pas, Messieurs, que par la sagesse de vos délibérations, par l'espritde modération qui dirigera vos travaux, enfin par le bon sens pratique qui peutseul assurer le succès des affaires et la prospérité des populations, vous ne par-veniez promptement à améliorer les intérêts qui vous sont confiés, à fixer sur unebase solide des institutions qui n'ont pu encore s'asseoir d'une manière définitive.Pour moi, je serai heureux de pouvoir vous seconder dans cette utile et sérieuse
entreprise.
Le 26 mai 1849, la recette municipale est créée ; son premiertitulaire est M. Brun de Favas, commis à la Trésorerie d'Afrique.Ses successeurs sont : MM. Honoré Fenech, 2 décembre 1864, et
Louis Bertrand, 1er janvier 1895.
Dans sa séance du 14 février 1849, le Conseil désigne pour la pre-mière fois les membres de la Commission chargée de procéder à un
recensement général des contribuables pour l'établissement du rôle
de la taxe sur les loyers en 1849. Sont nommés : les citoyens Privé,1er adjoint; Dobignard, conseiller municipal; Sauzède, négociant;Ollivier, quincailler, débitant de poudre ; Musso, propriétaire. A ces
membres furent adjoints, le 5 avril suivant, les citoyens Allaman,
Rivoire, Claris, Hertz, Austan, Nielli, Barneau, Sacomant, Sider,Marius Réguis, Cauro, Gregh, Annesley, Lavoûte aine, Le Proust
des Ageux. Le Conseil décide ensuite, à l'unanimité, la publicité de
ses délibérations.
Installation, le 5 avril 1849, de deux conseillers nouvellement élus,MM. Coggia et Allaman, et,le 3 décembre 1849, de MM. Denobelly,
Annesley et Ducorps, au titre français, et Ellul, au titre étranger,tous quatre nommés à la suite du renouvellement annuel du tiersdu Conseil municipal.
Séances des 19 et 23 mars 1850. Etablissement de l'impôt sur leschiens. Dans chaque habitation située dans les villages ou en dehorsdes murs d'enceinte, un chien de garde sera exempt de l'impôt ; leschiens de chasse ne pourront pas être considérés comme chiens de
garde.21 octobre 1850. Le Gouverneur général ayant demandé l'avis du
Conseil sur la question du logement chez les habitants des troupesde passage, cette assemblée proteste, les logements étant très restreintsà cause de leur cherté et les habitants se trouvant alors dans l'obli-
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 55
gation de loger à leurs frais les militaires dans les hôtels ou aubergesde la ville.
5 février 1851. Installation de quatre conseillers élus le 12 janvier :MM. Sainte-Colombe, Théophile Réguis, Claris et Nielli.
Par décret du 1er mai 1851, M. Peschart d'Ambly, maire, est nom-mé chevalier de la Légion d'honneur. M. d'Ambly a plus de 30 ansde service (9 ans et 3 mois de services militaires et 21 ans de services
civils). Il a été commandant de la Milice de Bône en 1837 et de
Philippeville de 1840 à 1843. Il est maire depuis le 14 février 1843.
4 août 1851. Le Conseil émet le voeu qu'à l'impôt sur les loyerssoit substitué un impôt sur les fourrages, lequel, à raison de 0 fr. 40de taxe par quintal métrique, permet d'espérer un revenu au moinsdouble de celui que rend la taxe sur les loyers
Séance du 6 août 1851. M. Claris propose au Conseil l'institutiond'une association tontinière communale dans la caisse de laquelle
chaque habitant parvenu aux limites d'âge, ou frappé d'infirmités
prévues par les règlements, toucherait une retraite proportionnée à
la quotité de ses versements, accrus des intérêts composés et des béné-
fices de survie. Il développe sommairement les avantages de cette
institution, dont les principaux seraient :
Pour les déposants :
D'avoir une retraite trois ou quatre fois plus forte que celles qu'ils
pourraient obtenir avec les mêmes dépôts dans les tontines particu-lières ou dans la caisse des retraites pour la vieillesse, ce qui est la
conséquence du taux d'intérêt plus élevé en Algérie et de longévité,moindre en Afrique qu'en Europe.
Pour la commune :
De trouver dans les premiers dépôts de la tontine les fonds néces-
saires à des créations urgentes pour lesquelles elle va être obligéede recourir à des emprunts.
Pour la population :
D'avoir à sa portée un placement avantageux et certain de ses
épargnes et de jouir du roulement constant et régulier de tous les
capitaux provenant de ses économies, lesquels, attirés par les avan-
tages du placement, afflueraient vers la caisse municipale, qui les
rejetterait à son tour dans la circulation.
56 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le Conseil prend cette demande en considération et prie M. Claris
de déposer un projet de statuts et règlement.En vertu d'une décision de M. le Gouverneur Général du 10 jan-
vier 1852, les trois mots : Liberté, Egalité, Fraternité, qui avaient
été inscrits sur la façade de tous les édifices publics, sont partouteffacés.
Une fête publique a lieu le 11 janvier 1852, à l'occasion du vote
sur le plébiscite du Président de là République. L'hôtel de la Sous-
Préfecture se fait remarquer par ses illuminations. Au dehors, des
flammes de Bengale, placées au sommet de colonnes élégammentconstruites, ajoutent à la richesse de la décoration. Les initiales deLouis Napoléon, en lettres d'or, surmontent la porte d'entrée.
14 janvier 1852. Installation de cinq conseillers élus le 28 décembre
1851 : MM. Chirac, Grech, Fenech, Guillemin, Feauroux.Par décret présidentiel du 23 janvier 1852, sont nommés pour 3
années : Maire, M. Peschart d'Ambly; adjoints : MM. Ri voire, De-
lay, Moine, de Gourgas.Séance du 26 mai 1852. En vertu de l'article 5 de l'arrêté du Mi-
nistre de la Guerre du 5 mai, ainsi conçu : « Les maires et adjointsdes localités érigées en communes prêteront serment devant le Conseil
municipal, convoqué à cet effet. Le maire recevra ensuite celui desconseillers municipaux », MM. Peschart d'Ambly, maire, Rivoire,
Delay et Gourgas, adjoints, prêtent le serment suivant : « Je jureobéissance à la Constitution et fidélité au Président. » Même forma-
lité pour les conseillers municipaux, MM. Chirac, Gregh, Ellul,
Guillemin, Sainte-Colombe, de Nobelly, Annesley, Nielli et Claris.
Tous, debout et la main droite levée, répondent successivement àla lecture de la formule de prestation : « Je le jure », sauf M. Ellul
qui, à titre d'étranger et de consul anglais, s'abstient provisoirementjusqu'à ce qu'il ait reçu les instructions de son consul général, auquelil en a référé.
Le mercredi, 26 mai 1852, à huit heures, sur la place de l'Eglise,les officiers des différents corps prêtent serment entre les mains deM. Tarbouriech, colonel, commandant le 3e Zouaves. A leur tour, les
employés d'administration prêtent, le 29 mai, serment entre les mainsdu Sous-Préfet.
M.le Baron Peschart d'Ambly, maire, reçoit,le 22 septembre 1852,la prestation de serment de M. Degand, Jean-François, propriétaireà Valée, nommé adjoint pour les villages Valée et Damrémont.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 57
Dimanche, 12 décembre 1852. Proclamation de l'empire. Pro-
gramme de la cérémonie, arrêté entre le Commandant supérieur ducercle et le Sous-Préfet :
Les autorités civiles et militaires, tous les corps armés : douane, marine ettroupes de terre de toutes armes, seront réunis en grande tenue sur la place de laNouvelle Eglise, dont une partie sera réservée à la population. A 11 heures 1/2,une messe sera célébrée en présence de cette assistance. A midi, un ban sera ou-vert ; les troupes présenteront les armes, le Maire lira le décret de proclamationde l'Empire, le ban sera fermé, un Te Deutn sera chanté et une salve de 101coups de canon immédiatement tirée. Pendant toute la journée, des secours ennature seront distribués à la Mairie et à domicile. Le soir, illumination généraleet réception à la Sous-Préfecture.
Séance du 26 mars 1853. Le maire et les conseillers municipaux
prêtent, dans l'ordre suivant, le serment ainsi conçu : « Je jure fidélité
à Napoléon III, empereur des Français, et obéissance à la Constitu-
tion » : MM. Peschart d'Ambly, maire; Rivoire et Delay, adjoints;Chirac, Gregh, de Nobelly, Sainte-Colombe, Nielli, Claris.
1er décembre 1854. Installation du Conseil municipal réorganisé
d'après les bases du décret du 8 juillet 1854 :
MM. Baron Peschart d'Ambly, maire; Constant Delay, 1er adjoint;
Adolphe de Nobelly, 2e adjoint; Auguste Alby, adjoint de Saint-
Antoine; Chirac; Claris; Allaman; Léon de Marqué; François Pri-
mard ; Louis Nielli ; Calcedonio Gregh, conseillers ; et Toussaint Fabre,en remplacement de M. Poupart, démissionnaire.
Le Baron d'Ambly meurt le 2 mai 1857. Le 8 juin 1858, un monu-
ment funèbre lui fut élevé au cimetière; il est entretenu par la ville.
C'est une colonne sur laquelle on lit l'inscription suivante :
A la mémoire du baron Peschart d'Ambly, Chevalier de la Légion d'honneur,
président de la Chambre consultative d'agriculture, premier Maire de Philippe-
ville, décédé le 2 mai 1857.
Monument élevé par la commune et les souscriptions particulières en vertu
d'une délibération du Conseil municipal, dûment approuvée à la date du 18 mai
1857.
Séance du 24 août 1857. M. Calendini, sous-préfet, installe en
séance publique M. O'Wallet, nommé maire en remplacement de feu
le Baron d'Ambly. Le décret de nomination, signé par Napoléon à
Plombières, le 24 juillet 1857, porte : « M. O'Wallet, Alexandre,
Adolphe, ancien officier de l'armée d'Afrique, commandant la Milice
58 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
de Constantine, propriétaire à Sétif. » Après la prestation de serment
de M. Wallet, le Sous-Préfet prononce l'allocution suivante :
Monsieur le Maire,
Le gouvernement de l'empereur vous a appelé à la première magistrature de lacité. Les services que vous avez rendus, soit dans les rangs de l'armée, soit endotant le pays d'utiles travaux, nous sont un sûr garant du dévouement dontvous ferez preuve pour justifier cette marque de haute confiance.
En vous inspirant des besoins du pays, votre tâche sera d'autant plus facile
que vous trouverez, dans l'expérience des hommes honorables qui composentvotre Conseil, une assistance aussi sûre que dévouée. Il est inutile de vous dire
que le concours de mon administration ne vous fera jamais défaut. Bien que cetteville ne date, pour ainsi dire, que d'hier, elle a marché à grands pas dans la voiedu progrès. On s'étonnerait, en effet, qu'elle fut arrivée à une telle prospérité sil'on ne savait de quel énergique dévouement est douée notre population, dont lesefforts courageux formeront une des pages les plus intéressantes de notre histoire
algérienne. Cependant il reste encore beaucoup à faire.Votre sollicitude doit avant tout s'attacher à doter la ville de bornes-fontaines
en rapport avec ses besoins. Les égouts publics sont incomplets. Le systèmed'éclairage doit être modifié. Le Conseil a déjà voté les fonds nécessaires pour laconstruction du Collège, mais il reste à construire une salle d'asile, des écoles
pour les enfants des deux sexes, enfin un hôtel-de-ville.Je suis convaincu d'avance que rien de tout ce qui peut contribuer à la prospé-
rité de la cité n'échappera à votre sollicitude.
31 décembre 1857. Installation du Conseil municipal :
MM. O'Wallet, maire; Delay et de Nobelly, adjoints; PhilippeAlby, adjoint de Saint-Antoine; Arnol, adjoint de Valée et de Dam-
rémont; Grémilly, capitaine de la santé, adjoint à Stora; Chirac, de
Marqué, Primard, Cullerre, Fabre, Nielli, Gregh, conseillers.
Séances du 10 mai 1858 et du 10 janvier 1859. Voeu pour que lemarché de Saint-Charles soit transféré à Philippeville sur la placedes Chameaux et ait lieu tous les mercredis. L'autorité supérieureayant rejeté le transfert demandé, le Conseil propose, le 9 mai 1859,la création d'un marché hebdomadaire le samedi. Par décision duConseil général du 7 mai 1903, un marché aux bestiaux a été créé à
Philippeville. Il se tient sur la place de la Halle aux Grains le jeudiet a été inauguré le 16 juillet 1903.
Séance dn 27 janvier 1859. Le Maire communique au Conseil unelettre du Sous-Préfet, portant notification officielle du mariage deS. A. I. le prince Napoléon, chargé du ministère de l'Algérie et desColonies. Ce fonctionnaire invite le Conseil municipal à voter uneadresse de félicitations à S. A. I. à l'occasion de son mariage.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 59
Le Conseil, heureux de pouvoir témoigner en cette circonstancesa profonde reconnaissance pour la sollicitude avec laquelle lé princeNapoléon s'occupe des intérêts de l'Algérie, accueille avec empresse-ment l'invitation qui lui est faite et vote, à l'unanimité, l'adressesuivante qu'il prie le Maire de faire parvenir à S. A. I. par la voie
hiérarchique :
Prince,
Depuis quelques mois à peine, la sagesse de S. M. l'Empereur vous a confié lesdestinées de l'Algérie et déjà de grandes mesures, des améliorations sensiblessont venues prouver avec quelle sollicitude incessante vous vous occupez des be-
soins, des intérêts et de l'avenir du pays..D'autres projets, en tête desquels se placent naturellement les chemins de fer,
si impatiemment attendus, attirent, nous le savons, toute votre attention.Vous comprendrez dès lors, Prince, les sentiments de profonde reconnaissance
qui dictent les félicitations que nous vous adressons aujourd'hui, tant au nom duConseil municipal que de tous les habitants de la commune de Philippeville, àl'occasion de votre mariage avec la princesse Marie-Clotilde de Savoie.
Cette union sera pour votre Altesse impériale, ainsi que pour la Princesse, votre
auguste fiancée, la source d'un bonheur complet, si Dieu exauce les voeux quenous formons du fond de notre coeur.
Séance du 16 mai 1859.
Le Maire donne lecture d'une lettre du Préfet, par laquelle ce haut
fonctionnaire demande l'avis des conseillers municipaux sur le projetde mettre à la charge des communes les frais de traitement des ma-
lades dans les hôpitaux, en leur abandonnant le cinquième réservé de
l'octroi de mer. Le Conseil, considérant que le chiffre de la popula-tion flottante de notre ville est hors de proportion avec celui des
autres villes de la province; que cela tient à sa position exception-nelle comme point d'embarquement et de débarquement ; considé-
rant, dès lors, que si l'on attribuait une subvention établie sur les
mêmes bases que celles des autres villes, la somme qu'elle recevrait
ne suffirait pas pour la couvrir des dépenses nouvelles que l'on met-
trait à sa charge et qui se solderaient par un déficit que l'on peutévaluer, dès à présent, à près de 30.000 francs ; ajourne sa délibé-
ration jusqu'au moment où il connaîtra le chiffre de la subvention
que l'administration supérieure attribuera sur le 1/5e de l'octroi de
mer.
Séance du 7 juillet 1859. Vote d'une adresse à l'empereur à l'occa-
sion des succès de l'armée française en Italie ; puis le Conseil, consi-
dérant que les communes ne sauraient s'imposer trop de sacrifices
60 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
pour alléger les souffrances causées par les nécessités de la guerre,décide : 1° qu'il sera fait appel à la population pour que tous, riches
et pauvres, apportent leur offrande; 2° que la commune s'inscrira
en tête de la liste pour une somme de mille francs.
Séance du 18 août 1859. Mêmes décisions pour la réception des
troupes revenant d'Italie, mais la quote-part de la ville est de 2.500
francs.
Séance du 3 août 1860. Voeu ayant pour but qu'une députation
composée du maire et de deux conseillers municipaux soit autorisée
à aller à Alger déposer aux pieds de S. M. l'Empereur les sentiments
de profonde gratitude de la population entière.
4 février 1861. Installation du Conseil municipal :
MM.O'Wallet, maire; Delay et de Nobelly, adjoints; de Gourgas,
adjoint de Saint-Antoine; Arnol, adjoint de Damrémont et de Valée;
Grémilly, adjoint de Stora; Chirac, Allaman, Primard, Nielli, Gregh,Toussaint Ricoux, de Boisson et Cullerre, conseillers. M. le Vicomte
de Gantés, sous-préfet, prononce un discours, dont nous extrayonsles passages suivants :
Un Conseil municipal est la première et la dernière expression de la civi-lisation moderne ; il est le premier et, par suite, le plus solide degré de cettecentralisation si forte, si homogène et si intelligente en même temps, qui composecet être collectif si grand, si puissant, si glorieux et si harmonieux qu'il est im-mortel et que les peuples appellent la France. Cette France, nous la continuons
ici, Messieurs ; son épée, que tant de vaillantes mains ont portée sur cette terre
redoutée, a fait place pour nous à des villes nouvelles, à des municipes nouveaux.
Quand nos infatigables soldats trouvaient dans ces contrées conquises quelques-unes de ces ruines qui attestent les grandeurs du passé, ils s'y arrêtaient avec un
mystérieux intérêt, comme s'ils devaient rencontrer des souvenirs de famille, etleurs généraux disaient : Nous revendiquons la succession des légions des Césars.Partout où se posera le pied de la France, les cités romaines renaîtront.
Le 9 mai 1863, le Conseil émet le voeu que, vu les difficultés de
recouvrement des impôts de taxes de loyers et des prestations, ces
impôts soient supprimés et remplacés par une augmentation de droitssur l'octroi de mer.
13 mai 1863. Le Conseil émet le voeu que les communes de l'Algériesoient assimiliées à celles de la Métropole, en ce sens que les fonctionsde maire soient purement honorifiques et qu'il n'y soit attaché aucuneindemnité.
Séance du 13 avril 1864. M. Nouvion, sous-préfet, accompagné de
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 61
M. Laroque, secrétaire de la Sous-Préfecture, installe le nouveauConseil, ainsi composé :
MM. Wallet, maire; Delay, de Nobelly, adjoints; de Gourgas,Arnol, Grémilly, adjoints des annexes; Chirac, Allaman, Primard,Nielli, Gregh, Ricoux, de Boisson et Teissier, conseillers.
L'arrêté préfectoral du 5 avril 1864, nommant les conseillers mu-nicipaux et signé Lapaine, porte, après la liste nominative de cesconseillers : « Ces nouveaux fonctionnaires devront, avant leur ins-tallation, prêter le serment prescrit par la loi, » c'est-à-dire : « Je jureobéissance à la Constitution et fidélité à l'Empereur. »
Le 11 août 1867, installation par le Sous-Préfet du Conseil muni-
cipal élu les 26 mai et 2 juin précédents.Membres au titre français : MM.Wallet, Castel-Dugenet, Grémilly
pour Stora, baron deMareuil pour Valée, Giraud-Billioud pour-Dam-rémont, Content, de Gourgas, Daruty, Henri Teissier, de Boisson, de
Bouyn ; Fraisse pour Saint-Antoine. Membre au titre israélite :M. Isaac Bensimon. Membre au titre musulman : M. Tahàr ben Em-barek. Membres au titre étranger : MM. Nielli, Frédéric Sider,Gregh, Sierzputowski.
Le Sous-Préfet donne lecture du décret impérial du 17 juillet pré-cédent, nommant pour une période de cinq années : MM. Alexandre
Wallet, maire ; Castel-Dugenet, Henri Teissier, adjoints ; Grémilly,de Gourgas, Degand, adjoints pour Stora, Saint-Antoine et Valée.Chacun des membres du Conseil présents, debout et la main droite
levée, jure obéissance à la Constitution et fidélité à l'Empereur.Le 21 août 1867, le Conseil, considérant qu'il est nécessaire que
les populations soient exactement tenues au courant des discussions
du Conseil qu'elles ont élu, décide que les journalistes seront invités
à prendre copie des procès-verbaux de ses délibérations et à les
publier. Le Préfet fit connaître qu'il ne s'opposait pas à la publi-cation officieuse dans les journaux, sous leur responsabilité, mais
qu'il se verra, à son grand regret, obligé de refuser sa sanction à
toute délibération contenant les noms des opinants. Dans la séance
du 4 octobre 1867, MM. de Gourgas, Daruty, Content et d'autres
conseillers pensent qu'il y a erreur de rédaction dans la dépêche pré-fectorale; MM. Grémilly et de Mareuil voient dans cette résolution
un acte de tyrannie. Le Conseil, ne pouvant admettre une pareille
décision, prie, à l'unanimité, le Maire de demander au Préfet l'article
de la loi sur lequel il se base. L'affaire n'eut pas de solution.
62 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le 9 décembre 1869, M. Charles Pozzo di Borgo prête le serment
d'usage en qualité d'adjoint spécial au poste de Stora, pour remplirl'intérim de M. Grémilly, en congé.
Le 9 mai 1870, le Maire installe, avec l'autorisation du Sous-Préfet,les six conseillers élus les 16, 17, 23 et 24 avril, à la suite de démis-
sions, savoir : MM. Félix Daruty, Jules Riondel, Lucien Teissère,Robert Calendini, Jules Nielli, Antoine Bruno. Après le serment
habituel, M. Daruty est nommé 2e adjoint.Dans sa réunion du 20 mai de la même année, le Conseil refuse
de discuter une adresse de félicitations au Chef de l'Etat, présentée
par le Maire, à l'occasion de l'attentat auquel le souverain vient
d'échapper.Séance du 11 juin 1870. Le Conseil remercie M. Gay, ingénieur en
chef des Ponts et Chaussées, qui fait don à la commune du montantdes honoraires qui lui sont dus pour divers travaux communauxexécutés sous sa direction, soit 4.949 fr. 90.
Séance du 10 juillet 1870. Considérant qu'aux Conseils municipauxseuls doit appartenir le droit d'établir souverainement le budget des
communes, le Conseil émet le voeu que les communes soient éman-
cipées de la tutelle administrative, sauf les cas d'emprunts ; émet,en outre, le voeu que le mandat des conseillers municipaux soitlimité à trois ans et que les maires soient nommés par le suffrageuniversel.
Séance du 5 septembre 1870. M.Wallet, maire, ouvre la séance et
s'exprime en ces termes :
En présence du changement de Gouvernement qui vient d'avoir lieu, j'ai cru demon devoir, Messieurs, de vous convoquer extraordinairement pour aviser aux
exigences de la situation. Nommé par l'Empereur, dont le pouvoir a cessé d'exister,je viens déposer entre vos mains ma démission de maire, mais je reste parmi vouscomme conseiller municipal, tenant ce mandat du suffrage universel.
M. Castel-Dugenet prend provisoirement la présidence du Conseil,
qui décide de conserver l'administration des affaires jusqu'à ce qu'ilait été statué autrement. Une adresse d'adhésion à la République est
envoyée au Gouvernement provisoire. Elle est ainsi conçue :
Le Conseil, à l'unanimité, salue de ses acclamations l'avènement heureux de la
République, à laquelle il offre le concours de son entier dévouement.
Puis, vu la démission de M.Wallet, l'assemblée procède à la nomi-nation de son président au scrutin secret. Obtiennent : MM. Teissère,7 voix; de Mareuil, 3 voix. En conséquence, M. Teissère est élu et
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 63
prend place au fauteuil. Le Conseil confirme dans leurs fonctions
d'adjoints MM. Castel-Dugenet, Daruty, Fraisse, Giraud-Billioudet Degand.
Le Commissaire de police, appelé, promet son concours le pluszélé pour maintenir le bon ordre, s'il venait à être troublé. M. Riondel,membre du Conseil et commandant la Milice, offre de son côté sonentier dévouement pour tout ce qui peut avoir trait à ses fonctions.Puis l'assemblée décide que les conseillers municipaux de la ville seréuniront jusqu'à nouvel ordre tous les jours à deux heures.
Le surlendemain, 7 septembre, M. Wallet fait connaître au Conseil
qu'en présence de la dépêche du 6, qui confirme provisoirement les
pouvoirs des autorités actuelles, il croit devoir reprendre sa démis-sion et rentrer dans ses fonctions de maire.
Le 12, M. Wallet dit au Conseil qu'il vient d'être invité par lePréfet à le réunir extraordinairement pour procéder à l'élection dumaire et des adjoints, qui devront être pris dans le sein du Conseil.
Résultats du scrutin : M.Teissère, maire; MM. Calendini et Content,
adjoints de la ville; MM. Grémilly, de Mareuil, Fraisse, Giraud-Bil-
lioud, adjoints pour Stora, Valée, Saint-Antoine, Damrémont.
Séance du 27 septembre 1870. Le Maire donne lecture d'une lettre
de M. Wallet, datée de la veille, par laquelle ce conseiller annonce
qu'il a repris du service pendant la durée de la guerre et qu'il ne
pourra plus assister aux réunions du Conseil. Cette assemblée exprimeà M. Wallet combien il regrette d'être privé de son concours et de
son expérience en ce moment, mais les fonctions militaires qu'il a
acceptées étant incompatibles avec celles de conseiller municipal, il
y a lieu de le considérer comme démissionnaire.
Le 7 novembre 1870, le nouveau Conseil municipal élu se réunit
pour procéder à l'élection du maire et des adjoints. Il est ainsi composé :
MM. Riondel, Giraud-Billioud, Fortuné Réguis, Teissère, Tour-
nîer, Paulo, Suire, de Chabannes, Alexandre Ricoux, Bonnot,Hauet,
Cauzon, au titre français; Nielli, Sider, Sierzputowski, François
Grima, au titre étranger; El-Hadj Mohamed ben Zrouda, au titre
musulman; Nahon, au titre israélite. M. Lucien Teissère, maire, est
démissionnaire des fonctions de maire. Résultats du scrutin : maire,
M.Riondel; 1eradjoint, M.Réguis; 2e adjoint,M. Alexandre Ricoux;
adjoint de Stora, M. Tournier; adjoint de Damrémont, M. Giraud-
Billioud; adjoint de Saint-Antoine, M. Fraisse; adjoint de Valée,
M. Degand; ces deux derniers pris en dehors du Conseil.
64 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
MM. Bonnot et Cauzon sont nommés, le 23 novembre, adjoints de
Valée et de Saint-Antoine, en remplacement de MM. Degand et
Fraisse, choisis en dehors du Conseil.
Séance du 3 février 1871. M. Teissère, conseiller municipal, a
demandé au Conseil, le 23 novembre 1870, un congé de dix jours
pour terminer la liquidation de la Sous-Préfecture, dont il est chargé
par intérim et qui doit être supprimée; soixante-dix-sept jours se
sont écoulés depuis. Bien que M. Teissère abandonne ses appointe-ments de Sous-Préfet au profit de la Défense Nationale, le Conseil
l'invite à venir reprendre sa place de conseiller, faute de quoi il sera
considéré comme démissionnaire.
Le 13 du même mois, le Conseil, considérant que les étrangerssont exclus des Conseils généraux, proteste contre leur admission
dans les Conseils municipaux et prie le Sous-Préfet de demander au
Commissaire extraordinaire que cette mesure soit appliquée aux
prochaines élections.
Le Conseil nouvellement élu se réunit, le 27 février 1871, pour
procéder à l'élection du maire et des adjoints. Il est ainsi composé :
MM. Riondel, Giraud-Billioud, Réguis, Alexandre Ricoux, Suire,
Salichon, Mourre, Bonnot, Calendini, Content, Fraisse, Primard,
Daruty, Hauet, conseillers français. MM. Sierzputowski, Attard,
Schembri, étrangers; Ahmed ben Saîd, musulman. Sont élus :
MM. Théophile Réguis, maire; Alexandre Ricoux, 1er adjoint;Louis Content, 2e adjoint; Salichon, Fraisse, Giraud-Billioud, adjointsde Valée, Saint-Antoine, Damrémont.
A. la suite de la démission de MM. Calendini, Riondel, Primard,
Daruty, Sierzputowski, Schembri, Attard et Fraisse et du décès de
M. Content, le Conseil est réduit à neuf membres sur dix-huit. Le
Préfet, M. Roussel, considérant qu'en présence du court espace de
de temps qui doit s'écouler d'ici aux élections générales, il est inop-
portun de convoquer les électeurs, prend, le 26 juin 1871, un arrêté
nommant une Commission municipale, qui fut installée le 30 par le
Sous-Préfet :
MM. Teissère, président; Riondel, adjoint; Fraisse, Etienne
Degand, Bessières, adjoints à Saint-Antoine, Valée, Damrémont;
Mourre, Piquepé, Grimaud, Rouden, Durrieu, Louis Faure, Alle-
mand, Nielli, Mahmoud ben El-Nyar, membres.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 65
Conformément à la dépêche du Sous-Préfet du 20 novembre 1871,le Conseil nouvellement élu se réunit le 21, sous la présidence deM. Mourre, pour procéder à l'élection, à titre de voeu, du maire etdes adjoints. En voici la liste :
Maire : M. Réguis ; 1er adjoint : M. Alexandre Ricoux ; 2e adjoint :M. Mourre; adjoints de Valée, Saint-Antoine et Damrémont: MM.
Salichon, Robe, Giraud-Billioud; conseillers français : MM. Hauet,Génin, Faure, Suire, Cauzon,Bonnot, Guide; conseillers étrangers etmusulman : MM. Sierzputowski, Cerrutti, Schembri, Bagur, Ali ben
Belkassem.
Le Préfet demandant aux Conseils municipaux de voter d'urgencele budget de 1872, le Conseil, considérant, le 6 décembre 1871, quel'autorité s'est réservé le droit de nommer les maires et les adjoints,décide qu'aucune affaire ne sera traitée avant cette désignation.
Le 9 décembre, le nouveau Conseil se trouve installé sans modi-
fications, le Ministre de l'Intérieur ayant approuvé les présentationsfaites par la municipalité.
Séance du 8 avril 1874. A la suite de la démission, en date du 7,
de MM. Réguis, Alexandre Ricoux, Bouchy, Faure, Génin, Salichon,
Pellet, Bonnot, Giraud-Billioud, Catherineau, Lhote, et de la démis-
sion antérieure de M. Debono, le Conseil se trouvant réduit à six
membres sur dix-huit, M. Desclozeaux, préfet, prend, le 8 avril, un
arrêté prononçant la suspension du Conseil et nommant une Com-
mission municipale, qu'il vient installer le même jour. Elle est ainsi
composée : MM. Wallet, maire, nommé à ces fonctions par décret,
signé à Versailles le 16 mars 1874, par Je Maréchal de Mac-Mahon,
ce qui avait motivé la démission d'une grande partie du Conseil ;
Mourre, adjoint; Fraisse, adjoint de Saint-Antoine; Carrey, adjointde Valée et de Damrémont; Laplanche, Colombini, Pégat, Sierzpu-
towski, Schembri, Barbaroux, Ali ben Belkassem.
Par décision du 9 mai suivant, lé Gouverneur prononce la suspen-sion pour un an de l'ancien Conseil.
Voeu du 11 novembre 1874. Considérant que les intérêts des an-
nexes ne sauraient être mieux représentés que par un des habitants
de la localité même, le Conseil émet le voeu qu'à l'instar de certaines
localités du département, il soit accordé aux habitants des villages
Valée, Damrémont et Saint-Antoine la faveur d'élire, au scrutin in-
dividuel, leur représentant au Conseil municipal.10
€6 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Séance du 4 janvier 1875. En vertu des pouvoirs qui lui sont
conférés par le Préfet, M. Wallet, maire, installe le nouveau Conseil :
MM. Vallet, maire; Mourre, 1er adjoint; Lhote, Schelbaum, Le-
maire, Catherineau,Génin, Suire.Giraud-Billioud, Salichon, Bouchy,Noël; Sierputowsk'i,Schembri,Chalon, Pellet, Faure, Masson, Ahmedben Saïd. .
Séance du 24 mars 1875.Voeux à présenter au Gouverneur général',lors de son passage :
1° Achèvement du port et son classement comme port militaire ;2° Débarquement et embarquement des troupes ici ou à Stora ;3° Création de centres agricoles entre Philippeville et Gollo, Phi-
Jippeville et Filfila;4° Rétablissement du magasin des tabacs ;5° Mouillage dans la rade de Philippeville de l'escadre de la Médi-
terranée;6° Construction d'un tribunal de première instance, d'une gendar-
merie et d'une prison ;7° Responsabilité collective des tribus en matière de vol;8° Exécution par la Compagnie du chemin de fer d'un certain
nombre d'aqueducs pour, l'écoulement des eaux qui, faute d'issues,séjournent plusieurs jours dans la plaine du Zéramna, toutes les fois
que surviennent des inondations ;9° Création d'un tribunal de commerce;10° Agrandissement du périmètre de la ville par la suppression des
fortifications ou le reculement des remparts ;11° Création de lignes ferrées entre Constantine, Sétif et Batna ;12° Transport par tous les bateaux à vapeur des dépêches entre la
Métropole et la Colonie et vice-versa ;13° Concession à la commune, pour l'agrandissement de son mar-
ché couvert, d'un terrain dépendant du domaine du Génie ;14° Concession à la commune d'une maison contigue au collège
pour l'installation de son musée.
Par décret du 8 mai 1875, le Président de la République nomme
adjoints au maire : MM. Lhote, au chef-lieu; Etienne Degand, à
Valée; Carrey, à Damrémont; Fraisse, à Saint-Antoine; Ali ben
Belkassem, adjoint indigène.La nouvelle loi municipale retirant leurs fonctions aux maires et
adjoints nommés en dehors des Conseils municipaux, M. Wallet
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 67
remet, le 25 août 1876, ses pouvoirs entre les mains de M. Lhote,1er adjoint, et, en son absence, à M. Pellet, 2e adjoint.
Le 5 mars 1877, le Sous-Préfet installe le maire et les adjointsnommés par décret présidentieldn6 février 1877, savoir : MM. Lhote,
Alphonse, maire; Legris, 1er adjoint; Vellard, 2e adjoint; Giraud-
Billioud, adjoint à Damrémont; Degand, adjoint à Valée; Collenot,
adjoint à Saint-Antoine.
Séance du 1er février 1878. Le Sous-Préfet installe le Conseilnouvellement élu et ainsi composé : MM. Collenot, Merle, Vellard,Nielli, Lyanna, Legris, Vinel, Alexandre Ricoux, Réguis, Genoux,
Giraud-Billioud, Estienne, Catherineau, conseillers français ; Chalon,
Taboni, Pina, Schneider, conseillers au titre étranger; Ali ben Bel-
kassem. M. Lhote ayant résigné ses fonctions de maire, M.Alexandre
Ricoux accepte de les remplir provisoirement.Le 6 avril suivant, le Sous-Préfet installe la nouvelle municipalité,
nommée par décret présidentiel du 12 mars : MM. Alexandre Ricoux,
maire; Jean-Baptiste Merle, 1er adjoint; Vellard, 2eadjoint; Giraud-
Billioud, Collenot, Constant Vinel, adjoints de Damrémont, Saint-
Antoine, Valée.
Le 4 septembre 1878, le Conseil adresse à Madame Thiers la dé-
pêche suivante :
Le Conseil municipal, à l'occasion de la mort de notre grand patriote M. Thiers,le premier président, fondateur de notre 3e République, a l'honneur de vous expri-mer les vifs sentiments de reconnaissance et d'admiration pour la mémoire de
l'illustre défunt et de notre sincère sympathie pour vous.
Séance du 12 avril 1879. Les membres du Conseil, assistés d'un
nombre égal des plus imposés, se réunissent pour donner leur avis
sur le projet d'érection du village Valée en commune de plein exer-
cice. Etaient présents : MM. Alexandre Ricoux, maire, président;
Merle,Vellard, Daniel, Giraud-Billioud,Vinel, Paysant, Catherineau,
Lyanna, Chalon, Schneider, Pina, Ali ben Belkassem, conseillers
municipaux ; Lesueur, Brochini, Schmitt, Nielli père, Jules Nielli,
Gardetto, Rambert, Herrouet, Frédéric Sider, Schiaffino, les plus
imposés. Etaient absents : MM. Amédée Nielli, Estienne, Genoux,
Taboni, conseillers ; Kraft, de Marqué, Henri Teissier, Aquadro père,
Ferdinand Pujol, Comte Landon de Longeville, les plus imposés. A
la majorité de 12 voix contre 11, l'érection projetée est rejetée.
Le 23 janvier 1881, le Sous-Préfet installe le Conseil nommé à la
suite des élections des 9 et 16 janvier, savoir : MM, Davet, Genoux,.
68 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Nielli, Monnier, Kayser, Sardon, Pina, Paysant, Paul Catherineau,
Vellard, Degand, Rambert, Gaston, conseillers français ; Chalon,
Sultana, Portelli, Taboni, conseillers étrangers ; Ali ben Belkassem.
Le 16 avril, il installe le maire et les adjoints nommés par décrets
des 24 février et 1er avril : MM. Vellard, maire; Amédée Nielli, 1er
adjoint; Julien Sardon, 2e adjoint; Degand, Paysant, Jean-BaptisteRambert, adjoints de Valée, Saint-Antoine, Damrémont.
Dans sa séance du 19 mai 1881, le Conseil donne un avis favorable
au rattachement du hameau de Bou-Fernana (Bissy) à la commune,à la condition que les 733 hectares de terres et forêts domaniales
du territoire à rattacher soient concédés à la ville.
Séance du 23 février 1882. Voeux à présenter au Gouverneur gé-néral, lors de son passage, le 24 février :
1° Modifications à l'arrêté de concession des sources du Filfila ;2° Dotation en faveur de l'hôpital civil ;3° Concession de terrains dans le quartier Est;4° Augmentation de l'effectif de la garnison ;5° Création d'une gare à Damrémont;6° Séjour de l'escadre de la Méditerranée dans le port ;7° Suppression des servitudes militaires ;8° Déclassement des communaux ;9° Concession des terrains conquis sur la mer;10° Concession des terrains militaires avoisinant la rue de Car-
thage;11° Visite, par les agents communaux, des moutons exportés.
Séance, du 13 mars 1882. Un crédit de 6.000 fr. ayant été mis àla disposition de la Commission désignée par le Conseil pour étudier
les questions se rattachant aux travaux publics et d'embellissement
de la ville, elle arrête ainsi la liste du ces travaux :
1° Agrandissement de la place de Marqué, qui devrait être reportéeà plusieurs mètres en avant, avec rampes sur arcades, dans le genredu boulevard de la République à Alger ;
2° Achèvement du théâtre par la construction d'un foyer, d'unbâtiment pour l'administration et de galeries extérieures ;
3° Clôture du cimetière par un mur ;4° Ouverture de la rue de Carthage;5° Travaux de voirie dans les hauts quartiers Ouest ;6° Suppression des remparts Sud et Ouest, ou leur report ;
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 69
7° Création d'un square sur la place de la Halle aux Grains ;8° et 9° Construction d'une école de garçons et d'une école de
filles ;10° Achèvement des constructions du collège;11° Aménagement du théâtre romain et création d'un square
avoisinant;12° Construction d'une justice de paix ;13° Travaux de voirie et construction d'égouts au faubourg ;14° Couverture de l'égout collecteur dans la plaine ;15° Construction de bouches d'égouts et de caniveaux ;16° Construction d'un bassin réservoir de 20.000 mètres cubes
d'eau au Skikda ;17° Aménagement des citernes romaines sous le théâtre ;18° Création d'une promenade publique sous l'hôpital militaire ;19° Aménagement de la place de l'Eglise ;20° Agrandissement ou changement de l'abattoir.
Dans sa séance du 3 juillet suivant, le Conseil adjoint à cette
Commission six habitants pris en dehors de cette assemblée : MM.
de Boisson, Delay, Comte Landon, Lesueur, Blanchet, Lhote.
A la suite des élections partielles des 14 et 21 mai 1882, les nou-
veaux conseillers élus sont installés par le Maire le 28 mai, puis il
est procédé à la nomination de la municipalité. Le Conseil se trouve
ainsi constitué :
MM. Réguis, maire; Dr René Ricoux, 1er adjoint; Joseph Pina,2e adjoint; Jules Nielli, Rambert, Gaston, adjoints de Valée, Dam-
rémont, Saint-Antoine; Degand, Paul Catherineau, Genoux, Calen-
dini, Vellard, Gauthier, Bourgeois, conseillers français ; Chalon,
Sultana, Taboni, Portelli, conseillers étrangers ; Ali ben Belkassem.
18 mai 1884. Installation par M. Réguis, maire, du Conseil élu les
4 et 11 mai. Il est procédé à la nomination du maire et des adjointset le Conseil se trouve ainsi composé : MM. Robert Calendini, maire,Dr Ricoux, 1er adjoint; Pina, 2e adjoint; Jules Nielli, Rambert,
Amédée Prax, adjoints de Valée, Damrémont, Saint-Antoine; Gas-
ton, Gauthier, Genoux, Réguis, Allemand, Couderc, Delsol, Le Gi-
gan, Haugade,Lalliermonet,Lecorgne,Marius, Massonipère, Mayeux-
Doual, Moreau, Léon Pignon, Rebière, Rivière, Rossi, Tuduri,Vé-
ron.
A la suite de la démission de M. Calendini, M. le Dr Ricoux, 1er
70 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
adjoint, est élu maire le 13 décembre 1884. Le 19, M. Pina est élu
1er adjoint et, le 23, M. Lalliermonet, 2e adjoint.Le 14 juillet 1887, M. le Dr Ricoux, maire et ancien conseiller
général, est nommé chevalier de la Légion d'honneur.
Le 20 mai 1888, il est procédé à l'installation du Conseil élu les
6 et 13 mai: MM. Vellard, maire; Auvergne, 1er adjoint; Germaix,2e adjoint; Massoni, Sault, Bertin, Pina, Laurent Merle, Gauthier,Dr Ricoux, Julien Catherineau; Genoux, Gaston, de Valicourt, Guide,
Lalliermonet, Demay, Robert, Frédéric Chiarelli, Henri Ranoux,
Guyard, Justin Auméran, Bourgeois, Magnière, Moyne,Thiriet père,Pierson, Louis Fenech, Raymond, Ali ben Belkassem, Brahim ben
Saad. Le 27 du même mois, sont nommés adjoints de Valée, Dam-
rémont, Saint-Antoine, MM. Guide, Gaston, Demay.Séance du 15 mai 1892. Installation des conseillers élus le 1er mai
et nomination de la municipalité : MM. Dr René Ricoux, maire;Laurent Merle, 1er adjoint; François Gauthier, 2e adjoint; Lafon,Amédée Prax, Jules Nielli, adjoints de Valée, Saint-Antoine, Dam-
rémont ; Joseph Pina, Dr Kayser, Lalliermonet, Pedemonte, Benoît
Feuille,Véron-Bellecourt, Saingery, Alexandre Aquadro, Hippolyte
Haugade, Marius Robert, Mazières, Rivière, Villeneuve, AlphonseBonnot, Pierre Germain, Lecorgne,Vincent Bianco, Mayeux-Doual,Lachaussée, Alfred Hontebeyrie, Pierre Paoli, Pertus, Eugène
Clayette, Sicre.
M. Théophile Réguis meurt le 7 juin 1892. L'un des plus anciens
habitants de notre cité, cet homme de bien fut placé deux fois à la
tête des affaires municipales. Simple autant que bon, il fut, en 1848,à l'établissement du suffrage universel, élu par ses concitoyens au
Conseil municipal. Les députés de l'époque, Emile Barrault, Henri
Didier, Ferdinand Barrot faisaient avec lui commerce d'amitié, ap-
préciant sa valeur et son influence. Quand l'annonce du coup d'Etat
de 1851 parvint en Algérie, Théophile Réguis ne fut pas le dernier
à protester au nom de la loi violée et il donna avec éclat sa démission
de conseiller municipal. Au plébiscite de 1870, il était à la tête du
parti républicain, toujours jeune, toujours convaincu. Ses concitoyensne l'oublièrent pas et lorsque le suffrage universel fut appelé à élire
les conseillers généraux, il fut choisi pour représenter Philippevilleau sein d'une assemblée départementale qui ne siégea jamais. Pen-dant l'époque troublée de l'insurrection de 1871-1872, M. Réguis,alors maire, donna toute la mesure de sa force d'esprit et de caractère ;
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 71
il avait déjà atteint sa soixantième année, âge du repos ou de l'indif-
férence pour tant d'autres.
Les années de calme suivirent et jusqu'en 1874 il resta à la mairie,administrateur prudent comme il avait été homme d'action. La
confiance et l'amour de ses concitoyens lui eussent longtemps encore
conservé son mandat; il fut brisé par les hommes de l'ordre moral.
Il rentra dans la vie privée sans protestations, sans regrets, ayant
pour lui la conscience d'avoir été à la hauteur de sa tâche. En 1882,il céda à un nouvel appel fait à son patriotisme et, pendant deux
années, il resta à la tête de la municipalité.Telle fut, à grands traits, cette existence bien remplie, consacrée
toute entière à la France et à la République. Les honneurs qui avaient
été le chercher, qu'il n'avait pas sollicités, n'ont jamais troublé la
sérénité de son esprit; il resta toujours l'humble commerçant acces-
sible à tous, le chef bienveillant, l'époux modèle et l'ami sûr et dé-
voué.
Le 25 juin 1894, le Conseil adresse la dépêche suivante à M. le
Président du Conseil des Ministres :
Conseil réuni en séance publique, aussitôt que la nouvelle lui est parvenue de
l'attentat dirigé contre M. Carnot, président de la République, s'associe aux sen-
timents de douloureuse réprobation que ressent la France toute entière, exprimeson attachement inébranlable aux institutions républicaines, insiste auprès du
Gouvernement pour qu'il prenne les mesures les plus énergiques contre les tenta 1
tives criminelles qui menacent la Société et décide, à l'unanimité, que le square
principal de la ville, dit Square de l'Eglise, prendra le nom de Square Sadi-Carnot.
Séance du 26 août 1894. Installation du Conseil élu les 12 et 19
août : MM. Dr Ricoux, maire; Edouard Blain, 1er adjoint; Blondeau,
2e adjoint; Jules Nielli, Lafon, Jules Chabassière, adjoints de Dam-
rémont, Valée, Saint-Antoine ; DrKayser, Pedemonte, Marius Robert,
Rivière, Mayeux-Doual, Pierre Paoli, Louis Godard, Gustave Mau-
rin, Bresson, de Bouyn, Laugier, Pottier, Paul Rossi, Bourdages,
Portet, Boisadan, Benquet, Vidot, Régibaud, Alfred Thiriet, Fo-
rest, Ali Bouaoukel, Pertus, Clayette, Léon Auméran, Gaultier de
Claubry.Le 3 septembre 1895, le Conseil émet le voeu que l'administration
supérieure applique avec la plus grande rigueur les restrictions rela-
tives à la naturalisation et que la loi soit modifiée dans ce sens que
la langue française soit exigée comme condition de la naturalisation.
Séance du 17 mai 1896. Installation du Conseil élu les 3 et 10 mai :
72 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
MM. Lucien Sider, maire; Joseph Pina, 1er adjoint; Jules Pottier,2e adjoint; Bruno Guide, Alphonse Bonnot, Louis Vivarié, adjointsde Valée, Damrémont, Saint-Antoine ; Vellard, Blain, Paret, Cottard,Ad. Chiarelli,Waton, Jules Grosso,Victor Baude, DrAugier, Mayeux-Doual, Benquet, Grias, Trempert, Hugon, Saint-Ernest, Marmin,
Bresson, Bonnet, Paul Rossi, Fauritte, Rambert, Casasnovas, Moser,
Chabassière, Guitton, Ali Bouaoukel.
A la suite des élections des 4 et 11 septembre 1898, le Conseil se
trouve ainsi composé : MM. Lucien Sider, maire; Pina, 1er adjoint;Pottier, 2e adjoint; Guide, Bonnot, Alfred Thiriet, adjoints de Valée,
Damrémont, Saint-Antoine ; Grias, Bresson; délégués au faubourg et
au Beni-Mélek ; Jules Grosso,Trempert, Hugon, Saint-Ernest, Bonnet,Paul Rossi, Degand, Blain, Bourrasset, Rivière, Dr Ricoux, Crote,
Duplessy, Renesson, Jette, Rambert, Casasnovas, Moser, Cottard,
Watton, Fauritte, Guitton, Ali Bouaoukel.
Dans sa séance du 28 février 1899, le Conseil approuve les termesde la dépêche suivante, adressée par le Maire au Président du Conseil :
La municipalité et la population, profondément émues par la nouvelle de lamort de M. le Président de la République Faure, s'associent au deuil qui frappe laFrance, vous expriment leurs sentiments les plus attristés et vous prient de vou-loir bien les transmettre à Madame Faure.
Il décide ensuite d'adresser à M. Emile Loubet, élu Président dela République, les félicitations du Conseil et de l'assurer de son
attachement aux institutions républicaines.Le 20 mai 1900, installation du Conseil élu les 6 et 13 mai : MM.
Dr Ricoux, maire ; Edouard Blain, 1er adjoint ; Paul Rossi, 2e adjoint;Bruno Guide, Alfred Thiriet, Duplessy, adjoints de Valée, Saint-
Antoine, Damrémont; Sauveur Pinelli, Octave Passerieu, Jules Cha-
bassière, Bourrasset, Jean Xicluna, Crote, Beaufils, Bernard Dupuy,Rambert, Rivière, Charles Renesson, Saint-Ernest, Marius Robert,Antoine Crespin, Dagas, Legros, Casasnovas, Forest, Joffre, Nullet,Léon Auméran, Ali Bouaoukel.
Les fonctions municipales ont d'abord été remplies par MM. les
Officiers :
BATSALLE, DAVID-JOSEPH,lieutenant-colonel du 61ede Ligne, commandant la Place,23 décembre 1838au 9 janvier 1839.
LEFEBVRE, LOUIS-HENRI,adjoint de lre classe à l'Intendance militaire, 9 janvier1839au 15mai 1839.
LAPIQUE, GUSTAVE,sous-intendant militaire, 15 mai 1839 au 3 juin 1839.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 73
CODRON, ALEXANDRE, adjoint de lrc classe à l'Intendance militaire, 3 juin 1839 au2 juin 1840.
Puis par un commissaire civil :
M. FENECH, EMMANUEL-XAVIER-MARIE-ANTOINE, ancien maire de Bône, du 2 juin 1840
jusqu'au 8 mars 1843.
Liste des Maires de la commune de Philippeville
PESCHART, BARON D'AMBLY, ALEXANDRE, propriétaire, né à Domprot (Marne), 8
mars 1843 au 2 mai 1857.
WALLET, ADOLPHE-ALEXANDRE, ancien officier, né à Bapaume (P.-de-C), 24 juillet1857 au 12 septembre 1870.
TEISSÈRE, LUCIEN, négociant, né à Aubagne (B.-du-R.), 12 septembre 1870 au 7
novembre 1870.
RIONDEL, JULES, capitaine en retraite, né à Saint-Martin (Isère), 7 novembre 1870
au 3 décembre 1871.
RÉGUIS, THÉOPHILE, négociant, né à Marseille (B.-du-R.), 3 décembre 1871 au 16
mars 1874.
WALLET, ADOLPHE-ALEXANDRE, ancien officier, né à Bapaume (P.-de-C), 16 mars
1874 au 25 août 1876.
LHOTE, ALPHONSE, architecte, né à Châlons (Marne), 6 février 1877 au 1er février
1878.
RICOUX, ALEXANDRE, courtier maritime, né à Bougie (Constantine), 12 mars 1878
au 23 janvier 1881.
VELLARD, FERDINAND-MARIE, avocat-défenseur, né à Paris (Seine), 24 février 1881
au 28 mai 1882.
RÉGUIS, THÉOPHILE, négociant, né à Marseille (B.-du-R.), 28 mai 1882 au 18 mai
1884.
CALENDINI, ROBERT, avocat-défenseur, né à Mostaganem (Oran), 18 mai 1884 au
5 décembre 1884.
RICOUX, RENÉ, docteur en médecine, né à Philippeville (Constantine), 13 décembre
1884 au 20 mai 1888.
VELLARD, FERDINAND-MARIE, avocat-défenseur, né à Paris (SeJ.ne), 20 mai 1888 au
1er mai 1892.
RICOUX, RENÉ, docteur en médecine, né à Philippeville (Constantine), 15 mai 1892
au 16 mai 1896.
SIDER, LUCIEN, avocat-avoué, né à Philippeville (Constantine), 17 mai 1896 au 15
mai 1900.
RICOUX, RENÉ, docteur en médecine, né à Philippeville (Constantine), 16 mai 1900,
maire actuel.
VI
JOURNAUX, ANNONCES
Le premier journal qui a paru dans notre ville est Le Courrier de
Philippeville ; il a été fondé en 1845; il était non politique. A cet
époque, M. A. Doucet, imprimeur, était propriétaire-gérant.En 1846,M. Doucet est imprimeur et M. Le Proust des Ageux, propriétaire-gérant. En 1847, M. Le Proust des Ageux est imprimeur et pro-priétaire-gérant.
Numéro du 5 décembre 1846. Annonce :
Restaurant situé sur la route de Philippeville à Stora, avant le second pont, à
l'enseigne : Aux Antiquités Romaines, propriétaire, M. Jayet.
Numéro du 15 juillet 1847. Annonces :
Chez M. Ellul, négociant, rue Nemours, 3 : bon vin clair de table à Ofr. 35 le
litre, par tierçons de 100 à 105 litres. — Bains d'eau douce, rue Royale, 35. Ma-touillot et Lapie. Prix du bain : 1 fr. 50. Six bains : 8 fr. 50. Douze bains : 16 fr. —
Service régulier de Philippeville à Constantine en un jour dans une calèche à 6
places. Départ tous les deux jours. Prix de la place : 15 fr. — Bière à 0 fr. 30 le
cruchon, au café chantant dit Brasserie Lyonnaise, rues du Cirque et de Cons-tantine.
Numéro du 15 décembre 1847. Annonce :
Portraits au daguerréotype, garantis très bonne réussite, à l'angle des rues Valéeet 61e, maison du serrurier. Le sieur Sének, opticien, tient aussi un assortimentde lunettes en argent, de longues-vues, verres de lunettes, etc.
Numéro du 25 avril 1848. Annonce :
Ouverture du restaurant du Château-Vert, tenu par un cuisinier, route de Stora,au bord de la mer. Pâtisserie faite sur le lieu même; huîtres fraîches, coquillages.Un bateau est mis à la disposition des consommateurs.
Dans son dernier numéro, celui du 5 août 1848, le Courrier de
Philippeville s'exprime ainsi :
76 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le Moniteur Algérien du 30 juillet, que l'on n'a pas jugé à propos de nous
envoyer, contient un arrêté du Gouverneur général de l'Algérie, en date du 29 juillet
1848, dont le premier article est ainsi conçu :
« Les gérants des journaux et écrits périodiques qui se publient actuellement
en Algérie devront, dans le délai de quinze jours à partir de la promulgation du
présent arrêté, fournir le cautionnement prescrit par l'article 1er de la loi du 14
décembre 1830. »
Le monarque déchu avait promulgué cette loi quatre mois et demi après son
avènement au pouvoir ; la République a attendu cinq mois.
Sous la monarchie, la presse algérienne était restreinte, entravée, esclave; sous
la République, elle est libre, moyennant le cautionnement.On riait, il y a quelques jours, quand nous disions qu'il serait imposé aux jour-
naux de la province. Est-ce par la politique que vous faites, nous disait-on ; nous
l'attendons encore ? On ne supposait pas au Courrier de Philippeville la possibi-lité de gêner le Gouvernement par sa politique.
Riez donc ; quant à nous, nous vous annonçons notre mort, car le cautionnement
qu'on nous demande est de 250 fr. de rente.Nous avons ressuscité, il y a deux ans, un journal qui n'existait que de nom et
que l'on ne voyait pas ; c'est tout ce que nous avons pu faire. Le brillant avenir
que nous lui promettions sous la République est terminé. Malingre sous la royauté,il meurt sous la République.
Brutus est mort en perdant la liberté; le Courrier de Philippeville meurt enla gagnant. Etrange contraste !
N'ayant pas d'actionnaires pour nous aider, nous cesserons jusqu'à nouvel ordrenotre publication actuelle.
Le premier numéro du journal Le Saf-Saf-parait le 20 janvier 1849..Ce journal fut publié d'abord en 1845 comme feuille d'annonces
non politique; son propriétaire était M. Le Proust des Ageux, im-
primeur. Il fut transformé en journal politique en janvier 1849. C'estla continuation du Courrier de Philippeville, qui se rétablit sous lenom de Saf-Saf. Le premier numéro contient cet avis :
AU PUBLIC
Un journal manquait à Philippeville ; les droits et les intérêts de cette cité nais-sante réclamaient une tribune qui fût spécialement consacrée à la défense, ausoutien de ces intérêts et de ces droits. Alger, Oran, Bône, Constantine ont leurs
journaux. Notre ville devait rentrer en possession du sien ; une importante lacunedans la presse algérienne devait être comblée.
Cette heureuse pensée, après l'avoir mûrie, les fondateurs du Saf-Saf viennentde la réaliser. Doter Philippeville d'un organe impartial autant qu'énergique,vouésans réserve à la consolidation des conquêtes faites par le progrès ; d'un organes'attachant à étendre, mais dans une sage mesure, ces précieuses conquêtes; à
obtenir, par tous les moyens en son pouvoir, la prompte satisfaction d'impérieuxbesoins ; à amener par ses efforts persévérants, par l'inflexible logique, cette in-
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 77
dispensable unité des lois qui doivent régir tout ensemble et la France et l'Algérie ;ainsi serésume la tâche éminente que les fondateurs du Saf-Saf se sont proposée.Et rien ne leur coûtera pour assurer son entier accomplissement.
Le Directeur-Gérant : LE PROUST DES AGEUX.
Numéro du 12 mai 1849. Les candidats du Saf-Saf aux élections
du 20 mai à l'assemblée législative sont : MM. Henri Didier, Emile
Barrault, Warnier.
Numéro du 2 juin 1849. Sont élus députés de l'Algérie : MM.
Emile Barrault, 7.567 voix; Henri Didier, 7.285; de Rancé, 3.325.
Numéro du 29 septembre 1849. On y constate qu'à cette date pa-rait ici un journal satirique illustré, L'Autographe. Il cessa de pa-raître, illustré, le 2 novembre 1850.
Numéro du Saf-Saf du 20 avril 1850 :
Avis aux démocrates. — Plus de 3.000 instituteurs viennent d'être révoqués deleurs fonctions ; presque tous sont pères de famille, tous sont sans ressources. La
République ayant proclamé le principe de la Fraternité, les démocrates doiventvenir en aide à ces victimes de la réaction. L'ouvrier, le riche apporteront leur
part à cette oeuvre vraiment patriotique. On souscrit chez le citoyen ThéophileRéguis, rue Nationale. Les souscriptions seront versées au Comité Central, à Paris,présidé par le citoyen Carnot, représentant du Peuple.
Numéro du 22 juin 1850. Le directeur du Saf-Saf rappelle à ses
correspondants que les lettres qui lui sont adressées doivent être
affranchies; il vient d'en refuser plusieurs, qui ne l'étaient pas.
Numéro du 5 octobre 1850. Annonce :
Rue Sétif. 11. Sereno, fumiste, fabricant de parfumerie. Se recommande au pu-blic.
Numéro du 23 novembre 1850. Annonces :
M. Revelli, élève du Conservatoire de Milan, ex-professeur de musique depuis14moisàBône, se fixe à Philippeville, où il donnera des leçons de chant et de piano.S'adresser à l'Hôtel National. — Avis important. Mme , dite Marguerite de
Bourgogne, ayant habité Philippeville, est priée de se présenter pour recevoir unesomme assez importante. S'adresser au bureau du journal.
Numéro du 7 décembre 1850. Annonce :
Au cacaotier. Maison Delay, sous les arcades. Vidoine. Fabrique de chocolats
broyés à l'espagnole, sans aucun mélange de fécules, de fèves ou autres farineux.
Numéro du 22 février 1851. Annonce :
M. Alexandre, artiste en cheveux, élève de Mariton, premier coiffeur de Paris,a l'honneur de prévenir les Dames, dont il est avantageusement connu, qu'il a
coiffé, coiffe encore et coiffera toujours, quelque soit ses concurrents. Il donne des
leçons aux perruquiers-coiffeurs à 5 fr. le cachet.
78 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le 9 octobre 1852, paraît le dernier numéro du journal LeSaf-Saf,
supprimé par ordre du Gouverneur général.
Le premier numéro du Zéramna est du 15 décembre 1850. Pro-
priétaire-gérant, C. de Franceschi. Imprimerie de Franceschi. En
1851 et 1852, le Zéramna est illustré. On remarque quatre superbes
lithographies tenant chacune une page du journal : « La colonne en
marche. » Au début, la colonne se compose de deux personnes, une
jolie fille de colon (la colonne) et un fringant sous-officier de Chas-
seurs d'Afrique. A la dernière page, la colonne revient avec les fruits
de l'expédition ; elle porte un enfant et en tient, par la main, un autre
à cheval sur un bâton (il est cavalier comme son père), tandis quele sous-officier s'éloigne au galop de son cheval.
Numéro du 13 mai 1854. A partir du 1er janvier 1854 et pendantune grande partie de cette année, le Zéramna sort des presses des
Imprimeries réunies de Franceschi et A. Marques, puis l'imprimeriene porte plus que le nom de Franceschi.
Numéro du 17 juin 1854. Annonces :
D'Argis, maison Martini, au 3e étage, rue Galbois, vis-à-vis de la Sous-Préfecture.
Photographie nouvelle. Plus de miroitage. Epreuves directes et positives sur glaces.
Le portrait vient redressé, c'est-à-dire que ce qui est à droite vient à droite. Ainsi
MM. les militaires n'ont plus besoin de changer de côté leurs armes, épaulettes et
décorations. Prix : 8 fr.
Les premiers rédacteurs en chef du Zéramna sont : MM. E. Berrué-
Boiteau, E.-V. Fenech, E. Cardon; puis, à partir du 29 mars 1856,
M. Brugerre prend la direction de ce journal, qu'il conserve jusqu'au16 janvier 1860. Le 20 novembre 1861, l'administration du Zéramna
reconnaît définitivement M. Luth comme gérant en remplacementde M. de Franceschi. En 1867, M. Brugerre est de nouveau proprié-
taire-gérant. Le 9 février 1872, M. Benoît Feuille se rend acquéreurde l'imprimerie typographique de Madame veuve Luth, rue Nationale,
49. M. Brugerre meurt le 1er octobre 1872. Son enterrement, civil,
est très imposant; la Philharmonique est à la tête du convoi, jouantdes airs funèbres. M. Benoit Feuille prend dès lors la direction du
journal, qu'il conserve jusqu'à sa mort, survenue le 1er juillet 1898.
Une grande partie de lapopulation accompagna son cercueil jusqu'au,cimetière.
Son fils aîné, Henri Feuille, lui succède à la direction du Zéramnar
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 79
qu'il abandonne pour être mis à la tête de l'Imprimerie de l'Indé-
pendant, à Constantine, en juillet 1902. M. Jean Sanviti le remplacecomme rédacteur en chef. L'imprimerie du journal Le Zéramna
est dirigée depuis le 13 mars 1885 par M. Alfred Hontebeyrie, quia été délégué ouvrier à l'Exposition Universelle de 1889 et à cellede 1900. Elle porte le nom d'Imprimerie Moderne.
Numéro du 15 septembre 1857. Annonce :
A vendre un moulin à vent, situé près de l'hôpital militaire.
Numéro du 15 février 1859. Annonce :
Allumettes de la fabrique Leydet, rue Impériale, n° 67. Ces allumettes, d'une
qualité sans égale, sont sans explosion et ont l'immense avantage sur celles deFrance de conserver toute leur sécheresse, n'étant pas obligées de traverser lamer. De plus, les boîtes sont couvertes de diverses caricatures nouvelles et amu-santes.
Numéro du 27 septembre 1859. Annonce :
Le sieur Gaussinet, dont le domicile est inconnu à l'administration, est avisé
qu'un pli cacheté à son adresse, renfermant un brevet d'invention pour un systèmede bateau plongeur, est déposé au premier bureau de la Préfecture.
Numéro du 22 mars 1859. Le sieur de Franceschi,. imprimeur
lithographe, est autorisé à publier une fois par semaine des dessins
et caricatures non politiques, à charge d'en opérer le dépôt légal à la
Sous-Préfecture.Numéro du 25 juin 1861. Annonce :
M. L..., médecin, prévient le public qu'il reçoit des abonnés à l'année, à des
prix très modérés, et que les personnes ou les familles qui voudront se confier à
ses soins, auront l'avantage, tout en dépensant moins d'argent que par le traite-ment par visites, de voir leur médecin deux, quatre et même six fois par jour et
dans la nuit au besoin, car il a l'habitude de suivre pas à pas les progrès des ma-
ladies, pour s'en rendre compte et les traiter en conséquence.
Numéro du 1er octobre 1861. Annonce :
A vendre ciment romain, qualité supérieure, extra-énergique. S'adresser aux
entrepreneurs du port.
En 1870, le Zéramna est le seul journal de Philippeville.Numéro du 6 novembre 1872. Annonce :
Scipion Moullet, rue Nationale, maison Picon. Pain fabriqué avec de l'eau de mer.
Nota. Le pain fabriqué avec de l'eau de mer est très agréable au goût ; il facilite
les fonctions digestives et se conserve frais beaucoup plus longtemps que le painordinaire.
80 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Numéro du 25 janvier 1873. Annonce :
M. Chéret, le chasseur de lions, devant quitter prochainement l'Algérie, offre,au prix de 200 fr., un superbe chien-courant griffon, chassant plume et poil.
Le journal Le Zéramna paraît toujours; il a donc actuellement
53 années d'existence.
D'autres journaux sont sortis des imprimeries Philippevilloises.Citons :
L'Echo deNumidie, revue paraissant tous les mercredis, non poli-
tique; rédacteur en chef : Brugerre, imprimeurs : Chevalier et Luth,
propriétaire-gérant : Frédéric Berjaud; 17 octobre 1860.Le Messager Algérien, novembre 1866, propriétaire-gérant : M.
Denis, imprimeur.Le Saf-Saf, qui réapparaît le 11 janvier 1871.
La Pie, journal satirique illustré; a paru d'avril à août 1871. Gé-
rant-responsable : Etienne Nicolas ; typographie, L. Denis aîné. Il est
remplacé, à cette date, par La Citrouille, journal illustré.
Nous voyons : en 1874, L'Observateur, rédacteur en chef : M.
Barbier ; en 1876, La Tribune Algérienne, rédacteur en chef : M. Cha-
leil; en 1878, L'Algérie; en 1884, Le Colon, rédacteur en chef : M.
Finat.
En 1890 : Le Potard, organe des intérêts des élèves en pharmacie,rédacteur en chef : M. Marius Garnier. La Mutualité française et
algérienne, rédacteur en chef : M. Louis Castellotti.En 1891 : Le Cerf-Volant, recueil littéraire mensuel, rédacteur en
chef : M. Paul Lucchesi.
L'Union Républicaine a paru pour la première fois le 14 juillet1892. Imprimerie Paul Aquadro. Gérant : A. Serré. Le 10 novembre
1892, M. A. Angéli en prend la direction et la rédaction. Du 11 no-
vembre 1894 au 2 octobre 1900, le rédacteur en chef est M. Léon
Auméran ; de cette date au 15 janvier 1902, M. Tarabella. Depuiscette époque, elle est revenue entre les mains de M. Auméran.
L'Union Républicaine a onze années d'existence et elle est impriméechez MM. Léon Auméran et Baptiste Parodi. Par délibération du
Conseil municipal du 16 juin 1900, ce dernier a été nommé déléguéouvrier à l'Exposition Universelle de 1900.
VII
POLICE, SECURITE, PERSONNEL, COMMUNAL
Un arrêté du 3 décembre 1840 crée une Commission de salubrité
permanente. Elle est composée d'un officier de santé et d'un fonction-naire civil, à la désignation du commissaire civil, et de deux officiersde santé au choix du sous-intendant.
Le 18 octobre 1840, le lieutenant Cazin est tué par les indigènes,dans sa chambre même. Ses ossements ont été transportés dans la
crypte du monument du Souvenir Français. La pierre tumulaire quirecouvrait sa tombe a été déposée au Musée ; elle contient l'inscrip-tion suivante : « M. Cazin, lieutenant au 62e de Ligne, assassiné le
18 octobre 1840. »
« En 1841, trois soldats de la garnison sont égorgés en plein jourdans le ravin dit du Pont Romain, route de Stora. Des factionnaires,des soldats en patrouille sont blessés ou tués dans l'enceinte même de
la ville. On trouve, assassiné dans sa guérite, un gendarme en faction
auprès de la Douane. Un négociant, M. de Nobelly, est blessé d'un
coup de feu à la jambe en rentrant chez lui, le soir, rue de Stora,
aujourd'hui rue Amiral Courbet, et M. Custo jeune échappe parmiracle à trois coups de pistolet tirés à bout portant. Les cris fré-
quents des sentinelles se font entendre dès que l'obscurité prête son
ombre aux rôdeurs de nuit, se répétant jusqu'au matin, et souvent
la fusillade suit les appels aux armes. On vit dans des alertes perpé-tuelles. L.-Charles Féraud. Histoire de Philippeville. »
Le brick-goélette l'Hortense-Elisabeth, de 85 tonneaux, capitaine
Raffelings, parti le 24 juillet 1847 de Marseille pour Philippeville,
aperçut, le 26 au matin, un assez gros navire sans pavillon, venant
directement sur lui. Le capitaine ne changea pas sa direction et les
deux bateaux se joignirent en peu de temps et passèrent si près l'un
de l'autre que leurs mâts se rencontrèrent et qu'une vergue de l'Hor-
12
82 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
tense-Elisabeth fut brisée. Le gros navire hissa' alors le pavillon grecet se mit en panne; il n'attaqua cependant pas. Le capitaine Raffe-
lings avait fait monter sur le pont ses six hommes d'équipage et plu-sieurs passagers qu'il avait à bord. Cette contenance causa peut-êtrel'irrésolution du navire grec, dont plusieurs de cette nation exerçaientalors la piraterie dans la Méditerranée.
Dans la nuit du 24 août 1847, plus de vingt chiens sont empoisonnés
par des boulettes jetées par ordre de la police. Cette mesure est recon-
nue nécessaire pour obliger les propriétaires de ces animaux à ne pasles laisser vaguer la nuit; quelques rues sont occupées par un si grand-nombre de chiens que l'on ne peut les parcourir sans danger.
Le 26 septembre 1847, mort d'un malfaiteur indigène fort dange-
reux, qui, depuis deux ans, désole nos environs, le nommé Saadi
ben Raoui; il avait habité pendant longtemps auprès du village Valée
et avait assassiné le sieur Mouliette, domestique de M. Lafont, colon
au dit village.Dans la nuit du 12 au 13 février 1848, un lion tue cinq vaches-
dans la propriété de M. Grenier, près du village Saint-Antoine.
