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OPERA de LYON
W O L F GANG AMADEUS MOZART
DON GIOVA N N IDon Giovanni ossia Il dissoluto punito
Livret de Lorenzo da Ponte
Dramma giocoso
en deux actes
K. 527
1787
LIVRET
5 Fiche technique
11 L’argument
19 Les personnages
DON GIOVANNI
24 Atto primo / Premier acte
162 Atto secondo / Second acte
CAHIER de LECTURES
Molière
283 Un cœur à aimer toute la terre
Ivan Nagel
285 L’incarnation du bonheur
André Tubeuf
287 La chasse & la fuite
Alfred de Musset
289 Sérénade de Don Juan
Lorenzo Da Ponte
290 Don Juan n’eut aucun succès
E.T.A. Hoffmann
293 Don Juan
Jean Genet
304 Parmi les morts
Alexandre Blok
305 Les pas du Commandeur
Charles Baudelaire
307 Don Juan aux enfers
CARNET de NOTES
Wolfgang Amadeus Mozart
310 Repères biographiques
320 & Notice bibliographique
Don Giovanni
322 Orientations discographiques
Illustration.
L’une des gravures de Jean-Honoré FRAGONARD
pour les Contes & Nouvelles en versde Jean de La Fontaine
“À Paris, de l’Imprimerie de P. Didot l’aîné”, an III – 1795
LIVRET
Selon ses Mémoires, Lorenzo da Ponte (lire page 294) rédige
pendant une période de deux mois le livret de Don Giovanni
de front avec ceux de deux autres ouvrages. On sait que c’est
Da Ponte qui a proposé le sujet de l’opéra à Mozart. Il s’ins-
pire pour son travail du Dom Juan de Molière, ainsi que du
livret écrit par Giovanni Bertati pour l’opéra de Giuseppe
Gazzaniga, Don Giovanni Tenorio, créé quelques mois aupa-
ravant à Venise.
PARTITION
Pasquale Bondini, directeur du Théâtre de Prague commande
un nouvel opéra à Mozart à la suite de l’immense succès des
Noces de Figaro (1786). Mozart compose Don Giovanni entre
mai et septembre 1787. Arrivé le 4 octobre à Prague pour la
création, il y complète sa partition (numéros avec chœur,
scènes de Masetto et du Commandeur, ouverture). Il porte
l’œuvre dans son catalogue privé le 28 octobre, sous la déno-
mination d’opera buffa.
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PERSONNAGES
DON GIOVANNI, giovane cavaliere estremamente licenzioso
DON GIOVANNI, jeune chevalier extrêmement libertin
Baryton
IL COMMENDATORE / LE COMMANDEUR
Basse
DONNA ANNA, sua figlia, dama promessa sposa di Don Ottavio
DONNA ANNA, sa fille, dame fiancée à Don Ottavio
Soprano
DON OTTAVIO
Ténor
DO N N A ELV I R A, dama di Burgos, abbandonata da Don Giovanni
DO N N A ELV I R A, dame de Burgos, abandonnée par Don Giovanni
Soprano
LEPORELLO, servo di Don Giovanni / valet de Don Giovanni
Basse
MASETTO, amante di Zerlina / amoureux de Zerline
Basse
ZERLINA, contadina / une paysanne
Soprano
CORO
Contadine e contadini ; servi ; coro di sotterra. Suonatori.
CHŒUR
Paysannes & paysans ; serviteurs ; chœur souterrain. Musiciens.
La scena si finge in una città della Spagna.
L’action se déroule dans une ville d’Espagne.
ORCHESTRE
2 flûtes
2 hautbois
2 clarinettes
2 bassons
6
2 cors
2 trompettes
3 trombones
Timbales
Mandoline
Cordes
Continuo : clavecin, violoncelle
Musique de scène
Acte I – No 13. Finale
Orchestre I : 2 hautbois, 2 cors,
Cordes sans les violoncelles, basson (ad libitum)
Orchestre II : violons, contrebasse
Orchestre III : violons, contrebasse
Acte II – No 24. Finale
2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons, 2 cors,
1 violoncelle
DURÉE MOYENNE
2 heures 50
CRÉATION
29 octobre 1787
Au Nationaltheater (actuel Théâtre Tyl) de Prague.
Direction. Wolfgang Amadeus Mozart
Mise en scène.Johann Josef Strohbach
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Luigi Bassi (Don Giovanni), Giuseppe Lolli
(Le Commandeur), Teresa Saporiti (Donna Anna),
Antonio Baglioni (Don Ottavio), Caterina Micelli
(Donna Elvira), Felice Ponziani (Leporello),
Giuseppe Lolli (Masetto), Caterina Bondini (Zerlina)
CRÉATION en FRANCE
1805
Académie Impériale de Musique (salle Montansier).
Création le 17 septembre 1805, dans une version dont le
livret et la partition avaient été adaptés.
1811
Théâtre des Italiens.
Création le 12 octobre de la version en italien, sous la
direction du compositeur Gasparo Spontini.
L’ŒUVRE à LYON
1822
Création le 10 décembre dans une version en français.
1973
Direction musicale.Theodor Guschlbauer
Mise en scène.Louis Erlo
Décors & costumes.Jacques Rapp
Roger Soyer (Don Giovanni), Pierre Thau
(Le Commandeur), Sylvia Geszty (Donna Anna),
Éric Tappy (Don Ottavio), Bernadette Antoine
(Donna Elvira), Gabriel Bacquier (Leporello),
Georg Pappas (Masetto), Danièle Perriers (Zerlina)
1980
Direction musicale. Emil Tchakarov
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Mise en scène. Louis Erlo
Décors.Jacques Rapp
Costumes. Jacques Rapp & Daniel Ogier
Roger Soyer (Don Giovanni), Sergios Kalabakos
(Le Commandeur), Margarita Castro-Alberti
(Donna Anna), Éric Tappy (Don Ottavio),
Rosario Andrade (Donna Elvira), Pierre-Yves Le Maigat
(Leporello), Helge Weidinger (Masetto),
Colette Alliot-Lugaz (Zerlina)
1983
Direction musicale.Armin Jordan
Mise en scène.Louis Erlo
Décors.Jacques Rapp
Costumes.Daniel Ogier
Claes Ahnsjö (Don Giovanni), Sergios Kalabakos
(Le Commandeur), Margarita Castro-Alberti
(Donna Anna), Éric Tappy (Don Ottavio),
Rosario Andrade (Donna Elvira), Pierre-Yves Le Maigat
(Leporello), Helge Weidinger (Masetto),
Colette Alliot-Lugaz (Zerlina)
1992
Direction musicale.Peter Eötvös
Mise en scène.Tamás Ascher
Décors.Zsolt Khell
Costumes.Györgyl Szakács
Éclairages. Tamás Banyai
Rodney Gilfry (Don Giovanni), Romuald Tesarowicz
(Le Commandeur), Michié Nakamaru/Joyce Guyer
(Donna Anna), John Mark Ainsley/Bruno Lazaretti
(Don Ottavio), Isabelle Vernet (Donna Elvira),
Giovanni Furlanetto (Leporello), Antonio Pirozzi
(Masetto), Janet Williams (Zerlina)
Au Théâtre du 8 e de Lyon
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1993
Reprise à l’Opéra de la production précédente
Direction musicale. Peter Eötvös
William Shimell (Don Giovanni), Frode Olsen
(Le Commandeur), Michié Nakamaru (Donna Anna),
John Mark Ainsley (Don Ottavio), Isabelle Vernet
(Donna Elvira), Giovanni Furlanetto (Leporello),
Christophe Lacassagne (Masetto),
Virginie Pochon (Zerlina)
1998
Direction musicale.Daniel Harding
Orchestre de chambre Gustav-Mahler
Chœur de l’Académie européenne de musique
Mise en scène.Peter Brook
Eléments scéniques.Tom Pye
Costumes.Chloé Obolensky
Éclairages. Jean Kalman
Roberto Scaltriti/Peter Mattei (Don Giovanni),
Alessandro Guerzoni/Gudjon Oskarsson (Le Commandeur),
Monica Colonna/Carmela Remigio (Donna Anna),
Kenneth Tarver/John Mark Ainsley (Don Ottavio),
Véronique Gens/Melanie Diener (Donna Elvira),
Nicola Ulivieri/Gilles Cachemaille (Leporello),
Nathan Berg/Till Fechner (Masetto),
Catryn Wyn-Davies/Lisa Larsson (Zerlina)
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PREMIER ACTE
SCÈNE 1
Un jardin, la nuit. Devant la maison de Donna Anna, LE P O-
RELLO fait les cents pas ; il récrimine contre sa condition
ingrate et fatigante de valet de grand seigneur. Du bruit,
on vient, il se cache. Son maître, DON GIOVANNI, cher-
chant à cacher son visage, fuit la maison, poursuivi par
DONNA ANNA : « N’espère pas, si tu ne me tues, que je te
laisse jamais fuir. » LE COMMANDEUR, père de Donna
Anna, survient à son tour. Entendant la voix de son père,
DONNA ANNA rentre dans la maison. LE COMMANDEUR in-
vite DON GIOVANNI au duel, il refuse. Le vieillard insiste,
GIOVANNI sort son épée ; bref combat ; DON GIOVANNI tue
LE COMMANDEUR.
