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InternationauxMagazine du Comité Français de la Chambre de Commerce InternationaleInternationaux
DOSSIER SPÉCIAL
Rio +20
Bâtonnier du Barreau de Paris
La politique internationale du Barreau
CHRISTIANE FERAL-SCHUHLPrésident de l'Autorité de la Concurrence
Dialogue avec ICC France
BRUNO LASSERRE
Président du Directoire deSchneider Electric
Interview exclusive
Jean-Pascal Tricoire
COUV 1_ICC 95-Magazine du Comite?:. 6/07/12 18:02 Page couv1
La présente livraison d’Echanges Internationaux comporte, comme à l’accoutu-mée, un dossier principal, illustré en couverture. C’est cette fois le SommetRio+20 que nous avons choisi comme sujet central, autour de l’analyse qu’en fait pour nous, à peine rentré du Brésil, le Président de Schneider Electric,Jean-Paul Tricoire, analyse complétée par celle de Laurent Corbier et quelquesautres documents.
Notre revue aborde aussi d’autres aspects majeurs des activités d’ICC et d’ICC France : je citerai tout d’abord l’interview que le Bâtonnier, MadameChristiane Feral-Schuhl, a bien voulu nous accorder, et qui évoque plusieurspistes de renforcement de notre coopération avec le Barreau. Je mentionneraiaussi la description très pertinente à laquelle procède notre ami Dominique
Lamoureux, Président de la Commission d’ICC France compétente en la matière, sur le développement commeaussi les limites de la responsabilité sociétale des entreprises.
D’autres volets de nos travaux sont bien sûr évoqués aussi dans les pages qui suivent mais j’ai pensé utile de meconcentrer, pour cet éditorial, sur le tout récent G20 de Los Cabos et sur la réunion du «Business Summit» quil’a préparé, réunion dans laquelle l’ICC a joué un rôle central. Nous étions en effet, avec le Comité Mexicain etle World Economic Forum, l’un des trois organisateurs de ce «B2012» dont la réussite doit beaucoup aussi, ilfaut le dire, au Gouvernement mexicain et au Président Calderon qui a vigoureusement incité ses collègues àvenir discuter avec nous de nos propositions, et qui a lui-même animé par trois fois nos rencontres : en ouvrantle Sommet, en présidant la Table Ronde sur la «croissance verte», enfin en accueillant – et c’est une innovationimportante – les principaux membres de nos Task Forces et le Chairman d’ICC que je suis à un petit-déjeunercollectif avec les Chefs d’Etat et de Gouvernement.
De ce qui est ressorti de toutes ces rencontres et du G20 lui-même, je dirai que celui-ci a fait droit, dans sa déclaration finale, à nombre des suggestions de nos groupes de travail, qu’il s’agisse du commerce interna-tional, de la Croissance Verte, de la lutte contre la corruption ou des enjeux liés aux nouvelles régulations financières. Mais la véritable incertitude demeure : celle de l’entrée en vigueur effective des messages ainsiémis par le G20, comme par les G20 antérieurs.
Notre document intitulé «ICC G20 Scorecard» diffusé sur place et qui évalue, justement, les degrés de réalisa-tion des engagements pris lors des sommets précédents et correspondant à des demandes des entrepreneurs, enmesurant ces degrés sur une échelle de 0 à 3, montre, avec un score moyen de 1,4, que nous sommes encore loindu compte quant à cette mise en œuvre réelle des orientations des G20 successifs.
Nous continuerons bien sûr à mettre à jour ce tableau de bord, cet «ICC Scorecard», même s’il sera complétéet approfondi par des travaux que va commander la nouvelle «Task Force Advocacy and Impact» qu’a judicieusement créée ce B2012 de Los Cabos, et dans laquelle figurent tant Laurence Parisot que notreSecrétaire Général Jean-Guy Carrier.
Les mois qui viennent vont, sur plusieurs plans, permettre à l’ICC et à son Comité Français de continuer à mettrela pression sur nos gouvernements, pour qu’en premier lieu ils cessent d’être passifs face aux tentations protectionnistes, pour qu’ils s’efforcent de ressusciter l’accord de «Trade Facilitation Agreement» entériné dansles négociations à l’OMC de l’an dernier mais que le principe «rien n’est acquis tant que tout n’est pas acquis»a empêché de concrétiser jusqu’ici, pour qu’aussi, en matière de croissance verte, ils cessent de s’en tenir auxgénéralités égrenées à Rio et rappellent, comme l’a fait le Président Calderon à Rio, que de nombreuses actionsconcrètes sont à la fois écologiquement et économiquement rentables et peuvent donc être lancées par une mobilisation conjointe du secteur public et du secteur privé, enfin pour que le financement de l’économie, et enparticulier du «Trade Finance», ne soit pas compromis par un texte final de Bâle 3 ne prenant pas suffisammenten compte les besoins de l’économie réelle.
Le mot d’ordre à l’ICC, et chez ICC France, sur ces points et pas mal d’autres, est : continuons le combat.
Bon été à tous.
Le mot du président
ICC FRANCE
1France
Gérard WORMSPrésident d’ICC France et de la Chambre
de Commerce internationale,
Vice-Président de Rothschild Europe
01 Mot du president 6/07/12 16:13 Page 1
LE MOT DU PRESIDENT par Gérard WORMS …………………………………………………………………………………………………………………………………… 1
ENTRETIEN
■ La politique internationale
du Barreau de Paris ………………………………………………… 3Christiane FÉRAL-SCHUHL, Bâtonnier de l’Ordre
des Avocats de Paris
POLITIQUE GÉNÉRALE
■ ICC, partie prenante du B20 de Los Cabos …… 5
■ Dialogue ouvert entre le Président de l’Autorité
de la concurrence et ICC France ………………………… 6
■ Plaidoyer en faveur d’une application
raisonnable des règles anti-évasion fiscale … 10Par Jean-Marc TIRARD, Avocat à la Cour Tirard,
Naudin, Président de la Commission Fiscalité,
ICC France
■ Pour une déductibilité fiscale
des intérêts réels et fictifs …………………………………… 11Par Michel AUJEAN, Associé de Taj Société d'avocats
et Vice-président de la Commission fiscale d’ICC France
AUTORÉGULATION ET BONNES PRATIQUES
■ Le nouveau contrat modèle de vente
internationale de l'ICC ………………………………………… 12Par Christoph MARTIN RADTKE, Avocat, Rechtsanwalt,
Associé LAMY & ASSOCIES et Président de la
commission Droit et Pratiques du Commerce
International d’ICC France et
Julien MAIRE DU POSET, Avocat à la Cour,
SMITH VIOLET, et membre de la commission Droit et
Pratiques du Commerce International d’ICC France
RÉSOLUTION DES LITIGES
■ Sélection et propositions d’arbitres
par ICC France …………………………………………………………… 14Par Philippe BOIVIN, Président du Comité consultatif
LES ACTIVITÉS D’ICC FRANCE ET DE LA CHAMBRE DE COMMERCE INTERNATIONALE
POINTS DE VUE
■ L’internationalisation des entreprises :
une priorité vitale ………………………………………………… 25par Vianney de CHALUS, Président, CCI du Havre,
Président CCI International, association des
chambres de commerce et d’industrie françaises
pour l’internationalisation des entreprises
■ Ethique, politique d'intégrité
et compétitivité ……………………………………………………… 27par Dominique LAMOUREUX, Directeur Ethique et
Responsabilité d’Entreprise Thales et Président
de la Commission Responsabilité d’Entreprise
et Anti-corruption d’ICC France
ÉVÈNEMENT
■ Les droits de l’Homme au cœur
des préoccupations des entreprises ………… 29
LA PAROLE AUX ADHÉRENTS
D’ICC FRANCE
■ Nexter : Toute la dynamique d’un groupe
international dans un secteur sensible …… 31Entretien avec Nathalie PAOLI, Directeur juridique
de Nexter System
■ La Conférence Rio+20 ………………………………………… 15
■ Retour de RIO …………………………………………………………… 16Interview exclusive de Jean-Pascal TRICOIRE,
Président du Directoire de Schneider Electric
■ La Chambre de Commerce Internationale
(ICC) très présente et visible
à la Conférence Rio+20 ………………………………………… 18Entretien avec Laurent CORBIER, Directeur Projets
Energies Renouvelables - Direction des Affaires
Publiques Areva et Président de la Commission
Environnement et Energie d’ICC
■ On the Eve of Rio: ICC Perspectives ……………… 20Par Louise KANTROW, représentante permanente
d’ICC aux Nations Unies
■ La problématique «Water for energy» …………… 21Par Dominique HÉRON, Directeur des Partenariats –
Véolia Environnement et Président de la Commission
Environnement et Energie – ICC France
■ Quel avenir pour les marchés
du carbone ?……………………………………………………………… 23Par Gabriela G. MERLA, Avocate associée
du cabinet Smith Violet
DOSSIER SPÉCIAL : RIO+20
2
ÉCHANGES INTERNATIONAUXEST LE SEUL MAGAZINE D’INFORMATION
D’ICC FRANCE, COMITÉ NATIONAL FRANÇAISDE LA CHAMBRE DE COMMERCE
INTERNATIONALE
Juillet 2012
N°95, 3e trimestre 2012
ECHANGES INTERNATIONAUXLes Dossiers du Comité Français de la
Chambre de Commerce [email protected]
Directeur de la publication : Gérard WORMS, Président du ComitéNational Français de la Chambre deCommerce Internationale
Editeur : ICC France 9 rue d’Anjou -75008 Paris Tél : 01 42 65 12 66 Fax : 01 49 24 06 39www.icc-france.fr
Comité de Rédaction :François GEORGESSophie BELMONTEve MAGNANT
Régie publicitaire : Editions OPAS 41, rue Saint-Sébastien - 75011 Paris Tél. : 01 49 29 11 00 Fax : 01 49 29 11 46
Editeur conseil : Jean-Pierre KALFON
Conseil éditorial :Sophie SCHNEIDER
Directeur commercial : David ADAM
Dépôt légal 92892 3e trimestre 2012
Imprimeur : GR Presse
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02 sommaire ICC 94 6/07/12 18:11 Page 2
3France
ENTRETIEN
Pourquoi et comment le
barreau de Paris définit-il
désormais plus en amont sa
politique internationale ?L’Ordre des Avocats de Paris a en
effet veillé à se doter d’instruments
permettant la définition et la mise
en œuvre plus en amont de sa poli-
tique internationale. Tout d’abord,
j’ai créé un «Comité stratégique de
politique européenne et internatio-
nale» du Barreau de Paris. Il com-
prend des membres du Conseil de
l’Ordre mais aussi des représen-
tants de cabinets parisiens, qui ont
pour la plupart créé des structures
à l’étranger et qui sont donc sur le
«terrain» international au quoti-
dien. Plusieurs de ces avocats sont
également membres d’associa-
tions ou d’organisations qui les
mettent en contact régulier avec
les entreprises à l’étranger. La
Délégation des Barreaux de France
à Bruxelles, qui représente les
barreaux français dans cette ville,
ainsi que les deux délégués du
Barreau de Paris auprès du CCBE
sont également partie prenante de
ce Comité. J’ai souhaité présider ce
Comité afin de m’impliquer le plus
possible dans l’activité internationa-
le et définir avec les membres de ce
comité les grandes lignes directri-
ces de la politique internationale du
Barreau de Paris tant dans ses
relations avec l’étranger qu’au
sein de ses commissions ouvertes
internationales sur lesquelles je
reviendrai plus loin. Mes premiers
objectifs consistent à assurer une
présence renforcée dans les
institutions européennes et interna-
tionales et dans nos rapports avec
les autres barreaux du monde. Nous
devons également œuvrer avec la
Délégation des Barreau de France
au CCBE pour être force de proposi-
tion sur les nouvelles normes
européennes qui intéressent notre
profession. Enfin, je souhaite déve-
lopper au sein du Barreau de Paris
le «réflexe européen» et faciliter
l’implantation des cabinets français
à l’étranger. Par ailleurs, la mise en
oeuvre et le suivi de cette politique
sont assurés par le Département
des Relations Internationales du
Barreau, en concertation avec les
membres du Comité.
Le barreau de Paris réunit en
son sein des avocats français et
étrangers, au carrefour du droit
continental et de la Common Law :
comment parvenez-vous à faire de
cette spécificité un atout pour les
entreprises ?
Lorsqu’il y a quelques années, le
barreau français a fait le pari de
l’ouverture du marché du Droit à
des structures étrangères et
notamment anglo-saxonnes, beau-
coup d’adversaires à cette ouvertu-
re se sont manifestés. On pouvait le
comprendre car le marché devenait
accessible à de grandes structures
américaines et britanniques, ce qui
pouvait être perçu comme une
réelle menace pour les cabinets
d’affaires français. Mais, très
rapidement, les avocats parisiens y
ont néanmoins vu une opportunité :
celle de travailler au sein de ces
structures et de poursuivre le
développement de leur carrière
professionnelle. C’est précisément
cette spécificité qui constitue un
atout pour les entreprises clientes.
Les avocats qui travaillent au sein
de ces «firmes» ont pu acquérir
pour la plupart des notions impor-
tantes de «common law» et sont
capables de comprendre des
concepts avec lesquels nombre de
leurs clients sont évidemment
familiarisés. Si bien entendu nos
intérêts en tant que Français ne
sont pas les mêmes que ceux
des anglo-saxons au niveau de
l’influence du droit dans le monde,
il n’est pas contestable que ce
«brassage» est intéressant pour
les entreprises. Dans le domaine
du droit des affaires, les avocats
doivent acquérir des standards
internationaux et, fort heureuse-
ment, le barreau de Paris est à
l’heure actuelle en très bonne position.
Quel intérêt les entreprises ont-
elles à voir le Barreau de Paris
entretenir d’étroites relations avec
les institutions internationales ?
Celui-ci souhaite-t-il privilégier en
particulier certaines probléma-
tiques ou les échanges avec certai-
nes régions du monde ?
Les entreprises ont évidemment
tout intérêt à ce que le barreau
de Paris entretienne d’étroites
Au carrefour du droit continental et de la Common Law, le barreau de Paris s’estdoté des moyens de définir et de mettre en œuvre le plus en amont possible sapolitique internationale qui intéresse directement les entreprises à plus d’un titre.
Christiane FÉRAL-SCHUHL, Bâtonnier de l’Ordre des Avocats de Paris
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La politique internationale duBarreau de Paris
ICC FRANCE
03-04 interview exclusive feral - schuhl 6/07/12 18:08 Page 3
4 France
ENTRETIEN
ICC FRANCE
relations avec les institutions
européennes et internationales.
Nous sommes des interlocuteurs
privilégiés du monde de l’entrepri-
se, nous les conseillons, nous les
défendons; il faut donc que nous
soyons le mieux introduits possi-
bles au sein des organisations
européennes et internationales où
se dessine le monde de demain et
où nous devons être une force
de proposition, de progrès d’inven-
tivité mais aussi de vigilance ;
certains aspects ou comporte-
ments doivent en effet être exami-
nés par les professionnels du Droit
que nous sommes. Le barreau de
Paris étant un barreau moderne,
toutes les problématiques qui se
posent à notre époque doivent lui
être familières ; tel est d’ailleurs
le cas et c’est précisément dans
des enceintes internationales telles
notamment que ICC, le MEDEF,
la Chambre de commerce, des
organisations dépendant de l’ONU
ou de la Banque Mondiale, de
la Commission européenne, que
notre présence doit être effective.
Par ailleurs, nous avons créé au
barreau de Paris un nombre impor-
tant de commissions ad hoc qui se
penchent régulièrement sur les
grands enjeux de notre époque
pour que la profession puisse être
partie à des grands débats de
société qui intéressent le monde
de l’entreprise. Enfin, le barreau de
Paris entend être le plus présent
possible dans certaines régions du
monde ; il assure une présence lors
des événements organisés par ses
homologues étrangers et répond
présent lorsque les pays étrangers
le sollicite pour contribuer à
l’élaboration de règles de Droit ou
déontologiques ou encore à l’orga-
nisation de la profession.
Quelle est la politique mise en
œuvre par votre barreau pour
assurer la présence de ses avocats
de par le monde ?
Nous aidons les avocats parisiens à
tenter l’aventure à l’étranger. Des
bourses ou des prêts à taux très
avantageux sont négociés avec une
banque dont une partie est prise en
charge par le Barreau. Je m’em-
ploie également à obtenir des bar-
reaux étrangers la possibilité pour
des avocats parisiens d’effectuer
des stages à l’étranger à l’instar de
ce qui se passe à Paris ; nombreux
sont en effet les jeunes avocats
étrangers qui peuvent le faire grâce
aux stages organisés pour eux par
le barreau de Paris. Mais il faut
aussi que les cabinets parisiens
veuillent eux-mêmes créer des
structures à l’étranger pour y
envoyer leurs collaborateurs ; sur
ce point, plusieurs cabinets ont
réussi à s’implanter à l’étranger
mais, dans le contexte actuel, peu
tentent en ce moment cet exercice.
Par ailleurs, comme vous le savez,
de nombreux avocats du Barreau
de Paris sont installés à l’étranger
et se sentent quelque peu oubliés
par leur Barreau d’origine. Je
souhaite renforcer les liens avec
eux. C’est pourquoi j’ai mis en
place plusieurs commissions bila-
térales pilotes au sein desquelles
j’ai nommé, pour chaque grande
ville étrangère, un correspondant
local qui a pour mission de faire la
liaison avec les avocats parisiens
installés localement.
Par quels types d’actions le barreau
de Paris sensibilise-t-il les entrepri-
ses aux initiatives qu’il prend en
matière de politique internationale ?