Le 16 juin 1848, le Conseil municipal est consulté par M.d'Ambly,maire, sur les mesures à prendre pour mettre un terme aux rixes-
qui s'élèvent entre deux compagnies de portefaix, l'une française,l'autre étrangère. Ces rixes sont suivies de provocations et de chants
qui tiennent dans l'inquiétude toute la population. L'assemblée
approuve l'arrêté suivant :
Toutes réunions, attroupements et chants quelconques sont interdits formelle-ment à partir de 11 heures du soir.
Le Sous-Directeur par intérim fait alors remise officielle au Maire
de la police municipale et rurale.
ARRÊTÉS DIVERS :
18 avril 1848. Défense de laver du linge au ravin du Beni-Mélek.
5 juillet 1848. Défense de coucher sur la voie publique.Le 22 avril 1849, M. Démanche, sous-préfet, fait une sortie avec
la Milice de Saint-Antoine, dont les fermes isolées sont attaquées-depuis quelque temps. Une autre sortie de la Milice a lieu clans lanuit du 23 avril, avec le garde-champêtre Nouvel. Un indigène esttué par M. de Bétous, commandant la Milice. Par suite des instruc-tions données par l'autorité supérieure, le Maire rappelle, le 24 mai
suivant, que l'entrée et la sortie de la ville sont interdites après sept
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 83
heures du soir à tous les indigènes, lesquels ne pourront plus circulerdans les rues à partir de neuf heures du soir. En cas d'alerte, de
rappel ou de générale battus à quelque heure que ce soit du jour,tous les indigènes devront rentrer chez eux.
Le Conseil municipal était réuni le 23 mai 1849, quand le gardeNouvel se présenta et annonça qu'il avait failli être assassiné parles arabes. La séance cessa aussitôt et les conseillers s'occupèrentd'organiser une sortie contre les rebelles.
Le 29 mai, le Maire informe les habitants que les convois militaires
pour Constantine partiront les 1er, 5, 9, 13, 17, 21, 25 et 29 juin. Ilest défendu aux habitants civils de voyager autrement qu'avec les-convois.
Le journal Le Saf-Saf, du 23 juin 1849, se plaint de ce que l'ap-
plication de l'arrêté du Maire, concernant les chiens errants, suscite
quelques rixes dans nos rues, d'ordinaire assez paisibles. On demande
que les individus chargés d'appréhender les chiens en contraventionsoient pourvus d'un signe distinctif comme agents de l'autorité. D'un
autre côté, on reproche à ces individus de prendre les chiens mu-
selés et même au seuil des maisons.
Séance du Conseil du 9 juillet 1849. Le traitement du commissaire
de police est fixé à 2.400 fr., dont 2.000 fr. payés par l'Etat.
Le village Valée est un peu turbulent. Le 18 août 1850, un cha-
rivari, renouvelé pour la 3e ou la 4e fois aux oreilles d'un colon marié
avec une veuve, a été suivi d'actes de violence; plusieurs personnesont été blessées par les mauvais plaisants, affublés de vêtements
grotesques et de masques. Le garde-champêtre a été impuissant à
réprimer le désordre et quand ce respectable agent de l'autorité a
voulu rentrer chez lui, il a trouvé sa porte barricadée.
En janvier 1850, des lions dévorent un homme aux environs de
la carrière romaine, près le village de Saint-Antoine. Un chien de
chasse, appartenant à M. Béchu, est enlevé, le 2 novembre, par une
panthère dans la propriété de Mareuil ; c'est le second qu'il perd de
cette manière. Le 14 décembre de la même année, un lion parcourt,la nuit, les rues de Damrémont, sans se laisser détourner par les
aboiements furieux des chiens de chasse. Le 25 mai 1858, un lion
blessé, qui errait dans le ravin du Beni-Mélek, est tué par des jar-diniers.
Un arrêté gouvernemental du 13 juin 1851 détermine la composi-tion du personnel de la police de notre ville :
84 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
1 commissaire, 1 secrétaire, 1 interprète, 2 inspecteurs, 4 agents
français, 1 agent indigène et 1 agent français à Stora.
Séance du Conseil du 5 novembre 1858. Le Maire rappelle à ses
collègues qu'à plusieurs reprises ils ont émis le voeu de voir trans-
porter hors de la ville les meules de fourrages de l'administration
militaire. Les dangers de ce voisinage ont été signalés à l'autorité
militaire à une époque où la ville n'avait pas une étendue bien consi-
dérable. Les constructions ayant pris un accroissement remarquable,il est urgent de faire disparaître un danger permanent dont les consé-
quences peuvent être d'autant plus terribles que les meules de four-
rages, touchent presque les magasins à poudre. Le Conseil prie le
Maire de faire toutes les démarches nécessaires pour arriver au
transfert des meules hors de la ville.Voeu renouvelé le 21 septembre1859 et le 22 juillet 1865.
Dans sa séance du 16 mars 1866, le Conseil vote une somme de
58.000 fr., à verser en dix annuités à l'Etat, pour le transfert hors de
la ville des meules de fourrages. L'Etat n'ayant pas trouvé cette
somme suffisante, le Conseil proteste à nouveau, le 14 novembre
1866, contre la présence des meules dans l'enceinte de la ville.
Le 26 septembre 1859, un lion tue le cheval de M." Grenier, pro-
priétaire à Saint-Antoine.
Le Conseil arrête, le 8 février 1865, le tarif des voitures de place :
calèche à deux chevaux, la journée de 12 heures : 15 fr.; la demi-
journée : 8 fr.; l'heure : la première, 2 fr., les autres, 1 fr. 50.Voi-
tures omnibus pour Stora et la banlieue, la place ou le colis : Qfr. 50
le jour, 1 fr. la nuit.
Le 19 décembre 1866, cette assemblée émet le voeu que, vu le grandnombre de mendiants répandus en ville, un dépôt de mendicité soit
établi à Philippeville.Dans la nuit du 24 mai 1870, la voiture faisant le service entre
Philippeville, Saint-Charles et Jemmapes, se trouve en présence de
quatre lions de grande taille. Il n'y eut pas d'accident.
Le 13 août 1873, la présence de plusieurs lions est signalée à Valée,à Djebel-Halia et près de la ferme Barrot. Un autre traverse la voiedu chemin de fer à Damrémont.
Le 19 mai 1879, M. Albert Grévy, Gouverneur général, pendantl'arrêt du train à Saint-Charles, dit à M. Merle des Isles, maire, quilui présente son Conseil municipal : « Monsieur le Maire, je vous
remercie de votre accueil. Je vous promets la sécurité; vous l'aurez. »
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 85
Les colons enregistrent avec joie cette déclaration laconique, qui en
dit plus long qu'un grand discours.
Le 10 juillet 1879, deux lions traversent la passerelle jetée sur le
Saf-Saf, près de la propriété Landon.
MM. Lucien Meil et Charles Dutarn, créent, le 1er novembre 1902,
une entreprise de transport des voyageurs par des tramways à trac-
tion animale sur les lignes de Philippeville-ville, Philippeville-fau-
bourgs et Philippeville-villages.Les prix sont : 0 fr. 10 par place pour la ville, les faubourgs, la
gare et les quais et 0 fr. 20 pour les villages Saint-Antoine, Damré-
mont et Valée. Les enfants au-dessous de 5 ans, tenus sur les genoux,sont transportés gratuitement.
Cette innovation obtient, dès le début, un très vif succès.
Citons maintenant quelques noms des fonctionnaires qui ont été
ou sont encore chargés de la sécurité dans la ville et dans la banlieue :
GARDES-CHAMPÊTRES
Juillet 1848. Ville : Nouvel, en remplacement de Segler, décédé.
Damrémont : Sémeri.
20 août 1848. Damrémont : Pierre Ferret.
5 novembre 1850. Valée : Sohn.
Damrémont : Mecker.
12 février 1851. Valée : Muller.
Damrémont : Joseph Didier, ancien sous-officier au
23e de Ligne.26 mai 1851. Saint-Antoine : Filliat.
13 avril 1852.Ville : Guillemard.
Damrémont : Oster.
POLICE MUNICIPALE
En 1841 : Cerceletet Jacquot, inspecteurs; Calcedonio Gregh, An-
toine et Mizzi.. agents.En 1842 : François Béchu, commissaire.
En 1843 : Bénazet, inspecteur.En 1844 : Alexandre Hatton, commissaire. Louis Lacour, agent.En 1847 : Le Cordier, commissaire et poète, nommé à Mostaga-
nem en 1848.
86 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
En 1848 : Creuilly et Chauchard, inspecteurs.5 octobre : 1850 : Devaux, commissaire, passe à Bône.
9 novembre 1850 : Gremillet le remplace.21 décembre 1858 ; Bosserelle, commissaire.
Ajoutons à cette liste d'anciens :
MM. Pierre Piolle et Moulis, 1874, commissaires.
Louis Dietz, 22 juillet 1876, commissaire.
Emile Hamont, 1882, commissaire et poète.Pierre Piolle, 26 octobre 1883, à nouveau.
Alexandre Ponticelli, 23 juillet 1884.
Jules Bonnardel, 14 mai 1894.
Barthélémy, commissaire intérimaire et poète.Léon Delpech, 1er juillet 1896.
Antonin Japert, arrivé à Philippeville le 29 décembre 1897,commissaire de 3e classe; élevé sur place à la 2e classe le 26 octobre
1898 et à la lre classe le 30 décembre 1901.
Notre ville a donc eu trois commissaires-poètes.Un 2e commissariat a été créé par décision gouvernementale du
31 janvier 1903. Il a été installé à l'angle des rues Valée et Jugurlha.Le premier titulaire est M. Baptiste Defendini.
La question, non encore tranchée, de donner des pensions de
retraite aux employés communaux,ne date pas d'aujourd'hui. Dans
sa séance du 30 juillet 1851, le Conseil nomme une Commission
chargée d'étudier un projet, de règlement relatif aux pensions de
retraite des employés de la commune. Le 25 novembre 1852, cette
assemblée émet le voeu que le Gouvernement organise une caisse de
retraite pour les employés communaux, et, le 1er mars 1854, elle
insiste pour cette création, comme pour les employés départementauxde l'Algérie.
Nous allons relater les noms des chefs de service et de certains
employés dans chaque branche de l'administration communale.
BUREAUX DE LA MAIRIE
31 janvier 1848. Cyrille Plantet, commis de 2° classe, faisant fonc-
tions de secrétaire.
26 juin 1848. Cosmes et Brôgante, employés.12 août 1848. De Nivoy, employé.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 87
25 décembre 1848. Brégante, secrétaire; entré à la mairie le 26
juin 1848.
31 décembre 1848. Zund, tambour de ville et afficheur.
31 janvier 1849. Ali ben Ismaël, chaouch.
1er janvier 1852. Fanchon, seérétaire; entré le 8 mai 1849 comme
surnuméraire.1er décembre 1858. Honoré Fenech, secrétaire. Joseph Charrier,
chef de bureau de l'état-civil ; entré le 31 juillet 1850 comme employé.29 janvier 1865. Cosmes, secrétaire.
11 novembre 1870. Bertherand, secrétaire.. 22 octobre 1873. Valentin Farge, secrétaire ; entré le 16 janvier1862 comme conducteur des travaux ; comptable le 16 janvier 1864.
2 février 1885. Louis Bertrand, secrétaire-généal ; entré le 15 avril
1875 comme surnuméraire.1er janvier 1895. Alexandre Ricoux, secrétaire général.23 juin 1896. Jean Cassole, secrétaire général.14 juillet 1900. Jules Feste, secrétaire général; entré le 1er août
1886 comme adjoint à l'état-civil.
VOIRIE
28 janvier 1850. Hurlin, Jean-Pierre, conducteur des travaux de la
commune, chef de service.
1er janvier 1856. Giraud, architecte-voyer.16 janvier 1862. Le même, nommé architecte de la ville.
27 septembre 1872. François Bel père, architecte.
30 octobre 1878. Henri Gouilly, architecte.
6 décembre 1886. René Descamps, architecte.
31 janvier 1889. François Bel père, architecte.
30 mars 1891. Georges Ollier, architecte.
4 avril 1898, Charles Bel fils, architecte.
13 mars 1899. Jean-Aimé Roche, conducteur chef de service.
Le 14 janvier 1852, M. Antoine Simpère est nommé cantonnier
de 3e classe et, le 1er janvier 1853, cantonnier de 2e classe. Chef can-
tonnier du 1er janvier 1858 au 1er juin 1896, M. Simpère a servi la
commune pendant 44 ans.
En janvier 1851, M. Jacques Ferré, collecteur des marchés, est
nommé chevalier de la Légion d'honneur. M. Ferré, presque octogé-
naire, a fait toutes les campagnes de la République et de l'Empire.Il a été sous-officier en Egypte et il avait déjà été porté pour la
décoration en 1815.
88 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
ABATTOIR
1er avril 1848. Jarlier, vétérinaire. François Brincat, homme de
peine.15 juin 1848. Pierre Cecconi, receveur.
1er janvier 1853. Coulomb, vétérinaire.
1er janvier 1857. Lafforgue, vétérinaire.
23 avril 1872. Dépré, receveur.
30 mai 1872. Pélissier, vétérinaire.
15 juillet 1882. Pelletier., vétérinaire.
25 décembre 1886. Pesle, vétérinaire.
26 novembre 1894. Félix Modeste, receveur.
VIII
RUES ET PLACES, ÉCLAIRAGE, PETITE ET GRANDE VOIRIE
ÉTABLISSEMENTS PUBLICS
Un arrêté gouvernemental du 29 septembre 1841 crée un abattoir
dans notre ville.
En 1841, la route de Stora à Philippeville ne figure encore que
pour travaux d'entretien ; elle a besoin d'être rectifiée en plusieurs
points où le passage des voitures éprouve des difficultés et de ma-
nière à être de niveau entre Philippeville et Stora, où l'on a le projetde créer un port en remplacement du mouillage assez médiocre qui
y existe.
Au 1er janvier 1842, l'enceinte de la place est presque entièrement
construite ; elle relie les forts qu'on a d'abord établis autour de la
ville. Une ligne de postes provisoires protège la route de Stora. Le
service du Génie a fait ouvrir la route de Philippeville à Constantine
et il la continue. Le magasin d'habillement et de campement est
installé.
En 1842, les fondations de la porte de Constantine sont creusées
et le corps de garde de droite est commencé.
En 1841, on pourvoit tous les services au moyen de baraquementsconsidérables. Dès 1839, on s'est occupé de construire l'hôpital du
Fort de France, achevé en 1842 et qui est établi pour 484 malades.
En 1842, on construit sur divers points des casernements qui offrent
des logements pour 1.300 hommes : la maison crénelée du fort Valée
et la caserne du fort de France, qu'on a commencée en 1841. On a
commencé aussi, dans la même année, la manutention. Enfin on as-
sure le service des eaux par la construction d'abreuvoirs et de puits.On fait, en 1842, une forge pour le Train des Équipages ; on cons-
13
90 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
truit presque entièrement la caserne de la rue des Numides (Isolés),
occupée bien que non entièrement achevée, le parc aux boeufs et deux
hangars pavés pour 600 boeufs. On achève toute la maçonnerie de
l'aile gauche de la caserne de France; l'aile Ouest est montée jus-
qu'au sol du deuxième étage, ainsi que le pavillon. On construit une
écurie de 80 chevaux pour les convois, le mur de clôture de l'hôpi-
tal, la buanderie, l'amphithéâtre, la manutention, l'emplacement de
deux meules a foin et le magasin à poudre jusqu'à la naissance des
voûtes.
On termine, en 1843, le couronnement et le crépissage d'une por-tion de l'enceinte construite l'année précédente, entre le fort Valée
et le saillant de Skikda. On achève la porte de Constantine ; cette
porte se compose de deux passages voûtés, flanqués, à droite et à
gauche, par deux petits corps de bâtiment crénelés, servant l'un de
corps de garde et l'autre de bureau d'octroi. On achève la partie de
l'enceinte du fort Royal, qui fait face à la campagne, et les crépis-
sages de l'enceinte de la ville. On termine le magasin à poudre et la
caserne du fort de France. Les deux maisons de la rue des Numides
sont achevés et occupées par la troupe. On commence les fondations
de la caserne du Train et celles du logement du commandant supé-rieur.
Route de Stora à Philippeville. Longueur de parcours : 4 kilomètres.
Stora étant considéré comme le véritable port de Philippeville, quin'a qu'une rade foraine, la route qui relie ces deux localités est de
la plus grande importance. Le tracé actuel laisse, à l'époque, beau-
coup à désirer ; il devra être rectifié sur une grande partie de son
parcours. On commence des travaux dans ce but en 1844, sur la
partie comprise entre le quai de Stora et El-Kantara. En 1843, on
avait déblayé les matières provenant des éboulements, qui sont fré-
quents pendant la saison des pluies, et élargi la partie comprise entre
la place de la Douane et le pont du Beni-Mélek.
Pendant cette année 1843, on prépare le projet de construction
d'une halle aux blés et la pose de bornes-fontaines. On pave la rue
Royale sur une longueur de 300 mètres depuis le ravin des citernes
(rue d'Austerlitz) jusqu'à la mer. Cette importante voie de commu-
nication est la seule accessible aux voitures. Une partie de la rue
des Numides est nivelée. Diverses rues secondaires sont ouvertes etdes escaliers en pierres de taille sont construits pour racheter les
trop fortes pentes. On construit dans la rue Royale, depuis la mer
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 91
jusqu'à la rue des Citernes (d'Austerlitz), un égout de 250 mètresde longueur ; cet égout, de grande dimension, reçoit les eaux pluvialeset ménagères provenant des rues supérieures. Un second égout estétabli le long de la rue des Citernes. On bâtit, en 1843, 70 maisons,la plupart en bonne maçonnerie, et estimées ensemble à près de500.000 francs.
Antérieurement à 1844 il n'existait, aux environs de notre ville,d'autre chemin que celui conduisant à un pont en bois établi sur
l'Oued-Zéramna, au point où aboutissent quelques sentiers arabes
pratiqués par les tribus de la vallée du Saf-Saf. On ne saurait consi-dérer comme chemins vicinaux d'autres sentiers ouverts, il est vrai,
par les soins de l'administration, mais qui n'ont d'autre but que defaciliter l'exploitation de jardins situés aux alentours. Aucune allo-cation n'a été affectée, en 1843, à l'entretien de ces chemins. En
1844, le plan de colonisation de Philippeville étant définitivement
arrêté par le Ministre de la Guerre, on entreprend l'ouverture des
chemins destinés à mettre les villages projetés de Valée et de Damré-
mont en communication avec le chef-lieu. C'est l'amorce de la nou-
velle route de Philippeville à El-Arrouch par la vallée du Saf-Saf.
Dans le cours de la même année, on construit sur le Zéramna, et
vis-à-vis de l'entrée de la pépinière, un pont en maçonnerie, qui des-
sert la partie commune, déjà ouverte, de deux chemins vicinaux des-
servant la plaine du Saf-Saf. Il reste à établir un second pont sur ce
deuxième cours d'eau et à terminer les chemins qui conduisent de la
ville à Valée et à Damrémont. Un petit embranchement de la route
de Constantine à la mer suffira pour desservir le village de Saint-
Antoine. Plus tard on mettra les deux premiers villages en commu-
nication entre eux par un chemin direct, qui traversera aussi le Saf-
Saf, et l'on reliera la pépinière à la route de Constantine par un em-
branchement de 1.300 mètres environ, mais le plus urgent était de
relier les centres de population avec le chef-lieu. C'est ce qu'on a fait
en 1844.En 1844, une horloge publique est placée, par les soins de la com-
mune, au sommet d'un pavillon construit à cet effet sur l'hôpitalmilitaire.
La rue Royale est pavée, en 1845, sur une longueur de 220 mètres.
On terminé, pendant cette année, la porte de Stora et la portion du
mur d'enceinte qui relie cette porte avec la fortification précédem-ment construite.
92 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Porte de Stora
On fait des réparations aux endroits des murs de la fortification et
aux divers chemins du rempart. Les plantations sont entretenues. Il
ne reste plus à construire que les batteries de côtes pour la défense
de la rade de Stora. On termine les fondations de la galerie en avant
du pignon Nord et on exhausse d'un étage le bâtiment des accessoires
de l'hôpital militaire ; on termine entièrement la galerie qui met en
communication les latrines avec les bâtiments de l'hôpital. Ces amé-
liorations produisent pour cet établissement une augmentation de
logement pour les infirmiers et des latrines vastes et commodes. On
répare les puits des établissements militaires et on achète et installe
une noria pour le puits de la buanderie. On améliore et recouvre en
tuiles l'écurie destinée aux convois et l'on construit des baraques nou-
velles pour les dépôts du 61e de Ligne et du 3e bataillon d'Afrique.On construit les deux bâtiments des accessoires de la caserne de
cavalerie. Chacun de ces bâtiments renferme un corps de garde, une
cuisine, des salles de police pour les soldats et les sous-officiers, une
prison, des logements de cantinières et de blanchisseuses. On termine
l'écurie située à la partie Sud du quartier et l'écurie double qui lui
correspond. On fait les maçonneries et la couverture de l'hôtel du
commandant supérieur du cercle et celles du petit bâtiment des
accessoires. II reste à faire les accessoires de la caserne des Numides
(Isolés), à terminer l'hôtel du commandant supérieur et le quartierde cavalerie, à construire les magasins des Subsistances militaires
au-dessus des voûtes de la marine, le magasin du campement, la
galerie en avant du pignon Nord de l'hôpital, l'hôtel du Trésor et de
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 93
la Poste, les bureaux du Génie, les logements du chef du Génie et du
gérant.Le nombre des maisons construites au 1er janvier 1845 est, pour
Philippeville, ses annexes et sa banlieue, de :
327 en maçonnerie,59 en maçonnerie et galandages,88 en galandages,36 en planches,
au total... 510, évaluées à 3.696.200 francs.
Plantations faites en 1846 :
Place de la Marine, 3 mûriers.
Intérieur de l'hôpital militaire, 10 ormes, 90 mûriers.
Avenue de l'hôpital militaire, 29 ormes, 24 mûriers.Intérieur de la caserne de cavalerie, 96 ormes, 18 mûriers.Avenue de la caserne, 39 mûriers.
Place de la porte de Constantine, 6 platanes, 52 mûriers.
Place du cimetière (Skikda), 121 mûriers.
Cour des Ponts et Chaussées, 14 mûriers.
Cour du théâtre romain, 15 mûriers.
Façade du commandant supérieur, 7 mûriers.
Place Bélisaire, 1 platane, 53 mûriers, soit, au total, 578 arbres.
Les travaux de dessèchement, exécutés en 1845, consistent dans
le curage de divers fossés ouverts dans les environs de Philippevilleet dans l'élargissement d'une partie des berges du Zéramna. On cons-
truit un mur de défense, le long de la route de Constantine, dans le
nouveau lit du Zéramna, qui se rendait auparavant à la mer en
traversant la rue Nationale, alors à l'état de ravin. Ces divers travaux
ont empêché que l'inondation du 11 mars 1846 ait produit aucun
dommage aux propriétés riveraines. On a reconnu néanmoins qu'ilserait convenable d'élargir une partie des berges du nouveau lit du
Zéramna, qui auraient été rompues si l'inondation avait duré plus
longtemps.Route de Philippeville à Stora. On continue, en 1845, l'élargisse-
ment de la partie de cette route comprise entre le pont de Stora et
le pont du Beni-Mélek; on améliore la chaussée de la route et on
commence la construction d'un mur de soutènement aux abords de
94 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Stora. En 1846, on continue de construire des murs de soutènement,on établit des banquettes et l'on entretient les fossés et la chaussée.
Route de Philippeville à Constantine par la vallée du Zéramna.
Longueur de parcours : 9 kilomètres. La partie de cette route, com-
prise entre Philippeville et El-Arrouch, d'un parcours de 32 kilo-
mètres, est remise aux Pont et Chaussées par le Génie militaire au
commencement de l'année 1845. Dans le cours de la même année, on
refait presque entièrement à neuf, avec empierrement de 0m,25 d'é-
paisseur, la portion de cette route entre l'Oued-Zerga (Saint-Charles)et El-Arrouch. On construit trois maisons pour loger des brigadesde cantonniers, à l'Oued-Zerga, Eddiss et El-Arrouch. En 1846, on
répare le pont en charpente de l'Oued-Amar et on achève l'empierre-ment de la partie de la route comprise entre l'Oued-Zerga et El-
Arrouch.
Route de Philippeville à Constantine par la vallée du Saf-Saf.
Longueur de parcours : 18 kilomètres. La nouvelle route projetée
par la vallée du Saf-Saf pour remplacer la portion de l'ancienne
route comprise entre Philippeville et l'Oued-Zerga (Saint-Charles),en passant par le col d'Eddis, se trouve commencée par le fait des
travaux effectués sur le chemin de Philipeville à Damrémont, quien fait partie.
Chemin de Damrémont. On construit ce chemin, en 1845, jusqu'au
point où il s'embranche avec celui de Valée. On achève le pont, de
8 mètre d'ouverture, sur le nouveau lit du Zéramna; on construit 4
ponceaux sur divers ravins et l'on empierre la chaussée jusqu'à l'an-
cien lit du Zéramna. La partie comprise entre l'embranchement etle village a été achevée en 1848.
Chemin de Valée. Ce chemin s'embranche sur le précédent, à 2.500
mètres de la ville. En 1845, on achève les terrassements et l'on cons-
truit un pont américain de 40 mètres de portée, sur le Saf-Saf, pourmettre le village en communication avec la rive gauche. Les dépensesfaites en 1845, pour les travaux neufs, sur les chemin de Damré-
mont et de Valée, s'élèvent à 104.437 fr. 25 et celles de 1846 à 82.000
francs environ.
En 1845, 70 mètres de galeries de la rue Royale sont asphaltées.L'ouverture des rues des Numides, de Constantine et de Sétif est
continuée; un chemin de piétons pour monter à l'hôpital militaireest ouvert. Enfin on construit, à Stora, un mur de soutènement ducôté de la mer. En 1846, ces divers travaux sont continués et d'autres
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 95
entrepris. 347 mètres d'égouts sont faits en 1845; celui de la rue du
Cirque est achevé en 1846.
Le 1er octobre 1846, les bureaux de la mairie sont installés rue
Marie-Amélie, au premier étage de la maison Scognamiglio ; le rez-de-chaussée est occupé le 26 avril 1847 par la police, dont l'entréeest sur la place Hélène. Cette maison était alors composée de deux
corps de bâtiments. Le premier corps donnait, rue Nemours, sur la
place Hélène, en face de l'emplacement où a été bâtie la maison Rieu,actuellement maison Grima (Café Gambrinus) ; les services de la policey furent installés. Le second prenait face sur la rue Marie-Amélie,
aujourd'hui rue Henri Teissier ; c'était là que se trouvait la mairie.En septembre 1846, six bataillons d'infanterie sont campés aux
Toumiettes, placés sous la direction du Génie militaire. Ces bataillonssont réunis pour substituer une voie nouvelle, facilement accessible,à l'ancienne route, difficile et dangereuse du col des Toumiettes (d'oùle nom de l'Armée française donné à cet endroit).
Dans sa séance du 18 juillet 1848, le Conseil vote un crédit de
8.000 fr. pour commencer les travaux de percement des rues.
Adjudications : le 15 mars 1848, d'un entrepôt de poudres à feu de
la régie. Dépense évaluée à 13.100 fr. Le 30 avril suivant, des travaux
de construction de quatre norias, bassins et canaux d'irrigation dans
la pépinière. Dépense évaluée à 30.000 fr.Le 20 juin 1848; de travaux
de construction de rigoles pavées et de chaussées d'empierrementdans les rues de petite voirie. Dépense évaluée à 25.000 francs.
Dans sa séance du 23 avril 1849, le Conseil émet son premier vote
pour les plantations publiques : 300 fr. pour chaque village.Séance du Conseil du 16 février 1849. Le citoyen Dobignard,
conseiller municipal, demande à acheter le terrain situé devant son
établissement connu sous le nom de Café de Foy, soit 20 mètres sur
5m,50. Il se retire de la salle au moment où la discussion est entamée.,
Le Conseil rejette avec les considérants suivants : ce propriétaire
propose de remplacer la tente de sa maison par un salon fermé; ce
serait une chambre d'été et d'hiver, qui réduirait de 110 mètres su-
perficiels l'étendue déjà si restreinte de là place de la Marine. D'aprèsle plan de la ville, il doit être établi devant le Café de Foy une chaus-
sée qui servira de passage aux charrettes et voitures qui se rendront
dans la rue des Numides.
Séance du 8 mars 1849. Création d'un service spécial chargé de
l'exécution des travaux communaux. Il est ainsi composé :
96 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Un architecte, 4.000 fr., plus les honoraires sur travaux neufs ;Deux conducteurs à 1.800 fr. chacun, l'un pour la voirie, l'autre
pour les bâtiments;Un expéditionnaire-dessinateur 1.500 francs.
Séance du 8 décembre 1849. Sur l'invitation du Sous-Préfet, le
Conseil procède à la dénomination des rues et places de la ville :
rues Nationale, Marie-Amélie (nom de la reine, femme de Louis-
Philippe), Joinville, Nemours, d'Orléans (tous trois princes de la
famille royale), Galbois (général), Constantine, Sétif (prolongementde la rue Valée),Vaillant (prolongement de la rue du Sphynx),Valée(maréchal), Sphynx (nom d'un navire de l'Etat qui était venu appro-visionner l'armée d'occupation), des Numides, Carthage, de l'Arsenal,3e Bataillon d'Afrique, de la Manutention, de la Douane, Marengo,Fenech, de la Montagne, Hippocrate, des Colons (dépôt des colons),des Beni-Mélek, Kléber, Buffon, de la Mosquée, de la Synagogue,Zéramna, Scipion, Mahomet, Saint-Antoine, Muiron, d'Arcole, du
Ravin, des Martyrs, du Clocher, des Ruines, du Chantier, du Han-
gar, de la Chapelle, d'Austerlitz, de Stora, 61e de Ligne, de l'Ecole,3e Chasseurs d'Afrique, de la Félicité, 62e de Ligne, du Cirque, Fil-
fila, Napoléon, Saint-Augustin, Jugurtha, Médéah, de la Halle. Placesdu Commerce, du Chemin de Ronde, de la Marine (devenue de Mar-
qué, nom du capitaine de frégate, commandant la marine à Philip-
peville), Cuvier, Bugeaud, d'Austerlitz, de la République (place de
l'Eglise), Corneille, Bélisaire, du Cirque, Wagram, d'Isly, Mazagran.D'autres désignations furent faites plus tard : rues Fornier (nom
d'un commandant du 3e Spahis, tué dans une charge contre les arabes
entre Philippeville et Collo, le 27 juillet 1848). Mamelon Négrier(général).
Les villages sont appelés :Valée (maréchal), Damrémont (général)et Saint-Antoine. Une inscription, placée sur la maison de M. Nail,
porte l'inscription suivante : « Village Brincard. Quartier de Saint-
Antoine. 1841. » 3 ou 4 cultivateurs étaient déjà établi au villageBrincard (du nom du capitaine du génie qui avait dirigé les premierstravaux et qui, de plus, avait tracé le plan de notre ville), quand, le20 août 1841, on substitua à ce nom, qui honorait un brave officier,celui de Saint-Antoine, qui ne signifie rien, au moins dans la cir-constance.
En 1849, le marché aux légumes est situé sur la place de l'Inten-
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 97
dance, rue Nationale (théâtre). Il est transféré sur la place Bélisaireen janvier 1850.
Séance du 14 octobre 1850. Le Conseil décide que les propriétairesseront obligés de faire construire à leurs frais les trottoirs et lesbordures d'après les plans donnés par l'Ingénieur des Ponts et Chaus-sées et que les eaux pluviales devront avoir une issue au moyen de
rigoles couvertes, en fonte ou en maçonnerie, qui dégorgeront, sousles trottoirs, dans les ruisseaux ou dans les égouts de la ville.
Séance du 21 du même mois. Création et mise en adjudication de
l'emplacement compris entre les routes de Constantine et de la Pépi-nière, afin d'y établir un lieu de stationnement de voitures et de
charrettes, M. Moutte et M. Héraud, entrepreneurs de roulage, ayant,chacun de son côté, fait des offres dans ce sens à la commune.
Le 31 octobre 1850, adjudication des travaux d'établissement de la
place de la République (de l'Eglise), évalués à 18.000 fr. En mars
1851, on plante des arbres sur la place des Chameaux et on démolit
les baraques de l'Intendance, qui se trouvent sur la place réservée
au théâtre.
Le Génie oblige, le 16 avril 1851, la commune à démolir, à pre-mière réquisition, l'abattoir bâti près du cimetière, dans la limite de
la première zone.
Séance du 1er mai 1851. Le Conseil décide la construction de la
halle aux grains sur l'extrémité de la place des Chameaux, à 150
mètres du mur d'enceinte. Le marché aux boeufs, qui y existe, sera
transféré sur l'emplacement vide, à l'angle du chemin du cimetière
et la route de l'abattoir.
La mairie est transférée, le 6 mai 1852, de la maison Scognamiglio,rue Marie-Amélie, 16, dans la rue de Constantine, maison Musso,
près de l'escalier qui conduit à la place Bélisaire. Location : 2.000 fr.
par an. Pendant cette année, on continue les travaux de l'abattoir du
Beni-Mélek. Le lundi, 29 novembre 1852, la mairie est transférée rue
des Numides, ancienne maison des bains français, école secondaire
actuelle.
Dans sa séance du 11 août 1852, le Conseil, examinant une demande
de M. Peisson tendant à ce que la ville fasse arroser la rue Nationale,
afin d'empêcher les magasins d'être abîmés par la poussière, consi-
dérant que cet inconvénient existe dans toutes les rues et que les
ressources du budget ne permettent pas une pareille dépense qui,.14
98 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
d'ailleurs, touche plutôt à la commodité de quelques personnes qu'àla salubrité publique, rejette.
A cette époque, un entrepreneur de Marseille offre d'installer
l'éclairage au gaz. Le Conseil, considérant qu'il existe 85 réverbères
à l'huile qui coûtent 15.000 fr. à la ville, engage, le 15 septembre,cet entrepreneur à venir s'entendre sur place. L'entrepreneur de
l'éclairage à l'huile de notre ville est, à cette date, M. Quasso.Séance du 20 mai 1853. Le Conseil, à l'unanimité, demande à
l'autorité supérieure l'autorisation de substituer au nom de la rue
Mahelma, près de la porte de Constantine, celui de rue de Gourgas,afin d'honorer la mémoire de M. de Gourgas, ancien adjoint, officier
de la Légion d'honneur, chef de bataillon en retraite de l'armée
d'Afrique, décédé en novembre 1852 dans sa propriété rurale, dont
l'exploitation l'avait classé au premier rang parmi les agriculteursde l'arrondissement.
Le Conseil décide, le 28 décembre 1853, le numérotage des maisons
aux frais des propriétaires.Location, le 29 août 1854, à MM. Merles frères, quincailliers, de
la baraque ayant servi d'abattoir communal, près du cimetière, et
du terrain y attenant.
14 avril 1857. L'autorité militaire met à la disposition de la popu-lation la jolie promenade de la bibliothèque militaire, où la fanfare
du Train jouera tous les jeudis et dimanches. La population fut sen-
sible à cette courtoisie.
Séance du 18 mai 1857. Le Conseil décide, à l'unanimité, que la
rue de Stora sera débaptisée et que le nom de rue d'Ambly lui sera
substitué. L'ancienne dénomination était devenue insignifiante et.
l'une des premières maisons bâties dans notre ville l'a été par M.
d'Ambly dans cette même rue de Stora. A partir de l'été de cette
année, on arrose, journellement, pendant la grande chaleur, la rue
Nationale et la place de la Marine.
Le 5 novembre 1857, le Conseil vote un projet de loterie de trois-
millions pour la construction de tous les édifices communaux.
En 1857, il n'y a qu'une seule rue pavée, la rue Marie-Amélie.
En août 1858, la place de la Marine est embellie et garnie de bancs,mais, comme dans toutes les rues de la ville, l'éclairage est défectueux.
Séance du 13 février 1860. Le Maire donne lecture d'une lettre de
M. le Commandant du Génie, faisant connaître que, par suite d'un
ordre laissé par le général inspecteur, l'horloge communale devra
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 99
être transportée sur un bâtiment civil et que, dans le cas où cetransfert ne pourra être effectué avantageusement pour la population,l'entretien de cette horloge, maintenue sur le bâtiment de l'hôpitalmilitaire, sera fait par les soins du service du Génie, à charge du
paiement des dépenses par la municipalité. Le Conseil accepte cette
dernière combinaison.
Séance du 5 mai 1860. Avant de commencer l'ordre du jour,M. Wallet, maire, informe le Conseil que M. de Marqué, capitainede frégate en retraite, officier de la Légion d'honneur, conseiller mu-
nicipal, est décédé à Paris le 2 avril, au moment où il s'occupait de
la création d'un port devant notre ville et demande au Conseil de
s'associer aux regrets que laisse cet homme de bien, pour lequel la
prospérité de notre ville était la préoccupation constante, en donnant
son nom à une des places de la ville. Le Conseil, par un vote unanimeet afin de perpétuer la mémoire de M. de Marqué pour le zèle et le
dévouement qu'il a apportés à la défense de la cité, donne le nom de
de Marqué à la place appelée actuellement place la Marine.
Cette place est aujourd'hui une des plus belles et des plus vastes
de l'Algérie. En terrasse sur la mer, elle occupe une superficie de
5.156 mètres carrés. Une gracieuse balustrade en marbre du Filfila
la borde au Nord, tandis qu'à l'Est elle se termine par une splendide
rangée de palmiers. C'est la promenade favorite des habitants de
notre ville.
Place de Marqué
7 mai 1860. Voeu du Conseil pour que la maison du commande-
ment soit cédée à la ville en vue d'y établir la mairie.
30 juin 1860. Le Conseil adopte un traité avec MM. Payan et Cie
pour les travaux de couverture du marché de la place Bélisaire. Le
100 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
13 août suivant, cette assemblée décide de passer un marché avec
M. Meugnot pour l'éclairage de la ville par le gaz.Le pont de Valée, sur l'oued Saf-Saf, est terminé et livré à la cir-
culation le 3 janvier 1861. Ce pont sort de la maison Ernest Goninet Cie, de Paris. Il pèse, en bloc, 66.336 kilogrammes; les grossespièces, formant l'assemblage et les attaches, sont au nombre de 2.287et pèsent 62.680 kilogrammes. Les rivets, au nombre de 13.928,
pèsent 1.356 kilogrammes. La longueur du pont est de 47 mètres;son ouverture d'arche de 40 mètres; l'élévation de ses parapets de
2m,80 et sa largeur intérieure de 4m,50.Séance du 8 février 1861. Le Maire propose d'acheter la maison
précédemment occupée par l'Hôtel de Luxembourg, pour y installerles services de la mairie. Le propriétaire consentirait la vente au
prix de 110.000 fr., moyennant un remboursement annuel, pendant18 ans, combiné avec un intérêt de 8 %, ce qui mettrait l'achat défi-nitif à 206.152 fr. Renvoi à une Commission d'étude. Le 13 février
suivant, l'achat est voté à ces conditions et un crédit de 10.000 fr.est inscrit pour l'installation des divers services.
Les travaux de construction du marché couvert de la place Bélis—saire commencent le 6 mai 1861.
Le samedi, 23 mars 1861, à deux heures, a lieu la pose de la pre-mière pierre de l'usine à gaz par M.Wallet, maire. Une médaille de
0m,12 en plomb, gravée par les soins de M. Joseph Roger, mentionnece fait. Diverses pièces de monnaies d'argent et de billon y sont
jointes, ainsi que le procès-verbal écrit sur parchemin et soigneuse-ment enfermé dans un étui métallique. Une foule nombreuse assiste-à cette cérémonie. Quelques jours après, on cherche à voler ces-
objets, mais sans y réussir.En 1862, le nom de Mellet est donné à une rue de la montagne,
du nom de M. Mellet, propriétaire près de la mosquée.14 mai 1862. Voeu pour l'obtention d'une subvention, en vue de
couvrir l'égout collecteur du faubourg, le long de la route départe-mentale de Philippeville à Guelma.
Résumé des travaux accomplis en 1863 : Restauration de la grandeciterne romaine, achèvement des études des eaux de Filfila. Créationd'une école-asile à Valée. Détournement du grand égout collecteurde la partie Sud de la ville. Achèvement de la halle couverte aux
poissons, au moyen d'obligations remboursables sur les revenus de-cette halle.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 101
Séance du 19 février 1866. Le Conseil décide d'employer à fairedes rideaux pour la grande salle de la mairie les étoffes en damasachetées pour le pavillon élevé sur le débarcadère lors de l'arrivéede l'Empereur et qui ne peuvent être vendues à cause du semis d'a-beilles d'or dont elles sont ornées.
27 août 1866. Vote d'une somme de 600 fr. pour construction d'un
hangar-abattoir à Stora.
Le premier essai d'éclairage au gaz est fait, dans les rues Impérialeet des Numides, le 15 janvier 1867. Le 23, les magasins commencentà jouir du nouvel éclairage; la maison Strauss éblouit les passantspar les 12 becs des vitrines de sa devanture.
31 août 1871. Le Conseil décide la vente de la mairie et la cons-truction d'un Hôtel-de-Ville sur la place du Théâtre, dont le deviss'élève à 50.000 francs.
23 juillet 1873. Le trottoir longeant dans toute sa longueur la
place de l'Eglise, du côté de la rue Nationale, et qui, en hiver,ressemblait à un marais, subit une transformation heureuse. Le ni-
veau est abaissé de 25 à 30 centimètres et les pavés pointus qui le
couvraient sont remplacés par une forte couche de ciment.
Séance du 16 décembre 1882. M. Portelli, Fortuné, conseiller
municipal, lit l'exposé ci-après :
En ma qualité d'enfant de Philippeville, je viens soumettre à l'approbation duConseil un voeu qui, je l'espère, sera accueilli favorablement. Il s'agit du 3e régi-ment de Zouaves.
Le 3e Zouaves a été créé à Philippeville le 23 mars 1852 et confié an comman-dement du brave colonel Tarbouriech. En 1854, deux ans après sa formation, ilest le premier à affronter avec deux de ses bataillons, l'armée russe en Crimée,dans la fameuse journée de l'Aima. Le maréchal Pélissier les signale à l'admiration
de tous dans ces termes : « Les Zouaves se sont fait admirer des deux armées ; ce
sont les premiers soldats du monde. »
A Inkermann, le 3eZouaves se porte au secours des Anglais, surpris par l'ennemi
dans leur propre campement, et les dégage en traversant plusieurs lignes enne-
mies, qui sont rompues. Le 7 juin 1855, il enlève la redoute du Mamelon Vert,sous les ordres du colonel de Polhès. A l'assaut de la tour de Malakoff, les deux
bataillons de Zouaves font des prodiges de valeur.
En 1859, le régiment est appelé en Italie, sous les ordres du colonel de Chabron.A Palestro, le combat étant à peine engagé, il franchit, sous la mitraille et les
balles, le canal qui le sépare des Autrichiens, les culbute, s'empare des canons et
poursuit l'ennemi pendant trois kilomètres. C'est pour ce haut fait que le drapeaudu régiment est décoré de la médaille militaire par le roi Victor-Emmanuel.
En 1862, deux bataillons du 3e Zouaves partent pour le Mexique, sous les ordres
du colonel Mangin. Jusqu'en 1867, ils conquièrent de nouveaux titres de gloire
102 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
dans ce pays malsain, où les embûches les attendent à chaque pas. Citons comme
principaux faits d'armes au Mexique les combats de San-Marco, de Puebla, du
col de Candellaria, de San-Lorenzo, où le 1er bataillon culbute l'armée mexicaine,lui prend huit canons et trois drapeaux et fait une foule de prisonniers. Après ce
combat, le drapeau du régiment est décoré de la croix de la Légion d'honneur:
En 1870, le régiment, sous la conduite du colonel Bocher, fait partie du corpsd'armée du maréchal Mac-Mahon. A Froeschwiller, il lutte toute la journée contre
des forces bien supérieures en nombre et ne se retire qu'après avoir perdu les
deux tiers de son effectif et 43 officiers sur 57.
Vous parlerai-je de ses exploits en Afrique ? Ils vous sont connus. Toutefois,
permettez-moi de vous citer l'expédition de la Grande Kabylie, où le régiment resta
constamment en colonne pendant trois années consécutives, 1856,1857 et 1858.
Mais, laissant de côté le courage militaire de ce régiment, pensons au courage
civique dont ont fait preuve tant de ses membres. A Mexico, le colonel Tourre et
le clairon Schleinker périssent victimes de leur dévouement en voulant sauver des
flammes des habitants et des Zouaves enveloppés par elles. Sans nous reporter
plus loin, n'avons-nous pas été témoins de la mort tragique des Zouaves Boubien,Clairet et Blondeau, brûlés vifs dans l'incendie du 22 août 1881, en disputant au
feu nos riches et belles forêts ? Je ne pourrais vous dire les noms de tous les braves
du 3° Zouaves qui se sont distingués depuis la création du régiment ; la liste en
serait trop longue. La bravoure de ce corps d'élite n'est-elle pas d'ailleurs connue
de tous ?
Constatons qu'il est à Philippeville depuis 1852, époque de sa création ; qu'il ya toujours tenu garnison ; que ses relations avec la population civile ont été conti-
nuellement sympathiques; que beaucoup d'officiers se sont mariés dans notre ville
et qu'un grand nombre de sous-officiers et de soldats s'y sont retirés après l'expi-ration de leur temps de service.
Pour tous ces motifs, je vous propose, afin de perpétuer dans notre ville le sou-
venir du 3e régiment de Zouaves, de vouloir bien donner son nom à une des rues
de la ville.
Le Conseil, à l'unanimité, décide d'approuver le voeu de M. Por-telli et, dans sa réunion du 20 janvier 1883, le nom d'Avenue du 3eZouaves est donné à la grande allée qui relie la rue de l'Arsenal àla place des Zouaves.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 103
UN REGIMENT DE BRAVES
Lutter sans trêve ni repos,En méprisant dangers, entraves ; —
Toujours joyeux, toujours dispos,Rendre des points même aux plus braves ;
Orgueilleux de leur fier drapeau,Insoucieux de la mitraille,Savoir sans peur risquer leur peau ; —
Impassibles dans la bataille,
Echevelés, couverts de sang,Manier le fusil, le sabre ; —
Et, quand la mort fauche par rang,
Rapprochant en ronde macabre,
Égaux, officiers et soldats,Garder leur sang-froid, leur courage ; —
Ignorés martyrs des combats,Mourir en frappant avec rage ; —
Entretenir tous en leurs coeurs
Nul autre amour que la Patrie ; —
Tels sont les soldats, les vainqueurs
De Crimée et de Kabylie ! —
Enfants du même régiment,
Zélés défenseurs de la France ;Oubliant vite, en un moment,Un jour passé dans la souffrance;Aimant le bruit sourd des canons ;Voilà cette troupe de braves ! —
Et ce régiment de lions
Se nomme : Troisième Zouaves.
L. B.
28 août 1887.
104 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le nom de Léon Gambetta est donné, le 16 décembre 1882, à la
rue du Cirque, ce qui ne signifiait rien d'ailleurs puisque le monu-
ment antique auquel elle aboutit était un théâtre et non un cirque.Le 6 juin 1885, il est décidé que la place du Cirque portera le nom
de place Victor Hugo et, le 22 du même mois, que la rue de Stora
sera appelée rue Amiral-Courbet.
En 1888, le service militaire fait procéder, sous les ordres de
M. Henri Noël, adjoint du Génie, propriétaire dans notre ville, à la
démolition de l'ancienne porte de Constantine et à son élargissement.La ville fournit, à cet effet, une subvention de 12.000 francs.
Séance du 16 janvier 1892. M. Henri Ranoux, architecte, cède
gratuitement à la commune les rues de la cité Castel-Dugenet qu'ila achetées. Le Conseil décide, à titre de gratitude, qu'une de ces rues
portera le nom de rue Henri Ranoux.
16 juin 1894. La rue des Numides est nommée rue Théophile
Réguis, en souvenir d'un homme de bien qui fut toujours un ardent
républicain.12 novembre 1895. La rue Marie-Amélie est dénommée rue Henri
Teissier, pour rendre hommage à la mémoire d'un ancien présidentde la Chambre de Commerce, officier de la Légion d'honneur, quiavait créé dans notre ville la maison de banque et de commerce la
plus importante et la plus connue de toute l'Algérie. Elle est aujour-d'hui dirigée par son fils aîné, M. Albert Teissier, conseiller muni-
cipal, conseiller général et président de la Chambre de Commerce.6 janvier 1899. La rue de la Synagogue portera, à l'avenir, le nom
de rue « de Lambert ». Madame de Lambert, femme très charitable,fit des legs importants à la ville et au bureau de bienfaisance.
1er avril 1899. Le Conseil décide que la rue des Poudrières sera
dénommée rue Capitaine Drouin. M. François Drouin, né à Marsols
(Alsace-Lorraine), fut élevé à Philippeville, où il était venu très
jeune et où son père était gardien du Génie. Enfant de troupe, il
s'engage à 18 ans au 3e Zouaves, où il conquiert tous ses grades.Lieutenant, il fait la campagne deTunisie et il est tué, étant capitaine,le 5 juillet 1885, à l'attaque de Hué (Annam).
IV
AMENAGEMENT DES EAUX
« On a trouvé de nombreuses citernes, généralement petites, surle plateau du Skikda. La croupe septentrionale du Bou-Yala (côtéOuest de la ville) abondait en citernes, qui se rencontrent à chaquepas et dont plusieurs sont importantes, notamment celle du fortd'Orléans et celle qui sert de fondations à la porte de Stora. (De
Marcilly, capitaine du Génie). »
Rusicade a dû, dans son origine, tirer ses eaux du Beni-Mélek et
aussi des nombreuses sources du Bou-Yala oriental, puis, quand la
population et les richesses de la ville romaine eurent augmenté, on
amena les eaux de l'Oued-Rira, qui baigne les flancs occidentaux du
Filfila.
« Vers 1842, le capitaine du Génie Riffault, chargé d'élaborer le
projet de conduite d'eau de l'Oued-Rira, a reconnu sur cette rivière
les traces de la prise d'eau romaine; il a vu également des vestigesde cette conduite sur des ruisseaux intermédiaires, notamment sur
l'Oued-El-Ksob. C'est à cette conduite que l'on attribue les deux
piliers massifs qui se trouvent à l'Est du Skikda, à l'entrée de la pro-
priété de Marqué (actuellement de Ganay). (De Marcilly). »
Une des sources venant des monts Filfila porte encore aujourd'hui,
d'après la tradition arabe, le nom d'Aïn-Roumane, la fontaine romaine.
a La conduite romaine du Beni-Mélek, qui amenait l'eau, épurée,aux grandes citernes alimentant la ville, avait une longueur de
3.580 mètres. Elle était si parfaitement visible en 1847 et 1848 quel'administration des Ponts et Chaussées pouvait, en 1848, mettre en
adjudication la restauration de la citerne de la prise d'eau et la répa-ration du barrage ....
« Les magnifiques citernes de Stora et de Philippeville, restaurées
15
106 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
par les Français en 1845 et 1846, servent encore aujourd'hui à ali-
menter la population des deux villes voisines (Jules Chabassière
et Louis Bertrand. Rusicade d'après ses ruines). »
En 1843, la ville n'est alimentée que par des puits publics ou
privés ; l'état dans lequel ils se trouvaient au moment de l'occupa-tion est sensiblement amélioré par de nombreux curages. Les cordes
des seaux sont remplacés par des chaînes de fer.
En 1845, les citernes romaines sont déblayées et on fait les appro-visionnements nécessaires pour les restaurer. Le conduit, de 4.000
mètres de longueur, qui amenait les eaux du Beni-Mélek, est décou-
vert en entier, mais il est en si mauvais état qu'il devra être refait
en totalité. Le Beni-Mélek ne fournissant de l'eau que pendant huit
mois de l'année, les citernes devront suffire à l'approvisionnement de
la ville pendant quatre mois. Il existe bien quelques puits, mais la
plupart tarissent en août et septembre. Les citernes contiendront
7.800 mètres cubes d'eau, que l'on distribuera dans les diverses partiesde la ville, au moyen de tuyaux en fonte formant siphon. Les dépensesfaites en 1845 pour la restauration des citernes s'élèvent à 49.994 f r. 03.
Cette restauration sera achevée en 1846 et les 700 mètres de conduite
compris entre le mur d'enceinte et les citernes seront reconstruits
en entier.
Séance du 23 avrill849. Le citoyen Peschart Dambly, maire,soumet au Conseil : l°Une lettre du 14 courant, que lui adresse M. le
Sous-Directeur des affaires civiles, relative aux projets à établir pourl'amélioration du système des eaux dans la ville et la campagne et
par laquelle il autorise le Conseil à se réunir extraordinairement à
l'effet de délibérer sur cette matière; 2° un extrait du procès-verbalde la Commission des routes et dessèchements, concernant le projetde la conduite d'eau du Beni-Mélek ; 3° un plan, avec rapport à
l'appui, traitant des travaux à exécuter pour amener les eaux des
monts Filfila; 4° un procès-verbal de conférence sur le même sujetentre l'Ingénieur ordinaire et le capitaine du Génie ; 5° le plan de la
promenade à établir autour des citernes romaines.
Le Conseil examine avec beaucoup de soin les divers documents
produits et il ne se dissimule pas l'importance de cette grave question.
Après une discussion qui roule sur les dépenses déjà faites pourconduire les eaux du Beni-Mélek dans les citernes romaines et sur
l'avantage réel que procurerait l'exécution du projet présenté par
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 107
l'Ingénieur ordinaire, tendant à amener dans cette ville les eaux duFilfila en les faisant passer par les villages Valée et Damrémont, leConseil est d'avis de suspendre tout d'abord les travaux projetésconcernant les vastes citernes situées dans l'intérieur de la ville.
Considérant, en outre, que le nouveau projet relatif aux eaux desmonts Filfila, bien que devant entraîner une dépense approximativede 500.000 fr., promet d'apporter des résultats très avantageux ; qu'ilest déjà hors de doute que son exécution procurera à la commune de
grands revenus en livrant des concessions d'eau aux habitants; consi-
dérant aussi que la quantité d'eau qui sort, en toutes saisons, des
carrières de marbre du Filfila, quantité qu'il est possible d'évaluer
au moins à 2.592.000 litres par 24 heures, d'après l'opinion émise parMM. de Marcilly et Lionnet, le premier chef du Génie et le second
Ingénieur ordinaire, peut, tout en approvisionnant abondamment la
ville, les villages Valée et Damrémont, les diverses fermes situées
entre Filfila et Philippeville, fournir encore des excédents considé-
rables qui seront employés à l'irrigation des terres;
Le Conseil, à l'unanimité, émet le désir formel que des études défi-
nitives et complètes soient faites le plus tôt possible sur le projetdont il s'occupe en ce moment et il déclare, dès aujourd'hui, quela réalisation de ce projet, dont l'utilité est si évidente, devant
contribuer à la prospérité de la commune et les sources du Filfila
devant être un jour des sources de richesses pour la ville et son ter-
ritoire, il s'oblige à voter une somme de 200.000 fr. à l'effet de mettre
à exécution ce magnifique projet. Cette somme sera payée en quatreannuités de 50.000 fr., à partir du jour où les travaux seront com-
mencés.
Séance du 24 mars 1851. Le Conseil vote la pose de dix bornes-
fontaines aux emplacements ci-après :
1° A l'angle de la place de Commerce et de la rue Marie-Amélie;
2° A l'angle des rues Fenech et Damrémont (montagne Ouest) ;
3° Place Bugeaud, au croisement des rues Valée et d'Orléans ;
4° Place Bélisaire, près l'hôpital civil, rue 3eChasseurs d'Afrique ;
5° A l'angle des rues Napoléon et Sétif (rues de France et Valée);6° A l'angle des rues Médéah et Galbois (place Wagram);7° A l'angle des rues Nationale et des Citernes, maison Scogna-
miglio ;8° A l'angle de la rue Nationale et de la rue du Cirque ;
108 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
9° A l'angle des rues Saint-Augustin et de Bône;10° Dans l'Est de l'hôpital militaire.
Le 30 juin 1853, adjudication d'une conduite en poterie pour ame-
ner les eaux du Beni-Mélek dans les citernes romaines. Devis :
73.036 fr. 26. Cette conduite fut achevée, dans l'espace de trois mois,
par le service des Ponts et Chaussées. Longueur : 4.000 mètres.
Séance du 13 mai 1859. Le Conseil vote une somme de 9.000 fr.
pour l'appropriation des citernes romaines sous le théâtre actuel.
Séance du 10 août 1859. Le Maire soumet au Conseil un projetdressé par l'Ingénieur des Ponts et Chaussées pour l'appropriationdes citernes romaines sous le théâtre ; au moyen de cette appropria-tion on pourrait utiliser une grande quantité d'eau qui se perd toutes
les années dans le ravin, faute de récipient pour la recueillir. Le
Maire ajoute que depuis que ce projet lui a été présenté, d'autres
citernes plus vastes ont été découvertes sur la montagne à proximitéde celles qui servent actuellement de réservoir et il demande s'il ne
conviendrait pas de commencer les travaux d'appropriation de ces
dernières avant de commencer ceux du théâtre. Le Conseil, aprèsexamen du projet présenté par l'Ingénieur, considérant qu'en effet
les citernes récemment découvertes sur la montagne ont l'avantagesur celles du théâtre d'être plus grandes et de pouvoir desservir toute
la ville, tandis que les autres ne peuvent distribuer l'eau que dans
le quartier le plus bas de la marine et qu'il convient, par conséquent,de donner la priorité à celles de la montagne, décide d'ajourner les
travaux d'appropriation des citernes placées sous le théâtre.
Délibération du 30 mai 1862. Le Maire expose que, dans la séance
du 24 mai courant, le Conseil a renvoyé à la Commission des travaux
la demande formée par le sieur Chapuis à l'effet de passer un traité
avec la commune au moyen duquel il s'engage à fournir à la ville,dans un délai déterminé, une quantité de 1.080 litres d'eau à la
minute; qu'afin d'édifier complètement le Conseil sur cette question,il a prié M. le Pharmacien-Major de l'hôpital militaire de faire
l'analyse de l'eau du Saf-Saf au point où le sieur Chapuis doit éta-blir sa prise d'eau. Le Maire donne lecture du rapport de ce praticien,d'où il résulte que l'eau du Saf-Saf est parfaitement potable et n'estnuisible en aucune sorte.
Le Conseil, considérant qu'il convient de ne pas laisser échapperune circonstance aussi favorable pour alimenter la ville de l'eaudont elle manque presque complètement, prie le Maire de dresser,
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 109
de concert avec le sieur Chapuis, un projet de traité, pour en êtreensuite délibéré dans une de ses plus prochaines réunions.
Il ne fut pas donné suite à cette délibération.Séance du 13 mai 1863. Vote d'une somme de 20.000 fr. pour
continuation des travaux de restauration de la citerne romaine de la
montagne et d'un traitement de 6.000 fr. par aa au conducteur desPonts et Chaussées, M. Biéron, chargé de l'étude des travaux d'amé-
nagement des eaux du Filfila et mis à la disposition de la communeà partir du 1er mai 1863.
Séance du 5 août 1863. Le Maire soumet au Conseil une proposi-tion de M. de Bouyn, qui offre de céder annuellement à la ville une
quantité d'eau de 20.000 mètres cubes pour une somme de 20.000 fr.
par an, au moyen d'un barrage qu'il construirait à ses frais dans le
ravin de l'Oued-Louach. Dans le cas où la commune voudrait opérerle rachat de ces travaux, elle aurait à lui payer un capital de250.000 fr.,
qui pourrait être remboursé par amortissement annuel avec intérêt
au taux de 8 %. Le Conseil, considérant que la quantité d'eau pro-
posée par M. de Bouyn n'est pas suffisante pour l'alimentation de la
population et que, dès lors, le sacrifice qu'il demande à la ville est
de beaucoup trop élevé, à l'unanimité, n'admet pas la propositionde M. de Bouyn.
Séance du 12 février 1864. Le Maire est autorisé à contracter
avec le Crédit Foncier un emprunt de 800.000 fr. pour l'exécution
des travaux d'aménagement des eaux du Filfila, dont la dépensetotale doit s'élever à un million environ.
Dans sa séance du 27 mai suivant, le Conseil vote une somme de
800 fr. pour études à faire par un conducteur des Ponts et Chaussées
du projet présenté par M. de Bouyn en vue de l'aménagement de la
source de l'Oued-Louach. Le 23 septembre de la même année, cette
assemblée rejette ce projet; le rejet est basé sur ce que l'eau, restant
assez longtemps exposée à l'air et au soleil, se corromperait facilement.
Séance du 1er mars 1867. Les travaux d'aménagement des eaux de
l'Oued-Ksob, de l'Oued-Rbaïb et de l'Oued-Meknesset étant terminés
dans leurs parties essentielles, M. Biéron, conducteur des Ponts et
Chaussées, en congé illimité pour ce service spécial, a demandé sa
réintégration dans l'administration. Le Conseil, à l'unanimité, lui
décerne un témoignage de satisfaction.
L'inauguration des eaux du Filfila a lieu le dimanche, 3 mars 1867.
Après 28 ans de pénurie et de disette, la population voit enfin son
110 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
voeu le plus cher exaucé. Aussi, malgré quelques ondées qui venaient
de tomber et l'imminence de nouvelles pluies, vers quatre heures,une foule compacte encombrait la place du 3e Zouaves, que domine
le château d'eau. Les autorités civiles et militaires, les chefs de ser-
vices et le personnel des Ponts et Chaussées avaient été officiellement
convoqués à cette intéressante cérémonie. Le cortège était précédé
par le clergé, qui avait endossé ses plus beaux habits de fête, et
escorté par la compagnie des Sapeurs-Pompiers, heureux, eux aussi,de n'avoir plus à craindre la disette d'eau dans l'exercice de leurs
fonctions humanitaires. La Société Philharmonique était venue ap-
porter son tribut de reconnaissance. M. l'Ingénieur des Ponts et
Chaussées attendait le cortège au haut de l'escalier qui conduit au
réservoir; il fait officiellement la remise des eaux au Maire. Il dit
que la conduite des eaux de l'Oued-Ksob, de l'Oued-Rbaïb et de
l'Oued-Meknesset amène un volume de 25 à 30 litres d'eau par seconde
et que, par les plus grandes sécheresses, ce débit descendra à 10
litres par seconde. Le Maire prend la parole et remercie tout le
monde du concours précieux qui a amené un si beau résultat : l'Em-
pereur, le Sous-Préfet, l'Administration supérieure, le Conseil muni-
cipal, l'Ingénieur en chef et le Conducteur des travaux, exécutés parMM. Oadot et Simon. Puis le clergé procède à la cérémonie de labénédiction.
Le 15 mai 1867, les arabes, sous le prétexte que la ville a fait venir
à grands frais l'eau des sources se trouvant sur leur territoire, démo-
molissent le barrage de l'une d'elles, la plus importante.Le 12 novembre 1880, la ville contracte avec le Crédit Foncier
un emprunt de un million ; sur cette somme, 260.000 fr. sont consacrés
à l'aménagement des eaux du Filfila. Adjudicataire : M. Guide.
Un autre emprunt de 492.000 fr. est consenti à la commune parle Crédit Foncier le 28 juin 1901. Les dépenses d'aménagement deseaux y figurent pour une somme de 142.500 fr., savoir :
1° Travaux d'élévation des eaux de l'Oued-Rira dans la
conduite du Filfila et d'élévation des eaux du Filfiladans les citernes 70.000
2° Achèvement des conduites d'eau 22.5003° Conduite d'eau de Valée 12.0004° Conduite d'eau de Saint-Antoine 38.000
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 111
Tout en rendant hommage à la bonne volonté de tous les fonction-
naires de l'Etat et de la Commune qui ont présidé à l'aménagementdes eaux depuis la création de notre ville, la population, qui s'est
imposé d'énormes sacrifices à cet effet, ne s'explique pas comment,tous les ans, elle est privée du précieux liquide pendant l'été, c'est-
à-dire au moment où elle en a le plus besoin.
Aussi nous avons tenu, dans le but de l'éclairer sur cette question,à publier les renseignements suivants, que nous avons puisés dans
des documents officiels que M M. les Ingénieurs des Ponts et Chaussées
ont bien voulu, avec leur obligeance habituelle, nous communiquersur notre demande.
ALIMENTATIONS EN EAU POTABLE DE PHILIPPEVILLE
APERÇU GENERAL DES RESSOURCES EN EAU
C'est un fait digne de remarque qu'il existe peu de source? aux
environs de Philippeville et que leur débit est extrêmement faible.
De nombreux puits ont été creusés en ville ; ils donnent presque tous
de l'eau saumâtre, sortant des schistes. Aucune source ne se fait jourdans les mamelons du Skikda et du Bou-Yala, sur lesquels est bâtie
la ville haute, ni dans la partie basse de celle-ci.
Le point d'eau le plus voisin est le Béni Mélek, appelé prise d'eau.
On a fait une conduite en maçonnerie pour porter dans les citernes
de la ville l'eau de pluie recueillie dans deux petits ravins, colligéedans des galeries souterraines. De source véritable, il n'y en a réel-
lement pas.Sur les contreforts qui se terminent dans la plaine du Zéramna, à
l'Ouest de ce cours d'eau, on ne connaît que des sources d'un débit
insuffisant même pour alimenter les quelques fermes construites sur
ces coteaux. Il faut remonter la vallée du Zéramna, à douze kilo-
mètres à l'Ouest du village de Saint-Antoine, pour rencontrer une
source d'un volume appréciable : l'Ain-Mira, donnant quelques litres
à la minute.
Dans la vallée même et"dans la plaine du Zéramna, on ne se pro-
cure de l'eau qu'en creusant des puits et en élevant le liquide au
moyen de pompes ou plus généralement de norias.
Dans le massif compris entre l'Estaya et la vallée du Saf-Saf, l'eau
112 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
est encore plus rare; à peine deux ou trois suintements donnent-ils
une alimentation très insuffisante aux quelques fermes existantes.
Dans la vallée du Saf-Saf, les alluvions sont plus pauvres en eau
potable que celles du Zéramna. Les puits n'y ont généralement un
volume un peu notable que s'ils sont placés près de la rivière, dont
ils prennent le liquide souterrainement, à la faveur du terrain per-méable dont sont formés les abords des cours d'eau.
Depuis le mamelon de Saoudi jusqu'aux montagnes derrière le
village Valée, l'eau potable fait à peu près défaut. Le douar Rorab
n'a qu'une source méritant ce nom, mais le débit est à peine suffisant
pour les habitants et les bestiaux.
Le village Valée possède, dans l'Est de ce centre, un point d'eau,
appelé Fontaine Charmante. Mais, en été, la source tarit et on a eu
jusqu'à ces derniers temps recours à l'eau d'un puits artésien élevé
par un moteur à vent.
Le mamelon de Skikda, depuis Philippeville jusqu'au Saf-Saf, n'a
pas une goutte d'eau. Dans la plaine s'étendant de l'embouchure du
Saf-Saf jusqu'aux contreforts qui se terminent derrière la ferme
Barrot, le terrain est fort peu aquifère; les puits réussissent assez
rarement. Les dunes, qu'on rencontre en se dirigeant vers le Filfila,sont d'une extrême sécheresse.
Si on étend de dix à vingt kilomètres le cercle qui vient d'être
exploré et qu'on commence par le Nord, on voit Stora et les environs
à peu près privés d'eau; sans les citernes romaines, restaurées et
agrandies, dans lesquelles on amène de l'eau de pluie du ravin des
Singes, le village n'aurait aucun moyen d'alimentation. En se diri-
geant jusqu'à la grande plage, on ne rencontre-que des ressources
très précaires et insuffisantes pour la population exclusivement indi-
gène qui habite le pays.Au village d'Aïn-Zoult (N.-O. de Philippeville), l'eau suffit pour
les besoins des habitants, à la condition que le débit nocturne soit
emmagasiné dans un réservoir.
Dans la partie Ouest, bien que couverte de forêts, l'absence desources véritables est aussi complète.
Les régions du Sud-Ouest et du Sud ne sont pas mieux partagées.On connaît Aïn-Zetouna; mais, en été, on n'y trouve guère que dela boue. Saint-Charles est fort mal alimenté ; la commune chercheà amener au village le produit de l'Aïn-Guelt-El-Bahary, qui se fait
jour à l'Oued-Deb.
HISTOIRE DE PIIILIPPEVILLE 113
En revenant par le Sud-Est et l'Est, on rencontre Ras-el-Ma, dont
la source ne dépasse pas un demi litre à la seconde, puis Bissy, dont
les deux sources, Aïn-Latrones et Aïn-Melah, sont presque à sec
chaque été.
Aucune autre ressource en eau n'est disponible qu'à l'Oued-Mek-
nesset, qui tarit souvent aussi en été. Il faut arriver sur le flanc
septentrional du Djebel-Halia et sur le versant Sud du Filfila pourrencontrer de l'eau en excédent sur les besoins du pays.
Si on étend encore le cercle autour de Philippeville, on ne trouve
de l'eau en quantité appréciable que dans le douar El-Ghédir (com-mune mixte de Jemmapes) au lieu dit : Aln-El-Hammam, situé à
vingt-cinq kilomètres environ au Sud de Philippeville.L'eau y est tiède et très chargée de sels calcaires, mais elle est
potable et le débit atteint jusqu'à cinquante-cinq litres à la seconde.
On y aura peut-être recours un jour.Etant donné que le Beni-Mélek n'a jamais constitué une ressource
de quelque importance, on a cherché à amener en ville un volume
suffisant d'eau pour répondre aux besoins d'une ville naissante, mais
qui comptait déjà une population de 12.500 âmes.
Avec l'eau du Beni-Mélek, emmagasinée dans les citernes et l'écou-
lement normal compté pour seize litres à la minute (ce débit est
descendu à quatre litres en 1862), la population pouvait recevoir neuf
litres et demi par jour et par habitant.
C'est dans ces circonstances qu'a été étudiée l'adduction des eaux
du Djebel-Halia et du Filfila en 1863.
Cette étude a été faite par M. Gay, alors Ingénieur des Ponts et
Chaussées à Philippeville; il la présenta lui-même à la date du 7
novembre 1863.
On croyait du reste avoir complètement résolu le problème. M. le
capitaine du Génie Brincard, en 1843, et M. l'Ingénieur des Ponts et
Chaussées Lionnet, en 1849, avaient évalué le volume total des
sources de l'Halia-Filfila à trente litres par seconde, soit 2.500 mè-
tres cubes par jour.Une telle ressource permettait de livrer à une population de 20.000
âmes cent vingt-cinq litres d'eau par jour et par habitant, en admet-
tant que toutes les sources de l'Halia-Filfila fussent amenées dans
la ville dont la population aurait doublé.
Mais, déjà en 1863, le jaugeage des sources ne donna que quinzelitres à la seconde, soit 1.250 mètres cubes par jour; toutefois en
16
114 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
escomptant que des captages faits avec soin augmenteraient le débit
des sources, le projet de la conduite d'eau fut fait pour porter cin-
quante litres à la seconde.