SCÈNE II
DON GIOVANNI retrouve LEPORELLO, qui lui reproche iro-
niquement ses deux faits d’armes : « Violer la fille et tuer
le père ! » DON GIOVANNI le menace, LEPORELLO se calme.
Maître et serviteur s’éclipsent.
SCÈNE III
DONNA ANNA, accompagnée de son fiancé DON OTTAVIO,
revient. Elle ne peut que constater la mort de son père.
Désespérée, elle n’entend pas les paroles de consolation
d’OTTAVIO ; elle lui fait jurer de venger cette mort.
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SCÈNES IV, V & VI
Une rue. C’est toujours la nuit. DON GIOVANNI accorde un
moment de liberté de parole à son LEPORELLO. Mais quand
son valet lui reproche sa vie dissolue, il lui intime violem-
ment l’ordre de se taire. Puis il lui fait part d’un nouveau
projet amoureux, quand il perçoit «une odeur de femme ».
Celle qui arrive, en tenue de voyage, est DONNA ELVIRA, à
la recherche de l’homme qui l’a abandonnée ; elle se pro-
met de lui infliger mille tourments. DON GIOVANNI se sent
évidemment attiré, et prêt à consoler cette belle délaissée,
qu’il ne reconnaît pas d’emblée. L’homme qui l’a trompée,
c’est lui. DONNA ELVIRA éclate en violent reproches.
Courageux, mais pas téméraire, DON GIOVANNI charge
LEPORELLO de prendre en charge ELVIRA avant de s’esqui-
ver discrètement.
LEPORELLO tente de consoler ELVIRA : « Vous n’êtes ni la
première ni la dernière. » Il lui montre et commente un
catalogue qu’il tient lui-même : celui des innombrables
conquêtes de son maître aux quatre coins de l’Europe.
DONNA ELVIRA, pleine de rage et de dépit – amoureuse
encore pourtant – jure de se venger du traître.
SCÈNES VII & VIII
En compagnie de leurs amis – PAYSANS et PAYSANNES –
ZERLINA et MASETTO chantent joyeusement leur amour et
leur mariage tout proche. DON GIOVANNI s’invite à la fête,
il y a tant de jolies femmes. Mais c’est la jeune mariée qui
aiguise son désir. Il charge LEPORELLO d’emmener dans
son palais toute la noce, sauf ZERLINA. MASETTO proteste
mais doit s’incliner devant les menaces de DON GIOVANNI.
SCÈNES IX & X
Enfin seul avec ZERLINA, DON GIOVANNI la séduit avec des
mots, des caresses, des promesses. ZERLINA hésite puis
cède. Tous deux chantent la joie toute proche d’un « inno-
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cent amour ». DONNA ELVIRA surgit alors. Elle a tout
entendu et tire la jeune femme des griffes du séducteur,
l’emmenant avec elle.
SCÈNES XI & XII
DON GIOVANNI se retrouve seul, pestant contre sa mal-
chance, quand arrivent ses amis, DON OTTAVIO et DONNA
ANNA, qui lui demandent son soutien dans le malheur qui
les frappe. DON GIOVANNI se met généreusement à leur
disposition quand, une fois encore, ELVIRA survient. Elle
met en garde DONNA ANNA : ne te fie pas à ce scélérat, il
m’a trahie, il te trahira. DON GIOVANNI tente de la faire
passer pour folle, mais la douleur et la noblesse d’ELVIRA
sèment le trouble dans l’esprit d’ANNA et d’OTTAVIO qui ne
savent plus que croire. DONNA ELVIRA s’en va, promettant
de rendre publics les mauvais coups de DON GIOVANNI.
Celui-ci, feignant la pitié, la suit pour qu’il ne lui arrive
pas malheur, dit-il. En partant, il salue ses amis.
SCÈNES XIII & XIV
Aux accents des dernières paroles de DO N GI OVA N N I,
AN N A reconnaît en lui avec horreur son agresseur noc-
turne. Pour la première fois, elle fait alors à OT TAV I O l e
récit de cette nuit où DO N GI OVA N N I a failli la violer.
Maintenant que le coupable et ses actes sont démasqués,
elle exige de DO N OT TAV I O vengeance de l’outrage et de
la mort de son père.
OT TAV I O a du mal à croire qu’un noble chevalier puisse être
capable d’un tel crime. Il se promet, pour l’amour d’AN N A
et pour sa sérénité, de la détromper ou de la venger.
SCÈNE XV
LEPORELLO rend compte à son maître de sa mission : les
paysans sont tous au palais, à moitié ivres, tout est prêt
pour les entreprises amoureuses de DON GIOVANNI qui
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demande à LEPORELLO de préparer une grande fête, de
rameuter encore quelques filles sur la place et de faire
danser tout le monde. Son catalogue, ce soir, doit s’enri-
chir de quelques unités.
SCÈNE XVI
Dans les jardins du palais, ZERLINA retrouve un MASETTO
furieux. Elle lui propose de payer le prix de son incartade :
qu’il la batte et qu’ensuite on fasse la paix. MASETTO est
reconquis. On entend DON GIOVANNI qui approche. ZER-
LINA prend peur, elle ne veut pas le revoir. MASETTO se
méprend sur le sens de son inquiétude : « Tu crains que je
comprenne comment la chose s’est passée entre vous. »
Il décide de se cacher pour observer la rencontre. ZERLINA
essaye en vain de l’en dissuader : c’est surtout pour lui
qu’elle a peur.
SCÈNE XVII
DO N GI OVA N N I rentre en scène avec ses serviteurs, réveillant
ses invités, les invitant à boire, à danser, à s’amuser.
SCÈNE XVIII
ZERLINA tente de se cacher parmi les arbres, mais DON
GIOVANNI la repère et l’entraîne vers la niche où, juste-
ment, MASETTO s’est caché. Après un mouvement de stu-
peur, il invite le couple à venir danser avec lui.
SCÈNE XIX
Arrivent DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO et DONNA ANNA,
masqués, décidés à saisir l’occasion de la fête pour dévoi-
ler les méfaits de DON GIOVANNI.
Par la fenêtre, LEPORELLO les aperçoit ; à la demande de
DON GIOVANNI, il les invite à rejoindre le bal. Les masques
invoquent l’aide du ciel avant d’entrer dans le palais.
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SCÈNE XX
Le bal a commencé brillamment : orchestres, invités, ser-
viteurs. DON GIOVANNI continue à courtiser ZERLINA ;
MASETTO, furieux, ouvre l’œil... Le trio des masques fait
son entrée. DON GIOVANNI les accueille à bras ouvert :
« C’est ouvert à tous, vive la liberté ! »
Le bal reprend. DON OTTAVIO exécute un menuet avec
DONNA ANNA. LEPORELLO, pour distraire l’attention de
MASETTO, le force à danser avec lui. DON GIOVANNI invite
ZERLINA, puis l’entraîne dans une autre pièce, suivie par
MASETTO et LEPORELLO. Soudain, un cri, le bruit d’une
poursuite. Les trois masques volent au secours de ZERLINA
qui a réussi à s’échapper. DON GIOVANNI rentre, traînant
LEPORELLO qu’il accuse d’avoir outragée ZERLINA. Mais la
ruse ne prend pas. ELVIRA, ANNA et OTTAVIO Se démas-
quent et promettent à DON GIOVANNI le châtiment immi-
nent de ses forfaits. Celui-ci affirme qu’il ne le craint pas.