C’est précisément ce que je souhaite
faire de manière plus active. Outre
l’organisation conjointe de colloques
avec des organisations regroupant
des grandes et moyennes entrepri-
ses qui est à promouvoir, j’ai enten-
du redynamiser les «commissions
ouvertes internationales» (au
nombre de 17) qui sont des commis-
sions dirigées par des avocats qui
organisent très régulièrement des
sessions, en moyenne de deux
heures, sur des thèmes juridiques
très variés qui peuvent être d’un
intérêt certain pour les entreprises.
Ces commissions recouvrent de
nombreuses zones du monde et
les réunions que leurs responsables
organisent gagneraient à être plus
connues du monde de l’entreprise,
ce à quoi je vais m’employer. Enfin,
j’envisage l’organisation d’un évène-
ment en Asie l’année prochaine
dont je souhaiterais qu’il soit une
opportunité de rencontres entre
entreprises et avocats. Propos recueillis
par Sophie Belmont
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5France
POLITIQUE GÉNÉRALE
Al’issue du B20/G20 de Cannes
de novembre 2011, Gérard
Worms, Président d’ICC, et
Markus Wallenberg, Président de
l’ICC Advisory Group, avaient
rencontré les représentants de
la Confédération des entreprises
mexicaines (Coparmex) et constaté
l’engagement personnel du Prési-
dent mexicain Felipe Calderon,
décidé à maintenir la dynamique du
processus engagé. Aussi, dès le
début de l’année 2012, ICC a été
associée à la planification du
Sommet de Los Cabos. Plus de 150
dirigeants et experts de plus de 25
pays ont étroitement collaboré au
sein de groupes de travail, pour
trouver des solutions pratiques aux
défis globaux de notre temps. Grâce
à l’engagement considérable du
Gouvernement mexicain, au dyna-
misme du Comité d’organisation
mexicain et au partenariat formé
avec le Forum Economique mondial
(WEF), ICC et MCKinsey, sans
oublier la participation active de
l’OCDE, le travail d’équipe et le rôle
d’ICC ont répondu à nos espoirs.
La recherche de solutions pratiques
et innovantes à sept défis majeurs
En janvier 2012, à Davos, le WEF et
ICC avaient lancé aux côtés du
Président Calderon les différents
groupes de travail chargés de faire
auprès des dirigeants du G20 des
recommandations globales sur
sept questions clés : la sécurité
alimentaire, la croissance verte,
l’emploi, le commerce et l’investis-
sement, la transparence et la lutte
contre la corruption, les technolo-
gies de l’information et de la com-
munication ainsi que l’innovation,
et enfin, le financement pour la
croissance et le développement.
L’objectif était bien naturellement
de construire sur les progrès déjà
réalisés à Séoul et à Cannes pour
aller encore plus loin. D’où un
certain nombre d’innovations. Les
groupes de travail ont régulière-
ment tenu informés les sherpas de
l’avancée des travaux. Les recom-
mandations détaillées ayant été
élaborées et communiquées deux
mois avant la réunion du G20, le
projet global a été examiné avec le
Président Calderon dès le mois
d’avril. Et, pour s’assurer que les
recommandations trouvent un écho
dans les différents pays au fil du
temps, un groupe de travail a été
spécifiquement chargé de mesurer
l’impact de celles-ci.
ICC, leader du groupe de travail
commerce et investissements
ICC a joué un rôle de tout premier
plan, en particulier sur le thème du
commerce et de l’investissement.
Mais, sur l’ensemble des sujets,
ICC, fort de son réseau mondial
d’entreprises, a mené des consul-
tations régionales sur les sept
thématiques de travail. Ainsi, en
mars 2012, sous l’égide du groupe
consultatif du G20, les chefs d’en-
treprises locaux opérant en Europe
orientale et au Moyen Orient
s’étaient réunis à Istanbul. Les
discussions s’étaient concentrées
en particulier sur les mesures
concrètes destinées à stimuler la
croissance économique et l’emploi.
Les participants avaient rappelé
l’intérêt essentiel à laisser ouverts
le commerce et l’investissement,
pourvoyeurs majeurs d’emplois,
ainsi que leur attachement au
multilatéralisme commercial et à
la lutte contre le protectionnisme. Ils
avaient aussi partagé leur expérien-
ce d’investissement dans l’économie
verte émergente en soulignant l’effet
de stimulation de celle-ci sur l’em-
ploi à long terme. S’en sont suivies
d’autres consultations régionales à
Doha, Moscou, Washington DC et
Pékin. Toutes ces informations ainsi
recueillies sur le terrain auront per-
mis d’enrichir les recommandations
élaborées par le Comité d’organi-
sation mexicain.
SB
Sous l’égide de l’ICC G20 Advisory Group, la Chambre de Commerce Internationale a fortement œuvrépour le succès du G20 mexicain des 18 et 19 juin dernier en proposant de rétablir la confiance dansl’économie mondiale.
ICC, partie prenante du B20de Los Cabos
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> Los Cabos
ICC FRANCE
05 Los cabos 6/07/12 18:09 Page 5
6 France
POLITIQUE GÉNÉRALE
ICC FRANCE
La Commission Concurrence
d’ICC France avait invité le
25 mai dernier le Président
de l’Autorité de la Concurrence
Bruno Lasserre à dialoguer avec
les entreprises et praticiens fran-
çais du droit de la concurrence.
Gérard Worms, Président d’ICC et
d’ICC France, n’a pas manqué de
saluer «l’action impressionnante
du Président de l’Autorité et de son
collège» qui fait de l’Autorité une
référence en Europe et dans le
monde. De son côté, le Président
de l’Autorité a rappelé combien les
contributions écrites fournies par
ICC France avaient permis de nour-
rir la réflexion dans le cadre de ses
consultations publiques ; tel a été
encore récemment le cas des
consultations relatives aux pro-
grammes de conformité et à la
procédure de non contestation des
griefs. Autant d’outils qui, selon
Bruno Lasserre, font de la politique
de concurrence française «une
politique d’incitation - et non de
récompense naïve ex-post -» et qui
pourrait bien faire des émules chez
nos voisins dans une Europe qui,
poussée par la crise, croit à l’unis-
son aux vertus de la concurrence.
Comment percevez-vous les effets
de la crise sur les différentes
politiques de concurrence menées
en Europe ?
La crise est un accélérateur de
réformes structurelles, qui contri-
buent à apporter des réponses
efficaces à celle-ci. Le Portugal
et la Grèce ont ainsi renforcé
l’indépendance de leurs autorités
de concurrence, ainsi que les
moyens juridiques et techniques
dont elles disposent, tandis que
le modèle moniste a gagné de
nombreux pays , la Grande-
Bretagne n’y faisant pas exception
en préparant pour 2014 la fusion
de l’OFT et de la Competition
Commission. De fait, le débat sur la
politique de concurrence est
aujourd’hui relativement apaisé en
Europe, où celle-ci est reconnue
par l’opinion publique comme un
instrument de compétitivité, et où
le débat se déplace sur les modali-
tés d’une relance au niveau euro-
péen. L’opinion publique française
a également évolué en manifestant
son soutien à une régulation de la
concurrence par un arbitre ferme
et indépendant dans une récente
enquête : la régulation concurren-
tielle est appréciée par 64% des
Français et une politique d’amen-
des dissuasives est considérée
comme nécessaire par 90% d’entre
eux. L’Autorité de la concurrence
recherche un équilibre entre trois
principaux objectifs : la convergence
et un équilibre entre l’efficacité et
la protection des droits des entre-
prises. Cet équilibre peut toujours
être amélioré et constitue une
condition de légitimité de notre
action. Nous veillons également à
développer une politique de pré-
vention par la mise à disposition de
communiqués sur notre boîte à
outils et une vision ambitieuse de la
conformité, intégrée à la politique
de concurrence.
Les consommateurs français sont
également des citoyens salariés
d’entreprises soucieux de compéti-
tivité, de politique sociale et de
politique industrielle ; cela va-t-il
naturellement de soi avec la
politique de concurrence ?
Les Français sont pétris de contra-
dictions et il est effectivement diffi-
cile de concilier tous ces aspects. Il
est également vrai que la France et
l’Allemagne ne font pas la même
interprétation du concept de libre
concurrence : la première y a vu
l’application d’une politique utra-
libérale, comme l’a notamment
révélé la campagne pour le «non»
au Traité constitutionnel, et la
seconde le moyen de préserver la
démocratie et de protéger les PME,
ces objectifs étant particulièrement
mis en avant par le SPD. Ce que les
citoyens acceptent en réalité moins
bien est le fait que, toutes les réfor-
mes d’ouverture à la concurrence
ayant été négociées à Bruxelles,
les artisans de la transposition
nationale des directives européennes
aient mis en avant les contraintes
bruxelloises, sans expliquer ce en
quoi les Français gagneraient à la
mise en œuvre de ces réformes en
Le droit de la concurrence a toujours été conçu par l’Autorité comme un outil auservice de la politique de concurrence, politique au sein de laquelle, dans une matièreaussi complexe, le dialogue est perçu comme une nécessité par son Président. Celui-ci n’a donc pas hésité à venir une nouvelle fois à la rencontre des membres dela Commission Concurrence d’ICC France pour évoquer sa vision actuelle de cettepolitique qu’il veut innovante et déterminée.
Bruno LASSERRE, Président de l’Autorité de la concurrence
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Dialogue ouvert entre le Président de l’Autorité de la concurrence et ICC France
06-09 Dialogue ouvert - lasserre 6/07/12 16:47 Page 6
7France
Politique générale
termes notamment de qualité de
service. Je l’ai expérimenté lors de
la l’ouverture à la concurrence des
télécoms; certains voyaient dans
le monopole plus de simplicité pour
les clients. L’opinion a bien changé
aujourd’hui sur cette question au
vu des effets bénéfiques de la
concurrence sur les prix et la
qualité de service. Dans tous les
cas, la politique de la concurrence
n’est pas une fin en soi mais reste
un moyen d’inciter les entreprises
à faire mieux, à conquérir de
nouveaux marchés, de nouveaux
clients et à partager les gains de
productivité selon le cycle vertueux
d’une économie de marché.
L’Autorité n’est pas juge des objec-
tifs d’intérêt général mais la
politique de concurrence impose
de s’interroger sur les meilleurs
moyens de parvenir à ces objectifs,
elle permet aussi de hiérarchiser
les différentes solutions possibles
en termes d’efficacité et de compé-
titivité.
Quelle importance l’Autorité accor-
de-t-elle à l’innovation ?
L’innovation constitue un ressort de
l’économie de marché et un moteur
de la concurrence. Elle est une
source de progrès et encourage
l’entrée de nouveaux acteurs. Il faut
néanmoins accepter que l’innova-
tion bouleverse et dérange. La
question du prix unique sur le livre
numérique en est un très bon
exemple. Certains ont souhaité voir
réguler son prix en prenant pour
modèle la loi Lang qui avait notam-
ment pour objectif de conserver un
maillage de librairies sur le terri-
toire et qui s’inscrivait bien dans
l’univers du livre imprimé. Mais la
question ne se pose pas dans les
mêmes termes pour le livre numé-
rique, qui constitue un fantastique
outil au service de la démocratisa-
tion de la culture car il est accessi-
ble en tous lieux. La demande de
fixer un prix unique pour le livre
numérique, qui ne se justifie ainsi
pas pour cet outil, ne répond-elle
pas plutôt à un souci de protection
des acteurs en place ? Ne vaut-il
pas mieux, plutôt que de fixer un
prix unique, laisser ce marché
émergent se développer et encou-
rager le développement de plate-
formes d’éditeurs en France,
comme cela s’est pratiqué avec
succès à l’étranger ? Cela dit, il
convient également de protéger les
droits de propriété intellectuelle,
toute la question étant de trouver le
bon équilibre.
Le communiqué sur les program-
mes de conformité constitue-t-il un
catalyseur susceptible de créer une
dynamique européenne?
L’Autorité croit en cet instrument
de prévention. Elle a décidé d’inté-
grer la conformité dans sa politique
de concurrence, en récompensant
la mise en place volontaire, pour
l’avenir, ou l’amélioration des pro-
grammes de conformité existants.
A la différence des Etats-Unis et du
Canada, qui affichent une politique
ambitieuse en la matière mais
accordent peu, en pratique, d’inci-
tations aux entreprises qui ont mis
en œuvre un programme de confor-
mité, l’Autorité s’est engagée dans
une approche systématique, dans
un communiqué qui l’engage vis-à-
vis des entreprises. La conformité
est un contrat gagnant-gagnant
méritant des incitations pour les
entreprises, l’élaboration de tels
programmes étant prise en compte
dans le calcul de la sanction, mais
suivant une procédure qui n’est en
rien naïve et qui suppose que
l’entreprise s’engage réellement
dans un programme ambitieux
et appliqué de façon effective, tout
en concevant celui-ci sur mesure
en fonction de son organisation
et de ses spécificités. D’autres
autorités de concurrence n’ont pas
intégré la conformité dans leur
stratégie d’enforcement. C’est
le cas de l’Allemagne et de la
Commission européenne.
Comment l’Autorité a-t-elle défini
cette politique ambitieuse ?
Elle a procédé par étapes. Elle a
d’abord commencé par évaluer les
initiatives spontanées déjà prises
par un certain nombre d’entreprises
françaises, en publiant une étude
sur cette question en 2008. Ensuite,
et plutôt que de normaliser les pro-
grammes, l’Autorité préfère laisser
les initiatives se développer, tout en
rappelant que des programmes
efficaces et susceptibles d’être pris
en compte par l’Autorité dans le
cadre de sa politique de concurrence
se fondent sur un socle de cinq
éléments essentiels : trois critères
propres à l’élaboration des pro-
grammes et deux critères propres
à leur mise en œuvre effective.
A partir de ces cinq piliers, les
entreprises peuvent mettre en
œuvre leur programme de confor-
mité en l’adoptant à leurs propres
spécificités. L’Autorité tiendra
compte notamment des caractéris-
tiques de leur environnement, de
leur taille, de leur culture et de
leur gouvernance. Le communiqué
n’entend donc pas prescrire un
programme type mais a pour seule
ambition de fournir des lignes
directrices aux entreprises qui
s’engagent dans cette démarche et
attendent de l’Autorité une poli-
tique fondée sur des principes
clairs et prévisibles lorsqu’elle
encourage, par une réduction de
sanction pouvant aller jusqu’à 10%,
les engagements de conformité
dans le cadre d’une non-contesta-
tion de griefs. Notre démarche
intéresse certains de nos voisins et
pourrait effectivement guider un
certain nombre de nouvelles initia-
tives de ce type en Europe.
Comment les choses se passent-
elles lorsque l’infraction est dénon-
cée dans le cadre d’un programme de
conformité sans être pour autant
éligible au programme de clémence ?
Sur ce point, et pour tenir compte
des points de vue exprimés lors de
la consultation publique, l’Autorité a
introduit une innovation par rapport
à son projet initial. Elle a précisé
quelle serait son approche pour les
infractions découvertes et traitées
grâce à un programme de conformité
autres que des cartels. Si, par
exemple, les infractions sont réali-
sées dans le cadre de relations
verticales dans la chaîne de valeurs,
que l’entreprise détecte cette
infraction grâce à un programme
de conformité et qu’elle y a mis fin
en faisant état des faits pertinents
avant toute intervent ion de
l’Autorité, alors celle-ci prend objec-
tivement ce fait en compte en
retenant une circonstance atténuan-
te à la décharge de l’entreprise.
ICC FRANCE
06-09 Dialogue ouvert - lasserre 6/07/12 16:47 Page 7
8 France
POLITIQUE GÉNÉRALE
ICC FRANCE
Contrairement au système de la
transaction devant la Commission
européenne, la procédure de non
contestation des griefs, assortie
d’engagements ou d’un programme
de conformité, ne permet pas aux
entreprises et à leurs conseils
d’avoir une idée précise du quantum
de la sanction, de sorte que certaines
entreprises en viennent à douter
qu’il s’agit là d’un instrument de
négociation rapide.
Sur la question de la prévisibilité
des sanctions, il est nécessaire de
prendre davantage de recul car le
texte du communiqué est encore
récent et seules sept décisions ont
été adoptées depuis sa publication.
C’est dans la mise en œuvre du
texte qu’il sera possible de trouver
des signaux plus précis. On ne peut
par ailleurs transposer le mode de
négociation des engagements dans
les procédures contentieuses
susceptibles d’aboutir au prononcé
de sanctions car dans ce dernier
cas la loi prévoit que la séparation
de l’instruction et de la décision
s’applique.
Va-t-on aujourd’hui vers une
stabilisation du système de
concurrence?
Nous disposons d’un système bon
et équilibré. Je ne m’attends pas à
des bouleversements institution-
nels et je plaide pour la stabilisa-
tion, même s’il peut y avoir certains
aménagements. Quant à une éven-
tuelle fusion de l’Autorité et des
régulateurs sectoriels, comme
l’ont déjà fait les Pays-Bas, et
comme l’Espagne l’a annoncé, ce
serait là une mauvaise réforme car
il s’agit de deux métiers différents
avec des objectifs distincts : les
régulateurs ont une très bonne
connaissance de leur secteur mais
une régulation concurrentielle
concernant tous les secteurs de
l’économie donne davantage de
distance par rapport aux opéra-
teurs. Le droit de la concurrence
est en outre un droit plastique qui
s’adapte aisément aux spécificités
de chaque secteur. Même si des
aménagements peuvent être opé-
rés au sein des régulateurs secto-
riels, une fusion risquerait de
brouiller les frontières et de multi-
plier des interprétations divergen-
tes du droit de la concurrence sans
réaliser pour autant d’économies
> Gérard Worms, Président d’ICC et d’ICC France et François Georges, Délégué général d’ICC France
06-09 Dialogue ouvert - lasserre 6/07/12 16:47 Page 8
9France
budgétaires. Je crois que le systè-
me existant de passerelles entre
l’Autorité et les régulateurs secto-
riels fonctionne bien et apporte les
réponses nécessaires. Vous m’avez
également interrogé sur les inten-
tions éventuelles de l’Autorité en
matière de communication à l’issue
des inspections. Je puis vous assu-
rer que l’Autorité poursuivra sa
pratique : elle ne communiquera
pas sur les étapes de l’enquête,
afin d’éviter de mettre en cause des
entreprises à un moment où aucu-
ne responsabilité n’est établie. En
revanche, si l’on interroge l’Autorité
à la suite de déclarations d’entre-
prises reprises dans la presse,
l’Autorité ne peut nier qu’elle a
mené des actes d’enquête.