On sait que les premiers travaux eurent pour but d'amener en ville
les eaux des premières sources et cours d'eau du Djebel-Halia (Oued-
Meknesset, Oued-Ksob, Oued-R'baïb). ,
En 1880, on prolongea les travaux jusqu'au Filfila et on amena
dans la conduite maîtresse les autres sources (Oued-M'sara, Oued-
Azib-Chabin, Oued-Djemen-Lakroud, Aïn-M'bradi, Aïn-Roumane,
Ain-Marbouba).
Ces travaux furent exécutés après une année de sécheresse, durant
laquelle le débit de toutes les sources était descendu à 300 mètres
cubes par jour.La diminution progressive du débit des sources, par suite de-
sécheresse et d'incendies des forêts, a établi un régime d'après lequelle minimum de 300 mètres cubes se produit assez souvent ; mais,
chaque année, il descend à 500 mètres. En 1903, le débit a même
été inférieur à 300 mètres cubes pendant une partie de l'été.
Mais, alors que les sources atteignaient leur débit minimum, on
constatait que la rivière principale, Oued-Rira, roulait dans son lit
un volume qui, mesuré en été, différait peu de huit litres à la seconde,soit plus de 600 mètres cubes par jour.
En distribuant 1.000 à 1.200 mètres cubes par jour, les besoins
en eau de la population sont très convenablement satisfaits.
C'est donc ce volume qui doit être amené en ville. Du moment
que le débit réuni de toutes les sources descend fréquemment au-
dessous de 500 mètres cubes, on fut obligé de recourir, pour compléterla quantité utile à la consommation normale, à l'eau qui se perdaitdans l'Oued-Rira.
La ville a, sur les projets du service des Ponts et Chaussées, installé
dans l'Oued-Rira un appareil élévatoire, qui élève dans la conduite
d'amenée du Filfila un volume de 600 mètres cubes environ, pourlequel il a été construit, soit le débit total de la rivière, accru des
infiltrations souterraines. Pour se faire une idée de la diminution
des réservoirs naturels dans la région de l'Halia-Filfila, autrefois si
riche en eau, on doit noter, en effet, que la quantité de liquide cou-
lant à la surface ou maintenue dans les sables formant le fond de
l'Oued-Rira, est descendue cette année à 350 mètres cubes environ;
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 115
en sorte que l'ensemble de toutes les eaux réunies a été, pendant la
période sèche, de 650 à 700 mètres cubes par vingt-quatre heures.
Si la sécheresse persistait, les eaux de l'Halia-Filfila ne suffiraient
plus à l'alimentation publique de Philippeville et de ses environs.
Il y a lieu d'espérer qu'après une succession d'années sans pluiessuffisantes viendra une période plus humide, rendant aux sources
sinon leur débit ancien, du moins une grande partie de ce débit,
aujourd'hui réduit à son extrême minimum.
HISTORIQUE RESUME DU FONCTIONNEMENT DU SERVICE DES EAUX
DE 1892 A 1902
Philippeville, comme la plupart des villes algériennes, a vu son
alimentation en eau potable fort compromise pendant les étés qui ont
suivi des hivers peu pluvieux. Malgré la construction, en 1879-1880,de la conduite amenant les eaux des sources de l'Halia-Filfila, la
disette se renouvelait chaque année.
En 1892, la population fut éprouvée cruellement par le manqued'eau et cette calamité était encore aggravée par l'insuffisance des
ouvrages hydrauliques de distribution ; les réservoirs de Skikda, quel'on construisait, n'étant pas encore en service, il était impossible de
constituer une réserve qui eût permis de régler la distribution des
eaux et d'assurer, au moins pendant quelques jours, l'alimentation
de la ville en cas d'accident sur la conduite d'amenée. Les eaux
étaient distribuées, au fur et à mesure de leur arrivée, dans quelques
quartiers de la ville et, dans chacun d'eux, pendant quelques heures
par jour.Le personnel employé à ce service, outre qu'il était souvent renou-
velé et parfois insuffisamment préparé à l'étude des questions hydrau-
liques, manquait de l'indépendance nécessaire, non seulement pourfaire un travail méthodique destiné à la connaissance du régime des
eaux d'alimentation et à l'élaboration du programme des améliora-
tions possibles, mais encore pour assurer une distribution rationnelle
des eaux amenées par la conduite maîtresse.
La disette causée par l'insuffisance du débit de la conduite, en
1892, appela l'attention du Conseil municipal sur la proposition que,six ans auparavant, en 1886, un architecte communal avait faite de
capter les eaux de l'Oued-El-Gatt et de les élever dans la conduite
du Filfila, située à peu de distance, mais à un niveau supérieur.
116 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Sur l'initiative de quelques conseillers municipaux, le projet fut
repris, étudié, discuté et accepté; il reçut même un commencement
d'exécution. Mais son examen, les enquêtes pour obtenir la conces-
sion des eaux, l'approbation des marchés à passer avec les entrepre-
neurs avaient exigé un délai assez long et les pluies de l'hiver surve-
nant arrêtèrent les travaux commencés qu'elles rendaient inutiles.
L'Oued-El-Gatt fut oublié.
Au commencement de l'été 1893, M. René Ricoux, maire, chargea
le service des Ponts et Chaussées de dresser les projets des travaux
destinés à améliorer l'alimentation de la ville, et, pour faciliter sa
tâche, lui remit la direction du service des eaux. La première tour-
née faite par l'Ingénieur ordinaire, M. Beltçaguy, et par le conduc-
teur, M. Brémond, le 1er juin, révéla un état de choses des plusfâcheux. La plus grande partie des eaux fournies par les sources du
Djebel-Halia et du Djebel-Filfila ne pouvant être débitée par la
conduite en fonte, se perdait en beaucoup de points ; les captageslaissaient à désirer et presque toutes les conduites secondaires étaient
obstruées par des dépôts calcaires.
Sur la proposition des Ingénieurs, des crédits furent accordés pour
exécuter les travaux les plus urgents et notamment pour vérifier le
profil longitudinal de la conduite. Des nivellements précis mirent en.
évidence des défectuosités nombreuses dans l'établissement de cette
conduite, mais démontrèrent surtout l'insuffisance de la pente géné-rale de cet ouvrage, dont le débit était dès lors inférieur à celui des
sources.
L'une des erreurs d'établissement de la conduite interrompit pen-dant plusieurs jours,.à la fin de 1894, l'arrivée des eaux du Filfila.
Dans le dernier ravin, traversé en siphon par la conduite en fonte
(l'Oued-Rbaïb), l'écoulement se faisait assez bien., lorsque le siphonétait amorcé, mais, au mois de novembre 1894, le garde des eaux
ayant été dans l'obligation de manoeuvrer la vanne de vidange pour
rejeter les eaux salies par les pluies, le siphon se désamorça et, dès
que la vanne fut refermée, l'air s'accumula en un point de la conduite
et il ne passa plus une goutte d'eau au-delà de ce point.
On avait déjà commencé les déblais pour rectifier le profil de la
conduite, lorsque le conducteur proposa de percer le tuyau en fonte,afin de laissser une ouverture pour la sortie de l'air. Cette solution
ayant été adoptée et exécutée, l'écoulement se fit aussitôt.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 117
Cette disposition existe encore et a rendu inutile la rectification
du profil de la conduite, qui eût occasionné une dépense importante.La transformation de la conduite libre en conduite forcée, dont
l'origine était placée à une hauteur suffisante pour porter la pentede 0m,001 à 0m,0052 fut projetée et réalisée en 1894; cette modifi-
cation, en supprimant toutes les pertes d'eau, avait augmenté d'une
façon notable le débit de l'aqueduc et, jusqu'en 1897, la ville futalimentée convenablement.
L'hiver de 1896-1897 ayant été très sec, le manque d'eau se fit denouveau sentir dès le mois de juillet suivant ; au mois d'août la
disette devint inquiétante : on ne recevait plus que 690 mètres cubes
par jour, quand il en aurait fallu 1.200. Le projet de captage des
eaux de l'Oued-El-Gatt fut repris et mis à exécution ; une pompe,actionnée par une locomobile louée à un industriel local, fut installée
près de la source et mise en marche le 11 septembre. Elle fonctionna
jusqu'au 26 novembre, avec une interruption de deux semaines dans
le courant du mois d'octobre, et fournit à la consommation un volume
moyen de 130 mètres cubes par jour. Comme le débit complet de
la source avait été utilisé, il devenait évident que cette ressource
était insuffisante ; c'est alors que l'Ingénieur ordinaire proposa de
prendre les eaux de l'Oued-Rira et dressa le projet de l'usine fixe à
établir dans le lit de cette rivière pour en élever les eaux dans la
conduite du Filfila; l'affaire fut présentée par M. Imbert, Ingénieuren chef.
L'exécution de ce projet, qui avait séduit la Municipalité, fut
ajournée pour deux causes : 1° La commune, qui projetait de contracter
un emprunt pour exécuter divers travaux, n'avait pas encore les
ressources nécessaires. 2° Pendant l'été de 1898, qui suivit, les sources
fournirent un débit quotidien moyen de 866 mètres cubes, qui assura
très convenablement l'alimentation de la ville.
La Municipalité, toutefois, fit les démarches nécessaires pour obte- .
nir la concession des eaux qui lui fut accordée le 27 juillet 1901.
En 1899, l'insuffisance de l'eau se manifesta dès le mois de mai.
On recourut de nouveau à l'Oued-El-Gatt, dont les installations
avaient été conservées. La pompe fonctionna, sans interruption, du
9 août au 21 novembre, fournissant un volume moyen de 136 mètres
cubes par jour, très approché de celui qui avait été constaté en 1897.
Pendant l'année 1900, l'hiver précédent ayant été pluvieux, la
ville n'eut pas à souffrir de la disette; mais, en 1901,1a pénurie fut
118 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
extrême et un rationnement rigoureux dût être imposé à la popula-
tion. Le débit des sources, en septembre, tomba à moins de 400
mètres cubes. Les eaux de l'Oued-El-Gatt furent encore utilisées,
mais cette source, influencée aussi par la sécheresse, ne put livrer
que 100 mètres cubes par jour, du 13 août au 16 octobre.
C'est en 1901 que, la commune ayant enfin réalisé son emprunt,on put entreprendre les travaux de l'Oued-Rira, dont le projet avait
été approuvé par la Municipalité et par l'autorité supérieure.Les travaux commencés dans le courant du mois de mai étaient
complètement terminés à la fin du mois de juin 1902.11 était temps,
car, déjà l'arrivée de l'eau des sources étant insuffisante, on avait
commencé à rationner la ville et les machines durent fonctionner
aussitôt. Depuis le 9 juillet, elles élèvent toutes les eaux de l'Oued-
Rira et ont assuré, depuis, une alimentation sinon complète, du moins
très satisfaisante.
Le tableau ci-contre, qui donne le débit des conduites du Filfila
depuis le 1er janvier 1894, complète le résumé ci-dessus; il démontre
l'utilité des travaux de captage des eaux de l'Oued-Rira, les seules
de la région qui soient, en quantité suffisante, susceptibles d'être
amenées à Philippeville.
DÉBIT DE LA CONDUITE DU FILFILA PENDANT LES ANNÉES
MOIS 1903
1894 1895 1896 1897 1898 1899 1900 1901 1902 (au momentdedel'oumse)
Janvier 45.350 33.020 26.031 34.687 29.818 36.000 29.276 33.639 26.920 35.400
Février 40.160 30.750 30.976 34.640 26.286 20.568 39.360 27.244 21.830 39.960
Mars 47.448 37.060 30.027 35.879 38.266 34.327 37.680 34.240 25.636 36.803
Avril 40.660 42.170 38.405 35.058 46.298 36.200 38.264 27.167 33.008 37.200
Mai 56.850 38.530 39.109 32.800 56.800 28.906 37.920 32.426 32.806 36.900Juin 35.000 33.480 51.640 29.934 36.766 28.146 41.186 27.123 20.934 30.040
Juillet 30.042 34.530 38.744 26.739 33.458 23.022 35.860 14.028 25.627 23.467
Août 28.882 27.700 30.014 20.801 29.700 19.722 26.970 15.766 24.498 22.161
Septembre 23.958 23.920 23.595 18.861 25.283 18.591 21.604 14.410 22.550 17.888Octobre 23.570 20.612 23.643 24.147 24.661 19.894 19.839 18.877 21.474
Novembre 19.030 19.905 28.429 23.479 26.016 19.396 21.157 21.783 17.553
Décembre 27.630 26.283 34.508 28.165 30.476 34.199 25.589 30.790 39.084
TOTAUX.... 123.070 118.420 105.681 142.192 105.660 157.677 115.159 111.987 207.022À déduire :
Volumes fournis parl'oued El-Gatt et parl'oued-Rira » » » 8.187 » 14.123 » 6.494 43.289
RESTE.... 123.070 118.420 105.681 134.005 105.660 143.554 115.159 105.493 163.733
Movennes ( par mois. 24.615 23.685 26.420 22.334 26.415 20.508 23.032 17.582 18.192Mojennes par jour. 804 774 866 728 866 671 753 576 600
Déficit annuel total.. 29.988 34.578 13.348 50.048 16.348 10.406 37.791 77.592 109.200
Débit quotidien ( mi- EnOctobre EnNovembre EnSeptembre EnSeptembre EnOctobre EnSeptembre EnOctobre EnSeptembre EnSeptembre
muni constaté).... 670 625 711 590 700 471 609 394 353
ta
120 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
USINE DE L OUED-RIRA
Les jaugeages de débit de l'Oued-Rira faits pendant l'année 1897,en été, avaient accusé 11 litres à la seconde, au minimum, représen-tant un volume total de 950 mètres cubes par jour.
Il n'était pas nécessaire de prendre toute cette quantité d'eau et le
programme comportait seulement le captage de 691 mètres cubes 200,à élever en 18 heures, soit 10 litres 50 environ par seconde, ou bien
un écoulement de 8 litres à la seconde, pendant 24 heures.
La hauteur à laquelle les eaux devaient être élevées étant de 106
mètres environ, la force motrice à employer devait être théorique-ment de 14.8 chevaux vapeurs.
Mais, en tenant compte du travail absorbé par le moteur et par les
pompes et de la perte de charge due au mouvement de l'eau dans les
tuyaux, et en admettant que ce travail supplémentaire est le 1/5 de
la force théorique nécessaire, on trouve que la machine devrait dé-
velopper une force totale de 18 chevaux vapeurs environ.
L'usine qui devait être édifiée dans le lit même de l'Oued-Rira
comportait les ouvrages suivants, en outre du bâtiment renfermant
les machines :
1° Un barrage en maçonnerie traversant le lit de la rivière fondé
sur le terrain imperméable et encastré dans chaque rive, d'une partdans un massif rocheux, d'autre part dans le terrain argileux. Son
but était d'arrêter les eaux s'écoulant souterrainement à travers les
couches de sable.
2° Un réservoir en maçonnerie de 300 mètres cubes de capacitéavec couche filtrante supérieure (sable et gravier), destiné à recueil-
lir les eaux superficielles de la rivière et à constituer une réserve
pendant les heures de chômage des machines.
3° Entre les deux ouvrages ci-dessus, et les réunissant, une galerievoûtée dans laquelle se trouverait le puisard du tuyau d'aspirationdes pompes.
La construction du bâtiment des machines et de l'annexe destinéeau dépôt du combustible était projetée, au-dessus de la galerie voûtéeentre le barrage et le réservoir.
Les dimensions du bâtiment principal avaient été fixées d'aprèscelles du mécanisme exigeant la plus grande étendue parmi les di-
vers systèmes proposés par les constructeurs que l'on avait consultés.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 121
La conduite de refoulement, en tuyaux de 0m,15 de diamètre inté-
rieur, s'élevait directement, aussitôt après sa sortie du bâtiment des
machines, sur le versant de la rive gauche de l'Oued-Rira, jusqu'ausommet d'un mamelon dominant le petit col voisin, près duquel
passe la conduite du Filfila.
Pour permettre aux eaux arrivées à ce point de s'écouler dans la
conduite forcée, on avait prévu la construction, au sommet du ma-
melon, d'un pylône en maçonnerie supportant, à une hauteur supé-rieure à celle de la ligne de charge des eaux de la conduite, une
bâche en tôle d'une capacité de deux mètres cubes.
Les eaux élevées par les pompes se déversaient librement dans la
bâche en tôle à la cote 132 et, de là, s'écoulaient par un tuyau de
Om,15 de diamètre, dans la conduite du Filfila, située à 150 mètres
de distance environ, à la cote 120.
Les dépenses prévues pour l'installation complète étaient évaluées
ainsi :
Barrage, galerie et réservoir 14.000
Bâtiment des machines 7.000
Conduite de refoulement et pylone 6.000
TOTAL 27.000
Machines 13.000
MONTANT TOTAL 40.000
En cours d'exécution, le programme qui précède a dû subir des
modifications profondes, intéressant les machines et les ouvrages de
captage, et qui augmentèrent les prévisions de dépenses de plus de
15.000 francs.
Les travaux, adjugés le 1er mai 1901, à un entrepreneur de Phi-
lippeville, M. Aliberti Baptiste, furent commencés à la fin du même
mois. Le lit de l'Oued-Rira fut dévié et creusé au pied des coteaux
de la rive droite, à 80 mètres environ, de l'emplacement de la future
usine.
On commença également le creusement du premier puits de son-
dage ; mais la construction de cet ouvrage dût être abandonnée
quelques jours après, à la suite des difficultés qu'occasionnait l'en-
vahissement de la fouille par les eaux et les sables fins entraînés,
ainsi que la rencontre d'une couche de gros gravier et de blocs.
17
122 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le 29 juillet, on entreprit le creusement du deuxième puits, sur
l'emplacement même de la galerie de prise projetée. L'expérience
qui venait d'être faite établit la nécessité de donner un diamètre
plus grand à cet ouvrage, pour mieux assurer la liaison de la maçon-nerie de briques et faciliter l'enlèvement des blocs qui seraient
sûrement rencontrés à quelques mètres de profondeur. Cette dimen-
sion fut fixée à trois mètres.
Après les travaux de préparation de l'emplacement, la confection
et la pose du rouet supportant les maçonneries, celles-ci furent com-
mencées le 2 août et étaient descendues à lm,80 quatre jours après.A cette profondeur le rouet fut arrêté et calé par des blocs qu'il ne fut
pas possible d'extraire et on dut continuer le travail avec un nouveau
rouet de 2m,40 de diamètre seulement, qui évitait les blocs calant,
le premier.On eut à surmonter des difficultés inouïes ; on rencontrait à chaque
instant des blocs de grosses dimensions, dont l'enlèvement exigeait
quelquefois des journées entières. Les pompes d'épuisement fonc-
tionnaient continuellement et les eaux extérieures entraînaient des
masses de sable extrêmement fin, sans cesse remplacées dès que les
premières étaient enlevées.
Les épuisements avaient donné lieu à une dépense très importanteet le fonçage du puits au-delà de la profondeur de 5 mètres, qui avait
été atteinte avec les moyens dont on disposait, n'était pas sans
danger.C'est pendant la dernière phase de la construction du puits qu'on
décida de modifier les dispositions du projet primitif et, pendantl'étude et la préparation du projet des nouveaux ouvrages, le chan-tier de l'entrepreneur fut occupé à la construction du bâtiment des
machines, qui a été terminée le 15 novembre.
Depuis cette date jusqu'au 28 avril 1902, on construisit le pylôneà l'extrémité de la conduite de refoulement, les maçonneries desmassifs destinés à supporter l'appareil élévatoire, on mit en placeles machines, qui étaient arrivées au commencement du mois de mars,et on effectua la pose de la conduite en fonte de refoulement.
Il ne nous est pas possible de nous étendre plus longuement surla marche des travaux si habilement dirigés par MM. Daujon, ingé-nieur en chef, et Beltçaguy, sous-ingénieur.
Constatons seulement que la construction des galeries présentade nombreuses et grandes difficultés et qu'il fallut compléter l'en-
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 123
semble du projet par des ouvrages imprévus, tels que massifs de
maçonnerie en divers points de la conduite de refoulement pour
s'opposer au glissement des tuyaux sur un terrain sans consistance
et d'une très forte déclivité et enfin construction sur cette' conduite,dans la partie comprise entre le pylône et la conduite de Filfila, d'un
bassin de huit mètres cubes de capacité pour le jaugeage des eaux
élevées par les machines. Tout fut achevé dans le courant du mois
de juillet et les machines furent mises en marche le 9 de ce mois et
essayées les 18 et 26. Le volume d'eau élevé, jaugé dans le bassin
construit à cet effet, était de douze litres par seconde.
EXPLOITATION. — RÉSULTATS OBTENUS
Les machines ont été mises en marche le 9 juillet 1902, elles fonc-
tionnaient encore, au 10 novembre, et n'ont subi aucune interruptionsérieuse.
Le volume total de l'eau provenant de l'Oued-Rira reçu dans les
bassins de Skikda au 1er novembre est de :
Mois de juillet 9 258— août 12 410— septembre 10 998— octobre 10.623
TOTAL 43 289
On doit ajouter à cette quantité :
1° Le débit de la conduite militaire branchée avant
l'arrivée aux bassins, celui des abreuvoirs et
des prises particulières en cours de route pourune évaluation de 1/10 des volumes indiquésci-dessus, soit 4.329
2° Les pertes d'eau constatées au M'Sara et au
sommet du pylone, à raison de 200 mètres cu-
bes par jour, pendant 1 mois, soit 7.500
TOTAL du volume élevé par les machines du 9 juil-
let au 31 octobre 1902 55.118 m3
Soit en moyenne 605 mètres cubes par jour de fonctionnement.
124 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le chauffage au bois n'a pas donné des résultats satisfaisants et
coûtait aussi cher que l'emploi du charbon seul; on y a renoncé-
depuis que le stock qui avait été approvisionné est épuisé.Le prix réel de l'eau reçue dans les bassins de Skikda et utilisée
pour l'alimentation de la ville ressort à 0 fr. 123 par mètre cube.
La comparaison du montant des redevances payées à la commune
pour fourniture d'eau, pendant le 3e trimestre des années 1901 et
1902, donne les résultats ci-après :
3e Trimestre 1901 9.000
3e — 1902 13.000
Différence en faveur de 1902.... 4.600
Les deux années ayant été comparables au point de vue du débit
des sources, l'excédant de recettes dé 1902 ne peut être dû qu'auvolume d'eau fourni par les machines de l'Oued-Rira.
Ce volume d'eau étant pour le trimestre de 32.666 mètres cubes, le
prix de vente de l'eau est donc, par mètre cube de 0 fr. 141.
Le prix de revient est de 0 fr. 123.
Il y a donc pour la commune, sans les dépenses de fonctionnement,un bénéfice de 0 fr. 018 par mètre cube.
OBSERVATIONS GENERALES
L'installation des machines de l'Oued-Rira semble avoir résolu le
problème de l'alimentation de la ville en eau potable. Mais on a vu
qu'en 1902 la solution n'a pas été complète, à cause de la grandesécheresse de cette année. Il en a été de même en 1903, mais avec
une aggravation de la situation. Si la sécheresse devait continuer,d'autres mesures seraient à prendre, et on a déjà indiqué que l'ad-
duction des eaux de l'Aïn-El-Hammam devra, en ce cas, être envi-
sagée.
Mais, aussi incomplet qu'ait été le résultat obtenu, on doit recon-
naître que, sans l'installation des machines à l'Oued-Rira, la populationaurait cruellement souffert de la disette, en 1903, puisque, pendantplusieurs mois, le débit total des sources est descendu au-dessous-
de tous les minima connus.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 125
En temps ordinaire, il est probable que l'alimentation d'été sera
assurée de façon convenable. De cette amélioration très réelle, il
convient de rapprocher le remplissage des citernes avec les eaux duFilfila. La réserve de 16.000 mètres, faite en hiver et qui est suffi-
sante pour alimenter le quartier haut de la ville pendant deux cents
jours environ, permet de distribuer en ville le volume d'eau total
débité par les sources ou élevé par les machines de l'Oued-Rira et
qui, selon toute vraisemblance, ne sera que rarement inférieur, sauf
en cas d'accident, à 900 mètres cubes par jour, dans les années ordi-
naires.
X
BOULANGERIE, BOUCHERIE
En 1845, il existe dans notre ville quatre boucheries et dix bou-
langeries.En décembre 1846, les taxes de la boucherie et de la boulangerie
sont ainsi fixées :
Pain. lre qualité 0 fr. 50 le kilo.
2e — 0 » 45 —
La boulangerie Mizzi vend cependant le pain de Ve qualité 0 fr.45seulement.
Viande. Boeuf 0 fr. 80 le kilo.
Veau 0 » 85 —
Mouton 1 » 00 —
Séance du 19 juillet 1848. Le Conseil nomme une Commission
pour traiter les questions suivantes :
Doit-on limiter le nombre des boulangeries ?
La boulangerie doit-elle être libre?
Quels seraient les avantages d'une seule boulangerie municipale?La boulangerie indigène et la boulangerie Mizzi doivent-elles être
soumises aux mêmes conditions que la boulangerie française?
Le Conseil émet, le 14 février 1849, un voeu pour la liberté de la
boulangerie, en exigeant des boulangers toutes les garanties recon-
nues nécessaires et en entourant cette industrie de certaines précau-tions jugées indispensables.
Prix du pain et de la viande en août 1850 :
Pain. lre qualité 0 fr. 30 le kilo.
2e — 0 » 25 —
128 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Viande. Boeuf 0 fr. 60 le kilo.
Veau 0 » 65 —
Mouton 0 » 65 —
Le Ministre de la Guerre d'Hautpoul, ayant l'intention de provoquerla suppression des manutentions militaires et de la fourniture du painde munition, alloue, par décision du 10 octobre 1860, une indemnité
de 0 fr. 18 par homme et par jour au dépôt du 2e régiment de la
Légion étrangère, à titre d'essai dans notre ville de l'achat par l'or-
dinaire du pain chez les boulangers. Les boulangers de Philippevilledéclarent immédiatement qu'ils livreront à l'armée le pain de 2e
qualité à 0 fr. 02 au-dessous de la taxe, soit de 0 fr. 21 à 0 fr. 22 le
kilogramme.
Séance du 9 août 1853. Le Conseil décide :
1° Que le nombre des boulangeries est illimité;
2° Que l'approvisionnement obligatoire, à répartir entre tous les
boulangers, sera de 250 quintaux de farine pendant la saison d'été et
de 500 pendant la saison d'hiver ;
3° Que la taxe municipale est supprimée, mais que les boulangerssont tenus d'afficher les prix du pain dans leurs boutiques;
4° Que chaque boulanger exploitant ne pourra fermer son magasin
qu'après un avertissement préalable à l'autorité municipale et avant
l'expiration du mois qui suivra cette déclaration écrite.
Dans sa réunion du lendemain, le Conseil décide :
1° Que le nombre des boucheries est illimité ;
2° Que la taxe municipale est remplacée par une taxe facultative
aux bouchers, qui sont tenus d'afficher le prix de la viande dans leurs
boutiques.
Séance du 6 février 1861. Une taxe de vente en ville des sangliersest frappée pour la première fois ; elle est fixée à 5 fr. par tête.
En janvier 1867, il existe 18 boulangeries. Dans 16, le pain se
vend 0 fr. 45 le kilo. Les deux autres, celles de M. Honoré Lan-
theaume, 10, rue du 61e, et de Madame Veuve Millet, rue impériale,85, vendent le pain 0 fr. 425.
Le dimanche, 21 novembre 1869, sur la place du marché aux
légumes, on débite pour la première fois de la viande de cheval.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 129
Arrêté municipal du 29 avril 1898 :
Considérant que le pain est une denrée de première nécessité et
qu'elle constitue la principale alimentation de la classe ouvrière ; le
prix du pain est ainsi fixé :
lre qualité, le kilo pesé 0 fr. 50
2e — pain rond de ménage, pesé 0 » 45
3e — pain de blé dur, pesé 0 » 40
Le pain n'est plus taxé depuis longtemps.
18
XI
CIMETIERE, POMPES FUNÈBRES
Au début, le cimetière se trouvait au-dessous des citernes duSkikda, dans l'intérieur des fortifications, afin, sans doute, d'éviterla profanation des tombes par les arabes.
Le 9 novembre 1859, le Conseil vote une somme de 48.321 fr. pourconstruction d'un logement pour le gardien et d'un mur de clôturedu nouveau cimetière. Il est décidé qu'on ne fera d'abord que la ported'entrée et le logement du gardien.
27 juin 1861. Approbation d'un marché pour le transport au cime-tière par corbillard.
4 juillet 1879. Création d'un cimetière à Damrémont.Séance du 16 novembre 1886. Le Conseil vote des remercîments
à M. le Comte Landon de Longeville, qui offre plusieurs milliers
d'eucalyptus pour entourer le cimetière et pousse l'obligeance jusqu'àprendre à sa charge les frais de plantation.
La clôture du cimetière, votée en 1859, est effectuée seulement en .1902, à l'aide d'un crédit de 40.000 fr., y compris la modification de
l'entrée, qui est placée maintenant en face le pont du chemin de fer.
LE JOUR DES MORTS
Le jour sacré des Morts, on voit la ville entière,En long fourmillement, se rendre au cimetière.Tout est paré de fleurs et les tristes cyprèsSur le champ du repos, plus fleuri que les prés,Semblent, tout reverdis, d'une note moins sombre
Projeter autour d'eux l'épaisseur de leur ombre
Et, parmi le fouillis épais de leurs rameaux,Tamisent le soleil au-dessus des tombeaux.Une femme là-bas, de douleur abîmée,Prosternée à genoux sur la tombe fermée
132 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
D'un mari mort trop vite, arrose de ses pleurs,Sous son voile de veuve, une gerbe de fleurs.Un époux, dont la mort d'une adorable femmeD'un chagrin éternel vient d'anéantir l'âmeEt de briser le coeur, qui pour elle a battuDe l'amour le plus pur, est là morne, abattu.Tout auprès, une croix, qui fut jadis placéePar une main pieuse et maintenant glacée.Gît, brisée en morceaux, sur le sol sillonnéDes débris desséchés d'un bouquet tôt fané.De tout jeunes enfants, les paupières rougies,Au caveau de famille, où brûlent les bougies,Déposent gravement, des larmes plein les yeux,Les jouets de leur frère envolé vers les cieux.Dans la plus grande allée on aperçoit des braves,Emus, jetant des fleurs au tombeau des Zouaves,Et je pleure moi-même au touchant souvenirD'un père bien-aimé, que je n'ai vu mourir.
Puis, tandis que chacun a l'âme pénétréeD'une amère douleur, par le portail d'entrée
Passe, sur un brancard suivi d'hommes en deuil,Au milieu de la foule, un tout petit cercueil.Voici qu'il a frôlé la robe d'une aïeuleEt la vieille a pensé qu'elle n'est pas la seuleA pleurer ses enfants, à perdre la raison,Et qu'une mère aussi sanglote à la maison.Le jour sacré des Morts, on voit la ville entière,En long fourmillement, se rendre au cimetière.
L. B.
5 Novembre 1892.
XII
GARNISON, ETABLISSEMENTS MILITAIRES
Un arrêté gouvernemental du 1er septembre 1840 crée dans noireville un peloton de gendarmes maures. Un autre arrêté du 1er octobresuivant institue le Cercle de Philippeville, sous le commandementd'un officier supérieur français.
En 1843, la garnison normale est ainsi fixée :
Infanterie 1.203 hommes. 30 chevaux.
Cavalerie 95 — 95 —
Artillerie 53 — 50 —
Train des Equipages. 31 — 53 —
Ouvriers d'administon 117 —
Un dépôt 157 —
Dépôt des Subsistants 100 —
TOTAUX 1.756 hommes. 228 chevaux,
plus un atelier de condamnés et une compagnie de discipline.
1846-1847. Le Commandant supérieur est le Colonel du 436 de
Ligne.25 juin 1847. Le 43e de Ligne part pour Constantine: il est rem-
placé, le 30 juin, par deux bataillons du 19e Léger, avec le colonel.
Il y a donc deux colonels dans notre ville : celui du 19e Léger et le
Colonel commandant supérieur du Cercle.
Août 1847. Par ordre de la Place, les officiers de toutes armes, quiarrivent et séjournent, doivent inscrire ou faire inscrire dans l'hôtel
où ils sont logés, leur nom avec indication de leur grade et du corps
auquel ils appartiennent, sur le registre destiné à l'inscription des
voyageurs.Le bateau à vapeur de l'Etat Le Grégeois, parti de Toulon le 22
134 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
août 1847, arrive le 27 au soir. Il quitte cette rade le 29 au matin,emmenant en France les malades militaires de l'hôpital.
M. le Colonel Barthélémy, commandant supérieur du Cercle, s'em-
barque le 27 septembre de la même année sur le bateau à vapeurVille de Bordeaux pour se rendre à Tunis. M. de Chasseloup-Loubat,
colonel du 19e Léger (devenu 94e de Ligne), remplit les fonctions en
son absence.
1848. Sont admis à faire valoir leurs droits à la retraite : MM.
Barthélémy, commandant supérieur, et Corniller, colonel du 43e de
Ligne, en garnison dans notre ville.
Par arrêté ministériel du 11 avril 1848, est nommé colonel du 43e
M. Loriton-Dumontel, lieutenant-colonel du 19e Léger. M. Adam,
capitaine au 3e Bataillon d'Afrique, chef du bureau arabe de Philip-
peville, est nommé Commandant du 1er Bataillon d'Afrique.15 mai 1848. Le 31e de Ligne, dont il restait encore ici un déta-
chement, quitte définitivement la garnison après plusieurs mois
d'attente. Le 24,500 hommes du 19e Léger s'embarquent sur le Titan
pour rentrer en France. 350 les avaient déjà précédés quelques joursavant. Il ne reste plus dans nos murs qu'un bataillon et deux com-
gnies de ce régiment, qui partiront prochainement.
Le Courrier de Philippeville du 5 juin 1848 s'exprime ainsi au
sujet de la rentrée en France du 19e Léger, tenant garnison à Phi-
lippeville :
Le 19eLéger s'est embarqué pour la France le 31 mai dernier, abord du Cacique;il va rejoindre l'armée des Alpes, dont il fait partie.
Nous ne détaillerons pas les exploits de ce beau régiment, l'espace nous man-
querait ; ils sont, du reste, assez connus dans la province. Nous résumerons seu-lement les principaux faits, trop glorieux et trop beaux pour avoir besoin du fardde l'histoire.
Le 19eLéger débarque en Afrique au mois de décembre 1841. Au mois d'avrilde l'année suivante, il compose la première colonne qui ait parcouru le pays entre
Philippeville et Bône. Le Colonel Brice, commandant supérieur du Cercle, sentantla nécessité de dégager la route de Constantine, où nos convois sont sans cesse
menacés, réunit 800 hommes du 19e et 200 du Bataillon d'Afrique et pousse une
pointe dans la direction de Collo au Tlelat(3 mai). Cette faible troupe, violemment
attaquée par des masses accourues à la voix de Sidi-Zerdoud, voit dans sa retraitele nombre de ses ennemis s'accroître et fait partout la plus belle contenance. Le19eperd à son début, dans cette affaire meurtrière, le chirurgien-major Lepelletieret le lieutenant Schoti et ramène à Philippeville 75 blessés, dont 5 officiers.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 135
C'est ainsi que le 19eprélude a sa belle réputation.Pendant ce temps, l'autre fraction, sous les ordres du général Négrier, reculait
notre domination dans l'Est et visitait pour la première fois les populations deTébessa. Cette même année 1842 est marquée par de nouveaux engagements glo-rieux pour le 19°.
Le schériff Sidi-Zerdoud continuait â tenir en échec tout le pays entre Philippe-ville et Constantine ; la garnison du blockaus d'Eddis repousse avec avantage deuxtentatives dirigées contre elle. Le même chef, dans une attaque pleine d'audace
(20 mai), s'avance jusqu'aux fossés d'El-Arrouch. Une fraction du 19econcourt à ladéfense.
Au mois d'octobre, ce régiment est dirigé sur Sétif. Lorsqu'il vint occuper ce
point, malgré les rigueurs de la saison, il dut rester sous la tente, presque rienn'étant créé. En quatre ans, mettant à profit les intervalles de paix que lui laissentles populations soumises, il sait, par des travaux, venir en aide à la colonisation :
caserne, hôpitaux, église, mosquée, jardins, tout s'élève en peu de temps. Et
lorsque le 19equitte la garnison de Sétif, il y laisse derrière lui une ville de 800âmes et un des établissements militaires les plus beaux de l'Algérie.
Pendant cette période, on retrouve le 19e, sous les ordres du général Sillègue,dans la Medjana, au Djebel-Dira, jusqu'à la limite de la province de Tittery, où ilincendie deux magnifiques villages kabyles (Ksour), dont les habitants ont refuséla soumission ; dans le Hamza, au fort de ce nom; dans le Hodna, à Bouçada, où,le premier, il va montrer les armes françaises.
Au Teniah-Macksen, une colonne composée du 19° Léger résiste avec vigueur àdeux attaques, dans les nuits des 31 mai et 1er juin.
L'année suivante, au mois d'avril 1844, nous retrouvons ce régiment à l'expédi-tion des Ouled-Sultan, sous les ordres du duc d'Aumale. Il prend une large part aucombat du 24 avril, où quatre de ses officiers sont mis hors de combat.
Au printemps de 1845, il fait partie de la colonne du général Bedeau, qui doitsoumettre la chaîne de l'Aurès, et assiste aux combats des 3 et 10 mai.
Au mois de juin de la même année, sous les ordres du général d'Arbouville, ilsoumet les Ajades et les Madydes, fait une razia chez les Hanaïches, se montre
dans le Hamza et, rallié à une colonne partie de Médéah, il entre dans le Jurjura,sur les crêtes duquel se livre un glorieux combat chez les Oulad-Aziz (19 juin).
Après le désastre de Sidi-Brahim, toutes nos troupes des trois provinces durent
se mettre en mouvement. Le 19equitte Sétif pour une campagne des plus rudes et
des plus pénibles qui doit durer neuf mois, au coeur de l'hiver. Eloigné de tout
point habité, il résiste avec courage à toutes les privations. Il livre un premiercombat à Ben-Salem, sur le Jurjura, le 12 novembre. Le 2e bataillon, vivement
engagé, perd beaucoup de monde. Le Commandant Faure est blessé. Ben-Salem, à
la tête de ses réguliers, lui suscite de nouveaux ennemis chez les Beni-Djaad. Les
22 et 23 novembre, il attaque la colonne avec vigueur au Bordj-el-Karoub et il est
partout repoussé. Les 16 et 18 décembre, nouveaux combats sur Tisser, qui amè-
nent l'entière soumission des Beni-Djaad, la retraite de Ben-Salem et le salut de
la Mitidja. Ce régiment parcourt ensuite le Sud de la province d'Alger; à Médéah,à Bogliar, à Milianah, sur le Chélif, il assure la tranquilité du pays par sa présence.Il entre enfin à Alger, à la suite du maréchal et au milieu du concours de toute la
136 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
population, jalouse de saluer des hommes éprouvés par tant de fatigues et tant de
dangers. Peu de temps après, il s'embarque pour revenir dans la province de Cons-tantine.
Pendant cette longue campagne, le reste du 19e,conservé à Sétif, pivotait dansla Medjana, pour préserver les tribus soumises contre les incursions de l'émir oude ses émissaires.
Le 12 avril, les trois bataillons, seuls, réunis sous les ordres du lieutenant-colonel
Dumontel, ajoutaient une belle page à l'histoire de ce régiment, par la surprisedu camp du schériff Mouley-Mohamed, qui agitait les Amouchas. Un immense
butin, des drapeaux, trois cents cadavres laissés sur le terrain furent les résultatsde cette journée, dans laquelle le 19e eut près de 80 hommes hors de combat, dont5 officiers. Pour assurer l'entière soumission de cette tribu, on dut livrer encoredes engagements les 7, 10, 18 et 22 juin, où les lieutenants Leduc et Genson, offi-ciers pleins d'intelligence et de courage, trouvèrent une mort glorieuse.
Enfin, ces pénibles travaux sont couronnés par l'expédition de la grande Kabylieet de Collo, où le 19e cimente la soumission des tribus du sang de trois de ses
officiers, dont deux, les lieutenants Pestiaux et Dedrée se font tuer bravementdans la nuit du 22 juin 1847.
Le 19e a donc eu, dans ses glorieuses campagnes, six officiers tués et 25 blessés ;il a, dans les instants de paix, fondé Sétif et travaillé aux routes de Philippevilleà Constantine et à celles de Sétif. Aujourd'hui sa tâche est finie en Algérie. La
France, qui d'un moment à l'autre, peut avoir besoin de troupes aguerries, l'a
rappelé.
Etaient en garnison à cette époque à Philippeville, dans ce beau
régiment, devenu le 94e de Ligne :
MM. Alexandre Wallet, lieutenant de Grenadiers, deuxième mairede notre ville;
François Bertrand, sergent-major de Voltigeurs, entré au 19ecomme simple soldat et retraité comme capitaine, chevalier de la
Légion d'honneur, après y avoir servi 30 ans sans interruption ; pèrede l'auteur de cette histoire;
Frédéric, Antoine Castel-Dugenêt, sergent de Grenadiers, pro-priétaire;
Charles Laout, grenadier, gérant du cercle des officiers, père denos concitoyens Alphonse et Louis Laout, négociants ;
Bléger, musicien de première classe, et Madame Bléger, cantinière,père et mère du célèbre compositeur Michel Bléger, qui fut directeurde notre Société Philharmonique.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 137
Le Courrier de Philippeville, dans son numéro du 29 juillet 1848,publie la notice suivante sur M. le Colonel Barthélémy, commandant
supérieur du Cercle :
Le Colonel Barthélémy, engagé volontaire en 1803 et commandant dix ans plustard (1813), n'est parvenu au grade de colonel qu'à la fin de décembre 1835. Làencore, la chute de l'empire avait, sinon brisé une carrière glorieuse, du moinsarrêté une élévation jusque là rapide ; la royauté a fait colonel le soldat que l'em-
pire eût fait général.Nous passerons sous silence la presque totalité de la vie de cet officier supérieur,
que nous ne connaissons que depuis le mois de janvier 1843, année de sa nomina-tion comme Commandant supérieur du Cercle de Philippeville.
A cette époque, notre ville, commencée en 1839, transformait déjà ses baraquesen maison en pierres : le Café de Foy était bâti, l'hôpital et la caserne s'achevaient ;mais on n'osait trop s'aventurer à l'extérieur et les correspondances de Philippe-ville à Constantine se faisaient encore à travers champs sous une forte escorte.Tout restait donc à faire : les arabes à éloigner, les routes à établir.
Dans cette même année (1843) eut lieu l'expédition de l'Edough, dirigée par leGénéral Baraguay-d'Hilliers ; ce fut la colonne commandée par le Colonel Barthé-
lemy qui prit et tua le fameux Sidi-Zerdoug, qui, l'année précédente, à la tète de6.000 hommes, avait attaqué le camp d'El-Arrouch.
Dans celle de Collo, qui eut lieu quinze jours après, le Général Baraguay-d'Hilliers confia une colonne détachée au Colonel Barthélémy, avec laquelle cetofficier pacifia une petite partie du pays et leva des impôts. Plus tard, il fît encored'autres expéditions pacifiques pour maintenir l'ordre dans les tribus soumises.
La sécurité devint alors plus grande ; la route de Philippeville à Constantine futétablie et des postes arabes, placés de distance en distance et répondant de tout
événement, rendirent la circulation plus libre et plus facile. Le territoire civil
s'augmenta considérablement.En 1845, le Colonel Barthélémy, aidé par le chef du bureau arabe, le Commandant
Adam, qui, lui aussi, a laissé d'heureux souvenirs dans notre localité, parvint, à
force de persévérance, à obliger, sans les mécontenter, les arabes habitant la rive
gauche du Saf-Saf à s'établir sur la rive droite et put ainsi livrer à la colonisation12.000 hectares de terrain, en partie défriché.
Les cinq années de commandement du Colonel Barthélémy ont été bien remplies ;la prospérité d'El-Arrouch, la création des villages Saint-Charles, Robertville et
Jemmapes, dans le territoire mixte, l'attestent. Le Colonel, il est vrai, n'a pascontribué seul à ces résultats, car nous lui avons entendu dire que l'autorité civileet les habitants l'avaient puissamment secondé dans la tâche qui lui étaient imposée.Et, en effet, pendant que les populations civiles de Bougie, de Tenez, etc., sont en
lutte avec leur Commandant supérieur, nous voyons la nôtre remercier, dans un
banquet d'adieu, le Colonel qui éprouve lui-même de vifs regrets de quitter un pays
qu'il a vu prospérer et dans lequel il promet de revenir quelquefois. Les souvenirs
qu'il laisse doivent donc consoler son départ et si son plus sincère désir est le bon-
heur et la prospérité du Cercle, il doit être sans crainte en laissant pour successeur
M. de Lourmel, lieutenant-colonel du 8e de Ligne.
19
138 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
5 août 1848. M. le Colonel d'État-Major de Tourville, comman-
dant supérieur du Cercle de Guelma est nommé commandant supé-rieur du Cercle de Philippeville.
Notre garnison a, dans le mois de janvier 1849, trois suicides à
enregistrer : Un caporal de la Légion étrangère est trouvé pendu à
un olivier dans le ravin du Beni-Mélek ; on attribue à une légère
punition cet acte de désespoir. Le second suicide, dont on ignore les
causes, est celui d'un artilleur, qui, au moment de recevoir son congé,se brûle la cervelle dans le cimetière. Enfin le maître-bottier du
Train des Équipages se pend dans sa chambre, sans causes connues.
Le 24 mars de la même année, la musique:du 2e régiment de la
Légion étrangère est envoyée de Philippeville à Batna. Le dépôt et
le magasin du 3e Bataillon d'Afrique sont transférés à Sétif.
Le 26 juin, un bataillon du 8e de Ligne et quatre compagnies du
2e régiment de la Légion étrangère, provenant de la colonne de M.
de Tourville, rentrent dans nos murs. Ces braves soldats portent sur
leurs visages basanés et amaigris et sur leur équipement les traces
des fatigues que leur a imposées la rude guerre de montagne qu'ils-ont faite pendant deux mois. Le Commandant supérieur arrive lui-
même le lendemain, après avoir dirigé sur Bône le reste des troupes
qui ont concouru aux opérations, qu'il a conduites avec une louable
énergie.Séance du Conseil du 23 juillet 1849. Est fixée à 360 fr. par an
l'indemnité accordée au barbier-perruquier attaché à l'hôpital mili-
taire pour le service des malades civils.
A partir du 1er janvier 1850, la garnison achète son ordinaire aux
bouchers civils au lieu de procéder elle-même à ses abatages ; il est
alloué à cet effet, 0 fr. 16 par jour à chaque soldat.
8 décembre 1849. Le nommé Desrichard, de la Compagnie de
Discipline, condamné par le Conseil de Guerre de Constantine à la
peine de mort pour assassinat de son sergent, est fusillé sur les hau-
teurs du Skikda, derrière la caserne de cavalerie.
Dans la nuit du 28 du même mois, à la suite de pluies diluviennes,une baraque du Train des Equipages militaires s'écroule sans causer
d'accidents.
A cette date, on remarque avec plaisir la nomination au gradede chevalier de la Légion d'honneur de MM. de Marcilly, capitainecommandant du Génie, Marchand, capitaine des ouvriers du Train.,et Lagrave, médecin à l'hôpital militaire. Ce dernier, chargé pen-
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 139
dant le choléra de 1849 de l'une des salles qui recevaient les femmeset les enfants des colons, a accompli sa tâche avec dévouement et
abnégation.6 avril 1850. Arrivée dans notre ville, pour y tenir garnison, de
deux compagnies de Voltigeurs algériens, de nouvelle formation. Les
Voltigeurs algériens se montrent vraiment dignes de l'assimiliation
qu'on leur a donnée avec la gendarmerie. Ils proviennent du licen-ciement de la Garde Républicaine.
Voici à ce sujet un extrait de l'Historique de la 19e Légion deGendarmerie par notre condisciple et ami le Général Moinier :
On n'avait pas tardé à se rendre compte que, réduite comme elle venait de l'être,la Légion d'Afrique était insuffisante pour faire face à toutes les exigences d'unservice aussi multiple que celui qui lui était imposé. La loi des finances du 30
juillet 1849 ayant ouvert un crédit suffisant, le Président de la République décré-
tait, le 1er octobre suivant, l'organisation de deux compagnies d'Infanterie desti-
nées à servir spécialement, dans l'étendue de l'Algérie, comme auxiliaires de la
Légion de Gendarmerie d'Afrique.Elles reçurent la dénomination de Voltigeurs algériens.Chacune d'elles était composée de :
OFFICIERS
Capitaine-Commandant 1
Lieutenant-Trésorier 1
Lieutenant 1
Sous-Lieutenant 1 4
TROUPES
Sergents 6
Caporaux 12
Voltigeurs 100
Clairons 2 120
TOTAL 124
Pour les deux compagnies 248
Tous les militaires ou citoyens faisant partie de la Garde Républicaine, créée le
16 mai 1848, et qui n'avaient pu être maintenus dans ce corps par suite de son
assimilation à la gendarmerie le 1er février 1849, étaient admis à concourir pourla formation des compagnies de Voltigeurs algériens, en vertu d'engagementsvolontaires ou de rengagements. Mais ces compagnies ne devaient pas se recruter.
Elles devaient être réunies en une seule lorsque, par extinction, leur effectif total
serait réduit au chiffre fixé pour l'une d'elles.
Les officiers pris, pour la formation, parmi ceux de toutes armes, ne concou-
raient qu'entre eux pour l'avancement. Le Ministre de la Guerre nommait les sous-
officiers et caporaux.
140 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
L'administration était dirigée par un Conseil dans chaque compagnie et soumise
aux mêmes dispositions que dans les compagnies de gendarmerie départementale.La solde, les hautes-paies, les indemnités et abonnements étaient les mêmes que
ceux déterminés pour les Voltigeurs corses.Leur habillement se composait d'une tunique en drap bleu foncé avec collet et
passepoils de même couleur ; d'un caban de même drap ; d'un pantalon de cuir-laine
gris-bleu; d'un pantalon de coutil bleu; d'un shako bleu avec galon et pompon de
même couleur ; d'un bonnet de police en drap bleu ; de brodequins de cuir noir,lacés sur le coup de pied ; d'une cartouchière en cuir noir.
Comme armement, les officiers avaient le sabre d'Infanterie et les voltigeurs, le
fusil de Dragon, transformé à percussion avec la baïonnette d'Infanterie et le sabre
d'Infanterie modèle 1831.Ces deux compagnies, réduites à un effectif trop faible pour être convenablement
utilisées, furent licenciés par décret du 26 mai 1852. Les officiers rentrèrent dansles armes auxquelles ils appartenaient primitivent et les hommes de troupes furent
replacés, avec leur grade, dans les corps d'Infanterie de l'armée d'Afrique.
Le 10 juin 1850, un soldat d'Infanterie légère d'Afrique, est fusillé
à Constantine pour avoir attenté aux jours de son sergent-major,
qu'il accusait de lui avoir dérobé une somme d'argent. Le même
jour, ce sergent-major, qui venait d'être cassé de son grade pourinconduite, se tue d'un coup de fusil, à Philippeville.
29 juin 1850. M. Mahué, sergent du bureau arabe, est nommé
sous-lieutenant au 43e de Ligne. M. Mahué avait su se faire aimer
et estimer dans notre ville, où il résidait depuis quatre ans. A cette
époque, une compagnie de Voltigeurs algériens, la première, quitte
Philippeville pour Batna.
7 septembre 1850.M.Charmetton, sous-intendant militaire, depuis
longtemps ici, quitte notre ville, où il est regretté pour les services
qu'il a rendus aux colons et aussi pour ses qualités personnelles quil'ont fait aimer de tous. Les habitants de Valée, Damrémont etSaint-Antoine lui remettent, au moment de son départ, une lettre
dans laquelle ils lui expriment toute leur reconnaissance.
Le 38e de Ligne quitte notre garnison le 14 septembre 1850.
Le même jour, la frégate à vapeur Le Vauban, de 540 chevaux,venant d'Italie, rentre dans notre port le matin, rapatriant le 16e
Léger. Pendant la traversée d'Italie en Afrique, le commandant duVauban fait interdire la Marseillaise, à la grande stupéfaction deceux qui croyaient encore que la France, pour avoir rétabli le Pape,n'en était pas moins en République. Deux autres bateaux à vapeur,de même provenance, sont attendus dans la journée.
21 septembre 1850. M. Conseil-Dumesnil, chef de bataillon au 20e
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 141
de Ligne, est nommé Commandant supérieur du Cercle, son prédé-cesseur, M. Drouet, lieutenant-colonel du 43e, rentrant à son corpssur sa demande.
Le Général de Saint-Arnaud arrive le 30 septembre 1850 en inspec-tion générale, venant de Bône. Il reçoit le lendemain la visite desdifférents corps, auxquels il promet la musique du 16e Léger et trois
compagnies du même régiment. La musique du 16e Léger quitte, en
effet, Constantine le 2 novembre 1850 pour se rendre ici.23 novembre 1850. M. Becquey de Sounay, chef de bataillon au
43e de Ligne, est nommé Commandant supérieur. Le sous-intendant
militaire, à cette époque, est M. Lebrun.Les obsèques de M. Former, chef d'escadron au 3e Spahis, frappé
à Collo par une balle en chargeant à la tête de ses cavaliers, ontlieu à Philippeville le 15 juillet 1851. La garnison tout entière accom-
pagne la dépouille mortelle de la noble victime à sa dernière demeure.M. le Général de Saint-Arnaud, voulant honorer son glorieux com-
pagnon d'armes, prend la tête du convoi et conduit le deuil.
Le bureau arabe était, en 1851, rue Constantine, maison Duthé; en
1854, rue Saint-Augustin, maison Daniel; en 1857, place d'Isly, au
bout de la rue Jugurtha, dans la maison appartenant actuellement à
M. Laïn.
14 février 1852. M. Adam, lieutenant-colonel au 2e régiment de la
Légion étrangère, est nommé Commandant supérieur-Les frégates à vapeur L'Orénoque et le Sané entrent le 25 mars 1852
dans le port de Stora, amenant des troupes de tous les corps d'In-
fanterie, destinés à la formation du 3e régiment de Zouaves. L'aviso
Le Grondeur, de la force de 160 chevaux, arrive d'Alger le 31 et
met à terre 29 soldats du 26e de Ligne destinés au 3e Zouaves.
M. Lebrun, sous-intendant militaire, est nommé chevalier de la
Légion d'honneur. Il comptait autant d'amis dans la populationcivile que dans l'armée.
Nous voyons, en 1853, qu'une maison de notre ville appartient à
M. Jean Nasica, caporal-sapeur au 19e Léger, en garnison à Paris,chevalier de Légion d'honneur.
18 juin 1853. Par ordre du Commandant supérieur, la musique du
3e Zouaves joue tous les jeudis et dimanches sur la place de l'Eglise,de 8 à 9 heures du soir.
Arrivée, le 29 juillet 1853, pour tenir garnison, d'un bataillon du
16e Léger.
142 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
La frégate à vapeur Caffarelli et les corvettes Vêloce et Brandon
arrivent dans notre port, dans la' soirée du samedi, 1er avril 1854,venant prendre le détachement du 3e Zouaves pour la Crimée. Du
camp élevé sur les hauteurs du Skikda, une retentissante acclama-tion répond aux deux coups de canon signalant leur approche. LesZouaves saluent ainsi la fin d'une longue attente. Le soir, les tentessont illuminées par un gigantesque feu de joie. Les chants et lesadieux accompagnent pendant la nuit les préparatifs du départ. Le
dimanche, à 2 heures, tout est prêt et 1.100 hommes courent s'em-
barquer à Stora. Vers 5 heures du soir, les trois navires portant nosbraves soldats sont hors de.vue.
23 septembre 1854. M. Lapasset est Commandant supérieur etreste longtemps en garnison à Philippeville. Un de ses zouaves, JulesChabassière, donna des leçons de dessin à sa famille; cet ancienzouzou est toujours un excellent dessinateur et peintre.
Le bateau d'Alger arrive le 16 décembre 1855, amenant 350 tirail-leurs et 16 officiers rentrant de Crimée. Lorsque les Tirailleurs
passent dans la rue de la Marine, une couronne de lauriers est jetéesur le premier, peloton:; ce symbole de gloire est aussitôt attaché au
drapeau du régiment, déchiré par la mitraille et noirci par la poudre.
Le 3e régiment de Zouaves, rentrant de Crimée et attendu depuisquelques jours, arrive le 13 mai 1865, au matin, sur le vaisseauL'Hercule, remorqué par une frégate à vapeur.
Bientôt les fiers accents des clairons et le son des tambours, fai-sant entendre la marche du régiment, annonce son approche. On se
presse, on se pousse pour voir de plus près ces figures guerrièresencore empreintes des fatigues des combats.
Rien de plus beau, de plus imposant qu'un pareil spectacle et,pour ceux déjà fiers d'appartenir à la nation qui possède de telssoldats, les coeurs battaient avec plus de violence. Disons-le avec
orgueil : les vainqueurs de l'Aima, d'Inkerman, de Sébastopol étaientles dignes descendants des braves d'Eylau, de Friedland et de laMoskowa.
La population, toujours heureuse de pouvoir donner une nouvelle
preuve de sa sympathie pour l'armée, offrit, le lendemain, un punchaux officiers du 3e et à ceux de la garnison. Cette brillante réunioneut lieu, à 8 heures du soir, dans la salle du Café Foy.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 143
Les autorités civiles avaient voulu prendre part à cette manifes-tion.
Des toasts furent portés par M. le Vicomte de Gantés, sous-préfet;M. le Baron Peschart d'Ambly, maire; M. de Nobelly et d'autres
personnages.Voici le toast de M. de Nobelly :
Messieurs,
Lorsque nous parlons ici du 3e régiment de Zouaves, nous disons les Zouaves de
Philippeville; nous le disons parce que nous avons vu ce beau régiment se formerdans notre ville ; nous le disons surtout parce que nous nous rappelons que, grâceau concours bienfaisant de MM. les Officiers du 3°régiment de Zouaves, les pauvresde notre ville ont eu du pain assuré pendant tout l'hiver de 1854.
Après ces divers toasts, M. le Colonel de Chabron, remercia leshabitants.
Le 15 au matin, le régiment quittait notre ville pour se rendre au
Filfila, où il dut camper jusqu'à nouvel ordre. Des commissaires,
agissant au nom de la population, avaient pris l'avance pour attendre
la troupe près de la ferme Véron, où devait avoir lieu la grandehalte et, par leurs soins, une distribution de vin fut faite aux hommes
et on offrit des rafraîchissements aux officiers.
Le 11 juillet 1856, le 1er régiment Etranger, fort de 32 officiers et
de 1.169 hommes de troupe, tous originaires de la Suisse, arrive de
Crimée à bord du navire de guerre La Saône; il séjourne ici jusqu'aucommencement d'octobre, avec sa musique.
Le dimanche, 31 mars 1858, une fête militaire a lieu sur la nou-
velle esplanade, dite du 3e Zouaves; il s'agissait d'inaugurer cette
place, arrachée à la montagne, la belle avenue du 71e de Ligne, sus-.
pendue au-dessus de la mer et qui la relie à la marine, la rue de
l'Arsenal, enfin les nouveaux bâtiments élevés par le 1er escadron du
Train pour compléter son quartier. Tous ces travaux, dus aux troupes
de la garnison, ont été exécutés par elle pendant les froides matinées
d'hiver et lorsqu'elles ne pouvaient faire l'exercice. M. Lapasset,commandant supérieur, préside le banquet. Trente-deux sangliers,tués dans une battue générale, une vingtaine de moutons, généreuxsèment offerts par les caïds, font les frais de ce repas. Le café pris,
144 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
les quadrilles se forment et, aux sons de la fanfare du Train, lessoldats dansent mille pas grotesques.
Séance du 18 août 1859. Le Conseil décide qu'une réception solen-nelle sera faite à tous les corps de troupes indistinctement, venantd'Italie. Trois enfants de notre ville, engagés au 3e Zouaves, sontmorts au feu en Italie : Emile Batigne, Jean Cecconi, Victor An-
drieux.
M. le Lieutenant-Colonel Moquery, du 1errégiment Etranger, prendle 20 novembre 1860 le commandement du Cercle.
17 août 1861. Décès de M. Pierre, Claude, Alexandre de Gournay,capitaine-adjudant de place, chevalier de la Légion d'honneur.
18 mai 1868. Décès de M. Antonin Rinaldi, commandant la place,très estimé dans notre ville.
Zéramna du 16 août 1870 :
Au milieu des deuils sans nombre qui accablent notre âme attristée, un deuilvient de nous frapper au plus profond du coeur. Du 3e Zouaves, de ce beau et fier
régiment, dans les rangs duquel aucun d'entre nous n'est sans avoir pressé desmains amies ; de cette intrépide légion poussant le courage à des limites inconnues ;de notre 3e Zouaves, il ne reste plus que quelques glorieux débris. Les Autres,autant de héros, sont tombés sous le feu prussien. Et l'ennemi lui-même, dix fois,vingt fois plus nombreux, est resté muet d'admiration devant cette héroïque pha-lange, ensevelie dans sa gloire. Adieu, vaillants martyrs dignes d'un si noble
trépas ! Adieu, soldats et amis morts pour la défense du sol natal ! Adieu ! voustous qui êtes couchés là-bas sans linceul, loin des pleurs de la famille ! La Patrie
gardera le pieux souvenir de votre héroïque et sublime dévouement et de vosmâles vertus.
En janvier 1872, une souscription ayant pour but d'élever un mo-
nument en l'honneur du 3e Zouaves produit une somme de 186 fr.;elle n'est pas continuée.
A partir du 12 octobre 1872, la fanfare du 3e Zouaves joue de 4heures à 5 heures : le dimanche, sur la place de l'Eglise et le jeudi,sur la place de Marqué.
17 avril 1875. L'état-major du 3e Zouaves, depuis plus de vingt ansdans notre ville, est envoyé à Constantine et remplacé par le 12ebataillon de Chasseurs à pied.
Les travaux de construction d'un fort au-dessus de la caserne desZouaves commencent en juillet 1875. 150 condamnés militaires,arrivés de Bône et de Bougie, se mettent à l'oeuvre. Ce fort dominerala vallée du Saf-Saf et le port. Il a été désarmé depuis.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 145
En 1876, le Commandant d'armes est M. le Major Huguet, du 3eZouaves.
La subdivision militaire est installée provisoirement dans notreville le 6 septembre 1876. M. le Général Abdellal prend possessiondes appartements réservés au Commandant de la place. Son séjourn'est pas de longue durée, car il quitte Philippeville pour Constan-
tine, avec ses bureaux, le 15 novembre suivant.
Le 12° bataillon de Chasseurs à pied part le 6 mars 1879 pour aller
tenir garnison à Lyon.Séance du Conseil municipal du 23 avril 1879. A cette date, la
garnison est composée de 533 hommes seulement, ainsi divisés :
3e Zouaves 261
26e régiment d'Artillerie 172
3e escadron du Train 36
21e section d'Ouvriers d'administration .... 40
21e section d'Infirmiers 20
2e régiment du Génie 4
TOTAL. 533
Le Conseil émet le voeu que la garnison soit renforcée.
Le cercle militaire est créé en janvier 1891, succédant à une réu-
nion des officiers. Sa bibliothèque renferme environ 900 volumes.
Aujourd'hui la garnison comprend :
Officiers sans troupe 12
1er bataillon du 3e Zouaves :
Officiers 12
Sous-officiers et soldats 540
4e batterie du 11e bataillon d'Artillerie :
Officiers 3
Sous-officiers et soldats 200
21e section d'Ouvriers d'administration :
Officier 1
Sous-officiers et soldats 50
21e section d'Infirmiers :
Officiers 3
Sous-officiers et soldats 50
TOTAL à reporter 871
20
146 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Report 871
Gendarmerie :
Officier 1
Sous-Officiers et soldats 16
5e escadron du Train :
Soldats 11
TOTAL 899
Elle est sous les ordres de M. Raoul de Lartigue, lieutenant-colonel
au 3e régiment de Zouaves.
Le 23 août 1881, un malheur affreux jette le deuil dans le 3e régi-ment de Zouaves. Le caporal Boubien et les zouaves Blondeau et
Cléret, faisant partie du détachement chargé de combattre les incen-
dies de forêts de l'Oued-Zen, sont enveloppés par les flammes et
tombent victimes du devoir. Leurs cadavres sont transportés à Phi-
lippeville, où l'inhumation eut lieu le 26. Plus de 6.000 personnessuivent le cortège. Le deuil est conduit par M. de Luxer, chef de
bataillon, commandant d'armes; M. Fernand Vellard, maire ; M. le
Préfet; M. Lesueur, conseiller général, et par MM. les Officiers de
toutes armes. La musique de la Société Philharmonique, les Pom-
piers, le Corps des Douanes, la Gendarmerie, les trois sociétés de
secours mutuels et une délégation du Cerclé de l'Union assistent aux
obsèques. Au cimetière, des discours sont prononcés par M. le Com-
mandant de Zouaves de Luxer, par M.Vellard, maire, et par M. le
Sous-Préfet Gagé. Le Conseil accorde la concession à perpétuité du
terrain où reposent les trois zouaves et M. Lesueur fait exécuter à
ses frais un monument en marbre, sur lequel est gravée l'inscriptionsuivante :
3e ZOUAVES
HOMMAGE AUX VICTIMES DES INCENDIES DU 23 AOUT 1881
BOUBIEN, HENRI, caporal au 3e Zouaves, mort à 25 ans.
CLÉRET, FRANÇOIS-DENIS, soldat au 3e Zouaves, mort à 23 ans.
BLONDEALT, MICHEL, soldat au 3e Zouaves, mort à 23 ans.
M. Joseph Taboni, propriétaire, fait entourer ensuite le monumentavec une grille en fer, qu'il donne généreusement.
18 janvier 1888. Un comité se crée pour mener à bien un projetd'érection, sur une place publique, d'un monument en l'honneur du
3e Zouaves, dont l'idée est mise en avant par MM. Teyssandier,
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 147
Lecorgne et Bertrand. Ce comité se dissout, un désaccord regrettableétant survenu parmi ses membres.
L'idée est reprise quatorze ans plus tard et, le 7 décembre 1902,un comité se forme, en vue d'ériger sur une de nos places publiquesun monument à la gloire du 3e Zouaves, créé à Philippeville le 23
mars 1852.
Nous donnons ci-dessous la statistique des entrées à l'hôpital mili-
taire, où tant de malades civils ont été soignés avec un dévouement
digne d'éloges; ces chiffres indiquent les entrées sans catégorie de
malades, civils et militaires confondus :
Année : 1840 7.693— 1841 6.380— 1842 6.713— 1843 5.857— 1844 5608— 1845 6.209— 1846 7.197— 1847 7.138— 1848 7.480— 1849 8.098— 1850 4.778— 1851 4.193— 1852 4.666— 1853 3.679— 1854 5.375— 1855 5.970— 1856 ... 4.351— 1857 4.123— 1858 3.074— 1859 3.653— 1860 3.884— 1861 3.275— 1862 4.268
1863 4.457— 1864 4.189— 1865 4.581— 1866 3.891
Année; 1867 3.379— 1868 5-737— 1869 4249— 1870 2.712— 1871 3 803— 1872 1.940— 1873 1.990— 1874 1.806— 1875 1.666— 1876 1.644— 1877 1.837— 1878 2 385— 1879 1.722— 1880 2.125— 1881 3 222— 1882 2.133— 1883 1.987— 1884 1.625— 1885 3 950— 1886 2.980— 1887 3.433
1888 1.960— 1889 1.712— 1890 1.377— 1891 1.178— 1892 1 146— 1893 1 009
148 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Année : 1894 937— 1895 1.096— 1896 912— 1897 885
1898 1 024
Année : 1899 1.324— 1900 1.133— 1901 1.064— 1902 903
Une plaque de marbre placée contre le mur, clans le vestibule
d'entrée de l'hôpital militaire, rappelle la mémoire des officiers de
santé, infirmiers et auxiliaires morts victimes de leur dévouement
pendant l'épidémie de 1849.
L'état-major de l'hôpital militaire est actuellement ainsi composé :
MM. Charles, Alfred Jarry, médecin major de lre classe, médecin
chef ;Pierre Château, pharmacien aide-major de lre classe ;
Louis, Arthur Triboulet, officier d'administration de lre classer
gestionnaire.
Caserne de France et Hôpital militaire
XIII
TRIBUNAL, JUSTICE DE PAIX, OFFICIERS MINISTERIELS
Une ordonnance royale du 26 septembre 1842 crée le tribunal de
Philippeville et fixe ainsi les traitemements des membres de ce tri-bunal :
Président 5.000 fr.Procureur du roi 5.000 —
Juge d'instruction 3.500 —
Juge 3.000 —
Substitut du Procureur 3 000 —
Juge adjoint 2.000 —
Le nombre des affaires civiles portées devant le tribunal pendantl'année 1845 a été de .307. Il lui en avait été soumis 390 en 1844.Le nombre de jugements définitifs est de 243, celui des jugementspréparatoires et interlocutoires, de 99. 43 affaires ont été terminées
par transaction ou désistement. Sur les 243 affaires terminées, 138
l'ont été par jugements contradictoires, 105 par jugements de défaut
non frappés d'opposition. Sur ces jugements, 101 ont été rendus en
dernier ressort, 142 avec faculté d'appel.Le tribunal a eu à statuer, en 1845, sur 452 affaires commerciales.
Il lui en avait été soumis 467 en 1844. Il en a terminé 412 par juge-ments définitifs et 2 par renvoi devant arbitres; 26 ont été rayéesdu rôle par suite de désistement ou de transaction.
Division des justiciables par nation et par religion : Entre chré-
tiens, 196; entre chrétiens et musulmans, 17; entre musulmans et
israëlites, 3; entre israëlites, 27.En 1845, il existe en Algérie 5 tribunaux : à Alger, Blidah, Bône,
Philippeville, Oran. Les tribunaux d'Alger et de Blidah n'ont pasd'attributions en matière criminelle; la cour royale d'Alger juge
150 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
directement tous les crimes de la province d'Alger et, sur appel, les
crimes des autres provinces. Ceux de Bône, Philippeville et Oran
statuent en premier ressort sur les crimes qui se commettent dans
leur arrondissement.
Les tribunaux de première instance, siégeant comme juridictions
correctionnelles, connaissent des délits commis dans leur ressort. Les
juges de paix et, à défaut, les commissaires civils statuent sur les
contraventions de police de leur canton ou district. Les cadis connais-
sent des infractions commises par les musulmans, lorsque ces infrac-
tions, punissables selon leur loi religieuse, ne constituent ni crime,ni délit, ni contravention d'après la loi française. Les attributions
répressives des tribunaux rabbiniques sont renfermées dans clés
limites semblables, en ce qui concerne les infractions imputablesaux israélites.