SECOND ACTE
SCÈNE I
Lassé de la conduite de son maître, excédé qu’il l’ait faus-
sement accusé, LEPORELLO veut le quitter. DON GIOVANNI
parvient à le faire changer d’avis en lui remettant quatre
doublons. Le valet conseille quand même au maître de
laisser tomber les femmes. Impossible pour DON GIO-
VANNI : elles lui aussi indispensables que l’air qu’il res-
pire et que le pain qu’il mange. Puis il l’informe de ses
nouveaux projets féminins : il a jeté son dévolu sur la
camériste de DONNA ELVIRA. Et pour mieux la séduire –
c’est une servante – il demande à LEPORELLO d’échanger
ses vêtements avec lui. Sitôt dit, sitôt fait.
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SCÈNES II & III
Dans le soir qui tombe, on entend la voix d’ELV I R A à sa
fenêtre, qui chante son déchirement : son cœur aime
encore le criminel. DO N GI OVA N N I saisit l’occasion : d’en
bas, il lui redit son amour, il lui demande pardon, il l’im-
plore de la rejoindre. La crédule ELV I R A cède à ses sup-
plications. LE P O R E L L O, avec le costume de son maître, va
se charger d’elle pour laisser le champ libre à DO N GI O-
VA N N I. C e l u i -ci se cache pour observer un peu le jeu de
son valet avec ELV I R A. LE P O R E L L O prend goût à la farce,
s’échauffe même un peu. DO N GI OVA N N I, caché, simule
un duel nocturne qui fait fuir ELV I R A et LE P O R E L L O. I l
peut alors, sous les fenêtres, chanter une sérénade à celle
q u’il convoite.
SCÈNES IV, V & VI
Il est dérangé par MASETTO, accompagné d’un groupe de
paysans armés comme lui. Expédition punitive : il s’agit
de trouver DON GIOVANNI. Le faux LEPORELLO propose de
se joindre à eux, organise les recherches et s’arrange pour
que MASETTO reste seul avec lui. Alors il le roue de coups
et le laisse brisé dans la rue. C’est là que ZERLINA le
trouve, tout gémissant. À condition qu’il calme sa jalousie,
elle lui promet de le soigner avec un remède qui n’est qu’à
elle et qui bat là, dans sa poitrine.
SCÈNES VII & VIII
LEPORELLO et ELVIRA ont trouvé refuge, cachés dans un
vestibule mal éclairé de la maison de DONNA ANNA. Celle-
ci paraît avec son fiancé. LEPORELLO et ELVIRA cherchent
une porte pour fuir et tombent sur MASETTO et ZERLINA.
On veut se venger de DON GIOVANNI, DONNA ELVIRA
demande grâce pour lui. Quand LEPORELLO se découvre,
la stupéfaction est générale.
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SCÈNE IX
LEPORELLO s’explique sur son déguisement, implore l’in-
dulgence de ceux qu’il a trompés, avant de réussir à
prendre la fuite.
SCÈNE X
DON OTTAVIO ne doute plus que DON GIOVANNI soit l’as-
sassin du Commandeur. Il exprime son intention d’aller
demander justice et vengeance à qui de droit. En atten-
dant, il demande à ELVIRA, ZERLINA et MASETTO d’aller
sécher les pleurs de DONNA ANNA.
Restée seule, elle exprime son angoisse : DO N GI OVA N N I
l’a certes trahie, mais elle ne peut s’empêcher d’avoir
peur et d’avoir pitié en voyant ouvert devant lui « l ’ a b î m e
de la mort » .
SCÈNE XI
Au clair de lune, DO N GI OVA N N I profite d’un moment de
répit dans un cimetière, celui où repose le Commandeur
dont on voit la statue. Il est rejoint par LE P O R E L L O à qui
il raconte ses derniers exploits en riant. On entend alors
une voix : « Avant le lever du jour, tu cesseras de rire. »
DO N GI OVA N N I croit à une plaisanterie, LE P O R E L L O n’ e s t
pas rassuré. C’est alors qu’il repère la statue du CO M-
M A N D E U R. Il demande à LE P O R E L L O de l’inviter à dîner le
soir suivant. Tremblant, LE P O R E L L O s ’ exécute. La statue
accepte l’invitation.
SCÈNE XII
DON OTTAVIO a fait le nécessaire pour que justice se fasse.
À présent, il exhorte DONNA ANNA à accepter la mort de
son père, à s’incliner devant la volonté du ciel. Il lui rap-
pelle qu’ils sont fiancés, mais ANNA hésite encore, elle
n’est pas prête, elle souffre encore. OTTAVIO est déterminé
à la soutenir dans son épreuve.
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SCÈNES XIII & XIV
Chez lui, DON GIOVANNI s’apprête à dîner, servi par LEPO-
RELLO, accompagné par la musique d’un petit orchestre
interprétant quelques airs plus ou moins connus. ELVIRA
surgit. Pour la dernière fois, elle tente de sauver DON
GIOVANNI, sans résultat. Après qu’elle est sortie, on entend
son cri terrifié. DON GIOVANNI envoie son valet voir ce
qu’il se passe. Même cri. LEPORELLO revient, terrifié :
c’est l’homme de pierre qui arrive à pas lourds. On entend
frapper à la porte. LEPORELLO ayant trop peur pour aller
ouvrir, c’est DON GIOVANNI qui s’en charge.
SCÈNE XV
LE COMMANDEUR a répondu à l’invitation, il entre. DON
GIOVANNI fait bonne figure, demande un autre couvert à
son valet. LE COMMANDEUR veut rendre son invitation à
DON GIOVANNI qui accepte et, comme gage, lui tend une
main qu’il ne peut plus dégager de la poigne de pierre. LE
COMMANDEUR lui demande de se repentir. DON GIOVANNI
refuse obstinément. LE COMMANDEUR se retire. On entend
des voix sombres. Entouré de flammes, DON GIOVANNI est
englouti par la terre sous le regard terrifié de LEPORELLO.
DERNIÈRE SCÈNE
DO N N A AN N A, DO N N A ELV I R A, ZE R L I N A, DO N OT TAV I O e t
MA S E T T O surviennent avec des officiers de justice pour que
le coupable soit châtié. LE P O R E L L O leur dit que ce n’ e s t
plus la peine, qu’il est parti loin. Et il leur raconte, la sta-
tue... l’engloutissement final. DO N N A ELV I R A va se retirer
au couvent, LE P O R E L L O se chercher un nouveau maître.
DO N N A AN N A demande encore un délai d’un an à OT TAV I O
avant le mariage. MA S E T T O et ZE R L I N A s’apprêtent à aller
dîner tous les deux. Et tous reprennent en chœur une
ancienne moralité : « Ainsi finissent les méchants et la
mort des trompeurs à leur vie ressemble toujours ! »
Le mythe de Don Juan fait partie de ceux qui fondent
l’imaginaire européen. Le personnage de DON GIOVANNI et cet
opéra de Mozart, font partie de ceux sur lesquels on a le plus
écrit, pensé, imaginé, fantasmé. Don Giovanni est un opéra du
mouvement, de la poursuite, de la fuite en avant, des contra-
dictions secrètes. La richesse du personnage central tient peut-
être à son côté insaisissable.
DON GIOVA N N I, « jeune chevalier extrêmement liber-
t i n » est un aristocrate, « grand seigneur méchant homme »
pour reprendre la définition de Sganarelle dans la pièce de
Molière. Il peut être généreux, quand il ouvre ses fêtes à
tous, au nom de la liberté. Il peut être mesquin : LE P O R E L L O
se plaint de son ingratitude dès la première scène, le valet ne
mange peut-être pas à sa faim puisqu’il prélève quelques
morceaux lors du dernier dîner de son maître. Il peut être
courageux – même par obstination – lorsqu’il affronte ses
accusateurs au finale du premier acte et la statue du CO M-
M A N D E U R à la fin du deuxième. Il peut être lâche, quand
il accuse LE P O R E L L O de la tentative de viol dont il est
lui-même coupable ; ou quand il isole MA S E T T O pour mieux
le rouer de coups. Des femmes – comme il l’explique à
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LE P O R E L L O, il a un besoin vital, organique, comme de « l ’ a i r
q u’il respire » ; un besoin plus qu’un désir, qui le pousse à la
poursuite incessante de toutes les femmes, de chaque femme.