Comme elle l’a rappelé dans son avis
"Ville de paris" rendu dans le secteur
de la grande distribution, l'Autorité
souhaite un pouvoir d'injonction
structurelle plus fort ; dans quelle
mesure est-ce indispensable? Si un
opérateur acquiert un pouvoir de
marché par ses propres mérites, on
peut s'interroger sur la légitimité
d'un interventionnisme économique.
Nous avions déjà fait part de ce
souhait lors des auditions devant
le Parlement, au moment de la
discussion de la LME. Certains,
comme la Commission Attali ou
l’association UFC-Que choisir,
avaient également fait des sugges-
tions en ce sens, suggestions qui
avaient trouvé écho auprès du
ministre de l’époque Christine
Lagarde. Mais, une fois adopté, le
texte de la LME a soumis ce pouvoir
d’injonction à trois conditions.
D’abord, l’établissement d’une
position dominante ; ensuite, et
plus difficile, la constatation d’un
abus ; enfin et surtout, le compor-
tement visé devait persister malgré
une décision de condamnation de
l’Autorité. Or, cette troisième condi-
tion ne sera jamais remplie,
comme nous l’avons précisé dans
l’avis Ville de Paris. En aucun cas,
nous n’avons reproché à Casino
d’avoir acquis un pouvoir de mar-
ché parce que le groupe avait su
anticiper la demande avant d’autres.
Mais, lorsque la situation est blo-
quée, faut-il s’en satisfaire même
si une enseigne détient 80% des
surfaces, sans que de nouvelles
entrées sur le court terme soient
envisageables ? L’Allemagne pour-
suit actuellement le même débat
dans le secteur de l’énergie. Déjà
au Royaume-Uni, lorsque les
caractéristiques du marché ne
fonctionnent plus, notre homolo-
gue a le pouvoir d’agir directement
sur la structure du marché en
imposant des cessions, comme il
l’a fait notamment en démantelant
un monopole privé aéroportuaire.
Vu le nombre frappant d’initiatives
d’enquêtes sectorielles récentes,
pouvez-vous préciser comment
l’Autorité identifie les secteurs
méritant attention ?
L’ancien Conseil de la concurrence
était trop réactif et pas assez pro-
actif. J’ai beaucoup plaidé pour que
l’Autorité puisse prendre l’initiative,
pour détecter les problèmes de
concurrence et faire des recom-
mandations aux opérateurs et aux
pouvoirs publics. Le législateur lui
a accordé le pouvoir de s’autosaisir
pour avis en 2008. Pour définir les
priorités en fonction des ressour-
ces, je dialogue avec le rapporteur
général, qui est chargé de faire des
propositions au collège. Nous
tenons compte d’abord de l’impor-
tance du secteur en termes de
compétitivité et de pouvoir d’achat
avant de prêter attention à ce que
l’on voit ou ce que l’on entend des
problèmes de concurrence, notam-
ment à l’étranger. Dans tous les
cas, la lecture de la presse écono-
mique reste très instructive.
Quelle est aujourd’hui votre position
sur la question des saisies informa-
tiques qui reste une réelle préoccu-
pation pour les entreprises?
Il y a deux voies possibles pour
progresser : le contentieux et la
concertation. Les entreprises ont
choisi le contentieux et, in fine, la
Cour de cassation a donné raison à
l’Autorité. Reste la voie de la
concertation. Nous ne restons pas
fermés à toute discussion sur le
sujet mais à la condition de ne pas
mettre en péril toute une série
d’enquêtes passées qu’il convient
de sécuriser : un texte doit appor-
ter cette garantie. Sur ce point,
nous ne pouvons pas transiger.
Quels sont selon vous les deux
sujets que la Commission interna-
tionale ICC devrait investir pour
l’avenir ?
L’Europe étant devenue un acteur
crédible, irréprochable et influent
sur la scène internationale de la
concurrence, elle peut désormais
plaider le thème de la réciprocité,
qu’il s’agisse de pratiques anti-
concurrentielles ou de contrôle des
fusions. Il faut y ajouter le sujet des
aides d’Etat : l’Europe ne doit pas
être la seule à protéger le marché
d’interventions publiques coûteu-
ses pour le contribuable et peu
efficaces pour la compétitivité.
Propos recueillis
par Sophie Belmont
Politique générale
ICC FRANCE
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06-09 Dialogue ouvert - lasserre 6/07/12 16:47 Page 9
10 France
POLITIQUE GÉNÉRALE
ICC FRANCE
Les acteurs économiques ont
pu constater la tendance de
plus en plus fréquente des
autorités fiscales de nombreux
pays, qu’ils soient développés ou
émergents, de culture de droit civil
ou de common law, à requalifier
certaines de leurs transactions
commerciales ou financières pour
les imposer plus lourdement en se
fondant parfois sur une interpréta-
tion excessivement large de leurs
règles anti-évasion fiscale. En
outre, il n’est pas rare que de telles
requalifications s’accompagnent
de lourdes sanctions voire, dans
certains cas, de poursuites pour
fraude fiscale.
Il n’est évidemment pas question
pour la Chambre de Commerce
Internationale (ICC) d’encourager
ni même d’accepter que les contri-
buables pratiquent l’évasion fisca-
le. ICC reconnaît que les autorités
fiscales ont le droit et même le
devoir de prendre les mesures
qu’elles jugent utiles pour s’oppo-
ser à de tels comportements, qu’il
s’agisse de règles visant spécifi-
quement certaines opérations ou
de règles générales (abus de droit
en France et dans d’autres pays de
droit civil ou équivalent fonctionnel
dans les pays de common law).
Les administrations fiscales doi-
vent respecter des principes
ICC estime qu’il est essentiel que
les gouvernements et les adminis-
trations fiscales acceptent de
reconnaître que, face à la concur-
rence, les entreprises doivent être
autorisées à opérer ainsi qu’elles le
jugent approprié et de choisir
notamment les solutions les moins
lourdement imposées pour réaliser
leurs transactions. Le droit d’orga-
niser leurs affaires de la manière la
plus efficace, y compris du point de
vue fiscal, doit être reconnu et
respecté.
Les éventuelles règles anti-évasion
spécifiques à certaines transac-
tions que les administrations fisca-
les veulent interdire ou décourager
par la mise en œuvre de règles fis-
cales peu favorables doivent être
suffisamment claires. Il est en effet
indispensable que le contribuable
puisse être assuré qu’une transac-
tion strictement conforme à la
lettre de la loi ne sera pas remise
en question en raison d’une éven-
tuelle interprétation différente de
ladite loi par le service chargé de
son application.
Il n’est pas acceptable que des
mesures d’incitation fiscale puissent
être remises en cause a posteriori
par le biais de dispositions «anti-
abus», spécifiques ou générales. Si
le législateur est à l’évidence en
droit d’y mettre un terme, lorsqu’il
l’estime approprié, une telle remise
en cause ne doit en aucun cas être
rétroactive.
La loi doit être claire et précise
Toute transaction expressément
exclue de l’application d’une
mesure anti-évasion spécifique ne
devrait pas pourvoir être critiquée
sur le fondement d’une règle géné-
rale. A défaut, le principe fonda-
mental de sécurité juridique serait
gravement compromis.
La mise en œuvre et l’application
de dispositions de portée générale
devraient être strictement limitées
aux montages purement artificiels,
ainsi qu’aux opérations dénuées de
toute justification économique.
De manière générale, les mesures
anti-évasion fiscales doivent en
tout état de cause être suffisam-
ment claires et précises de façon
à ne pas laisser le champ libre
à l’interprétation. En outre, les
acteurs économiques devraient
pouvoir s’assurer, avant de conclu-
re leurs transactions selon une
procédure simple et dans un délai
raisonnable, que celles-ci ne
seront pas critiquées par les admi-
nistrations compétentes.
ICC considère que les acteurs éco-
nomiques ont le devoir de respecter
strictement leurs obligations fisca-
les dans tous les pays où ils inter-
viennent. Ils doivent également
s’abstenir de mettre en œuvre tout
montage artificiel dont la seule
finalité serait d’éviter l’impôt. De
leur côté, les gouvernements et les
administrations fiscales doivent
respecter un certain nombre de
principes rappelés dans un policy
statement initié par la Commission
Fiscalité d’ICC France.
La Chambre de Commerce Internationale qui œuvre en faveur de l’élimination detous les obstacles entravant le commerce et les investissements internationaux estnotamment préoccupée par une application parfois abusive des règles anti-évasionfiscale.
Jean-Marc TIRARD, Avocat à la Cour Tirard, Naudin, Président de la Commission Fiscalité , ICC France
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Plaidoyer en faveur d’uneapplication raisonnable des règles anti-évasion fiscale
10 TIRARD 6/07/12 16:51 Page 10
11France
La neutralité de la fiscalité au
regard des décisions d’inves-
tissement est généralement
considérée comme une propriété
essentielle de tout système fiscal.
La décision d’investir doit reposer
sur des considérations purement
économiques. Or, en matière de
fiscalité des entreprises, on cons-
tate le plus souvent que fonds
empruntés et fonds propres reçoi-
vent un traitement fiscal différent
du fait même de la déductibilité des
intérêts d'emprunts, alors que la
rémunération des fonds propres ne
donne lieu à aucune déduction.
Les solutions pour la neutralité
fiscale
En théorie, les solutions envisage-
ables oscillent entre deux positions
extrêmes. Une première approche
reposant sur la non-déductibilité
intégrale des intérêts d'emprunts
est souvent présentée comme une
Comprehensive Business Income
Tax (CBIT), du nom donné à cette
tentative de réforme aux USA. Une
seconde approche, notamment
mise en œuvre en Belgique,
consiste à étendre la déductibilité
aux intérêts notionnels correspon-
dant à une rémunération des capi-
taux propres, appelée Allowance
for Corporate Equity (ACE). La pre-
mière solution conduit à élargir
l'assiette de l'impôt sur les socié-
tés et à accroître le coût du capital
avec un effet négatif sur l'investis-
sement à fiscalité inchangée par
ailleurs. Mais, lorsqu'elle est intro-
duite dans le cadre d'une réforme
fiscale avec une baisse significative
du taux de l'Impôt sur les Sociétés,
cette solution se traduit par une
amélioration du bien-être(1).
La seconde approche améliore l'ef-
ficacité économique car elle élimi-
ne la distorsion entre dette et capi-
taux propres et réduit le coût du
capital. Utilisée seule, elle est
considérée comme attractive pour
des pays à taux élevés et assiette
large. Mais si on décide d'accroître
le taux d'Impôt sur les Sociétés
pour la financer, cette réforme
érode l'assiette par le "profit shif-
ting" que provoque la hausse du
taux, ce qui tend à réduire le bien-
être. Une action coordonnée au
niveau européen réduit ces risques
en réduisant le champ du profit
shifting.
Quelle approche recommander?
Du fait des conséquences opposées
de ces deux approches, leur combi-
naison peut se révéler intéressante
si elle permet de compenser leurs
inconvénients respectifs. L'étude
menée par la Commission fiscale
d’ICC montre qu'une combinaison
des deux approches qui serait neu-
tre du point de vue des recettes
peut renforcer l'efficacité écono-
mique en supprimant la distorsion
dans le choix endettement/capitaux
propres pour le financement des
sociétés. Un coût du capital plus
élevé sur les investissements
financés par la dette se trouve alors
compensé par un coût du capital
plus faible sur les investissements
financés par capitaux propres. Il en
résulte en moyenne un léger
accroissement de l'investissement
et une amélioration du bien-être du
fait d'une structure financière plus
efficace. Une telle combinaison
repose assurément sur des limites
fixées à la déductibilité, un plafon-
nement, de façon à encadrer le
risque de planning fiscal.
C’est dans ce contexte que la
Commission fiscale d’ICC a prépa-
ré un Policy statement(2) recom-
mandant aux Etats d'introduire
dans la mesure du possible des
dispositifs de déduction des inté-
rêts notionnels (ACE). Par ailleurs,
constatant que, ces dernières
années, les Etats ont plutôt eu
tendance à introduire des réfor-
mes tendant à limiter la déductibi-
lité des intérêts d'emprunts, la
Commission invite les Etats à la
plus grande prudence lorsqu'ils
envisagent des réformes de ce
type, afin de ne pas réduire artifi-
ciellement la déductibilité des
intérêts, ce qui affecterait négati-
vement le coût du capital. Limiter
la déductibilité pouvant conduire à
une double imposition, il est
essentiel d’en restreindre l’usage
aux seuls cas abusifs et de ne sur-
tout pas en faire une mesure
générale!
La Commission fiscale d’ICC suggère de rétablir la neutralité fiscale au regard desdécisions d’investissement en combinant deux approches dont les inconvénientsrespectifs sont ainsi compensés.
Par Michel AUJEAN, Associé de Taj Société d'avocats et Vice-président de la Commission fiscale d’ICC France
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Pour une déductibilité fiscaledes intérêts réels et fictifs
(1) Voir : Ruud A. de Mooij and Michael P. Devereux, “Alternative Systems of Business Tax in Europe: An applied analysis of ACE and CBIT
Reforms”, Taxation Papers No 17, 2008 EU Commission, DG TAXUD.
(2) Limitations of Deductions of Interest Payments ; ICC Document No. 180-520 – (February 2012) .
Politique générale
ICC FRANCE
11 Aujean michel 6/07/12 16:54 Page 11
12 France
AUTORÉGULATION ET BONNES PRATIQUES
ICC FRANCE
L'ICC propose aux opérateurs du
commerce international de
nombreux contrats modèles pour
les opérations les plus fréquentes
telles que la vente, l'agence commer-
ciale, la distribution mais aussi pour
des situations plus complexes telles
que la franchise, la sous-traitance, le
transfert de technologies, la licence de
marque et bien d'autres. Une liste
complète est disponible sur le site inter-
net d’ICC: www.iccwbo.org. Les contrats
modèles proposés par ICC se
différencient des autres contrats
modèles disponibles sur le marché
(ORGALIME, FIDIC), notamment par le
fait qu'ils ne sont pas rédigés par des
organisations professionnelles de
vendeurs ou d'acheteurs; ils sont
équilibrés et tiennent compte des inté-
rêts des deux parties. Ils sont rédigés
par des experts d'ICC et reflètent
la pratique des entreprises à l'interna-
tional. Ils sont dans la mesure du
possible détachés d'un droit national et
font largement référence aux textes et
usages du commerce international.
Les nouveautés
ICC a mis en œuvre les connaissan-
ces de la pratique du commerce
international et de ses experts,
membres du comité de rédaction, afin
d'intégrer dans le nouveau contrat
modèle de vente internationale toutes
les évolutions de la pratique de
la vente internationale. Egalement,
selon la pratique d'ICC, ce nouveau
projet de contrat modèle a été
communiqué à l'ensemble des comités
nationaux et groupes pays afin
d'obtenir leurs commentaires. Il y a
eu de nombreux retours de la part
des comités nationaux qui ont fait
part de l'avis de leurs membres. Il est
à noter que les membres du comité
national français ICC France ont été
particulièrement réactifs et ont pu
faire de nombreux commentaires
dont la pluparts ont été repris.
Tout d'abord, le groupe de travail a
décidé d'élargir le champ d'applica-
tion du contrat modèle de vente inter-
nationale d'ICC afin de le rendre
applicable à toutes les ventes inter-
nationales de biens manufacturés.
Ensuite, s'agissant de la loi applica-
ble, le groupe de travail a décidé
de conserver l'application de la
Convention de Vienne sur les contrats
de vente internationale de marchan-
dises de 1980 (CVIM) permettant aux
parties de soumettre les questions
non réglées par la CVIM à une loi
nationale. La CVIM reste le seul
ensemble de règles régissant les
contrats de vente internationale
accepté par un grand nombre
d'Etats ; 78 Etats sont signataires de
la CVIM aujourd'hui. Pour les ques-
tions non réglées par la CVIM, la loi
applicable, à défaut de choix des par-
ties, sera la loi du vendeur. Il n'était
pas possible pour ICC de vérifier la
comptabilité de ce contrat modèle
avec tous les droits nationaux et le
groupe de travail a donc choisi de
proposer aux utilisateurs de choisir la
loi Suisse. Le groupe de travail a en
effet vérifié que le contrat modèle
dans son ensemble était conforme au
droit Suisse.
La liste des documents contractuels
et de transport a été mise à jour
avec l'intervention de la Fédération
Internationale des Associations de
Transitaires et Assimilés (FIATA). Les
nouveaux Incoterms® 2010, applica-
bles depuis le 1er janvier 2011, ont
été intégrés dans le texte du contrat
modèle. Les mises à jour correspon-
dantes ont nécessité une remise
à plat de nombreuses clauses. Le
contrat modèle ajoute aux modalités
de paiement un tout nouvel instru-
ment "Bank Payment Obligation"
(BPO) établi par ICC et SWIFT qui crée
un mode de paiement électronique
sécurisé et rapide.