Etat des affaires criminelles jugées par le tribunal pendant l'an-
née 1845 :
l'I CONDAMNATIONSo <
Abus de confiance 2 2 ans 1 à peine correctionnelle.
Assassinats 3 10 » 5 à mort, 2 aux trav. forcés, 1 à prison.Blessures volontaires 1 1 » là peine correctionnelle.
Faux en écriture publique... 1 3 » 1 »
» privée 1 1 » 1 acquittement.
Vols qualifiés 10 12 » 4 aux trav. forcés, 1 à réel., 6 à prison.
18 29 »
Le 19 novembre 1846, le tribunal où siégeaient MM. Auguste Ma-
rion, président; Grenier et Beaufils, juges; Robinet de Cléry, pro-cureur du roi, condamne à la peine des travaux forcés à perpétuitéla juive Embarka bent Saïd, pour empoisonnement de sa patronneet tentative d'avortement. Ce jugement est confirmé par arrêté dela cour royale d'Alger du 26 décembre suivant.
Le 29 du même mois, arrivent à Alger les nommés Messaoud ben
Saad, Ahmed ben Saad et Abdallah ben Boucheliga, condamnés àla peine de mort par notre tribunal. Par un autre jugement en datedu 14 janvier 1848, le nommé Mohamed ben Hamel, fabricant de-
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 151
bâts, est condamné à cinq années de travaux forcés, sans exposition,pour vol à l'aide d'effraction.
En 1843, le juge d'instruction est M. Pinson de Mener ville.En 1844, le juge adjoint est M. Sudraud des Isles.En 1849, un juge s'appelle Maynard deLavalette, un autre Eudoxe
Bon.Par décret du président de la République du 18 juillet 1849, M.
Delaruelle, avocat, docteur en droit, est nommé substitut. Un jugese nomme Brachelet. Il est remplacé, le 30 novembre 1850, par M.
Nogent-Saint-Laurent.Le 22 juillet 1852, à huit heures du matin, a lieu l'exécution, à la
porte de Constantine, du nommé Saïd ben Aftat, condamné à mort
par le tribunal de Philippeville pour assassinat de la dame Briffa etvol d'une somme de 17 fr. et de divers objets et effets.
En 1854, nous voyons les noms suivants : MM. Bulan, juge, et
Taravant, substitut. En 1855, M. Chanrond est substitut et M. La-
noix, juge.Par ordonnance du 1er juin 1857 et décision de M. le Procureur
général, chef de la justice en Algérie, en date du 15 juillet suivant,les assises se tiendront en premier lieu à Bône, en deuxième lieu à
Philippeville, en troisième lieu à Constantine. L'extrait conforme est
signé par M. Auguste Jauffret, greffier en chef de la cour d'assises
de Philippeville.La deuxième session des assises de Philippeville, ouverte le 8 juin
'
1868, sous la présidence de M. le Conseiller Meynier, est close le 11.
Ministère public : MM. Février, procureur impérial ; Bézombes, subs-
titut. Défenseurs : MMesBourges, Davet, Calendini,Véron, Passerieu.
Chapot.15 juillet 1876. Un concours est ouvert entre les architectes de
l'Algérie pour la confection d'un projet de palais de justice. Dernier
délai de dépôt des projets : 15 septembre 1876.
En 1878, construction du palais de justice sur la place Corneille.
Architecte auteur du projet, M.Roubier. Entrepreneur, M. Durrieu,
Liste des présidents du tribunal depuis sa création :
MM. Pierre, Cyrille Mongrand 5 janvier 1843.
Pelluchon-Destouches 23 avril 1844.
Auguste Marion 13 mars 1845.
Caillebar 4 septembre 1849.
152 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
MM. Bouvier 6 mars 1851.
Soulé 5 mars 1857..
Cammartin 18 octobre 1864.
Pérez : 3 juin 1868.
Poucheret 29 novembre 1876.
Lafitte 22 décembre 1880.
Ronnot 28 janvier 1881.
Letanneur 18 mai 1883.
Billiet 10 janvier 1889.
Walter-Brown 9 octobre 1899.
Procureurs :
MM. Semidéi, procureur du Roi.. .. 5 janvier 1843.
Didier 25 janvier 1845.
Robinet de Cléry 25 février 1845.
Bertauld 23 décembre 1847.
Thierry, procr de la République. 15 octobre 1848.
Lardière 2 septembre 1851.
Jules Fabre, procureur impérial. 16 décembre 1858.
Février 3 juin 1868.
Sartin, procr de la République . 4 janvier 1871.
Boerner. 15 juillet 1871.
De Saltet de Sablet d'Estières.. 14 août 1873.
D'Andrée de Renoard 22 novembre 1877.
Vialla 4 septembre 1880.
Richard 7 novembre 1883.
Ravisy 28 octobre 1886.
Besset 26 mars 1891.
Jules Bono 16 juillet 1894.
La justice de paix de Philippeville est créée par ordonnance
royale du 18 mai 1841. Le traitement du juge est fixé à 2.400 francs
par ordonnance du 26 septembre suivant.
En 1842, le juge de paix a eu à s'occuper à l'audience de 1.549
affaires, parmi lesquelles 972 civiles et 577 commerciales. Il a rendu
1.153 jugements, tant contradictoires que par défaut; 115 affaires
ont été arrangées à l'audience, 281 abandonnées, 60 portées en conci-
liation en dehors de l'audience et conciliées.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 153
La justice de paix de notre ville n'a pas éprouvé le même sort
que celle de Boufarik, créée le 20 février 1842 et supprimée le 26
septembre suivant. Les chiffres qui résument les travaux du jugede Philippeville démontrent combien son institution était urgente.Notre ville compte en 1841 une population de près de 4.000 âmes.
De nombreuses constructions s'y improvisent, les intérêts rivaux des
trafiquants s'y agitent et se heurtent; de là une multitude de contes-
tations commerciales et de procès civils du genre de ceux que l'or-
donnance du 18 mai a placés dans les attributions de la justice de
paix. A défaut de toute autre juridiction, les affaires même quiexcèdent la compétence du juge de paix arrivent forcément à ce
magistrat, lorsqu'elles exigent une prompte intervention de la jus-tice.
En 1845, le juge de paix a tenu 182 audiences tant civiles que de
simple police. Il a eu à s'occuper de 601 affaires introduites par ci-
tations. Il en a terminé 473 par jugements définitifs ou arrangementsà l'audience. En 1844, le nombre des affaires s'était élevé à 548.
Dans sa séance du 14 février 1849, le Conseil accepte un bail de
3, 6, 9 ans, à raison de 1.050 fr. par an, pour le prétoire de la jus-tice de paix, maison Galzen, rue Galbois, n° 13. Elle fut transportée
plus tard dans la maison Daniel, rue du Sphinx, n° 65, puis rue
Valée, dans la maison de Boisson, n° 56, et enfin, en 1885, dans le
bâtiment actuel de la rue du Sphinx, appartenant à la commune.
Liste des juges de paix :
MM. Prosper Caylet 1842
Marc Raynaud de la Valette 1843
Charles Guermet 1845
Léon Lavocat.
Christophe Gardère 1854
Edouard Daniel 1856
LéopoldMerot 1861
Victor Imberdis 1864
Eugène Planchat 1867
Charles Lebrun 1870
Léon Bourges 1870
Amédée Finot 1873
Armand de Manas
Walter Brown . 1877
21
154 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Jules Olmetto 1880
Auguste Gitton 1880
Jean Clémenti 1883
Numa Duminy 1885
Paul Tanis 1889
Charles Audrouing 1890
Léopold Ladarré 1892
Charles Cabanes 28 décembre 1899
L'ordonnance royale du 10 août 1834, portant organisation du
service de la justice en Algérie, dispose, dans son article 25, que les
tribunaux musulmans sont maintenus.
Le premier cadi de Philippeville a été M. Mohamed ben Zerrouda.
Le cadi actuel est M. Ben-Dali Amar Mohamed ben Mustapha.
Un arrêté du 13 août 1842 crée un office de commissaire-priseur.Un autre arrêté du ministre de la guerre, en date du 23 novembre
suivant, crée trois offices de défenseurs près notre tribunal.
En 1845, les défenseurs sont au nombre de 4, avec cautionnement
de 2.000 fr. chacun. Il y a aussi 2 notaires, cautionnement 4.000 fr. ;3 huissiers,cautionnement 1.200 fr.; 1 commissaire-priseur, caution-
nement 1.000 fr.; 1 interprète-judiciaire, cautionnement 1.200 fr.
Deux décrets, en date des 29 mars et 28 mai 1902, ont institué en
Algérie, dans chaque canton, des tribunaux qui connaissent de tous
les délits commis par les indigènes musulmans.Ils ont reçu le nom de tribunaux répressifs indigènes. Ces décrets
ont été abrogés et remplacés par un décret du 9 août 1903.
Les tribunaux répressifs indigènes sont actuellement composés du
juge de paix ou de son suppléant, président, et de deux juges, l'un
français et l'autre indigène.A Philippeville, siège d'un tribunal, l'organe du ministère public-
est le Procureur de la République.Le tribunal répressif du canton de Philippeville tient ses audien-
ces, tous les samedis, dans le local de la justice de paix.La loi du 30 décembre 1902 a institué en Algérie, au chef-lieu
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 155
judiciaire de chaque arrondissement une cour criminelle, devant
laquelle sont déférés les crimes imputables exclusivement aux indi-
gènes. La cour de Philippeville a tenu ses premières assises le 15
mai 1903.
Dans sa séance du 16 novembre 1886, le Conseil émet un voeu
pour la création d'une troisième chambre de notaire.
Nous allons citer quelques officiers ministériels dont nous avons
rencontré les noms dans le cours de nos recherches :
Notaires :
MM. Duneugermain 1846
André Privé
Philippe Fich'et 1849
Jean-Nicolas JungF. Guillemin 1850
François-Auguste Primard 1852
Meurice 1858
Robe 1874
Georges Schelbaum
Paul Pinchon, docteur en droit 1896
Jules Pierrat 1899
Eugène, Isidore-Bourdin 31 janvier 1903
Avocats, Défenseurs, Avoués :
MM. Camille Villeneuve 1846
Antoine Teissier
Victor Véron
Decroix
Casimir Serpentié 1847
Emile Passerieu 1863
Bourges 1868
Georges Lavigne 1870
Fernand Vellard :.... 1873
Robert Calendini 1875
Comte de Lafont 1878
Armand Lepitre 1888
Louis Saingery 1889
Lucien Sider. 1889
156 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
MM. Lazare Guignet 1889
Octave Passerieu 1890
Raymond Mercier 1892
Georges Piollenc 1901
Jean Sanviti 1902
Bartolomé Morato 1902
M. Emile Passerieu, installé comme juge de paix à Bougie, le 11
janvier 1861, a été nommé avocat-défenseur à Philippeville, le 2
octobre 1863 et suppléant du juge de paix le 4 janvier 1864 ; il a
démissionné de ces dernières fonctions, le 17 mars 1901, après lesavoir remplies pendant 37 ans.
Syndics de Jaillîtes :
M. Amédée Purpan 1846
Greffiers du tribunal :
MM. Jaufïret 1846
Bertrand Mazel 1896
Greffiers de la justice de paix :
MM. J. Michaud 1847
Paul Tourrette 1885
Ange-François Fiorini 1898
Commissaires-priseurs :
MM. Ange Doria 1846
Allender 1849
Dominique Loviconi 1856
Bellaton 1863
Mercier 1865
Berdou-Bureu 1877
Huvey 1879
Mongellas 1886
Communeaux 1886
Lalliermonet 1889Bouzeran 1896Paul Tourrette 1897
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 157
Huissiers :
MM. Joseph Fleur 1844Mathieu Bourcier
Mestayer .. 1846
Joseph Martin
Jean-Baptiste Nansot 1849
LavergneJoachim Bayle 1851
Quéron 1867
Aubinat 1870
Dreyfus
Guertling 1872
Benoist 1873
Wolfhügel 1875
Jacob Ceddaha . 1884
Jean-Baptiste Travail 1896
Louis Marcacci 1896
Henri Huron 1901
XIV
CONSEIL DE PRUD'HOMMES
Dans sa séance du 6 septembre 1873, le Conseil municipal, sur lademande du Gouverneur général, s'engage à fournir en temps oppor-tun le local nécessaire pour la création d'un Conseil de prud'hommeset à supporter les frais qu'occasionneront l'installation et le fonction-nement de ce tribunal.
Créé vingt ans plus tard, par décret présidentiel du 18 septembre1893, le Conseil de prud'hommes est installé le 18 février 1895 parM. Gautier, sous-préfet, assisté de MM. Billiet, président du tribunal ;Dr René Ricoux, maire ; Blanchet, président de la Chambre de Com-
merce; Bono, procureur de la République ; Alexandre Ricoux,conseiller général, et Ladarré, juge de paix.
Les présidents depuis la création sont :
MM. Alphonse Cottard 18 février 1895.
Désiré Sumian 30 septembre 1896.
Georges Schmitt 18 septembre 1900.
Charles Bourrasset 13 février 1901.
Vice-Présidents :
MM. Louis Barthalot 18 février 1895.
Jules Degand 30 mai 1902.
Secrétaire-greffier
M. Henri Bousquet 20 juillet 1895.
Le Conseil règle les différends entre patrons et ouvriers et arrive
souvent â les concilier. Il rend de très grands services à la classe
ouvrière, aux travailleurs et aux patrons aussi bien qu'aux ouvriers.
En 1900, sur 115 affaires, 73 ont été résolues par conciliation; 25,
retirées par les parties et 17 seulement terminées par jugements.
160 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
En 1902, le Conseil a été.saisi de 124 affaires. Les conciliations
ont été de 87 % et les affaires terminées sans jugement de 95 %•Pendant la période quinquennale de 1897 à 1901, le Conseil a été
saisi de 564 affaires. Les conciliations ont été de 79 % et les affaires
terminées sans jugement de 91 %.
Les conseillers prud'hommes actuellement en fonctions sont :
MM. Louis Barthalot, Alexandrin Quasso, Georges Schmitt, élus
en 1894 et réélus en 1900 ;MM. Joseph Casasnovas, Jean Costes, Paul Sublime, élus en 1897;
MM. Jules Aulu, Charles Bourrasset, Louis Fabre, Joseph Maroni,
Frédéric Robert, élus en 1900.
XV
PRISON CIVILE, MAISON D'ARRÊT
Le premier écrou inscrit date du 9 mai 1843.En 1845, 127 individus ont été détenus préventivement; 40 ont
été en liberté sans jugement et 87 mis en jugement.Un arrêté gouvernemental du 6 août 1852 institue une Commission
gratuite de-surveillance près de la prison civile, composée du Sous-
Préfet, du Maire, du Président du tribunal et du Procureur.
Elle est ainsi désignée actuellement :
MM. Julienne, sous-préfet.Walter-Brown, président du tribunal.
Bono, procureur de la République.Dr Ricoux, maire et médecin.
Sandraly, curé.
Ledermann, pasteur.Nielli, pharmacien.Bertin, libraire.
Pinchon, notaire.
Le 1er décembre 1889, la prison a été transportée de l'immeuble
Couderc, rue Constantine, dans le nouveau local de la rue d'Austerlitz,
qui appartient au département.Le gardien-chef est M. Pascal Micaelli, nommé à Philippeville le
18 avril 1894.
22
XVI
CULTES, ÉGLISES
Le 25 juin 1842, l'évêque d'Alger, assisté de MM. Le Mauff, curé,
Boyer, peintre, et Boyer, clerc minoré, baptise une cloche du poidsde 282 kilogrammes, envoyée par le Maréchal duc de Dalmatie, mi-nistre de la Guerre, pour servir à l'église.
Elle a été appelée Marie, Philippine, Adélaïde.
Parrain : S. M. Louis-Philippe Ier, roi des Français, représenté
par le comte de la Tour du Pin, colonel du 19e régiment d'Infanterie
Légère, officier de l'ordre royal de la Légion d'honneur.
Marraine : S. A. Royale Adélaïde d'Orléans, représentée par Mme
Mathilde de Marqué.La construction de l'église est mise aux enchères et adjugée le
23 novembre 1846. Les travaux doivent être terminés à la fin de 1848.
L'entrepreneur est M. Bourret, avec un rabais de 1 %.25 octobre 1846. A la demande de la population maltaise, un
poste de vicaire maltais est créé; le titulaire est M. Galéa.
25 juin 1847. L'abbé Caries, premier vicaire, est nommé curé à
Drariah (Alger).Le samedi, 28 août 1847, pendant la première communion, un vase
de fleurs artificielles ayant pris feu, le communique aux rideaux
d'une fenêtre. Par un mouvement spontané, tous les enfants, au
nombre de plus de 80, se précipitent vers les portes. Il n'y eut pas
d'accident. L'église est, à cette époque, rue des Citernes (rue d'Aus-
terlitz), dans la maison de Manas.
La procession de la Fête-Dieu a lieu le dimanche, 2 juillet 1848;
elle est peu nombreuse, l'heure étant mal choisie, de 6 heures à 7
heures et demie, moment généralement adopté pour le dîner. La
musique de la Légion étrangère, arrivée le matin de Bône, l'accom-
pagne en jouant la Marseillaise. Une seconde, plus brillante, est
164 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
annoncée pour le dimanche suivant, à 5 heures; le curé se rend aux
deux clubs pour les engager à y assister.
Août 1848. Le clergé algérien est autorisé à porter la barbe.
Séance du 30 mai 1849. M. de Nobelly propose d'affecter une-
somme de 1.200 fr., pour le traitement d'un troisième vicaire, attaché-
à l'église de la ville. Le Conseil émet à l'instant son opinion sur cette-
proposition et, à la majorité de 13 voix contre 2, rejette la demande-
de M. de Nobelly.Séance du 4 octobre 1851. M. Peschart d'Ambly, maire, fait
connaître qu'il demande pour l'église catholique un don de deux
tableaux à l'huile destinés à son ornement. Cette initiative est ap-
prouvée par le Conseil, qui reconnaît les besoins d'un culte professé
par la plus grande partie de la population de notre ville; en face de
cette nécessité, il regrette que les ressources du budget ne lui per-mettent pas de faire cette dépense. Il espère néanmoins qu'une suite
favorable pourra être donnée à la requête du Maire et, confiant dans
la bienveillance du Ministre, il prie M. d'Ambly d'insister auprèsde l'autorité supérieure pour que ces deux tableaux soient accordés-
à l'église sur les fonds dont le Ministre dispose pour les objets d'art.
Le Conseil verrait avec plaisir que leur exécution fut confiée à
MM. Pasqualini et Amédée Fenech, artistes capables, résidant à
Paris. Il exprime le voeu que l'un de ces tableaux représente Saint-
Philippe, patron de la ville, et l'autre le martyr de Saint-Cyprien,
évêque de Carthage.12 octobre 1851. Une magnifique statue dorée de la Sainte-Vierge,,
portée en procession le 15 août précédent, est donnée à l'église par-la colonie maltaise.
Par décret présidentiel du 28 avril 1852, sont érigées en succur-
sales les églises de Valée-Damrémont et de Stora. Un traitement
de 1.800 fr. est alloué à chacun des desservants. Le Conseil, dans sa
séance du 19 juin suivant, loue à Valée, l'immeuble Coqueret et
demande la cession du lazaret de Stora, pour l'installation du culte
et du presbytère dans ces deux annexes. La chapelle de Valée est tou-
jours dans l'immeuble Coqueret.Séance du 6 juillet 1852. Vote d'une somme de 700 fr. pour l'ac-
quisition d'un tableau pour l'église (Saint-Philippe ou Saint-Augus-tin), l'Etat en ayant refusé le don gratuit.
M. Pavy, vicaire général, bénit la chapelle de Valée le 25 avril1853.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 165
Séance du 9 juin 1853. Résiliation, à partir du 1er janvier 1854,du bail de l'immeuble Lavoute, servant de chapelle, l'Inspecteurprincipal des bâtiments civils annonçant qu'il sera possible, à cette
date, de célébrer l'office divin dans la nouvelle église, et vote d'uneindemnité de logement de 1.000 fr. par an au curé de la ville.
6 novembre 1853. Le Conseil regrette de ne pouvoir intervenirdans la dépense du mobilier et de la décoration de la nouvelle église,évaluée à 28.000 francs.
Le 22 février 1854, le Conseil loue l'immeuble Lieutaud à Saint-
Antoine, pour servir d'église provisoire.Au moment de transporter dans la nouvelle église, en février 1854,
le mobilier de l'ancienne, on songe à restaurer les trois tableaux
apposés aux. murs. Ce soin est confié à M. Abel Pujol, qui venaitd'achever la décoration du théâtre. L'une de ces toiles, dont il fallut
détacher le cadre, porte le nom illustre de Van Dyck. Elle représentel'ensevelissement du Christ et a été donnée à l'église par Monsei-
gneur Dupuch.
L'Eglise. Vue prise du Bou-Yala
Séance du 10 janvier 1859. Le Conseil émet le voeu qu'une succur-
sale catholique soit créée à Saint-Antoine et déclare prendre à sa
charge le montant des objets mobiliers qui devaient être fournis à
celle du Filfila et s'élevant à 1.200 francs.
Séance du 16 décembre 1870. Le Conseil, à l'unanimité, supprimetoutes les subventions communales aux différents cultes.
166 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Séance du 3 janvier 1871. Le Conseil supprime les logements et
les indemnités de logement accordés aux ministres des différents
cultes et décide que la mesure qui vient d'être prise sera applicableà partir du 1er avril suivant. Le Maire devra aviser au plus tôt les
intéressés, tant ceux qui reçoivent des indemnités que ceux quihabitent des bâtiments communaux. Cette décision fut rejetée parle Préfet jusqu'à ce qu'une nouvelle loi ait prononcée la séparationdes églises et de l'Etat.
Liste des curés de la paroisse :
MM. Le Mauff, de 1839 au 31 décembre 1849.
Darbord, du 1er janvier 1850 au 1er mai 1853.
Plasson, du 1er juin 1853 au 1er janvier 1857.Soubrier, de janvier 1857 au 30 juin 1863.
Gaussait, du 1er juillet 1863 au 1er janvier 1884
Salles, du 1er avril 1884 au 1er octobre 1889.
Sicard, d'avril 1890 au 26 juin 1891.
Henri Sandraly, du 1er juillet 1891.
M. Soubrier est mort étant évoque d'Oran et M. Gaussail étant
évêque de Perpignan.En 1843, nous trouvons un vicaire du nom de Vincent Balzan.M. Sandraly, curé de la paroisse du Saint-Coeur-de-Marie, est
chanoine titulaire et vicaire forain.
Une ordonnance du 4 février 1844 établit un oratoire du culte
réformé.
Le 6 décembre 1847, meurt M. Paul, premier pasteur protestantde notre ville. Il est remplacé par M. Lombral.
Séance du 11 avril 1853. Le Conseil décide l'acquisition, au prixde 5.000 fr., d'une maison à effecter à l'installation de l'oratoire
protestant et servant à l'époque de loge franc-maçonnique.Séance du 9 juin 1853. Le Conseil vote un crédit de 1.000 fr. par
an pour location du logement du pasteur, dans la maison DomingoBarca, place Bélisaire.
Séance du 3 novembre 1853. Rejet de la demande du pasteur, envue de la création de l'emploi d'un chantre-lecteur.
Pasteur protestant actuel : M. Emile Ledermann, qui remplaça
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 167
M. Emile Metzger, entré en fonctions le 9 septembre 1900 et décédéle 16 mars 1903.
En 1845, on continue la construction de la mosquée. Achevée en
1846, elle fut remise au culte musulman (rite Maleki) le 20 octobre
1846. La dépense totale s'est élevée à 39.387 fr. 98, sur lesquels10.000 fr. ont été versés par les indigènes. Le premier iman de la
mosquée fut Si Salah ben Sassy ; celui actuel est Si Mohamed ben
Chegou.21 juillet 1849. Le rhamadan est annoncé par trois coups de canon
et, dans la soirée, le minaret de la mosquée est illuminé. Cet usages'est perpétué.
La foudre est tombée deux fois sur la mosquée, en 1865, puis le 15
octobre 1869, détruisant le croissant qui la dominait. Non sans quel-
ques hésitations, les indigènes consentirent à le laisser remplacer parun paratonnerre.
Il existe dans notre ville une chapelle de la confrérie musulmane
religieuse de la Kadria. Le mokhadem est Si Hadj Bouzian ben Ali
ben Lelmi.
Dans sa séance du 5 novembre 1850, le Conseil refuse de prendreà la charge de la commune le loyer de la synagogue, vu la non exis-
tence d'un rabbin légalement établi par l'administration supérieure.Le rabbin actuel est M. Jacob Haziza.
En 256 de notre ère, on voit un évêque de Rusicade,Verulus, siégerau concile assemblé à Carthage. A un autre concile tenu à Cirta
(Constantine), en 305, on cite un autre évêque nommé Victor et, en
411, au célèbre colloque de Carthage, présidé par le comte Marcellin,
on voit encore assister deux évêques de Rusicade : Faustianus, catho-
lique, et Junior, donatiste.
Il résulte d'une inscription, trouvée le 3 avril 1886 dans le square
Carnot, qu'au IVe siècle, l'évêque de Rusicade était Navigius, nobilis
autistes perpetuusque pater, Christi legisque minister.
XVII
LIGUE DE LA LIBRE-PENSEE
La Ligue de la Libre-Pensée, section de Philippeville, existe de-
puis le 8 mai 1881, date de l'approbation de ses statuts.
Son but est de combattre le cléricalisme et de proscrire l'ingé-rence des membres du clergé de n'importe quelle religion dans les
cérémonies funèbres. Tout adhérent doit s'engager à inscrire dans
son testament qu'il veut être enterré civilement.
La Ligue vient en aide à ceux des adhérents qui se trouvent dans
la gêne ou la misère. Une somme de 42 fr. est allouée à chaquefamille pour les obsèques civiles des' membres décodés.
23
XVIII
COLLEGE, ECOLES SECONDAIRES, INSTRUCTION PUBLIQUE
Le Ministre de la Guerre décide que le grand local précédemmentoccupé par le service des Ponts et Chaussées (place Victor Hugo)sera affecté à un établissement d'instruction secondaire à partir du1er octobre 1847.
3 septembre 1853. Distribution des prix à l'institution communale,dirigée par M. Olivier (collège actuel). La musique du 3e Zouaves
prête son concours ; le Préfet avait créé un prix d'honneur à cetteoccasion. Les élèves le plus souvent nommés sont : François Grimaudet Pierre Vincent.
9 septembre 1854. Distribution des prix à la même école. Remar-
qué parmi les élèves ayant obtenu le plus grand nombre de prix :
Adolphe Gantés, Frédéric Chiarelli, Germaix, Grimaud, Félix Cavic-
chioni, Louis Escoffier, Charles Blanchet, Eugène Fenech, Félix
Brochini, Arthur Hurlin.
15 septembre 1857. M. Lerebourg, bachelier ès-lettres, est nommé
directeur de l'institution communale, en remplacement de M. Olivier,démissionnaire. A cette époque, les travaux de construction du futur
collège sont très avancés.
Séance du 10 novembre 1857. Le Conseil décide la suppression du
cours d'arabe jusqu'à ce que l'enseignement supérieur soit donné à
l'institution communale à partir de la 3e et accorde une indemnité
de licenciement d'un mois de traitement à M. Gantés, professeur
chargé de ce cours.
Dans sa séance du 5 février 1858, le Conseil apprécie hautement
les services rendus par M. Louis Guyard, fondateur de l'institution
privée qui forma le noyau de notre collège. A cette date, nous
remarquons les noms de MM. Kuehn et Roman, professeurs dans
cet établissement.
172 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
M. Guyard a débuté dans l'enseignement au mois de septembre
1839, à l'école communale de Mayenne, où il était chargé d'une
classe enfantine. En 1840, il était envoyé au petit séminaire de Mus-
tapha Supérieur et était chargé d'une petite classe fréquentée pardes enfants d'officiers. L'école était située dans le local occupé ac-
tuellement par les dames du Sacré-Coeur.
Dans ce poste il reçut des félicitations de M. Leprêcheux, direc-
teur de l'enseignement en Algérie.Il rentra en France en 1842 et exerça au pensionnat de Saint-Ber-
tevin, près de Laval. Il fut de nouveau envoyé en Algérie et exerça,à Philippeville, au pensionnat Béchu, subventionné par la ville.
En 1848, pourvu des titres universitaires exigés, il fonda, à ses
frais, la première école laïque de Philippeville. Ses débuts furent
pénibles. La première année, elle comptait 16 élèves ; la rétribution
scolaire s'élevait à 68 fr. et le loyer était de 40 fr. Cependant l'école
se suffit à elle-même; de plus, M. Guyard trouvait le moyen, avec
ses seules ressources, de faire les frais d'une distribution de prixdans laquelle il dépensa 300 fr. Le jeune Réguis, devenu plus tard
sous-ingénieur des Ponts et Chaussées, y obtenait le prix d'excellence.
Les succès de l'école, les bons soins donnés aux enfants avaient
porté leurs fruits. Les élèves étaient devenus plus nombreux et M.
Guyard ne pouvait plus suffire seul aux besoins de l'enseignement.Pendant les vacances, il alla chercher en France un professeur afin
d'élargir le programme de l'école et créer des cours de latin.
Avec la seule rétribution scolaire de 5 fr. par élève, M. Guyardavait à faire face aux frais occasionnés par le loyer, le traitementdu nouveau professeur et les frais généraux de l'école. C'était une
charge trop lourde pour son modeste budget. Il fit part de sa situa-
tion difficile à M. l'Inspecteur d'Académie, lors d'une visite à l'école,et il demanda à être nommé instituteur communal.
L'école libre que dirigeait M. Guyard avec tant de dévouement
était devenue un pensionnat de jeunes gens et comptait àcette époque17 élèves internes et demi-pensionnaires.
La responsabilité d'un établissement si important était une tropforte charge pour lui. Avec une générosité digne des plus grandséloges, M. Guyard céda son école à l'administration académique;elle est devenue le collège communal de notre ville.
M. Guyard demanda et obtint le poste d'instituteur à El-Arrouch,.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 173
mais il n'y resta que peu de temps. Quelques mois après, en 1852,l'administration académique le nommait maître primaire au collège.
Il y resta jusqu'à sa retraite, en 1891, jouissant de la considérationde ses chefs, de l'estime des familles et de l'affection de ses élèves.Ses services avaient été récompensés par sa nomination d'officier
d'académie, en 1877, et celle d'officier de l'Instruction publique, en
1889. Il avait le droit d'espérer mieux.
M. Vidal est nommé principal le 8 octobre 1861.Séance du 10 février 1862. Le Conseil accorde l'admission gra-
tuite au collège du premier enfant indigène qui ait demandé à yentrer, le jeune Saïd ben Mohamed, fils d'un écrivain au bureauarabe.
Séance du 11 septembre 1862. Le Maire donne lecture d'une lettre
par laquelle le Sous-Préfet demande s'il ne serait pas possible de
revenir sur la création du collège communal et de réaliser une éco-
mie considérable en substituant à ce collège une école secondaire
privée avec deux ou trois professeurs.
Le Conseil,
Considérant que les charges de la commune pour le collège se sont élevées en
1861 à la somme de 10.415 fr.; qu'en supposant qu'une école secondaire suffise aux
exigences de la situation, il est certain que le chiffre de deux ou trois professeursserait au-dessous des besoins du service dans un établissement qui compte 130
élèves : qu'une institution secondaire organisée sur des bases sérieuses occasion-
nerait une dépense d'environ 5.000 fr.; que, par conséquent, la suppression du
collège ne produirait qu'une économie de 5.000 fr.; qu'au surplus le collège n'a
encore que deux ans d'existence et que l'expérience n'est pas suffisante pour faire
juger de l'opportunité de son maintien ou de sa suppression; est d'avis qu'il n'ya pas lieu, quant à présent, de supprimer le collège pour le remplacer par une
institution secondaires privée.
Séance du 18 décembre 1863. Vote d'une indemnité de 300 fr. à
l'aumônier du collège.Séance du 30 mai 1864. Sur la demande du consistoire protestant,
l'école des garçons de ce culte est annexée au collège, ce qui produitune augmentation de 30 élèves. D'un autre côté, à la prière du Mi-
nistre de l'Instruction publique, la création d'un cours pour l'ensei-
gnement professionnel est décidée.
La population du collège est, en mars 1865, de 106 élèves.
Séance du 6 novembre 1865. Le recteur pense, avec le Conseil, que
l'enseignement classique doit être maintenu et qu'on ne saurait en
priver, sans de graves inconvénients, les familles qui destinent leurs
1-74 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
enfants aux professions libérales, mais il ajoute qu'il n'est pas encore
temps d'établir à Philippeville un collège de plein exercice, c'est-à-dire
possédant toutes les chaires jusqu'à la philosophie inclusivement et
un régent pour chaque chaire et que l'on pourrait se borner, pour le
moment, au cadre suivant : principal chargé de la 4e et de la 5e,
régent de 6e et de 7e, régent de 8e et de la classe préparatoire, plusdeux régents pour l'enseignement spécial et enfin deux maîtres pour
l'enseignement primaire. Le Conseil, à l'unanimité, maintient son
voeu pour la création d'un collège de plein exercice, avec l'adjonctiond'un cours professionnel et d'un régent de rhétorique et de seconde.
Des cours du soir publics et gratuits, non rétribués par la com-
mune, sont ouverts au collège le 20 novembre 1865 :
Tous les soirs, sauf les jeudis et dimanches, lecture, écriture, M.
Guyard;Les lundis, mercredis, vendredis, langue française, orthographe et
style épistolaire, M. Benezet;Les mardis, jeudis, samedis, mathématiques, M. Catala, principal
du collège.Séance du 14 novembre 1866. Le Conseil décide qu'à l'avenir au-
cun enfant ne sera admis au collège avant l'âge de sept ans et fixe la
rétribution scolaire à 5 fr., 8 fr. et 10 fr. par mois.Séance du 19 décembre 1866. Le Conseil, à l'unanimité, est d'avis
de transformer le collège en établissement d'enseignement secondaire
spécial, sur la demande du Ministre de l'Instruction publique.La ville a passé avec l'Académie, le 23 février 1902, un nouveau
traité par lequel elle s'engage à assurer, pendant dix ans à partir du
1er janvier 1901, l'existence de notre collège et à payer le déficit quise produit annuellement entre les recettes et les dépenses de cet éta-
blissement.
La réputation de notre collège n'est plus à faire ; il a formé deshommes d'élite qui, par leur savoir et leur talent, se sont acquis des
situations qui font le plus grand honneur à l'établissement et à la
cité, dont ils ont été ou les hôtes ou les enfants.
L'enseignement secondaire est divisé en deux cycles, l'un d'unedurée de quatre ans, l'autre de trois ans. L'enseignement élémentaire
comprend les classes de 7e et de 8e, la lre et la 2e préparatoires. Desclasses enfantines, qui reçoivent des enfants de 3 à 7 ans et dirigéespar des mères de familles expérimentées, ayant fait leurs preuvesde savoir et de patience, sont jointes à l'établissement.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 175
Le collège reçoit des pensionnaires, des demi-pensionnaires et desexternes libres ou surveillés. Les élèves sont au nombre de 239.
Liste du personnel enseignant :
MM. Camille Mathieu, principal. Eustase Mourot, Jean Dansard,Jean Raffaelli, Antoine Magnaschi, sciences. Albert Fouret, Henri
Dufour, Joseph Cotte, Jean Larrieu, lettres. François Piétri, histoire.Jules Mariani, arabe. Michel Leca, grammaire. Henry Barbe, languesvivantes. François Casset, Michel Padovani, Jean-Baptiste Battesti,Léon Locquette, classes élémentaires et préparatoires. Louis Ran-
davel, dessin. Mmes Nathalie Alby et Marie Roumieux, classes en-
fantines. MM. Lucien Raffy, Toussaint Sansonetti, Lucien Touchet,
répétiteurs. Michel Leca, surveillant général. Jules Pottier, compta-bilité. Jean-Baptiste Bernardi, écriture, tir, escrime. Adrien Tournou,
musique. Gilbert Biscos, répétiteur et gymnastique.Madame Alby est décédée le 15 août 1903, regrettée de tous, pa-
rents et élèves.
Une association amicale des anciens élèves du collège est fondée
en 1894.
Elle a pour but de maintenir entre tous ses membres les relations
d'amitié contractées au collège et de contribuera la prospérité de cet
établissement.
L'association comprend environ 200 membres.
Les membres fondateurs sont :
MM. Alexandre Aquadro, Docteur Féraud, Louis Sider.
L'association a pour président d'honneur M. Louis Guyard, doyendes professeurs du collège, officier de l'Instruction publique.
L'association qui n'existe plus aujourd'hui, a entretenu pendant
plusieurs années des boursiers d'externat au collège.Elle a décerné le grand prix d'honneur annuel, patroné et faci-
lité l'organisation de fêtes scolaires et de conférences.
Le premier bureau élu pour quatre ans était composé de :
MM. Docteur Féraud, président.Bouzeran, vice-président.Louis Sider, trésorier.
Henri Marnet, secrétaire.
Aquadro, Bertin, Blanchet, Grapin, membres.
176 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
En 1845, le pensionnat d'instruction secondaire des garçons compte37 élèves. En 1849, M. Béchu est directeur, appointé par l'Etat, de
l'école secondaire, pensionnat où il y a 13 élèves.
Dans sa séance du 17 avril 1885, le Conseil décide l'installation
des cours secondaires de jeunes filles dans une maison située à
l'angle des rues Filfila, de la Manutention et Capitaine Drouin.
L'école secondaire est désormais créée, sous la direction de Madame
Galland. Mademoiselle Bertrand, directrice d'école à Châteauroux
(Indre), est nommée, le 26 janvier 1888, sous-directrice chargée des
classes primaires dans cette école.
L'école secondaire est transférée, en octobre 1893, dans la maison
Gaumain, rue Capitaine Drouin, et, en janvier 1900, dans l'immeuble
Primard, rue Théophile Réguis.Le nombre d'élèves est de 89.
L'enseignement comprend : l'enseignement moral, la langue et la
littérature françaises, les littératures anciennes, les langues vivantes
(anglais, arabe), l'histoire, la géographie, la cosmographie, les ma-
thématiques, l'histoire naturelle, l'hygiène, l'économie domestique,la physique et la chimie, les travaux à l'aiguille (couture, coupe et
assemblage), le dessin, la musique vocale, la gymnastique.
L'enseignement donné par des professeurs du collège à l'école
secondaire est le suivant : physique et chimie, histoire de la civili-
sation, géographie, anglais, arabe, littérature française, littératures
anciennes, dessin, musique vocale.
La directrice est Madame Galland; elle est secondée par 5 adjoin-
tes, 5 professeurs du collège chargés de cours, 1 maîtresse de mu-
sique et 1 maîtresse d'arabe.
Bien que de création relativement récente et malgré le nombre
trop restreint d'élèves qui la fréquentent, l'école secondaire de
jeunes filles a remporté, depuis qu'elle est ouverte, des succès fort
appréciables : 45 brevets élémentaires, dont 3 avec dispense d'âge;15 brevets supérieurs, dont un avec dispense d'âge ; 2 certificats
d'études primaires et admissions au concours pour les bourses de
l'enseignement primaire supérieur; 5 admissions aux écoles nor-
males d'institutrices. D'autre part, plusieurs jeunes filles ont, peu de
temps après avoir quitté l'école secondaire, où elles avaient fait leurs
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 177
études, été reçues à divers examens : bourses de l'enseignementsecondaire, brevet élémentaire et brevet supérieur.
Etablissements d'instruction primaire en 1845 :
Ecole des frères de Saint-Joseph, du Mans 79 garçons.Ecole des soeurs de la doctrine chrétienne., 123 filles.Ecole privée 46 garçons.
4 août 1869. Madame Céleste Canton ouvre, rue de Stora, n° 4,une maison d'éducation pour les jeunes filles.
La Ligue de l'Enseignement est installée définitivement le 18 août1869 : au collège dans la salle des cours d'adultes et dans son local
personnel, rue du Sphinx, n° 36. Les cours commencent le 30 aoûtet sont ainsi organisés :
Lecture et écriture MM. Meunier et Brugerre.Calligraphie Daprela.Dessin et géométrie Ventre et Charrier.
Français Dr Kayser.Arithmétique Réguis.Histoire et géographie Mazières.Chimie et botanique Sales.
Zoologie Dr Ricoux.Tenue de livres Faure aîné.
Mademoiselle Rose Charrier ouvre, le 10 septembre 1870, uneécole libre de jeunes filles. A cette époque, Mesdemoiselles Le Chauffde la Blanchetière cèdent à Madame Mallet leur institution de de-
moiselles.
Séance du 27 décembre 1870. Le Conseil décide l'impression àcent exemplaires et la distribution du rapport de M. Hauet, déposéau nom de la Commission de l'instruction publique et qui se termine
ainsi :
« Le programme de l'instruction primaire doit comprendre la« morale., la lecture, l'écriture, l'orthographe, l'arithmétique, l'his-
« toire de France (non pas l'histoire de ses rois, mais l'histoire du
« peuple), la géographie, le dessin, la gymnastique. »
Le Conseil ajoute que la Constitution de la République française,sera lue dans chaque classe et chaque semaine et que le maître
l'expliquera aux enfants les plus âgés.
24
178 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le 3 février 1871, le Conseil examine une pétition des habitants
de Saint-Antoine, demandant le maintien des soeurs dans ce village.Renvoi à l'examen de la Commission de l'instruction publique.
Séance du 31 mai 1883. Création d'un bataillon scolaire, sous la
direction de M. Bernardi. Vote d'un crédit de 500 fr. pour achat de
fusils. Le 24 mai 1884, création de la caisse des écoles, dont les
membres, désignés le 21 août suivant, sont MM. Jules Nielli, Le
Gigan, Lalliermonet, Massoni, Dr Ricoux, Véron, Prax et Rivière.
Par arrêté du Ministre de l'Instruction publique du 27 novembre
1894, un comité d'inspection et d'achat de livres de la bibliothèque
populaire communale est créé. Ce comité est ainsi composé : MM. le
Maire, président; Bertin, libraire; Bertrand, conservateur du Musée,
secrétaire;Blain, 1eradjoint; Mathieu, principal du collège; Rivière,
conseiller municipal ; Rossi, adjoint au maire. La bibliothèque po-
pulaire possède 2.150volumes. Le bibliothécaire est M. Saint-Ernest;
ses fonctions sont gratuites et toutes de dévouement.
L'instruction primaire est donnée à Philippeville dans sept écoles
savoir :
Ecole laïque des garçons. Directeur, M. Brocard, Charles ; 11
adjoints, 597 élèves. M. Brocard, décédé le 28 janvier 1903, a été
remplacé par M. Charles Zannettacci-Stephanopoli.Ecole laïque des filles. Directrice, Madame Contard, Marie; 10
adjointes, 582 élèves,
Ecole maternelle. Directrice, Mademoiselle Clayette, Lucie; 2
adjointes, 339 enfants.
Ecole laïque du faubourg. Garçons : M. Paul Gérardin, instituteur ;49 élèves. Filles : Mademoiselle Elisabeth Barbé, institutrice; 55
élèves. Ecole enfantine : Madame Catherine Perroudon, institutrice;
78 enfants.
Ecole mixte de Valée-. Mademoiselle Sylvie Battesti, institutrice ;63 élèves.
Ecole mixte de Saint-Antoine. Madame Joséphine Baret, institu-
trice; 58 élèves.
Ecole mixte de Damrémont. Directrice : Madame Catherine Pao-
lini ; 25 élèves.
Le budget de la ville est, pour 1903, en ce qui concerne l'instruc-
tion publique secondaire et primaire :
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 179
Dépenses 171.200 00Un sixième de l'octroi de mer retenu par l'Etatpour
le paiement des traitements des instituteurs etdes institutrices 19.800 00
Entretien des bâtiments et achat de matériel, chauf-
fage, éclairage, etc 5.500 00
TOTAL.. 196.500 00
Recettes 91.500 00
La commune supporte donc une dépense de 105.000 00
soit le cinquième de son budget pour l'instruction publique. De
plus, dans l'emprunt de492.000 fr. qu'elle a contracté le28 juin 1901,elle affecte une somme de 180.100 fr. à nos écoles :
Construction d'un groupe scolaire au faubourg... 66.000 00
Agrandissement de l'école laïque des garçons, en
ville 55.000 00
Agrandissement du collège 34.500 00
Agrandissement de l'école maternelle, en ville. .. 24.600 00
TOTAL 180.100 00
Ces travaux sont en voie d'exécution.
Le 15 septembre 1852, ouverture de l'école de M. Rivière dans la
maison Boutinet, rue du 3e Bataillon.
M. Jacques, Gabriel Rivière, instituteur libre, conseiller municipalet membre du Conseil départemental, est aujourd'hui âgé de 78 ans.
Dans l'instruction primaire depuis 1839, il fut, de 1852 à 1855, per-sécuté pour ses opinions républicaines qui lui valurent des amendes
et même la prison.Il a obtenu, dans sa longue carrière de nombreuses récompenses,
dont la dernière, février 1903, a été l'obtention des palmes acadé-
miques.
Les frères Saint-Joseph, du Mans, s'établirent dans notre ville
en 1844 et y demeurèrent jusqu'aux vacances de 1873. Leur école
était d'abord située dans la rue du 62me et, en 1864, dans la rue du
3e Bataillon. Le frère directeur était M. Galmard.
180 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Les frères des écoles chrétiennes de Paris furent appelés, en 1874,à succéder aux frères de Saint-Joseph et y restèrent comme institu-
teurs communaux jusqu'aux vacances de 1880, époque de la laïcisa-
tion. Le directeur était le frère Némy-Gabriel.En 1880, un comité, dit des Ecoles libres, se forma pour conserver
l'enseignement congréganiste à Philippeville. Une maison située à
l'angle des rues de France et de Carthage fut louée et aménagée pourl'école des Frères, qui y est restée jusqu'au mois de juillet 1902.
Actuellement l'école est située rue Valée, 58, maison de Boisson ;elle compte 6 classes et 210 élèves. Le personnel enseignant se
compose du directeur, frère Justinien-Léon, et de 7 frères instituteurs-
adjoints.
L'Algérie n'était pas encore entièrement conquise, lorsque le
Gouverneur général, maréchal Bugeaud, et Monseigneur Dupuch,
évêque d'Alger, s'adressèrent par des instances réitérées à la Maison-
Mère de la Doctrine Chrétienne de Nancy, afin d'obtenir des reli-
gieuses à Philippeville pour fonder une école, un ouvroir et s'occuperdu soin des malades.
Le 3 mai 1841, 6 religieuses quittaient la Maison-Mère de Nancy,pour se rendre à Alger. Elles profitèrent de leur séjour en cette ville
pour s'initier aux éléments de la langue arabe.
Le 7 novembre 1841, après des fatigues, des souffrances de tous
genres, la petite colonie arrivait à Philippeville où elle fut accueillie
par la très charitable Madame Piquepé. Quand la maison d'école fut
sommairement préparée, la soeur Symphorose, Supérieure, et 5
religieuses s'y installèrent et bientôt leur dévouement eut libre
carrière sur les enfants des colons, des indigènes et sur les malades
qu'elles soignaient à domicile.
Le 29 mai 1843, un hospice fut créé et 4 nouvelles religieusesvinrent unir leur dévouement à celui de leurs compagnes. En 1849,le choléra sévit avec une force effroyable ; chaque soeur semblait se-
multiplier pour soulager les malades. Aussi, dès 1850, le Ministrede la Guerre, M. d'Hautpoul, adressait à la Supérieure générale-de la Doctrine Chrétienne une lettre de félicitations pour le courageet l'abnégation des soeurs de Philippeville.
En 1856, la Supérieure, soeur Symphorose, appelée à la directiondu pensionnat de Bab-Azoun (Alger), fut remplacée par soeur
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 181
Adélaïde. Dès 1858, en dépit d'obstacles sans nombre, la nouvelle
Supérieure fit construire le pensionnat des religieuses.L'action bienfaisante de soeur Adélaïde, ses efforts constants
donnèrent aux travaux de la salle d'asile, des classes communales,d'un ouvroir et aux études du pensionnat, cette direction intelligente
qui lui valurent les médailles de bronze, d'argent et d'or.
Soeur Adélaïde était aussi chargée de l'hospice des femmes.
Pendant 30 ans, elle s'est dévouée à ceux qui souffraient, aussi bien
qu'à l'éducation de la jeunesse.En 1876, soeur Saint-François remplaçait la Supérieure, décédée.
Vers cette époque, soeur Ammienne eut la direction des soeurs de
l'Hôpital, et, depuis 1890, soeur Béatrix continue, avec 8 religieuses,les mêmes fonctions de dévouement.
C'est à 1882 que remonte la création de l'école libre de la rue
Galbois, dont la directrice, soeur Nomadie, fut remplacée par soeur
Marie-Alphonse. Cette école compte 400 enfants. En 1902, elle
présenta 10 aspirantes au certificat d'études primaires ; toutes furent
reçues.En 1895, soeur Saint François, devenue Supérieure-Provinciale,
fut remplacée à la tête du pensionnat par soeur Marie-Joseph. Cet
établissement compte .190 enfants, réparties dans 7 classes et un
ouvroir. Chaque année, le pensionnat présente des élèves aux
examens académiques. En 1902, deux élèves sur trois ont obtenu
leur brevet supérieur et une fut reçue avec félicitations du jury.En 1900, trois soeurs furent chargées de desservir la crèche, fondée
pour 20 enfants.
XIX
BEAUX-ARTS, LITTERATURE, POESIE, THEATRE, MUSIQUEPUBLICATIONS DIVERSES
Un programme :
Théâtre de Philippeville. Soirée du 1er mars 1848. Directeur : Lu-dovic Reichestein. Chef d'orchestre : Eugène Reichestein.
Un Docteur en herbe, vaudeville en deux actes. Phoebus ou l'Ecri-vain public, vaudeville en deux actes. Entre ces deux pièces, concertvocal et instrumental. M, Quentin, chef de la musique du 19e Léger,prête son concours, ainsi que M. Bléger, musicien de lre classe au
19e, père de Michel Bléger, le regretté chef de la Philharmonique.Le Courrier de Philippeville dit dans son numéro du 15 août 1847 :
Nous avons vu avec plaisir, dimanche dernier, de nouveaux décors
sur notre scène. La troupe du 19e Léger, comme elle l'avait annoncé,a changé les décors à toutes les pièces. Au second acte des Mémoiresdu Diable, le bal était très bien et les costumes très beaux.
7 avril 1849. M. Reichestein obtient un nouveau privilège de trois
années, à dater du 1er avril, pour l'exploitation des théâtres de Cons-
tantine et de Philippeville. Avant M. Reichestein, le directeur de
notre scène était M. Thurbet. C'est lui qui a établi, le 2 juin 1844,le premier théâtre de notre ville ; le 25 du même mois, la troupe de
Madame Saqui jouait sur ce théâtre improvisé, qui fut interdit au
bout de trois années d'existence.
Programme de la soirée du 16 septembre 1849. Troupe enfantine
de Madame Saqui. L'Amour et Psyché. Bal anacréontique. La Bou-
quetière. Le Fils du Bravo. Les Souvenirs d'Enfance, vaudevilles.
Séance du 3 décembre 1849. Le Conseil vote une somme de 800 fr.
pour réparations à la salle du théâtre, maison Narboni, sur la demande
de M. Ludovic Reichestein, directeur priviligié des théâtres de Phi-
lippeville, de Constantine et de Bône, et maintient à la charge du
directeur le prix de location de cette salle, soit 60 fr. par mois.
184 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Programme de la soirée du 3 novembre 1850. La Chasse aux
Lions ou une Saint-Hubert en Afrique, impromptu dédié aux
chasseurs de Philippeville. Une Femme exposée ou les deux
Ménages, comédie en 3 actes. Le Lait d'ânesse, vaudeville. Asinus
asinum fricot ou les Deux Précepteurs, comédie-vaudeville. Le
Philtre Champenois, vaudeville.
Le Conseil approuve, le 26 mai 1851, la mise en adjudication de
la construction du théâtre.
Le Ministre de la Guerre renouvelle pour 3 ans, le 1er mai 1852,le privilège des théâtres du département en faveur de M.
Reichestein.
Séance du 13 mai 1853. Le Conseil vote 7.800 fr. pour travaux et
fourniture du mobilier de la scène, des décors et du mécanisme du
théâtre, dans une salle en location.Le 4 février 1854, ouverture de la salle du théâtre de la place
Corneille.
Le Conseil accepte, le 7 février 1857, l'offre du M. Galzen, pro-
priétaire et menuisier, de construire, pour les bals, un plancher sur
les stalles d'orchestre du théâtre, au prix de 1.400 fr., avec intérêts
de 10 0/0 jusqu'au remboursement total.12 décembre 1857. Soirée de prestidigitation au théâtre par le
célèbre Bosco.
Séance du 3 février 1859. Par suite de l'achèvement du perron de
l'église, le Conseil examine s'il ne conviendrait pas d'enlever du
milieu de la place la statue de l'empereur Antonin qui y a été amé-
nagée provisoirement et qui gêne la circulation. Après discussion,le Conseil reconnaissant qu'en effet cette statue, dont il ne méconnaît
pas la valeur comme spécimen de l'art païen, n'est pas convena-
blement placée devant un édifice chrétien, décide à l'unanimité,moins une voix, de la faire transporter sur la place de la Marine.
Séance du 13 mai 1859. Le Conseil vote pour la première foisune subvention au directeur du théâtre ; elle est fixée à 1.000 fr.
M. de Presles est nommé directeur privilégié du théâtre le 9
novembre 1859.Le Conseil décide, le 4 mai 1861, la construction de stalles de
balcon au théâtre.
Création, le 13 mai 1861, de la bibliothèque publique et vote, le
20 octobre 1862, de la construction des magasins de décors derrièrele théâtre.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 185
En 1867, le directeur du théâtre est M. Bétout et le chef d'orchestre
M. Grassau. M. Bétout cesse de diriger les théâtres du départementle 19 août 1876.
Le Ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts donne à
la ville, le 7 juin 1879, la statue en marbre de Brennus, qui a figuréà l'exposition de 1878 et qui est due au ciseau de M. Taluet. M.
Georges Lesueur offre à la municipalité le piédestal en marbre, tout
prêt à être mis en place.
BRENNUS
Parmi les vertes frondaisons
Du square Carnot, la statue
De Brennus, en toutes saisons,Sur son socle est si peu vêtue
Qu'autant vaudrait qu'elle fût nue.
Brennus, le corps bien en avant,Au lieu de brandir une épée,Dans sa main droite agite au vent,Comme un guerrier fait d'un trophée,Une vigne qu'il a coupée.
Ce n'est pas le rude étrangerJetant son glaive en la balance ;C'est le Brennus de Béranger,
Appuyant son corps qui balance
Sur un cep en guise de lance.
Brennus soldat dit : Vae Victis !
Aux Romains après la victoire.
Le nôtre : Fortuna Vitis !
Et son cep vaut mieux que la gloireDu Gaulois connu dans l'Histoire.
16 février 1901. L. B.
Le 23 juin 1881, M. le comte Landon de Longeville offre, pour
orner le bassin de la place de l'église, une statue en bronze repré-
sentant une Nubienne. Cette statue est actuellement dans un des
squares de la place Wagram.
186 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Nous aurions été heureux de pouvoir relater toutes les publications
parues,, dues à l'imagination et au talent de nos concitoyens; ce cha-
pitre eut été trop long. Nous nous bornerons à citer :
Les poètes, MM. Paul BARTHÉLÉMY (Paul la Soulonne), AntoineBOUZERAN (Nivelant), F. COLOMBA, professeur au Collège (1859),Toussaint GRIMALDI, Emile HAMONT, Joseph MOGENIER, ouvrier
terrassier, Jean RAIBAUD, ROGER-LACASSAGNE., Paul Rossi, Louis
SIDER;Les historiens et grammairiens, MM. Emmanuel-Vincent FENECH,
L.-Charles FÉRAUD, Octave TEISSIER, Jacques-Gabriel RIVIÈRE.
Les artistes peintres, MM. Louis HAAS (Sidi), Georges PIGNON
(Jordic) ;Les compositeurs de musique, MM. Louis GRECH, Emmanuel
REVIRE ;L'écrivain militaire, M. Félix PITOIS, Sous-Intendant (1897) ;Les statisticiens et mutualistes, MM. le docteur René Ricoux,
Louis CASTELLOTTI, Alfred HONTEBEYRIE, Prosper MERCIER ;Les mathématiciens et hydrographes, MM. Martin BELTÇAGUY,
Achille CARPENTIER, RIBAUCOUR et SALVA ;
L'archéologue, M. Joseph ROGER;L'orateur populaire, M. Benjamin CAZELLES ;Enfin l'érudit et infatigable M. Jules CHABASSIÈRE, à la fois peintre,
architecte, inventeur et doyen des archéologues de l'Afrique du
Nord.
XX
MUSEE, THEATRE ROMAIN
Dans les premiers temps de la conquête du pays par les Français,de 1838 à 1850 environ, beaucoup de vestiges de l'occupationromaine trouvés à Philippeville, l'antique Rusicade, et qui pouvaientêtre transportés, étaient envoyés soit au musée du Louvre, soit à
Constantine, chef-lieu de la province, soit même à Alger. C'était assez
naturel, puisqu'il n'y avait pas encore dans notre ville un local suffi-samment aménagé pour les recevoir et les conserver.
Vers 1845, un conducteur des Ponts et Chaussées,, M. Laborie,réunit les divers objets gisant épars de tous côtés et les fit trans-
porter dans l'intérieur du théâtre romain, classé depuis commemonument historique. L'emplacement du bureau de M. Laborie setrouvant mitoyen avec celui du théâtre romain, ce fonctionnaire putveiller assez facilement à la conservation de ces collections et ce
fut une chose heureuse, car, à cette époque, le théâtre romain n'était
pas clôturé.
Dans sa séance du 14 février 1853, le Conseil municipal émet levoeu que les objets d'art réunis au théâtre romain, qui sert de cour
à l'école primaire, soient remis à l'administration communale, à
charge par elle de prendre les dispositions nécessaires pour leur en-
tretien et leur conservation. Dans sa réunion du 3 septembre sui-
vant, cette assemblée vote un crédit de 500 fr. en 1853 et de 500 fr.
en 1854 pour la conservation des antiquités. Le Ministre de la Guerre
se réserve la faculté de réclamer la possession des antiquités qu'il
désirerait placer au musée algérien institué à Paris ou dans tous
autres musées nationaux.
Sur la proposition de M. Alexandre Waliet, maire, M. Joseph
Roger, architecte, est nommé conservateur du musée par arrêté
préfectoral du 13 décembre 1859, portant création du musée archéo-
188 HISTOIRE DE PHIL1PPEVILLE
logique. On peut dire que c'est réellement de cette époque que date
notre musée.
Cependant l'honneur de sa création ne revient pas seulement à
MM. Wallet et Roger, mais aussi au prince Jérôme Napoléon,Ministre de l'Algérie et des Colonies, qui adressa aux autorités civileset militaires, en janvier 1859, une circulaire les invitant à aviser à
la conservation des ruines, vestiges et débris de la domination
romaine, et enfin à M. de Toulgoët, Préfet du département, qui,obéissant à ces ordres, stimula d'une façon toute spéciale le zèle d&
ses fonctionnaires.
L'organisateur du musée est sans contredit M. Joseph Roger ; il
en resta le conservateur du 13 décembre 1859 au 3 juillet 1876, jourde son décès, c'est-à-dire pendant 17 ans.
Par les soins de Roger, les statues, colonnes, sarcophages et autres
gros monuments furent placés dehors au théâtre romain et lesmenus objets dans un hangar clos, y attenant. Le 8 avril 1868, la
Société française de numismatique et d'archéologie de Paris décerna
une médaille en vermeil, grand module, à M. Joseph Roger.
De 1876 à 1885, c'est-à-dire après Roger, la conservation des-
collections du musée fut confiée à des employés municipaux sans
goût et sans instruction spéciale, qui considéraient comme une
charge l'honneur qu'on leur accordait, puisque leurs nouvelles
fonctions n'étaient pas rétribuées. Nous faisons exception pour M.
Hugues Dry, chef de bureau à la mairie, homme érudit et conscien-
cieux, qui fut conservateur de 1885 à 1890.
A cette époque, nos collections étaient en mauvaise place, soit
dehors, soit dans une pièce obscure de l'entresol de la mairie, servant
aussi de salle d'archives, où un incendie faillit tout consumer le 6
février 1892.
Sur les instances du conservateur actuel, le Conseil municipaldécida la création d'un musée sur la place d'Isly, pour laquelle l'Etat
accorda une subvention de 16.000 fr. Une souscription publique-
produisit une somme de 2.100 fr. et des entrepreneurs Philippevilloisvoulurent bien faire gratuitement pour 1.000 fr. environ de travaux
divers (maçonnerie, menuiserie, ébénisterie, serrurerie et peinture).Le premier coup de pioche fut donné le 22 novembre 1898.
L'ensemble du musée occupe une superficie de terrain de 2.726-
mètres carrés, dont 94 de façade sur 29 de profondeur, entièrement.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 189
clôturée par des murs et une grille. Les bâtiments représentent unesurface de 278 mètres carrés ; ils sont au nombre de trois :
I. — Pavillon central, composé de deux grandes salles de 20 mètresde longueur sur 9 mètres de largeur, l'une au rez-de-chaussée affectée
uniquement à l'archéologie, l'autre, de même dimension, au premierétage ; c'est la salle de peinture, de sculpture et de collectionsmodernes.
II.— Pavillon Nord. 7 mètres sur 7 mètres. Au rez-de-chaussée,
logement du gardien ; le premier étage est réservé pour y installerla collection de numismatique (6 à 7.000 médailles et monnaies) etle cabinet du conservateur.
III. — Pavillon Sud. Mêmes dimensions que le pavillon nord. Au
rez-de-chaussée, musée d'armes, fort intelligemment organisé parnotre concitoyen M. Jean-Baptiste Martin, armurier. Le premierétage est destiné à l'aménagement d'un musée de pêches maritimes,avec le concours de l'inscription maritime et du pilotage. Les modèlesde bateaux, de filets et d'engins de pêche dans notre golfe sont placésprovisoirement dans la grande salle du premier étage du pavilloncentral et dans- le grenier.
Des galeries couvertes, commencées en partie, d'une superficie de448 mètres carrés, relieront les trois pavillons entre eux à la hauteurdu premier étage, ce qui supprimera l'entrée de la salle moderne
par la rue du Sphynx.Le plan d'ensemble du musée a été dressé par M. Henri Ranoux,
architecte, qui a surveillé la construction du pavillon central et du
pavillon Nord, ainsi que le transport délicat et dangereux des sarco-
phages, statues, colonnes et autres objets lourds du théâtre romainà la place d'Isly.
Le pavillon Sud a été projeté et construit par M. Jean-Aimé
Roche, architecte de la ville, qui a fait procéder aussi à la pose de la
grille de clôture.
Tous deux ont fait preuve de bon goût, d'amour de l'art et du plus
grand désintéressement. M. Henri Ranoux, chargé par arrêté muni-
cipal du 20 mars 1899 de la surveillance des travaux de construction
du musée, n'a pas voulu d'honoraires pour l'établissement des planset la peine qu'il a prise, avec le plus grand zèle, à faire opérer le
déménagement du musée de la place d'Isly.Notre musée était peu connu ; il commence à être fort apprécié
190 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
et visité par de nombreux touristes. Il est, en effet, l'un des plusriches en collections archéologiques, puisqu'il renferme :
61 colonnes, 52 bases, 106 chapiteaux, 9 statues, 6 bustes, 8 sta-
tuettes, 1 cadran solaire, 10 bornes et colonnes milliaires ; presquetous ces vestiges sont en marbre du Filfîla. En outre : 15 sarco-
phages, dont plusieurs sont remarquables, 1 dolium d'une capacitéde 1.000 litres, 1 beau médaillon en mosaïque représentant Bacchus;des têtes, des torses, des fragments de statues, des moulins, des
margelles de puits, etc., plus un grand nombre de poteries, de lam-
pes, d'objets en verre, en os, en bronze et en plomb et 174 inscrip-tions.
Statue de l'Empereur Antonin
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 191
Le nombre de visiteurs a été, aux diverses époques suivantes, de :
1861 728
1862 884
1863 1.092
1864 1.104
1900 1 1001901 1.0061902 1.080
Administration du musée :
MM. René Cagnat,membre de l'Institut, inspecteur général des mu-sées scientifiques et archéologiques de l'Algérie.
Albert Ballu, architecte en chef des monuments historiques de
l'Algérie.Louis Bertrand, conservateur du musée et du théâtre romain.
François Bertrand fils, conservateur adjoint.Henri Ranoux, architecte, auteur du projet de construction.Jean-Aimé Roche, architecte, chargé des travaux d'achèvement.
Albert Treille, gardien.
Comité d'administration :
MM. Dr Ricoux, maire.
Paul Rossi, Octave Passerieu, Chabassière et Albert Teissier,conseillers municipaux.
Randavel et Redon, artistes peintres.
Le musée a remporté un grand diplôme d'honneur à l'Expositionuniverselle de Philippeville en 1895 et, en 1898, une médaille d'orà l'Exposition internationale de Berghen (Norvège), pour sa partici-
pation très notable à cette exposition.
Le théâtre romain, dont les ruines se trouvent derrière le collège,
occupait, avant sa destruction lors de l'occupation française, environ
4.900 mètres carrés ; la partie des ruines qui n'est pas couverte parles constructions modernes (collège et magasin des Ponts-et-
Chaussées) est de 2.740 mètres. La scène a disparu ; il ne reste queles substructions des gradins. Ce monument devait contenir de 5 à
6.000 places. Il est plus grand que les théâtres de Djemila et de
Timgad ; sa largeur maxima était de 82 mètres, tandis que celui de
Timgad n'a que 63 m. 60 et celui de Djemila 62 mètres.
192 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Une très belle mosaïque existe dans le propriété Allemand, en-
dessous de l'hôpital civil. Elle représente le triomphe d'Amphytrite.Les cubes en sont très fins et d'un riche coloris.
Stora était le port de la ville romaine de Rusicade. On y remarque :
Les citernes restaurées, situées dans la partie haute du village et
utilisées depuis l'occupation française (1838) ; elles étaient d'une
contenance d'environ 3.000 mètres cubes d'eau à l'époque romaine ;La fontaine moderne, qui coule sous la voûte même d'une grande
citerne romaine. Cette citerne est du plus remarquable appareil.
Malgré les mutilations qu'elle a subies et qui ont éventré à peu prèsle tiers de sa voûte, elle témoigne de son antique importance parses belles dimensions : 8 mètres de large sur près de 9 mètres de
haut, sans parler de sa longueur qu'on ne peut plus évaluer, mais quin'était pas moindre de 20 à 25 mètres. Des blocs de maçonnerie
provenant de cette citerne existent encore sur le rivage, ce qui indique
qu'elle s'est effondrée ou qu'elle a été démolie lors de l'établissement
du chemin qui mène du village de Stora au petit phare.
XXI
SOCIETES MUSICALES
Séance du 6 août 1858. Le Maire soumet une demande de la So-ciété Philharmonique, fondée le 7 mars 1856, tendant à mettre à sa
disposition, pour ses répétitions, une salle du collège communal ; il
estime qu'il convient d'encourager cette réunion de jeunes gens quiconsacrent à l'étude de la musique et du chant leurs heures de loisir.Le Conseil, considérant qu'on ne saurait trop venir en aide à une
pareille institution et que le meilleur moyen de la voir prospérer est
de la prendre sous son patronage, décide, à l'unanimité, qu'il sera
mis à la disposition de la Société Philharmonique une salle du col-
lège communal.
Simple fanfare, elle devint, dès le 9 novembre 1858, une musiquefort appréciée. Un règlement signé par MM. Wallet, maire; Pégat,
président; et Grün, chef, fut élaboré.
Séance du 5 février 1859. Le Maire expose qu'une réunion de
jeunes gens s'est formée sous le nom de Société Philharmonique et
qu'ils ont créé une musique qui a donné jusqu'à présent les plusheureux résultats. Malheureusement cette société est près de se dis-
soudre par suite du manque d'un chef qui puisse donner tous ses
soins aux répétitions. Il croît cependant qu'en accordant une subven-
tion à cette société, on pourrait trouver un homme capable qui se
chargerait de la direction des répétitions. Le Conseil, considérant
qu'on ne saurait trop venir en aide à une institution dont il recon-
naît le but moral et utile, puisque d'un côté elle pousse les jeunes
gens à l'étude de l'art au lieu de les laisser oisifs, et que, d'un autre,
elle dote notre ville d'une musique dont elle est privée depuis si
longtemps, décide, à l'unanimité, d'allouer à titre de subvention à
la Société Philharmonique une somme de 600 fr. par an.
Faisaient partie, à l'époque, de la société comme musiciens fonda-
194 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
teurs : MM. Paret, propriétaire; Gaumain, horloger; Paul Catheri-
neau, représentant de commerce.
Dans sa séance du 13 mai suivant, le Maire expose, sans obtenir
de résultat, qu'une autre question est celle de l'achat d'instruments
de musique pour cette Société. La plupart des jeunes gens qui la
composent sont hors d'état de les acheter à leurs frais ; de plus, il
convient que la commune possède la plus grande partie de ces instru-
ments pour ne pas être prise au dépourvu en cas de départ de
quelques-uns des membres de la Société. Une souscription, ouverte
en ville, a produit une somme de 500 fr. environ et une partie des
instruments a été remboursée par ceux qui pouvaient le faire ; il ne
reste plus à payer qu'une somme de 835 fr., au moyen de laquelle la
commune restera propriétaire d'un fonds d'instruments de musiquedont elle pourra jouir en tout temps.
21 juin 1859. La municipalité accorde à la Société Philharmoniqueun local et l'éclairage.
Le jeudi, 25 juillet 1861, la Société joue pour la première fois
divers morceaux sur la place de la Marine. Le public est vivement
touché de cette agréable innovation.
Programme des morceaux exécutés le 25 juillet 1861, à 8 heures
du soir, sur la place de Marqué, par la Société Philharmonique :
1° Le Char du Soleil, pas redoublé LAVAGNE.
2° Sainte-Claire, marche DANIEL.
3° Atala, fantaisie BLANCHETEAO.
4° La Belle Varsovienne, polonaise E. MARIE.
5° La Garde Impériale, marche BESSIÈRES.
6° Les Bons Vivants, quadrille BLANCHETEAU.
22 novembre 1861. Fête de Ste-Cécile. Programme des morceaux
exécutés à l'église, de 11 h. 1/2 à midi, parla Société Philharmoniqueet la Fanfare du Train, réunies :
1° Revue Impériale, pas redoublé.2° Le Roi des Mers, fantaisie ZIÉGLER.
3° L'Arche d'Alliance, andante ...
4° Marie, défilé
Le 28 décembre 1864, le Conseil vote une subvention de 1.200 fr.