C’est cette poursuite qui stimule le personnage, qui le fait
agir et tenir. DO N GI OVA N N I n’a que deux brefs airs solistes
dans la partition : un air brillant, où il presse LE P O R E L L O
d ’ o rganiser la fête et la danse ; une courte et caressante séré-
nade à la mandoline, dédiée à une qu’il aime... Sa vie débri-
dée l’amène jusqu’au meurtre, celui du CO M M A N D E U R : c’est
à partir de cet événement que l’abîme s’ouvre devant lui, et
que sa perte se joue.
Autour de ce personnage central, les autres personnages
tournent, comme en orbite, déterminés par ses agissements.
Son valet d’abord, LEPORELLO, toujours à la limite de
la démission, mais que des liens assez forts unissent à son
maître : on perçoit chez lui une grande admiration pour DON
GIOVANNI – c’est lui qui met à jour le catalogue de ses con-
quêtes – mêlée à une grande répulsion devant sa vie dissolue,
son cynisme ou sa méchanceté. LEPORELLO, comme double,
malgré lui, de son maître : l’inversion des rôles de l’acte II en
est comme un signe.
Les autres planètes qui tournent autour de DON GIOVANNI
sont les femmes.
DONNA ELV I R A, celle qu’il a presque épousée à
B u rgos, puis qu’il a abandonnée. C’est elle qui va se dresser à
plusieurs reprises devant DO N GI OVA N N I, pour déjouer ses
p l a n s . DO N N A ELV I R A l’abandonnée qui n’abandonne jamais :
sa colère et son dépit n’ont d’égaux que l’amour et la compas-
sion qu’elle persiste à éprouver pour DO N GI OVA N N I, j u s q u’ a u
dernier moment, jusqu’à la dernière visite, quasi humiliante,
où elle tente de le ramener dans le droit chemin. DO N N A
ELV I R A finira sa vie retirée dans un couvent, pour y finir ses
jours, dans le remords peut-être, dans les regrets sans doute.
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DONNA ANNA fait partie du même monde que DON
GIOVANNI qui est un de ses amis. D’où sa stupeur quand elle
découvre presque par hasard – par une intonation de DON
GIOVANNI – que c’est lui qui a tenté de la violer avant de tuer
son père en duel. La scène dont elle fait le récit à son fiancé
DON OTTAVIO, elle en est profondément marquée, elle n’en
finit pas de la revivre. ANNA a du mal à faire le deuil, elle va
demander à son fiancé de remettre encore le mariage d’une
année : peut-être sa rencontre avec DON GIOVANNI l’aura-t-
elle tourmentée jusqu’en des domaines les plus secrets, ina-
vouables pour elle...
Son fiancé, DON OTTAVIO, peut paraître un person-
nage assez pâle, surtout face à la vitalité débridée de DON
GIOVANNI. C’est un honnête homme en fait, un homme cour-
tois, pacifique mais prêt à assumer toutes les vengeances et
tous les sacrifices pour le bonheur de celle qu’il aime.
ZERLINA est une jeune paysanne. Elle est évidemment
sensible aux séductions de DON GIOVANNI et manque de céder
à ses propositions. C’est l’intervention de DONNA ELVIRA qui
l’en préserve, et peut-être aussi une forme de bon sens, et
l’amour, tout simplement, qui l’unit à son MASETTO.
MASETTO est un personnage simple. Il aime celle qui
est sur le point de devenir sa femme. Il en est jaloux, si jaloux
qu’il en oublie que DON GIOVANNI est le maître, et que le pay-
san n’a jamais raison contre le seigneur. Il l’apprend à ses
dépens puisqu’il se fait finalement proprement corriger par
DON GIOVANNI qui l’a attiré dans une sorte de guet-apens.
LE COMMANDEUR enfin, est le père de DO N N A AN N A.
Il intervient peu mais fortement. Au début, en défendant sa
fille, imposant – pour son malheur – le duel à DO N GI OVA N N I :
il entre, se bat et meurt. On le retrouve en statue, mi-mort, mi-
vivant, comme messager et instrument de la chute finale du
héros. Représentant de forces célestes – il faut noter que Dieu
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n’est pas cité dans l’opéra – il tente de provoquer le repentir de
DO N GI OVA N N I, sans y parvenir. Son rôle s’arrête là. Limité par
le temps, ayant échoué dans sa mission, il s’en repart, laissant
la place aux forces souterraines qui engloutissent le libertin.
Ouvertura
ATTO PRIMO
Giardino. Notte.
SCENA 1
No 1. Introduzione
LEPORELLO (con ferraiuolo, passeggia davanti la casa
di Donna Anna)
Notte e giorno faticar, per chi nulla sa gradir,
Piova e vento sopportar, mangiar male e mal dormir...
Voglio far il gentiluomo, e non voglio più servir,
E non voglio piu servir; no no no no no non voglio più servir.
Oh che caro galantuomo! Voi star dentro colla bella,
Ed io far la sentinella, la sentinella, la sentinella!
Voglio far il gentiluomo, e non voglio più servir,
E non voglio piu servir; no no no no no non voglio più servir.
Ma mi par... che venga gente... ma mi par... che venga gente;
Non mi voglio far sentir, ah non mi voglio far sentir,
Non mi voglio far sentir, no, no, no, no, no,
Non mi voglio far sentir.
(S’asconde.)
24
Ouverture
PREMIER ACTE
Jardin. Nuit.
SCÈNE 1
No 1. Introduction
LEPORELLO (revêtu d’une cape, va et vient devant la maison
de Donna Anna)
Nuit et jour se fatiguer, pour qui ne sait pas dire merci,
La pluie, le vent, les supporter, dormir mal et mal manger. . .
Je veux faire le gentilhomme et ne plus faire le valet,
Et ne plus faire le valet ; non, non, non, ne plus faire le valet.
Oh quel cher et galant homme ! Vous dedans avec la belle,
Et moi je fais la sentinelle, la sentinelle, la sentinelle !
Je veux faire le gentilhomme, je ne veux plus faire le valet,
Je ne veux plus faire le valet, non, non, non, je ne veux
plus faire le valet.
Mais je crois... qu’il vient du monde... mais je crois... qu’il
vient du monde ;
Je ne veux pas me trahir, ah je ne veux pas me trahir,
Je ne veux pas me trahir, non, non, non, non, non
Je ne veux pas me trahir.
(Il se cache.)
25
DONNA ANNA (tenendo forte pel braccio Don Giovanni,
ed egli cercando sempre di celarsi)
Non sperar, se non m’uccidi, ch’io ti lasci fuggir mai.
DON GIOVANNI
Donna folle! indarno gridi! chi son io tu non saprai!
LEPORELLO
Che tumulto! oh ciel, che gridi!
Il padron in nuovi guai.
DONNA ANNA
Non sperar, se non m’uccidi, ch’io ti lasci fuggir mai,
Non sperar ch’io ti lasci fuggir mai.
DON GIOVANNI
Donna folle! indarno gridi! chi son io tu non saprai, no,
Tu non saprai.
DONNA ANNA
Gente! servi! al traditore!
DON GIOVANNI
Taci, e trema al mio furore;
DONNA ANNA
Scellerato!
DON GIOVANNI
Sconsigliata!
DONNA ANNA
Scellerato!
DON GIOVANNI
Sconsigliata!
MOZART DON GIOVANNI
26
DONNA ANNA (agrippant fortement Don Giovanni
qui cherche à se dissimuler)
N’espère pas, si tu ne me tues, que je te laisse jamais fuir.
DON GIOVANNI
Folle femme ! Tu cries en vain ! Tu ne sauras pas qui je suis !
LEPORELLO
Quel tumulte ! Oh ciel, quels cris !
Le patron a encore des ennuis.
DONNA ANNA
N’espère pas, si tu ne me tues, que je te laisse jamais fuir.
N’espère pas que je te laisse jamais fuir.
DON GIOVANNI
Folle femme ! tu cries en vain ! tu ne sauras pas qui je suis,
Non, tu ne sauras pas.
DONNA ANNA
Mes gens ! Mes serviteurs ! sus au traître !