La mise en place d'un outil informa-
tique intelligent
L'une des grandes nouveautés du
contrat modèle de vente internationa-
le est la mise en place d'un outil
informatique permettant aux utilisa-
teurs de travailler sur un texte
électronique et de rédiger ainsi en
contact avec un gain de temps consi-
dérable et une sécurité juridique
accrue. L'utilisation des nouveaux
outils informatiques rendra ce
contrat modèle plus accessible à
l'ensemble des utilisateurs.
Le contrat modèle sera toujours
divisé en deux parties avec d'une
part, les conditions particulières du
La Chambre de Commerce Internationale (ICC) a décidé de mettre à jour un de ses Best-Sellers en matièrede contrat modèle ; celui sur la vente internationale. La nouvelle version sera publiée à l’automne 2012.
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Le nouveau contrat modèle devente internationale de l'ICC
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R
Julien MAIRE DU POSET,Avocat à la Cour, SMITH VIOLET,
et membre de la commission Droit et Pratiques du Commerce
International d’ICC France
Christoph Martin RADTKE,Avocat, Rechtsanwalt, Associé LAMY &ASSOCIES et Président de la commissionDroit et Pratiques du CommerceInternational d’ICC France
12-13 Radtke et maire du poste Julien 6/07/12 17:01 Page 12
13France
Autorégulation et bonnes pratiques
contrat, qui devront être complétées
par les parties, et d'autre part, les
conditions générales. Ces deux
parties sont précédées d'une intro-
duction explicative qui permettra aux
utilisateurs de comprendre tous les
aspects de ce contrat modèle.
La nouveauté réside dans l'interface
informatique qui sera mise en place
pour la partie conditions particuliè-
res. Cette interface permettra aux
utilisateurs de compléter cette partie
en remplissant les espaces ou en
faisant des choix entre plusieurs
options lorsque cela sera possible et,
dès lors, de finaliser un contrat de
vente international en quelques
minutes. Par ailleurs, cet outil appor-
tera également plus de sécurité juri-
dique aux parties. Dans la pratique,
les membres du groupe de travail ont
souvent eu l'occasion de voir des opé-
rateurs du commerce international
choisir différentes options à la fois
non compatibles entre elles. De tels
choix peuvent fragiliser le contrat,
voire le rendre inutilisable. La nouvelle
interface informatique a évité ce pro-
blème. En effet, dans l'hypothèse
d'un choix d'options incompatibles
entre elles par les parties, l'interface
informatique leur signalera cette
incompatibilité par un avertissement
qui les invitera à modifier leurs choix.
ICC réfléchit à la mise en place
d'une application type «Smartphone»
permettant aux utilisateurs d'accéder
au contrat modèle de vente interna-
tionale en permanence lors de leurs
déplacements.
La publication de ce contrat modèle
est prévue pour l'automne 2012 et
ICC France mettra en place des sémi-
naires de formations à destination
des entreprises utilisant le contrat
modèle.
Au cœur du Triangle d’or :
un lieu prestigieux pour organiser
vos réunions et séminaires
Une adresse à retenir :
10, avenue Raymond Poincaré
75016 Paris.
Pour toutes informations et
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(Cécile Fromentin)
au 01 42 65 12 66
ou par courrier électronique
Les Espaces ICC
ICC FRANCE
12-13 Radtke et maire du poste Julien 6/07/12 17:01 Page 13
14 France
Le Comité National Français (ICC
France) s’est organisé à cet
effet en créant, à compter du
1er janvier 2010, sous l’impulsion de son
Président, Gérard Worms, et de son
Délégué Général, François Georges,
un Comité consultatif pour la sélection
et les propositions d’arbitres, dont les
membres sont nommés pour un
mandat d’un an renouvelable. On
rappellera brièvement sa composition,
les deux missions qui lui ont été
assignées, et l’esprit dans lequel il
estime devoir remplir chacune d’elles.
La composition du Comité
Depuis sa création, j’ai l’honneur de
présider ce Comité, dont les sept
autres membres, en dépit de
quelques changements intervenus
depuis l’origine1, sont actuellement
deux magistrats (Dominique Hascher
et Gérard Pluyette), deux avocats
(Laurent Jaeger et José Rosell) et
trois directeurs juridiques d’entrepri-
ses (Carol Xueref, Jean-François
Guillemin et Emmanuel Vuillard).
Transparent, ouvert et collégial, il
traduit ainsi une proportion équili-
brée de professionnels du droit, tous
unanimement reconnus comme
d’éminents spécialistes de l’arbitra-
ge et ayant naturellement renoncé à
être proposés comme arbitres par le
Comité pendant toute la durée de
leur mandat.
Les deux missions du Comité
Elles portent respectivement sur lasélection des personnes aptes àremplir la fonction d’arbitres ICC, etsur la proposition, parmi elles, decelle(s) que la Cour pourra être appe-lée à désigner en qualité d’arbitre(s).La sélection consiste à procéder àl’inscription d’arbitres sur la listed’ICC France, étant précisé que, dansle cadre de cette mission, le Comitéest composé non seulement de seshuit membres, mais également duPrésident Gérard Worms, auquel sejoignait, jusqu’à son récent décès, leregretté Serge Lazareff en sa qualitéde Président de la Commission del’arbitrage d’ICC France. Il en sera demême avec la nouvelle présidente dela Commission, Carole Malinvaud,qui sera invitée à participer au comi-té de sélection. Le Comité, qui seréunit deux à trois fois par an enmoyenne (physiquement ou virtuelle-ment) aux fins d’examiner les candi-datures à cette inscription, s’estefforcé, depuis sa création, de diver-sifier les profils, par une ouverturevers les universitaires et juristesd’entreprises, et de favoriser unmeilleur équilibre de sa liste sur labase de critères d’expérience, decompétence et d’âge. Sur ce dernierpoint, il n’a pas manqué de rajeunircette liste et de proposer à la Courdes arbitres qui n’avaient jusqu’alorsjamais officié.
Les propositions suivent un proces-sus rigoureux. Saisi par le Secrétariatde la Cour d’une demande, qu’elle soitde président de tribunal arbitral oud’arbitre unique, le Délégué Générald’ICC France consulte le Comité,après s’être préalablement assuré del’absence de tout conflit d’intérêts dechacun de ses membres avec les par-ties à l’arbitrage et/ou leurs conseils.Une fois cette vérification faite, leComité, connaissance prise des données du litige et du cursus desarbitres potentiels suggérés par le Délégué Général ou par ses membres, organise le plus souventune conférence téléphonique (parfoisun simple échange de courriels) quipermet de proposer, dans le bref délaiimparti, deux ou trois noms, lesquelssont alors soumis à la Cour par ordrede préférence. Dans l’exécution decette mission, le Comité n’a eu decesse de varier ses propositions, enévitant qu’elles portent sur lesmêmes noms et en donnant leurchance à de nouveaux arbitres.Après deux ans et demi de fonction-nement, le bilan du Comité apparaîttrès largement positif, à en juger tantpar le nombre de consultationsreçues de la Cour3, qui n’a jamais étéaussi élevé, que par celui de ses pro-positions entérinées par la Cour. ICC France peut ainsi se flatter defigurer à ce double titre dans le pelo-ton de tête des Comités Nationaux.
Selon l’article 13.3 du Règlement de la Cour internationale d’arbitrage de la Chambrede Commerce Internationale (ICC), dans sa dernière version applicable au 1er janvier2012, identique sur ce point à l’article 9.3 du Règlement de 1998, «lorsqu’il incombeà la Cour de nommer un arbitre, elle procède à la nomination sur la base d’uneproposition d’un comité national ou groupe d’ICC qu’elle estime approprié».
Philippe BOIVIN, Président du Comité consultatif
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Sélection et propositionsd’arbitres par ICC France
(1) Gérard Pluyette a remplacé Jean-Paul Béraudo au 1er janvier 2011 et José Rosell occupe depuis le début mai 2012 le siège
abandonné par Carole Malinvaud à la suite de sa nomination à la présidence de la Commission de l’Arbitrage d’ICC France.
(2) Cet impératif interdit aussi aux deux membres du Comité, qui sont également membres de la Cour, de se prononcer sur une
proposition du Comité Consultatif lors d’un Comité Restreint de la Cour.
(3) 34 en 2010, 39 en 2011 et 16 à la mi-mai 2012.
RÉSOLUTION DES LITIGES
ICC FRANCE
14 Boivin 6/07/12 17:05 Page 14
15France
Le Sommet de la terre Rio+20 a été qualifié d’échec par
certains, déçus par le texte finalement voté par les Etats
qui, selon eux, reste seulement pavé de bonnes intentions.
Et un quotidien économique de poser la question : «Dans les
faits, combien de dirigeants d’entreprises placent l’environne-
ment en tête de leurs priorités stratégiques» ? Au-delà des
études ayant été évoquées sur le sujet, le présent dossier
spécial atteste d’une réelle mobilisation des entreprises. Parmi
d’autres chefs d’entreprises présents à Rio, Jean-Pascal
Tricoire, Président du Directoire de Schneider Electric, a accepté
de nous rendre compte, dans une interview exclusive, de ses
impressions à chaud sur ce Sommet qu’ICC avait préparé très en
amont, à plus d’un titre. Tel a été notamment le cas de la contri-
bution concrète et positive qu’ICC a apportée en faisant des
propositions constructives pour faire de la croissance verte une
réalité et en prenant position sur le reporting en matière de
développement durable, encourageant un reporting raisonnable
sur le mode de la soft law. Tel a été également le cas du rôle de
l’eau dans la production de l’énergie, thématique dans laquelle
la Commission Environnement et Energie d’ICC France s’était
investie très tôt, avant et après le Forum mondial de l’eau de
Marseille en mars dernier, ce qui a permis à son Président
Dominique Héron de présenter au Business Day de Rio une
«briefing note» adoptée par ICC sur ce sujet. Bien d’autres
sujets y ont encore été traités et, comme le montre encore ce
dossier spécial, les membres d’ICC France restent plus que
jamais mobilisés sur nombre de questions à venir sur la
croissante verte, question de financement comprise !
DOSSIER SPÉCIALDOSSIER SPÉCIAL
La Conférence Rio+20
■ Interview exclusive de Pascal Tricoire,
Président du Directoire de
Schneider Electric ................................................... 16
■ La Chambre de Commerce Internationale
(ICC) très visible et présente à la
Conférence de Rio+20, Laurent Corbier,
Président de la Commission Environ-
nement et d’Energie d’ICC France,
met en évidence les contributions
majeures d’ICC .......................................................... 18
■ On the Eve of Rio, Louise Kantrow,
représentante d’ICC auprès des Nations
Unies, nous donne ses impressions
sur le contexte des négociations ........... 20
■ La thématique «Water for Energy»
explicitée par Dominique Héron,
Président de la Commission Environ-
nement et Energie d’ICC France ............... 21
■ Quel avenir pour les marchés du
Carbone ? Gabriela G. Merla, Avocate
associée, Cabinet Smith Violet,
fait le point .................................................................. 23
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La Conférence Rio+20
ICC FRANCE
15 intro 6/07/12 17:31 Page 15
16 France
STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX
DOSSIER SPÉCIAL
Au cœur des enjeux discutés à Rio autour de l’économie et de la croissance verte,Schneider Electric, partenaire officiel du pavillon français, s’est mobilisée sur plusieursfronts lors de la conférence. Le Président de son directoire, Jean-Pascal Tricoire,explique comment, tout en livrant son analyse sur l’engagement des entreprisespour un développement durable dans le temps parce qu’intelligent.
Interview exclusive de Jean-Pascal TRICOIRE, Président du Directoire de Schneider Electric
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R
Retour de RIO
ICC FRANCE
En quoi votre entreprise était-
elle concernée par ce troisième
sommet mondial du dévelop-
pement durable ? Se sent-elle
investie d’une responsabilité parti-
culière de par son activité et les
enjeux ?
Aujourd’hui plus que jamais ,
Schneider Electric est au cœur des
enjeux de développement durable.
Notre mission est double. D’un côté il
y a l’équation énergétique ; il faut
faire plus avec moins de ressources,
notamment grâce à l’efficacité éner-
gétique qui, selon l’Agence interna-
tionale de l’énergie, apportera 50%
des réductions d’émissions de CO2
dans les trente prochaines années.
Plus d’efficacité, c’est aussi «parta-
ger l’énergie» via des réseaux intelli-
gents (smart grids) en mettant en
relation les nouvelles sources de
production d’énergies renouvelables,
mais aussi le véhicule électrique et
les bâtiments pour mieux gérer
l’équilibre production-consommation
et différer les consommations lors
des pics de demande d’électricité.
De l’autre côté, nous nous attachons
à trouver des solutions pour les
1,3 milliard de personnes qui sont
aujourd’hui privées d’électricité.
Cette situation est inacceptable et
entraîne des problèmes de santé et
de sécurité des personnes, et de
pollution de l’environnement. Nous
inventons, avec des partenaires et les
populations du «BoP» (Base de la
Pyramide), des solutions pour déve-
lopper une énergie fiable, abordable
et propre.
Schneider Electric est donc au cœur
des enjeux discutés à Rio autour de
l’économie et de la croissance verte.
La conférence Rio+20 était une
caisse de résonnance pour montrer
de façon très concrète que des
solutions existent, qu’elles sont
disponibles maintenant et qu’elles
ne coûtent pas cher ! Pour un projet
d’efficacité énergétique permettant
autour de 30% d’économies d’éner-
gie en moyenne, on parle d’un retour
sur investissement de 3 à 5 ans. C’est
très rapide. Enfin, Rio+20 a permis
d’échanger avec les différents
acteurs de la Société Civile, entrepri-
ses, villes et ONGs, et de faire naître
ainsi de nouvelles opportunités.
Comment avez-vous perçu et appré-
cié le rôle de la Chambre de
Commerce Internationale en sa
qualité de porte-parole mondial
des entreprises dans le cadre du
BASD et de l’organisation d’un
Business Day ?
La réunion du BASD était de très bon
niveau. C’est important de voir colla-
borer ICC avec le WBCSD et le Pacte
Mondial. C’est de ce genre de colla-
borations que naissent des idées
innovantes. Et c’est aussi par ce biais
que le monde de l’entreprise peut
mieux faire connaître ses solutions et
apprendre des autres acteurs de
l’écosystème. Les thématiques choi-
sies étaient très pertinentes, notam-
ment sur l’urbanisation et l’énergie.
En tant que chef d’entreprise, com-
ment qualifierez-vous les résultats
de ce troisième Sommet ? Quels en
sont les résultats les plus tangibles ?
Peuvent-ils contribuer à soutenir
votre politique et vos actions en
matière de développement durable ?
On ne peut qu’être déçu du manque
d’ambition du texte final face à
l’énormité de l’enjeu. Si l’on regarde
les vingt dernières années, nous
sommes face à un constat d’échec.
Les problèmes étaient déjà posés en
1992 : impact de l’activité humaine
sur le climat, raréfaction des res-
sources, déforestation, problèmes
liés à l’eau et à la désertification…
Les actions mises en place pour y
répondre ont été timides. On aurait
pu attendre que Rio+20 aille au-delà
de la réaffirmation de ces enjeux et
de l’importance du développement
durable et pose un cadre plus clair et
plus ambitieux. Le contexte écono-
mique a sûrement pesé dans le
manque d’engagement des grands
Etats. Pourtant, la croissance verte
est une formidable opportunité d’in-
novation et de création d’emplois qui,
pour la plupart, ne sont pas «déloca-
lisables». C’est donc selon moi une
des réponses à la crise actuelle.
Au-delà du document final, ce som-
met aura été celui de la Société
Civile, entreprises incluses. On a
vu émerger un dialogue constructif
entre les villes ou régions, les ONGs
et les entreprises pour apporter des
solutions locales de croissance verte
et responsable. Au-delà de ce que
nous faisons avec nos clients
traditionnels, nous développons des
partenariats avec des acteurs
institutionnels ou des ONGs sur la
formation des jeunes aux métiers de
l’énergie par exemple.
A Rio, nous avons été partenaire offi-
ciel du Pavillon français, géré par une
structure multi-acteurs représen-
tants la Société Civile (le Club France
Rio+20). Nous avons également pro-
fité du Sommet pour officialiser notre
partenariat avec le social businessGrameen Shakti au Bengladesh, en
présence du Professeur Muhammad
Yunus. Cette Joint-Venture nommée
Grameen-Schneider Electric vise à
produire localement des systèmes
16-17 tricoire 6/07/12 17:14 Page 16
17France
ICC FRANCE
d’éclairage et de recharge électrique
économes et propres pour remplacer
les solutions à base de kérosène
utilisées aujourd’hui, tout en formant
les populations locales à la mainte-
nance et à la vente.
Enfin, nous avons participé à de
nombreux débats autour des villes
durables. Aujourd’hui, 75% des
émissions de CO2 proviennent des
zones urbaines qui abritent déjà
plus de 50% de la population mondia-
le. Un monde «décarbonné» passe
donc par des villes intelligentes où
l’intégration entre les différents
réseaux (énergie, transports publics,
routes ...), grâce aux technologies
d’information et de communication,
est centrale. Les maires ont pleine-
ment conscience de ces enjeux et
des implications en termes de choix
d’investissement.
Tout ceci va naturellement vers une
croissance verte pleine d’opportuni-
tés pour les petites et grandes
entreprises et, encore une fois,
sera créateur d’emplois.