à la Société Philharmonique, à la condition que son directeur devra
donner des leçons gratuites au collège et à l'école des Frères.
Le 2 août 1865, a lieu la fusion de la Société Orphéonique et de
la Société Philharmonique, à l'occasion de la remise d'une médaille
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 195
d'or, don de l'empereur, à M. Louis Grech, compositeur de musique,directeur de l'Orphéon.
Le 18 mai 1872 a lieu au Casino le punch offert par la populationà la Société Philharmonique pour fêter la victoire qu'elle vient de
remporter à Alger, sous la direction de M. Schambel.
La Société Philharmonique a accompagné la colonne de Milicienset de Francs-Tireurs de Philippeville en 1871; elle est restée 44 jours,dehors.
Sa bannière a appartenu à l'Orphéon; la ville en a fait don à la
Philharmonique, en 1872, lorsqu'elle est rentrée du concours d'Alger,où elle a remporté tous les premiers prix. Le drapeau actuel a été
offert par M. Paul Rossi, président, en témoignage de son attache-
ment à la Société.
En 1897, un comité s'est formé pour édifier l'Institut musical actuel,dont la valeur est de 22.000 fr.; ce comité était composé de MM.
Paul Rossi, Charles Cassar, Edouard Pons, Joseph Maroni, Tony
Deviègue, Jean Raibaud, Joseph Grosso, Louis Laout.
La société compte actuellement: 55 exécutants,40 élèves, 90 mem-
bres honoraires.Liste des présidents :
MM. Ferdinand Pégat, Barthélémy Peisson, Domergue, Adolphe
Gantés, David Lyanna, René Ricoux, Adolphe Chiarelli, Beltçaguy,Alexandre Aquadro, Benjamin Cazelles, Alexandre Aquadro, Paul
Rossi.Liste des chefs :
MM. Béchem, chef fondateur, avec M. Bonifay comme sous-chef;
Strébitzski; Grün; Ferdinand Pégat, chef et président; Lavagne;
Clément; Joly; Schambel; Adolphe Gantés, chef et président; Picard;
Canton; Ferret; Edouard Gantés; Julien Waltre; Demelin; Beau-
fils; Michel Bléger, le célèbre compositeur ; Guyot; Manens; Lata-
pie; Tournou. M. Beaufils est sous-chef depuis le 1er novembre 1886;
il a rempli les fonctions de chef, à diverses reprises, pendant 61 mois.
Liste des porte-drapeau :
MM. Courbe, Paul Grosso, Mikalef, Charles Cassar, Catalourda,
chevalier de la Légion d'honneur, et Catelli.
Composition du Conseil d'administration actuel :
MM. Paul Rossi, président. Jules Pottier, Marcel Daprela, vice-
196 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
présidents. Edouard Tiozzo, trésorier. Membres : Guillaume Marquet,Edouard Pons, Charles Cassar, Joseph Maroni, Paul Sublime, Er-
nest Liottard, Louis Laout, Joseph Amante, Joseph Grosso, Léon
Auméran, Justin Auméran.
MM. Dr Ricoux, Ad. Chiarelli, Beltçaguy, présidents honoraires.
Prosper Mercier, vice-président honoraire. Louis Bertrand, trésorier
honoraire. Alexandre Beaufils, chef honoraire.
La liste des récompenses remportées par la Société Philharmonique
depuis sa création est trop longue pour être énumérée ici. Nous cite-
rons les principales seulement :
Alger, 12 mai 1872. Grande médaille d'or.
Bône, 4, 5 juin 1890. Médaille d'argent, grand module; médaille
de vermeil, grand module et 500 francs.
Alger, 17,18 avril 1892. Un premier prix et deux deuxièmes prix,avec félicitations du jury pour le chef, M. Waltre.
Philippeville, 14 avril 1895. Médaille d'or.
Alger, 7, 8 avril 1901. Deux deuxièmes prix et une médaille d'ar-
gent.Bône, 30, 31 mars, 1er avril 1902. Couronne de vermeil, médaille
d'or, 300 fr., et prix de direction au chef, M.Tournou.
La Société musicale Les Enfants de Philippeville a été fondée le
15 décembre 1896.
Bien que jeune, cette Société a déjà rendu de grands services, en
dehors des concerts donnés en public :
Inauguration du monument funéraire du Souvenir Français, fête
des jeunes gens des Classes 1896, etc., fête des Anciens Combattants
de 1870-1871, en un mot cérémonies où elle fut conviée.
Lors du premier concours à laquelle elle assista (Bône,. 30 et 31
mars 1902), elle remporta 2 premiers prix, un deuxième prix et un
prix de direction (M. Striébig).Le Président est M. Albert Teissier et les Vice-Présidents MM.
Paul Albert et Cavicchioni, en fonctions depuis la formation de la
Société. Le chef provisoire est M. Jean Mamo.
Liste des directeurs :
MM. Manens, A. Sotton fils. Dumonchau, Vallin, Striébig.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 197
En 1893, sur l'initiative de M. François de Angelis, il se forme un
premier groupe de mandolines et de guitares., qui prend le nomd'Estudiantina Rusicadienne.
Ses Présidents ont été, de 1893 à 1896, année de sa dissolution,MM. Castola, Jean, Antoine et Nicolas Spadaro ; ses chefs, MM.
François de Angelis et Marius Durand.L'Estudiantina Rusicadienne a obtenu de grands succès dans toutes
les cérémonies où elle a assisté, notamment pendant le servicefunèbre célébré à la mémoire du regretté Président Carnot et, en
1895, au concours de Constantine, où elle remporta deux premiers* etun deuxième prix.
La Société Les Mandolines Renaissance a été constituée par M.Jules Bono, président, et M. Albert Païta, directeur, le 3 décembre
1895.
Elle a remporté de nombreux succès : Concours musical de
Constantine, 7 et 8 juin 1896, premier prix d'honneur, premier prixd'exécution et troisième prix de lecture à vue. Concours d'Alger, 7
et 8 avril 1901, premier prix d'honneur, avec prime de 300 fr. et
félicitations du Jury, et premier prix d'exécution.
Concours de Bône, 30 et 31 mars 1902, premier prix d'honneur
avec prime de 500 fr., une des plus hautes récompenses de ce
concours, premier prix d'exécution et deuxième prix de lecture à vue.
Liste des présidents :
MM. Jules Bono, du 3 novembre 1895 au 15 décembrel899; Jules
Saint-Germès.
Directeurs :
MM. Albert Païta, du 3 décembre 1895 à juin 1899. (M. de Angelisfait l'intérim). Du 1er mars 1900 au 1er juin 1901, M. Vallin. (MM.Onorati et Pons fils font l'intérim). 1er mars 1902, M. Bouët.
Composition actuelle du bureau :
MM. Jules Bono, président d'honneur ; Jules Saint-Germès, pré-
sident; Nicolas Spadaro, vice-président; Zahra, trésorier ; Bernadac,secrétaire. Assesseurs : MM. Joseph Gébinger, Valérino, Calamaro,
Fidanza, Cassola, Roses, Caffiero, Salza, Baracaggio et Attard. Chef:
M. Gueylard.
198 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le 25 février 1890, est fondée, sous le nom de Cercle Musical, uneSociété dont le but est de propager le goût de la musique et d'instruireles jeunes gens doués d'aptitudes musicales. Les membres fondateurssont: MM. Adolphe Chiarelli, Saingery, Goirand,Revire. Le bureau
est ainsi constitué : MM. Adolphe Chiarelli, président; Carrey, vice-
président; Saingery, trésorier; Louis Bertrand, secrétaire; deTour-
donnet, Passerieu, conseillers; Goirand, administrateur.Le Cercle Musical a donné et donne encore des concerts et des
soirées dansantes très recherchés ; il a prêté son concours à de nom-breuses oeuvres charitables ou d'intérêt public.
Son bureau actuel est ainsi composé : MM. Léon Morel, président ;Léon Petit, vice-président; Louis Godard, secrétaire-trésorier ; Em-manuel Revire, Paul Degand, administrateurs ; Ernest Liottard,Adérald Siret, membres. M. Siret est décédé le 21 mars 1903.
L'Amieal-Groupe a été fondé le 15 juin 1901. La Société a pourbut l'étude de la.musique et de l'art dramatique; elle n'est composéeque de jeunes gens. Elle prête son concours aux]oeuvres de charité.
Son Conseil d'administration est le suivant :
MM. Henri Mourre, président. Ernest Bianco, vice-président. H.
Oberlé, trésorier. P. Péroni et E. Bensimon, secrétaires.Blaise Brandi,chef d'orchestre, A. Buscail, régisseur. F. Manzo, commissaire. Ar-
disson, Bénédetti, Baraca, Dupuis, Lacaze, Maurin, Mazella, Schir-
mer, Sancan, membres du comité. .
En 1899, une nouvelle Société, l'Estudiantina la Philippevilloise,se forma.
Cette Société s'est fait entendre dans de nombreuses cérémonies
patriotiques et religieuses, notamment en avril 1900, pour la béné-diction du drapeau des Anciens Combattants 1870-1871, pendant lesfêtes nationales de 1900, 1901 et 1902, etc.
En avril 1901, elle prend part au concours d'Alger, où elle obtientun premier prix d'exécution, un premier prix de quatuor et undeuxième de trio. Concours de Bône, 30 et 31 mars 1902, premierprix de lecture à vue avec félicitations du Jury, premier prix d'exé-
cution, deuxième prix d'honneur avec prime de 300 francs.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 199
Liste des présidents :
MM. Emmanuel Revire, Bourrasset, P. Graux, Dr Augier, Sanviti.
Directeurs :
MM. Dumonchau, François de Angelis.
Bureau actuel :
MM. Paul Graux,président; Castellano et Bertucci, vice-présidents;R. Demeglio, trésorier; M. Onorati, secrétaire; Cervino, Collozzi,
Georges Fenech, Joseph Borg, Hernandez, Littiero, Ricci, Gaston
Cunéo, Quasso, Buono, administrateurs; Jean Chircop, porte-drapeau.
Séance du 29 décembre 1862. Le Conseil vote un crédit de 500 fr.
pour création d'un orphéon sous la direction de M. Salvator Daniel.
1er septembre 1873. Dissolution de la Société Musicale de Philip-
peville, qui semble ne pas avoir subsisté longtemps. Cette dissolu-
tion est annoncée, au nom du comité et pour le président absent, parle vice-président L. Roubière.
En 1876, existait une Musique Municipale, dirigée par M. Picard.
Séance du 7 juillet 1883. Le Conseil vote une somme de 2.500 fr.
pour création d'un orchestre symphonique.
Création, le 10 octobre 1896, de la Russicada, société ayant pourbut l'étude du chant et de l'art dramatique. Président, M. Prot.
XXII
ETABLISSEMENTS DE BIENFAISANCE
L'hôpital civil a été créé en 1844 dans la rue du Sphynx, derrièrele marché aux légumes ; il a été transféré de la rue du Sphynx dansles bâtiments actuels le 14 juillet 1869.
Par arrêté municipal du 1er avril 1848, Mademoiselle MargueriteDussert est nommée infirmière du dispensaire, au traitement annuel
de 360 francs.
Séance du 23 juillet 1849. Le Conseil désigne pour faire partie de
la Commission devant présenter un avant-projet de construction d'un
hospice civil : MM. Privé,Denobelly, conseillers municipaux; Meurs,
architecte; Nielli, pharmacien; de Manas, médecin.
Une Commission administrative de l'hospice est créée le 28 juillet1849. Elle est composée de : MM. Marion, président du tribunal;
Denobelly, négociant; Delay, propriétaire; Bon, juge d'instruction;
Annesley, propriétaire; Pégat, négociant; Teissier, avocat.
Séauce du 20 mai 1853. Sur la demande du Sous-Préfet, le Conseil
municipal étudie la question de création d'un hôpital spécial pourles malades civils, hommes et femmes, mais il recule devant la dé-
pense qui s'élèverait, pour 900 lits à raison de 1.200 fr., à 1.080.000 fr.
En ce qui concerne la cession proposée de l'hôpital militaire à l'admi-
nistration civile, le Conseil pense que les charges qui en résulteraient
pour la commune seraient trop onéreuses.
Par suite de la suppression du dispensaire, le 1er février 1854, les
droits de Mezouar (droits de visite), antérieurement perçus parl'économe du dispensaire, sont encaissés par les soins de la police et
versés tous les mois à la caisse municipale.1er décembre 1869. Deux postes de médecins suppléants sont créés
à l'hôpital civil. Sont désignés MM. Ricoux et Kayser.
L'hospice des vieillards est créé le 17 juillet 1877. Le 13 février
27
202 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
1896, le Conseil municipal proteste contre le projet de transfert à
l'hospice Coll de Bône des vieillards actuellement à l'hôpital-hospicede notre ville.
Liste des médecins traitants :
MM. de Manas 1844.Ricoux 1870.
Kayser —
de Valicourt 1894.
Augier 1892.Zoeller 1898.
Liste des directeurs :
MM. Martin, premier économe 1872.Du Bourguet 1875.Rondot 1877.
d'Orbigny 1879.
Mazué, receveur économe. 1881.
Grucker, directeur 1892.
Champion 1895.
Legros 1899.O'Donovan 1901.
Beynet 1901.
Le personnel actuel est le suivant :
MM. Ricoux, Augier, Zoeller, médecins traitants ; Féraud, médecin
adjoint; Beynet, directeur; Collomb, économe; soeurs: 8; infir-miers : 4 ; moyenne de malades : de 40 à 60 ; vieillards : 105 : nombrede lits de malades : 152.
Commission administrative :
MM. Ricoux, maire, président; Sault, Carrey, Haas, administra-teurs. M. Sault est décédé le 20 mars 1903, universellement regretté.
La commune de Philippeville dépense annuellement pour secoursdivers et entretien des malades ayant acquis chez elle le domicile
légal de secours par un séjour d'un an au moins, une somme moyennede 60.000 fr., soit le 1/8 de son budget. C'est une des charges les
plus écrasantes qu'elle ait à supporter, car elle est hors de proportionavec ses ressources, mais cependant obligatoire.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 203
Le 19 avril 1850 a lieu l'installation de la Commission nommée
par le Préfet à la suite de la création du Bureau de Bienfaisance etqui est ainsi composée :
MM. Vincens de Gourgas, propriétaire; Grenier, juge; Chirac,négociant ; Véron, défenseur ; Claris, syndic des courtiers. M. Chiracest nommé ordonnateur et M. Véron, secrétaire.
Liste des ordonnateurs et secrétaires :
24 janvier 1851. Fourtier, payeur de l'armée, ordonnateur.
Claris, secrétaire.24 novembre 1851. Allaman, receveur principal des Douanes,
ordonnateur.24 avril 1855. Ellul, ordonnateur.
Frédéric Sider, secrétaire.28 avril 1858. Auguste Jauffret, greffier en chef du Tri-
bunal, ordonnateur.7 mars 1868. Frédéric Sider, ordonnateur. Il n'y a plus
de secrétaire non rétribué.25 novembre 1880. Carrey, ordonnateur.30 juin 1882. Lemarchand, ordonnateur.10 octobre 1883. Mayeux-Doual, ordonnateur.
6 juin 1888. Frédéric Chiarelli, ordonnateur.24 juillet 1889. Hre Lalliermonet, ordonnateur.
30 mai 1892. Jules Redon, ordonnateur.4 novembre 1899. Alphonse Cottard, ordonnateur.
22 septembre 1900. Louis Bonnard, ordonnateur.
Le budget primitif de 1857 est en recettes de 4.800 fr.,dont 1.000
fr. de subvention de la ville, et en dépenses de 4.800 francs.
Conformément aux règlements en vigueur, les membres du bureau
de bienfaisance prêtent, le 4 mars 1858, entre les mains du Maire,le serment suivant : « Je jure obéissance à la Constitution et fidélité
à l'Empereur. Je jure, en outre, de me consacrer à l'oeuvre de bien-
faisance et de remplir les fonctions qui me sont confiées avec exacti-
tude, probité et dévouement ».
Le 15 novembre 1865, le 3e Zouaves ayant reçu des sociétés fores-
tières de l'arrondissement une somme offerte aux militaires de ce
corps, en récompense des services rendus pendant les incendies, le
régiment dispose de cette offrande en faveur des pauvres et affecte
une somme de 300 fr. au bureau de bienfaisance.
204 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Séance du 9 septembre 1880. M. Frédéric Sider cessant ses fonc-tions d'administrateur, le Président fait son éloge et rappelle qu'ilest administrateur depuis le 15 février 1855, c'est-à-dire depuis plusde 25 ans et ordonnateur du 7 mars 1868, soit depuis 12 ans. Ses
collègues expriment le regret de voir M. Sider quitter des fonctions
qu'il a remplies avec tant de tact et de dévouement.
Statistique des indigents secourus en janvier 1903 :
Français ... 54 familles 218 personnes.Espagnols 15 — 53 —
Maltais ......... 18 — 79 —
Italiens 33 — 154 —
Indigènes 10 — 28 —
TOTAUX 130 familles 532 personnes.
Dans sa séance du 24 janvier 1893, le bureau de bienfaisance créeun refuge de nuit, qui rend encore de grands services. Le Conseild'administration était alors composé de MM. Redon, ordonnateur ;Alexandre Aquadro, Bourdages, Cottard, Adrien Haas, administra-teurs.
Séance du 13 septembre 1894. Il est donné lecture d'un rapport de
M. l'Inspecteur général des établissements de bienfaisance, dontnous extrayons ceci : « La Commission administrative, constituéedans la forme réglementaire, comprend : MM. le Maire, président.Redon, ordonnateur. Laurent Merle et Alphonse Bonnot, délégués du
Conseil. Jean-Baptiste Martin, Cottard et Bourdages, désignés par lePréfet. Le bureau fonctionne d'une façon remarquable et le Conseild'administration apporte le zèle, l'activité et surtout la ponctualité-dans l'exercice de ses attributions ».
Séance du 18 octobre 1894. M. Louis Bertrand, secrétaire-adjointet secrétaire depuis 20 ans, cessant ses fonctions par suite de sa no-mination à la recette municipale, reçoit le titre de secrétaire-hono-raire du bureau de bienfaisance.
Séance du 4 novembre 1899. M. Redon ayant résilié ses fonctions,le Conseil d'administration, eu égard aux excellents services qu'il a,rendus pendant 11 années, dont près de 8 comme ordonnateur,nomme M. Redon, administrateur-ordonnateur honoraire.
Dans sa séance du 2 décembre 1901, le Conseil d'administration»
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 205
vote des remercîments à M. Cottard, qui rend depuis 13 ans les plusgrands services à l'oeuvre charitable du bureau de bienfaisance. M.Cottard est toujours administrateur.
Budgets primitif et supplémentaire de 1902 :
Recettes 14.378 37
Dépenses 14.342 00
Indigents secourus en 1902 :
Français 45 familles. 154 personnes.Espagnols 6 — 24 —
Maltais 6 — 30 —
Italiens 12 — 48 —
Indigènes 10 — 44 —
TOTAUX 79 familles. 300 personnes.
Statistique globale des 3 années 1899, 1900 et 1901 :
Nombre de personnes secourues à titre permanent : 728.— —
temporaire : 112.Valeur de ces secours : 38.565 fr. 84.
Un grand nombre d'ouvriers et d'indigents de passage sont secourus
en bons de pain et en soupes à prendre au fourneau économique.
Composition actuelle du Conseil d'administration :
MM. Dr Ricoux, maire, président; Bonnard,ordonnateur; Bonnot,
Bresson, Bourrasset, Cottard et Legros, administrateurs.
Le service médical des indigents et du bureau de bienfaisance est
assuré par M. le Dr René Ricoux fils.
Une délibération du Conseil municipal du 17 août 1848 crée une
crèche à Philippeville. Une autre, du 8 février 1861, porte création
d'un fourneau économique. Le 11 septembre de la même année, le
Conseil émet le voeu que deux petites soeurs garde-malades soient
envoyées en résidence ici.
Séance du 30 juin 1858. Sur la demande de M. Grémilly, adjointde Stora, le Conseil, reconnaissant que M. Massoni, médecin, montre
vis-à-vis de la population de Stora, un empressement désintéressé
dont il lui doit être tenu compte, demande à l'autorité supérieure de
206 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
l'adjoindre à M. le Dr Mellet, médecin de colonisation, et de luiallouer une indemnité annuelle de 600 fr. pour entretien de soncheval.
Parmi les médecins qui ont rendu de nombreux et très utiles ser-vices à la population, il en est un dont le nom trouve naturellementsa place dans cette histoire; c'est le père Massoni, comme tous l'ap-pelaient familièrement mais respectueusement. Médecin des facultés
d'Ajaccio et de Montpellier, installé dans notre ville depuis 1852, ilne cessa d'apporter dans l'exercice de ses fonctions une abnégationet un dévouement vraiment admirables.
Il exerçait la médecine avec la conscience d'un honnête hommeet le désintéressement que donne le sentiment du devoir. Les nom-breuses épidémies de choléra, de typhus, de dyphtérie qu'il eut à
traverser et dans lesquelles il se prodigua toujours, sans ménagement,ont bien montré qu'il appartenait à ces vieilles générations qui sa-vaient réunir au même degré la vigueur du corps et la force des
qualités morales. Il n'a répandu autour de lui que le bien.Trois fois les Conseils municipaux de Philippeville et de Stora,
réunis dans une même pensée, sollicitèrent pour lui, les 14 novembre
1890, 20 août 1892 et 23 mai 1899, la croix de la Légion d'honneur,
que demandaient aussi, en faveur de ce brave, la presse locale ettoute la population. Ces démarches n'aboutirent pas, mais tout Phi-
lippeville et tout Stora assistaient à ses obsèques. M. François-XavierMassoni s'est éteint doucement le 22 septembre 1902, à l'âge de 89ans.
11 mars 1868. Essai de création, sous le patronage de la munici-
palité, d'une société ayant pour but l'extinction de la mendicité.Le 25 avril 1886, est créée une Société Protectrice des Animaux,
dont le président élu est M. Rivière, instituteur en retraite. Le tré-sorier est M. Dry, chef de bureau de l'état-civil à la mairie. M. Pel-
letier, vétérinaire, et M. Beltçaguy, sous-ingénieur, ont prêté un très
précieux concours à cette société bienfaisante, qui n'existe plus.
Dans sa séance du 26 juin 1899, le Conseil municipal décide l'ac-
quisition de l'immeuble Battréau, rue Hippocrate, avec les fonds dela donation de Lambert, en vue de l'installation de la Crèche et duFourneau économique, moyennant le prix de 20.000 fr.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 207
L'oeuvre de la Crèche et du Fourneau économique sont réuniesdans le même bâtiment. Le fonctionnement de ces oeuvres a étéassurée jusqu'à la lin d'août 1900 par un personnel laïque composéd'une directrice, d'une cuisinière et de deux bonnes, dont les appoin-tements mensuels étaient, entre toutes, de 160 fr. Depuis le 1"
septembre 1900, le service a été confié à des religieuses, au nombre
de deux, aidées par une bonne. Traitement mensuel, entre toutes,120 francs.
Malgré l'économie réalisée sur le personnel et d'autres branches
du service et s'élevant à 600 fr. par an, malgré les subventions du
Conseil général et la charité publique, ces oeuvres, dont le fonction-
nement remonte au mois d'avril 1892, voient leurs ressources dimi-
nuer sensiblement. Aussi, pour pouvoir équilibrer le budget, on a
suspendu, depuis 1898, les distributions de soupe et de viande pen-dant les mois de juin, juillet, août et septembre, ainsi que cela se
fait d'ailleurs à Constantine et à Bône.
C'est grâce à ces mesures qu'il a pu être délivré plus de 10.000
rations en 1901 et de 13.000 en 1902, tout en conservant une réserve
de 1.484 fr. 69.
Un peu de statistique :
Recettes générales 1893 7.974 55— 1898 5.247 29— 1902 4.598 11
Dépenses générales 1893 7.762 10— 1898 5.463 90— 1902 4.020 60
Réserves en espèces 1893 4.247 30— 1898 897 01— 1902 1.484 69
CRÈCHE
La Crèche contient 7 berceaux. Il y a, de plus, 14 places sur les
lits de camp. Nombre d'enfants admis : 20. Rétribution maternelle par
jour et par enfant : 0 fr. 10.
Nombre de journées, 1893 2.464— 1898 4.449— 1902 3.670
208 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Moyenne par jour, 1893. : 8— 1898 14— 1902 12
FOURNEAU ÉCONOMIQUE
Nombre de rations de soupe et de viande, 1893... 22.009— — 1898... 6.709— — 1902... 12.875
Conseil d'administration de l'oeuvre de la Crèche
et du Fourneau économique :
Mn,es Charles Blanchet, présidente. Raymond Mercier, vice-pré-sidente. Paul Pinchon, trésorière. Paul Rengade, secrétaire. Veuve
Abadie, Eugène Bertin, Joseph Chatillon, Auguste Daujon, Roze-
Joannis, Louis Saingery, A. Théry, Edouard Abadie, membres dubureau.
La Société des Dames de Charité existait déjà en 1847. Nous voyons,en effet, que le 15 juin 1847, S. M. la Reine des Français fit don de
200 fr. à cette société, qui cessa de fonctionner en 1870 et ne fut
reconstituée qu'en 1891 par Madame Rouden de Manas l'autorisation
fut donnée le 19 août par le Préfet.
Son but est de secourir tous les pauvres sans distinction de races
ou de religions ; 117 familles sont inscrites en 1902.
Elle est présidée par Mademoiselle J. Rouden de Manas, assistée
d'un comité de dames conseillères et visiteuses.
XXIII
SOCIETES DE SECOURS MUTUELS
Séance du 10 novembre 1857. Le Conseil, à l'unanimité, décide
la création d'une société de secours mutuels et de prévoyance et la
frappe d'une médaille commémorative pour tous les membres fon-
dateurs. Cette société, La Prévoyante, commence à fonctionner le1er juillet 1858. Les médecins, au choix des frères malades,'sont :
MM. Basset, de Manas, Loviconi et Massoni, au titre civil, et M.
Bonneau comme médecin militaire. Les trois pharmaciens de la loca-
lité peuvent être choisis indistinctement pour la livraison des médi-
caments.
Le bureau, élu le 9 décembre 1857, est ainsi constitué :
Président : le Maire. Vice-présidents : MM. de Marqué père et
Biord. Trésorier : M. Allaman. Secrétaire : M. Fanchon. Adminis-
trateurs honoraires : MM. Barthélémy Peisson, Mourre, de Nobelly,
Cullerre, de Boisson. Administrateurs titulaires: MM. Béziade, Julien,
Durieu, Cavicchioni, Jauffret.
M. de Gourgas fut élu plus tard président.Il existe, au 6 octobre 1877, une société de secours mutuels qui
porte le nom de l'Alliance. Elle ne paraît pas avoir eu une longuedurée.
La première société de secours mutuels prend le titre de Société
de Secours Mutuels et de Prévoyance. Elle est plus connue sous le
nom de La Prévoyante. Fondée le 13 décembre 1857 et approuvée
par arrêté du Gouverneur général en date du 13 mars 1858, elle
fonctionne dès le 1er juillet suivant. Sa devise est : « Le bien de
chacun par le secours de tous ».
Elle a pour but de fournir gratuitement les secours du médecin et
les médicaments aux sociétaires malades, de leur payer une indem-
28
210 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
nité pendant le temps de leur maladie et de pourvoir à leurs frais
funéraires.
La Prévoyante est composée de 12 membres honoraires et de 178
participants, dont 55 femmes et 50 enfants.
Elle n'a pas encore de caisse de retraite.
Voici la composition de son bureau :
MM. Alfred Thiriet,président. Joseph Forest,vice-président. VictorPortet, secrétaire. Lazare Pénalva, trésorier. Léon Auméran, Domi-
nique Fieschi, Joseph Bougia, Marius Dupuy, Pierre Garrigues,
Dominique Paoli, François Susini, Auguste Digoudé, François Ge-
noux jeune, Jacques Pasqualini, administrateurs.
La société de secours mutuels La Fraternelle a été créée le 11 juil-let 1871 par la 6e compagnie de la Milice, capitaine Jacques Roux.Elle fut autorisée le 12 septembre suivant.
Dans sa réunion du 19 novembre 1871, le bureau définitif est ainsi
composé :
MM. Jacques Roux, président ; Tousseau, vice-président; Jourdan,
secrétaire; Praget, trésorier; Delanoé, Roger, Forest, Lhuillier, De-
bono, Morinot, administrateurs.
Il fallait, à cette époque, être apte à faire le service de la Milice
pour être admis dans la Société. Les enfants n'y furent reçus qu'àpartir du 5 août 1872.
Le 17 septembre 1881, une caisse de pensions de retraite est cons-
tituée; elle est autorisée le 15 octobre suivant. Le Conseil d'admi-nistration qui créa cette institution si utile était alors le suivant :
MM. Robert Calendini, président; Jules Degand, vice-président;Paul Rossi, secrétaire; Alphonse Grandadam, trésorier; AugusteAuméran, Gervais Rebière, Auguste Leborne, Louis Castellotti,Edouard Pons, Edmond Rossi, Eugène Clayette, Claude Blanchet,
Bayeux, administrateurs.
L'âge des ayants droit à la retraite, d'abord fixé à 65 ans, a étéréduit à 55 ans par arrêté ministériel du 3 août 1901.
La caisse des retraites a servi des pensions à huit sociétaires, dontdeux sont décédés en 1900 et six en jouissent actuellement.
La Fraternelle se compose de 136 membres. Les sociétaires choi-sissent leur médecin et leur pharmacien. Son capital est de 27.054 fr.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 211
Liste des présidents :
MM. Jacques Roux 1871Dr Alfred Kayser 1874Robert Calendini 1879Gervais Rebière 1887Jules Degand 24 mai 1890
réélu le 21 septem. 1895 et le 12 novem. 1900
Conseil d'administration actuel :
MM. Jules Degand, président; Augustin Auméran, vice-président ;Jules Feste, secrétaire; Louis Hubinger, trésorier; Joseph Bonnet,secrétaire-trésorier adjoint; Jean Chaffrais, Jean-Baptiste Laugier,Barthalot, Sulzlée., Edouard Pons, Jules Vidal, administrateurs.
La société de secours mutuels L'Union a été fondée à Philippeville,le 5 juillet 1869 et approuvée le 9 avril 1870.
MM. Rinaldi, docteur, et Exiga, maître maçon, deux mutualistesdont le souvenir restera, en furent les promoteurs et les créateurs.Le but de l'association, proposé et atteint jusqu'à ce jour, est d'assurer
à ses adhérents la gratuité médicale et pharmaceutique, l'attribution
de secours, en cas de nécessité, notamment aux veuves et aux or-
phelins, et la prise en charge des frais de funérailles des sociétaires.
Elle se propose aussi de créer des retraites aux invalides du travail,mais le projet ne pourra prendre corps que lorsque ses ressources,malheureusement trop restreintes à l'heure actuelle, permettront à
cette espérance de devenir une réalité.
Etrangère aux questions d'ordre politique ou religieux, la société
L'Union est ouverte à toutes les bonnes volontés et à toutes les
personnes qui, par leur conduite et leur honorabilité, sont reconnues
dignes d'appartenir à l'assistance mutuelle.
Elle comprend des membres honoraires et des membres partici-
pants ; ceux-là n'ont aucun avantage, ne sont astreints à aucune
fonction, mais concourent à la prospérité de l'association par leurs
cotisations ainsi que par leurs conseils. Ceux-ci, appelés à profiter de
bienfaits matériels et directs, doivent se conformer strictement aux
règlements et statuts.
L'association, cependant, ne comporte pas que des avantages
pratiques, elle ne rend pas que des services matériels ; elle en rend
212 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
d'autres de l'ordre moral le plus élevé. Elle apprend aux hommes à
se connaître, à s'entr'aider et forme ainsi une véritable école de
fraternité humaine, dont la devise est : « Aidons-nous les uns les
autres ».
La société L'Union est dirigée par un Conseil d'administration
composé de :
1° Un président ; 2° deux vice-présidents ; 3° un secrétaire ; 4°
un trésorier ; 5° six adminstrateurs, nommés par les sociétaires, à la
majorité et en assemblée générale.Voici les noms de nos concitoyens qui se sont succédé à la
présidence depuis sa fondation :
MM. Dr Rinaldi; Mourre, entrepreneur ; Greffier, négociant; Sault,
négociant; Lalliermonet, commissaire-priseur ; Piétri, menuisier;
Castellotti, employé de commerce ; Albertini, propriétaire.Le Conseil d'administration actuel est ainsi composé :
MM. Albert Albertini, président; Jules Mariani, François Costa,
vice-présidents ; Louis Castellano, trésorier; Eugène Meichler, secré-
taire ; Nicolas Polliard, Félix Ricci, Jean Costes, Maurice Vives,
François Peybernard, conseillers.
Lors de l'ouverture de la ligne du chemin de fer de Philippevilleà Constantine, le 23 août 1870, il fut convenu entre tous les agentsde cette ligne que, chaque fois que le décès d'un camarade se produi-rait, une liste de souscription serait mise en circulation dans le but
d'honorer sa mémoire. Pendant quelques années les souscriptions
produisirent suffisamment, mais les décès devenant plus nombreux,on se fatigua de verser; d'un autre côté, certaines souscriptions pro-duisaient de 3 à 400 fr. et d'autres à peine 40 fr., ce qui était une
anomalie car, étant tous employés de la même administration, tous
devaient être égaux dans des circonstances pénibles. Cette inégalitése maintint jusqu'en 1886. A cette époque se produisit le décès d'un
camarade laissant une veuve et cinq enfants en bas-âge ; la sous-
cription ne produisit qu'environ 30 fr. Il fut dès lors reconnu que le
but voulu n'était pas atteint, car les sommes recueillies étaient gé-néralement employées à l'achat de couronnes ou à l'édification de
monuments funéraires. Quant à la famille du défunt, on ne s'occupait
guère si elle aurait du pain à manger le lendemain.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 213
Cette situation ne pouvait se prolonger. M. Bonnard, agent des
trains, forma le projet de créer une société de prévoyance, à cotisa-tions de 0 fr. 25 par mois, et présenta, le 15 mai 1888, un projet destatuts qui fut approuvé par le Préfet le 18 novembre suivant. La
Société, créée clans notre ville, prit le nom de Union des employésP.-L.-M. du département de Constantine. Le but était et est encore
de perpétuer la mémoire des membres de la Société décédés et de
venir immédiatement en aide à sa famille. Le droit d'entrée fut fixé
à 2 fr. et la cotisation trimestrielle à 1 franc.De nouveaux statuts furent établis en 1893, complétant ceux de
1888.
. Le premier Conseil d'administration, celui de 1888, était ainsi
composé :
MM. Mercier, président; Bonnard, vice-président, fondateur de la
Société et qui, par modestie, refusa la présidence; Polliard et Lam-
bert, trésoriers ; Buscaliony, secrétaire. Bérard, Piétri, Dupuy, admi-
nistrateurs.
Le Conseil actuel est le suivant, pour la section de Philippeville :
MM. Demolins, président d'honneur; Chandessais et Bourrasset,
vice-présidents d'honneur ; Charvet, président; Ilker ; vice-président;Bonnard etMourre, trésoriers ; Arboré etQuinet, secrétaires; Dupuy,Corset, Delanoé., administrateurs.
Statistique :
En 1888 152 sociétaires.
1895 270 —
1900 283 —
1902 310 —
En 1889 ... 554 24 accordés en secours funéraires et autres.
1895... 736 90 — — —
1900... 551 95 — — —
1902... 1.197 70 — — —
En 1888 458 •60 en caisse.
1895 6.237 38 —
1900 11 062 72 —
1902. 11.497 33 -
En dehors de leur société de secours mutuels, les employés de la
214 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Compagnie P.-L.-M, ont créé une Société Coopérative de consom-
mation, dont le siège social est au faubourg d'El-Kantara, à Constan-
tine. Cette société, formée entre les employés, agents et ouvriers des
chemins de fer, à capital variable, a pour but de fournir à ses mem-
bres toutes les denrées alimentaires et tous les autres objets de
consommation ou d'usage domestique dans les meilleures conditions
de qualité et de prix, en s'approvisionnant en gros, autant que pos-sible aux sources de production. L'acte notarié est du 24 août 1900;citons parmi les administrateurs, signataires de cet acte, M. Alexis
Durand, employé à l'inspection principale de Philippeville, membre
fondateur.
La Société de Secours Mutuels des Sapeurs-Pompiers a pour but
de leur venir en aide en cas de maladie, d'accident ou de privationde toute nature et de leur constituer une caisse de retraites pour la
vieillesse. La cotisation est de 1 fr. par mois. Ses statuts ont été
approuvés le 25 février 1885.
Conseil d'administration actuel :
MM. Beltçaguy, président; Rabaute et Roche, vice-présidents.
Un Congrès-Concours a lieu dans notre ville les 15, 16, 17, 18,19 et 20 novembre 1890, en vue d'établir sur quelles bases doivent
reposer les sociétés de secours mutuels, pour répondre aux obliga-tions qu'elles contractent envers leurs membres ; d'élargir la sphèred'action de nos associations en étudiant dans quelle mesure le système
coopératif peut contribuer à augmenter le bien-être du mutualiste;enfin d'indiquer par quels moyens on peut arriver à garantir de la
misère les derniers jours des vieux adhérents.
156 sociétés de France et d'Algérie adhèrent au Concours et s'yfont représenter. Le Congrès reconnaît que les principaux buts à
poursuivre par les associations fraternelles sont : soins médicaux et
pharmaceutiques ; indemnité de maladie ; secours aux veuves et aux
orphelins des sociétaires décédés; pension de retraite aux vieux
adhérents. Il émet entre autres les voeux suivants : Droit pour les
associations de se grouper par ville et même par région, dans l'uniquebut de se porter un utile concours dans toutes les questions qui inté-
resseront l'assistance mutuelle. Reconnaissance aux sociétés de se-
HISTOIRE DE PIIILIPPEVILLE 215
cours mutuels de la vie civile sans aucune restriction. Règlement à
l'arbitrage des petites querelles intestines, en réservant aux tribu-naux ordinaires le seul cas de malversation.
Présidents d'honneur : MM. Georges Bonjean, sénateur; HippolyteMaze, sénateur; Mengarduque, préfet; Gautier, sous-préfet; Vellard,maire; Blanchet, président de la Chambre de Commerce.
Président: M. Monbrun, vice-président du Conseil général d'Oran.
Vice-présidents : MM. Henri Vermont, avocat à la cour d'appel de
Rouen; Dr Gyoux, de Bordeaux; Emile Bérard, notaire à Blidah.
Secrétaire général : M. Louis Castellotti.
Secrétaires: MM. Bertrand, secrétaire de la mairie; Mercier, avocat
à Constantine; Gontard, de Marseille.
Censeurs : MM. Beltçaguy, sous-ingénieur; Lalliermonet.
Rapporteur général : M. Priou, interprète judiciaire à Mostaga-nem.
LA MUTUALITE
Chercher à bien faire et faire le bien ;Aimer son prochain ; sauver son semblable ;Savoir du malheur être le soutien ;
Tel est, cher ami, ton but admirable
Et ta devise est : Mutualité !
Laissons de côté le banal hommage ;La vertu n'est rien sans l'humilité.
O toi, Charité, douce, pure et sage,Tu ne peux avoir d'égale en bonté !
Timide, ta main console et soulage,
Ignorant toujours ce qu'elle a donné.
L. B.
2 février 1888..
XXIV
LOGEFRANC-MAÇONNIQUE
Comme dans un grand nombre de localités de France et d'Algérie,notre ville possède une Loge maçonnique française.
Le but principal de la Franc-Maçonnerie est, d'après une décla-ration du Grand Orient de France, de vulgariser l'oeuvre philantro-pique, philosophique et progressive, qu'elle a entreprise.
Elle ne reconnaît pas d'autres vérités que celles fondées sur la raisonet la science et c'est avec les seuls résultats obtenus par cette der-nière qu'elle combat les superstitions et les préjugés sur lesquels les
Églises fondent leur autorité.
Sa loi primordiale est la tolérance. Elle a sollennellement inscrit,en tête de sa Constitution générale, le respect de toutes les croyances,de toutes les idées et de toutes les opinions.
Le zèle de ses membres est d'autant plus actif que les progrès déjàréalisés actuellement assurent le triomphe, dans l'avenir, de l'admi-rable trilogie où se résument ses efforts séculaires et qui est la seuleformule sacrée de ses réunions :
Liberté! Egalité! Fraternité!
La Loge Les Enfants de Mars fut créée au rite français à Sétif,le 2 mai 1842, par des officiers de l'armée d'Afrique, d'où son nom
rappelant le caractère combatif et glorieux de ses fondateurs.
Dans ses séances des 6, 7 et 8 mai 1844, le Grand Orient de France
autorisa le transfert de cette Loge à Philippeville, où elle continua
ses travaux jusqu'en 1891, époque à laquelle elle dut se mettre en
sommeil (9 janvier 1891). Elle se réveilla le 25 juin 1900 et ouvrit
ses travaux dans un local situé rue Hippocrate, n° 21. Mais le nombre
des adeptes augmenta depuis dans de telles proportions qu'elle dut
218 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
faire aménager un nouveau local plus spacieux. Elle est aujourd'hui,
depuis le 29 novembre 1902, dans la maison Brun, rue Jugurtha.En 1843, s'était déjà fondée dans notre ville une Loge qui portait
le nom de : Les Régénateurs de Russicada et qui fusionna l'année
suivante avec Les Enfants de Mars.
Avis inséré dans le journal Le Saf-Saf, du 13 novembre 1849 :
Un comité de secours pendant le choléra est établi dans le local de la Loge franc-
maçonnique, rue du 3e Chasseurs d'Afrique, près de la Poste. Un appel a été faitaux jeunes gens de la ville pour les engager à se joindre aux Francs-Maçons.
Avec le concours de M. le Dr de Manas, des mesures sont prises pour que les-
premiers médicaments y soient trouvés et portés à domicile, en attendant la pré-sence du médecin, par des membres de la Société et des jeunes gens étrangers àl'institution et qui viendront en aide aux familles et aux malades partout où ilsseront appelés.
Les membres de la Chambre de Commerce ont souscrit personnellement 330 fr.
pour les victimes du choléra.
22 juin 1850. Le pasteur de l'église protestante de Philippeville
part en tournée à Bône. L'autorité municipale n'ayant pu mettre une-
salle convenable à sa disposition, la Loge maçonnique de Bône, fidèle
à ses principes de tolérance, offre le local destiné à ses réunions.
Le dimanche, 29 juillet 1860, à quatre heures du soir, la Loge
maçonnique célèbre, dans le local de l'ancien Café Lamartine, une
cérémonie publique ayant pour objet l'adoption de quelques enfanta
de frères affiliés à cette Loge. Un grand nombre de personnes de
toutes distinctions assistent à cette fête et témoignent par leur pré-sence de leur sympathie à une institution éminemment morale et
philanthropique.16 janvier 1867. La Loge maçonnique Les Enfants de Mars décide
que trois prix, consistant en trois livrets de caisse d'épargne de 25fr. chaque, seront mis par elle à la disposition du Maire pour êtredécernés à ceux des élèves des cours d'adultes dignes de ces récom-
penses.Le 28 mai 1870, la Loge prend l'initiation de faire signer par
l'arrondissement de Philippeville une adresse à Jules Simon pourl'abolition de la peine de mort. Les listes sont couvertes de suite denombreuses signatures.
La Loge actuelle, conformément à ses principes et aux exemples-donnés par les précédents Conseils d'administration, accorde tous lesans des prix aux élèves des écoles laïques et vote des fonds pouracheter des jouets et des vêtements, qui sont distribués aux enfants.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 219
pauvres la veille de la fête de Noël. Elle possède une caisse de bien-
faisance, dite hospitalière, alimentée par des dons de ses membreset qui sert à secourir toutes les infortunes qui lui sont signalées, sansdistinction de culte et de nationalité. Elle a organisé, dans son nou-veau local, des soirées et des conférences très suivies.
Liste des Vénérables :
1843 MM. Dolini.
1844 Ricoux, courtier maritime.
1845 Dolini.
1846-1849 Ricoux.
1849 Gillet.
1850-1856 Ricoux.
1856-1860 Maulion.
1860 Menestrier.
1861-1864 Deloupy.1864-1868 Faure, négociant,1868-1871 Dr Kayser.1871-1883 Lhote, architecte.
1883 Llado, négociant.1883-1891 Pierson, Pierre Schneider et Beltçaguy.25 juin 1900 Jean Beaumont.
XXV
AGRICULTURE, VITICULTURE
Trois propriétaires, MM. Cauvin, Delay et de Gourgas, qui avaient
envoyé des produits de leurs jardins à l'Exposition d'Alger, au moisde septembre 1848, reçoivent une médaille de bronze le 17 février1849.
La Société Agricole, dont les réunions ont lieu dans le local de laChambre de Commerce, renouvelle son bureau le 1er juillet 1849.Sont nommés :
MM. de Mareuil, chevalier de la Légion d'honneur, colon de lavallée du Saf-Saf, président; d'Ambly, maire, colon de la vallée du
Zéramna, vice-président; E.-V. Fenech, secrétaire de la Chambre de
Commerce., colon de la vallée du Saf-Saf, secrétaire-trésorier ; de
Gourgas, chevalier de la Légion d'honneur, colon de la vallée duZéramna ; Delay, chevalier de la Légion d'honneur, colon de la vallée
du Zéramna; Desrumeaux, représentant de M. F. Barrot, colon de
la plaine du Saf-Saf; Sierzputowski, colon de la vallée du Zéramna;
Grenier, juge au tribunal et colon, membres.
Par arrêté du 23 novembre 1849, un concours pour les produits et
travaux agricoles de l'arrondissement du cercle de Philippeville a
lieu le 23 décembre dans le local de l'institution Béchu (théâtreromain, collège actuel).
Le journal Le Saf-Saf, du 3 août 1850, s'exprime ainsi :
Les produits de notre région surpassent en quantité, saveur et grosseur, tout ce
qu'on pouvait espérer. Rien n'est aussi beau que les raisins et les pêches de M.
Lavoute, les pois et les prunes de reine-claude de M. Cauvin, mais ces fruits sont
encore chers. Il n'en est pas de même des pastèques et des melons : M. Salvator
Grima, l'un de nos plus riches colons, en a fait une telle récolte qu'il vient d'en
expédier un navire à Alger ; un autre partira dans quelques jours pour la provinced'Oran. Les pastèques se vendent ici de 10 à 15 centimes ; les melons Cantaloups,
222 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
semblables à ceux que l'on vend à Paris 3 et 4 fr. pièce, coûtent ici de 15 à 30
centimes. Les pommes de terre, qui manquaient l'année dernière et coûtaient 30
centimes le kilo, valent 10 centimes cette année ; encore sont-elles meilleures et se
conservent-elles mieux. La récolte en est si abondante que M. Grima en exportecomme pour les autres produits.
M. Borde, entrepreneur, essaye, en 1850, la fabrication de l'huile
d'olives et obtient d'excellents résultats.
Séance du 30 juillet 1851. Le Conseil municipal vote un crédit de
200 fr. pour prime à l'agriculture (médaille d'or). Cette médaille,destinée au cultivateur le plus intelligent et le plus sérieux de l'ar-
rondissement, est accordée par le Conseil, à l'unanimité, le 5 octobre
1851, à M. François Grima. MM. de Gourgas et Poupard obtiennent
une mention honorable.
Un concours agricole a lieu à Constantine, le 19 octobre 1851, sous
la présidence de M. de. Soubeyran, préfet. Nos concitoyens obtien-
nent un grand nombre de récompenses.Séance du 15 septembre 1852. Le Conseil vote un crédit de 300 fr.
pour contribuer à la fête du Concours agricole et de l'Exposition
générale des produits de la province, qui a lieu en 1852 à Philip-
peville.Liste des récompenses du Concours agricole universel de Paris en
1856 :
MM. Grima, médaille d'argent, maïs.
Nielli, médaille de bronze, essences de géranium et absinthe
petit grain.
Le journal L'Africain, du 28 octobre 1857, espère que les travaux
agricoles de M. François Grima, qui ont valu à ce dernier 27 mé-
dailles et plusieurs mentions honorables, seront récompensés d'une
façon plus éclatante par le Gouvernement.
31 octobre 1860. Un botaniste de notre ville, M. Fleury Brajon,découvre un tubercule pouvant rivaliser avantageusement avec la
pomme de terre. Il est du genre bunion, famille des ombellifères ; les
arabes l'appellent Talrouda. Nos soldats en ont souvent mangé en
Algérie. En 1836 et 1837, la garnison de Tlemcen, manquant de
vivres, trouva dans ce tubercule une grande ressource. Les soldats
allaient l'arracher avec leur baïonnette et augmentaient ainsi leur
nourriture journalière, qui consistait en un quart de ration d'orge.La nouvelle espèce, qu'étudie M. Brajon, a de 10 à 12 tubercules,
enveloppés d'une légère écorce jaunâtre, comme la pomme de terre.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILE 223
26 octobre 1865, décès de M. François Portelli, l'un des premierscolons de Philippeville, où il était venu en 1838. Membre de l'Aca-démie nationale agricole, manufacturière et commerciale, fondée àParis le 26 décembre 1830 et présidée par le duc de Montmorency,il avait obtenu 24 médailles d'or, d'argent et de bronze dans diverses
expositions de France pour ses cotons, tabacs et primeurs., récoltésdans sa belle propriété de Kermarqué.
Séance du 10 juillet 1870. Le Conseil, considérant que parmi tousles moyens qui peuvent rendre prospère la colonisation du pays,l'agriculture doit être placée au premier rang; qu'il est urgent d'ini-tier aux principes d'économie agricole nos colons qui, faute d'être
éclairés, sont restés, en général, sous l'empire des vieilles routines;Emet le voeu qu'il soit créé au plus tôt une école d'agriculture dansla province de Constantine.
Un Concours agricole a lieu à Philippeville, le 16 septembre 1876,sous la présidence de M. Georges Lesueur.
Séance du 14 avril 1898. Le Conseil émet le voeu que le départe-ment crée à Philippeville une école d'agriculture, de viticulture et
de culture maraîchère. Le Maire rend compte, le 30 décembre 1899,
que le Ministre de l'Agriculture a approuvé la proposition du Conseil
général en vue de l'acquisition des propriétés Veuve Jamot et Piol-
lenc pour le fonctionnement de l'école d'agriculture, de viticulture et
de culture maraîchère.
Un arrêté du Gouverneur général, du 5 avril 1900, crée une Ecole
pratique d'agriculture et de viticulture à Philippeville. Elle est établie
dans un domaine de 166 hectares, acquis à cet effet par le départe-ment. Ce domaine est situé à quatre kilomètres de la ville, sur le
bord de la route nationale de Philippeville à Constantine, en partiedans la plaine de la riche vallée du Zéramna et aussi en coteaux et
montagne. Sa situation géographique et orographique, la diversité .
de composition minéralogique de ses terres, ainsi que les différentes
expositions de ses coteaux, le rendent apte à toutes les cultures de
l'extrême littoral et du Tell : cultures maraîchères et fruitières, irri-
guées ou non, de primeurs ou de saison; culture de céréales et de
plantes industrielles; culture de la vigne; prairies et pâturages pour
opérations d'engraissement et de laiterie ; forêts de chênes-liège.Toutes ces cultures y sont représentées. La culture de la vigne amé-
224 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
ricaine et celle des arbres fruitiers y sont l'objet d'expériences etd'études spéciales.
La ville de Philippeville a annexé à l'école un lot de 114 hectarescommunaux forestiers et un lot de 8 hect. 75 de terrains de culture.-L'ensemble forme donc un champ d'études éminemment propicepour un enseignement agricole. Les logements du directeur et desélèves sont installés, à flanc de coteau, dans un local bien aéré par labrise de mer et fort convenablement aménagé.
L'école a pour but : 1° de former des agriculteurs praticiens éclai-
rés, sachant appliquer avec discernement les bonnes méthodes cultu-rales ; 2° de préparer un certain nombre de candidats aux écoles
supérieures d'agriculture.
L'enseignement y est à la fois théorique et pratique ; il y estdonné par quatre professeurs, trois conférenciers, deux chefs de pra-tique agricole et horticole et un instructeur militaire.
L'enseignement théorique porte sur les matières suivantes : agri-culture, physique et chimie, sciences naturelles et horticulture, fran-
çais, mathématiques appliquées, zootechnie, hygiène, arabe.
Les élèves partagent leur temps entre la théorie (études, cours etleur application) et la pratique. Ils sont divisés en deux sections quise succèdent l'une à l'autre ; ils participent à tous les travaux si variésde l'exploitation et font, en outre, des visites dans les propriétésagricoles et industrielles de la région, ainsi que dans les marchésvoisins. La durée des études est de trois années.
L'école reçoit des internes, des demi-pensionnaires, des externeset des auditeurs libres. Le prix de la pension est de 400 fr. ; celui dela demi-pension de 250 fr. et celui de l'externat de 50 fr.; les audi-teurs libres paient 600 fr. par an. Des bourses et des demi-boursessont accordées par le Gouvernement général, le département et laville.
A la fin des études, les élèves reçoivent, après examen, un certificatd'instruction de l'école pratique.
Le personnel est le suivant :
Directeur : M. Félix Godard, diplômé de l'Ecole nationale d'agri-culture de Grignan, ancien inspecteur délégué du Crédit Foncier deFrance et directeur du domaine de l'Habra, officier du Mérite agri-cole.
Professeurs : MM. Frédéric Meyer, diplômé de l'Ecole nationale de
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 225
Montpellier; Simon Castex, diplômé de l'Ecole nationale de Grignan,ancien chargé de cours à l'Ecole coloniale d'agriculture de Tunis ;Charles Trioullier, diplômé de l'Ecole nationale de Montpellier ; Louis
Garapon, diplômé de l'Ecole nationale de Grignan.Conférenciers : MM. Jules Mariani, chargé de l'enseignement de
l'arabe ; Dr Léon Féraud, chargé de l'enseignement de l'hygiène,médecin attaché à l'école.
Chefs de pratique : MM. Emile Sanlaville et Alfred Faraud.
Surveillant instructeur militaire : M. Paul-Pierre de Les Champs,ex-sous-officier.
Moniteur horticole : M. René Accollas.
A son début, l'Ecole pratique d'agriculture et de viticulture comptait32 élèves; elle en a aujourd'hui 46 et peut en recevoir 50. Son recru-
tement est donc assuré.
30
XXVI
COMICE AGRICOLE, SOCIETE D'HORTICULTURE
SYNDICAT AGRICOLE
Le Comice agricole de Philippeville, créé en 1851, a fonctionné
jusqu'en 1896; il fut présidé successivement par diverses notabilités
de la région et, en particulier, par MM. de Mareuil, Wallet et Le-
sueur.
En 1896, à la suite d'une période d'inactivité qui se prolongea pen-dant quelque temps, il fut reconstitué sur l'initiative de M. Gautier,
sous-préfet, qui prenait un vif intérêt aux choses de l'agriculture,et M. Barrot fut élu président.
Philippeville était alors le centre d'un important vignoble, encore
florissant, mais déjà gravement atteint dans sa vitalité par l'invasion
phylloxérique; la lutte contre le fléau, dont les propriétaires de cette
région étaient les premières victimes en Algérie, devint donc tout
naturellement l'objet des préoccupations du Comice. Il s'attacha à
guider les propriétaires dans la voie pleine de périls de la reconsti-
tution par les vignes américaines, à relever leur courage, à les mettre
en garde contre des écueils insoupçonnés, qui pouvaient conduire à de
nouveaux désastres. Il fallait propager les bons porte-greffes, appren-dre aux intéressés à les distinguer avec certitude, à les sélectionner,
à rejeter ceux qui n'offraient pas de garanties suffisantes aux pointsde vue de la résistance, de l'adaptation au sol, de l'affinité avec les
greffons français, etc. C'est dans ce but que fut créée, sur un terrain
concédé gratuitement par la municipalité, une pépinière de vignes
américaines, dont la direction fut confiée à des hommes dévoués et
expérimentés; grâce au choix judicieux des cépages qui y furent
cultivés et à la sélection sévère dont ils furent l'objet, de bons porte-
greffes furent répandus dans la région et les intéressés purent venir
étudier les caractères qui permettaient de les reconnaître.
228 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
En même temps furent organisés des concours de greffage, desti-
nés à former parmi les ouvriers locaux des greffeurs habiles, aptesà profiter des salaires avantageux qui rémunèrent ce genre de tra-
vail et libérant, d'autre part, les propriétaires de l'intervention oné-
reuse des greffeurs venant de France.
Se faisant sur un autre point l'interprète des légitimes réclamations
des viticulteurs, le Comice insistait auprès de l'administration pourobtenir la suppression des taxes sur les vignes, taxes imposées poursubvenir aux frais de la lutte contre le phylloxéra et qu'il était irra-
tionnel et inique de faire payer par des vignerons, dont les vignesmourantes n'étaient plus l'objet d'aucune tentative de protection et
dont toutes les ressources encore disponibles étaient manifestement
insuffisantes pour faire face aux grandes dépenses de la reconstitu-
tion.
Les nombreuses et délicates questions soulevées par la culture de
la vigne américaine, ainsi que les difficultés que présente la conduite
de la vinification sous le chaud climat de l'Algérie, démontraient
chaque jour la nécessité pour les viticulteurs d'une sérieuse prépa-ration à ce genre d'exploitation. En effet, une base solide, des-
connaissances à la fois scientifiques et pratiques leur sont aujourd'hui
indispensables. Pour répondre à ce besoin, le Comice estima qu'ilétait nécessaire de créer une école d'agriculture et que cette école
ne pouvait être placée ailleurs qu'à Philippeville, seul point de l'Al-
gérie où la culture de la vigne américaine fut alors autorisée. Il
mena dans ce but une campagne active dans laquelle il obtint l'appuides représentants de la région, tant à la Chambre des Députés qu'auConseil général, et il eut enfin la très vive satisfaction d'obtenir le
succès souhaité. Actuellement l'école d'agriculture est en plein fonc-
tionnement; elle constitue pour Philippeville un élémentde prospéritédurable ; elle prépare des agriculteurs instruits et utiles ; elle est, en
outre, grâce à son personnel enseignant, un centre d'activité intellec-
tuelle et d'influence morale dont bénéficie la région.L'activité du Comice se manifestait encore de diverses autres façons ,
telles que :
Participation à l'Exposition universelle de Paris, en 1900, qui lui
valut les récompenses suivantes :
Médaille d'or, pour produits alimentaires d'origine végétale.—
d'argent — — viticole.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 229
Médaille de bronze, exploitations et industries forestières.— d'argent, agronomie et statistique agricoles.
Publication d'un Bulletin agricole mensuel.Création d'un Syndicat agricole (janvier 1901).Création d'un laboratoire public d'analyses agricoles (octobre 1902).
Enfin le Comice poursuit sans relâche, avec toute l'énergie et la
persistance nécessaires, la réalisation d'une oeuvre d'une importancecapitale pour la région de Philippeville, la seule capable d'assurer àce pays une richesse constante et hors de pair, nous voulons parlerde la construction du barrage des Zardezas; il a confiance qu'il réus-sira clans cette entreprise si intéressante et que ce grand travail, troplongtemps ajourné, entrera bientôt dans la période d'exécution. Surson initiative, un comité spécial s'est formé et a recueilli déjà denombreuses souscriptions qui représentent une somme considérableet donnent une base sérieuse et solide aux démarches qu'il fait auprèsde l'administration pour obtenir les subventions indispensables. Déjàle service des Ponts et Chaussées a reçu des instructions pour pro-céder à un complément nécessaire dés études techniques faites autre-fois.
On est en droit d'espérer que bientôt les sécheresses désolantes del'été ne seront plus qu'un souvenir pour les habitants de la vallée
du Saf-Saf et que les ardeurs du soleil africain, loin d'être une cause
de stérilité, deviendront, à l'avenir, grâce aux irrigations, une source
puissante de vitalité et de production intensive.
Le bureau du Comice agricole est ainsi composé :
MM. Barrot, président; Nielli et Théry, vice-présidents; Dr Fé-
raud, secrétaire; Macquin, trésorier; Castex, directeur du laboratoire
et secrétaire adjoint.
La Société horticole et de culture maraîchère a été fondée le 19
décembre 1899. Le but de cette société est de favoriser le développe-ment et les progrès de l'horticulture et de la culture maraîchère dans
l'arrondissement de Philippeville.Elle publie, depuis sa fondation, un bulletin mensuel, qui est de-
venu commun à la Société horticole et au Comice agricole..Les divers concours qu'elle a organisés en juillet 1901, en janvier
et en juillet 1902, entre les producteurs de l'arrondissement, ont
230 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
obtenu un très vif succès. De nombreuses récompenses ont été décer-
nées aux exposants.De fréquentes distributions gratuites de graines, plantes, greffons,
sont faites aux sociétaires.
La cotisation est de 6 fr. par an, avec droit au Bulletin. Le siègede la Société est rue Nationale et place Wagram, maison Bouchy ;
par suite d'une entente heureuse, ce local est aujourd'hui commun
au Comice et au Syndicat agricoles.Le bureau actuel se compose de :
MM. Dr Augier, président; Ranoux et Charnallet, vice-présidents ;
Genet, trésorier; Lépitre,. secrétaire; Castex, secrétaire-rédacteur ;
Baptistin Merle, Godard, Schellemberg, Louis Bertrand, Guigues,Pina, Veyret, conseillers.
LES PETITS POIS
Près des choux aux teintes vineuses,Dans la plaine, à l'abri du vent,Et par les branches épineuses,
Que vernit le soleil levant,Tenus ainsi que par des doigts,Poussent gaiement les petits pois.
Au milieu des rugueuses branches
Des gousses pendent lourdement
Et de mignonettes fleurs blanches
Frôlent malicieusement
Les ventres gonflés par le poidsEt la rondeur des petits pois.
Et tout cela s'agite et bouge,La gousse frappant, le bois mort
Et la fleur narguant le chou rouge
Qui croît au pied de son support.Tout est vivant, sauf le vieux bois
Qui soutient les lourds petits pois.
Déjà la neige sur la roche
Fond sous les rayons du soleil ;Voici que le printemps s'approche :
Après la nuit vient le réveil.
Avril renaîtra dans un mois ;C'est la saison des petits pois.
A Saint-Antoine, le 19 Mars 1901. L. B.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 231
Le Syndicat agricole, de création récente (janvier 1902), est appelé-à rendre de grands services aux agriculteurs de la région en leur
procurant, dans les conditions les plus économiques et avec toutes
les garanties au point de vue de la qualité, les divers produits et
instruments qui leur sont nécessaires, tels que : engrais, produits
cryptogamiques, semences, etc.
Les membres du bureau sont :
MM. Barrot, président; Pesle et Dr Augier, vice-présidents ; Ren-
gade, secrétaire ; Macquin trésorier ; Castex, secrétaire-adjoint.
XXVII
SOCIETE HIPPIQUE
Cette Société qui, pendant de nombreuses années, donna tant debelles fêtes, où l'on se rendait de tous les points de l'Algérie, fut unedes preuves de la prospérité de notre ville.
Dès le 10 août 1864, le Conseil municipal lui alloue une subventionde 1.000 fr. pour un prix à décerner au vainqueur au nom de lacommune. Des courses eurent lieu les 20 et 21 septembre 1874 sur
l'hippodrome de Damrémont, sous la présidence de M. Marmin. Les
vainqueurs se partagèrent 5.550 fr. de prix.Nous citons, au hasard, la distribution des récompenses qui eut
lieu les 16 et 17 septembre 1876, sous la présidence de M. Marmin :
Course au trot monté. 3.600 mètres. Prix, 400 fr. : Tric-Trac, à
M. Joseph Grima.
Poule d'essai. Course au galop. 1.800 mètres, Prix, 1.000 fr. : Le
Lièvre, à M. Spiteri.Omnium. Course au galop. 3.600 mètres. Prix : 900 fr. : Toqué,
à M. Spiteri.Partie liée. Course au galop. 3.600 mètres. Prix : 1.500 fr. :
Maboul, à M. Delaye.
Military. Steeple-chase. 2.200 mètres, 10 obstacles. 3 prix : 3
objets d'art.1er prix : Flot, à M. Peter, lieutenant au 5e Hussards;2e prix : Accabit, à M. de Bagliou, lieutenant au 3e Chasseurs
d'Afrique ;3e prix : Kaddour, à M. Cadron, lieutenant au 5e Hussards.
Course au trop attelé. 5.400 mètres. Prix, 400 fr. : Nageur, à M.
Rambert.
Critérium. Course au galop. 3.600 mètres. Prix: 1.000 fr. :
Vengeur, à M. Attard, de Sétif.
31
234 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Course de fonds. 5.400 mètres. Prix: 3.000 fr. : Toqué, à
M. Spiteri.
Steeple-Chase, 3.600 mètres, 14 obstacles. Prix, 1.200 fr. :
Trompeur, à M. Bédouet.
Des amateurs du sport hippique s'occupent de reconstituer la
Société : leurs démarches sont en bonne voie de réussite.
XXVIII
COMMERCE, INDUSTRIE
Par arrêté du 6 mai 1844, des courtiers de commerce sont institués,dont 5 à Philippeville. Les premiers nommés sont : MM. Ricoux etRouchas.
Consommation en bestiaux de la population totale en 1845 : 2.414boeufs ou vaches, 1.059 veaux, 959 chevreaux ou agneaux, 414 porcs,4.258 moutons.
Prix moyen des principales denrées dans notre ville, en 1845 :
Volailles, 1 fr. la pièce. OEufs, 0 fr. 70 la douzaine. Boeuf, 0 fr. 70le kilo.Veau, 0 fr. 77. Mouton, 0 fr. 76. Porc frais, 1 fr. 50. Porc salé,1 fr. Pommes de terre nouvelles, 18 fr. les cent kilos. Pommes deterre de France, 13 fr. 45. Huile à manger, 0 fr. 75 le kilo. Huile de
France, 1 fr. 60. Huile à brûler, 0 fr. 80 le litre. Miel, 150 fr. les cent
kilos. Riz, 49 fr. Morue, 42 fr. Vin, 56 fr. la bordelaise de 220 litres.
Eau-de-vie, 0 fr. 70 le litre.
Cire, 330 fr. les cent kilos. Tabac, 85 fr. les cent kilos. Tabac de
France, 160 fr. Savon, 71 fr. Foin, 9 fr. Paille, 6 fr. 40. Bois à brûler,3 fr. 30. Bois scié, 11 fr. 50. Charbon de bois, 7 fr. 60. Charbon de
terre, 4 fr. 60. Alcool 32°, 1 fr. 30. le litre.
Sel, 6 fr. 70 les cent kilos. Sucre brut, 109 fr. Sucre raffiné, 129 fr.
Café, 145 fr. Graisse, 154 fr. Pain : lre qualité, 0 fr. 39 le kilo ; 2e,0 fr. 29 ; 3e, 0 fr. 24. Farines : 1re qualité, 37 fr. 50 les cent kilos; 2e,29 fr. 40; 3e, 25 fr. 45. Blé, 14 fr. 80 l'hectolitre. Orge, 8 fr. 70. Lé-
gumes secs d'Algérie, 10 fr. 60 les cent kilos. Légumes secs de France :
fèves, 28 fr.; haricots, 44 fr.; Pois, 43 fr. 65.
Les Arabes, au nombre de 49.947 ont apporté en 1845 sur le marché
de notre ville :
23.246 boeufs, 10.169 moutons, 272 chevaux, 193 mulets, 231 ânes,58.798 volailles, 5.351 hectolitres de blé, 10.207 d'orge, 2.446 de
236 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
fèves, 15.708 charges de bois, 5.413 de. charbon, 4.742 hectolitres
d'huile, 21 kilos de cire, 1.183 de beurre, 1.000 de tabac, 3.390 de
laine, 660 kilos de tissus de laine, 1.945 peaux de boeufs.
L'administration des berlines du commerce modifie son service à
partir du 15 septembre 1850 : De Philippeville à Constantine et vice-versa, premier départ, tous les jours, à 6 heures du matin ; deuxième
départ, tous les jours impairs, à 8 heures du matin.
Le 12 juin 1850, une société avait pris un brevet d'invention pourla fabrication d'alcool d'asphodèle de 35 à 38 degrés. Cette fabriqueest établie à Damrémont et le journal Le Saf-Saf dit : « Tout le
monde a pu goûter les produits d'excellent goût que les inventeurs
ont tirés de l'asphodèle. » Le Maire, le Président de la Chambre de
Commerce, l'Inspecteur de colonisation et une foule de curieux sont
allés, le 15 novembre 1851, féliciter MM. Barneau, Vie et Cie et
constater par eux-mêmes les heureux résultats obtenus et qui sont
de grande importance pour la colonisation et, en particulier, pourle village Damrémont.
Le 22 février 1851, Philippeville s'enrichit d'un bel établissement
créé par M. Nielli pour la fabrication du chocolat.
Le Ministre de la Guerre ayant prescrit que le piédestal de la
statue du maréchal Bugeaud, à ériger sur la place d'Isly à Alger,serait construit en blocs de porphyre du cap de Fer, l'Ingénieur en
chef des Ponts et Chaussées est chargé de l'opération ; — il réussit,
le 3 avril 1852, à extraire de cette carrière un bloc suffisant pour four-
nir tout le porphyre nécessaire.
Séance du 25 novembre 1852. Le Conseil loue à MM. Daniel et
Verdus le blockhaus du village Valée pour y établir un moulin à vent.
Séance du 29 août 1854. Le Conseil substitue le droit d'abatage
par tête de bétail à celui perçu au poids et arrête le tarif suivant :
Taureaux, 18 fr. Boeufs, vaches, veaux, 10 fr. Veaux au-dessous de
30 kilos, 8 fr. Béliers, 5 fr. Moutons, brebis, chèvres, agneaux et che-
vreaux, 2 fr. Porcs, 8 fr.
Le Cercle Civil fait son ouverture le 4 février 1860. Le journalLe Zéramna dit qu'un établissement de ce genre, où l'utile est jointà l'agréable, manquait réellement et qu'il rendra de grands services
aux commerçants qui s'y réuniront.
Ce cercle est créé par des commerçants, des fonctionnaires civils
et des propriétaires dans la maison Picon, place de la Marine. Les
officiers sans troupe, en résidence à Philippeville, y sont admis. Le
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 237
nombre des membres fondateurs est de 131. Les statuts sont signéspar MM. de Nobelly, Philippe Alby, Toussaint Ricoux, Ferdinand
Pégat, Jauffret, Sainte-Colombe, Grech, Allaman, Cullerre, Edouard
de Marqué, G. Pasquet.Le Cercle de l'Union a été créé le 15 novembre 1878 par 82 mem-
bres fondateurs, signataires des statuts primitifs. Les statuts actuels,en date du 30 septembre 1896, ont été approuvés par le Préfet le 11
novembre suivant.
Le premier bureau d'administration élu était ainsi composé :
MM. Dr René Ricoux, président; Salmon et Vellard, vice-prési-sident; Loze, Ponsoye, Bayeux, Bretonnière, Thorel, Sardon, Davet
et Llado, membres.