DON GIOVANNI
Tais-toi, et tremble devant ma colère ;
DONNA ANNA
Scélérat !
DON GIOVANNI
Insensée !
DONNA ANNA
Scélérat !
DON GIOVANNI
Insensée !
27
PREMIER ACTE SCÈNE I
LEPORELLO
Sta a veder che il
Libertino...
DONNA ANNA
Gente! servi!
DON GIOVANNI
Taci, e trema!
LEPORELLO
... Mi farà precipitar!
DONNA ANNA
Come furia
Disperata ti saprò perseguitar.
Come furia disperata, disperata...
DON GIOVANNI
Questa furia disperata
Mi vuol far precipitar.
Questa furia disperata...
LEPORELLO
Che tumulto! oh ciel, che gridi.
Sta’a veder che il
Libertino mi farà precipitar.
Sta’a veder che il libertino mi farà precipitar.
DONNA ANNA
... ti saprò perseguitar.
DON GIOVANNI
... Mi vuol far precipitar.
MOZART DON GIOVANNI
28
LEPORELLO
Vous allez voir que ce
Libertin...
DONNA ANNA
Mes gens ! serviteurs !
DON GIOVANNI
Tais-toi, et tremble !
LEPORELLO
... Me perdra !
DONNA ANNA
Comme une furie
Au désespoir je saurai te harceler.
Comme une furie au désespoir...
DON GIOVANNI
Cette furie au désespoir
Veut précipiter ma perte.
Cette furie au désespoir...
LEPORELLO
Quel tumulte ! oh ciel, quels cris.
Vous allez voir que ce
Libertin me perdra.
Vous allez voir que ce libertin me perdra ;
DONNA ANNA
... je saurai te harceler.
DON GIOVANNI
... Veut causer ma perte.
29
PREMIER ACTE SCÈNE I
DONNA ANNA
Scellerato!
DON GIOVANNI
Sconsigliata!
DONNA ANNA
Scellerato!
DON GIOVANNI
Sconsigliata!
LEPORELLO
Sta a veder che il
Libertino mi farà precipitar!
Che tumulto!
Oh ciel che gridi!
DONNA ANNA
Gente! servi!
Come furia disperata
Ti sapron perseguitar,
Come furia...
DON GIOVANNI
Taci, e trema!
Questa furia disperata
Mi vuol far precipitar.
DONNA ANNA
... Disperata, disperata...
DON GIOVANNI
Questa furia disperata...
MOZART DON GIOVANNI
30
DONNA ANNA
Scélérat !
DON GIOVANNI
Insensée !
DONNA ANNA
Scélérat !
DON GIOVANNI
Insensée !
LEPORELLO
Vous allez voir que le
Libertin me perdra !
Quel tumulte !
Oh ciel quels cris !
DONNA ANNA
Mes gens ! serviteurs !
Comme une furie au désespoir,
Je saurai te harceler.
Comme une furie...
DON GIOVANNI
Tais-toi et tremble !
Cette furie au désespoir
Veut précipiter ma perte.
DONNA ANNA
... Au désespoir, au désespoir...
DON GIOVANNI
Cette furie au désespoir...
31
PREMIER ACTE SCÈNE I
LEPORELLO
Sta a veder che il libertino
Mi farà precipitar.
Sta a veder che il libertino mi farà precipitar.
Sta a veder che il libertino mi farà precipitar.
Sta a veder che il libertino mi farà precipitar.
DONNA ANNA
... Ti sapro perseguitar,
Ti sapro perseguitar.
(Sentendo il Commendatore lascia Don Giovanni
ed entra in casa.)
DON GIOVANNI
... Mi vuol far precipitar,
Mi vuol far precipitar.
IL COMMENDATORE
Lasciala, indegno, battiti meco!
DON GIOVANNI
Va’, non mi degno di pugnar teco.
IL COMMENDATORE
Così pretendi da me fuggir?
LEPORELLO
Potessi
Almeno di qua partir!
DON GIOVANNI
Va non mi degno, no.
IL COMMENDATORE
Così pretendi da me fuggir?
MOZART DON GIOVANNI
32
LEPORELLO
Vous allez voir que le libertin
Me perdra.
Vous allez voir que le libertin me perdra.
Vous allez voir que le libertin me perdra.
Vous allez voir que le libertin me perdra.
DONNA ANNA
... Je saurai te harceler
Je saurai te harceler.
(Entendant le Commandeur, elle laisse Don Giovanni
et rentre dans la maison.)
DON GIOVANNI
... Veut précipiter ma perte,
Veut précipiter ma perte.
LE COMMANDEUR
Laisse-la, misérable, bats-toi !
DON GIOVANNI
Va, je ne daigne pas me battre avec toi.
LE COMMANDEUR
Ainsi tu prétends m’échapper ?
LEPORELLO
Si je pouvais au moins
Fuir cet endroit !
DON GIOVANNI
Va, je ne daigne pas, non.
LE COMMANDEUR
Ainsi tu prétends m’échapper ?
33
PREMIER ACTE SCÈNE I
LEPORELLO
Potessi
Almeno...
DON GIOVANNI
Misero!
IL COMMENDATORE
Battiti!
LEPORELLO
... Di qua partir!
DON GIOVANNI
Misero! Misero, attendi, se vuoi morir!
Combattono.
IL COMMENDATORE
Ah... soccorso!...
Son tradito!... l’assassino... m’ha ferito...
E dal seno palpitante...
LEPORELLO (a parte)
Qual misfatto! Qual eccesso!
Entro il sen, dallo spavento palpitar il cor mi sento.
DON GIOVANNI (a parte)
Ah, già cade il sciagurato, affannoso
E agonizzante già dal seno palpitante
Veggo l’anima partir,
Veggo l’anima partir,
Già dal seno palpitante,
Veggo l’anima partir.
MOZART DON GIOVANNI
34
LEPORELLO
Si je pouvais
Au moins...
DON GIOVANNI
Malheureux !
LE COMMANDEUR
Bats-toi !
LEPORELLO
... Fuir cet endroit !
DON GIOVANNI
Malheureux ! Patience, si tu veux mourir !
Ils se battent.
LE COMMANDEUR
Ah... au secours !...
Je suis trahi !... l’assassin... m’a touché...
Et de mon sein qui palpite...
LEPORELLO (à part)
Quel méfait ! C’est trop !
Dans mon sein je sens mon cœur trembler d’épouvante.
DON GIOVANNI (à part)
Ah, le pauvre est déjà à terre, haletant
Et agonisant, de son sein palpitant déjà
Je vois son âme s’en aller,
Je vois son âme s’en aller,
De son sein palpitant, déjà
Je vois son âme s’en aller.
35
PREMIER ACTE SCÈNE I
IL COMMANDATORE
... Sento l’anima partir,
Sento l’anima partir.
(Muore.)
LEPORELLO
Io non sò che far, che dir.
Io non sò che far, che dir.
Entro il sen, dallo spavento, palpitar il cor mi sento.
Io non sò che far, che dir.
Io non sò che far, che dir.
SCENA II
Recitativo
DON GIOVANNI
Leporello, ove sei?
LEPORELLO
Son qui per mia disgrazia; e voi?
DON GIOVANNI
Son qui.
LEPORELLO
Chi è morto, voi, o il vecchio?
DON GIOVANNI
Che domanda da bestia! il vecchio.
LEPORELLO
Bravo: due imprese leggiadre!
Sforzar la figlia, ed ammazzar il padre!
MOZART DON GIOVANNI
36
LE COMMANDEUR
... Je sens mon âme s’en aller,
Je sens mon âme s’en aller.
(Il meurt.)
LEPORELLO
Je ne sais que faire ni que dire.
Je ne sais que faire ni que dire.
Dans mon sein je sens mon cœur trembler d’épouvante.
Je ne sais que faire ni que dire.
Je ne sais que faire ni que dire.
SCÈNE II
Récitatif
DON GIOVANNI
Leporello, où es-tu ?
LEPORELLO
Je suis là, pour mon malheur ; et vous ?
DON GIOVANNI
Je suis là.
LEPORELLO
Qui est mort, vous ou le vieux ?
DON GIOVANNI
Quelle question stupide ! le vieux.
LEPORELLO
Bravo : deux beaux faits d’armes !