Si la Société Civile s’engage forte-
ment, les dirigeants politiques ont
une grande responsabilité et devront
prendre des décisions. Tout ce dont
nous parlons ici est très nouveau :
nouvelles technologies, nouvelles
façons de concevoir nos villes, nou-
veaux bâtiments. Et la seule façon de
mener rapidement le changement
est de faire en sorte qu’il s’impose
par des réglementations adaptées,
que doivent mettre en place les
gouvernements.
Estimez-vous que, désormais, la
Communauté des affaires interna-
tionale est pleinement mobilisée
pour échanger, amorcer efficace-
ment la transition et construire une
économie verte ?
Certainement. On le voit notamment
lors des B20 (la réunion préparatoire
du G20 pour le secteur privé) où
les thématiques de développement
durable, et notamment d’efficacité
énergétique et de croissance verte,
sont de plus en plus présentes
depuis plusieurs années. L’accord
sur l’efficacité énergétique signé lors
du G20 à Los Cabos, Mexique, en est
une preuve. Du point de vue des
entreprises, les opportunités autour
du défi énergétique sont immenses
et il y a longtemps que la question
n’est plus «faut-il y aller ou pas ?»
mais «comment et avec qui y aller ?».
Le jeu de la compétition mondiale fait
ensuite son œuvre !
Il subsiste cependant des résistances
à adopter les nouvelles technologies
qui permettent de trouver des solu-
tions plus efficaces aux problèmes
identifiés. Développer l’intelligence
des villes, l’intelligence des bâti-
ments permettra de concevoir les
architectures de manière très diffé-
rente. Il faut plus de soutien et plus
de formation dans ce sens.
Après ce Sommet, avez-vous des
conseils à donner à vos collègues
Chefs d’entreprise sur la façon de
conduire leur politique de dévelop-
pement durable ?
Je ne me permettrais pas de donner
des conseils, seulement de partager
notre vision qui est que le seul
développement qui vaille est durable.
Les stratégies de développement
que nous mettons en place doivent
pouvoir s’inscrire de façon durable
dans le temps, et par conséquent,
avoir des impacts financiers, sociaux,
écologiques et éthiques équilibrés et
positifs pour les parties prenantes de
l’entreprise.
Propos recueillis par
Sophie Belmont
Dossier spécial©
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> Rio illuminé
16-17 tricoire 6/07/12 17:14 Page 17
18 France
STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX
DOSSIER SPÉCIAL
ICC s’est positionnée très tôt et à plus d’un titre pour porter le voix de la Communautéinternationale des affaires pour une transition réussie vers l’économie verte lors dela conférence des Nations Unies sur le développement Rio+20 qui s’est dérouléedes 20 au 22 juin 2012 au Brésil. Pourquoi et comment ICC s’est-elle impliquée ?Explications avec Laurent Corbier, Président de la Commission Environnement etEnergie d'ICC, et Directeur Projets Energies Renouvelables - Direction des AffairesPubliques d’Areva.
Laurent CORBIER, Directeur Projets Energies Renouvelables - Direction des Affaires Publiques Areva et
Président de la Commission Environnement et Energie d’ICC
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La Chambre de CommerceInternationale (ICC) très présente et visible à laConférence Rio+20
ICC FRANCE
La Communauté internationale
des affaires avait déjà démon-
tré avec succès combien elle
avait progressé dans l’intégration du
Développement durable dans la
pratique commerciale. Et si les
entreprises de tous secteurs avaient
déjà adopté des mesures concrètes,
beaucoup restait encore à faire pour
relever les défis économiques, de
développement et d’environnement.
Forte de ses travaux sur l’économie
verte, ICC s’est montrée très active
pendant la conférence et la phase
préparatoire qui l’a précédée à Rio.
Le résultat d’un travail très en
amont : la Green Economy TaskForce, créée à l'été 2010 au sein de
la Commission Environnement et
Energie d’ICC, a rendu sa contribu-
tion au «Zero draft» des Nations
Unies en novembre 2011 avec ses
partenaires de Business Action forSustainable Development (BASD).
Pouvez-vous nous préciser ce qu’est
le BASD et la manière dont il s’est
exprimé à Rio ?
L’initiative BASD a été fondée à
l’origine par le World BusinessCouncil for Sustainable Development(WBCSD) et ICC, à l’occasion du
Sommet de la Terre de Johannesburg
en 2002. Ces deux organisations
co-fondatrices ont été rejointes, pour
lancer «BASD 2012», par le Pacte
mondial des Nations Unies, compte
tenu notamment du nombre impor-
t a n t d e m e m b re s co m m u n s .
L’initiative a par ailleurs été ouverte à
dix associations sectorielles très
variées - transport aérien, agricultu-
re, ciment, aluminium, pétrole ... -
pour permettre de couvrir un tissu
géographique et industriel plus
large. BASD fonctionne avec une
structure épurée: un comité de pilo-
tage qui gère la stratégie, et une
équipe projets pour coordonner les
groupes de travail et assurer l'inter-
face entre les membres et avec les
Nations Unies. Le comité de pilotage
est présidé par Kris Gopalakrishnan,
vice-Président de la Confédération
de l'industrie indienne et PDG
d’Infosys.
Véritable plateforme collaborative,
BASD n'a pas vocation à être la voix
uniforme et unique des entreprises,
chacun de ses membres prévoyant
aussi de faire sa propre contribution
à Rio+20. BASD a néanmoins été
reconnu comme «coordinateur du
groupe majeur entreprises et indus-
tries» par les organisateurs de la
conférence. Sa mission : rassembler
la communauté des entreprises sur
les points de convergence mais, étant
donné la variété de vues, de pays et
de secteurs, il est difficile d’affirmer
qu'un système international peut tout
régler. En marge de la Conférence
elle-même, BASD a organisé le
19 juin le Business Day : des échan-
ges à haut niveau ayant permis
notamment de faire remonter les
messages-clés du corporate sustai-nablity forum du Pacte mondial qui
s’était tenu du 15 au 18 juin.
Pourquoi et comment ICC a-t-elle
travaillé sur l’économie verte ?
L’économie verte était l’un des thèmes
annoncés de la Conférence et l’ICC
et ses membres ne pouvaient pas ne
pas approfondir la question, et voir
dans quelle mesure elle pouvait s’in-
tégrer dans les pratiques et principes
internationaux que nous recomman-
dons par ailleurs. La Green EconomyTask Force d'ICC a commencé par
analyser et commenter le rapport
du Programme des Nations Unies
pour l'Environnement (Pnue) sur
ce thème. Puis elle a publié dix
«conditions» autour des thèmes de
l'innovation sociale, économique et
environnementale. Nous avons
ensuite travaillé sur une feuille
de route, «the Green EconomyRoadmap», explicitant et illustrant
ces conditions : revue et amendée
par des entreprises et la Banque
Mondiale, elle a été présentée dans
sa version finalisée à la conférence
de Rio. Cette feuille de route consti-
tue un guide pour les entreprises,
les décideurs et la société civile qui
18-19 Corbier laurent 6/07/12 17:25 Page 18
19France
ICC FRANCE
doit leur permettre d’élaborer et de
mettre en œuvre des politiques et
des actions concrètes pour le déve-
loppement durable et l’économie
verte. Elle inclut les meilleurs
pratiques et un appel à de futures
collaborations.
Sur quels autres types de probléma-
tiques ICC aura-t-elle été amenée à
travailler en amont de la conférence
et lors de la conférence RIO+20 ?
ICC a marqué de sa présence de
nombreuses manifestations, tant lors
des sessions préparatoires organi-
sées depuis environ un an par les
Nations Unies, qu’à RIO même, au
cours du mois de juin. Le BusinessDay a permis d’aborder une dizaine
de thématiques sectorielles liées à
l’agriculture, le ciment, l’industrie
chimique, les forêts, les matériaux,
l’industrie pétrolière et gazière mais
aussi la demande croissante d’élec-
tricité, la place des PME, les biens de
consommation et les transports. ICC
s’est finalement trouvée, au travers
d’initiatives et de contributions
variées, impliquée dans tous les thè-
mes majeurs développés et débattus
à l’occasion de la conférence.
Quels sont les autres moyens pour
ICC d’assurer la promotion du
Développement Durable dans la
pratique des affaires ?
ICC promeut de manière permanente
le Développement Durable et toutes
ses composantes, notamment à tra-
vers ses travaux sur la Propriété
Intellectuelle, sa participation active
au B20, ses lignes directrices pour
l’investissement international, ses
règles de bonne conduite dans la
lutte anti-corruption, sans parler de
ses outils pratiques de facilitation du
commerce, comme le modèle de
contrat sur le transfert international
de technologies, ou de ses différen-
tes plateformes d’action.
Plaidez-vous pour la participation de
la société civile dans la gouvernance
mondiale de l'environnement ?
Nous avons changé d'ère, les «major
groups» de la société civile doivent
être des interlocuteurs reconnus et
les entreprises, notamment, ont un
rôle important à jouer. Même si
elles ne demandent pas à être des
«négociateurs», rôle qui incombe aux
Etats, elles pourraient participer de
façon plus active, plus systématique
et donc plus structurée, à la prépara-
tion des négociations. Il faut trouver
le bon équilibre et les bons mécanis-
mes de participation. Nous avons
déjà fait un saut extraordinaire
depuis le sommet de Johannesburg :
en dix ans il y a eu une prise de cons-
cience forte du rôle du secteur privé.
D'ailleurs, depuis un an et demi, la
Convention cadre des Nations Unies
sur les changements climatiques
(CCNUCC) se pose la question de la
meilleure participation des entrepri-
ses aux conférences sur le change-
ment climatique. Et des processus se
mettent en place, comme les parte-
nariats public-privé pour le Fonds
Vert. Au final, le texte issu de la négo-
ciation de Rio mentionne très explici-
tement le rôle nécessaire et attendu
des entreprises. Pour ICC, c’est un
encouragement fort à poursuivre ses
contributions au débat international.
Quels enseignements tirez-vous de
la participation d’ICC à la conférence
de Rio ?
Il est sans doute trop tôt pour tirer
des conclusions détaillées de l’issue
de la Conférence ni d’en évaluer
toutes les conséquences. La plupart
des commentateurs «politiques» ou
«géopolitiques» ont pointé du doigt le
caractère peu ambitieux du texte
final, la crise du multilatéralisme, à
commencer par celle de la «méca-
nique onusienne» elle-même, et
l’absence d’entente, encore moins de
consensus, entre les « grands blocs »
(UE, USA, pays BRIC, G77) sur la ges-
tion de la planète. ICC ne souhaite
pas s’arrêter à cette seule analyse, et
trouve au contraire des éléments de
satisfaction dans la reconnaissance
accrue du rôle et du leadership des
entreprises, et dans la prise de
conscience progressive du fait que
les échanges commerciaux interna-
tionaux et les investissements qu’ils
permettent de générer sont la clé
d’un développement équitable et
durable. Enfin, ICC se félicite d’une
part de la réussite du Business Dayqui a rassemblé près de mille partici-
pants et, d’autre part, de l’excellent
accueil réservé à ses travaux
sur l’Economie verte : la «GreenEconomy Roadmap» et son annexe
intitulée «Best practices and calls for
collaboration»1 ont été largement
diffusés, présentés et commentés à
l’occasion des nombreuses réunions
de Rio.
Dossier spécial
1 http://beleuz.wordpress.com/2012/06/19/green-economy-roadmap-from-icc
©D
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18-19 Corbier laurent 6/07/12 17:25 Page 19
20 France
Louise Kantrow, ICC’s Permanent
Representative to the United
Nations and Organizing Partner
representing the Business and
Industry Major Group, led a BASD
delegation of ten business represen-
tatives to this session. The delegation
attended all the meetings, monitored
the discussions and engaged with
negotiators during some 20 “splinter
group” sessions and plenary mee-
tings. While acknowledging a positive
spirit and commitment to be engaged
in a process that had negotiators
working late into the night, by the end
of the five days, limited progress on
the major issues could be cited.
Titled “The Future We Want” and
19 pages in length, the original docu-
ment was released on 10 January
2012. During this session, delegates
discussed an 80-page revised draft
text produced by the Co-Chairs. In
the end, 70 paragraphs were agreed
ad referendum, with 259 paragraphs
still containing bracketed text. With
less than three weeks to go before
Rio+20, key areas of divergence
remain. The most important reason
for the slow pace of drafting and
negotiating is the lack of early
consensus on the main issues on
Rio+20 agenda - green economy, the
institutional framework for sustaina-
ble development (IFSD), and the
more recently introduced sustainable
development goals (SDGs).
By the end of the week, the bottom
line was that the unresolved substan-
tive problems were too political with
long-term implications to be resolved
by mid-level negotiators in New York;
they will have to be decided at the
last PrepCom in Rio, possibly at the
conference itself.
While complete success at the infor-
mal informals proved elusive, the
general feeling was upbeat, one of
relief and even reserved satisfaction.
For business in particular, negotiating
the road to Rio has already had positi-
ve repercussions around the world: it
has brought sustainable development
into sharper focus, and given environ-
mental health a strong public
spotlight. ICC will have a major
launch of i ts Green Economy
Roadmap during an official side event
of the conference, host and co-organi-
ze several other side events including
the ICC Creativity 4 Innovation Forum.
ICC and business hope the Rio+20
outcomes to focus on the following key
deliverables to catalyze private sector
action towards a green economy:
• Encourage widespread adoption
and uptake of sustainability princi-
ples by businesses of all sizes, sec-
tors and regions.
• Provide the enabling environment
necessary to accelerate and inten-
sify the practice of corporate
sustainability so that business can
fully contribute to sustainable
development. Combating corrup-
tion and ensuring peace and
security will be critical to diffuse
corporate sustainability practices.
The private sector is committed towork collaboratively with the publicsector and civil society to createincentives and remove barriers toachieve green economies.
• Embed the “green economy”
concept in the broader sustainable
development concept. The busi-ness community believes that theterm "green economy" is embed-ded in the broader sustainabledevelopment concept.
• Recognize that in order to move
forward, it is crucial to green all
sectors in all countries and advan-
ce resource efficiency and life
cycle approaches. ICC considersimprovements of existing proces-ses (manufacturing technologies,jobs, logistics, research, etc.) to beas important as launching new products and technologies. Bothapproaches should be pursuedsimultaneously for a step change.
• Recognize that collaboration and
collective action is needed to
operationalize and mainstream
the concept of a green economy.
The transition towards a green economy is a shared responsibilityby all actors in the value chain. Noone stakeholder group, whetherbusiness and industry, governmentsor society, can do this on their own
As government leaders and stakehol-
ders join together at Rio it remains tobe seen whether a spirit of coopera-tion will be reflected in an ambitiousoutcome that gives hope to futuregenerations.
“We are near, and yet so far,” These were the words of UNCSD Secretary-GeneralSha Zukang as he closed the third round of “informal informal” consultations on thedraft outcome document for the UN Conference on Sustainable Development (UNCSD or Rio+20) that took place from 29 May to 2 June 2012 at UN Headquartersin New York.
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On the Eve of Rio:ICC Perspectives
Louise KANTROW, représentante permanente d’ICC aux Nations Unies
STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX
DOSSIER SPÉCIAL
ICC FRANCE
20 on the eve of rio - kantrow 6/07/12 17:34 Page 20
21France
Dossier spécial
ICC FRANCE
L’eau est liée à l’énergie de deux
manières : d’une part, l’énergie
est nécessaire pour produire,
traiter et distribuer l’eau et, d’autre
part, la production d’énergie ne peut
se faire sans utiliser l’eau, d’une
manière ou d’une autre, de même
qu’elle produit des rejets. Dans un
contexte de plus en plus contraint
par la raréfaction de l’eau et par une
demande très forte en énergie, l’in-
terdépendance eau-énergie impose
une approche renouvelée et prospec-
tive. Il est aussi essentiel de sensibi-
liser les décideurs publics aux enjeux
que représente une gouvernance
inclusive et durable de l’eau et de
l’énergie. Dans un premier temps,
seule la dimension « eau pour l’éner-
gie » a été abordée avec pour objectif
de proposer des règles et des
bonnes pratiques de nature à
répondre au défi de l’interdépendan-
ce eau-énergie.
Pour une approche renouvelée et
prospective du couple eau-énergie
Parce que l’eau n’est pas un bien
ordinaire, l’interdépendance eau-
énergie ne peut être abordée sous un
angle exclusivement économique.
Une approche qualitative s’impose.
Les ressources en eau sont inégale-
ment réparties à la surface de la
planète et souffrent des pressions
qu’exercent sur elles les activités
humaines. La valeur de l’eau est
donc fonction de sa disponibilité et
des conflits d’usage. Mais l’eau est
aussi particulièrement sensible aux
variations de changements clima-
tiques. Enfin, l’eau - du fait de sa
« territorialité » - n’est pas un bien
échangeable, ce qui rend inopérants
pour réguler son usage les mécanis-
mes de marché de type allocation de
quotas, à l’instar de ceux mis en
place pour réduire les émissions de
carbone. L’inadéquation entre la
demande et l’offre d’eau pour produi-
re de l’énergie peut donc être à la fois
conjoncturelle et structurelle.
Pour déterminer le mix-énergétique
le mieux adapté, une approche stric-
tement quantitative est insuffisante.
La disponibilité de débit et la qualité
de la ressource en eau sont les deux
critères essentiels à prendre en
compte. Cette démarche impose de
recueillir toute l’information utile
pour apprécier la performance de
chaque solution énergétique envisa-
gée en termes de quantité d’eau
utilisée mais aussi de niveau de
sollicitation des ressources et de
qualité globale de l’eau car toutes
les technologies de production
d’énergie n’ont pas la même
«empreinte hydrique». Paradoxa-
lement, les énergies décarbonées
peuvent être intensives en eau ou
sensibles aux phénomènes naturels
d’évaporation et d’infiltration, à
l’instar de l’hydroélectricité.