Le Cercle a été d'abord installé clans l'immeuble Reinheimer, der-
rière le Grand Hôtel, puis transféré dans la maison Cohen-Adad, rue
Nationale, le 31 janvier 1889, et clans l'immeuble Meurs, aujourd'hui
Pujol, au-dessus du Café de Foy, place de Marqué, le 27 janvier 1895.
La bibliothèque renferme 2.000 volumes.
Cercle de l'Union
Liste des présidents :
MM. Dr René Ricoux 15 novembre 1878.
Salmon 10 janvier 1881.
Jules Bretonnière 24 août 1882.
Amédée Davet 23 décembre 1887.
238 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
MM. Narcisse Carrey 16 mars 1889.
Louis Roux 20 décembre 1893.
Jules Bretonnière 3 mai 1898.
Fernand Vellard 29 décembre 1898.
Louis Saingery 14 décembre 1900.
Bureau actuel :
MM. Louis Saingery, président; Barthélémy Morato et Jean Séguy,.
vice-présidents; Adrien Haas, trésorier; Gaston Fenech, secrétaire;Marius Rabaute, Paul Rengade, Dr Henri Davet, Raphaël Scogna-
miglio, Georges Sider, Louis Bianco, membres.
Un Cercle du Commerce et de l'Agriculture s'est constitué le 14
février 1902, sur l'initiative de M. Baptistin Merle et de ses colla-
borateurs : MM. Dr Augier, Alexandre Henry, Macquin, Henri Ra-.
noux, Paul Aquadro, Sauveur Pinelli, Gianotti, Lépitre.Il est installé dans le local du Cercle des Commerçants, créé en
1860, rue Nationale n° 13.
Le Conseil d'administration est composé de :
MM. Baptistin Merle, président; Dr Augier et Garrez, vice-prési-
dents; Graux, secrétaire; Bargoni, trésorier; Colombet, Salvator
Grima, Lépitre, Moureau-Lachaussée, Pichon, Ranoux, Sublime,administrateurs.
Le nombre des membres est déjà de 250, malgré sa création récente.
En 1861, les carrières de marbre du Filfila sont exploitées par une
nouvelle société, sous la dénomination : Dolisie et Cie.
Séance du 14 août 1862. Le Conseil émet un voeu pour l'établisse-
ment d'une foire, qui aurait lieu tous les ans clans la première
quinzaine d'août.
Séance du 8 mai 1863. Le Maire expose au Conseil que les habitants
de la place Bugeaud ont demandé à plusieurs reprises l'appropriationde cette place en marché aux poissons, mais que les travaux ont dû
être ajournés faute de ressources suffisantes. Il a donc cherché une
combinaison qui permette de donner satisfaction à ces habitants sans
imposer de nouvelles charges à la commune. A cet effet, il a réuni les
propriétaires intéressés et leur a proposé de se former en société paractions, qui seraient remboursables avec le produit de la location des
magasins qui y seraient construits, la commune se réservant le droit
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 239
de stationnement payé par les marchands de poissons. Cette propo-sition a été acceptée et le nombre d'actions nécessaires pour arriver àla somme de 38.500 fr., montant du devis, a été souscrit immédiate-ment. Le Conseil adopte le contrat ; les actions produiront 7 % d'in-
térêt, plus 50 fr. de prime par action libérée.Les tarifs des marchés de la place Bélisaire et de la place Bugeaud
sont ainsi arrêtés le 5 novembre 1864 : Marchands de légumes, lemètre par jour : 0 fr. 20 à l'abonnement et 0 fr. 30 à la journée. Bou-chers et autres marchands, 0 fr. 40 par jour. Corbeille de poissonsvendue à la criée : 0 fr. 25. Revendeurs, tables par mètre et par jour :0 fr. 20. Corbeille vendue en ville : 0 fr. 15.
Une découverte appelée à rendre de grands services est faite, enmai 1865, par M. Germaix, inspecteur principal des bâtiments civils.Il s'agit de briques-liège ou poreuses, remarquables par leur légèretéet préférables à la brique creuse.
Dans sa réunion du 15 juin 1865, le Conseil décide qu'une foire setiendra du 1er au 15 septembre. Le 18 juillet suivant, il fixe la date
du 10 au 25 septembre.Une société coopérative de consommation est fondée le 30 janvier
1867. Sont nommés administrateurs : MM. Castel-Dugenet, proprié-taire; Denis, imprimeur; Sierzputowski, propriétaire; Faure aîné,
négociant; Goujat, négociant. Cette société, pendant le cours de sa
durée, un an environ, a économisé aux consommateurs une somme
de près de 110.000 fr., mais elle a été forcée de succomber devant
l'indifférence générale.25 juin 1873. Récompenses à l'Exposition gastronomique de Paris :
M. Herrouet, propriétaire à Eddis. Vin rouge de 1871, fait avec des
plants de Bordeaux. Médaille de bronze. M. Picon, amer africain.
Médaille de vermeil.
Séance du 24 septembre 1874. Le Conseil émet un voeu pour la
création d'une succursale de la Banque de l'Algérie à Philippeville.Extrait du Zêramna des 3 et 7 octobre 1874. Statistique officielle.
Exportations des céréales en 1872 : 64.000.000 kilos; en 1873 :
92.000.000 kilos. Poissons en 1872 : 1.770.283 kilos; en 1873 :
1.575.628 kilos. Recettes de la douane en 1872 : 1.315.418 fr.; en
1873 : 1.336.925 fr. Navigation en 1872 : 1.305 navires jaugeant281.436 tonneaux; en 1873:1.159navires jaugeant 314.609 tonneaux.
Industrie. En 1872, deux ateliers fonctionnent pour la préparation du
liège; 120 personnes occupées. Production journalière : 150.000
240 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
bouchons et 8.000 semelles. Les briquetteries fabriquant à la main
produisent annuellement 1.500.000 briqnes et autant de tuiles. La
briquetterie mécanique, à vapeur, dirigée par M. l'Ingénieur Pierru-
gués s'installe et fait déjà 5.000 fr. d'affaires par mois. L'usine
Fournier et Cie produit, en 1873, 2.000 hectolitres d'alcool ; elle fait,en outre, la mouture des grains.
Par décret du 22 avril 1875, une succursale de la Banque de l'Al-
gérie est créée ici, pour fonctionner à partir du 1er septembre, mais
elle ne commença ses opérations que le 3 janvier 1876.
Les Equitables pionniers Franco-Algériens créent, le 22 juillet 1886,une association amicale du travail. Sont nommés : Président, M.
Magnan, ouvrier boulanger ; secrétaire, M. Mogenier, terrassier.
Encouragée par le Gouvernement général, qui lui accorda une sub-
vention de 500 fr. le 23 janvier 1887, et par des hommes de haute
valeur, tels que M. Lesueur, ingénieur civil, Beltçaguy, sous-ingé-
nieur, Grillet, architecte, et tant d'autres dont les noms nous échap-
pent, elle avait tous les éléments pour réussir, mais elle n'osa jamaisaffronter une adjudication publique, ce à quoi elle était pourtantautorisée, et, par suite, ne put continuer à subsister.
Le cadre de cet ouvrage ne nous permet pas de citer toutes les
industries de notre commune, mais nous ne pouvons cependant passersous silence les carrières de marbre du Filfila, malheureusement
inexploitées actuellement.
A 25 kilomètres Est de Philippeville et à 60 kilomètres de Bône,au Filfila, existent des carrières de marbre blanc statuaire, exploitéesautrefois par les Romains. On le retrouve dans les monuments an-
tiques de Constantine, de Tébessa, de Timgad et même de Carthage-Tunis.
Ces carrières occupent une superficie de 1.400 hectares et pourraient
produire des milliers de mètres cubes de marbre par mois pendant
plus d'un siècle. On y trouve les marbres verts, noirs, jaunes et de
superbes onyxs. La puissance des gîtes marbriers est estimée à vingtmillions de mètres cubes par plusieurs ingénieurs spécialistes.
Les sites du Filfila sont charmants et très pittoresques. Est-il une
plus délicieuse excursion qu'une promenade aux Platanes, endroit
frais et ombreux, où coule une eau pure et limpide sous de grandsarbres au vert feuillage ?
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 241
LES PLATANES - FILFI LA
REMINISCENCE
A M. Georges LESUEUR, sénateurde Constantine.
Verbe incarné dans la nature ;
Esprits cachés au fond des bois ;Brises qui n'êtes qu'un murmure,
Qu'un long susurrement de voix ;Sombres forêts ; parfums des roses ;Marbres blancs ; sables désolés ;Eau souriante et rocs moroses ;Petites fleurs sous les grands blés;
Dans mes vers parlez.
Haies vives le long des prairies ;
Myrte verdissant les coteaux ;Rayons d'or, tableaux de féeries ;
Sapins droits comme des poteaux ;Soleil filtrant parmi les branches
Des gros arbres échevelés ;Sentiers où l'on voit, les dimanches,Des couples d'amants, isolés.
Dans, mes vers parlez.
Parlez le céleste langage
Que, seul, le poète comprendEt dont la grandeur se dégageMême entre ce qui paraît grand.
Parlez, beaux vallons solitaires,D'où mes vers se sont envolés ;
Espaces pleins de doux mystères ;Recoins perdus, inviolés ;
Dans mes vers parlez.
Parlez, voix douces, voix immenses,Des vents harmonieux accords,
Qui semblez tantôt des romances,Tantôt des fanfares de cors.
Parlez, voix fortes, voix câlines
Aux gazouillements roucoules,
Rendant, comme les mandolines,
Des sons suaves et perlés ;Dans mes vers parlez.
L. B.15 avril 1889.
32
242 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Une Chambre syndicale des propriétés immobilières de Philip-
peville et de sa banlieue s'est créée le 19 avril 1903. Elle a pour but :
la défense des intérêts généraux de la propriété bâtie, l'examen des
questions et l'étude des réformes qui la concernent, la recherche des
mesures propres à diminuer les charges qui la grèvent, l'exécution
de toutes les démarches utiles auprès des pouvoirs publics, du parle-ment, etc.
Le Conseil d'administration fondateur est ainsi composé :
Président, M. Dominique Gardetto. Vice-présidents, MM. EugèneBertin et Maximin Tribaudeau. Secrétaire, M. François Faroud.
Trésorier, M. Jules Redon. Membres : MM. Auguste Aquadro, Gas-
ton Fenech, Jacques Guiscafré, Jules Grosso, Adrien Haas, Jules
Lopis, Ferdinand Meyer, Roger Paret, Paul Rengade, Joseph Vi-
renque.
XXIX
CHAMBRE DE COMMERCE, CONSULS
Un arrêté du Ministre de la Guerre, en date du 4 octobre 1844, créela Chambre de Commerce.
Les premiers membres nommés, en 1845, par le Gouvernement,sont :
MM. de Nobelly, président; Ricard, secrétaire; Blanchet, Bran-
thomme, Chirac, Gérold, Lavoute, Morel, Narboni, Pégat, Ricoux,membres.
Le 14 avril 1849, les commerçants patentés procèdent à l'élection
de la Chambre de Commerce. Sont élus : MM. Barneau, Rivoire,
Fauroux, Denobelly, Sauzède, Vié, Grima (étranger). C'est la premièreélection de cette Chambre.
Sont élus, le 11 novembre 1850 : MM. Deboisson, Sicret et Vias.
Elections du 2 décembre 1856 : MM. de Boisson, Henri Teissier,
Toucas-Quartier, Augustin Chirac, de Nobelly, Ferdinand Pégat,
Raphaël Scognamiglio, David Cohen-Nehamia.
16 août 1859. MM. Henri Teissier, de Boisson et Toucas-Quartiersont réélus président, vice-président et secrétaire.
19 mars 1861. Sont élus : MM. Abadie, Alby et Pasquet.5 juillet 1865. Election de M M. Eliaou Néhamia, Gabert, de Marqué,
Teissière, Brunache.
Nous arrêtons là ces citations.
Liste des présidents :
MM. de Nobelly de 1845 à 1849
Rivoire 1849 à 1858
Henri Teissier 1858 à 1863
de Boisson 1863 à 1871
Henri Teissier 1871 à 1882
244 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
MM. Antoine Bruno de 1882 à 1887
Charles Blanchet 1887 à 1899
Albert Teissier 1899
M. Henri Teissier, père du président actuel, est resté 16 ans à la.
tête de la Chambre de Commerce de Philippeville.Comme négociant et banquier, M. Henri Teissier s'est fait une
place considérable dans les affaires. Son nom doit être inscrit au
nombre des fondateurs de notre ville et de ces grands champions
qui ont contribué à faire connaître et affermir la puissance de pro-duction de l'Algérie. Sa prévoyance, ses aptitudes toutes spéciales,son profond esprit d'ordre , sa grande droiture placèrent, dès le com-
mencement , sa maison au premier rang dans le monde commercial.
M. Teissier honorait la place de Philippeville et, par la puissancede son capital, il rendit les plus grands services au commerce de
la province de Constantine. Ses qualités le désignèrent de bonne
heure au choix des électeurs consulaires. Nommé président de la
Chambre de Commerce en 1858, il fut maintenu dans ses fonctions
jusqu'en 1863, puis de 1871 à 1882, c'est-à-dire pendant 16 ans. A
cette époque, il déclina cet honneur. Il contribua à la réalisation du
premier emprunt qu'elle contracta en 1876 pour la continuation des
travaux du port.M. Henri Teissier a été nommé chevalier de la Légion d'honneur
en 1861 et officier par décret présidentiel du 14 octobre 1880.
Son père, avocat-défenseur à la création même du tribunal, alaissé dans le monde judiciaire le souvenir de l'esprit le plus fin et
le plus agréable et de l'honorabilité la plus grande, unie à la déli-
catesse professionnelle la plus scrupuleuse.Ce nom déjà aimé, M. Henri Teissier l'a rendu universellement
respecté.L'auteur de cette histoire se rappelle toujours avec émotion l'année
qu'il a passée comme employé dans la maison commerciale de M.
Henri Teissier, qui lui témoignait la plus bienveillante sympathie.La composition actuelle de la Chambre de Commerce est :
MM. Albert Teissier, président; Charles Blanchet, vice-président ;
Joseph Chatillon, trésorier ; Eugène Kapp, secrétaire-archiviste ;
Eugène Bertin, Edouard Blain, Henri Bourgeois, Marcel Daprela,Joseph Pina, Sauveur Pinelli, Valentin Sutter, Hadj Mohamed ben
Karoui, Idrici Mohamed ben Ahmed, membres.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 245
Notre Chambre de Commerce a toujours rendu et rend encore les
plus grands services à notre ville, dont elle s'efforce d'assurer la
prospérité. Grâce à ses travaux incessants, qu'il serait trop longd'énumérer ici, notre port est devenu le plus sûr et l'un des plusbeaux des ports algériens.
Liste des consuls en exercice :
MM. Herbert Scratchley, vice-consul d'Angleterre.
Adolphe Chiarelli, agent consulaire d'Autriche-Hongrie, che-
valier de l'ordre royal du Sauveur de Grèce.
Paul Albert, vice-consul de Belgique.Frédéric Schneider, vice-consul de Danemark, chevalier de
l'ordre royal du Cambodge.
Barthélemy Morato, vice-consul d'Espagne.Frédéric Chiarelli, vice-consul de Grèce, doyen des consuls,
officier de l'ordre royal du Sauveur de Grèce.
Marius Daprela, agent consulaire d'Italie.
Jules Pottier, vice-consul des Pays-Bas, officier d'Académie.
Albert Teissier, vice-consul de Suède et de Norvège.Louis Sider, vice-consul de Suisse.
XXX
PORT, PLAGES, NAVIGATION
En 1844, le mouillage, éloigné à peu près de trois milles de la ville,n'est pas tenable avec la moindre mer de large ; aussi aucun navire
n'y séjourne. On avait construit sur la plage de Philippeville plu-sieurs débarcadères en bois, qui ont été successivement renversés parles tempêtes. Le dernier, qui existait encore à la fin de 1844, soutenu
par un appareil de lignes solidement amarrées, paraissait devoir ré-sister aux plus fortes mers. Il fut très endommagé vers la fin del'hiver de 1843. Les améliorations, qui y avaient été faites cette
année là, s'élevèrent à 5.000 fr. Cet ouvrage, indispensable pour
opérer le débarquement des voyageurs et des marchandises, est res-
tauré et consolidé de nouveau au commencement de 1845. L'adminis-
tration se propose, à cette époque, de doter Philippeville d'un quaiet d'un débarcadère en maçonnerie de béton. Les projets de ces ou-
vrages sont alors à l'étude. Une lampe à réflecteur, attachée à un
poteau fixé à la tête du débarcadère, éclaire le mouillage.Il n'existait à Stora d'autre moyen de débarquement qu'un petit
môle en bois, plusieurs fois démoli par la mer et successivement
rétabli. On y a dépensé 3.000 fr. en 1843. En 1844, on commence la
construction d'un débarcadère en béton, à proximité de l'aiguade.Cet ouvrage consiste dans un terre-plein de 20 mètres de longueur,
parallèle à la ligne du quai Nord projeté, et de 36 mètres de largeursur le rivage. Le terre-plein sera revêtu de murs sur les trois faces
baignées par la mer, pavé et garni de moyens d'amarrage pour les
navires. Dans le mur de la face Nord sera pratiqué un escalier à
double rampe, destiné à faciliter le débarquement et l'embarquementdes passagers et des colis. La construction de cet ouvrage, évaluée à
35.000 fr., sera terminée en 1845.
Une somme de 60.000 fr. est employée de la façon suivante en
248 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
1843 : construction d'un mur en maçonnerie soutenant la partie de la
route qui forme quai, 40.000 fr.; restauration des citernes romaines
destinées à alimenter l'aiguade à l'usage de la marine, 20.000 fr. La
restauration de ces citernes a été exécutée par le Génie militaire.
La baie où se trouvent Philippeville et Stora étant limitée à l'Est
par le cap de Fer et à l'Ouest par le cap Bougaroni, une anse demi-
circulaire, formée par ce dernier, renferme le mouillage de Stora. La
pointe Nord de cette anse, terminée par la petite île des Singes, le
couvre assez complètement. Pour relier Philippeville et Stora et les
enfermer dans le même port, il faudrait exécuter des travaux gigan-
tesques, dont la dépense s'élèverait à plusieurs dizaines de millions.
Aussi, en 1845, l'administration repousse les vastes projets qui lui
sont soumis dans ce but et fait dresser le plan des travaux nécessaires
pour couvrir le mouillage du large par une jetée de 300 mètres et dé-
truire l'effet du ressac par un môle de 50 mètres, rattaché à l'îlot
des Singes.Le débarcadère en bois de Philippeville, exposé pendant l'hiver
à toute la violence de la mer, a besoin de fréquentes réparations. Il
est nécessaire que l'on construise à côté un débarcadère en pierre,relié au mur de soutènement qu'il faudra établir le long des placesde la Douane et de la Marine (places du Commerce et de Marqué
actuellement), pour les agrandir et les défendre-contre la mer. En
1845, les dépenses faites pour l'entretien de ce débarcadère en bois
s'élèvent à la somme de 8.421 fr. 88, dans laquelle se trouvent com-
pris 3.866 fr. 51 pour construction de caisses à couler le béton, des-
tinées à l'établissement d'un debarcadère en maçonnerie à Stora. Cedernier travail étant ajourné jusqu'à la construction des quais de
Stora, on se borne, en 1846, à établir un petit débarcadère provisoireen pierre, dont la dépense s'élève à 12.000 francs.
Le fanal de Stora, qui consiste en une grosse lanterne allumée àl'îlot des Singes, est insuffisant. On construit, en 1846, un phare de4e ordre sur l'île Sridjinia et on remplace le feu du blockhaus par unfanal sidéral placé sur l'îlot des Singes. Ces travaux doivent rendreau commerce et à la navigation un immense service; ils sont évalués
à 33.000 fr. pour le phare et 8.000 fr. pour le feu du port.
Mouvement du port de Stora du 4 au 14 Octobre 1846.
ENTRÉES :
De Toulon : Brick-goëlette français, Mazagran, 113 tonneaux, vin.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 249
De Marseille : Brick français Sauveur, 105 tonneaux, diverses mar-chandises.
Vapeur français L'Elbe, 132 tx, passagers et diversesmarchandises.
Brick français Le Gruissanais, 118 tx, diverses mar-
chandises.
De La Nouvelle : Brick-goëlette français Jeune Delphine, 69 tx, vin.
De Palma ; Bateau espagnol Saint-Jean, 36 tx, lard et diverses mar-
chandises.
De Carloforte : Bateau sarde La Victoire, 25 tx, diverses marchan-
dises.
Tartane sarde San-Giacomo, 37 tx, porcs vivants.
D'Alger : Vapeur Le Vautour, courrier.
Brick-goëlette français Bidartine, 71 tx, vin et eau-de-vie.
De Gigelly : Bateau français Adolphe, 23 tx, sur lest.
De Collo : Bateau maure L'Emessael, 8 tx, diverses marchandises.
» Dieudonné, 2 tx, bois à brûler.
» La Victoire, 1 t., bois et fruits.
» Le Divan, 6 tx, diverses marchandises.
» Le Mabrouck, 11 tx, diverses marchandises.
SORTIES :
Pour Toulon : Brick français Les Deux Frères, 131 tx, futailles vides.
Pour Marseille : Vapeur français l'Elbe, 132 tx, passagers et diverses
marchandises.
Pour Ajaccio : Gondole française Saint-Joseph, 11 tx, sur lest.
Bateau français Saint-Erasme, 8 tx, sur lest.
Pour Livourne : Brick français Le François, tan.
Pour Malte : Bateau maltais Madone del Liesse, 17 tx, sur lest.
Pour Alexandrie : Brick français Anne et Polonnie, 165 tx, sur lest.
Pour Alger : Vapeur Le Vautour, courrier.
Brick français Mazagran, 113 tx, fourrages.
Pour Gigelly : Brick-goëlette français Jeune-Fany, 78 tx, farines et
foin.
Pour Collo : Bateau maure Le Rabah, 6 tx, sur lest.
Bateau français Général Riégo, 28 tx, sur lest.
Bateaux maures L'Emessael, Dieudonné et La Victoire,
sur lest.
Bateau maure Le Mabrouck, 11 tx, tissus.
33
250 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Pour Bône : Balancelle espagnole San-Antonio, 32 tx, sur lest.
Bateau français Le Mabrouk, 15 tx, sur lest.
» La Rosine, 43 tx, div. marchandises.
Vapeur le Ténare, courrier.
Bateau français Adolphe, 23 tx, sur lest.
En 1846, le Commandant du port de Stora est M. Artigues. La
compagnie de bateaux à vapeur qui fait le service est la Cie Bazin
et Périer.
Le 28 septembre 1846, a lieu l'adjudication des travaux de cons-
truction du phare de l'île Srigina. Adjudicataire : M. Dessouliers,2 % de rabais.
Le 14 avril 1847, a lieu l'inauguration du service de bateaux à
vapeur de la Cie Bazin de Stora-Philippeville à Tunis, en touchant
à Bône et à La Calle.
Un avis annonce que le phare construit sur l'île Srigina et le feu
de port de l'îlot des Singes, à l'entrée du golfe de Stora, seront allu-
més le 15 décembre 1847.
Le courrier de Marseille, Le Sphynx, de la Cie Bazin-Périer, partile 23 décembre 1847, n'arrive à Philippeville que le 3 janvier 1848.
Ce retard fut fatal aux gourmets. Le bateau, devant arriver le jourde Noël, est chargé de bon nombre d'huîtres et de dindes truffées,
qui furent laissées à la Compagnie, pour s'éviter des frais inutiles,ainsi que d'autres marchandises plus importantes et impatiemmentattendues.
En juin 1848, Le Solon et Le Dauphin, bateaux en fer de 200
chevaux, sont affectés à la correspondance du littoral en remplacementdu Ténare et de l'Euphrate, bateaux de 160 chevaux.
Un arrêté du 17 juillet 1848 institue une Commission de surveil-
lance des bateaux à vapeur du commerce français, qui doit s'assurer
s'ils présentent toutes les garanties de construction, de stabilité, d'ar-
mement et d'appareils de sûreté, Sont nommés membres de cette
Commission : MM. de Marqué, capitaine de frégate, commandant la
Marine; Lyonnet, ingénieur ordinaire des Ponts et Chaussées; de
Marsilly, capitaine chef du Génie; Garcin, capitaine de la santé.
Le Sphynx, bateau à vapeur de la Cie Bazin, arrivé le 10 juin 1850,fait la traversée de Marseille ici en 45 heures. Un voyageur, M. Ri—
cardi, propriétaire à Constantine, venant directement de Londres, a
traversé la Manche, toute la France et la Méditerranée en quatre
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 251
jours. Le journal Le Saf-Saf, relatant ce fait, s'exprime ainsi : Ces
prodiges de la locomotion par la vapeur seront encore dépassés quandsera terminé le chemin du fer du Centre de la France.
Le 5 octobre 1850, le Sous-Préfet prévient ses administrés que,pour faciliter l'embarquement des passagers, un coup de canon, tiréde l'arsenal, annoncera l'arrivée des bateaux-courriers aussitôt qu'ilsseront en vue, plusieurs de ces courriers repartant presque aussitôtleur arrivée.
Dans la nuit du 8 février 1851, pour une forte bourasque du Nord,
plusieurs centaines d'étourneaux se heurtent contre les glaces du
phare de Srigina. On les trouve le lendemain matin gisant sur la
première plate-forme ; les pêcheurs en ramassent aussi sur la mer.Séance du 19 juin 1852. Le Conseil ajourne la création d'un ser-
vice régulier, subventionné, de transports de Philippeville à Stora,la voiture Bertin,qui fait le service des dépêches, ne trouvant jamaisà prendre de voyageurs pour l'une ou l'autre destination. Le 16
juillet suivant, l'asssemblée communale vote cependant une subven-tion de 500 fr. aux voituriers.
20 août 1852. M. Poulain,lieutenant de vaisseau, directeur du portde Stora, est nommé chevalier de la Légion d'honneur. M.Catalourda,maître pilote du même port, est décoré de la médaille militaire; il
est déjà titulaire de la médaille d'or de sauvetage.Le 1er décembre 1855, il est établi un nouveau service de bateaux
à vapeur entre Marseille et Stora, qui doit faire le trajet en 40 heures.
L'un de ces bateaux, le Monte-Christo, est très connu par la supé-riorité de sa marche. C'est à la compagnie marbrière du Filfila, dont
les travaux sont poussés avec beaucoup d'intelligence, que l'on doit
cette nouvelle ligne.3 novembre 1857. Le magnifique vapeur L'Hermus, capitaine de
Bovis, venant de France avec les dépêches, fait une agréable surpriseà la population en arrivant le dimanche, 28 octobre, après avoir
effectuée sa traversée en 37 heures. C'est la plus grande vitesse
constatée depuis que la Compagnie des Messageries Impériales est
chargée du service de la poste.Le Conseil d'amirauté d'Alger, chargé de donner son avis sur la
décision de la Commission nautique de Paris, la consacre à une forte
majorité le 1er décembre 1857, en décidant que le port sera établi
devant Philippeville par raison d'économie et de commodité.
Le Céphise, bateau neuf à hélice des Messageries Impériales,
252 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
arrive le 10 juillet 1858 , ayant effectué la traversée de Marseille ici
en 33 heures.
M. Jacquet, lieutenant de vaisseau, directeur du port de Stora, est
nommé chevalier de la Légion d'honneur le 24 août 1858.A cette époque l'horizon s'éclaircit et les questions qui préoccupent
depuis si longtemps le commerce de notre ville sont en grande par-tie résolues selon les voeux de la localité. Notre chemin de fer, étudié
et tracé par une puissante compagnie, fait partie des trois lignes .quele Gouvernement est prêt à concéder. Mais il en était une autre
plus importante, c'était celle du port. Il s'agissait de savoir si le
port se ferait à Stora ou à Philippeville.
L'opinion en faveur de notre ville, qui avait de nombreux contra-
dicteurs, est devenue, par suite d'études sérieuses faites par l'hono-
rable M. de Marqué, ex-capitaine de frégate, ancien commandant
de la marine à Stora, la seule acceptable.M. le Directeur de la compagnie du chemin de fer lui-même qui,
induit en erreur, s'était prononcé déjà pour Stora, se déclare aujour-d'hui le plus zélé défenseur du port devant Philippeville.
Séance du 16 mai 1859. Le Conseil municipal examine un mémoire
très volumineux, appuyé de plans et dessins, déposé par M.de Marquéet exposant les avantages de la construction du port devant Philip-
peville. Puis cette assemblée, considérant qne M. de Marqué a uti-
lisé, dans l'intérêt de la commune, les connaissances acquises parses longs services dans la marine et par un séjour prolongé dans les
différents ports de l'Algérie et particulièrement dans celui de Stora;
que son but est d'assurer à Philippeville les avantages considérablesrésultant d'un port devant la ville; que l'on ne saurait trop recon-
naître le généreux dévouement qu'il a apporté dans cette circonstance ;à l'unanimité, vote des remercîments à M. de Marqué.
Séance du 28 juillet 1859. Le Conseil, considérant que la création
d'un port devant la ville est d'une urgente nécessité, émet le voeu
de voir adopter, sauf les modifications qui pourraient être jugées
indispensables, le projet présenté par M. de Marqué, ancien directeur
du port de Stora.
Le journal Le Zêramna, du 9 février 1860, dit :
Il est urgent d'avoir un port devant la ville. Un homme dont Philippevilleconservera toujours le souvenir avec un sentiment de reconnaissance, s'occupe de
cette question avec une ardeur digne des plus grands éloges et du succès le plus
complet. M. de Marqué, oubliant les fatigues de sa carrière militaire, renonce au
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 253
repos que l'on aime assez généralement à son âge et poursuit avec une persistanceinfatigable la résiliation du voeu que nous formons tous : la création d'un port.Hier à Alger, aujourd'hui à Paris, M. de Marqué n'a pas cessé un instant de dé-fendre nos intérêts.
Séance du 2 mai 1860. Le Maire informe le Conseil que, sur lademande d'un grand nombre d'habitants, il a sollicité de l'autoritémilitaire l'autorisation de laisser placer des baraques en bois, pen-dant la saison des bains de mer, le long de la plage, dans la zonemilitaire située sous l'hôpital et les casernes. En réponse à cette
demande, le Ministre de la Guerre a donné l'autorisation nécessaire,sous la réserve de payer un droit de location du terrain occupé.
Un décret impérial du 14 août 1860 autorise les travaux de cons-truction du port devant notre ville et affecte à ces travaux unesomme de douze millions de francs, qui sera imputée sur les ressour-
ces créées par le budget extraordinaire de l'Algérie.Le 18 septembre 1860, notre port s'enrichit d'un joli petit vapeur
très coquet et très gracieux, de la force de vingt chevaux, destiné
à servir de remorqueur. Ce bateau, La Seyne, commandé par le
capitaine Peirin, doit faire aussi des voyages de plaisir sur la côte ;le premier voyage a lieu de Philippeville à Collo.
Les travaux du port sont adjugés à MM. Godbarge, Lescat et
Peccadeau, de Bordeaux, moyennant un rabais ! de 20 %, soit, sur
trois millions, un rabais de 600.000 francs.
Une grue pour l'embarquement et le débarquement des marchan-
dises est établie sur la place de la Marine par M. Girardo. Le tarif
est le suivant, y compris le transport en douane : caisse ou colis de
100 kilos, 0 fr. 10. Bordelaise, 0 fr.20. Demi-muid, 0 fr. 50. Boucaut,
0 fr. 70. Tout colis ne dépassant pas 25 kilos est débarqué gratuite-ment.
Séance du 15 novembre 1863. Le Maire expose que depuis quel-
ques années l'escadre d'évolution de la Méditerranée fait des haltes
dans les différentes rades de l'Algérie, mais qu'elle s'est toujoursabstenue de s'arrêter dans celle de Philippeville, sous le prétexte de
manque d'eau pour l'approvisionnement des bâtiments. Le Conseil,
considérant que les citernes, soit de Stora. soit de Philippeville, sont
en mesure de fournir toute l'eau nécessaire aux besoins d'une escadre,
émet le voeu que la rade de Philippeville soit comprise dans les dif-
férentes stations assignées à l'escadre d'évolutions de la Méditerranée.
Ce voeu est renouvelé le 9 avril 1868, le 11 juin 1870 et le 17 juin 1874.
254 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
En 1865, le directeur du port de Stora est M. Sieuzac et le sous-
directeur M. Castera.
La mise à l'eau du premier bateau construit à Philippeville a lieu
le samedi, 25 novembre 1871. Son constructeur est M. AdolpheAmante et celui qui n'a pas craint d'exposer ses capitaux pour inau-
gurer sur notre rade cette importante industrie est M. Raphaël Pina,
négociant. L'Ange Raphaël, c'est le nom de ce bateau, jauge 110
tonneaux.
Le vendredi, 16 septembre 1872, le quatre-mâts La Lorraine, de
la Société Générale, entre dans la darse du port de Philippeville.C'est la première fois qu'un navire d'un aussi fort tonnage vient
mouiller devant la ville.
Extrait du journal Le Zéramna du 15 mars 1873 :
Le vapeur Le Touareg est obligé de quitter son mouillage dans le port et dese rendre à Stora parce qu'un navire mouillé trop près de sa bouée menaçait
d'engager sa chaîne dans l'hélice.Il est difficile d'empêcher que de pareils faits se reproduisent, car le trafic de
notre place est si bien soutenu que notre port, tout rudimentaire qu'il est encore,donne abri derrière la grande jetée à une moyenne de vingt à vingt-cinq navires,
qui y opèrent continuellement, mais on pourrait remédier beaucoup plus facile-ment aux difficultés qui se présentent si la Direction du port se trouvait à Philip-
peville et non à Stora.
Depuis plus d'un an, tous les navires à voiles viennent mouiller devant Philip-
peville; la plupart des vapeurs y viennent aussi, car les courriers seuls et les
quatre-mâts séjournent à Stora. Les services des Douanes et de la Santé se sontvus contraints, par la force des choses, de venir s'installer à Philippeville ; laDirection du port, seule, n'a pas suivi ce mouvement.
Il semble cependant naturel que l'Inscription maritime et la Direction du port,alors surtout que celle-ci est appelée à appliquer un règlement concernant les
navires, se trouvent sur les lieux mêmes où les navires sont ancrés et non à quatrekilomètres de là.
Les capitaines marins se voient obligés de se déplacer, ainsi que leurs équipages,quand ils ont affaire à l'Inscription maritime, ce qui leur occasionne de grandespertes de temps et d'argent.
Cette réforme a déjà été demandée depuis longtemps par la Chambre de Com-
merce.
Séance du 26 août 1874. Le Conseil, considérant que, contrairement
aux affirmations du Ministre de la Marine, la rade de Stora présentedes garanties de sécurité puisqu'au mois de mai 1865, lors du voyagede Napoléon III , une escadre, composée de 20 vaisseaux ou frégates,a mouillé pendant plusieurs jours devant Philippeville, renouvelle
ses voeux précédents.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 255
A partir du 1er septembre 1874, deux feux fixes rouges sont allu-
més, pendant toute la nuit, dans les maisonnettes récemment cons-
truites, l'une sur la pointe du Château-Vert, l'autre sur le versantNord du Skikda.
Par décision gouvernementale du 18 décembre 1875, M. Lehagreest nommé capitaine du port. Il est remplacé, le 16 avril 1887, parM. Alfred Amoureux, lieutenant de vaisseau en retraite, capitainede port de 2e classe, nommé de 1re classe le 16 juillet 1895.
On démolit, le 28 février 1877, l'appontement qui avait jusqu'alorsservi pour l'embarquement et le débarquement des voyageurs.
A partir du 1er octobre 1879, le service de la santé est confié au
capitaine du port de commerce.
Le 2 novembre 1890, le cuicassé Duguesclin, avant-coureur de
l'escadre, mouille dans le port de Philippeville. Le lendemain y en-trent Le Vauban, vaisseau amiral, Le Bayard et le croiseur à grandevitesse Le Cécille, formant la 3e division de l'escadre, commandée parl'amiral O'Neill. Le 14 du même mois, le Conseil émet le voeu quela passe de la grande darse, par laquelle est entrée cette division
navale, porte à l'avenir le nom de passe « Amiral O'Neill ».
Séance du 24 septembre 1893. Le Conseil, émet le voeu que le portde Philippeville soit désigné comme port d'attache et de ravitaille-
ment de l'escadre russe de la Méditerranée. La séance est levée au
cri unanime de : Vive la France ! Vive la Russie !
Le nom de de Marqué est intimement lié à l'histoire de notre port.Né à Vigueron (Tarn et Garonne) le 11 février 1795, M. Léon de
Marqué est élève et aspirant de marine du 26 août 1811 au 21 août
1821, enseigne le 22 août 1821, lieutenant de vaisseau le 12 avril 1829,
capitaine de corvette le 21 décembre 1838, capitaine de frégate le 3
mai 1848, retraité le 30 avril 1852. Campagnes à la mer : en paix,15 ans, 6 mois et 51 jours ; en guerre, 2 ans, 14 mois, 29 jours. Che-
valier de la Légion d'honneur le 29 avril 1836 ; officier le 4 juin 1839.
M. de Marqué, étant lieutenant de vaisseau, avait été autorisé, en
1833, à faire l'essai d'un nouveau système de gréement en fil de fer,
qu'il a inventé et proposé pour les manoeuvres dormantes. Ce grée-ment a été appliqué au brick Le Lutin ainsi qu'à un autre brick de
20 canons, qui était commandé par le Comte de Gourdon. A bord du
Lutin, ce gréement s'est maintenu pendant toute sa croisière dans
256 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
un état très satisfaisant. M. le Baron Tupinier, conseiller d'Etat,membre de l'amirauté, directeur des ports, fit au Ministre de la
Marine, le 20 avril 1836, un rapport très élogieux sur M. de Marquérelativement à son invention si utile.
C'est à ce brave marin, à cet infatigable officier, que nous devons
notre port. Aussi sa mort, survenue le 2 avril 1860, fut pour notre
ville un deuil général. Le journal Le Zéramna, du 10 avril 1860,
s'exprime ainsi à ce sujet :
L'annonce d'un bien triste événement est venue consterner notre ville. Le braveM. de Marqué, capitaine de frégate retraité, défenseur zélé et infatigable desintérêts de notre localité, a cessé d'exister.
La mort est venue le frapper à Paris, où il s'était rendu dans le seul but de
soumettre en haut lieu l'exposé de son intelligent travail de projet de port devant
Philippeville.C'était son idée fixe, que son dévouement désintéressé lui avait fait poursuivre
et mûrir à force d'études ; travail expérimenté d'un hydrographe consommé, quieut, pour ainsi dire, l'heureux effet de changer l'intention qu'on avait alors d'éta-blir le port devant Stora.
Aussi attendait-on son retour avec une légitime impatience et déjà, pour fêter
dignement ce moment tant désiré, les habitants de notre ville lui préparaient de
grandes ovations.M. de Marqué n'est plus ! Son noble coeur a cessé de battre, et nous ne pouvons
que joindre nos vifs et sympathiques regrets au désespoir de sa famille.
Séance du 23 mai 1899. Le Conseil approuve et appuie le voeu sui-
vant de la Chambre de Commerce : « Que l'Etat entretienne près du
collège, à dater du 1er octobre 1899, un professeur spécial d'hydro-
graphie dans les conditions appliquées en France aux institutions de
ce genre ressortissant à l'administration de la Marine ». Le 23
décembre suivant, l'assemblée municipale vote les crédits nécessaires
à la création d'une école d'hydrographie, que le Ministre de la Marine
avait décidée par arrêté du 20 octobre 1899. Ce ministre désignaM. le Lieutenant de vaisseau en retraite Achille Car pentier comme
directeur de la nouvelle école.
Le but de l'école d'hydrographie est de donner aux élèves, qu'ilssoient débutants ou déjà marins, l'instruction voulue pour devenir :
soit élèves de la marine marchande, soit maîtres au cabotage, soit
officiers de la marine marchande, soit enfin capitaines au long cours
avec brevet simple ou avec brevet supérieur.Bien qu'encore dans sa période de formation, l'école a déjà fait
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 257
recevoir deux élèves de la marine marchande et un capitaine au longcours.
L'enseignement maritime y est donné le matin, tandis que le soir
l'enseignement y est purement mathématique : arithmétique, algèbre,géométrie, mécanique, trigonométrie, etc. Tous ces cours sont gra-tuits.
Le Département de la Marine entretient sur le littoral de la Métro-
pole et sur les côtes d'Algérie-Tunisie une école de pilotage sur unnavire de l'Etat. Cette école, destinée à former des pilotes de la flotte
militaire, est installée, pour le littoral algérien, sur le torpilleur dehaute mer Aventurier, avec le torpilleur Doudart de Lagrée, comme
annexe. Le port d'attache, précédemment à Bizerte, est transféré à
Philippeville, le 1er janvier 1903.
Les élèves pilotes, au nombre d'une vingtaine, occupent les locaux
du poste des torpilleurs, dans l'intervalle de leurs tournées à la mer.
M. Pierre-Louis Colson, lieutenant de vaisseau, commande L'Aven-
turier et dirige l'école. L'officier en second est M. Fernand Douxami,
enseigne de vaisseau. -
Les attributions de l'Inscription maritime comprennent : l'inscrip-tion et la levée des marins du commerce pour l'armée de mer; la
police de la navigation ; la surveillance des pêches; l'administration
des naufrages et épaves; les pensions aux marins du commerce, etc.
Ce service a été dirigé par des officiers du commissariat de la
Marine, détachés des ports militaires, jusqu'au mois d'octobre 1902.
Un décret du 7 octobre 1902 a décidé que les commissaires reste-
raient exclusivement affectés au service militaire des arsenaux et des
bâtiments de la flotte. Un corps d'officiers, avec le titre d'adminis-
trateurs de l'Inscription maritime, a été créé pour diriger les quar-tiers.
Le quartier d'Inscription maritime de Philippeville a été installé
en 1875.
Voici la liste des commissaires depuis sa création :
MM. Abel Duchenne, sous-commissaire ..... 1er novembre 1875.
Théodore-Charles de Kérimel de Ker-
veno février 1880.
Michel-Marcelin Bérard..... . 25 décembre 1882.
34
258 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
MM. Lucien Faure 20 juin 1886.
Jules-Adolphe Lemoine 23 janvier 1893.
Paul-Charles Layrle 14 mai 1895.
Claude-André Olivier, sous-commissaire, 14 mai 1898; passele 1er décembre 1902 dans le corps des administrateurs de
l'Inscription maritime et maintenu à son poste.
Pendant l'été de 1860, des baraques se construisent sur la plagesituée en dessous de l'hôpital militaire et de la caserne de France,
pour servir de cabines de bains. Dix ans plus tard, cette plage est
abandonnée; la vogue est pour celle de Douïra, où M. Lesueur a
installé des cabines très confortables.
Aujourd'hui les baigneurs, n'ayant que l'embarras du choix, se
portent vers la plage de Stora, sur celle du Château-Vert et vers
l'îlot des Chèvres, qui semble vouloir devenir un bain très fréquenté.En cet endroit, en effet, à 800 mètres de la ville, dans la direction
de l'embouchure du Saf-Saf, existent deux belles plages : la première,
près de l'enracinement de la jetée du port; la seconde et la plus
agréable, à 200 mètres plus loin, au lieu dit l'Ilot. Cest un endroit
admirable et pittoresque, plein de fraîcheur et d'ombre. Une source,sortant sous des figuiers, se perd dans le sable du rivage; plus loin
on se repose sous des grottes vraiment curieuses. Une presqu'île ter-
mine la plage, ajoutant à l'ensemble du tableau un coup d'oeil im-
prévu. Quel mélange de couleurs dans ce ravissant paysage.depuisl'or des rayons du soleil jusqu'à l'azur des flots calmes du grand lac
méditerranéen !
On ne pouvait arriver à ce délicieux endroit qu'après des efforts
incalculables, en sautant de rocher en rocher, au grand risque de
prendre un bain imprévu et involontaire. Actuellement un chemin
de six mètres de large y mène facilement; c'est un de nos concito-
yens, M. Henry Bousquet, qui, propriétaire des carrières de pierressituées au bord de la mer, a eu l'heureuse idée de le créer pour son
exploitation et l'entretient en bon état. Ses travaux sont les premiers
jalons de la future route du port à l'embouchure du Saf-Saf, indi-
quée sur les plans de la commune. Nul doute que, dans un temps
peu éloigné, ces endroits charmants ne se couvrent de petites villas.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 259
L'Avant-Port
Nous devons à l'obligeance de M. Daujon, ingénieur en chef des
Ponts et Chaussées, les renseignements techniques suivants sur notre
port :GÉOGRAPHIE
Le port de Philippeville, situé par 4° 34 de longitude Est et 36° 50 de latitudeNord (clocher de l'église), est de formation artificielle et se trouve dans la partiela plus méridionale du golfe du même nom.
Ce golfe, compris entre la pointe Tasrah, ou Esrah, et le cap de Fer, a 17 millesd'ouverture sur 9 milles de profondeur ; il présente la forme d'un croissant dontla concavité regarde le Nord.
La côte, depuis la pointe Tasrah, extrémité Ouest du golfe, jusque vers le fond
de ce dernier, se dirige à peu près vers le Sud-Est et, dans ce parcours d'environ10 kilomètres, les falaises y dominent, sauf sur quelques points où de petites
plages de sable se sont créées dans les sinuosités du rivage : la plage des Agmès,ou Grande plage, d'où s'extrait un sable de qualité absolument supérieure, et l'anse
de Stora, où se trouve une plage fréquentée par les baigneurs, qui sont toutes deux
dans cette partie de la côte. Divers îlots rocheux (îles de Srigina, du Lion, de la
Macaque, des Singes), se trouvent, en outre, à proximité de la terre et paraissentdes lambeaux détachés des falaises voisines à la suite d'érosions successives, exer-
cées par les eaux de la mer.
Philippeville est placée à l'embouchure du Saf-Saf, sur les versants d'un col qui
sépare la croupe du Bou-Yala des mamelons du Skikda.
HYDROGRAPHIE
Devant la côte de Philippeville et sur une largeur de 400 mètres environ, le fond
du golfe est fermé par un banc rocheux et inégal, dont les profondeurs croissent,à partir du bord de la mer, jusqu'à dix ou douze mètres. Au Nord de ce plateau
sous-marin, dont on aperçoit çà et là, tout près du rivage, quelques points sail-
lants, régnent surtout des fonds de sable plus ou moins vaseux, mais les grandes
profondeurs n'apparaissent guère qu'au Nord de l'entrée du golfe; ainsi, la lignedes fonds de 100 mètres passe à 4 milles au Nord du port et celle des fonds de 200mètres à 3 milles plus au Nord.
260 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
La baie de Philippeville est battue en plein par toutes les aires du vent du large-
comprises entre le N.-O. et le N.-E. et n'offre, par conséquent, aucun mouillage
assuré contre les gros temps de l'hiver.
Cependant, en 1883, l'escadre de la Méditerranée est venue mouiller à l'Ouest
d'une ligne joignant l'îlot de la Macaque au musoir de la jetée de 1.400 mètres.
MÉTÉOROLOGIE
Pendant l'hiver, les vents dominants sont ceux de l'Ouest et, pendant l'été, ceux
de l'Est.
Depuis le coucher du soleil jusqu'à neuf heures du matin, la brise souffle de terre,venant du Sud ; elle souffle de mer, c'est-à-dire du Nord, pendant le reste de la
journée. Ce phénomène a lieu avec une grande régularité à Philippeville, même
pendant l'hiver.
Les vents les plus dangereux sont ceux du Nord et du Nord-Est, parce qu'ilsarrivent directement sur le fond de la baie. Il est heureusement rare que les vents-
de cette partie soient très violents.
Le golfe est partiellement abrité contre les grandes vagues du large et. le plus
souvent, il présente un calme relatif pendant que les tempêtes, même violentes,
S'élèvent dans la Méditerranée. Mais il reçoit aussi, dans certains cas assez rares
qui surviennent à de longs intervalles, les lames de la pleine mer avec toute leur
hauteur et toute leur puissance.Bien avant la création du port actuel, des désastres terribles avaient jeté un triste
renom sur le golfe de Philippeville. C'est tout le contraire aujourd'hui.
MARÉES
Les marées sont peu sensibles dans le golfe de Philippeville ; les oscillations-
maxima observées sont de 0m, 40 environ au-dessus ou au-dessous du zéro moyen,ce qui porte leur amplitude totale maxima à 0m, 80 environ. En général, les eaux
montent par les vents de S.-O. et quand le baromètre baisse ; elles descendent parles vents de N.-E. et quand le baromètre monte.
ATTERRAGES
L'atterrage est facilité par le relief de la côte, car de nombreux sommets de-
montagnes, très rapprochées de la mer, se distinguent aisément les uns des autres.Ce sont d'abord, dans l'Ouest, les sommets de Bougaroni, dont le point culminant,le Djebel Goufi, a 1.186 mètres d'altitude, puis, entre Collo et Philippeville, ceux
de Meurn Aïcha (564 mètres) sur le méridien de Collo, de Sidi Ali (548 mètres) sur-monté d'un marabout, de Djebel Bellout (560 mètres). A l'Est de Philippeville on
aperçoit le Filfila, le Djebel el Allia (661 mètres), le Coudiat Kobercha (564 mètres)et le massif du cap de Fer ; parfois, de jour, on distingue nettement le front Nordde la carrière de Skikda. .
De nuit, les navigateurs sont guidés par les feux suivants : phare du cap Bouga-roni, feu fixe blanc ; phare du cap ce Fer, feu fixe blanc, varié, de 30; en 30
secondes, par des éclats alternativement blancs et rouges ; île Srigina, feu fixe
blanc; ilôt des Singes, feu fixe blanc; bouée lumineuse de la jetée du Nord, feufixe rouge ; bouée lumineuse de la jetée du Château-Vert, feu fixe vert ; Château-
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 261
Vert, feu fixe rouge ; Skikda, feu fixe rouge. Des lanternes vertes et rougeséclairent dans le port l'entrée même de la darse.
PORT
Le port couvre la longueur de côte qui s'étend entre la pointe de Skikda à l'Estet celle du Château-Vert à l'Ouest.
Il est ouvert à l'Ouest et protégé par une jetée longue de 1.625 mètres, enracinéeà la pointe de Skikda.
Il comprend deux parties :
1° La darse, à l'Est, qui mesure 600 mètres dans sa plus grande longueur sur140 à 380 mètres de largeur et couvre une surface de 19 hectares environ (7 hec-
tares, 45 ares, si l'on considère seulement les fonds de 10 mètres au moins) ;2° L'avant-port, limité à l'Ouest par la jetée du Château-Vert, longue dé 300
mètres, qui mesure 440 mètres de long sur 600 mètres de large et qui abrite une
surface de 32 hectares environ.
La passe de l'avant-port, entre l'extrémité de la jetée du Château-Vert et la grandejetée, a 300 mètres de largeur par des fonds de 15 mètres au moins ; la passed'entrée de la darse comprise entre les traverses Nord et Sud a une largeur de 100
mètres par des profondeurs de 12 mètres.
QUAIS
Les navires trouvent dans l'avant-port, le long des traverses Nord et Sud, des
quais offrant des hauteurs d'eau de 5m, 60à 6 mètres.
Dans la darse, les fonds sont de 6 mètres le long du quai Est de la traverse
Sud, du quai Sud, et sur 150 mètres du quai Sud-Est. Ils sont de 7m,40 au moins
sur le reste de la longueur de ce dernier et le long des quais Est et d'entretien.
Mais, à l'intérieur de la darse, les fonds atteignent jusqu'à 15mètres en approchantde la grande jetée.
Les quais sont arasés à lm,60 au-dessus du niveau moyen des eaux et offrent une
longueur totale de 1.665 mètres environ.La darse est aménagée pour recevoir les navires de guerre du plus fort tonnage.
Une division de l'escadre composée de trois cuirassés et d'un croiseur peut s'amar-
rer sur les corps morts, l'arrière à la grande jetée, indépendamment des contre-
torpilleurs et des torpilleurs qui peuvent s'amarrer à quai sans gêner le commerce.
Les travaux en cours permettront à une deuxième division de s'amarrer dans
l'avant-port,
262 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
DESCRIPTION TECHNIQUE
GRANDE JETEE
La grande jetée, qui constitue l'ouvrage le plus important qu'ait nécessité la
création du port de Philippeville, ne devait, suivant les prévisions premières,n'avoir que 1.400 mètres de longueur ; c'est sur ces bases, d'ailleurs, qu'elle fut
construite de 1860 à 1884 par des fonds de 15 à 20 mètres.
L'expérience démontra vite son insuffisance et, de 1891 à 1897, les Ingénieurs
la prolongèrent encore de 225 mètres pour l'amener au point où elle est aujour-d'hui.
La construction de cet important ouvrage a donné lieu à une lutte opiniâtreentre les Ingénieurs, qui s'efforçaient de le maintenir contre la mer, et celle-ci
qui, furieusement soulevée par les gros temps de Nord-Est, s'acharnait à la
détruire.
La victoire est enfin restée aux Ingénieurs et le port est maintenant doté d'une
défense contre laquelle les mers les plus démontées peuvent lutter sans espoir de
succès.
JETÉE DU CHATEAU-VERT
La jetée Ouest ou du Château-Vert, commencée en 1877, a été finie en 1882; elle
présente une longueur de 400 mètres environ et est composée uniquement d'enro-
chements naturels.
QUAIS
Les quais ont été commencés en 1881, fondés sur quatre assises de blocs arti-
ficiels de 10 mètres cubes superposés et reposant, à 6 mètres au-dessous de la mer,sur un massif d'enrochements.
AMÉNAGEMENT DES TERRE-PLEINS
Les terre-pleins ont été exécutés au fur et à mesure de l'avancement des travaux,à l'aide des détritus de la carrière de Skikda, laquelle produit environ deux volu-
mes (apparents) de détritus pour un volume (plein) de blocs ou moellons.
VOIES FERRÉES
Les voies ferrées desservant les quais ont été établies entièrement aux frais de
la Chambre de Commerce. Les travaux ont commencé en 1882; au 31 décembre
1900, 4.700 mètres de voies étaient livrées à l'exploitation.
APPROFONDISSEMENT DE LA GRANDE DARSE
Ces travaux ont duré de 1887 à 1895.
TRAVAUX DIVERS
Sur l'initiation prise par les Compagnies de navigation et pour donner satisfac-
tion aux nombreux travailleurs des quais, une conduite alimentant en eau douce
les quais et les terre-pleins du port a été établie en 1891.
HISTOIRE DE PHIL1PPEVILLE 263
Des coffres d'amarrage sur blocs-ancres en maçonnerie ont été établis tant dans
la darse que dans l'avant-port, pour permettre l'appareillage ou l'accostage des
navires.
L'éclairage des quais et des terre-pleins est assuré par des réverbères à gaz de-
puis 1895.
DÉCISIONS LES PLUS IMPORTANTES
Les travaux de construction du port de Philippeville ont été déclarés d'utilité
publique par décret du 28 juillet 1860, sur le vu d'un avant-projet, s'èlevant à 12
millions. Ces travaux ont été exécutés par deux entreprises :
La première, adjugée le 20 février 1861 à MM. Godbarge, Lescat et Peccadeau,sur le vu d'un premier projet partiel s'èlevant à 3 millions, fut réglée à la somme
de 2.826.547 fr. 01.
La deuxième entreprise fut adjugée le 18 février 1867 à M. Castor, sur le vu d'un
projet atteignant 3.800.000 fr.; des travaux supplémentaires s'y agrégèrent succes-sivement dans la suite et c'est en définitive M. Castor, ou plutôt ses substitués,MM. Hersent et Lesueur (25 janvier 1875), qui achevèrent le port.
La dépense totale autorisée, qui était fixée à 12 millions par le décret de 1860,fut successivement élevée à 13 millions par décision du 22 décembre 1876 et à
16.500.000 fr. par décision du 17 décembre 1878. Les décisions des 25 janvier et 23
avril 1890, qui autorisèrent le prolongement de la grande jetée sur 225 mètres,
majorèrent encore le chiffre des dépenses autorisées de 2.070.000 fr.; enfin diverses
décisions ultérieures sont venues encore augmenter ce dernier chiffre.
DÉPENSES FAITES
On peut estimer comme suit les dépenses faites à la date du 31 décembre 1900
pour la création du port de Philippeville :
Jetée Nord 12.933.223 08— du Château-Vert 415.139 42
Traverse Sud 609.790 92
- Nord 282.766 40
Terre-pleins 2 958.852 16
Quais (non compris ceux des traverses) 1.033.085 98
Voies ferrées 158.173 45
Approfondissements et dérochements en dehors des quais 603.679 51
•Conduite d'eau 24.000 00
DÉPENSESà l'entreprise 19.018.710 92
Dépenses régielles, dont 122.000 fr. pour dérochements 1.129.743 06
Indemnités diverses 203.598 37
TOTAL 20.352.052 35
Si l'on ajoute à ces chiffres :
Ie Les travaux autorisés par la loi du 24 juillet 1900 (prolonge-ment de la jetée du Château-Vert, construction d'une nou-
A reporter 20.352.052 35
264 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Report 20.352 , 052 35
velle traverse Nord, dérochements de l'avant-port, aménage-ment des terre-pleins, outillage, hangars, etc.) 2.000.000 00
2° La dépense prévue pour la réfection du quai Est 245.000 00
3° Le montant des travaux en cours sur la grande jetée pour
réparer les dégâts causés par la tempête de janvier 1900
(entreprise Gillot) 250.000 00
On arrive à un total de 22.847.052 35
Soit à 23 millions, c'est-à-dire au double de la dépense primitivement prévue.
La Chambre de Commerce a participé aux dépenses antérieures au 1erjanvier1901 pour 3.484.236 fr. 26, soit pour 17 % environ. Les lois et décrets des 17
décembre 1875, 3 février 1890 et 23 février 1892 l'ont d'ailleurs autorisée à perce-voir les droits de tonnage ou de péage nécessaires au paiement des annuités des
emprunts qu'elle a dû contracter.
ÉTAT ACTUEL
L'espace abrité par la grande jetée, longue de 1.625 mètres, est composée de
deux parties :
1° La darse, à l'Est, mesurant 600 mètres dans sa plus grande longueur, sur 180
à 380 mètres de largeur, et couvrant une surface de 19 hectares environ (7 hectares45 si l'on considère seulement les fonds de 10 mètres au moins) ;
2° L'avant-port, limité à l'Ouest par la jetée du Château-Vert, mesurant 440mètres de long sur 600 mètres de large et couvrant une surface de 32 hectaresenviron.
La passe de l'avant-port, comprise entre l'extrémité de la jetée du Château-Vertet la grande jetée, est de 300 mètres environ, par des fonds de 15 mètres au moins ;la passe d'entrée de la darse, comprise entre les travaux Nord et Sud, a une largeurde 100 mètres et offre des profondeurs de 12. mètres.
Les plus grands navires peuvent évoluer facilement dans l'avant-port et dans ladarse. Celle-ci voit, chaque année, s'y amarrer, bout à quai le long de la grandejetée, une division de l'escadre de la Méditerranée comprenant au moins trois
grands cuirassés.
QUAIS
Les navires trouvent dans l'avant-port, le long des traverses Nord et Sud, des
quais offrant des hauteurs d'eau de 5m,60 à 6 mètres. Dans la darse, les fonds sontde 6 mètres le long du quai Est de la traverse Sud, du quai Sud et sur 150 mètresdu quai Sud-Est; ils sont au moins de 7m40 sur le reste de la longueur de ce der-nier et le long du quai Est et du quai d'entretien. Mais, à l'intérieur même de la
darse, les fonds atteignent jusqu'à 15 mètres en approchant de la grande jetée.Le quai de la traverse Nord est réservé aux torpilleurs et le quai d'entretien au
service des Ponts et Chaussées. La longueur des quais réservée aux opérationscommerciales est de 1.393m, 70 sur une longueur totale de 1.664m,70.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 265
TERRE-PLEINS
Les terre-pleins ont une surface totale de 26 hectares 69 ares 87 centiares,savoir :
Autour de la darse 21 hectares 91 ares 79 centiaresAu Sud de l'avant-port 4 — 78 — 08 —
OUTILLAGE
Le port n'est pas encore doté d'outillage public, ni de hangars ; mais la Chambrede Commerce s'en préoccupe et a les ressources nécessaires pour les installer.
Quand les navires ne peuvent faire leurs opérations avec les moyens du bord,ils ont recours actuellement aux entreprises d'acconage, au nombre de trois et quidisposent de 16 chalands pouvant porter chacun de 20 à 50 tonnes et de deux
pontons-bigues de 12 à 15 tonnes.
OUVRAGES ACCESSOIRES
Il n'existe pas de forme de radoub ; on a seulement construit dans l'angle Sud-Ouest de l'avant-port un talus de halage, de 115 mètres de long sur une profondeurmoyenne de 18 mètres.
INSTALLATIONS POUR LA PÊCHE
Un bateau garde-pêche, Le Chéliff, est attaché au port de Philippeville ets'amarre près de la traverse Nord.
INSTALLATIONS DIVERSES
Sur la traverse Nord sont installés des établissements appartenant à la Marine
de guerre et pouvant, le cas échéant, être utilisés pour une station de torpilleurs.La Marine de guerre possède de même sur les terre-pleins un parc à charbon.Le service sanitaire dispose sur les terre-pleins d'un parc à bestiaux de 1 hec-
tare 20 ares, muni de tous les aménagements nécessaires.
Enfin le service du port possède un bureau (santé) et le service des douanes un
bâtiment servant de bureau et de corps de garde.
SERVICES RÉGULIERS DE VOYAGEURS ET DE MARCHANDISES
Jusqu'en 1864, les navires mouillaient tous à Stora. Au commencement de 1864,les petits navires purent venir s'abriter derrière la jetée de la petite darse provi-soire de l'entreprise et y effectuer leurs opérations sur le bord des quais. Depuis
1872, tous les navires mouillent derrière la grande jetée.
Après la conquête, 1838, le service de transports des dépêches et des voyageursde Stora à Marseille, et vice-versà, fut d'abord assuré par la Marine militaire ;
mais, au commencement de 1845, l'Etat adjoignait à ses frégates une ligne de
correspondance confiée à des vapeurs du commerce et ce fut le 11 janvier. 1845
que parut pour la première fois devant Stora un vapeur dn commerce affecté à la
correspondance, L'Elbe. Il y eut, à cette occasion, fête à Philippeville.Le trajet de Stora à Marseille se faisait alors en 55 ou 60 heures.
Le service nouveau fut tout d'abord assuré par la Cie Bazin et Périer, de Mar-
35
266 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
seille, puis par la Société Arnaud, Touache et Cie, plus connue sous le nom de Cic
de Navigation mixte ou Cie Touache.
Assurèrent ensuite successivement le service :
La Cie Impériale des Messageries maritimes, du 1ermai 1853 au 1erjanvier 1855;La Cie des Services maritimes des Messageries Impériales, à partir du 1erjanvier
1855;La Cie Valéry, à partir de 1870 ;La Cie Générale Transatlantique, à partir de 1880.
Le service côtier a été assuré par les frégates de l'Etat jusqu'en 1867 ; les com-
pagnies concessionnaires qui précèdent l'assurèrent ensuite.Il faut signaler d'ailleurs que, parallèlement aux compagnies faisant le service
postal, diverses compagnies à services réguliers prirent successivement naissance.
La Cie Touache fait des services réguliers entre Marseille et Philippeville depuis1852. En 1865 apparut la CieGénérale des Transports maritimes à vapeur ; en 1874,la Ligne Péninsulaire et Algérienne, devenue plus tard la CieHâvraise-Péninsulaire ;en 1874 également, la Cie des bateaux à vapeur du Nord ; en 1880, la Cie Caillol et
Saint-Pierre; en 1892, la Cie Schiaffino, devenue ensuite la Cied'Hauteville, Jobez,Mathieu et Cie; en 1894, la CieProsper Durand; en 1899, la Cie côtière Achaquefils ; en 1901, la Cie Franco-Tunisienne.
Les compagnies de navigation fréquentant actuellement d'une façon régulièrele port de Philippeville sont les suivantes :
Cie Générale Transatlantique, avec 4 départs hebdomadaires.Ci0 Touache, avec 1 —
Société Glede Transports maritimes, avec 3 —
Cied'Hauteville, Jobez, Mathieu, avec 4 —
Cie Achaque fils, avec .... 2 —
Cie Prosper Durand, avec 2 —
RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX
Le mouvement commercial du port de Philippeville a atteint 220.000 tonnes en
1899, mais il est descendu, en 1900, à 153.000 tonnes. Les opérations des naviresse font bord à quai.
L'entrée du port est des plus faciles et fait de ce dernier un excellent refuge.Les navires à vapeur y entrent sans grande peine. Les voiliers ne rencontrent
quelque difficulté que par les vents du N.-N.-E., lesquels sont d'ailleurs fort rares.
Mais, même par ces vents, après avoir doublé le musoir de la jetée, en se lançantdans le vent, ils trouvent derrière celle-ci un abri suffisant pour attendre des
secours, s'il y a lieu.Les instructions nautiques de 1872 sur les côtes d'Algérie avaient cependant
présente Philippeville comme détestable; l'entrée était indiquée comme fort
dangereuse et il était conseillé aux navires, en cas de mer N.-E., d'éviter le portet d'aller mouiller dans le N.-O., à Stora. Ces indications pessimistes ont été biendémenties par la suite. Le 4 novembre 1890, une division navale de 4 cuirassésvient mouiller dans le port et depuis il en est généralement de même chaqueannée.
Aussi, le 10 juillet 1891, le Ministre de la Marine demandait-il à son collègue
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 267
des Travaux publics d'étudier divers travaux dans le port de Philippeville en vue
d'y faciliter le séjour des bâtiments de guerre. Ces ouvrages ont été exécutés et,duns le but de permettre à une seconde division de l'escadre de stationner dans
l'avant-port, celui-ci va, en effet, être fermé davantage et déroché jusqu'à (— 10
mètres) sur une partie de son étendue.
PRINCIPALES RELATIONS COMMERCIALES PAR MER ET PAR TERRE
Le mouvement commercial du port se fait presque tout au cabotage ; le longcours y entre pour une proportion infime. Le pavillon français seul couvre les
95 centièmes des bâtiments et conserve la même proportion dans le tonnage de
jauge.Par terre, la région naturelle desservie par le port de Philippeville, réserve faite
de la région l'avoisinant, s'étend principalement au Sud du parallèle de Constantine;elle va jusqu'au désert et est limitée à l'Est au méridien d'Aïn-Beïda ; à l'Ouest,au méridien de Sétif.
PÊCHE
Dans la baie de Philippeville, on pratique la grande et la petite pêches. La grande
pêche est faite avec le filet « boeuf » et la petite avec les autres genres de filets et
aussi avec casiers, palangres, lignes, etc.; mais, en réalité, c'est à l'aide de filets
que les pêcheurs prennent la très grande majorité des poissons.Le décret du 2 juillet 1894 qui réglemente la pêche en Algérie et celui du 5 du
même mois, spécial au quartier de Philippeville, divisent les filets en trois catégo-ries : 1° filets fixes, 2° filets flottants, 3° filets traînants.
FILETS FIXES
Par filets fixes on comprend ceux qui sont fixés au bord de l'eau au moyen de
poids ou de piquets et qui, une fois en place, conservent leur position jusqu'aumoment de la relève. Il existe à Philippeville 33 engins de cette sorte, ayant cha-
cun une longueur moyenne de 150 mètres et une valeur de 250 fr. environ.
FILETS FLOTTANTS
Ces filets sont ainsi nommés en raison de ce qu'on les immerge dans les couches
supérieures de la mer et qu'ils ne touchent jamais le fond. Dans ce type de filets
rentrent le sardinal et le lamparo.Le sardinal est un filet droit fait de diverses pièces de 120 à 130 mètres de lon-
gueur chacune, assemblées en tel nombre qu'il convient suivant la largeur de
l'espace à barrer, lequel dépasse le plus souvent un kilomètre. Il y a ici 645 pièces
ou lés de ce genre, coûtant en moyenne 100 fr. chaque.Le lamparo ou rets volant est un filet dont la retombée va en croissant de ses
extrémités à son milieu, où elle atteint de 15 à 20 mètres, et qui est construit de
telle façon que le développement de la longueur, munie de flotteurs, soit supérieur
d'une quantité déterminée à celui de la partie lestée. Ce filet a une longueur de 180
à 200 mètres. Il existe à Philippeville 40 engins de cette espèce.
FILETS TRAÎNANTS
Le décret du 5 juillet 1894 divise ces filets en deux séries : la première série
268 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
comprend ceux qui sont traînés au fond, à la remorque d'un ou de plusieurs bateaux
(filets boeufs) ; dans la deuxième rentrent ceux qui sont halés à bras sur le rivagedu large vers la terre (boùliche) et ceux qui, coulés au fond, sont immédiatementramenés à la surface (tartanon ou tartanelle).
Le boeuf est un filet composé d'une poche de 10 mètres de long et de 4 à 5 mè-tres d'ouverture, accompagnée de deux ailes symétriques de 20 mètres environ de
longueur chacune, ce qui donne pour le filet déployé une longueur totale de 45mètres environ. Les ailes de ce filet sont traînées chacune par un bateau à voiles,
auquel elles sont reliées par des câbles de 3 à 400 mètres de long ; la partie lestéelaboure le fond et le dévaste. Il existe ici 5 couples de bateaux montés par 150
pêcheurs, munis de 25 filets. Chacun de ceux-ci vaut, avec les câbles de traction,de 1.000 à 1.200 fr. Les bateaux affectés à cette pêche jaugent 30 tonneaux en
moyenne et valent de 6 à 7.000 fr. l'un.Le tartanon ou tartanelle est un filet de 50 à 60 mètres de longueur environ,
composé, comme le boeuf, d'une poche et de deux ailes, mais ici la poche est pluslarge que profonde. Il existe à Philippeville 25 filets de ce genre, valant 150 fr.
l'un, en moyenne.La bouliche ou senne est un filet du même genre que le tartanon, mais de bien
plus grandes dimensions. Il y a à Philippeville 4 grandes sennes de 200 mètres de
longueur chacune et 19 petites sennes de 120 mètres. La valeur des premières estde 500 fr. et celle des autres de 200 fr. environ.
ÉPOQUES DES DIVERSES PÊCHES
La pèche de tous les poissons de mer est permise en tout temps, de jour et denuit ; celle des coquillages et des crustacés est seule interdite du 1eroctobre au 30novembre inclus. De plus, l'usage du filet boeuf est défendu du 1erjuin au 31 aoûtet ces filets ne peuvent jamais être utilisés en dedans d'un alignement allant del'île de Srigina à la maison Cabaroc, sur le flanc du Filfila. Ils ne peuvent être
employés qu'à partir des fonds de 40 mètres et en tirant vers le large. L'usage dela bouliche et du tartanon est interdit du 1ermars au 31 mai inclus.
La loi du 1er mars 1888 a interdit au pavillon étranger la pêche dans les eaux
territoriales, soit à moins de 3 milles du rivage.