Violer la fille et tuer le père !
37
PREMIER ACTE SCÈNE II
DON GIOVANNI
L’ha voluto, suo danno.
LEPORELLO
Ma Donn’Anna, cosa ha voluto?
DON GIOVANNI
Taci, non mi seccar, vien meco, (in atto di batterlo) se non
vuoi qualche cosa ancor tu!
LEPORELLO
Non vuo’ nulla, signor, non parlo più.
Partono.
SCENA III
DONNA ANNA (con rizolutezza)
Ah, del padre in periglio in soccorso voliam.
DON OTTAVIO (con ferro ignudo in mano)
Tutto il mio sangue verserò se bisogna: ma dov’è il scellerato?
DONNA ANNA
In questo loco...
No 2. Recitativo accompagnato e Duetto
DONNA ANNA (vede il cadavere.)
Ma qual mai s’offre, oh Dei, spettacolo funesto agli occhi miei!
II padre... padre mio... mio caro padre...
DON OTTAVIO
Signore...
MOZART DON GIOVANNI
38
DON GIOVANNI
Il l’a voulu, tant pis pour lui.
LEPORELLO
Mais Donna Anna, qu’a-t-elle voulu ?
DON GIOVANNI
Tais-toi, ne m’embête pas, viens avec moi (menaçant de le
battre) si tu ne veux pas prendre aussi !
LEPORELLO
Je ne veux rien, seigneur, je ne dis plus rien.
Ils sortent.
SCÈNE III
DONNA ANNA (avec résolution)
Ah, volons au secours de mon père.
DON OTTAVIO (épée dégainée à la main)
Je verserai tout mon sang si besoin : mais où est le scélérat ?
DONNA ANNA
En ce lieu...
No 2. Récitatif accompagné & Duo
DONNA ANNA (voyant le cadavre.)
Mais quel spectacle funeste, oh dieux, s’offre à mes yeux !
Le père... mon père... mon père aimé...
DON OTTAVIO
Seigneur...
39
PREMIER ACTE SCÈNE III
DONNA ANNA
Ah l’assassino mel trucidò. Quel sangue... quella piaga...
quel volto... tinto e coperto del color di morte... ei non res-
pira più... fredde ha le membra... Padre mio... caro padre...
padre amato... io manco... io moro...
DON OTTAVIO
Ah, soccorrete, amici, il mio tesoro! Cercatemi... recate-
mi... qualche odor... qualche spirto... ah non tardate...
Donn’Anna... sposa... amica... iI duolo estremo la meschi-
nella uccide...
DONNA ANNA
Ahi...
DON OTTAVIO
Già rinviene... datele nuovi aiuti...
DONNA ANNA
Padre mio...
DON OTTAVIO
Celate, allontanate agli occhi suoi quell’oggetto d’orrore.
Anima mia... consolati... fa’ core...
Duetto
DONNA ANNA (disperatamente)
Fuggi, crudele, fuggi! lascia ch’io mora anchi’io ora ch’è
morto, oh Dio, chi a me la vita diè.
DON OTTAVIO
Senti, cor mio, deh senti, guardami un solo istante, ti parla
il caro amante, che vive sol per te.
MOZART DON GIOVANNI
40
DONNA ANNA
Ah, l’assassin me l’a tué. Ce sang... cette blessure... ce
visage... recouvert par la couleur de la mort... il ne respire
plus... ses membres sont glacés... Mon père... cher père...
père aimé... je défaille... je meurs...
DON OTTAVIO
Ah, amis, secourez mon amour! Allez me chercher... m’ap-
porter... quelque parfum... des sels... ah ne tardez pas...
Donna Anna... épouse... amie... la pauvre, cette extrême
douleur va la tuer...
DONNA ANNA
Ah...
DON OTTAVIO
Elle revient à elle... aidez-la encore...
DONNA ANNA
Mon père...
DON OTTAVIO
Cachez, éloignez de ses yeux cet objet d’horreur. Mon
âme... console-toi... prends courage...
Duo
DONNA ANNA (avec désespoir)
Va-t-en, cruel ! laisse-moi mourir aussi à présent qu’il est
mort, oh Dieu, celui qui me donna la vie.
DON OTTAVIO
Mon cœur, de grâce écoute, regarde-moi juste un instant,
l’amant chéri te parle, qui ne vit que pour toi.
41
PREMIER ACTE SCÈNE III
DONNA ANNA
Tu sei... perdon... mio bene... l’affanno mio, le pene... Ah!
il padre mio dov’è?
DON OTTAVIO
Il padre... Lascia, o cara, la rimembranza amara... Hai
sposo e padre in me.
DONNA ANNA
Ah... il padre... il padre mio dov’è?
DON OTTAVIO
Lascia, o cara, la rimembranza amara... Hai sposo e padre,
hai sposo e padre in me.
Recitativo
DONNA ANNA
Ah! vendicar, se il puoi, giura quel sangue ognor.
DON OTTAVIO
Lo giuro... lo giuro... lo giuro agl’occhi tuoi, lo giuro al
nostro amor.
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
Che giuramento, oh Dei!
Che barbaro momento!
Fra cento affetti e cento
Vammi ondeggiando il cor.
Fra cento affetti e cento
Vammi ondeggiando il cor.
DONNA ANNA
Vendicar quel sangue giura!
MOZART DON GIOVANNI
42
DONNA ANNA
C’est toi... pardon... mon amour... ma souffrance, la
peine... Ah ! où est mon père ?
DON OTTAVIO
Le père... Laisse, ô ma chérie, ce souvenir amer... Tu as en
moi un époux et un père.
DONNA ANNA
Ah... le père... où est mon père ?
DON OTTAVIO
Laisse, ô ma chérie, ce souvenir amer... Tu as un époux et
un père, tu as en moi un époux et un père.
Récitatif
DONNA ANNA
Ah ! jure, si tu peux, de venger ce sang.
DON OTTAVIO
Je le jure... je le jure... je le jure sur tes yeux, sur notre
amour.
DONNA ANNA & DON OTTAVIO
Quel serment, oh dieux !
Quel instant terrible !
Sur cent et cent sentiments
Mon cœur va flottant.
Sur cent et cent sentiments
Mon cœur va flottant.
DONNA ANNA
Jure de venger ce sang !
43
PREMIER ACTE SCÈNE III
DON OTTAVIO
Lo giuro! agl’occhi tuoi, al nostro amor.
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
Che giuramento, oh Dei!
Che barbaro momento!
Fra cento affetti e cento
Vammi ondeggiando il cor.
Fra cento affetti e cento
Vammi ondeggiando il cor...
DONNA ANNA
Vammi ondeggiando
Ondeggiando il cor,
DON OTTAVIO
Vammi ondeggiando il cor
Vammi ondeggiando il cor,
DONNA ANNA
Vammi ondeggiando
Ondeggiando il cor,
Vammi ondeggiando il cor...
DON OTTAVIO
Vammi ondeggiando il cor,
Vammi ondeggiando il cor...
Partono.
MOZART DON GIOVANNI
44
DON OTTAVIO
Je le jure ! sur tes yeux, sur notre amour.
DONNA ANNA & DON OTTAVIO
Quel serment, oh dieux !
Quel instant terrible !
Sur cent et cent sentiments
Mon cœur va flottant.
Sur cent et cent sentiments
Mon cœur va flottant...
DONNA ANNA
Mon cœur va flottant
Mon cœur va flottant,
DON OTTAVIO
Mon cœur va flottant
Mon cœur va flottant,
DONNA ANNA
Mon cœur va
Flottant, mon cœur va
Mon cœur va flottant...
DON OTTAVIO
Mon cœur va flottant,
Mon cœur va flottant...
Ils sortent.
45
PREMIER ACTE SCÈNE III
SCENA IV
Notte. Strada.
Recitativo
DON GIOVANNI
Orsù, spicciati presto... cosa vuoi?
LEPORELLO
L’affar di cui si tratta è importante.
DON GIOVANNI
Lo credo.
LEPORELLO
È importantissimo.
DON GIOVANNI
Meglio ancora: finiscila.
LEPORELLO
Giurate di non andar in collera.
DON GIOVANNI
Lo giuro sul mio onore, purchè non parli del Commen-
datore.
LEPORELLO
Siam soli.
DON GIOVANNI
Lo vedo.