Il faut préparer l’avenir par la
recherche et le développement sur
les ressources en eau, l’évolution
des usages et l’apport de l’eau à la
production d’énergie.
Malgré l’intérêt croissant porté à
l’interaction eau-énergie, les publi-
cations de travaux de recherche sont
encore limitées. Or, il est essentiel
de développer la connaissance pour
éclairer les décideurs, les concep-
teurs et les ingénieries. Il manque
notamment des études approfondies
sur la gouvernance couplée de l’eau
et de l’énergie. Les autorités
publiques comme les acteurs écono-
miques doivent pouvoir disposer
d’études robustes sur la consomma-
tion d’eau par type de production
d’énergie et sur cette base, comparer
entre elles les offres énergétiques.
Réduire la consommation en eau de
l’industrie énergétique passe aussi
par l’innovation technologique. Pour
les énergies renouvelables, on peut
évoquer le développement d’agro-
carburants de seconde génération, le
recours accru à l’énergie marémotri-
ce encore peu exploitée ou encore
La commission Environnement et Energie d’ICC France a concentré en 2011 et 2012ses travaux sur les interactions entre l’eau et l’énergie en réunissant un grouped’experts qui a élaboré un document important : la Briefing note «Water for Energy»adoptée par la Chambre de Commerce Internationale (ICC) et diffusée à Rio le 19 juin dernier, lors du Business Day1.
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R
La problématique «Water for energy»
Dominique HÉRON, Directeur des Partenariats – Véolia Environnement et Président de la Commission
Environnement et Energie – ICC France
Cinq bonnes pratiques
recommandées par la
Commission Environnement
et Energie du Comité français de la
Chambre de commerce internatio-
nale :
1. Développer une approche quali-
tative de la consommation en
eau d’un mix énergétique à tra-
vers les concepts de débit et de
qualité de la ressource ;
2. Répondre au défi de l’interdé-
pendance eau-énergie grâce à
l’innovation technologique ;
3. Réguler les usages de l’eau en
intégrant les industriels de l’é-
nergie en tant que parties pre-
nantes à part entière ;
4. Penser l’interaction eau-énergie
à l’échelle du bassin versant ;
5. Prendre en compte l’impact
social des projets industriels
sur les communautés.
�
21-22 heron 6/07/12 17:36 Page 21
22 France
l’exploitation à un stade industriel de
turbines hydrauliques.
Si la participation des acteurs écono-
miques est incontournable, le sou-
tien des autorités publiques l’est tout
autant à travers la réglementation, le
subventionnement et plus globale-
ment la création d’un environnement
favorable à l’innovation.
Vers une gouvernance eau-énergie
inclusive et durable
Sous l’effet de la croissance démo-
graphique, de l’urbanisation et de
l’effet des modes de vie, il faut plus
d’eau et d’énergie pour assurer
le développement économique et le
bien être des sociétés. Cette deman-
de croissante pèse sur les disponibi-
lités des ressources.
L’eau connaît des usages multiples
(agricole, industriel, domestique
etc.). C’est aussi un patrimoine
naturel riche de nombreux écosystè-
mes qu’il faut préserver. Priorité
étant donnée à l’eau potable et à
la conservation de la ressource, le
couple eau-énergie dans la régula-
tion des usages pourrait sembler
subsidiaire. Une gestion durable de
la ressource impose la mise en place
d’un processus participatif à travers
un dialogue continu entre tous
les usagers. Et, dans ce cadre, il
est essentiel que les producteurs
d’énergie soient considérés comme
parties prenantes à part entière.
Le rôle des pouvoirs publics est donc
de mettre en place un cadre favorable
à une gouvernance inclusive.
Se pose aussi la question de l’échelle
pertinente de gestion de ces services
de base. L’expérience montre que
c’est autour des territoires naturels
que sont les bassins versants qu’il
faut la structurer, les découpages
administratifs n’étant pas opérants.
En France, la gestion de l’eau a été
confiée à six agences financières de
bassin. Ces opérateurs décentralisés
ont pour rôle de réguler la demande
en eau. Ils mettent en œuvre une
gestion équilibrée et économe de la
ressource sécurisant l’alimentation
en eau potable et le développement
durables des activités économiques.
Dans les pays où des telles structures
existent, il est souhaitable que les
producteurs d’énergie puissent
davantage y prendre part pour que
leurs intérêts soient entendus et
mieux pris en compte.
Enfin, promouvoir une gestion raison-
nable et raisonnée de la ressource en
eau relève de la responsabilité sociale
des entreprises du secteur de l’éner-
gie. L’eau ne peut pas être uniquement
une matière première pour alimenter
des cycles de production industrielle
en fournissant l’énergie utile : elle a
une connotation sociétale qui ne doit
pas être ignorée. Pour satisfaire une
demande en eau et en énergie tou-
jours croissante, les grands projets
d’infrastructures sont nombreux. On
pense à renforcer l’exploitation du
potentiel hydroélectrique dans cer-
tains pays développés ou émergents
tandis que l’élévation du niveau des
eaux contraint à construire de nouvelles
digues ou à rehausser les anciennes
pour protéger les populations et les
activités économiques. Quelle que soit
leur finalité, la réussite de ces projets
d’infrastructure dépend étroitement
de la réalisation en amont d’études
intégrant leur impact sur la ressource
en eau pour tous les usagers du
bassin, de la qualité du dialogue
engagé avec les parties prenantes,
particulièrement les ONG.
En conclusion, si l’énergie est
indispensable à l’eau, l’eau est une
ressource sous contrainte. Ces
contraintes peuvent être néanmoins
maîtrisées grâce à une approche
globale intégrant la dimension terri-
toriale des politiques publiques, le
développement de nouvelles techno-
logies et le dialogue social au niveau
local. L’approche inclusive conduit à
dépasser le seul volet «l’eau pour
l’énergie» du «nexus» pour s’interro-
ger aussi sur la contribution de
l’énergie à l’approvisionnement en
eau et au traitement des eaux
polluées. Dans le cadre d’Objectifs du
Millénaire revisités, cette dimension
sera incontournable; consommation
d’énergie requise pour alimenter
le dessalement d’eau de mer, par
exemple, ou pour réduire les risques
sanitaires des eaux usées.
DOSSIER SPÉCIAL
ICC FRANCE
(1) Cette « Briefing note » est un travail collectif auquel ont participé plusieurs membres de la Commission Environnement et Energie d’ICC France. Ellea été présentée au cours du Business Day lors d’une session dédiée à l’eau par Dominique Héron. Le document peut être consulté sur le site d’ICC :http://iccwbo.org/
21-22 heron 6/07/12 17:36 Page 22
23France
Dossier spécial
ICC FRANCE
L’air est un bien commun2 et pour
le protéger des mécanismes
financiers se sont développés,
intégrant des incitations écono-
miques qui encouragent son utilisa-
tion durable. Par exemple, les
systèmes qui fixent les plafonds
d’utilisation des ressources, avec
l’attribution en parallèle d’un permis
d’utilisation (allocation/quotas)3. Ce
système est appelé «système de pla-
fonnement et commerce», en anglais
«Cap & Trade». Le système de Cap &
Trade peut accepter l’utilisation de
compensations («offsets» en anglais)
pour le développement des activités
régulées. Les offsets sont des réduc-
tions d’émissions certifiées, délivrées
dans des lieux ou centres d’activité
différents de ceux couverts par le Cap
& Trade. Le système de Cap & Trade
a été mis en œuvre comme un outil
pour réduire les GES, dans la lutte
contre le changement climatique.
L’application de ces mécanismes et
leurs résultats ont été controversés.
Avant 2012
Face au problème du changement
climatique, la communauté interna-
tionale a signé en 1992 la CCNUC4,
comme un accord international pour
lutter contre le problème. Le
Protocole de Kyoto5 réglemente un tel
engagement. La première étape du
protocole expire le 31 Décembre
2012. La prochaine étape exige un
consensus sur la régulation et sur
les acteurs y participant. En vertu du
principe des responsabilités commu-
nes mais différenciées dans la lutte
contre le changement climatique, les
pays industrialisés qui ont ratifié le
Protocole de Kyoto (Pays Annexe 1)
sont obligés de réduire leurs émis-
sions de GES. Pour aider à respecter
ces engagements, le Protocole de
Kyoto prévoie des mécanismes flexi-
bles: l’échange d’émissions, la mise
en œuvre conjointe et le mécanisme
pour un développement propre
(«MDP»). Ce dernier établit que les
pays de l’Annexe 1 pourront dévelop-
per dans les pays en voie de dévelop-
pement des projets qui réduisent les
GES, les certifier et générer ainsi
des réductions d’émissions certifiées
(«CERs»6), vendues comme offsets
pour les pays industrialisés. Le reve-
nu tiré de la vente des CERs aide au
financement des projets MDP dans
les pays d’accueil. Plus les GES sont
réduis et plus les financements obte-
nus à partir de la vente des CERs
seront importants. En conséquence,
sur la base de ce mécanisme, les
pays ne disposant pas des ressour-
ces nécessaires pour réduire les GES
peuvent recevoir des fonds générant
ainsi des incitations économiques
pour les entreprises des pays
industrialisés investissant dans des
projets réduisant les émissions.
Jusqu’à mai 2012, 28 milliards de
dollars ont été générés à partir des
transactions de CERs. Si tous les pro-
jets sous-jacents sont mis en œuvre,
ces contrats permettront d’investir
130 milliards de dollars supplémen-
taires7. Cela démontre la capacité
de ces mécanismes à mobiliser
l’investissement dans les pays en
développement. Toutefois, la réduction
des émissions se traduit non seule-
ment dans un besoin de financement,
mais aussi par des coûts de réduction
des émissions pour les pays obligés à
réduire leurs émissions.
Pendant les négociations de la
deuxième phase du protocole, le
principe de «responsabilités commu-
nes mais différenciées» a donc été
fortement contesté. Certains pays en
développement maintenant classés
comme «émergents», comme la
Chine et l’Inde notamment, sont deve-
nus les premiers émetteurs de GES
au monde et ils n’ont assumé aucun
engagement de réduction, créant une
disparité dans le commerce interna-
tional au milieu d’une forte crise
mondiale. Conséquence : des pays
industrialisés comme les Etats-Unis
ne vont pas l’adopter ; d’autres,
comme le Canada et le Japon,
refusent de continuer dans le schéma
proposé par le Protocole de Kyoto ;
d’autres, enfin, limitent l’utilisation des
CERs comme offsets pour le respect
des obligations au sein de l’EU ETS8.
Vu l’incertitude existant sur l’avenir du
système international de réduction
des émissions, ainsi que l’offre excé-
dentaire sur le marché des quotas
dans le EU ETS (effet de l’activité
industrielle réduite par la crise écono-
mique), les prix des CERs et EUAs9 ont
chuté de façon spectaculaire jusqu’à
32% en 201110. Compte tenu de ce
scénario, une question se pose :
existe-t-il encore des opportunités
pour des mécanismes économiques
incitant à l’investissement dans la lutte
contre le changement climatique?
Après 2012
Malgré la crise du Protocole de
Kyoto11, d’autres possibilités s’ouvrent
pour la réduction des GES. Les
accords bilatéraux entre pays: le
Japon veut par exemple négocier
bilatéralement l’achat de réduction
Les marchés du carbone sont entrés dans une période d’incertitude. Ils n'ont paséchappé à la crise économique que traverse le monde, et ils souffrent de l’absenced’engagements internationaux de réduction des gaz à effet de serre («GES»). Il existe toutefois des opportunités, en voici les principales.
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Quel avenir pour les marchésdu carbone ?
Gabriela G. MERLA, Avocate associée du cabinet Smith Violet 1
23 merla Gabriela 6/07/12 17:37 Page 23
24 France
des émissions, afin de lui permettre
d’atteindre ses objectifs nationaux.
Les engagements de réduction,
nationaux ou régionaux: c’est le cas
notamment des pays industrialisés
comme l’Australie, les pays en déve-
loppement comme le Mexique et la
Corée du Sud, les régions avec des
systèmes de réduction comme la
Californie et le Québec. Le marché
volontaire, chaque jour plus impor-
tant: c’est l’achat de réduction des
émissions par le secteur privé, poussé
par une société consciente exigeant
un engagement des entreprises dans
le développement durable.
Tant le «Post Kyoto», que les autres
possibilités mentionnées ci-dessus,
utiliseront l’expérience laissée par
les mécanismes de Kyoto pour mobi-
liser l’investissement. En ce qui
concerne la génération d’offsets(mobilisation de l’argent des pays
industrialisés dans les pays en déve-
loppement), les mécanismes de
Kyoto seront mis en oeuvre avec une
version «plus évoluée» : par pro-
gramme ou par secteur. Ainsi, la cer-
tification des réductions d’émissions,
ne serait pas faite par projet - ce qui
représente un coût en termes de
temps et de ressources - mais par
programmes ou par secteurs, nationaux
ou transnationaux. Le MDP program-
matique prévu par Kyoto a été le
pionnier. Dans ce système, on obtient
l’enregistrement d’un programme
d’activités; les projets qui répondent
aux critères définis dans le program-
me d’activités enregistré sont «inté-
grés» au programme. Les réductions
d’émissions obtenues dans le pro-
gramme sont certifiées, sans avoir
besoin d’enregistrer chaque projet.
Les MDP programmatiques sont d’un
grand intérêt pour les entreprises dont
les activités génèrent des GES, et dont
les activités sont menées avec les
mêmes caractéristiques dans diffé-
rents lieux géographiques. Après avoir
enregistré son programme de réduction
des émissions, la société va intégrer
au programme tous les centres
d’activités qui répondent aux critères
établis dans le programme enregistré.
Ultérieurement, la société pourra
obtenir des CERs pour chacun de ses
centres d’activité. Dans les circonstan-
ces actuelles, le développement de
MDP Programmatique dans les pays
les moins avancés12, est particulière-
ment pertinent car ces CERs pourront
être utilisés au sein du EU ETS.
Il existe également les actions nom-
mées NAMAs, qui sont de program-
mes sectoriels, proposés par les pays
en développement qui réduisent les
émissions des GES en dessous d’un
niveau prédéterminé ou niveau prédé-
fini comme d’habitude («BAU»13). Les
NAMAs peuvent prendre la forme de
politiques et de mesures, de règle-
mentations, de programmes et même
d’incitations financières. Les NAMAs
peuvent également inclure un ou plu-
sieurs secteurs. Les offsets peuvent
être obtenus si les émissions d’un
secteur sont maintenues en dessous
du niveau BAU, même si les actions
d’atténuation sectorielles ont été
promues ou mises en œuvre par le
secteur public ou privé.
Qui voudrait acheter les offsets géné-
rées à partir des programmes secto-
riels ? Nous avons fait préalablement
référence aux systèmes en cours de
développement et aux acheteurs
potentiels. Mais il faut toujours garder
à l’esprit que pour qu’il y ait des inves-
tissements dans les programmes,
deux éléments doivent être présents:
un système de MRV14 crédible et
précis15 et un cadre juridique qui régle-
mente les programmes à développer,
assurant la sécurité juridique pour les
investissements à réaliser. Celui qui
investit le premier aura plus d’opportu-
nités. Pourquoi donc attendre davan-
tage face à ce besoin pressant?
DOSSIER SPÉCIAL
ICC FRANCE
1 Forte d’une expérience de plus de dix ans sur le droit du changement climatique, Gabriela G. Merla ([email protected] ) estl’auteur du «Guide Légal pour l’implémentation des MDPs programmatiques».
2 Bien commun ; bien non soumis à son appropriation par une personne et qui peut faire l’objet d’un usage excessif, détruisant ainsison équilibre durable.
3 Pour utiliser la ressource au delà de l’«allocation» accordée, il est nécessaire d’acheter un autre quota. Les quotas peuvent être achetés et vendus entre les utilisateurs desdits biens (en fonction de leurs besoins et de leurs capacités à réduire l’utilisation des ressources). Si la ressource est utilisée sans une allocation, des sanctions sont alors imposées. La possibilité de vendre des quotas(comme une incitation économique), et les sanctions éventuelles, incitent à une réduction de l’utilisation des ressources ou à une utilisation plus efficace de celles-ci.
4 Convention-cadre des Nations Unies sur le changement climatique, encore désignée sous son acronyme anglais «UNFCCC».
5 Protocole signé le 11 Décembre 1997 et entré en vigueur le 16 Février 2005.
6 Acronyme anglais pour “Certified Emission Reductions”.
7 Kossoy and Guigon (2012): State and trends of the Carbon Market 2012, World Bank, Washington DC; p. 11.
8 EU ETS:“European Union Emission Trading Scheme” signifiant Système communautaire d’échange de quotas d’emissions. En con-formité avec les règlements de la phase III de l’EU ETS, dans le cas où il n’existe aucun accord international (Kyoto deuxième étape)qui intègre les plus gros pollueurs de la planète, l’EU ETS n’acceptera de CERs que s’ils résultent de projets enregistrés avant 2012ou si les projets sont enregistrés après 2012 et qu’ils se développent dans les pays moins développés comme les pays d’Afrique.
9 EUAs : «European Union Allowances» désigne le permis-quota dans le cadre du EU ETS.
10 Kossoy and Guigon, op cit, p. 9.
11 Lors de la 17e Conférence des Parties (COP17) à Durban, certains progrès ont été obtenus mais insuffisants : parmi eux, l’engage-ment d’établir les bases pour une deuxième période d’engagement, et la voie pour un accord universel devant être conclu en 2015et qui entrera en vigueur en 2020 au plus tard.