PRODUITS DE LA PÊCHE
Les principales espèces de poissons que l'on rencontre dans le golfe de Philip-peville sont les suivantes :
Bar (ou loup), méro (ou mérou), rouget (ou surmulet), vive (ou araignée), gron-din, rascasse (ou scorpène), maquereau, thon, bonite, pilamide, saurel, ombrine,serre, daurade, sargue, pagre, pageau, marbré, sparaillon, bogue, oblade, saupe(ou juif), muge (ou mulet), sauclet (ou prêtre), vieille, goujon, allache (ou alose
finte), anchois, sardine, capelan, merlan, sole, turbot, aiguille, congre, murène,ange, requin, roussette, chien de mer, raie, anguille, moustelle, brochet, saint-
pierre et calmar (ou encornet).Comme crustacés, on trouve les crabes, crevettes (ou chevrettes), langoustes,
cigales, araignées de mer, oursins et tortues de mer ; comme mollusques, les clo-
visses, arapèdes, haricots de mer, poulpes (ou pieuvres), moules, sèches et huîtres.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 269
PERSONNEL AFFECTÉ A L'EXPLOITATION ET AUX TRAVAUX
DU PORT
TRAVAUX
Philippeville est le siège de la résidence de l'Ingénieur en chef de la circons-
cription de Philippeville et du service maritime et de l'Ingénieur ordinaire de cetarrondissement et du service maritime.
POLICE ET EXPLOITATION COMMERCIALE
Le service spécial de police et d'exploitation commerciale comprend : 1 capitaineet 2 maîtres de port ; 1 chef canotier et 2 canotiers.
SERVICE SANITAIRE
Ce service est dirigé par un docteur en médecine, qui est directeur de la santé ;il est assisté par le capitaine et les maîtres du port.
Une étuve à désinfecter, système Geneste-Herscher, existe au bureau de la santé.Un vétérinaire de la localité procède à la visite du bétail avant son embarquement.
PILOTAGE
Le service du pilotage est organisé ici depuis le 1er juillet 1875. Il comprend :1 chef pilote, 3 pilotes et 8 canotiers.
INSCRIPTION MARITIME ET POLICE DE LA PÊCHE
Philippeville est le siège de la résidence d'un commissaire de la Marine, quiexerce les fonctions de commissaire de l'Inscription maritime. Un bateau à vapeur,Le Chéliff, assure, sous ses ordres, la surveillance de la pêche.
SURVEILLANCE DES BATEAUX A VAPEUR
Une commission de surveillance des bateaux à vapeur, dont l'Ingénieur en chef
est président, existe au port de Philippeville et fonctionne régulièrement.
Nous n'avons fait que résumer la remarquable notice de M. Auguste
Daujon, Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, sur le port de
Philippeville. Elle est si intéressante et si bien documentée que nous
aurions voulu la reproduire in-extenso, mais le cadre de notre
volume ne nous le permettrait pas ; nous le regrettons fort.
Si notre port est l'un des plus beaux et certainement le plus sûr
de tous les ports algériens, c'est grâce à des hommes comme
M. Daujon et ses prédécesseurs: MM. Gay, Salva, Pelletreau,
Ribaucour et Imbert. Il est juste de le constater ici.
XXXI
PONTS ET CHAUSSEES
Nous avons rencontré dans nos recherches quelques noms defonctionnaires des Ponts et Chaussées :
1842. MM. Joseph Béchaux, régisseur-comptable.Bonnet, conducteur.
1844. Félix Podestal, piqueur.
Adolphe Fesq, employé.1849. Lionnet, ingénieur ordinaire.
Gillet, conducteur.
1857. De Castelet, employé.1858. De Larras, ingénieur.1864. Martin Beltçaguy, piqueur, aujourd'hui sous-in-
génieur.
Liste des Ingénieurs en Chef
MM. Capelle 1849.
Coumes 1849-1852.
Regnault de Lannoy de Bissy....... 1852-1867.
Lonclas 1867-1869.
Bernard 1869-1873.
Lebiez 1873-1874.
Neveu-Derotrie 1874-1875.
Gay 1875-1876.
Salva 1876-1885.
Pelletreau 1885-1886.
Albert Ribaucour 1er juin 1886-13 septembre 1893.
Imbert lernovem. 1893-1er octobre 1900.
Auguste Daujon 1er janvier 1901.
272 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
La population de Philippeville doit avoir une grande reconnaissance
pour ces hommes d'élite, dont la science a assuré la construction et
l'agrandissement de notre port. L'un d'eux, M. Ribaucour, fut un
des plus grands mathématiciens et géomètres de notre époque. A la
nouvelle de sa mort, survenue le 13 septembre 1893, les Académies
des Sciences de la France et de presque toute l'Europe levèrent leur
séance en signe de deuil.
XXXII
PECHES MARITIMES
En 1865, l'Inspecteur des pêches est M. Emeric, lieutenant devaisseau en retraite.
Le Conseil, dans sa réunion du 19 mars 1890, émet l'avis que le filetdit « lamparo » peut être maintenu, mais à la condition que desmesures énergiques seront prises pour que la pêche avec ce filet ne
puisse se faire à moins d'un mille du rivage et qu'il ne soit pas tiréà terre.
Autre voeu, en date du 8 septembre 1896, pour que l'emploi du
filet « boeuf » ne soit autorisé que du lever au coucher du soleil, en
attendant une nouvelle réglementation de la pêche sur nos côtes.
On a lu, vers la fin du chapitre XXX, les renseignements si
intéressants contenus dans la savante notice de M. l'Ingénieur en
chef Daujon.
36
XXXIII
SOCIÉTÉ DE SAUVETAGE, SPORT NAUTIQUE
Le 25 avril 1848, à 6 heures du soir, le citoyen Domingue, chefdes portefaix, sauve un militaire du 3e bataillon d'Afrique, quis'était jeté à la mer, étant ivre.
Le 7 juillet 1849, le sieur Ali ben Ismail, chaouch de la Mairie,descend par une fenêtre de la maison Gastardi, rue de Constantine,envahie par un incendie, une femme âgée qui allait infailliblement
périr.Une Société de Sauveteurs est créée dans notre ville le 1er dé-
cembre 1887, sous l'égide de la Société des Chevaliers-Sauveteursde Nice, par MM. Lalliermonet, Vives, Castellotti, Ponticelli et
Bertrand. Elle prospéra rapidement et rendit de très grands services.
Ses présidents ont été : MM. Hilaire Lalliermonet (médaille d'ar-
gent), 1er décembre 1887 ; Louis Castellotti, 30 juin 1888 ; Marius
Garnier, 12 mars 1890 ; Dr Alfred Kayser (médaille d'or), 26 dé-
cembre 1890; Martin Beltçaguy (médaille d'argent), 18 janvier 1893;Jules Pottier, 13 février 1897.
Une autre Société de Sauveteurs ayant été créée sous le nom de
« Sauveteurs de l'Espérance », la fusion des deux Sociétés a lieu le
18 mars 1898.
La Société des Sauveteurs assure, moyennant une rétribution an-
nuelle de 30 francs, la surveillance des plages, en cas d'accident,
pour toutes les troupes de la garnison pendant la saison des bains,
y compris la fourniture de la barque de sauvetage et des cordages,
bouées, ceintures et autres appareils.Elle compte 31 membres participants ou honoraires.
Son bureau d'administration est actuellement ainsi composé :
MM. Jules Pottier, président ; Nicolas Spadaro et Joseph Vives,
276 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
vice-présidents ; Louis Bertrand, secrétaire ; Constant Armérigo,trésorier.
Extrait d'une poésie lue au banquet des Sauveteurs, le 8 août 1889 :
Je dois citer encore un seul nom : c'est Pierson,Cet ami, ce vaillant, ce travailleur honnête,Dont la mort jette une ombre au jour de notre fête !
M. Pierson, débarqué à Alger en 1842, est venu s'établir dans
notre ville en 1848. Il fut un entrepreneur consciencieux et un homme
bienfaisant, dans toute l'acception du mot.
M. Thiriet est décédé dans notre ville le 28 mars 1894. Venu à
Philippeville aux premiers temps de la fondation de notre cité, il
fut, comme géomètre de l'État, chargé de la création des villages de
Gaston ville, Robertville, Penthièvre, Mondovi et la Robertsau.
Retraité en 1873, il mit, jusqu'à ses derniers jours, son activité
et sa grande connaissance des choses au service de la colonisation,
qui ne fit jamais appel en vain à son expérience.M. Thiriet était titulaire de deux médailles d'argent accordées
dans les circonstances suivantes : 17 août 1857, sauvetage d'une
personne qui s'était jetée à la mer à 10 heures du soir ; 8 décembre 1858,
sauvetage de l'enfant Conradi, âgé de 10 ans, tombé dans un puitsà ras du sol, situé dans le terrain vague où est actuellement édifiée la
maison Cohen, rue Nationale, n° 42.
Le Sport nautique de Philippeville, fondé le 24 juin 1889, a été
autorisé par arrêté préfectoral du 12 janvier 1890. Il a pour objet de
développer parmi les amateurs le goût des choses de la mer et de la
navigation de plaisance.La société organise des régates très appréciées ; elles ont lieu gé-
néralement le 14 juillet, jour de la Fête Nationale, et toutes les fois
que l'escadre de la Méditerranée nous fait le plaisir et l'honneur de
mouiller dans notre superbe rade.
En 1892, le S.-N.-P. organise le canotage scolaire; il fait construire
pour le collège et pour l'école laïque deux jolies yoles, dont le planet l'exécution sont dus à M. Louis Maître.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 277
Le S.-N.-P. se compose de 125 membres actifs ou honoraires; ses
embarcations sont au nombre de 45 à voile et 16 à l'aviron.
Le bureau de la Société, élu le 29 novembre 1902, est le suivant :
MM. Hippolyte Haugade, président; Sylvestre Luigi, vice-président;
Jean-Baptiste Barbagelata, secrétaire; Alphonse Magnière, secrétaire-
adjoint ; Salvator Ripoll, trésorier; Alphonse Cottard, conservateur
du matériel; Léon Auméran, Abella, Colozzi, Charles Prévalet, Félix
Eugène Roze-Joannis, administrateurs.
XXXIV
NAUFRAGES, EPIDEMIES, CALAMITÉS PUBLIQUES
Extrait de l'Histoire de Philippeville par Charles Féraud :
Le premier mois de l'année 1841 fut marqué par un désastre, qui laissera d'inef-façables souvenirs dans le coeur de ceux qui en ont été témoins. Ce fut un de cesrares ouragans, dont la violence est inexprimable, et que l'on croit causés non seu-lement par le déchaînement de toutes les tempêtes, mais encore par une brusquecommotion de ces contrées que nous cachent les profondeurs des mers. En effet,dans les désastres qui marquèrent d'une date de deuil la fin de janvier 1841, rien,dans l'atmosphère, ne fut différent de ce que l'on avait vu jusqu'alors et de cequ'on a remarqué depuis. C'était un temps d'hiver sombre et pluvieux ; le vent,depuis plusieurs jours, soufflait irrégulièrement de tous les points. Les naviressurpris au large cherchaient un refuge dans les ports.
Le 21 janvier, dans la journée, 29 navires de commerce, La Marne, corvettede charge, et le stationnaire L'Arrach, simple balancelle, étaient mouillés sur larade de Stora. Une houle saccadée et lourde, amenée par les vents du Nord-Est,envahit le port et fatigue les bâtiments. Bientôt des rafales impétueuses se préci-pitèrent de tous les points du compas et la mer, suscitée par ces tourmentes,s'éleva ; les flots s'agitèrent en tourbillons ; à la houle succédèrent des vagues fu-rieuses. Le brick français L'Accéléré fut la première victime arrachée de sesamarres ; à six heures du soir, il fut jeté sur la plage de Stora ; son équipage sesauva. Un autre brick français, L'Adolphe se perdit à une heure du matin. La
tempête s'exerça les 23 et 24 sans se lasser, mais les navires tinrent bon. Quelqueséquipages, après avoir assuré la conservation de leurs câbles et mouillé toutesleurs ancres, se jetèrent à terre, dans les rares accalmies de ces deux jours, ou
gagnèrent La Marne, qui leur paraissait un sûr refuge. Désastreuse inspiration !...La Marne, fatiguée par trois jours d'ouragan, avait pris sesdispositions contre
l'orage, comme elle les eût faites pour le combat ; elle avait désagréé ses voiles,calé ses mâts, mis à la mer toutes ses ancres, et semblait devoir, ainsi allégée et
assujettie, défier longtemps, et par sa masse et par l'intrépidité de ses chefs etde son équipage, toutes les tempêtes. Mais, hélas ! l'habileté et le courage ne
purent longtemps la maintenir contre le déchaînement des ouragans du ciel etdes fureurs de la mer !
En ce moment Philippeville, population civile et militaire, n'avait qu'uneseule âme et qu'un regard. Tous les yeux étaient fixés sur Stora, et ce qu'ils y
280 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
puisaient d'épouvante est impossible à dire ; tous les coeurs aussi étaient saisis
d'un terrible pressentiment. Il était midi : de Philippeville à Stora, ce coin de
golfe, d'ordinaire si paisible, ne formait qu'un immense brisant. De moment en
moment, un navire soulevé par les flots montrait au milieu du ciel gris sa mâture
effilée et la vague suivante, le roulant dans son écume, présentait un instantau jour sa noire carêne ; d'autres, par un jeu du hasard, étaient transportés entierset debout sur le seuil des maisons de Stora, et la vague les y laissait immobiles,fixés dans le sable. De ce nombre fut le trois mâts russe La Contenance, jaugeant266 tonneaux. Deux fois plongé au fond de la mer, le stationnaire reparut deuxfois et se conserva entre deux eaux. Un brick fut lancé perpendiculairement dansles airs, et retombant sur l'arrière, s'abîma sans qu'on en vit les débris. Trois ou
quatre, que maintenaient leurs câbles, roulés sur eux-mêmes, coulèrent à leur poste.D'autres enfin, ayant chassé sur leurs ancres, furent brisés les uns contre les au-tres et vinrent pièce à pièce au rivage. Un brick-goëlette français, L'Emilie,entraîné en dehors de ce tourbillon, traverse en quelques minutes le fond de la
rade, va se jeter sur le débarcadère suspendu de Philippeville, battu lui-même parles lames, et ce choc brise tout !
Quelque grandioses, étranges et terribles que fussent ces spectacles, ils ne pou-vaient distraire du drame bien autrement navrant dont La Marne devenait lethéâtre. On savait que les autres navires étaient presque tous vides de leurs équi-pages ; mais là, sur le pont de La Marne incessamment battu par les lames, debraves marins, fidèles à leur poste, épuisés par une lutte sans trêve contre les élé-
ments, semblaient dévoués à une mort certaine. Confondus parmi eux, d'autresmarins de toutes nations étaient venus s'abriter sous le drapeau militaire de laFrance. Hélas ! ce drapeau n'était plus qu'un signal de détresse ! A midi, un
coup de canon s'était mêlé aux bruits lugubres de la mer et du ciel. C'était un
appel dans le suprême danger. La Marne chassait, traînant au fond de la merses ancres puissantes devenues inutiles, et, par une déplorable fatalité, le navirese trouvait irrésistiblement, poussé au point de la plage où des rochers et des
pentes abruptes rendaient l'échouement plus dangereux et les secours plus diffi-ciles.
Une foule anxieuse, insensible au vent glacial, à la pluie pénétrante, couraitsur la route de Stora, se désespérait dans son impuissance et semblait venir as-sister seulement à l'agonie d'une foule de braves gens. Cependant on voulut tenter
l'impossible :les plus intrépides se mirent à descendre, en s'accrochant aux brous-
sailles, aux ronces, aux rochers, la pente du côteau, dont le pied était battu parles flots,et tentèrent de s'emparer des bouées de sauvetage auxquelles étaient attachésles grelins destinés à établir un va-et-vient, seul moyen de salut ; mais La Marnes'était, la veille, généreusement dépouillée pour fournir des cordages aux autresnavires menacés, et, dans le moment, ces moyens manquaient à son salut, ou du
moins, à celui de ses marins. Le danger cependant devenait pressant. Le navire,poussé par de violents assauts, n'était plus qu'à cent mètres du rivage et chaqueimpulsion pouvait le mettre en pièces sur les rochers. L'artillerie et le génieapportèrent leurs cordes, et, après deux heures d'angoisses, d'efforts et d'héroïsme,un câble joignit enfin la corvette au rivage. Mille bras s'y attachèrent pour leretenir et s'y raidirent pendant deux heures, rien ne pouvant fournir un pointd'attache plus sûr. Ce qu'il fallait d'énergie pour maintenir ce câble est incroyable ;
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 281
cinq cents hommes s'y relayèrent tour à tour. La pente du côteau était si rapideque les pieds y trouvaient à peine un appui, et vingt fois les secousses renversè-rent et entraînèrent les hommes les plus robustes. Cette corde tendue au-dessusdes flots était le pont étroit et mobile qui conduisait de la mort à la vie ; les nau-fragés s'en approchaient sans confusion, sans entraînement, sans impatience ; l'or-dre survivait au désastre. Hélas ! de ceux qui se hasardaient à user de ce dange-reux moyen de salut, combien peu arrivaient jusqu'aux bras qui leur étaientavidement tendus. Parfois ces malheureux, affaiblis par les privations et lessouffrances, mais parvenus cependant, après de suprêmes efforts, jusqu'au milieudu câble sauveur, l'abandonnaient tout-à-coup et tombaient dans le gouffre qui,tournoyant sur eux, les broyait parmi les débris. D'autres crispaient leurs mem-bres autour de la corde et s'y arrêtaient un instant ; mais comme si elle eûtrevendiqué des victimes marquées, la mer s'élevait jusqu'à eux, et, dénouant leur
étreinte, les entraînait.Dans ces moments où une seconde gagnée était la vie, on put voir un marin
passer avec adresse et sang-froid au-dessus de l'un de ses camarades arrêté par la
fatigue au milieu du câble, et, après chaque distance gagnée par lui-même, le traî-nant après lui, le mettre en sûreté.
Les traits d'héroïsme, d'ailleurs, se multipliaient et grandissaient avec les dan-
gers, D'énergiques soldats, de courageux citoyens se jetaient au-devant des nau-
fragés que les flots poussaient à la plage parmi les débris meurtriers et les arra-chaient à l'agonie. Plusieurs de ces hommes dévoués furent entraînés et ne repa-rurent pas. Généreux martyrs, demeurés inconnus pour la plupart. Un de ceux
qui firent preuve du plus grand courage est M. Gaétan Picon. Le Gouvernementlui accorda une médaille d'honnenr en or.
C'est ainsi qu'un à un les hommes de La Marne furent disputés à la mort ; maisce sauvetage ne pouvait suffire aux deux cents malheureux entassés sur le pont etattachés aux manoeuvres du navire, car il s'en allait pièce à pièce sous leurs pieds.
Les bastingages, impuissante barrière, sont emportés ou défoncés ; la mâture,ébranlée par les secousses qui battent la coque et parfois la soulèvent pour lalaisser tomber avec de lourds craquements, chancelle et s'abat. Le beaupré, quieût fourni un pont sauveur s'il se fût trouvé du côté de la terre, tourné hélas !
vers la mer, est brisé le premier; l'artimon disparait, le grand mât, couvert d'hom-mes attachés à ses échelles, plonge au milieu des lames et s'approche du rivage parl'une de ses extrémités, tandis qu'il est retenu par l'autre à la corvette. Aussitôt
M. Gathier, le commandant de La Marne, donne l'ordre de profiter de ce moyende salut. On se précipite, en effet, et ce sauvetage réussit : une quarantaine d'hom-
mes gagnent la terre. Mais trop tôt, une lame dévorante s'abat sur le corps
désemparé de La Marne, balaye son pont et la brise en trois parties, en la rap-
prochant du rivage. Un instant, l'on vit, sur l'un de ces débris, un matelot, resté
seul auprès du capitaine, le supplier de se confier à lui et le capitaine refusa, en
intimant à cet homme dévoué de songer seulement à lui-même. Et quand il fut
bien constaté, aux yeux de tous, qu'il avait fait son devoir jusqu'au bout, en res-
tant, le dernier, sur les planches brisées qui avaient été son navire, M. Gathier,
profitant, avec un coup d'oeil assuré, du retrait instantantané de la lame, atteint
le rivage où l'avait précédé son matelot.Ces dernières péripéties du drame avaient été applaudies par descris de bonheur
37
282 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
partis du fond du coeur de la foule émue jusqu'aux larmes. On s'empressa autour
des naufragés ; colons et soldats se dépouillèrent pour les couvrir, une ambulance
fut improvisée sur la route et les prolonges de l'armée, les enlevant aux intem-
péries, transportèrent les blessés à l'hôpital, où tout était disposé pour les recevoir.
Les valides furent conduits dans les maisons particulières et partout on les
accueillit avec un sentiment exalté de fraternité.
L'ouragan s'acharna toute la nuit sur les débris qu'il avait faits. Le golfe fut
couvert d'épaves, et, chose horrible à voir, de cadavres sanglants et défigurés. A
cinq heures du soir, des préposés des douanes eurent le bonheur de recueillir un
fourrier de La Marne. Ce jeune homme, enlevé du pont de la gabarre, avait été
porté d'abord vers la haute mer avec le débris sur lequel il s'était cramponné.
Après cinq heures d'agonie, il toucha la plage et fut sauvé.
Des trente-et-un navires mouillés dans la rade de Stora, vingt-huit des différents
ports de la Méditerranée, dont dix français et quatre francisés, avaient péri dans
le désastre. Cinq bateaux allégés, tirés et amarrés sur la plage, en avaient été
arrachés et brisés. Le nombre d'hommes dévorés par la mer n'a pu être exacte-
ment constaté. De l'équipage de La Marne, formé de cent cinquante hommes,
cinquante-trois manquèrent à l'appel. L'état-major fut réduit au commandant et à
un enseigne de vaisseau.
L'un des trois navires, qui, par un de ces hasards dont Dieu a le secret, se main-
tinrent, le brick sarde L'Industrie, capitaine Ferro, avait conservé à bord cent
einquante-trois marins qui s'y étaient réfugiés. Ce fut la seule chance heureuse au
milieu de tous ces malheurs.
Telle fut la désastreuse journée du 25 janvier 1841. Elle remplit d'une doulou-
reuse stupeur la ville nouvelle ; et bien que l'ouragan, eût, le même jour, répartises ravages sur tous les rivages, on demeura longtemps sous la désespérante im-
pression qu'il avait laissée dans notre port en y amenant le cruel épisode de la
perte de La Marne.Mais cette date de deuil, hâtons-nous de le dire, resplendit du mérite et de la gloire
des plus beaux dévouements. A voir l'empressement unanime, l'émotion générale,l'ardeur au sauvetage, la constance des efforts, l'intrépidité, l'audace des tentatives,l'incroyable abnégation de soi, on aurait pensé que les liens du sang les plus étroitsliaient les naufragés à tous les habitants de Philippeville, que la vie de ceux-làétait la vie de ceux-ci.
« Ce n'était pas seulement du courage qu'il fallait dans cette circonstance, c'étaitle sacrifice presque certain de la vie pour quiconque voulait sauver celle d'unautre. (Rapport du Commandant supérieur de Philippeville, M. le Colonel d'Al-
phonse, au général Galbois). »
L'exaltation du dévouement était poussée si loin que des sauveteurs déjà entraî-nés par les flots, meurtris par les débris (et quels débris ! des portions énormesde navires, des carênes entières), après avoir été retirés tout sanglants, au prixdes plus périlleux efforts, retournaient immédiatement à leur tâche mortelle. Ona vu des marins de La Marne toucher à peine la terre et s'échapper des bras quiles avaient saisis, pour aller disputer aux flots avides quelqu'un de leurs camara-des encore exposés... C'était admirable et déchirant !
« Une goëlette toscane, encore chargée, passa, renversée la mâture en bas, par
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 285
dessus La Marne, et s'enfonça de l'avant dans les falaises. (Rapport de M. deMarqué, du commandant Gathier et du capitaine Gavoty). »
Le curé de Philippeville, M. le Mauff, s'était avancé parmi les plus braves etmêlait aux sifflements de la tempête, aux grondements de la mer le Miserere oule sublime Dies irae, et, interrompant ses chants ou sa prière, jettait une rapideabsolution à l'une de ces vies si promptes à disparaître...
Quand les chefs militaires ou civils voulurent citer des actes particuliers d'hé-roïsme, leur embarras fut grand. Chacun avait pris part au sauvetage, avec em-pressement, courage, abnégation, et l'on songeait si peu à l'avantage d'êtreremarqué qu'il fut impossible de retrouver ou de reconnaître la plupart de ceuxqui s'étaient dévoués.
« Il faudrait, écrivait le colonel d'Alphonse au Général commandant la province,il faudrait envoyer l'état nominatif de l'armée et de la population ». Témoignagesincère et certainement bien mérité !
Un jour, quand, moins préoccupée du présent ou de l'avenir, la colonie de Phi-lippeville pourra songer à recueillir ses titres à l'estime des générations, elleconservera, par un monument, la date funèbre de ce désastre ; mais elle conserveraaussi l'héroïsme de tous et les noms de ceux qui furent assez heureux pourêtre distingués dans cette lutte générale et confuse du dévouement.
Plage de Stora
Pendant que ces tristes événements se passaient dans la baie de Stora, un autre,
navire, L'Espérance, faisait de sou côté naufrage vers le cap de Fer, régionencore très peu soumise. Ce bâtiment ramenait d'Alger un détachement de vingt-
cinq hommes du train. Les passagers et l'équipage purent aborder la plage, mais
les quarante-quatre mulets qui étaient à bord se noyèrent. Dans la position diffi-
cile où il se trouvait, l'officier qui commandait le détachement réunit tout son
monde et le mit en marche dans la direction de Philippeville, après être parvenuâ décider un arabe, accouru sur la plage, à lui servir de guide. Il était environ
sept heures du matin ; les naufragés marchèrent toute la journée, traversant au
milieu de populations qui ne leur firent aucun mal. Le soir, ils arrivaient chez un
284 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
cheikh nommé Bou-Afia, établi à deux lieues de la ville. Là, ils furent accueillis
avec empressement, les femmes et les enfants allumant de grands feux pour faire
sécher leurs vêtements et leur donnant à manger, ce dont ils avaient le plus grandbesoin.
Le lendemain, le cheikh accompagna le détachement jusqu'au Saf-Saf, et fitsonder le passage de la rivière par ses deux fils avant d'y engager les naufragés.C'est ainsi qu'il les ramena sains et saufs à Philippeville.
La Marne est ensablée, tout près du rivage, entre les rochers quise trouvent au-dessous du premier tournant de la route, en partantde Stora, et ceux qui s'avancent en face et au commencement de la
petite plage de l'usine Delory. Par les fortes tempêtes, la mer en
rejette encore des débris : tôles, ornements de sabres, boulets, ca-
nons de fusils et menus objets.Il existe au musée de notre ville : 4 canons, l gueuse, 3 fusils, 1
sabre d'officier, 1 petit crucifix et 1 lampe provenant du naufrage deLa Marne.
Le 14 octobre 1849, un immense incendie de forêts amène le feu
jusqu'aux portes de la ville; une brusque saute de vent la sauve
d'une destruction inévitable.
Séance du 8 octobre 1849. MM. les Officiers de santé de l'hôpitalmilitaire ayant demandé comme distiction spéciale et comme hon-
neur rendu à la mémoire du sous-aide Sinroles, mort à la peine
pendant l'épidémie cholérique, la concession gratuite à perpétuitéde la tombe qui doit garder ses dépouilles, le Conseil, vu la conduite
courageuse de ce sous-aide pendant le choléra, accorde, à l'unani-
mité et par acclamation, la concession demandée
Sont nommés chevaliers de la Légion d'honneur, en mars 1850,
pour leur dévouement pendant l'épidémie cholérique, MM. de Manas,docteur en médecine, et de Nobelly, négociant, ancien président dela Chambre de Commerce.
MM. Ducorps, négociant, ex-officier de santé, Gillet, conducteurdes Ponts et Chaussées; Privé, notaire et adjoint au Maire; Lauro,tailleur ; Olivier, négociant, obtiennent des médailles d'honneur.
Mentions honorables : MM. Maulion, entreposeur de poudres, Bor-
det, employé aux Ponts et Chaussées; Bertin, propriétaire; Des
Ageux, imprimeur; Floupin, coiffeur; Rivoire, négociant; Reynier,serrurier.
Arrêtés municipaux. 22 août 1856 : Considérant que, depuis hier,.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 285
la ville et ses environs ont ressenti successivement plusieurs secoussesde tremblements de terre et qu'il importe d'obvier, autant que pos-sible, aux catastrophes à prévoir; Article premier.Tous les habitants
sont invités à s'abstenir de coucher cette nuit dans leurs maisons.
Art. 2. Il est interdit, sous les peines les plus sévères, d'entretenir,
après la retraite, des feux de cuisine ou de cheminée. Il n'est fait
d'exception à cet article que pour les boulangers. 24 août 1856 : Le
Maire publie l'arrêté sous-préfectoral suivant : Une Commission de
cinq membres est instituée pour vérifier l'état des immeubles et sta-
tuer sur les mesures de sûreté à prendre dans l'intérêt public.Les inondations sont un fléau pour les propriétaires de la plaine
du Zéramna. Les plus hautes crues eurent lieu en 1855, 1859, 1886
et 1898; la plus terrible fut celle du 29 janvier 1886.
L'exhaussement de la route départementale numéro 5, dite de la
pépinière, a eu pour effet de placer la plate-forme au-dessus des
crues moyennes, mais non des autres, qui couvrairaient la route et
les allées qui doivent être exhaussées prochainement. A ce point de
vue, il y a donc une amélioration sensible, mais non complète. Espé-rons que les inondations ne seront bientôt pas plus à redouter du
côté de la pépinière que sur la route nationale numéro 3, aux envi-
rons du pont de l'Oued Louach.
Là, il y avait des inondations presque tous les ans et bien souvent
des voyageurs étaient surpris par les eaux débordant du lit du
Zéramna et traversant la route pour se déverser dans l'Oued Louach.
Le relèvement de la route en ce point, fait sur 1.300 mètres de lon-
gueur, a eu pour effet de placer la plate-forme de cette route au-dessus
des crues les plus hautes.
Les inondations les plus fréquentes sont dues au Saf-Saf, dont le
niveau dépasse très notablement celui de la plaine du Zéramna. Si,
pendant une crue du Saf-Saf, le Zéramna est lui aussi gonflé par les
eaux, il se produit alors le maximum du débordement. La crue du
29 janvier 1886 a atteint la cote 6m, 45 au-dessus du niveau de la mer ;
celle du 15 février 1859 n'a pas dépassé 6m,20.
La ligne du chemin de fer étant à la cote 8m,50 pourrait empêcher
le Saf-Saf d'inonder la plaine devant Philippeville si l'on bouchait
les ponceaux au moyen de clapets s'ouvrant de l'amont à l'aval, mais
se fermant sous la poussée des eaux d'aval. Le service des Ponts et
Chaussées s'occupe de cette question si intéressante pour nos colons
de la plaine.
XXXV
CHEMIN DE FER
Dans la réunion du Conseil municipal du 18 novembre 1852, unmembre expose qu'en présence de l'immense impulsion donnée aucrédit public par Son Altesse Impériale le Prince Président de la
République et de l'importance qu'ont acquis les transports de mar-chandises entre Philippeville et Constantine, le moment paraît favo-rable d'appeler l'attention du Gouvernement et des capitalistes sur
l'opportunité de relier ces deux villes par une voie ferrée, dont le
tracé, tournant les Toumiettes par la vallée du Saf-Saf, serait aussifacile que peu dispendieux. Le Conseil émet un voeu dans ce sens.
Par arrêté préfectoral du 24 décembre 1860, M. Lancelin, ingé-nieur des Ponts et Chaussées, chargé par la Compagnie des cheminsde fer algériens des études et de la construction du chemin de ferde Philippeville à Constantine, est autorisé, de même que les agentssous ses ordres, à traverser les propriétés situées sur le parcours de
la ligne.Séance du 20 février 1864. Le Conseil présente le voeu suivant,
relativement à la création de cette ligne : que l'emplacement de la
gare soit au bord de la mer, mais en dehors de la porte de Constan-
tine, en un endroit aussi rapproché que possible de la ville.
La Compagnie P.-L.-M. inaugure le 23 août 1870, au matin, le
service de la ligne de Philippeville à Constantine. Contrairement à.
l'usage établi, aucune fête officielle ne célèbre ce grand évènement ;il n'y a ni guirlandes, ni drapeaux, ni illuminations. Au moment où
les malheurs de la Patrie plongent tous les coeurs dans une insurmon-
table tristesse, il serait malséant de se livrer à une explosion bruyantede gaieté. La Compagnie fait preuve en cette circonstance de tact et
de patriotisme.Séance du 17 novembre 1891. Le Conseil émet le voeu pour la
288 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
création, à Damrémont, d'une gare qui serait ouverte aux expédi-tions de petite vitesse.
Nous ne terminerons pas ce chapitre sans rappeler la mémoire
d'un homme de bien, le père des employés P.-L.-M., M. l'Inspecteur
principal Léon Hérault. Tous ceux qui ont eu l'honneur de servir
sous ses ordres, — et nous sommes de ceux-là, — se souviennent
de sa paternelle bonté, de son coeur d'or. Chevalier de la Légiond'honneur pour les nombreux services qu'il avait rendus, notamment
par l'intelligente organisation des trains de transports militaires pen-dant la guerre fatale et l'insurrection arabe, M. Hérault est décédé
à Philippeville le 6 février 1894, laissant un noble exemple à ses
successeurs.
Les hauts fonctionnaires de la Compagnie P.-L.-M. dans notre
ville sont actuellement : MM. Alphonse Demolins, inspecteur prin-cipal; Emile Sicard, inspecteur; Louis-Georges Charvet, chef de
gare; Joseph Gleichauf, chef de dépôt; Louis Lopis, chef de sectionde la voie ; Théophile Deyglun, chef de bureau d'inspection ; Elisée
Hilker, conducteur de la voie, chef de bureau; Joseph Tolelle, chefmécanicien. M. Charvet vient d'être nommé sous-inspecteur, ne lais-sant ici que des amis.
XXXVI
POSTES, TELEGRAPHE, TELEPHONE
Un bureau de poste est établi à Stora le 3 mai 1851.
Le télégraphe commence à fonctionner à Philippeville en 1856,avec MM. Landry et Kappler, et le téléphone le 24 mai 1893. De
1870 à 1878, époque de la fusion de la poste avec le télégraphe, nous
pouvons citer comme receveurs, chefs de service, MM. Charlier, Pi-
rodon, Charlier (de nouveau), A. Prades, Cavalié (octobre l878, fusion),
Cazelles, Renoux et Louis-François-Julien Gratteau, nommé dans
notre ville le 14 mars 1896.
Nous trouvons, en 1847, le nom de M. Jean Boutinet, facteur de
la poste.Le service des postes, télégraphe et téléphone est installé dans un
coquet bâtiment sur lequel on lit l'inscription suivante :
PHILIPPEVILLE
MINISTÈRE DU COMMERCE, DE L' INDUSTRIE ET DES COLONIES
La direction générale des Postes et Télégraphes a fait ériger cet hôtel, en 1891,
par M. Pierre BONNELL, architecte-entrepreneur, sous la direction des Ponts et
Chaussées.Altitude : 12m
L'Ingénieur des Ponts et Chaussées était M. RIBAUCOUR.
Un des receveurs des postes et télégraphes, qui a laissé dans notre
ville un souvenir durable, M. Benjamin Cazelles, y fut nommé le 27
mars 1875 ; il y mourut le 20 juillet 1900. Nous résumons sa vie dans
les quelques lignes suivantes :
Né à Montagnac (Hérault), le 19 janvier 1825, il fut, en 1852, un
des premiers compris sur la liste de proscription ; le 27 avril, il était
interné à la Casbah de Bône avec 600 de ses compagnons d'infortune,
puis à Guelma.
290 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le Gouvernement de la République lui rendit justice et l'annéeterrible le trouvait receveur des postes à Guelma. Capitaine de la
Milice, puis major, il ne cessa de s'occuper de l'organisation de la
Défense nationale contre l'Allemagne.Nommé receveur dans notre ville en 1878, il s'attira les sympathies
du public Philippevillois. Il prit sa retraite après 40 années de ser-
vices militaires ou civils; il fut, peu après, choisi comme adminis-
trateur de la caisse d'épargne.
Benjamin Cazelles était un orateur entraînant, un tribun populaire;ses discours lui ont valu une réputation bien justifiée.
Son caractère expansif, enthousiaste, bon et généreux le faisait
aimer de tous. Cazelles n'avait pas d'ennemis.
XXXVII
TRESOR, DOUANES, POUDRES, TABACS
CONTRIBUTIONS DIVERSES ET DIRECTES, CADASTRE
En 1850, le trésor est situé devant la place Bélisaire (marché aux
légumes), dans la maison Villeneuve, rue Valée, n° 36. Il a été trans-féré dans le local actuel, à l'angle des rues Théophile Réguis et Filfila,le 1er janvier 1880. Citons quelques noms de fonctionnaires du trésor:MM. Lhoste, payeur-adjoint, détaché spécialement pour le servicedes postes, 1843. Teissonnière, payeur particulier; Bousquet et Judcy-Saint-Alire, adjoints, 1847. Farrenc, payeur, 1853. Ensuite : MM.
Maylin, Béchu, Josse, Jean Séguy, Gié, Baratciart et Adrien Don-nier (18 octobre 1902).
Un arrêté du 24 décembre 1839 crée un entrepôt fictif des douanes,dont la durée est fixée à 6 mois. Une ordonnance du 2 décembre 1845
autorise l'établissement à Stora, pour les marchandises étrangèreset les productions des Colonies françaises, d'un entrepôt réel des
douanes.
La partie de la construction du hangar de la douane à Philippe-ville, qui a pu être élevée en 1845, a 16 mètres de largeur sur
28 mètres de longueur et occupe un espace de 448 mètres carrés.
Livrée au commerce au mois de juin 1845, elle est immédiatement
envahie par la quantité considérable de marchandises que l'on dé-
barque journellement dans le port de Stora ou sur la plage de
Philippeville. Son insuffisance étant reconnue, des dispositions sont
prises pour construire l'autre partie du hangar projeté.En 1846, une somme de 110.000 francs est allouée pour la cons-
truction des bâtiments et dépendances nécessaires à l'installation du
service de la douane. Cette année-là, le hangar est achevé. En 1848
292 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
fut construit l'immeuble actuel de la douane, qui jusqu'alors était
installée dans la maison où est aujourd'hui le Grand Hôtel.
Séance du 5 juillet 1884. Le Directeur des douanes ayant proposéau Ministre le transfert de l'inspection à Bône, le Conseil émet le
voeu qu'elle soit maintenue ici.
Voici quelques noms de fonctionnaires des douanes, que nous
avons l'occasion de citer :
MM. Maréchal, lieutenant des douanes 1840
Wable, sous-inspecteur 1842
Louault, peseur —
Soulier, sous-brigadier —
Emmanuel Vincent Fenech, commis —
Jules Brégand, brigadier 1844Pierre Villebrun, préposé —
Allaman, employé—
Cess, lieutenant 1848
Allaman, receveur principal—
M. Allaman a été remplacé le 1er janvier 1878 par M. Maillet. Ses
autres successeurs sont: M. Lombardi, 1er octobre 1880 et M. Jean-
Baptiste Cotin, 1er octobre 1884.
L'Inspecteur principal est M. Paul Tabary ; le Capitaine des
douanes, M. Jean-Baptiste-Sylvain Cabié.
Un arrêté gouvernemental du 2 août 1842 crée un débit de poudresà feu dans notre ville.
L'établissement de tabacs, qui n'était qu'une succursale de celui
de Bône, est érigé en magasin principal à partir du 1er janvier 1861.
Personnel : MM. Bisson, entreposeur de 2e classe ; Gauchet,.contrôleur de magasin ; Mazenc, contrôleur de culture ; Schmidt,vérificateur de culture.
Un arrêté gouvernemental du 20 août 1840, promulgué le 31 du-
même mois, rend applicables à Philippeville les lois et arrêtés régle-mentant les administrations financières.
Voici la liste des receveurs des Contributions diverses depuis cette
création :
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 293
MM. Piolle de Champflorin 31 décembre 1841Hirbet 16 novembre 1846
Péquéreau 1er avril 1847A. Gérolami 1847
E. Vallin 1er février 1873
Lapeyre 1874
F. Ceccaldi 9 juin 1875
A. Lesueur 1er septembre 1876
A. Greliche 19 juin 1880C. Veyrenc 23 août 1882
A. Dualé 30 septembre 1891
D. Pulicani 1er février 1897
Alexandre Brua 1er octobre 1898
Une sous-direction fut créée dans notre ville le 1er juillet 1894 ; le
premier titulaire a été M.Edouard Alem, le second M. Charles Horn,en mai 1897. Elle fut supprimée par arrêté du 14 janvier 1902 ; cette
mesure a été générale pour toutes les sous-directions.
Un décret du 8 mai 1872 organise le service des Contributions
directes et des recensements des impôts arabes en Algérie.
Liste des répartiteurs :
A la création, M. Baron.
De 1874 à 1885, M. Virgile Froger, qui a été remplacé par M.
Carpuat, actuellement encore en fonctions.
Les géomètres du service topographique ont été : MM. Nicolas
Thiriet, à la création ; Voisin et François Chamboeuf.
Le service n'existe plus ici comme circonscription.
XXXVIII
ENREGISTREMENT, DOMAINES, HYPOTHÈQUES
Un arrêté gouvernemental du 15 octobre 1840 crée un bureau deconservation des hypothèques, qui est confié au receveur de l'enre-
gistrement.
Liste des receveurs de l'enregistrement :
MM. Bex, 7 octobre 1840 ; Toppin, 29 juin 1841; Martineau, 1er
janvier 1843; Stephanopoli, 2 octobre 1844; Deshaires, 13 janvier1847; Loreau, 1er novembre 1849; Ménot,16 septembre 1853 ; Nicolle,8 octobre 1853 ; Cattier, 28 octobre 1854 ; Crovisier, 8 décembre 1857;
Tardiveau, 15 juillet 1858; de Mendoça, 26 avril 1860; Campmas, 9
août 1861 ; Bernard, 23 décembre 1861 ; Colomb-Ménard, 23mai 1864;
Lachaud, 22 août 1864 ; Tapie, 1er novembre 1866 ; Hurlin, Arthur,2 juin 1870 (intérimaire); Robert des Cots, 1er février 1874; de La-
borie, 20 juillet 1874; Hurlin, 10 décembre 1880. Henry Bousquet,commis de l'enregistrement depuis le 1er mai 1874.
Receveurs des domaines :
MM. Floch, 4 août 1840; Sainte-Colombe, 21 décembre 1844;
Laporte, 31 mars 1860; Nicolle, 1er janvier 1876; de Laborie, 7
novembre 1880; Vincent, 1er juillet 1888; Auguste Fischer, 5 janvier1890.
Conservateurs des hypothèques :
MM. Mutinot, 1er juillet 1888 ; Capot de Quissac, 2 novembre 1899.
XXXIX
CAISSE D'EPARGNE
Séance du 29 juin 1854. Le Maire donne lecture du décret impérialdu 18 avril 1854, portant création de la caisse d'épargne, et installe
le Conseil d'administration, ainsi composé à la suite du vote du
Conseil municipal du 24 courant : MM. Chirac, Sainte-Colombe, de
Nobelly, Ricoux, Frédéric Sider, Daniel, Primard, Daruty, Claris,
Nielli, Vincent Fenech, de Marqué. Séance tenante, il est souscrit
220 fr. par les membres présents à titre de dons volontaires au béné-
fice de la caisse.
Statistique de 1902 :
Fonds de réserve et de dotation : 22.724 fr. 44.
Nombre de livrets existant : 1.194.
Dépôts au 31 décembre : 324.364 fr. 92.
Conseil des directeurs :
MM. Dr Ricoux, maire, président. Aimé Saint-Ernest, Jean Crote,
Jean Séguy, Alphonse Cottard, Jules Chabassière, Paul Sublime,
Jules Redon, Adérald Siret, Alexandre Beaufils, Jean Xicluna, Hip-
polyte Legros, Paul Rossi, secrétaire. François Bertrand, trésorier.
39
XXXX
MILICE, SAPEURS-POMPIERS, DÉFENSE NATIONALE
Dix-huit mois avant le commencement de notre établissement àPhilippeville, la population civile, sans avoir reçu aucune organisa-tion sous le rapport de la Milice, prenait spontanément les armes
lorsque l'occasion paraissait le demander et se mettait avec empres-sement à la disposition de l'autorité militaire. Mais vers la fin de1840, différents symptômes ayant fait craindre une attaque des tribusvoisines, le Commandant supérieur jugea nécessaire de régularisercette situation. Les principaux habitants de la ville furent convoqués ;on forma quatre compagnies doubles. Les commandants et capitainesfurent nommés à l'élection. Divers postes leur furent confiés et, pen-dant plusieurs mois, elles continuèrent un service actif.
Le 1er octobre de la même année, un arrêté du Gouvernement
général organisa la Milice de Philippeville en un bataillon fort de
cinq compagnies. Le 16 janvier 1841, une compagnie de Sapeurs-pompiers y fut ajoutée et successivement trois nouvelles compagniesfurent organisées.
Enfin différents vols qui eurent lieu dans le port de Stora, l'assas-sinat de trois militaires commis à quelque distance de ce point, ren-daient de nouvelles mesures nécessaires. Le 11 octobre 1841, unarrêté du Gouverneur général autorise la formation d'une compagniede Milice à Stora, dépendant du bataillon de Philippeville, qui
compte ainsi dix compagnies, en comprenant celle des Sapeurs-
pompiers.A la fin de l'année 1841, la Milice de Philippeville compte un
effectif de près de 1.100 hemmes et fournit par jour 35 hommes de
service. Pendant le mois de septembre, les troupes ayant été obligéesde sortir de la ville, elle met à la disposition du Commandant de la
300 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Place, pendant deux semaines, 157 hommes de garde par jour, quise prêtent avec zèle à ce service onéreux pour des négociants et des
ouvriers et concourent énergiquement à la défense de la nouvelle
commune patrie.Un arrêté du 7 juin 1845 crée à Valée une section de compagnie
de la Milice.
En 1845, la composition du bataillon de la Milice est la suivante :
1 compagnie de Grenadiers, 1 de Voltigeurs, 6 de Chasseurs, en
tout : 25 officiers, 661 sous-officiers et miliciens, plus 1 compagniede pompiers à l'effectif de : 1 capitaine, 1 lieutenant, 1 sous-lieute-
nant, 75 sous-officiers et pompiers.Par arrêté gouvernemental du 9 avril 1848, il est formé une sec-
tion d'Artillerie de la Milice. Le 20 du même mois, la compagnie
procède à l'élection de ses officiers et sous-officiers, savoir :
MM. Lyonnet et Rivoire, capitaines en 1er et en 2e; Ranguerre et
Debetous, lieutenants; Sider, maréchal des logis chef; Fenech, four-
rier. Le 13, les élections des officiers et gradés de la Milice et des
Pompiers ont commencé.
Arrêtés divers créant : 16 juin 1848, une batterie d'artillerie de
Milice; 15 juillet suivant, une section de Milice à Saint-Antoine et
une autre au ravin du Beni-Melek ; 9 mars 1849, un peloton de
cavalerie.Le Moniteur Algérien du 25 juin 1848 apporte les nominations
suivantes dans la Milice, faites pour trois ans par le Gouverneur
général :
Compagnie de Voltigeurs, les citoyens Claude Blanchet, négociant,
capitaine; Villey, horloger, lieutenant; Barbaroux, marchand, sous-
lieutenant.
lre compagnie de Chasseurs, les citoyens Cera Aufan, commission-
naire en marchandises, capitaine ; François Chapelan, charron,
lieutenant; Guérin-Toudouze, interprète de la sous-direction, sous-
lieutenant.
2e compagnie, J.-B. Barneau, négociant, capitaine; Vaille, cafetier,
lieutenant; Joseph Boisson, bottier, sous-lieutenant.3e compagnie, Louis Frémont, négociant, capitaine; Barthélemy
Peisson, chapelier, lieutenant ; Raymond-Lamour, propriétaire ,sous-lieutenant.
4e compagnie, Pierre Jacob, sous-employé aux vivres, capitaine ;
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 301
Antoine Muller et Alexandre Mangin, tous deux aussi sous-employésaux vivres, lieutenant et sous-lieutenant.
Parmi les nombreux gradés, citons au hasard : les citoyens ClaudeMerle, coutellier; Clayette, boulanger; des Ageux, imprimeur; Ca-therineau, négociant; Honoré Peisson, serrurier; Paret, bourrelier;Blain, négociant; Baude aîné, boucher; Gassier, concierge; Picon,négociant; Théophile Réguis, marchand; Camille Villeneuve, avocat;Joseph Brochini, marchand.
Par arrêté du Gouverneur général du 9 mars 1849, il est créé un
peloton de Cavalerie de Milice, ainsi composé : un lieutenant com-
mandant, un sous-lieutenant, un maréchal des logis chef, troismaréchaux des logis, six brigadiers, un trompette, trente cavaliers.Ce peloton fait ses élections le 25 avril suivant : MM. Alby, sous-lieutenant ; Bourgeois et Villard, maréchaux des logis ; Ricord,brigadier-fourrier; Even, Lemaire et Sierzputowski, brigadiers.
Extrait du journal Le Saf-Saf, du 4 juin 1849 :
Le 4 juin 1849. vers cinq heures du matin, le Commandant par intérim de
Philippeville fut prévenu que, dans la nuit, le douar du cheick Mohammed ben
Marabout, de la tribu des Agmès, établie à trois heures Ouest de la place dans lesvallons que domine la route de Collo, avait été incendié et le cheick tué ; il réunitimmédiatement les troupes de la garnison et se mit en route une heure après avecsix cents hommes de toutes armes et deux obusiers de montagne.
Les compagnies d'Artillerie et des Pompiers de la Milice, présentant un effectifd'environ 150 volontaires, marchaient avec la colonne, sous les ordres de M. leCommandant de Bétous.
Le peloton de cavaliers de la Milice avait aussi pris rang dans la Cavalerie,com-mandée par M. Gauthier, capitaine de Gendarmerie.
Vers neuf heures du matin, après une marche rapide, on arrivait à la tête dela vallée des Agmès ; la tribu rendait en ce moment les derniers devoirs au cheick
qui avait péri victime de son dévouement à la France.On s'arrêta sur ce point pour attendre le résultat d'une reconnaissance envoyée
en avant sous les ordres de l'officier du bureau arabe. Cet officier ayant fait savoir
qu'il importait aux intérêts du pays de faire une démonstration plus en avant, onse remit en marche vers dix heures. Le pays devenait d'un accès de plus en plusdifficile ; le gros de l'Infanterie et les obusiers de montagne furent laissés à la têtedu défilé, où ils prirent position pour de là se porter où besoin serait,
M. Cartier, commandant de la colonne, poursuivit sa marche avec soixante
fantassins, les fusils de rempart, la Cavalerie et le Goum ; après des difficultés de
toute espèce, il arrive, vers midi, au premier douar des Zéramna. On n'y trouva
que quelques femmes; les hommes, assure-t-on, étaient à leur poste pour protégerle pays contre les kabyles soulevés : on dût respecter leurs habitations.
302. HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
On apercevait de ce point, derrière le premier rideau de montagne, la fumée des
dacheras que brûlait la colonne de M. de Tourville, commandant supérieur du
Cercle. Quelque fatiguées que fussent les troupes sorties de Philippeville, on eut
essayé de faire jonction avec celles qui opéraient à peu de distance, mais deux
causes s'y opposaient, l'absence des vivres et l'impraticabilité des sentiers. Ces
circonstances obligeaient à la retraite ; elle s'exécuta en bon ordre.
Vers deux heures, on rejoignit le gros de la colonne ; elle venait enfin de recevoir
de Philippeville un ravitaillement bien nécessaire, qui lui arrivait escorté de quel-
ques miliciens.
Après une heure de repos, on dût reprendre le chemin de la place, où l'on rentra
à sept heures du soir avec le regret de n'avoir pu donner cours aux bonnes dispo-sitions qui se manifestaient dans tous les rangs et qui, à n'en pas douter, se
fussent traduites avec énergie, si l'occasion s'était présentée.C'est avec un empressement général que la Milice a pris part à cette sortie ; elle
croyait marcher au-devant de l'ennemi, elle l'a fait avec dévouement et prompti-tude. La garde de la ville avait été laissée aux autres compagnies, sous le com-
mandement du capitaine de la Milice Lieutaud, et elles sont restées sous les armes
jusqu'au retour de la colonne.
Les miliciens ont très bien supporté les fatigues de cette marche dans un paysdifficile et l'armée a pu voir qu'elle a dans la population un auxiliaire énergiqueet dévoué. La plus grande fraternité a régné pendant toute la marche. Les vivres
ont été partagés avec le même empressement que les fatigues; aussi ne parlerons-nous pas d'un acte d'intolérance que s'est permis un officier du bureau arabe à
l'égard de M. Rivoire, l'un des adjoints de la Municipalité de Philippeville, qui
accompagnait nos volontaires. Ce fait a été une malheureuse exception.Les rapports du cheich des environs constatent que la démonstration du 4 juin
a produit un excellent effet dans le pays, en prouvant que nous pouvions réprimertoute tentative d'agression et protéger les tribus qui veulent nous rester fidèles.
Ce résultat profitera à notre sécurité et nous ne doutons pas que si l'occasion se
représentait, toute la ville montrerait le même zèle et le même empressement.Nous faisons suivre les ordres du jour auxquels a donné lieu la sortie que nous
venons de raconter.
ORDRES DU JOUR :
Le Commandant par intérim est heureux de pouvoir exprimer à la Milice et à la
garnison de Philippeville ses sentiments de reconnaissance et d'estime pour
l'empressement qu'elles ont mis à se réunir hier matin, pour le bon ordre qu'ellesont observé pendant la marche, en avant et en retraite, à travers de grandesdifficultés de température et de terrain ; enfin pour les bonnes dispositions qu'ellesont montrées en des occasions où elles auraient pu être utiles.
Les circonstances n'ont pas répondu aux dispositions, mais la démonstration
d'hier aura au moins le double avantage de prouver que l'effectif réel disponiblen'est pas aussi réduit qu'on le supposait peut-être au-dedans et au-dehors et que,au besoin, nous avons la volonté et le pouvoir d'aller en aide aux tribus qui de-
meurent fidèles à la France.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 303
Le présent ordre sera lu aux troupes réunies pour l'appel.Philippeville. le 5 juin 1849.
Le Commandant par intérim,CARTIER.
Mon cher Commandant,
Hier, lorsque vous étiez encore sous les armes, j'ai tenu à remercier la Milice,à vous remercier du dévouement plein d'abnégation dont elle venait de faire
preuve.
Aujourd'hui je vous envoie, pour être porté à la connaissance du bataillon, l'ordredu jour de M. le Commandant militaire. Aux témoignages d'estime et de recon-
naissance qu'il renferme, je veux de nouveau, et avec effusion, ajouter mes bien
sincères félicitations. En un jour, et du premier bond, la Milice a marqué sa placesur la même ligne que notre brave armée : en partageant ses fatigues et ses dangers,elle a montré ce que peut le courage intelligent uni à un intelligent commande-ment. Honneur donc à la Milice entière de Philippeville ; honneur aux compagniesspéciales : Pompiers, Artilleurs, Cavaliers.
Avec de tels hommes, avec un tel Commandant (M. de Bétous), on peut, on doit
tout attendre d'elle, si difficiles que soient les circonstances.
Dites-lui, Commandant, combien je me suis senti fier d'avoir l'honneur d'être
placé à la tête d'une population à laquelle appartient une pareille Milice.
Recevez, etc.Le Sous-Préfet,
DEMANCHE.
Par suite du départ d'une grande partie de la garnison, la Milice
prend la garde du poste de la rue Nationale, le 26 septembre 1849.
Un arrêté gouvernemental du 10 juillet 1852 prescrit la dissolution
des Milices dans tout le territoire algérien, à l'exception des com-
pagnies de Sapeurs-pompiers. Par arrêté du 13 septembre suivant,la Milice dé Philippeville est ainsi réorganisée : Philippeville, un
bataillon de 400 hommes, dont 100 étrangers, formant trois compa-
gnies d'Infanterie, 1 de Pompiers et 1 subdivion d'escadron de Ca-
valerie ; Conseil de recensement de 8 membres. Stora, une subdivision
de compagnie d'Infanterie, 1 subdivision de compagnie de Pompiers,effectif total : 50 hommes. Valée, une subdivision de compagnied'Infanterie de 20 hommes. Saint-Antoine, 1 subdivision de com-
pagnie d'Infanterie de 25 hommes. Ces trois subdivisions sont réunies
au bataillon de Philippeville.Un arrêté gouvernemental du 22 février 1853 prescrit la remise aux
mairies des armes de guerre, cartouches et munitions délivrées à l'ad-
ministration civile et affectées à l'armement des Milices algériennes.Le 28 octobre 1854, le colonel Marengo, inspecteur général des
Milices algériennes, passe en revue la Milice de Philippeville.
304 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
La Milice fait défaut a la revue du 15 août 1858 (fête de 1empe-
reur), à l'exception de quelques miliciens que l'on dut renvoyer, vu
leur petit nombre. Le 21 novembre suivant, la musique de la Milice,
réorganisée depuis peu de temps, célèbre la Sainte-Cécile.M. Castel-
Dugenet est nommé chef de bataillon, commandant la Milice, le 28
décembre de la même année.
Le 29 avril 1865, meurt, à l'âge de soixante-dix ans, M. Othon
de Franceschi, capitaine en retraite, capitaine adjudant-major de la
Milice. Il avait fait ses premières armes sous Napoléon Ier et sa
conduite brillante en Afrique, de 1835 à 1852, et notamment pendantles fatigues de l'occupation de notre ville, lui avait valut la croix
de la Légion d'honneur.
Budget de la Milice pour 1868 :
Indemnité à l'adjudant-major 1.200 00
Solde des tambours et trompettes 1.440 00
Habillement et équipement des susdits 280 00
Réparation des armes, caisses et instruments 600 00
Entretien, chauffage et éclairage du corps de garde et
des bureaux .. 100 00
Frais d'impression et de bureau 150 00
Entretien des pompes à incendie 300 00
Entretien du matériel des pompes 300 00
TOTAL 4.370 00
Séance du 25 novembre 1867. Le Conseil, considérant que certains
agents consulaires réclament pour que les étrangers ne soient plus
compris dans la Milice ; qu'il serait fort injuste, dans un pays où le
nombre des étrangers balance presque celui des Français, que ceux-ci
seuls soient appelés à concourir à la protection des fortunes com-
munes et de la sécurité publique, émet à l'unanimité le voeu que les
étrangers continuent à faire partie des Milices au même titre et dans
les mêmes conditions que les français. Les conseillers municipaux au
titre étranger, comprenant tout ce que cette mesure a de juste et
d'équitable, s'associent au vote des membres français.Les Francs-Tireurs, destinés à former une nouvelle compagnie
d'élite de la Milice, au même titre que les Pompiers, procèdent, le
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 305
24 juin 1868, à l'élection de leurs officiers et sous-officiers. Sontnommés : MM. Adrien Chitier, capitaine; Philippe Fessenmayer et
Alphonse Faucon, lieutenants; Henri Dupont, sous-lieutenant; René
Ricoux, médecin; Faure aîné, sergent-major; Mazenc, fourrier;Perreimond, Labbé, Mastagli et Martel, sergents.
Le 2 août 1870, les étrangers européens, exemptés du service dela Milice en vertu de conventions internationales, demandent à être
acceptés comme volontaires dans la Milice pendant la durée de la
guerre.Tous les citoyens armés de Philippeville sont solennellement convo-
qués, le dimanche, 14 août 1870, pour une grande revue. On constate,à la louange de notre patriotique cité., que jamais on n'avait vu
pareille affiuence, semblable empressement. Les compagnies ayantformé le cercle, chaque sergent-fourrier lit un ordre du jour dans
lequel M. Nouvion, sous-préfet, en raison des terribles épreuvestraversées et dont on ne peut prévoir le terme, fait appel a l'énergieet au dévouement de tous les bons citoyens. Cette patriotique et
chaleureuse allocution produit une excellente impression, qui se ma-
nifeste par le cri unanimement répété de : Vive la France ! Chacun
reprend son rang de bataille ; on porte les armes et, au milieu d'un
respectueux silence, la musique fait entendre l'hymne sublime de la
Marseillaise.
Un comité de Défense nationale est créé le 4 octobre 1870. Sont
nommés : MM. Colas, de Chabannes, Lesueur, Réguis père, Delagarde,
Brugerre, Dr Kayser, Fawtier, Lorient, Hanet, Soudain, Louvet,
Louis Content, Delapierre, Louis Nielli.
Séance du 20 octobre 1870. Le Conseil vote un emprunt de 75.000
fr. pour la défense nationale. Les membres présents du Conseil mu-
nicipal s'inscrivent immédiatement pour une somme de 9.550 francs.
Le dimanche, 23 octobre 1870, la Milice, au grand complet, y
compris les Francs-Tireurs et les Corps francs, est convoquée pourune revue. Ces troupes civiles dépassent le chiffre de 1.200 hommes,
ainsi répartis :
Etat-major 50
Sapeurs-pompiers 56
Première compagnie. 172
Deuxième compagni e 158
A reporter 436
40
306 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Report 436
Troisième compagnie... 138
Quatrième compagnie 106
Francs-Tireurs 96
Francs-Tireurs du Saf-Saf 206
Tirailleurs du faubourg de l'Espérance ...... 106
Cavaliers éclaireurs....... 20
Section de Saint-Antoine 45— Valée 50— Damrémont 18
TOTAL 1.221
Séance du 29 septembre 1870. En dehors de l'achat de 200 équi-
pements complets pour les miliciens mobilisables, achat s'élevant à
8.000 fr., le Conseil municipal met une somme de 20.000 fr. à la
disposition du comité de Défense, pour faire face aux dépenses d'en-
rôlement des indigènes. Les engagements volontaires se feront pourla durée de la guerre seulement; ils donneront lieu à l'attribution
d'une somme de 150 fr., payable le jour de l'engagement. Les hom-
mes seront reçus de 18 à 35 ans. Pourront également, s'engager les
indigènes âgés de plus de 35 à 40 ans, mais à la condition qu'ilsseront reconnus aptes à faire un bon service. Les mêmes engagements,à titre d'acte patriotique, seront reçus pour la durée de la guerre,avec prime de 50 fr., payable le jour de l'engagement ; il sera délivré
par le comité à cette catégorie d'engagés un diplôme spécial. Lesrecruteurs recevront, après réception au corps de chaque engagé,une prime de 10 francs.
Séance du 3 décembre 1870. Le Maire adresse la dépêche suivanteà M. du Bouzet, commissaire du Gouvernement à Alger : « A la
réception de vos circulaires concernant les capitules, le Comité deDéfense nationale, le Bureau du Club des ouvriers et les officiers dela Milice m'ont demandé de les réunir au Conseil municipal, pour se
prononcer sur la question de savoir si la ville recevrait ou non les
capitules. La réponse unanime, moins une voix, a été pour le refusde les recevoir. Je crois devoir, dans ces circonstances, porter ce voteà votre connaissance, toute la réunion vous laissant la responsabilitédes événements qui pourraient surgir. Une protestation est adresséeau Gouvernement, à Tours. » Une liste de protestation fut déposéeau secrétariat de la Mairie.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 307
En décembre 1870, la cantinière de la Milice est Madame veuve
Jouy.Le Conseil décide, le 7 décembre 1870, de prélever un crédit de
5.000 fr. sur l'emprunt patriotique en vue d'acheter les objets et us-tensiles nécessaires à l'hospitalisation des blessés qui doivent êtreévacués sur l'Algérie, ustensiles qui ne peuvent être fournis par leservice des hôpitaux.
Un corps de garde est installé dans le presbytère de Valée le 16décembre 1870. Le même jour, sur la demande du Comité de Défense,le Conseil vote la création d'une compagnie franche, composée d'in-
digènes avec un cadre français. Cette compagnie, entièrement équipéeet habillée, coûtera, avec la prime de 20 fr.., donnée à chaque hom-
me, une somme de 16.800 fr., soit 140 fr. par homme.
L'assemblée municipale décide, le 29 du même mois, qu'unesomme de 2.000 fr. sera prélevée sur l'emprunt pour être envoyée au
général Garibaldi, en lui exprimant toutes les sympathies de la po-
pulation de Philippeville pour ses courageux combattants, puis, le
lendemain, qu'une somme de 659 fr. sera également prélevée sur
l'emprunt, pour remboursement des frais d'équipement du corpsfranc-noir au capitaine de cette compagnie, qui en a fait l'avance.
A cette époque, une compagnie de Vétérans est en formation;une vingtaine de volontaires apprennent, à l'arsenal, la manoeuvre
du canon. Deux honorables habitants, bien connus pour leur dévoue-
ment à la chose publique, MM. Picon et Lesueur, dffrent d'acheter
deux mitrailleuses.
Dans sa séance du 16 janvier 1871, le Conseil décide que le crédit
de 10.000 fr. restant disponible sur l'emprunt patriotique sera ainsi
réparti : 3.000 fr. seront envoyés à Garibaldi et 7.000 fr. au Gou-
vernement de la Défense nationale, à Bordeaux.
Séance du 1er février 1871. Le Conseil envoie au Gouvernement,
à Bordeaux, l'adresse suivante :
Considérant qu'une paix honteuse ne peut être acceptée par la France ; quecette paix éterniserait la guerre ; se rallie au vote du Conseil municipal de Bor-
deaux, en date du 30 janvier, protestant contre toute condition de paix qui ne
sauvegarderait pas l'honneur national et adjure la délégation de Bordeaux de
rester à son poste et de continuer la guerre à outrance en s'entourant d'énergiques
républicains.Il remercie, en outre, le Conseil municipal de Bordeaux de sa patriotique ini-
tiative.
Vive la France ! Vive la République !
308 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le 23 février 1871, les trois compagnies de Francs-Tireurs de
Philippeville et du Saf-Saf partent pour El-Arrouch. Par arrêté
du 18 mars suivant, l'autorité militaire licencie la compagnie franche
du Zéramna.
Nomination, le 5 avril 1871, au grade de sous-lieutenant de Francs-
Tireurs, de M. Léon Pignon, en remplacement de M. Mittre, nommé
major de la Milice.
Une dépêche pressante, adressée aux autorités dans la nuit du
dimanche, 23, au lundi, 24 avril 1871, demande un contingent de
450 hommes pour être dirigé sur le théâtre de l'insurrection arabe.
Les capitaines de la Milice sont immédiatement convoqués pour
prendre les mesures nécessaires. Toute la matinée est passée en pré-paratifs et, vers quatre heures du soir, 625 hommes, parmi lesquelsenviron 200 volontaires, partent par le train ordinaire.
L'entrain de notre Milice mobilisée est admirable. La populationentière se transporte aux abords de la gare, pour saluer le départde nos miliciens. La musique, qui n'a pas été requise pour cette
expédition, demande et obtient d'en faire partie. Elle précède les
Francs-Tireurs, escortant le drapeau, et joue la Marseillaise danstout le parcours de la Mairie à la gare.
Effectif des partants :
Etat-major et musique 38
Sapeurs-Pompiers 13Francs-Tireurs 76Francs-Tireurs du Saf-Saf 207lre compagnie de marche 882e — 116Chasseurs-Francs 65Artillerie 22
TOTAL 625
Citons, au hasard, les noms de MM. Damoy, lieutenant-colonel ;Houlez, chef de bataillon ; Dr Ricoux, médecin ; Sales, pharmacien ;Lemaire, Lesueur, Gibauid, capitaines; Perreimond, Faure, Léon
Pignon, lieutenants ; Gaumain, sergent-major.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 309
Hôtel Gibaud, aujourd'hui Grand Hôtel
Une partie de cette colonne arrive le 18 mai à Sétif.
Tarif de solde de la Milice pendant l'insurrection :
Lieutenant-Colonel 13 75 par jour.Chef de bataillon 11 666 —
Capitaine 8 055 —
Lieutenant 5 694 —
Sous-Lieutenant 5 138 —
Sous-Officier 1 25 —
Milicien 1 00 —
Le 4 juin 1871, le bataillon mobilisé rentre dans ses foyers. Cha-
cun se met en fête pour l'accueillir. Malgré une pluie battante, plusde mille personnes vont à sa rencontre jusqu'à la gare des marchan-
dises. Le bataillon sédentaire, la compagnie des Vétérans sont
rangés sous les armes. Le Conseil municipal, le Maire en tête, attend
nos braves concitoyens à la porte de Constantine. Enfin la popula-tion toute entière, groupée dans la rue Nationale, ne cesse, pendanttout le trajet du faubourg à la marine, de leur prodiguer les marquesde sympathie les plus touchantes. On a accordé depuis, en 1895, la
médaille coloniale à ces braves.M. Gaétan Picon, l'inventeur philippevillois du célèbre Amer qui
porte son nom, fait don à la Milice, le 3 août 1871, d'une mitrailleuse« Le Gaétan ».
Séance du 10 août 1872. Le Conseil accorde une pompe à incendie
au village Valée.
310 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Par arrêté gouvernemental du 16 décembre 1875, sont nommés
dans la compagnie des Pompiers : MM, Dr Alfred Kayser, capitaine;Jean Beille, maître menuisier, lieutenant en remplacement de M.
Haas, décédé; Auguste Agon, employé aux Ponts et Chaussées,
sous-lieutenant.
Par arrêté du Gouverneur général du 6 juillet 1876, vu l'article
34 de la loi du 6 novembre 1875 déterminant les conditions suivant
lesquelles les Français domiciliés en Algérie sont soumis au service
militaire, les Milices algériennes sont dissoutes et les armes versées
dans les arsenaux de l'Etat. Est seul exempt de la dissolution le
corps des Sapeurs-Pompiers, dont l'organisation est réglée par le
décret du 29 décembre 1875.
Un décret présidentiel du 31 mars 1877 nomme dans la compa-
gnie de Sapeurs-
Pompiers : MM. Dr Alfred Kayser, capitaine;Etienne Dugoua, lieutenant; Auguste Agon, sous-lieutenant.
Décret du 19 décembre 1878. Sont nommés : MM. Agon, lieute-
nant; Marius Alexandre, sous-lieutenant des Sapeurs-Pompiers.La compagnie crée, le 4 janvier 1879, un service de sûreté de
nuit : 3 hommes et 1 clairon, prêts à se rendre sur le lieu du sinistre,
occupent le poste de la rue de Carthage de huit heures du soir à
cinq heures du matin.
Décret du 16 août 1879. Compagnie des Pompiers. Sont nommés :
MM. Marius Alexandre, lieutenant; Michel Picard, sous-lieutenant.