MOZART DON GIOVANNI
46
SCÈNE IV
Nuit. Rue.
Récitatif
DON GIOVANNI
Allons, dépêche-toi vite... que veux-tu ?
LEPORELLO
L’affaire dont il s’agit est importante.
DON GIOVANNI
Je le crois.
LEPORELLO
Elle est très importante.
DON GIOVANNI
Encore mieux : conclus.
LEPORELLO
Jurez de ne pas vous mettre en colère.
DON GIOVANNI
Je le jure sur mon honneur, pourvu que tu ne parles pas du
Commandeur.
LEPORELLO
Nous sommes seuls.
DON GIOVANNI
Je vois.
47
PREMIER ACTE SCÈNE IV
LEPORELLO
Nessun ci sente.
DON GIOVANNI
Via.
LEPORELLO
Vi posso dire tutto liberamente?
DON GIOVANNI
Sì.
LEPORELLO
Dunque quando è così: caro signor padrone, la vita che
menate (all’orecchio, ma forte) è da briccone.
DON GIOVANNI
Temerario! in tal guisa...
LEPORELLO
E il giuramento!...
DON GIOVANNI
Non sò di giuramenti... taci... o ch’io...
LEPORELLO
Non parlo più, non fiato, o padron mio.
DON GIOVANNI
Così saremo amici; or odi un poco, sai tu perchè son qui?
LEPORELLO
Non ne so nulla: ma essendo così tardi... non sarebbe
qualche nuova conquista? Io lo devo saper per porla in lista.
MOZART DON GIOVANNI
48
LEPORELLO
Personne n’écoute.
DON GIOVANNI
Allez.
LEPORELLO
Je peux tout vous dire librement ?
DON GIOVANNI
Oui.
LEPORELLO
Alors bon : cher seigneur maître, la vie que vous menez (à
l’oreille mais fort) est celle d’une canaille.
DON GIOVANNI
Téméraire ! si c’est comme ça...
LEPORELLO
Et le serment !...
DON GIOVANNI
Je ne connais pas de serments... tais-toi... ou je...
LEPORELLO
Je ne parle plus, je ne respire plus, ô mon maître.
DON GIOVANNI
Ainsi nous serons amis ; maintenant écoute un peu, sais-
tu pourquoi je suis ici ?
LEPORELLO
Je n’en sais rien : mais puisqu’il est si tard... ne serait-ce
pas quelque nouvelle conquête ? Il faut que je le sache
pour la mettre sur la liste.
49
PREMIER ACTE SCÈNE IV
DON GIOVANNI
Va’ là, che se’ il grand’uom. Sappi ch’io sono innamorato
d’una bella dama, e son certo che m’ama. La vidi... le par-
lai... meco al casino questa notte verrà... Zitto: mi pare
sentire odor di femmina...
LEPORELLO
Cospetto! che odorato perfetto!
DON GIOVANNI
All’aria, mi par bella:
LEPORELLO
E che occhio, dico!
DON GIOVANNI
Ritiriamoci un poco, e scopriamo terren.
LEPORELLO
Già prese foco.
Vanno in disparte.
SCENA V
No 3. Aria
DONNA ELVIRA (in abito da viaggio)
Ah chi mi dice mai quel barbaro dov’è,
Che per mio scorno amai, che mi mancò di fe,
Che mi mancò di fe?
Ah se ritrovo l’empio,
E a me non torna ancor,
Vo’ farne orrendo scempio, gli vo’ cavare il cor,
Gli vo’ cavare il cor...
MOZART DON GIOVANNI
50
DON GIOVANNI
Te voilà sage. Sache que j’aime une belle dame et je suis
sûr qu’elle m’aime. Je l’ai vue, lui ai parlé... cette nuit, elle
viendra avec moi au pavillon... Chut : je crois que je sens
une odeur de femme...
LEPORELLO
Parbleu ! quel odorat parfait !
DON GIOVANNI
À son allure, elle me semble belle :
LEPORELLO
Et quel œil, je trouve.
DON GIOVANNI
Écartons-nous un peu, et étudions le terrain.
LEPORELLO
Il s’est déjà enflammé.
Ils s’écartent.
SCÈNE V
No 3. Air
DONNA ELVIRA (en tenue de voyage)
Ah qui pourrait me dire où se trouve ce barbare,
Que pour ma honte j’ai aimé, qui de foi m’a manqué,
Qui de foi m’a manqué ?
Ah si je retrouve le cruel,
S’il ne me revient pas,
Je veux le massacrer, lui arracher le cœur,
Je veux lui arracher le cœur...
51
PREMIER ACTE SCÈNE V
DON GIOVANNI
Udisti! qualche bella dal vago abbandonata.
DONNA ELVIRA
... Vo’ farne orrendo scempio, gli vo’ cavare il cor,
DON GIOVANNI
Poverina, poverina!
DONNA ELVIRA
Gli vo’ cavare il cor, sì, gli vo cavare il cor.
DON GIOVANNI
Cerchiam di consolare il suo tormento.
LEPORELLO
Così ne consolò mille e ottocento.
DONNA ELVIRA
Ah chi mi dice mai quel barbaro dov’è,
Che per mio scorno amai, che mi mancò di fe,
Che mi mancò di fe?
Ah se ritrovo l’empio,
E a me non torna ancor,
Vo’ farne orrendo scempio, gli vo’ cavare il cor,
DON GIOVANNI
Poverina, poverina!
DONNA ELVIRA
Gli vo’ cavare il cor, sì, gli vo’ cavare il cor.
DON GIOVANNI
Cerchiam di consolare il suo tormento.
MOZART DON GIOVANNI
52
DON GIOVANNI
Tu as entendu ! quelque belle abandonnée.
DONNA ELVIRA
... Je veux le massacrer, lui arracher le cœur,
DON GIOVANNI
Pauvre petite, pauvre petite !
DONNA ELVIRA
Je veux lui arracher le cœur, oui, lui arracher le cœur.
DON GIOVANNI
Tentons de la consoler de son tourment.
LEPORELLO
Ainsi, il en a consolé mille huit cents.
DONNA ELVIRA
Ah qui pourrait me dire où se trouve ce barbare,
Que pour ma honte j’ai aimé, qui de foi m’a manqué,
Qui de foi m’a manqué ?
Ah si je retrouve le cruel,
S’il ne me revient pas,
Je veux le massacrer, lui arracher le cœur,
DON GIOVANNI
Pauvre petite, pauvre petite !
DONNA ELVIRA
Je veux lui arracher le cœur, oui, lui arracher le cœur.
DON GIOVANNI
Tentons de la consoler de son tourment.
53
PREMIER ACTE SCÈNE V
LEPORELLO
Così ne consolò mille e ottocento.
DONNA ELVIRA
Gli vo’ cavare il cor, gli vo’ cavare il cor,
Gli vo’ cavare il cor, cavare il cor.
DON GIOVANNI
Signorina, signorina!
DONNA ELVIRA
Chi è là?
Recitativo
DON GIOVANNI
Stelle! che vedo!
LEPORELLO
O bella! Donna Elvira!
DONNA ELVIRA
Don Giovanni! Sei qui, mostro, fellon, nido d’inganni!
LEPORELLO (a parte)
Che titoli cruscanti! Manco male che lo conosce bene!
DON GIOVANNI
Via, cara Donna Elvira, calmate questa collera... sentite...
lasciatemi parlar...
DONNA ELVIRA
Cosa puoi dire, dopo azion sì nera? In casa mia entri fur-
tivamente, a forza d’arte, di giuramenti e di lusinghe arri-
vi a sedurre il cor mio; m’innamori, o crudele, mi dichiari
tua sposa, e poi, mancando della terra e del cielo al santo
MOZART DON GIOVANNI
54
LEPORELLO
Ainsi, il en a consolé mille huit cents.
DONNA ELVIRA
Je veux lui arracher le cœur, lui arracher le cœur,
Je veux lui arracher le cœur, arracher le cœur.
DON GIOVANNI
Mademoiselle, mademoiselle !
DONNA ELVIRA
Qui est là ?
Récitatif
DON GIOVANNI
Ciel ! que vois-je ?
LEPORELLO
Excellent ! Donna Elvira !
DONNA ELVIRA
Don Giovanni ! Tu es ici, monstre, traître, nid de tromperies !