12 En Amerique: Haiti. En Afrique: Angola, Bénin, Burkina Faso, Burundi, Comores, Dijibouti, Érythrée, Éthiopiem Gambie, Guinée,Guinée-Bissau, Guinée equiatoriale, Lesotho, Liberia, Madagascar, Malawi, Mali, Mauritanie, Mozambique, Niger, Ouganda,République centrafricaine, République démocratique du Congo, Rwanda, Sao Tomé-et-Principe, Sénégal, Sierra Leone, Somalie,Soudan, Tanzanie, Tchad, Togo, Zambie. En Asie: Afghanistan, Bangladesh, Bhoutan, Cambodge, Laos, Birmanie, Népal, Timor orien-tal, Yémen. En Océanie: Kiribati, Salomon, Samoa, Tuvalu, Vanuatu.
13 BAU: “Business as Usual”.
14 Monitoring, Reporting et Verification des réductions d’émission.
15 Ceux du Protocole de Kyoto profitent d’une bonne réputation.
23 merla Gabriela 6/07/12 17:37 Page 24
25France
Pour de nombreuses entrepri-
ses aujourd’hui, l’interna-
tionalisation de leurs activités
- c'est-à-dire exporter ou s’implan-
ter à l’étranger - constitue si pas
l’élément clé de leur pérennité,
pour le moins la condition néces-
saire de leur croissance, de leur
développement. Nous ne le savons
que trop bien. Un déficit de notre
commerce extérieur de plus de
70 milliards d’euros est tout sim-
plement inacceptable et insoutena-
ble. On le sait aussi, et depuis des
années, notre dispositif d’ensem-
ble d’appui à l’export n’a pas fonc-
tionné comme il aurait du. C’est un
fait. Mais il faut aussi reconnaître
que les acteurs du commerce exté-
rieur n’ont pas, entre leurs mains,
tous les leviers nécessaires.
Un problème de culture et de
stratégie ?
Le manque d’appétence pour
l’export de la part de certains chefs
d’entreprises constitue probable-
ment le premier frein à notre dyna-
misme. La preuve ? Les organismes
chargés du développement à l’ex-
port ne sont jamais plus sollicités
que lorsque les tensions sur le
marché intérieur français apparais-
sent. Les années 2009 et 2010 nous
l’ont prouvé. Ce manque de volonté
est peut-être une question de géné-
ration. A nous de travailler sur cette
dimension, par la formation des
jeunes, par la stimulation des créa-
teurs d’entreprises et par nos outils
d’accompagnement. Ce qui est sûr,
par contre, c’est qu’à nous compa-
rer avec les entreprises allemandes
- LA réussite à l’international - on
voit bien que les questions de fisca-
lité, de transfert du patrimoine, de
structure capitalistique des PMI-
ETI, de relations entre grands grou-
pes, grands donneurs d’ordre et
PME-PMI sous-traitantes intervien-
nent lourdement, en notre défaveur.
Rajoutez à cela le sujet des seuils
d’éligibilité aux aides financières,
celui du coût du travail qui fera que
l’entrepreneur ne se dotera pas de
la ressource humaine impérative
pour se développer à l’étranger.
C’est donc une approche globale de
l’entreprise, de son statut et de sa
dynamique qu’il nous faut avoir. Et
c’est vrai que là - tout en gardant
raison - le modèle allemand mérite
d’être regardé. Premier exporta-
teur, l’Allemagne est aussi un
importateur massif ! Les industriels
allemands n’ont délocalisé qu’une
partie de leurs chaines de produc-
tion dans les pays limitrophes !
Combien de fois sommes-nous sur-
pris par cette fameuse dimension
du «chasser en meute» à l’étranger
par la présence physique même des
entreprises allemandes !
Accessoirement, ne conviendrait-il
pas aussi de revoir les modes de
calcul de nos échanges internatio-
naux, en particulier compte-tenu
de la stratégie industrielle de nos
entreprises d’investissement direct
à l’étranger. Quand le nombre de
filiales ou d’entreprises françaises
implantées au Maroc, en Chine ou
en Indonésie ne cesse d’augmen-
ter, cela n’implique-t-il pas de
facto une diminution de nos flux
exports vers ces pays ? Quand, en
plus, le choix du transfert s’est fait
en implantant l’intégralité de la
chaine de production, on exporte
alors des véhicules Renault depuis
Tanger, on vend des voitures PSA
depuis la Chine, et plus de France.
L’image précise des flux intra-
groupes et la création de valeur
ajoutée à l’étranger sont autant
d’éléments sur lesquels nous
devons aussi avoir de la visibilité.
Certes, cela ne réglera pas la ques-
tion de notre déficit si la comparai-
son se fait à périmètre identique
avec nos concurrents, mais cela
donnera une image plus précise du
rayonnement de nos entreprises et
de nos produits, une image plus
fidèle de la «Maison France» à
l’étranger.
Une mobilisation d’ensemble, et
des CCI en particulier
On a bien vu la dégradation, rapide,
de notre balance commerciale et
au-delà, du nombre de nos expor-
tateurs. Depuis plusieurs années
maintenant, les ministres du
Commerce extérieur français cher-
chent à inverser la tendance. Cela
ne sera ni facile, ni simple. Et cela
prendra du temps ! Nous aurons un
impact réel si tous - nous les
acteurs du commerce extérieur :
les Chambres de commerce et
d’industrie, Ubifrance, les sociétés
privées d’accompagnement, les
régions, les financeurs - nous
mobilisons les entreprises déjà
exportatrices pour les aider à
augmenter leurs flux. Mais il faut
aussi cibler celles qui ont cessé
d’exporter, celles qui ont des produits
POINT DE VUE
ICC FRANCE
Le contexte économique français et européen nous oblige à deux choses : d’une partrestaurer les atouts de la compétitivité de nos entreprises et, d’autre part, accélérerencore leur internationalisation sur les marchés porteurs.
Vianney DE CHALUS, Président, CCI du Havre, Président CCI International, association des chambres decommerce et d’industrie françaises pour l’internationalisation des entreprises
L’internationalisation desentreprises : une prioritévitale
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25-26 point de vue - Chalus 6/07/12 17:41 Page 25
26 France
POINT DE VUE
ICC FRANCE
ou des savoir-faire mondiaux ou à
potentiels mondiaux, celles qui
innovent, les «born global». Toutes
celles qui peuvent avoir une accélé-
ration de leurs exportations si elles
sont bien conseillées et accompa-
gnées, tout en ne perdant pas de
vue celles pour lesquelles il faudra
plus de temps. C’est la mission du
Commissariat général à l’interna-
tionalisation des entreprises,
mission à laquelle nous croyons.
Dans ce cadre, le réseau consulaire
a décidé de se mobiliser plus enco-
re que par le passé, sur quatre axes
stratégiques en particulier qui
concernent à la fois notre propre
fonctionnement - c’est notre ambi-
tion interne en quelque sorte - et
pour les entreprises. Les CCI de
France ont été identifiées pour être
dans la Charte de l’exportation
2012-2014, le «guichet unique»
dans les régions. Les CCI - avec les
CCI françaises à l’étranger, formi-
dable réseau d’opportunités, d’ap-
pui commercial et à l’implantation,
dont l’un des atouts est d’être auto-
financé à 97 % - sont des réduc-
teurs de complexité par la capacité
qu’elles ont à agir directement au
côté des entreprises comme à
mobiliser, faire appel aux experti-
ses des autres acteurs nationaux et
régionaux. C’est ce rôle là que nous
devons assurer, et c’est notre pre-
mière mobilisation, afin de confor-
ter la proximité des CCI, comme
«guichet unique» dans les territoi-
res, pour l’ensemble des autres
acteurs et des entreprises. Cela
veut dire aussi, parce que nous
avons la capacité à agir à l’échelle
régionale et transrégionale, être
les acteurs de la coordination avec
les collectivités territoriales et au-
delà, entre régions. Nous faisons le
choix également d’accompagner
une nouvelle cible privilégiée d’en-
treprises : non plus seulement les
primo-exportateurs - sur lesquels
nous avons travaillé en particulier,
mais pas seulement, entre 2009 et
2011 - mais pour accompagner les
forts potentiels en concentrant nos
moyens humains et financiers sur
ces entreprises, en créant des pro-
cessus homogènes d’accompagne-
ment dans la durée, avec quatre
lignes de métiers dans les CCI à
l’international : l’information et la
sensibilisation ; la préparation à
l’international (diagnostics, élabo-
ration de plan d’actions «export,
stratégie d’implantation…) ; la
structuration du développement
international, notamment autour
du volet des ressources humaines
de l’entreprise (coaching export,
formations, recrutements en
France et à l’étranger) ; et enfin,
l’accompagnement au développe-
ment international (missions de
prospection, salons à l’étranger,
le développement commercial
notamment avec les CCI françaises
à l’étranger…). Troisième axe :
notre mobilisation sur le «Grand
international», nouvelle frontière
de nos entreprises. Il ne s’agit pas
que de cibler les BRICS, mais bien
de conduire les entreprises partout
où la croissance est forte, partout
où les marchés qu’elles ont à
prendre sont parmi les plus
dynamiques. Enfin, nous nous
engageons à rendre des comptes,
avec des résultats nationaux homo-
gènes présentés publiquement,
tous les six mois, avec des indica-
teurs de satisfaction, la mise en
place d’un panel de PME à suivre et
à interroger régulièrement.
Tout cela n’est pas pour nous une
révolution, mais la poursuite à la
fois des efforts que nous avons
engagés et la traduction de ce que
les entreprises nous disent. Cela
doit d’ailleurs être complété à
notre sens par des mesures et des
décisions publiques à destination
des entreprises mêmes. Et nous
avons des propositions à faire. ■
25-26 point de vue - Chalus 6/07/12 17:41 Page 26
27France
Soumises à d’importantes
évolutions du contexte écono-
mique et géopolitique mondial
et à la globalisation de leurs activi-
tés, ces entreprises ont été incitées
à faire évoluer en profondeur la
conduite de leurs opérations, qu’il
s’agisse de gérer leurs ressources
humaines, leurs pratiques com-
merciales, le fonctionnement de
leurs sites industriels ou leurs
relations avec les parties prenantes
liées à leur environnement. Même
si de plus en plus d'entreprises
ont pris en compte ces transfor-
mations, s’engageant de façon
volontaire dans une démarche
de responsabilité d’entreprise,
elles se doivent aussi d’améliorer
leur compétitivité par des démar-
ches pertinentes en matière
d'intelligence stratégique.
L'éthique au cœur d'un environne-
ment complexe en profonde muta-
tion
Les entreprises ont, de tout temps,
cherché à s’adapter aux évolutions
de leur environnement. Pourtant,
en ce début de XXIe siècle, les
transformations du cadre institu-
tionnel, dans lequel s’exercent
leurs activités, sont particulière-
ment significatives. Alors que
pendant des décennies, ces entre-
prises ont conduit leurs affaires
dans un strict cadre national, sous le
contrôle étroit de l'Administration,
qui leur fixait le périmètre de leurs
actions et leurs règles de conduite,
ces mêmes entreprises, aujourd’hui,
ne dirigent plus leurs opérations
dans un seul cadre national, limité et
cohérent, mais dans un nouvel espa-
ce stratégique globalisé, leur gestion
s’exerçant dans un contexte de plus
en plus complexe.
Ce nouvel espace économique
international, où se combinent
aussi bien des règles fixées par des
organismes internationaux et des
parlements nationaux - souvent
d’ailleurs hétérogènes - que des
"exigences normatives" édictées
par de multiples intervenants
(opinions publiques, organisations
non gouvernementales et autres
parties prenantes), pose de multi-
ples défis aux entreprises interna-
tionales, comme à leurs autorités
de tutelle. Il justifie des modes de
gestion et de conduite renouvelés
sous des concepts innovants en
matière de gouvernance d'entre-
prise. En l’absence de gouvernance
mondiale, la combinaison et la
complexité de ces différents
prescripteurs contribuent encore
à accroître l'incohérence dans
laquelle les entreprises doivent
conduire leurs affaires, d'autant
que leurs prescriptions, codes,
standards, souvent d'origine anglo-
saxonne et rassemblés sous le
terme de "soft law", peuvent se
trouver parfois en décalage - sinon
en opposition - avec les systèmes
juridiques d'autres pays.
De cet espace de plus en plus glo-
balisé et de cet environnement
législatif et normatif complexe,
composé de multiples organes
prescripteurs, naît une demande
croissante de transparence qui
contraint les entreprises à conduire
irrémédiablement leurs activités
selon des processus intelligibles,
marqués par une traçabilité renfor-
cée. Face à ces évolutions de la
gouvernance mondiale, les organes
publics, qui ont le monopole de la
fabrication de la loi ou "hard law",
voient leur domaine se réduire peu
à peu, une loi "dure" s’adaptant mal
à une situation en perpétuel mou-
vement. Pour être précise, la loi est
condamnée à des révisions très
fréquentes, qui la rendent illisible,
et le législateur doit, de plus en
plus, se limiter à énoncer des
principes lapidaires. Il appartient
alors à l'entreprise de définir,
notamment par des codes, référen-
tiels et standards, la conduite de
ses affaires dès lors que la loi
devient imprécise ou muette.
Le concept d'éthique et de respon-
sabilité commence là où la loi
s'arrête.
Afin de respecter ses objectifs éco-
nomiques, dans un cadre législatif
et normatif contraignant, le mana-
ger doit alors constamment faire
des arbitrages entre les différentes
normes qui s'imposent à lui. Il doit
doser les efforts que son entreprise
doit faire dans chaque cas entre un
minimum et un optimum. Loin de
mettre en péril la survie de son
entreprise, à savoir la réalisation
de bénéfices, il permet ainsi son
développement régulier et harmo-
nieux à long terme. Ces choix
éthiques forment l’essentiel des
responsabilités du nouveau mana-
ger, sachant que les intérêts qu’il
doit prendre en considération sont
toujours plus nombreux et plus
précis, et les arbitrages toujours
ICC FRANCE
La plupart des grandes entreprises internationales ont, depuis quelques années,progressivement pris conscience qu’il leur fallait inscrire une stricte conformité deleurs activités internationales aux législations, comme une définition de standardséthiques rigoureux, dans la vision stratégique de leur développement.
Dominique LAMOUREUX, Directeur Ethique et Responsabilité d’Entreprise Thales et Président de laCommission Responsabilité d’Entreprise et Anti-corruption d’ICC France
Ethique, politique d'intégritéet compétitivité
©D
R
Point de vue
27-28 point de vue - Lamoureux 6/07/12 17:48 Page 27
28 France
POINT DE VUE
ICC FRANCE
plus fréquents et plus délicats à
effectuer.
Ce cadre mondialisé impose, pour
une gestion efficace des équipes,
de passer de l’implicite à l’explicite,
de l’oral à l’écrit, du discrétionnaire
au "normé". Il conduit à un nouveau
paradigme du management. De
surcroît, la "judiciarisation" renfor-
cée de la vie économique engendre
la mise en oeuvre plus fréquente
des responsabilités civiles et
pénales de l’entreprise, personne
morale, comme de ses dirigeants.
L'intelligence stratégique au service
de la responsabilité d'entreprise
De nombreux experts considèrent
que ces contraintes assumées
contribuent non seulement à la
performance des entreprises
intègres mais aussi améliorent leur
image et leur notoriété - et nom-
breuses sont celles qui en accep-
tent l'augure - tout en les inscrivant
dans une gestion maitrisée des
risques. A terme, elles peuvent
créer un élément différenciant,
source d'avantages compétitifs.
Toutefois, de telles politiques ont
un coût élevé, parfois même consi-
dérable, et grèvent la rentabilité de
l'entreprise «citoyenne». Or, il
serait irresponsable d'avoir la
moindre naïveté sur la réalité de
l'environnement compétitif auquel
sont soumises les entreprises
occidentales. La plupart des pays
émergents sont, dans leur majori-
té, loin d'être confrontés aux
mêmes contraintes et exigences
politiques en matière sociétale
et environnementale ou sur la
question des droits de l'Homme.
Pour maintenir la compétitivité
d’une entreprise "responsable",
l'Intelligence Economique devient
une absolue et ardente nécessité,
seule capable d'éclairer et de
guider l'entreprise qui choisit
l'éthique dans la conduite de ses
affaires.
Par une démarche d'intelligence
économique rigoureuse, il importe
d'assurer, en premier lieu, la sécu-
rité et la protection du patrimoine
intellectuel et stratégique de l’en-
treprise face à des concurrents
animés de moins de scrupules.
Mais il importe surtout, pour main-
tenir une position concurrentielle,
que les acteurs "responsables"
développent des expertises renfor-
cées pour non seulement mieux
comprendre les attentes de leurs
clients et les stratégies de leurs
concurrents, mais encore pour
maîtriser leur environnement en
général et accroitre leur influence
sur leur marché. Dans ce contexte,
il est évidemment fondamental
que les acteurs de l'intelligence
économique - et leurs méthodes
d'intervention - s'inscrivent dans
les mêmes exigences éthiques
que les objectifs qu'ils poursuivent.
La recherche d'information et d'in-
fluence doit s'abstraire de certains
errements passés et de pratiques
délictueuses.
Cette intelligence économique
"éclairée" doit intervenir égale-
ment dans le domaine normatif,
tout particulièrement sur le vaste
marché des idées qui fixe doréna-
vant les règles de gouvernance des
acteurs mondiaux. Les standards
de "bonnes conduites" ne doivent
pas être l’exclusivité des organisa-
tions non gouvernementales, des
think-tanks ou des cabinets de
consulting outre-Atlantique. S'il est
légitime que les institutions poli-
tiques, notamment les législateurs,
disent le "quoi", il est probable que
l'entreprise saura dire le "com-
ment" avec pragmatisme et avec
une efficacité accrue, compte tenu
de son expérience et de son savoir-
faire dans un espace mondial.