Le 27 mai 1880, la compagnie transporte son poste de nuit de la
rue de Carthage dans l'immeuble communal adossé à la rue de Cons-
tantine et faisant face sur la place du théâtre ; ce local servait autrefois
aux répétitions de la Société Philharmonique.Un décret du 24 septembre de la même année nomme capitaine
des Sapeurs-Pompiers M. Martin Beltçaguy. Dans sa séance du 19
novembre suivant, le Conseil, considérant que le Dr Kayser, capitainecommandant la compagnie de Sapeurs-Pompiers, qui s'est récemment
démis de ses fonctions, a toujours fait preuve, depuis de longues
années, d'un dévouement sans bornes, lui vote des éloges et des
remercîments.
Le Conseil d'administration de la compagnie des Sapeurs-Pompiers
décide, le 9 octobre 1887, la création d'une fanfare ; la direction en est
confiée à M. July père, puis à M. July fils. Elle se fit entendre la
première fois, le 3 juin 1888, à l'occasion de la notification qui fut
faite à M. le Dr Kayser du décret le nommant médecin de la compa-
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 311
gnie, après en avoir été le capitaine. La création de la fanfare des
Pompiers, subventionnée par la ville, fut, dès lors, considérée comme
musique municipale. Elle fit défiler les troupes de la garnison, Pom-
piers en tête, à la revue du 14 Juillet 1888. Elle prend pour chef M.
Dumonchau le 14 janvier 1891 ; M. Devaux, est sous-chef. Au concours
d'Alger, où la conduisit le lieutenant Rabaute, la fanfare remporta,les 17 et 18 avril 1892, 3 prix avec félicitations du jury. Cette société,
qui a été si appréciée par le public philippevillois, fut dissoute le 25
mai 1893, à la suite de la démission de son chef, M. Dumonchau.
Par décret du 17 novembre 1891, M. Marius Rabaute est nommé
lieutenant et M. Henri Ranoux, sous-lieutenant de la compagnie.Un décret du 6 octobre 1893 nomme M. le Dr de Valicourt médecin
aide-major et un autre décret du 26 août 1898 M. Aimé Roche, sous-
lieutenant, en remplacement de M. Ranoux, démissionnaire.
XXXXI
SOCIÉTÉS D'ANCIENS MILITAIRES, SOUVENIR FRANÇAIS, ETC.
Voici, en novembre 1857, les noms et les grades des anciens mili-taires du premier empire, qui viennent de recevoir la médaille deSaint-Hélène : MM. Accoyer, soldat; Blanc, canonnier ; de Fran-ceschi lieutenant; Ferré, sous-lieutenant; de Laderrière, brigadier ;Mourre, soldat.
Un arrêté préfectoral du 2 mai 1889 autorise la société fondéesous la dénomination de : « Association Fraternelle des Anciens Mi-litaires retraités et non retraités ». L'esprit de cette association est
de grouper dans une pensée de bienfaisance, dégagée de toute idée
de propagande religieuse ou politique, les anciens officiers, sous-
officiers et soldats retraités et non retraités, appartenant à toutes les
classes de la Société. Elle fait appel à tous les dévouements et sa
devise est : Pro patria !
Liste des présidents :
MM. Charles Valdéjo, capitaine de Chasseurs d'Afrique.Armand Mayeux-Doual, chef d'escadron de Spahis.
Benjamin Cazelles, receveur des Postes et Télégraphes.Jean-Marie Crote, maréchal des logis chef de Gendarmerie.
Paul Graux, sous-lieutenant de réserve de Zouaves.
Le bureau actuel est ainsi composé :
MM. Jean Crote, président d'honneur; Paul Graux, président;Constant Lecorgne et Victor Bouché, vice-présidents ; Victor Magnez,secrétaire ; Edouard Cazelles, trésorier ; Claude Guyétant, Ferdinand
Beaumont, Félix Modeste, Dominique Morelli, Roger Vergès, admi-
nistrateurs.
41
314 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le Souvenir Français est une société nationale pour l'entretien
des tombes des militaires et marins morts pour la patrie ; elle a été
autorisée par arrêté ministériel du 29 août 1887.
Le comité de Philippeville a été créé, dans l'assemblée généraledu 21 décembre 1893, de la façon suivante :
Présidents d'honneur : le Maire, le Sous-Préfet, le Commandant
d'armes, le Président de la Chambre de Commerce.
Président : M. Valdéjo, capitaine en retraite.
En 1895, le comité, après avoir recueilli des souscriptions, à l'aide
des ressources de la Société, put procéder à l'adjudication d'un mo-
nument funéraire, avec ossuaire, à élever au cimetière dans un terrain
concédé gratuitement par la commune. L'adjudicataire fut M. Gas-
pard Ghiringhelli. Les travaux étaient évalués à 4.000 fr. Les plansde ce monument, en forme de pyramide, ont été établis par M.
Beltçaguy, sous-ingénieur des Ponts et Chaussées.
Cet ossuaire, destiné à recevoir les restes de tous les militaires etmarins morts en activité de service, commencé en 1895, fut terminéen 1897. M. Georges Lesueur a offert gratuitement tous les marbres
nécessaires, qui représentent une réelle valeur. L'inauguration solen-nelle eut lieu en grande pompe le 27 janvier 1898 ; la bénédictionfut donnée par Monseigneur Cazaniols, évêque de Constantine et
d'Hippone.Le 12 décembre 1895, une plaque commémorative, rappelant les
noms des enfants de notre ville morts sous les drapeaux, a été placéedans le vestibule de la Mairie. Sur cette plaque figurent les nomssuivants :
MASSON, Charles, soldat au 4e Zouaves. Décédé à Alger le 26 décembre 1877.GUICHARD, Jean-Pierre, canonnier au 3e d'Artillerie. Décédé à Alger le 21 décem-
bre 1880.
DEGAND, François, soldat au 20e d'Artillerie. Décédé à Oran le 21 octobre 1888.DROUIN, François, capitaine au 3e Zouaves. Tué le 5 juillet 1885 à l'attaque de Hué.
Voici les noms des divers présidents du Souvenir Français :
21 décembre 1893 : M. Valdéjo, capitaine en retraite.27 octobre 1894 : M. Martineau, —
15 juin 1896 : M. Cazelles, receveur des Postes en retraite.5 mars 1898 : M. Desvignes, officier d'Administon comptable.
16 — : M. Beltçaguy, sous-ingénieur des Ponts et
Chaussées.9 avril 1898 : M. Garrez, capitaine de réserve.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 315
Tous les ans, à la Toussaint, la Société porte des couronnes sur lemonument qu'elle a fait élever et sur les tombes des officiers et
soldats inhumés en dehors de l'ossuaire.
Le monument porte cette inscription :
LE SOUVENIR FRANÇAISA LA MÉMOIRE DES SOLDATS ET MARINS MORTS POUR LA PATRIE
1897
Dans le but de resserrer les liens d'amitié qui doivent exister entre
d'anciens soldats français ayant combattu côte à côte, ayant supportéles mêmes fatigues et les mêmes dangers, MM. Lalliermonet, Gasnier,
Jayot et Chavret décident, en octobre 1896, de faire appel, dans la
presse locale, aux anciens militaires ayant fait la campagne de 1870-
1871 contre l'Allemagne. 42 adhérents y répondent. Toute l'armée
française est représentée dans cette réunion : artilleurs, cuirassiers,
cavaliers, marins, zouaves, lignards, gardes nationaux mobiles, etc.
Le Groupe des Combattants de 1870-1871 est fondé. Madame Lau-
rin, ex-cantinière au 3e régiment de Zouaves, décorée de la médaille
militaire, est acclamée présidente d'honneur. M. Crote est nommé
président et M. Jayot, secrétaire.
Le Groupe des Combattants de 1870-1871 s'occupe tout spéciale-ment : de réveiller et d'entretenir le patriotisme parmi les françaisde race ayant combattu contre les allemands, afin que les jeunes
générations prennent exemple lorsqu'il leur faudra faire face à
l'ennemi ; de rendre les derniers devoirs aux camarades adhérents ;
d'aider, dans la mesure du possible, les membres du groupe sans
travail ou malades.
Les Anciens Combattants se réunissent tous les premiers dimanches
du mois. Un banquet amical et fraternel a lieu tous les ans; en 1902,
il fut fixé au 30 novembre, anniversaire de la bataille de Champigny,sous Paris, à laquelle quatre d'entre eux assistèrent : MM. Beaujeleau,
Chavret, Macquin et Onorati. Les adhérents sont actuellement au
nombre de 31.Bureau actuel :
Président : MM. Auguste Jayot.Trésorier : Jean-Baptiste Travail.
Secrétaire : André Pfrimmer.
316 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
La Société des Vétérans des Armées de terre 1870-1871 est une
société nationale de retraites, fondée à Paris le 1er janvier 1873. La
section de Philippeville (317e section) a été constituée le 19 février1899 sous la présidence d'honneur de M. de Bouyn, officier d'admi-nistration principal en retraite, et la présidence effective de M.
Bouzeran, conducteur des Ponts et Chaussées. Elle compte actuelle-
ment plus de cent adhérents.
Noms des présidents :
19 février 1899. MM. Bouzeran, conducteur des Ponts et Chaus-sées.
31 décembre 1900. Pierre Schneider, employé chez M. Teissier.16 mars 1901. Beaujeleau, propriétaire.25 mai 1902. Siret, capitaine de Gendarmerie en retraite.
5 avril 1903. Germain Beaujeleau, propriétaire.
La cérémonie de la remise officielle du drapeau par M. le Capi-taine Jacquot, du 3e régiment de Zouaves, délégué de M. le GénéralCommandant le 19e corps d'armée, eut lieu le 29 avril 1900 et futune véritable fête pour notre ville.
La 317e section se fait un honneur et un devoir d'assister, drapeauen tête, à toutes les cérémonies et fêtes patriotiques.
XXXXII
SOCIETES DE TIR
Une Société de tir se forme le 17 juillet 1874. Le bureau est ainsiconstitué :
MM. Dr Bryon, médecin-major du 3e Zouaves, président; Lemaire,
négociant, vice-président; Gaumain, bijoutier, trésorier ; Paul Sider,secrétaire; Béchu, payeur du trésor, Dr Kayser, A. Jaunin, Blot,
capitaine du Génie, Léon Pignon, Marmin, inspecteur des forêts,Thiriet, géomètre, Vicomte de Boisdenemetz, officier comptable, Baud,
capitaine d'Artillerie, membres.
Les statuts de cette société sont approuvés le 25 du même mois.
Son but est de procurer aux amateurs du tir l'occasion de se livrer à
cet exercice et d'organiser des fêtes et des concours. Elle cessa de
fonctionner en 1891 ; son titre était : Société de Tir de Philippeville.
Un concours de tir a lieu le 20 septembre 1876, sous la présidencede M. Marmin, avec le concours de la fanfare du 12e bataillon de
Chasseurs à pied. M. Lucet, sénateur, assistait à cette fête et y a
pris la parole.Liste des récompenses :
FUSIL
MM. Liottard, Emery, de Vibray, médailles de vermeil. Baunin,
de Vibray, Emery, Liottard, Jaunin, Sales, Catherineau, Gaumain,
Cavicchioni, médailles d'argent. Elèves du collège : Thiriet, médaille
d'argent. Sous-officiers et soldats : Aussenac, 3e Zouaves, médaille
de vermeil ;Veluet et Jourdan, 12e Chasseurs à pied, médaille d'argent.
PISTOLET
MM. de Vibraye, capitaine au 3° Hussards, médaille de vermeil.
318 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Virot, Pontillon, Hérault, inspecteur principal du chemin de fer,
médailles d'argent.
Une société de tir et d'escrime, La Philippevilloise, est créée le 19
avril 1893. Son but principal est l'enseignement de l'escrime. Son
président est M. Saingery, avoué.
La Société civile de Tir est fondée le 31 juillet 1893 par MM. Grias,
Richet, Trempert, Lanaspèze, Guillebaud. Ses statuts sont approuvésle 14 septembre 1893. Son but est de former des tireurs, de vulga-riser et de propager l'étude théorique et pratique du tir.
Elle a été dissoute en juillet 1902.. Une nouvelle société vient de
se former avec les mêmes éléments, mais comme société mixte. Ses
statuts ont été approuvés par le Ministre de la Guerre le 28 février
1903. Elle remplace donc à la fois la Société civile de Tir et l'ancienne
Société mixte de Tir, dont nous parlons ci-après. Elle prend le nom
de Société mixte de Tir L'Union des Tireurs.
Son bureau est :
MM. Alphonse Garrez, président ; Dr Lucien Augier, vice-président;
Jean-Bapliste Martin, directeur du tir; Emile Davan, secrétaire;Marcelin Vassy, trésorier; Auguste Tréhoret, Joseph Grias, Jules
Redon, Casimir Marty, Ernest Chêne, Antoine Lopez, administra-
teurs.
La Société mixte de Tir est créée à la suite de l'approbation du
Ministre de la Guerre du 11 octobre 1890. Elle comprend, à ses dé-
buts, 192 membres faisant tous partie de la réserve de l'armée aetive
ou de l'armée territoriale. La cotisation est de 6 fr. par an pour les
officiers et de 3 fr. pour les sous-officiers et soldats.
Son premier Conseil d'administration est le suivant : MM. Vilan,
capitaine de réserve de Zouaves, président; Charles Millot, lieutenant
de réserve de Zouaves, vice-président ; Louis Bertrand, officier d'ad-
ministration de l'intendance territoriale, trésorier; Véron-Bellecourt,lieutenant du Génie territorial, membre; Claude Pichon, sous-lieute-
nant territorial de Zouaves, officier de tir ; Boitard, officier de réserve
de l'intendance, secrétaire.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 319
Les présidents furent ensuite :
MM. Valdéjo, capitaine territorial de Chasseurs d'Afrique ; Mar-
tineau, capitaine territorial de Zouaves; Garrez, capitaine au 9ebataillon territorial de Zouaves.
La Société mixte de Tir désigna comme délégués au concours
national entre les sociétés de tir territoriales, qui eut lieu au champde tir de Satory en avril 1892, MM. Joseph Grias, Jules Redon et
Paul Moyne. Sur 10.000 tireurs, la délégation fut classée dans les 40
premiers et elle remporta de nombreux prix aux séries à volonté et
au tir d'honneur.
La Société mixte de Tir cessa de fonctionner au commencement
de l'année 1900, bien que sa situation financière fût prospère. Mais
l'éloignement du champ de tir militaire et les commodités du champde tir civil, au point de vue surtout du confortable, firent passer peuà peu les membres de la société mixte dans la société civile.
XXXXIII
EAUX ET FORETS
Avant 1881, Philippeville ne formait qu'un petit cantonnement.Nous y trouvons néanmoins, en 1849, un sous-inspecteur du nom de
Joseph-Gabriel Beaugard. Remarquons aussi les noms de MM. Claude
Quatrepoint, garde en 1844, et Chitier, inspecteur en 1869. En avril
1881, M. Ernest Marmin est chargé de l'installation et de la gestion
de l'inspection dans notre ville. Garde général : M. Delourme.
Liste des inspecteurs :
MM. Ernest Marmin avril 1881.Aubert janvier 1887.
Le Dret 30 octobre 1895.
Pierre-Adolphe Demoyen 10 mars 1900.
Liste des gardes généraux :
MM. Delourme juin 1881.
Philippe Robin ..... août 1881.
Guillot décembre 1885.
Jean Nallet 1887.
George -. 1890.
Maglioli 1895.
Louis Sultzlée 8 février 1898.
Félix de Laage de la Rocheterie 11 octobre 1901.
XXXXIV
CHASSE, SOCIÉTÉS DE CHASSE
Le 15 février 1865, une compagnie de Saint-Hubert est formée
pour la destruction des animaux nuisibles, carnassiers et fauves.
Commission provisoire : MM. Demay, major du 3e Zouaves ; Fenech,
adjoint au bureau arabe départemental ; de Bouyn, propriétaire ;
Laroque, secrétaire de la Sous-Préfecture; Lambert, employé des
forêts ; Anglada, chef d'escadron du Train ; Cosmes, secrétaire de la
Mairie.
Le 1er mars suivant, il est décidé que la compagnie de Saint-Hubert portera le nom de Société de Saint-Hubert, avec ce program-me : Délivrer le pays et l'agriculture des bêtes féroces et nuisibles.
Sont nommés : MM. Demay, président; Lambert, vice-président;
Cosmes, secrétaire ; Dousselin, capitaine au 3e Zouaves, trésorier ;E.-V. Fenech, Laroque, de Bouyn, Simon, de Mareuil, de Boisson,
veneurs.
Procès-verbal de la chasse du 5 mars 1865 : 3 traques ayant été
faites successivement, 9 sangliers, 1 hyène et 5 chacals ont été tirés.
2 sangliers ont été blessés par M. Piquepé et par M. le Médecin-majorde Maugras. 2 sangliers et 2 chacals ont été abattus. Un sanglier,blessé par M. des Isles, a été achevé par M. Roux. Un chacal a été
tué par M. Pautard; un sanglier et un chacal par M. de Bouyn.De 1873 à 1876, un tueur de lions, M. Constant Chéret, devient
célèbre dans notre contrée. Il est blessé mortellement, le 22 novembre
1876, en relevant un piège qu'il avait tendu près de Bissy.
La Société de Saint-Hubert existe toujours ; elle est la plus ancienne
société de chasse de l'Algérie. Son but est la destruction des fauves
et des bêtes nuisibles (lions, panthères, chats-tigres, hyènes, lynxs,
chacals, ratons, porcs-épics, sangliers, renards).
324 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Au 1er janvier 1903, le nombre des fauves tués depuis la création
de la société (1865), était de 3.722. Les battues ont lieu les mardi,
jeudi et dimanche; le produit en est partagé entre les chasseurs.
Les étrangers à la ville peuvent participer aux chasses; les officiers
de l'escadre y sont régulièrement invités et souvent des chasses
spéciales sont organisées en leur honneur.
Son Conseil d'administration est composé de: MM. Henri Ranoux,
président; Gustave Dauphin, vice-président; Florent Gaillard, secré-
taire; Jean Figarola, trésorier.
La société a 8 veneurs, directeurs de la chasse, 2 traqueurs et une
meute de 25 chiens. Les membres participants sont au nombre de 65.
La société de chasse La Diane a été approuvée par arrêté préfec-toral du 12 juin 1894. Son premier bureau fut ainsi constitué, le 20
du même mois : MM. Bordes, avoué, président; Fischer, receveur
des Domaines, vice-président; Crote, propriétaire, trésorier; Duha-
meau, secrétaire. Les présidents furent ensuite : MM. Alem et Octave
Passerieu.
Le nombre des membres participants est de 23.
Le but de La Diane est la destruction des animaux nuisibles. Les
battues ont lieu les jeudi aprés-midi et dimanche matin.
Les sangliers et porcs-épics tués sont partagés également entre les
chasseurs participant à la battue. Le tireur qui a abattu un ou plu-sieurs sangliers a droit à la hure eh sus de sa part égale à celle des.
autres chasseurs. Les marcassins d'environ 5 kilos vidés appartien-nent au tireur, ainsi que les autres animaux divers.
Un superbe territoire de chasse a été mis à la disposition exclusive
de La Diane par M. le Vicomte de la Frégeollière; c'est la forêt du
Zéramna, d'une étendue de 3.000 hectares.
La meute est composée de 10 chiens. Il a été abattu par les membres
de la société, dans les battues régulières, depuis sa création : 189
sangliers, 1 hyène, 49 chacals, 14 porcs-épics, 27 ratons.
Les officiers de l'escadre sont invités à des battues organisées à
leur intention.
Le bureau actuel est ainsi composé : MM. Auguste Fischer, pré-sident; Georges Schmitt, vice-président; Jean Crote, trésorier. Les
traqueurs sont : Le Malem et Belkassem ben Ali.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 325
En 1893 est fondé Le Rallye Philippeville, qui exista pendantdeux ans. C'était une société de chasse, créée uniquement contre les
sangliers et les fauves. Il possédait un vautrait de 12 chiens fox
hounds, achetés chez M. Servant, dans son vautrait qui est un des
plus importants de France; ce gentleman possède une meute de 150chiens.
Le Rallye eut quelques succès et ses trompes ont sonné plus d'unefois l'hallali au grand ébahissement des arabes.
Le président était M. le Comte de Lafon; son départ pour Cons-
tantine, en 1895, amena la dissolution de la société, dont il étaitl'âme.
Nous extrayons quelques passages du livre de M. E.-V. Fenech ;Récits et Chasses d'Algérie :
En 1852, à El-Diss, vers les cinq heures du soir, une femme accourait au-devantde deux chasseurs, qui cheminaient sur la grande route après avoir dépassé leblockaus de la plaine, et leur annonçait qu'un lion se tenait, à une centaine de
mètres, couché en travers du chemin. Tous deux marchent résolument vers le
point indiqué. L'un d'eux, M. Simonet suit la route même ; l'autre, M. Pottier.
père de notre concitoyen M. Jules Pottier, suit les bords. Il aperçoit le lion et,
profitant de ce que son attention se portait sur Simonet. l'ajuste et fait feu ; l'effetfut foudroyant. L'animal bondit sur lui-même et raidit ses membres dans une
seule convulsion ; c'était une lion de deux ans.
Autres noms d'intrépides chasseurs cités par Fenech : Giraud ;
Charrier, chef de bureau à la Mairie; Zill ; Pascal Bugelli ; A. de
Boisson; Rouden; Béchu ; Fouet; Laroque; Desjardins, récemment
retraité, étant directeur des Contributions diverses à Constantine.
XXXXV
FETES ET CEREMONIES, HOTES ILLUSTRES
Le 11 octobre 1846 a lieu la fête patronale du village Valée. Le
lieutenant-général Bedeau honore cette fête de sa présence. L'orches-
tre est composé de musiciens militaires autorisés par le Colonel du
43e de Ligne.M. Alexandre Dumas et son fils arrivent, le 20 décembre 1846, sur
la corvette Le Véloce. Partis de suite pour Constantine, ils reviennent
ici le 23 et s'embarquent à destination d'Alger.Le dimanche, 30 avril 1848, a lieu au village Valée, la plantation
de l'arbre de la Liberté. Les autorités civiles, le clergé et un grandnombre d'habitants de la ville et des villages environnants se rendent
à cette cérémonie. La plantation de l'arbre est suivi d'un banquet
patriotique, pendant lequel plusieurs discours sont prononcés ; la fête
est terminée par un bal champêtre. Même cérémonie à Damrémont le
dimanche, 14 mai 1848.
Le 12 octobre 1849, arrive d'Alger M. Pierre Bonaparte, repré-sentant du peuple, chef de bataillon à la Légion étrangère.
M. le Général de brigade de Saint-Arnaud, nommé commandant
de la province de Constantine, arrive de Bône le 19 février 1850. Il
reçoit les autorités civiles et militaires et promet de s'intéresser à
notre ville.
Le général Pélissier, Gouverneur général par intérim, arrive le 18
mai 1851. Une salve de 11 coups de canon annonce son arrivée en
ville; la Milice est sous les armes, formant la haie sur son passage.
Les mêmes honneurs qu'avait reçus, quelques jours auparavant, le
Gouverneur général d'Hautpoul, sont rendus au général Pélissier.
Le soir, à onze heures, une nouvelle salve de 11 coups de canon
annonce le départ du général, qui s'embarque immédiatement sur
Le Titan, partant le lendemain matin pour Bône.
328 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le 10 avril 1852, le général de Mac-Mahon, commandant supérieurde la province, arrive le matin par le courrier d'Alger. Le 7 mai
suivant, le général Randon, Gouverneur général, arrive vers deux
heures du soir, venant de Constantine. Il ne veut pas de réceptionofficielle.
Séance du 15 septembre 1858. Le Conseil demande d'urgence l'ou-
verture d'un crédit de 10.000 fr. pour la réception de S. A. T..le
prince Napoléon.Séance du 6 mai 1859. Le Maire informe le Conseil que S E. le
Ministre de l'Algérie et des Colonies a commencé ses tournées surle sol africain. Le Conseil, considérant que l'on ne saurait trop faire
pour recevoir le Ministre que l'Empereur a choisi pour tenir les rênesde l'administration algérienne; que son arrivée inaugure une èrenouvelle pour l'Algérie et que la municipalité, au nom de la popu-lation qu'elle représente, doit se montrer jalouse de prouver sa recon-
naissance; décide, à l'unanimité, qu'un banquet sera donné à S. E.aux frais de la ville. Y seront conviés tous les chefs de service etles membres de la Chambre de Commerce. Un bal par souscription,à 10 fr. par tête, sera organisé. Les frais de réception, 6.000 fr.
environ, seront prélevés sur les fonds disponibles du budget de 1859.Dans sa réunion du 8 septembre 1860, le Conseil vota un crédit de10.000 fr. pour cette réception, le Ministre n'étant venu qu'à cette
époque.
RÉCEPTION DES TROUPES REVENANT D'ITALIE, LE 23 AOUT 1859
La porte de Stora, par où elles devaient faire leur entrée en ville,avait été coquettement décorée de guirlandes de feuillages, dont
plusieurs entouraient des croix de la Légion d'honneur et les lettresN. E. sur les frontispice, lequel était surmonté, au centre, d'un grandaigle impérial pavoisé de bannières tricolores ; on y lisait en carac-tères bleus et saillants :
LA POPULATION DE PHILIPPEVILLEA L'ARMÉE D'ITALIE
ET AUX TROUPESDE LA PROVINCE
De chaque côté, renfermés dans un écusson, on avait écrit lesnoms des batailles gagnées par notre armée. Au-dessus de ces deux
écussons, deux trophées d'armes complétaient cette décoration.Le 24, lendemain de l'arrivée des Tirailleurs algériens, tous ces
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 329
militaires furent traités dans une diffa offerte par leurs compatriotesvenus des tribus environnantes et organisée par les soins des chefsdes deux bureaux arabes civil et militaire et de M. le Cadi; le cous-cous circulait à profusion et la gaîté était générale.
Le lendemain, vers le soir, par les soins de la Commission délé-
guée, il a été fait aux militaires des autres corps rentrant d'Italieune distribution de vivres, de pipes et de tabac.
Puis, vers huit heures du soir, une brillante illumination éclairaitla place de la Marine, lieu désigné par le punch, auquel assistaientles officiers venant d'Italie, ceux de la garnison et les autorités civileset militaires. Pendant tout le temps, à intervalles rapprochés, la
musique de la Milice se faisait entendre.
Des toasts ont été portés par MM. Wallet, maire; Toupé, sous-
préfet par intérim ; Jauffret, président de la Commission ; de Nobelly,adjoint au maire, et par M. le Colonel du 3e Chasseurs d'Afrique.
Séance du 10 juin 1861. Vote d'un crédit; illimité, à la dispositiondu Maire, pour la réception de LL. AA. IL le prince Napoléon etla princesse Clotilde.
Le journal L'Echo de Numidie, dans son numéro du 19 juin 1861,raconte ainsi le voyage du prince Napoléon et de la princesse Clotilde:
LL. AA. II. le prince Jérôme Napoléon et la princesse Clotilde sont entrés en
rade de Stora le 15, vers quatre heures de l'après-midi, abord du yacht Le Jérôme
Napoléon.Un accident survenu pendant la traversée de Bône à Philippeville a retardé
l'arrivée de LL. AA. II. Le yacht, voulant passer entre une masse de rochers et le
rivage, a touché ; comme il était à craindre que l'accident survenu n'eût occasionné
des avaries graves, le prince a envoyé sa chaloupe à vapeur à Stora pour deman-
der des secours en hommes et en bateaux.
La Seyne est partie aussitôt avec deux gondoles dirigées par MM. Carbone et
Santamaria. Le Protis est parti le matin, portant 80 hommes d'Artillerie et des
vivres pour ces hommes. A leur arrivée, on avait commencé à opérer le dégage-ment du yacht ; grâce à leur concours, on a pu le remettre à flot sans autre
avarie que le bris de la fausse quille dans une partie de l'avant. La petite escadre
s'est dirigée immédiatement sur Stora.
Il est inutile de dire que tout le monde, dans cette circonstance, a fait son
devoir; mais nous devons mentionner particulièrement le capitaine du Protis,
qui a fait exécuter à son bâtiment des manoeuvres habiles et décisives, ayant
puissamment contribué au dégagement du yacht.
La frégate L'Ariège, arrivée le matin du 15 et portant des Chasseurs d'Afriquerevenant de Syrie, reçut l'ordre de débarquer immédiatement ses troupes et de
partir pour le cap de Fer, mais heureusement sa présence n'était plus nécessaire
43
330 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
et elle n'a pas eu besoin d'aller jusqu'au bout; la petite escadre avait déjà reprissa route.
Le Prince et la Princesse n'ont débarqué que le 16 au mutin, à quatre heures et
demie, et sont partis immédiatement pour Constantine, accompagnés de M. le
Préfet et de M. le Général Desvaux.
Le yacht impérial La Reine Hortense est entré dans notre rade, pour remplacersans doute Le Jérôme Napoléon, qui sera, dit-on, envoyé en réparation à Toulon.
Hier, 17, des dépêches venues de Constantine ont remis sur pied notre popula-tion ; aux préparatifs déjà faits et qui consistaient en un arc de triomphe improviséà l'entrée de la place de Marqué, sont venus se joindre ceux de la population ita-
lienne, qui en a élevé un deuxième dans là rue Impériale, à la hauteur de la rue
du Cirque. Il était surmonté de trois inscriptions en langue italienne, que nous
traduisons ; celle de gauche portait :
AU PLUS ILLUSTRE DES ROIS, VALEUREUX CHAMPION DE LA LIBERTE DE SON PEUPLE
celle de droite :
A CLOTILDE DE SAVOIE, AUGUSTE FILLE DE VICTOR-EMMANUEL I, ROI D'ITALIE
au milieu :AU PRINCE NAPOLÉON L'ITALIE RECONNAISSANTE
Toutes les maisons de la rue Nationale étaient pavoisées et splendidement illu-
minées.Leurs Altesses Impériales, attendues entre onze heures et minuit, sont arrivées
vers dix heures et demie, avec l'intention manifeste de se dérober aux vivats et
aux acclations de la foule qui encombrait la rue. Mais les Italiens, groupés en
masse sous leur arc de triomphe, ont été assez heureux pour les arrêter au passage.Ils avaient à leur tête un jeune porte-drapeau costumé en bersaglieri et une jeunefille vêtue de blanc, qui a offert à la Princesse un magnifique bouquet et lui a
remis, au nom des Italiens de Philippeville, l'adresse dont nous traduisons le texte :
« A Son Altesse Impériale, la Princesse Clotilde de Savoie,
« Les Italiens résidant à Philippeville, heureux d'accueillir dans ces murs la fille
de leur roi, prient Votre Altesse Impériale de vouloir bien accepter l'hommage
qu'ils lui présentent humblement, comme un témoignage de leur dévouement
pour leur bien-aimé et valeureux souverain.« Quoique loin de la Patrie, leurs aspirations ne s'élancent pas moins vers la
terre natale et l'Auguste Monarque, premier soldat et intrépide défenseur de la
liberté et de l'indépendance de l'Italie.
« Tous les Italiens résidant à Philippeville. »
Une chaloupe à vapeur a conduit LL. AA. à bord de la Reine Hortense, yachtimpérial, qui a levé l'ancre le 19, à sept heures du matin.
Séance du 11 septembre 1861. Le Préfet ayant annoncé l'arrivée
prochaine du Gouverneur général, le Conseil, considérant qu'ilconvient de fêter dignement la première autorité du pays et attendu
que S. E. est accompagnée de Madame la Duchesse de Malakoff,décide, à l'unanimité, d'offrir un banquet à LL. EE. dans la salle-
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 331
d'asile, de donner un bal au théâtre, d'illuminer tous les établisse-ments publics et les rues où passeront LL. EE., enfin de décorer la
porte de Stora et de dresser un arc de triomphe à l'entrée de la rue
Impériale. Le Conseil met à la disposition du Maire un crédit illimité
pour les frais de réception.
Nous extrayons les lignes suivantes d'un excellent ouvrage, intitulé
Napoléon III en Algérie, édité par Challamel aîné, de Paris, en1865 et publié par M. Octave Teissier, correspondant du ministèrede l'Instruction publique, conservateur du musée scientifique, artis-
tique et archéologique de Draguignan et père de notre concitoyen,M. Paul Teissier :
L'empereur Napoléon III arrivait à Philippeville le 28 mai 1865, sur le yachtimpérial, escorté des escadres française et italienne. La rade offrait un spectaclemagnifique. Vingt vaisseaux ou frégates, brillamment pavoises, mêlant la voix de
leurs canons aux acclamations de la foule, qui bordait la côte ; les évolutions de
l'escadre italienne, qui s'éloignait après avoir salué la ville ; le yacht s'avançant,entouré d'une quantité considérable de canots, d'où s'élançaient les cris de « Vive
l'Empereur », mille fois répétés et auxquels répondaient les vivats de la populationet ceux des ouvriers du port, agitant de nombreux drapeaux; tout enfin, dans
cette mise en scène, éclairée par un soleil splendide, contribuait à donner un aspect
grandiose et gai, tout à la fois, au débarquement du cortège impérial.Sa Majesté fut reçue sur le quai par M. Wallet, maire, entouré de son Conseil
municipal, et par toutes les autorités civiles et militaires.
M. Wallet, en remettant à l'Empereur les clefs de la ville, lui adressa un discours ;
l'Empereur répondit qu'il s'intéressait à la prospérité de Philippeville, puis il s'en-
tretint avec MM. Nouvion, sous-préfet ; de Boisson, président de la Chambre de
Commerce ; de Gourgas, président de la Société de Secours mutuels ; Gay, ingénieuren chef des Ponts et Chaussées, et Lambert, inspecteur des forêts.
Il recommanda aux chefs arabes le dévouement à la France, puis il se rendit à
l'église pour entendre la messe et il remarqua, en parcourant la rue Impériale, les
arcs de triomphe, l'un élevé par la Municipalité, l'autre par les Italiens et le, troi-
sième par les Sapeurs-Pompiers. Après la messe, Sa Majesté est partie pour
Constantine.
Napoléon III s'arrêta un instant à Saint-Antoine, où deux arcs de triomphe lui
avaient été élevés : l'un par les habitants du village et construit avec des fleurs
et de la verdure ; l'autre par les concessionnaires des forêts, formé avec du liège et
offrant dans son ensemble un spécimen de tous les objets de ce produit, depuis le
liège brut jusqu'au liège artistement travaillé.
Le 6 juin, en revenant de Constantine, Napoléon III ne tut pas peu surpris de
trouver sur l'emplacement même où il avait déjeûné le 28 mai, un petit monument
332 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
commèmoratif portant, sur une table de marbre, l'inscription suivante, écrite en
lettres d'or : — S. M. Napoléon III, Empereur des Français, a déjeuné ici le 28
mai 1865. — L'Empereur remarquant la famille Bugelli, qui le saluait avec enthou-
siasme, fit arrêter sa voiture et, après avoir remercié Pascal Bugelli, lui demanda
s'il désirait quelque chose : Non, Sire, répondit le colon. On pria plus tard Bugellide dire pourquoi il n'avait placé qu'une inscription sur le monument qu'il venait
d'élever : C'est que, chaque année, répondit-il, quand la récolte me le permettra,
j'inscrirai sur une plaque nouvelle ce que l'Empereur aura fait pour l'Algérie,
après son voyage »
Nous avons visité, il y a peu de temps, le monument et nous
avons constaté que les trois autres faces sont restées vierges de
plaques commémoratives. Le voyage du Souverain n'avait servi sans
doute à rien d'appréciable pour ce brave et digne colon, qui n'enviait
ni rubans, ni secours, mais qui, dans son coeur simple, pensait quela venue du grand Chef allait faire prospérer l'Algérie en suppri-mant les entraves apportées à son essor par une administration bien
intentionnée, mais incapable de coloniser.
La fête du 15 août 1868 est célébrée avec beaucoup d'éclat. La
Société Philharmonique se distingue. Les luttes maritimes des 15
et 16 août sont très brillantes; voici le résultat de quelques courses:
6 avirons et au-dessous :
1er prix. M. Salvo Grech, 100 fr. et un fanion d'honneur.
2e prix. Bateau de M. Lesueur, 90 fr. et un fanion.
A la voile :
Prix. Bateau Notre Dame d'Afrique, patron Bertucci, 60 fr. et un
fanion.
M. Jules Favre est de passage dans notre ville le 20 avril 1870.
Une réunion a lieu au casino, où il est chaleureusement applaudi.M. Cambon, gouverneur général, arrive le 25 juillet 1891 ; un
punch lui est offert le soir au théâtre. Arrivée, le 18 février 1900, deM. Henri Roujon, directeur des Beaux-Arts. M. le Gouverneur gé-néral Edouard Laferrière visite notre ville le 30 juin 1900.
Le centenaire de Victor Hugo a été célébré d'une façon éclatantedans notre ville le 26 février 1902. Voici le compte-rendu de la fête
d'après le journal Le Victor Hugo, qui parut spécialement à cetteoccasion :
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 333
Notre beau soleil d'Afrique, sur lequel on peut compter en toutes saisons, a faitdéfaut mercredi ; nous avons eu un ciel parisien. Mais la pluie qui, la nuit durant,avait donné en averses continues, s'est arrêtée à temps et la fête du couronnementa pu se dérouler dans la rue Gambetta et sur la place Victor Hugo, sans êtremouillée.
L'invitation du Maire avait été entendue ; toutes les fenêtres étaient garnies de
drapeaux, plusieurs magasins entourés de guirlandes et, on l'a constaté avec un
grand plaisir, les étrangers eux-mêmes avaient donné l'exemple.Dès une heure de l'après-midi, les rues aboutissant au square sont animées ; ce
sont des toilettes fraîches, car, bien que le soleil fut absent, la température étaitd'une douceur printanière.
Successivement, les enfants des divers établissements arrivent et se massent aufond du square, qui présente un coup d'oeil des plus joyeux. Précédés des musiquesles filles, puis les garçons se dirigent vers la place Victor Hugo. Signalons, en
passant, la décoration pleine de goût qui fait honneur à M. Roche, architecte dela ville.
Au fond de la place est adossée une estrade avec, sur le devant, le buste deVictor Hugo ; tout autour, une profusion de verdure, de fleurs, d'oriflammes et de
drapeaux.Au pied de l'estrade les enfants de l'école enfantine, les mains pleines de fleurs.Dès que tout ce petit monde charmant fut bien massé, les musiques réunies en-
tonnent la Marseillaise qui est écoutée, têtes nues, dans le plus grand silence.
M. le Maire entouré de ses adjoints, des conseillers municipaux, du délégué
financier, des membres de l'enseignement : principal, professeurs, maîtres et
maîtresses, monte sur la tribune et prononce un discours que des longs applaudis-sements accueillent.
Tour à tour, les représentants du collège, de l'école secondaire des filles, des
écoles primaires (garçons et filles) de la ville et du faubourg, viennent déposer des
couronnes, des gerbes, des bouquets, tandisque la place retentit d'acclamations
joyeuses.Les petits enfants de l'école enfantine jettent des fleurs.
Le cortège se reforme et, toujours précédés de nos musiques réunies, les enfants
se dirigent vers le théâtre, où ils doivent assister à la matinée littéraire.
Ici, nous renonçons à décrire l'avalanche humaine qui se précipite et assiègetoutes les portes. Malgré un déploiement de police, on se bouscule, on déborde;
pour contenir toute cette foule amassée sur la place du théâtre, il eut fallu une
salle contenant 5 ou 6.000 places, et pas une n'eut été vide.
Enfin, sans accidents, on pénètre, on se place : les autorités civiles et militaires,
les invités, les élèves avec maîtres, sur la scène qui, bien que débarrassée de tous
les décors, ne peut recevoir tout le monde.
Dans la salle, non moins comble, ce ne sont que riants visages de dames et de
demoiselles et tout cela empli de la plus épanouissante gaieté.A deux heures et demie précises, aux accords de la Marseillaise, le rideau se
lève et alors des deux côtés le spectacle est merveilleux ; la salle, en voyant le
buste entouré de palmes, éclate en applaudissements et en bravos.
L'émotion une fois calmée, M. le Dr Ricoux, maire, se présente sur le devant
de la scène et prononce un discours très applaudi.
334 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Le programme suit alors son cours. Après la lecture de vers de M. Roger-
Lacassagne, applaudis comme ils le méritent, M. le professeur Fouret commence
une conférence sur Victor Hugo.Pendant prés dé trois quarts d'heure, sans fatigue, la salle suit avec une reli-
gieuse attention les paroles du conférencier. Une explosion d'enthousiasme accueilleles derniers mots. La salle entière éclate en bravos.
Tour à tour, MM. Derval, Darvys et Dupouy, directeur et artistes du théâtre
municipal, viennent lire les extraits de l'oeuvre de Victor Hugo, inscrits au pro-
gramme, et tous recueillent des applaudissements bien mérités. La Mort de
Gavroche, fort bien mimée par M. Dupouy, a surtout impressionné la salle.Le programme est achevé ; alors garçons et filles des écoles laïques viennent
entourer le buste et chanter l'hymne du poète, mis en musique par leur professeur,M. Tournou.
C'est aux accents de la Marseillaise que la foule des auditeurs s'écoule lente-
ment, unanime à reconnaître l'éclat de la fête et l'enthousiasme qu'elle fait naître
dans toute la ville.
L'exiguité de la salle, due surtout à l'affluence des auditeurs, n'a pas permis de
satisfaire à toutes les mesures prises, mais en somme une foule nombreuse, calme
et heureuse, a pu se réunir et entendre.
Toute la population y a pris part. Messieurs les Officiers, avec une délégation des
troupes de la garnison à laquelle des places avaient été réservées, se sont unis à
la population civile.
Quand nous avons arrêté le plan de cette histoire, nous ne nous
attendions pas à l'heureuse chance de pouvoir la terminer par un
événement aussi important que celui du voyage de M. le Président
de la République en Algérie. M. Loubet est le premier Président quisoit venu visiter notre colonie. Nous allons raconter aussi brièvement
que possible son passage à Philippeville.Le prélude des fêtes a été l'entrée dans notre port, le 21 avril, de
de la division de l'escadre commandée par M. le Vice-Amiral Pottier
et composée de trois cuirassés : Le Gaulois , Le Charlemagne et Le
Saint-Louis, du croiseur Le Linois, des contre-torpilleurs La Ra-
pière et La Pertuisane et du torpilleur La Hallebarde.Le lendemain, à dix heures du matin, eut lieu une prise d'armes
des troupes de la garnison ; il s'agissait de décorer de la médaille de
Chine cinq sous-officiers du 3e Zouaves ayant pris part à l'expédition.Cette cérémonie, à laquelle toute la population s'était associée, eutlieu devant le monument de la place du Commerce. A la prière deM. le Chef de bataillon Francez, ces décorations furent remises parM. le Vice-Amiral Pottier, qui prononça avant la remise une allocu-tion chaude et patriotique que tous les assistants applaudirent.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 335
Nous la reproduisons ici :
Mon cher Commandant,
En me conviant à la cérémonie de remise des décorations de Chine à votre
bataillon de Zouaves, vous m'avez fait le plus grand plaisir.J'ai vu, là-bas en Chine, les Zouaves à l'oeuvre. Non seulement je les ai appréciés,
mais encore par leur belle tenue, leur endurance, leur gaîté, ils ont fait l'admira-
tion de toutes les puissances. J'étais fier de les avoir sous mes ordres, sous la
Grande Muraille.
Je regrette de ne pouvoir être là pour l'inauguration de votre beau monument,mais je vous témoigne hautement que vous avez toute mon admiration et quezouaves et marins sympathiseront toujours.
Le soir, à cinq heures, la musique du Saint-Louis joue plusieursmorceaux sur le kiosque de la place de Marqué. Puis, à huit heures
trois quarts, le Cercle musical donne un concert suivi de bal, enl'honneur de Messieurs les Officiers de l'escadre.
M. le Dr Ricoux, maire, avait, depuis quelques jours, fait afficher
et publier la proclamation suivante :
ARRIVÉE DE M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE A PHILIPPEVILLE
Chers Concitoyens,
M. le Président de la République arrivera à bord de La Jeanne d'Arc, vendredi
prochain, 24 avril, à huit heures du matin.
Bien que son séjour parmi nous ne doive pas dépasser quelques heures, nous
aurons tous à coeur, nous inspirant de nos sentiments patriotiques, de manifester
notre respetueuse reconnaissance vis-à-vis de celui qui représente si dignement
la République.J'invite tous les habitants à décorer leurs demeures, à pavoiser leurs fenêtres,
non seulement dans la rue Nationale, que le Cortège présidentiel doit parcourir
dans toute sa longueur, mais tous, sans exception, même dans la haute ville.
Il faut que M. Loubet, en avançant dans le golfe, puisse admirer, dans sa parure
de fête, notre ville si pittoresque vue de la pleine mer.
Et, quand le vénéré Chef de l'Etat se trouvera parmi nous, que de toutes les
poitrines éclatent les cris répétés de :
Vive la France ! Vive l'Algérie ! Vive la République ! Vive Loubet !
L'escadre, qui ne devait rester que vingt-quatre heures dans notre
port, y a demeuré quatre jours, ce qui a permis à la population et
à un grand nombre d'étrangers à la localité de visiter les superbes
bâtiments de notre flotte. Pendant ce séjour, M. le Vice-Amiral
Pottier ne ménagea pas, à diverses reprises, ses appréciations flatteuses
sur notre beau port. Elle leva l'ancre le vendredi, 24 avril, une heure
336 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
avant l'arrivée de La Jeanne d'Arc, qui fut signalée par le pilotageà six heures du matin.
La Jeanne d'Arc, portant à son bord le Président de la République,franchit la passe à sept heures et quart. Sur les quais et le long de
la rue Nationale, les troupes s'échelonnent aussitôt et forment la
haie.
Toutes les fenêtres, tous les balcons sont noirs, ou plutôt sont
blancs de monde, car le soleil, un soleil printanier, darde ses rayonsradieux et la plupart de nos concitoyennes ont revêtu des toilettes
claires.
L'estrade placée au fond de la place de Marqué, est bondée de
jolies femmes qui forment comme un parterre de fleurs du plus bel
effet.
Les corps constitués, les fonctionnaires, se rendent par groupessur les quais, où doivent avoir lieu les présentations. Ils pénètrent,aussitôt, dans le salon aménagé avec un goût exquis par M. Fabre,dans les hangars de la Société Générale et sont placés dans l'ordre
réglé par le protocole.Il est huit heures, le canon tonne. M. Loubet quitte La Jeanne
d'Arc et se rend au débarcadère sur une chaloupe à vapeur. Il met
lestement pied à terre et s'avance vers le salon de réception.MM. Fallières, président du Sénat, Maruéjouls, ministre des Tra-
vaux publics, Etienne, vice-président de la Chambre des Députés,Thomson, Aubry, députés, Lesueur, ancien sénateur, Plantié, préfet,Pinelli et Féraud, délégués financiers, Sider, conseiller général, et
le Commandant Reibell sont à ses côtés.Dès son entrée sous le vaste et splendide velum, M. Loubet est
arrêté par Madame Alby, directrice de l'école enfantine, qui lui
présente cinq enfants chargés de fleurs. Les costumes des trois pre-mières fillettes, Mesdemoiselles Julie Blain, Marie Gardet et Emilie
Aquadro, sont respectivement bleu, blanc et rouge ; les bouquets etles rubans qu'elles portent sont également de mêmes couleurs et
composent le plus gracieux drapeau tricolore qui se puisse rêver.
Les deux jumeaux : Fatma et Mohamed Karoui, élèves de la même
école, portent un bouquet tricolore avec les rubans du drapeau arabe
sur lesquels sont inscrits en lettres d'or :
Philippeville-Algérie- 24 Avril 1903
Nous donnons ici une poésie due à la plume de M. Louis Bertrand ,
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 337
que récita fort gentiment la jolie fillette de notre estimé concitoyenM. Blain:
HOMMAGE A M. LOUBET, PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
VOEUX D'ESPÉRANCE
Monsieur le Président, on nous a dit :
« Aujourd'hui, c'est un jour de grande fête,« Où l'on voit le grand comme le petit« Heureux devant vous d'incliner la tête. »
Puis on ajouta : « Spectacle charmant !« Elle nous revient la douce Espérance« Et tout nous sourit puisqu'en ce moment« Dans notre cité nous avons la France. »
Nous sommes aussi de petits Français ;Nous sommes aussi de jolies Françaises.Ainsi qu'à Paris, d'où vient le progrès,Nous aimons les jeux, le sucre et les fraises;Mais pendant la classe on est studieux
Et sous nos doigts blancs l'encre coule et file.
Daignez, par ma voix, recevoir les voeux
Des petits enfants de Philippeville.
Le Président de la République, avec sa bonhomie habituelle et
son sourire bienveillant, embrasse Mademoiselle Julie Blain et les
mignons enfants qui l'entourent et adresse quelques mots d'élogebien mérités à Madame Alby, leur digne maîtresse.
M. le Maire présente le Conseil municipal et prononce une allocution.
M. Loubet dit qu'il est heureux d'être venu à Philippeville et qu'ilconnaît les sentiments, le patriotisme des habitants.
Les consuls des puissances étrangères saluent ensuite le Président.
M. Brown, Président du Tribunal civil, présente le personnel de
la Justice.
M. Loubet a un mot aimable pour M. Brown et pour les membres
du Tribunal.
M. Teissier, Président de la Chambre de Commerce, prononce en-
suite un remarquable discours.
M. Loubet répond en disant qu'il fait des voeux pour que notre
belle ville prospère de plus en plus. Par sa situation exceptionnelledans la Méditerranée, il ne doute pas que Philippeville ne devienne
une des plus importantes cités de la Colonie.
44
338 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
M. Francez, commandandant d'armes, affirme le dévouement de
l'armée à la Patrie.
M. Sandraly, curé doyen, présente son clergé, qui, dit-il, ne s'oc-
cupe pas de politique.M. Ledermann, pasteur protestant, dit quelques mots. M. Loubet
remercie.
M. Godard, directeur de l'Ecole d'Agriculture, présente au Prési-
dent le personnel de l'école, en l'assurant de tout son dévouement aux
institutions républicaines et en signalant le rôle utile que l'enseigne-ment de l'agriculture peut jouer dans un pays où les intérêts agricolessont prépondérants.
M. le Président répond dans le même sens et témoigne toute la
satisfaction qu'il a éprouvée en constatant la richesse de l'agricul-ture en Algérie.
M. Mathieu, principal, présente à son tour, les professeurs du
collège.M. Loubet dit qu'il est heureux de la prospérité de cet établisse-
ment, qui compte un nombre d'élèves considérable.
Les instituteurs sont présentés par M. Zannettacci, directeur de
l'Ecole des Garçons, qui fait entendre quelques paroles éloquentes.
M. le Président répond, disant qu'il connaît les sentiments des
instituteurs et ajoute que, dans un pays où les étrangers sont nom-
breux, on ne saurait trop faire connaître et aimer la France.
Le Président passe ensuite devant chacun des corps constitués et
répond en quelques mots à tous les souhaits qui lui sont adressés,notamment à M. Beaumont, vénérable de la Loge maçonnique, et
à M. Degand, président de la Fraternelle.
Après les présentations, qui ont duré une demi-heure, le cortègese forme et se dirige vers le monument du 3e Zouaves, où M. Loubet
fait arrêter son landau. M. Garrez s'avance alors et, au nom des
Anciens Militaires dont il est le président, prononce un beau discours
patriotique.C'est alors que la Chorale, massée près de l'estrade si bien orne-
mentée par la maison Laout, attaque un choeur composé par M.
Louis Bertrand et mis en musique par M. Adrien Tournou.
Puis le cortège monte vers la rue Nationale. Il passe sous six arcs-
de triomphe superbes, que nous décrirons tout à l'heure, et sous unemultitude de petits drapeaux formant un ciel splendide. Sur tout le
HISTOIRE DE PHIL1PPEVILLE 339
parcours, la foule applaudit vivement et crie : Vive Loubet ! Vivele Président !
Après avoir parcouru toute la rue Nationale jusqu'à la place Wa-
gram, on revient sur ses pas et on se dirige vers la gare.Coquettement décorée de drapeaux, de verdure et de guirlandes
multicolores, la gare mérite une mention spéciale. Des haies artifi-cielles de palmes et de branchages cachent les abords de la cour et
la rendent agréable à voir ; la façade des bureaux et des salles d'attenteest également enjolivée de palmes, de trophées et de drapeaux.
Aménagé et décoré avec le plus grand soin, un salon donne accès
sur le débarcadère. Entièrement tapissé d'andrinople rouge parseméd'étoiles dorées, le salon est décoré avec un goût vraiment artistique.
Bronzes d'art, palmes et mimosas, lianes fleuries encadrent admi-
rablement des tentures de prix.M. Loubet et les personnages qui l'accompagnent montent aussitôt
dans le train présidentiel qui comprend treize wagons.A dix heures, le convoi s'ébranle sous les vivats de la foule.
Une heure après le départ du Président, La Jeanne d'Arc quittaitnotre port et se dirigeait sur Bône, escortée des contre-torpilleurset des torpilleurs de son escorte.
Revenons maintenant sur cette belle journée de fête, favorisée parun temps splendide.
LES ARCS DE TRIOMPHE
Le premier arc de triomphe est à l'entrée de la rue Nationale, à
la Marine. Il représente les murs et les tours d'une ville fortifiée et
a été dressé par la Commune.
Le deuxième est celui de la Colonie italienne.
Construit par M. Jules Grosso, sur les plans de M. Bourbon, archi-
tecte, et avec l'aide de MM. François de Angelis et Louis Contursi,
il est d'une réelle élégance. Au sommet, la couronne royale d'Italie,
d'un aspect très décoratif ; sur les côtés les écussons de France et
d'Italie. Dans deux niches de verdure, deux fillettes portant en écharpeles couleurs tricolores, l'une bleu, blanc, rouge, et l'autre vert, blanc,
rouge, représentent les deux nations latines. Ce sont Mesdemoiselles
Geneviève Esquilante (Italie) et Louise Baroni (France). Les déco-
rations de verdure et de fleurs, très fraîches et très belles, sont dues
à M. Salvator Baroni, jardinier de M. Vellard. Une banderole, tenant
la largeur de l'arc, indique : La Colonie Italienne à M. le Présidentde la République Française.
340 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Ajoutons qu'en dehors des personnes citées plus haut, ceux quiont pris l'initiative de cette magnifique décoration sont MM. Marius
Daprela , consul d'Italie, Félix Gianotti, Raphaël Migliaccio et JosephDinacera, etc., etc.
Le troisième a été élevé par la Municipalité à la hauteur de la
Mairie. M. Sublime en a exécuté le travail.
Ce sont là des draperies parsemées de fleurs. Des guirlandes de
feuillage courrent du sommet au bas de ce monument de bon goût,
produisant le plus bel effet.
Le quatrième est celui de la Colonie Maltaise.
C'est un superbe travail effectué avec talent par notre concitoyenM. Maroni. De chaque côté sont deux pilastres entourés de feuillage et
de fleurs, surmontés d'un superbe dôme portant entrelacés des tro-
phées de drapeaux aux couleurs françaises et anglaises et sur lequelon lit : La Colonie Maltaise au Président de la République.
Au sommet, deux grands drapeaux portent la croix de Malte. Une
longue guirlande de feuillage entrecroisé, avec, dans son milieu, un
énorme bouquet de fleurs, joint les chapiteaux au centre du dôme.
Pour marquer l'oeuvre accomplie en Algérie et plus particulière-ment à Philippeville, où ils ont créé de splendides et riches jardins,
comparables à ceux de Salluste, d'antique mémoire, nos maraîchers
laborieux ont suspendu, comme emblème de leur travail, au sommet,de cet are symbolique, des branches entières de citronniers, d'oran-
gers, etc.
L'effet produit par cet ensemble de verdure et de fruits du pays.est des plus heureux.
Le cinquième est celui des indigènes; il a été construit par M. Vie,sur les plans de M. Paul Rossi.
On lit en exergue : La population Indigène au Président de la
République.C'est un ensemble délicieux de tapis aux riches couleurs, de ten-
tures arabes, produits de l'industrie du pays, et de palmes verdoyantesde dattiers.
Un minaret hardi, se dressant vers les cieux , surmonté du croissant
de Mahomet, encadré de drapeaux indigènes, complète merveilleu-
sement l'ensemble de ce monument de style mauresque.Le sixième est l'arc de triomphe des Agriculteurs, très gracieur
avec ses guirlandes de fleurs et les instruments aratoires qui en
forment la base.
HISTOIRE DR PHILPPEVILLE 341
LE MONUMENT DU 8e ZOUAVES
M. Mercier, président de la société La Chéchia,, prononei un longdiscours, couvert par les applaudissements, pendant l'inaugurationdu monument en l'honneur du 3° Zouaves. MM. Jacob, gierétaire,Noël Coullaud, Constant, M. et Mme Laurin, membres, étaient à sescôtés.
Les yeux se portent tout naturellement vers la vaillante cantinièredu 3e Zouaves, Madame Laurin. On ne nous pardonnerait peint dene pas placer ici une notice historique sur la fie militaire de cettefemme si digne d'éloges, qui compte 36 ans de services et 35 campa-gnes.
Nous extrayons donc du livre Cantinière et Vivandiere françaisesde M. Richard, capitaine au 20e bataillon de chasseurs à pied les
quelques lignes qu'il y a consacrées â Madame Laurim ;
Une de nos cantinières dela guerre frabco-allemandeest
dans toute l'armée d'Afrique ; c'est Madame Laurin, cantinierre au 3e régiment de
Zouaves, â Philippeville. Quelle belle et noble existence militaire quecelle decette vaillante Française !
Madame Laurin, demoiselle Dumas, née le 28 juillet 1845, s'était mariée en
1863, â M. Datailley, maréchal des logis trompettepassent tons deux au 3e Zouaves, où Madame Dutailley est commissionée pourtenir l'emploi de cantiniére.
Surviennent les jours sombres de 1870, La nouvelle de la déclaration de guerreà l'Allemagne est accueillie par des acclamations enthousiastes au 3eZouaves,avec lequel Madame Datailley s'embarque pour la France ,
Le jour de la bataille de Froeschwiller, pendant que son brave régiment se faithacher glorieusement â la défense du Niéderwald , la jeune cantinière prodigueses
soins aux blessés et sert la goutte aux zouaves presque sur la ligne de feu. A
quelques pas d'elle est tombé le lieutenant-colonel Deshorties de Beaulieu atteintau rentre d'un coup de feu tiré â bout portantzouaves. La canntiniere et le zouaves Richard se précitent à son secours, on
remporte â une ambulance établie dans
malheureux village le combat fait rage , Madame Dutailley , les vétement ensem-
glantés. donne activement ses soins intelligents aux blesses. Mais la fortunenous est contraire, Sous les poussées formidables et répétées de 140,000 allemandsnos valeureux soldats du 1er corp d'armée tentent des efforts surhumains pourarrêter l'invasion de leur patrie. A chacun de leurs retours offensifs , lesallemandsreculent sousleur étreinte pour revenir ensuite plusnombreuxencore.A un mo-ment donné notre héroine , toute entière à ses pauvers blessés, sont une lourde
main se poser sur son épaule : elle est prisonnière . Pas encore car d'un coup derevolver à bout portant, elle l'officeir de .... qui la tient et , d'un second
instant nos troupes zouaves lignard , ... et chasseurspélé-méle tendaient
342 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
un dernier effort désespéré, avant de battre en retraite. Madame Dutailley était
sauvée ! Elle échappait au sort cruel qui lui était certainement réservé, si elle
avait été faite prisonnière.Madame Dutailley avait pu rejoindre son régiment le soir de la bataille de
Froeschwiller ; elle le suivit à Sedan. Là, elle connut les angoisses de la captivité,car elle fut emmenée en Allemagne avec les débris de son valeureux régiment.Internée pendant quelque temps dans une forteresse prussienne, elle réussit à
s'évader par un ingénieux stratagème et courut se mettre à la disposition du
général Uhrich, enfermé dans Strasbourg assiégé.Pendant le bombardement; elle se trouvait dans la citadelle et y fut blessée à la
cuisse gauche d'un éclat d'obus. Prisonnière de guerre pour la deuxième fois, aprèsla reddition de Strasbourg, la courageuse cantinière dut à sa blessure d'être internée
à Mayence.A peine remise, elle s'évada de nouveau et alla rejoindre à Montpellier le dépôt
du 3e régiment de Zouaves, où elle fut accueillie avec les marques de la plus pro-fonde admiration. Les officiers du régiment adressèrent aussitôt au Ministre de
la Guerre une pétition demandant la croix de la Légion d'honneur pour la vail-
lante cantinière. Les généraux Barrai et Uhrich apostillèrent très chaudement
cette légitime demande. On dut certainement y faire droit, car, le 15 janvier 1871,Le Progrès des Communes, publié à Libourne, insérait la note suivante :
« Madame Dutailley., de Génissac, canton de Branne, la vaillante cantinière du« 3e Zouaves, vient d'être décorée de l'ordre de la Légion d'honneur pour sa belle
« conduite sur le champ de bataille. »
Au mois de mars suivant, la Commune accomplissait son oeuvre d'abominable
destruction ; le palais de la Légion d'honneur n'était plus en quelques heures qu'unmonceau de décombres et de ruines fumantes. Le dossier de Madame Dutailley fut
brûlé et il devint impossible de le reconstituer, plusieurs des signataires man-
quant à l'appel.La guerre terminée, la cantinière retourna à Philippeville, d'où elle partit aus-
sitôt pour suivre son régiment dans la campagne contre l'insurrection Kabyle de
1871. Elle fut de toutes les affaires où se distingua le 3e : Nigrine, Ravin bleu, etc.
Quelque temps après la guerre, son premier mari étant mort, elle épousa en
secondes noces le zouave Abel Laurin, dont elle porte actuellement le nom.
Ce ne fut qu'en 1890 que cette femme héroïque reçut enfin la récompense de sa
belle conduite et fut décorée de la médaille militaire. Récompense tardive, mais
qui fit battre d'une émotion patriotique et fière le coeur de soldat de la cantinière.
En 1895, la médaille coloniale vint s'ajouter à la collection de médailles qui ornent
la poitrine de cette vaillante.
Un poète qui a chanté les exploits de la cantinière du 3e Zouaves, M. L. Destremx,ancien député de l'Ardêche, termine ainsi son poème :
Cette femme au coeur d'or, modeste cantinière,Au courage viril, à la valeur guerrière,Tendre mère aussi bien que bonne épouse enfin,Vous l'avez reconnue en Madame Laurin.
HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE 343
LES RÉCOMPENSES
Un certain nombre de récompenses ont été accordées dans notreville à l'occasion du voyage de M. Loubet.
Sont nommés :
Chevaliers de la Légion d'honneur
MM. Albert Teissier, président de la Chambre de Commerce.Pierre Guidoni, officier d'administration de lre classe, gestion-
naire du service des vivres.
Rivas, Fortuné, Benjamin, capitaine au 3e Zouaves.
Officiers d'Académie
MM. Henri Feuille, publiciste.Aimé Saint-Ernest, bibliothécaire de la ville.
Alphonse Cottard, administrateur du bureau de bienfaisanceet de la caisse d'épargne.
Chevaliers du Mérite Agricole
MM. Edouard Blain, propriétaire, 1er adjoint au maire.
Jean Beaumont, propriétaire.
François Grimaud, propriétaire.
D'autres distinctions ont été distribuées :
Médailles d'honneur du travail
MM. IsidoreBourniquel, Alphonse Gueth et Marc-Aurèle Alessandri,
employés à la Banque de l'Algérie.Laurent Santamaria, de la maison Cordina et Cie.
Pierre Calamaro, de la maison Teissier.
Jean-Baptiste Bataillard, Ignace Burgun père et Thomas Gar-
cias, mécanicien et ouvriers aux ateliers du P.-L.-M.
Mentions honorables pour services rendus à la Mutualité
MM. Alfred Thiriet, Lazare Penalva et Casimir Marty, tous trois
très honorablement connus dans notre ville pour leur dé-
vouement à la cause mutualiste.
344 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
CONCLUSIONS
Les débuts de notre ville ont été difficiles et pénibles; la vaillante-
population d'alors surmonta tous les obstacles avec courage et gaieté.
Survint une ère fortunée et prospère, de trop courte durée; ce fut
une époque de confiance et d'amitié, d'abondance et de joie.
Aujourd'hui, ces temps heureux ne sont plus que souvenirs. On
lutte encore avec courage, mais avec moins de confiance et surtout
avec moins de gaieté.
L'espérance est d'essence divine ; elle est notre force en ces temps
d'épreuve imméritée, qui, sans doute, cesseront bientôt, car la popu-lation philippevilloise d'aujourd'hui, comme celle des premiers tempsde notre cité, « est douée d'un dévouement énergique et ses efforts
courageux forment une des pages les plus intéressantes de l'histoire
de l'Algérie. »
Nous arrêtons là cet ouvrage; un autre le continuera plus tard.
Nous croyons, en l'écrivant, être agréable à nos lecteurs et utile
à notre pays. Si nous atteignons ce double but, nous nous déclarons
entièrement satisfait, n'en ayant jamais cherché d'autre.
Louis BERTRAND.
6 Juin 1903.
TABLE DES MATIÈRES
Pages
CHAPITRE Ier. —Origines de Philippeville 1
II. — Armes de la ville . 5
III. —Population, Etat-Civil ... 9
IV. — Administration civile 41
V. —Municipalité, Conseil municipal, Evénements
politique 45
VI. — Journaux, Annonces 75
VII. — Police, Sécurité, Personnel communal 81
VIII. — Rues et places, Eclairage, Petite et grandeVoirie, Etablissement publics 89
IX. —Aménagement des eaux 105
X. —Boulangerie, Boucherie . 127
XI. — Cimetière, Pompes funèbres 131
XII. — Garnison, Etablissements militaires. 133
XIII. — Tribunal, Justice de paix, Officiers ministé-
riels 149
XIV. — Conseil de prud'hommes 159
XV. — Prison civile, Maison d'arrêt 161
XVI. — Cultes, Eglises 163
XVII. — Ligue de la Libre pensée 169
XVIII. —Collège, Ecoles secondaires, Instruction pu-
blique 171
XIX. — Beaux-arts, Littérature, Poésie, Théâtre,
Musique, Publications diverses 183
XX. — Musée, Théâtre romain 187
XXI. — Sociétés musicales 193
XXII. — Etablissements de bienfaisance 201
XXIII. — Sociétés de Secours mutuels 209
XXIV. —Loge franc-maçonnique ........
217
45
346 HISTOIRE DE PHILIPPEVILLE
Pages
CHAPITRE XXV. — Agriculture, Viticulture 221
XXVI. — Comice agricole, Société d'horticulture,
Syndicat agricole 227
XXVII. — Société hippique 233
XXVIII. — Commerce, Industrie 235
XXIX. — Chambre de Commerce, Consuls 243
XXX. — Port, Plages. Navigation 247
XXXI. — Ponts et Chaussées 271
XXXII. — Pêches maritimes 273
XXXIII. — Société de sauvetage, Sport nautique... 275
XXXIV. — Naufrages, Epidémies, Calamités publi-
ques 279
XXXV. — Chemin de fer 287
XXXVI. — Poste, Télégraphe, Téléphone 289
XXXVII. — Trésor, Douanes, Poudres, Tabacs, Con-
tributions diverses et directes, Cadas-
tre 291
XXXVIII. —Enregistrement, Domaines, Hypothèques 295
XXXIX. — Caisse d'épargne 297
XXXX. — Milice, Sapeurs-Pompiers, Défense na-
tionale 299
XXXXI. — Sociétés d'Anciens militaires, Souvenir
Français 313
XXXXII. — Sociétés de Tir 317XXXXIII. — Eaux et Forêts 321XXXXIV. — Chasse, Sociétés de Chasse 323
XXXXV. — Fêtes et Cérémonies, Hôtes illustres 327
ERRATUM
Page 105. Titre. Lire Chapitre IX au lieu de Chapitre IV.
PHILIPPEVILLE.— Imprimerie Administrative et Commerciale Moderne, 18, rue Th. Réguis
TABLE DES MATIERESCHAPITRE Ier. - Origines de PhilippevilleCHAPITRE II. - Armes de la villeCHAPITRE III. - Population, Etat-CivilCHAPITRE IV. - Administration civileCHAPITRE V. - Municipalité, Conseil municipal, Evènements politiqueCHAPITRE VI. - Journaux, AnnoncesCHAPITRE VII. - Police, Sécurité, Personnel communalCHAPITRE VIII. - Rues et places, Eclairage, Petite et grande Voirie, Etablissement publicsCHAPITRE IX. - Aménagement des eauxCHAPITRE X. - Boulangerie, BoucherieCHAPITRE XI. - Cimetière, Pompes funèbresCHAPITRE XII. - Garnison, Etablissements militairesCHAPITRE XIII. - Tribunal, Justice de paix, Officiers ministérielsCHAPITRE XIV. - Conseil de prud'hommesCHAPITRE XV. - Prison civile, Maison d'arrêtCHAPITRE XVI. - Cultes, EglisesCHAPITRE XVII. - Ligue de la Libre penséeCHAPITRE XVIII. - Collège, Ecoles secondaires, Instruction publiqueCHAPITRE XIX. - Beaux-arts, Littérature, Poésie, Théâtre, Musique, Publications diversesCHAPITRE XX. - Musée, Théâtre romainCHAPITRE XXI. - Sociétés musicalesCHAPITRE XXII. - Etablissements de bienfaisanceCHAPITRE XXIII. - Sociétés de Secours mutuelsCHAPITRE XXIV. - Loge franc-maçonniqueCHAPITRE XXV. - Agriculture, ViticultureCHAPITRE XXVI. - Comice agricole, Société d'horticulture, Syndicat agricoleCHAPITRE XXVII. - Société hippiqueCHAPITRE XXVIII. - Commerce, IndustrieCHAPITRE XXIX. - Chambre de Commerce, ConsulsCHAPITRE XXX. - Port, Plages. NavigationCHAPITRE XXXI. - Ponts et ChausséesCHAPITRE XXXII. - Pêches maritimesCHAPITRE XXXIII. - Société de sauvetage, Sport nautiqueCHAPITRE XXXIV. - Naufrages, Epidémies, Calamités publiquesCHAPITRE XXXV. - Chemin de ferCHAPITRE XXXVI. - Poste, Télégraphe, TéléphoneCHAPITRE XXXVII. - Trésor, Douanes, Poudres, Tabacs, Contributions diverses et directes, CadastreCHAPITRE XXXVIII. - Enregistrement, Domaines, HypothèquesCHAPITRE XXXIX. - Caisse d'épargneCHAPITRE XXXX. - Milice, Sapeurs-Pompiers, Défense nationaleCHAPITRE XXXXI. - Sociétés d'Anciens militaires, Souvenir FrançaisCHAPITRE XXXXII. - Sociétés de TirCHAPITRE XXXXIII. - Eaux et ForêtsCHAPITRE XXXXIV. - Chasse, Sociétés de ChasseCHAPITRE XXXXV. - Fêtes et Cérémonies, Hôtes illustres