Toutefois, il est certain qu'une telle
politique d'intelligence écono-
mique, au service d'un manage-
ment "éclairé", impose également
de créer une intelligence collective.
Cette intelligence doit se forger
d'abord au sein même de l'entre-
prise. Il est essentiel de créer,
parmi les salariés, de la confiance
et de l'intelligence pour comprend-
re les risques, partager une vision
commune des enjeux et être capa-
ble d'échanger l'information utile
aux autres. Seul un tel manage-
ment "éclairé", prenant appui sur
des valeurs de respect, crée des
stratégies collectives, pertinentes
et gagnantes. Il peut aussi s'avérer
utile de développer de l'intelligence
collective entre des entreprises
concurrentes. Ainsi, certaines
initiatives sectorielles permettent
aujourd’hui à des industriels de
promouvoir des démarches d'intel-
ligence stratégique en vue de créer
un différentiel de compétitivité avec
leurs compétiteurs émergents. Une
telle démarche a été engagée, avec
succès, dans le secteur de l'aéro-
nautique, de l'espace et de la
défense sur le thème de l'éthique
des affaires. Mais il y a surtout
urgence à créer une authentique
intelligence collective entre les
pouvoirs publics et les acteurs
économiques. Elle conditionne le
développement et la réussite de
toute politique d'intelligence éco-
nomique et stratégique. Elle
implique des partenariats publics /
privés renforcés, faisant appel à
une confiance profonde entre tous
les acteurs. Réclamée à maintes
reprises en France, elle tarde
cependant à se mettre en place car
elle imposerait une révolution
culturelle que les différents
protagonistes semblent timides à
engager.
Face à cette "étrangeté du Monde",
à laquelle les acteurs publics
comme privés sont chaque jour
confrontés, il importe de trouver
des réponses innovantes et proac-
tives avec une authentique agilité
dans les esprits. ■
27-28 point de vue - Lamoureux 6/07/12 17:48 Page 28
29France
ICC FRANCE
Convaincu que la mondialisa-
tion doit être socialement sou-
tenable, une problématique
des droits de l'Homme au cœur des
priorités d'ICC, son comité français
avait réuni une dizaine de personna-
lités pour sensibiliser les entreprises
sur leurs obligations en droits de
l'Homme, «l'objectif étant de trouver
le bon équilibre, sans déformer à
l'excès les objectifs des entrepri-
ses» ; c'est ainsi que Gérard Worms,
Président d'ICC et d'ICC France, a
ouvert le séminaire devant près d'une
soixantaine de participants; entrepri-
ses, avocats, banques et agences de
notation.
Créer de l'intelligence économique
dans un monde en mutation
François Zimeray, Ambassadeur
pour les droits de l'Homme depuis
2008 ayant aussi exercé les fonctions
d'avocat d'affaires, reste convaincu
que droits de l'Homme et intérêts
économiques, non antinomiques,
doivent se concilier; ce qui est impro-
prement appelé «le printemps
arabe» est né du drame d'un tunisien
dans l'impossibilité d'exercer une
activité économique, droit fondamen-
tal. Au registre de la morale, François
Zimeray préfère le dialogue: «l'enjeu,c'est de mettre du respect dans lesproduits et les marchés ; la notioncommune de respect rejoint leconcept de compétitivité et si notrefaçon de voir le commerce peut pro-gresser dans le monde, c'est parcequ'elle porte des valeurs de droits de l'Homme». Les entreprises sont
invitées selon cette dynamique à
travailler plus étroitement avec le
réseau diplomatique français qu'il
faut mobiliser en coopérant dans le
cadre de la mondialisation dont l'un
des principaux défis reste la lutte
contre la pensées unique globale à
mener en affinant sa capacité de
discernement.
Pour cela, il faut maîtriser le cadre de
référence international que précise
Eric Dugelay, Associé au service en
Développement durable du Cabinet
Deloitte, d'autant plus que les règles
deviennent plus contraignantes. Le
26 avril dernier, a été publié le décret
d'application de la loi du Grenelle II
obligeant les entreprises à un report
annuel sur les droits de l'Homme. En
2011, les principes directeurs de
l'OCDE avaient détaillé les obliga-
tions de moyen reposant sur les
multinationales. En 2010, la norme
ISO 26.000, outils d'autoévaluation
de Développement durable, avait fait
du respect des droits de l'Homme en
principe transversal de responsabili-
té des entreprises. Et, en 2008, le
Rapport John Ruggie avait posé
des principes directeurs essentiels
autour de trois axes : «protéger,
respecter et réparer»1.
La question est de savoir si, dans le
cadre de leurs activités internationa-
les, les entreprises considèrent
qu'elles sont dans une démarche
volontaire ou celle du respect d'obli-
gations, observe Dominique de la
Garanderie, Avocat au Barreau de
Paris, ancien Bâtonnier de l'Ordre et
Présidente de l'IFEJI. Les entrepri-
ses ont-elles le choix d'ignorer les
conventions internationales, recom-
mandations et règles fondamentales
qu'elles appliquent dans leurs pays ?
Au-delà de la question de la respon-
sabilité sociale, celle de la responsa-
bilité juridique est sous-jacente 2.
Dans tous les cas, souligne l'avocate,
«les entreprises doivent prendre encharge la politique « sociétale » dansle cadre de leur politique d'investis-sement. Ainsi, l'apport économiquepermettra la mise en place du
©D
R
> Monsieur l’Ambassadeur pour les Droits de l’Homme, François Zimeray
Prendre en compte des droits de l'Homme dans le management des entreprises : quels dilemmes etquelles responsabilités ? Tel était le questionnement des nombreux participants venus assister auséminaire organisé le 31 mai dernier par ICC France.
Les droits de l’Homme aucoeur des préoccupations des entreprises
ÉVÈNEMENT
29-30 Zimeray 6/07/12 17:53 Page 29
30 France
respect des droits humains. C'estainsi qu'il y aura une «capillarité» del'application des droits humains, ilsont besoin des entreprises et inver-sement, les entreprises l'ignorantprennent des risques importants àplus ou moins long terme» 3.
Olivier Loubière, déontologue d'Areva
et Vice-Président d'edh, confirme : le
cadre de référence de J. Ruggie man-
daté par l'ONU pose le principe de
responsabilité de l'entreprise pour
l'impact de ses activités sur les droits
de l'Homme. Dans les régions sensi-
bles, corruption et atteinte à ces
droits vont de pair. Mais comment
rendre opérationnel le management ?
Il l'explique : Areva a intégré dès
l'origine les droits de l'Homme à sa
charte des valeurs, et à la procédure
de conformité éthique du manage-
ment, «mais Ruggie va encore plusloin dans la notion de respect en larendant proactive par l'obligation,pour l'entreprise, de faire acte deprévention. Cela commandait dedévelopper des outils de «due dili-gence raisonnable», outils qu'edh aélaborés en son sein tout en lançantune formation destinée aux Seniorsexecutive»4.
Mettre en œuvre sa stratégie
d'entreprise
Didier Terrolle, Directeur Excellence
en RSE de Sanofi, a présenté l'appro-
che intégrée du groupe allant de la
sensibilisation des cadres dirigeants
et managers opérationnels à l'éva-
luation des pratiques internes, tout
en rappelant la prégnance de la
sphère d'influence jusqu'aux fournis-
seurs. Les droits de l'Homme doivent
être abordés plus comme une oppor-
tunité que comme un risque : «ilssont le socle de notre démarcheRSE» souligne Didier Terrolle, avant
de détailler la démarche proactive du
groupe, d'autant que le message est
porté au plus haut de Sanofi. Le
Groupe Total, déjà doté depuis 2000
d'un Code de bonne conduite, a
publié en 2011 un guide pratique
visant à sensibiliser ses collabora-
teurs, en leur donnant outils et
recommandations pour adopter les
bons réflexes sur le terrain. Et Julie
Vallat, juriste en charge des droits de
l'Homme, de préciser comment des
cadres dirigeants et la direction
juridique du Groupe sont associés à
chacune des évaluations éthiques
des filiales, menées en partenariat
avec des tiers spécialisés à but non
lucratif comme le Danish Institute for
Human Rights (DIHR), pour renforcer
l'importance de ses sujets et mettre
en place des plans d'action et de
suivi des éventuelles lacunes identi-
fiées à cette occasion. C'est aussi
notamment à partir des travaux de ce
dernier que le Groupe Mazars a,
comme le précise son Pdg Philippe
Castagnac, «développé un référentielpour offrir une démarche d'auditpermettant aux entreprises de
communiquer, en interne et en
externe, et de produire des plans
d'amélioration des bonnes pratiques».
D'autant plus que, comme le souli-
gne Xavier Delacroix, Président de
l'Association Française des Conseils
en Affaires Publiques, «la structure
des entreprises n'est pas forcément
en adéquation avec la transversalité
des droits de l'Homme». L'essentiel
reste de trouver des approches
réalistes, de réconcilier l'urgence
financière avec le temps réel des
actions à mener, de tenir compte
de la vision souple des pays non
membres de l'OCDE et de valoriser les
efforts accomplis en cours de carrière.
L'entreprise, si elle n'a pas à être
morale, doit rester éthique en
menant des arbitrages complexes et
en manageant les droits de l'Homme
sur l'ensemble des parties prenan-
tes. Ce qui, d'après Dominique
Lamoureux, Directeur Ethique et
Responsabilité d'entreprise de
T h a l e s e t P r é s i d e n t d e l a
Commission Responsabilité d'entre-
prise et anti-corruption d'ICC France,
oblige à s'orienter vers la soft law
pour trouver l'équilibre. Et de conclu-
re avec Saint-Exupery : «l'avenir, tu
n'as point à le prévoir mais à le
permettre».
SB
1 Une Déclaration de l'OIT avait aussi permis d'élaborer huit conventions, d'applicabilité directe en France, faisant ressortir quatre
droits fondamentaux rappelés dans le «Global Compact» de 2000 mais tout juste respectés, au vu de l'audit de certaines entreprises:
le non travail forcé, le non travail des enfants, la non-discrimination et le droit syndical. En fait, remédier à de tels dysfonctionnements
suppose pour les entreprises d'avoir la capacité de mesurer, de reporter et de vérifier. Or, une étude sur la pratique des entreprises
du CAC40 publiée par Deloitte en juin 2011 montre que, sur 38 affichant leurs engagements dans des documents, que 22 formali-
saient dans une charte, seules 7, regroupées au sein de «Entreprise pour les Droits de l'Homme» (edh), allaient plus loin avec un
dispositif dédié.
2 Le management peut adopter des indicateurs comme la norme ISO 26.000 si sont livrées information et formation liées au degré
de sophistication des textes applicables, impératifs ou non, probablement moins maîtrisée côté PME.
3 En cas de manquement d'une entreprise dans un pays, les «points de contact nationaux» peuvent être saisis pour enquêter notam-
ment sur l'application des principes directeurs de l'OCDE. Les sanctions, rares pour l'heure, seront prises éventuellement par des
autorités nationales ou internationales (CPI). Ainsi, apparaît la nécessité, mise en évidence par John Ruggie, lorsqu'une entreprise
s'installe, de réaliser une étude d'impact, notamment sur le respect des droits humains.
4 Le fait que le PDG donne le «la» avec un «statement» clair en matière de droits de l'homme est aussi, comme pour l'éthique de
l'entreprise, un acte primordial à l'égard du management.
ÉVÈNEMENT
ICC FRANCE
29-30 Zimeray 6/07/12 17:53 Page 30
31France
Héritier de plus de trois siècles
d'histoire dans le domaine de
la défense terrestre, Nexter a
été créé en 2006. Dans un environ-
nement fortement concurrentiel, le
Groupe s'est transformé et a adop-
té un modèle économique efficace
qui lui permet depuis sa création
d'être bénéficiaire. Aujourd'hui,
toujours dans une même dyna-
mique d'adaptation aux enjeux
internationaux et aux besoins des
forces sur les différents théâtres
d'opération, Nexter est devenue
une entreprise réactive et agile.
Avec un chiffre d'affaires de 851
millions d'euros en 2011, dont 38%
de part à l'export, Nexter est un des
principaux acteurs de la défense
terrestre français.
Pouvez-vous nous rappeler les
pôles d’activité du Groupe Nexter ?
Le groupe Nexter confirme son
statut d'acteur global de la défense.
En tant que "systémier de systé-
mier", systémier et équipementier,
l'offre de Nexter est extrêmement
large. Nexter offre une gamme
renouvelée, innovante et de plus en
plus compétitive. Un pôle système
regroupe notamment les véhicules
blindés, dont le VBCI, l'Aravis, et le
char Lecler, les systèmes d'artille-
rie avec le Caesar®, les armes et
tourelles pour les trois secteurs de
défense terrestre, naval et aéro-
nautique, dont les canons du Rafale
ou de l'hélicoptère Tigre. Nous
sommes également un des princi-
paux leaders européens avec notre
pôle munitionnaire. Enfin, un pôle
est constitué de notre offre
Equipement avec cinq filiales
spécialisées dans l'ingénierie, la
fourniture de sous-ensembles
complexes et de services dans les
domaines tels que l'électronique,
l'optique, la mécanique, l'hydrau-
lique, les shelters ou encore la
protection NRBC. En
outre, nos équipes
détiennent également
des savoir-faire dans
le domaine du soutien
et du maintien en
condition opérationnel
des matériels des
forces armées per-
mettant de proposer
des solutions globales
à ses clients.
Quels sont les enjeux
actuels du groupe au
regard de son activité
internationale ?
Les enjeux de Nexter
sont bien évidemment
d'être encore plus présent à
l'international, notamment dans un
environnement fortement contraint
budgétairement. Pour répondre aux
défis de demain, nous avons lancé
en 2011 un plan d'entreprise ambi-
tieux pour rendre notre offre bien
plus compétitive tout en gardant
notre maîtrise de la qualité de nos
systèmes. Nous avons également
développé notre gamme de maté-
riels et d'offre, en maintenant un
investissement en R&D particuliè-
rement important. Avec la création
de filiales au Canada et en Inde, et
d'une co-entreprise en Espagne,
nous avons pour objectif d'atteindre
les 50% de part à l'exportation très
rapidement. Enfin, nous restons
particulièrement attentifs aux
besoins de l'armée de Terre fran-
çaise, seul ou au sein de coopéra-
tions ou groupements avec d'autres
industriels du secteur (tels Renault
Truck Defense, Sagem ou Thales).
En quoi vos fonctions et responsa-
bilités vous ont-elles conduites à
ressentir le besoin d’adhérer à ICC
France ?
En qualité de directeur juridique
d'un Groupe acteur dans un sec-
teur sensible, il est primordial de
partager les préoccupations et
bonnes pratiques des autres pro-
fessionnels adhérents tout en se
tenant informé des évolutions
règlementaires et jurisprudentiel-
les. A cet égard, les groupes de
travails, séminaires et formation
d'ICC France constituent des
atouts et des outils précieux.
LA PAROLE AUX ADHÉRENTS
Nexter : Toute la dynamique d’un groupe international dans un secteur sensible
Acteur global de la défense, Nexter offre une large gamme de produits et de systèmesde plus en plus compétitive à l’international. Les moyens de sa politique de développementpassent aussi par son adhésion à ICC. Pourquoi et comment ; explication avec NathaliePaoli, Directeur juridique du groupe.
Nathalie PAOLI, Directeur juridique de Nexter System
©D
R
> Le VBCI (véhicule blindé de combat d'infanterie)
ICC FRANCE
31 Parole aux adherents - nexter 6/07/12 18:00 Page 31
32 France
L'agenda d'ICC France
CONTACT ET INSCRIPTION
Nicole HENRY - ICC France - Tél. 01 42 65 41 83
Chambre de commerce internationaleL’organisation mondiale des entreprises
France
Formations et Séminaires
Septembre 2012
• 18 Petit-déjeuner débat «Pourquoi
choisir la médiation plutôt
qu’un autre mode de résolution
des litiges ?» (Paris)
• 20 Session de formation
«Le nouveau Règlement
d’Arbitrage de la Chambre de
Commerce Internationale» (Lyon)
Octobre 2012
• 4 Session de formation
«Initiation aux garanties
bancaires internationales » (Paris)
• 9 Session de formation «Le nouveau
Règlement d’arbitrage de la
Chambre de Commerce
Internationale» (Paris)
• 10 Séminaire «Commerce international :
blanchiment d’argent et sanctions
économiques» (Paris)
• Du 10 au 18 Session de formation intensive
au traitement des opérations de
crédit documentaire (Paris)
• 17 Séminaire «Montant optimal des
amendes anti-trust» (Paris)
• 23 et 24 Session de formation «Maîtrise
des garanties bancaires interna-
tionales» (Paris)
• 25 Session de formation «La lettre
de crédit stand-by» (Paris)
Novembre 2012
• 13 Session de formation
«Les encaissements
documentaires» (Paris)
• 14 et 15 Atelier Trade Finance (Paris)
• 20 et 21 Session de formation «Initiation
aux crédits documentaires» (Paris)
• 27 Petit-déjeuner débat «Comment
promouvoir le recours à la média-
tion au sein de l’entreprise et
convaincre la direction ?» (Paris)
• 29 Session de formation
«Le nouveau Règlement
d’arbitrage de la Chambre de
Commerce Internationale» (Paris)
• A préciser : Séminaire «Le contrat
modèle de vente ICC» (Paris)
Décembre 2012
• 7 Séminaire «Trade finance» (Paris)
ICC FRANCE
32 Agenda formation et seminaires 6/07/12 18:01 Page 32