LEPORELLO (à part)
Quels titres brillants ! Par bonheur, elle le connaît bien !
DON GIOVANNI
Allons, chère Donna Elvira, calmez cette colère... écou-
tez... laissez-moi te parler...
DONNA ELVIRA
Que dire, après une action si noire ? Tu entres chez moi fur-
tivement, par ruses, serments et caresses, tu parviens à sé-
duire mon cœur ; je tombe amoureuse, ô cruel, tu m’ a p p e l l e s
ton épouse, puis, bafouant la loi sacrée de la terre et du ciel,
55
PREMIER ACTE SCÈNE V
dritto, con enorme delitto dopo tre dì da Burgos t’allonta-
ni, m’abbandoni, mi fuggi, e lasci in preda al rimorso ed al
pianto, per pena forse che t’amai cotanto!
LEPORELLO (a parte)
Pare un libro stampato.
DON GIOVANNI
Oh in quanto a questo ebbi le mie ragioni: è vero?
LEPORELLO (ironicamente)
È vero. E che ragioni forti!
DONNA ELVIRA
E quali sono, se non la tua perfidia, la leggerezza tua?
Ma il giusto cielo volle ch’io ti trovassi, per far le sue, le
mie vendette.
DON GIOVANNI
Eh via siate più ragionevole...
(A parte) Mi pone a cimento costei.
(A donn’Elvira)
Se non credete a labbro mio, credete a questo galantuomo.
LEPORELLO (a parte)
Salvo il vero.
DON GIOVANNI (forte)
Via, dille un poco...
LEPORELLO (piano)
E cosa devo dirle?
DON GIOVANNI (forte)
Sì, sì, dille pur tutto.
MOZART DON GIOVANNI
56
après trois jours – crime immense – tu quittes Burg o s ,
m’abandonnes, me fuis, me laissant la proie du remords et des
pleurs, punition peut-être de t’avoir tant aimé.
LEPORELLO (à part)
Elle parle comme un livre.
DON GIOVANNI
Oh quant à cela, j’avais mes raisons : c’est vrai ?
LEPORELLO (ironiquement)
Vrai. Et des raisons puissantes !
DONNA ELVIRA
Et quelles sont-elles, sinon ta perfidie et ta désinvolture ?
Mais le ciel de justice a voulu que je te retrouve, pour sa
vengeance et la mienne.
DON GIOVANNI
Allons, soyez plus raisonnable...
(À part) Elle me met à rude épreuve.
(À Donna Elvira)
Si vous ne me croyez pas, croyez ce gentilhomme.
LEPORELLO (à part)
Vérité mise à part.
DON GIOVANNI (fort)
Allons, dis-lui un peu...
LEPORELLO (à voix basse)
Et que dois-je lui dire ?
DON GIOVANNI (fort)
Oui, oui, dis-lui tout.
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PREMIER ACTE SCÈNE V
DONNA ELVIRA (a Leporello)
Ebben, fa presto.
In questo fra tempo Don Giovanni fugge.
LEPORELLO
Madama... veramente... in questo mondo conciossia cosa
quando fosse che il quadro non è tondo...
DONNA ELVIRA
Sciagurato, così del mio dolor gioco ti prendi?
(Verso Don Giovanni che non crede partito)
Ah voi... stelle! l’iniquo fuggì! misera me! dove, in qual
parte...
LEPORELLO
Eh, lasciate che vada: egli non merta che di lui ci pensiate...
DONNA ELVIRA
Il scellerato m’ingannò, mi tradì!
LEPORELLO
Eh consolatevi; non siete voi, non foste, e non sarete né la
prima, né l’ultima; guardate questo non picciol libro: è
tutto pieno dei nomi di sue belle; ogni villa, ogni borgo,
ogni paese è testimon di sue donnesche imprese.
No 4. Aria
LEPORELLO
Madamina, il catalogo è questo
Delle belle che amò il padron mio,
un catalogo egli è che ho fatti’io,
Osservate, leggete con me, osservate, legete con me.
In Italia seicento e quaranta,
MOZART DON GIOVANNI
58
DONNA ELVIRA (à Leporello)
Eh bien, fais vite.
Pendant ce temps, Don Giovanni s’échappe.
LEPORELLO
Madame... en vérité... en ce monde puisque et quand bien
même le carré n’est pas rond...
DONNA ELVIRA
Malheureux, tu te joues ainsi de ma douleur ?
(À Don Giovanni qu’elle croit toujours là)
Ah vous... ciel ! le misérable a fui ! pauvre de moi ! où, de
quel côté...
LEPORELLO
Eh laissez-le aller : il ne mérite pas que vous pensiez à lui...
DONNA ELVIRA
Le scélérat m’a trompée, m’a trahie !
LEPORELLO
Eh consolez-vous ; vous n’êtes, ne fûtes, ne serez, ni la
première, ni la dernière ; regardez ce gros livre ; il est
rempli des noms de ses belles ; chaque ville, chaque
bourg, chaque pays est le témoin de ses conquêtes.
No 4. Air
LEPORELLO
Petite madame, voici le catalogue
Des belles qu’aima mon maître,
Un catalogue que j’ai fait moi-même,
Regardez, lisez avec moi, regardez, lisez avec moi.
En Italie six cent quarante,
59
PREMIER ACTE SCÈNE V
In Lamagna duecento e trent’una,
Cento in Francia, in Turchia novantuna,
Ma in Ispagna son già mille e tre, mille e tre, mille e tre.
V’han fra queste contadine, cameriere, cittadine,
V’han contesse, baronesse, marchesine, principesse,
E v’han donne d’ogni grado, d’ogni forma, d’ogni età,
D’ogni forma, d’ogni età.
In Italia, seicento e quaranta,
In Lamagna duecento e trent’una,
Cento in Francia, in Turchia novantuna, ma, ma
Ma in Ispagna son già mille e tre, mille e tre, mille e tre.
V’han fra queste contadine, cameriere, cittadine,
V’han contesse, baronesse, marchesine, principesse,
E v’han donne d’ogni grado, d’ogni forma, d’ogni età,
D’ogni forma, d’ogni età.
Nella bionda egli ha l’usanza di lodar la gentilezza,
Nella bruna la costanza, nella bianca la dolcezza.
Vuol d’inverno la grassotta, vuol d’estate la magrotta;
È la grande maestosa, è la grande maestosa, la piccina,
La piccina, la piccina, la piccina, la piccina,
La piccina, la piccina, la piccina, la piccina,
È ognor vezzosa, è ognor vezzosa, è ognor vezzosa...
Delle vecchie fa conquista, pel piacer di porle in lista;
Sua passion predominante è la giovin principiante.
Non si picca se sia ricca, se sia brutta, se sia bella,
Se sia ricca, brutta, se sia bella:
Purché porti la gonnella, voi sapete quel che fa,
Voi sapete quel che fa, purché porti la gonnella
Voi sapete quel che fa, voi sapete, voi sapete quel che fa,
Quel che fa, quel che fa, voi sapete quel che fa.
(Parte.)
MOZART DON GIOVANNI
60
En Allemagne deux cent trente et une,
Cent en France, en Turquie quatre-vingt-onze,
Mais en Espagne, il y en a déjà mille trois, mille trois.
Parmi elles des paysannes, des femmes de chambre, des
c i t a d i n e s ,
Des comtesses, des baronnes, des marquises, des princesses,
Et des dames de tout rang, de toute forme, de tout âge
De toute forme, de tout âge.
En Italie six cent quarante,
En Allemagne deux cent trente et une,
Cent en France, en Turquie quatre-vingt-onze, mais, mais
Mais en Espagne, il y en a déjà mille trois, mille trois.
Parmi elles des paysannes, des femmes de chambre, des
c i t a d i n e s ,
Des comtesses, des baronnes, des marquises, des princesses,
Et des dames de tout rang, de toute forme, de tout âge
De toute forme, de tout âge.
Chez la blonde, il aime à louer la gentillesse,
Chez la brune, la constance, chez la tête blanche, la douceur.
En hiver il veut la grasse, en été il veut la maigre ;
La grande est majestueuse, la grande est majestueuse, la
petite,
La petite, la petite, la petite, la petite,
La petite, la petite, la petite, la petite,
Est toujours gracieuse, est toujours gracieuse...
Des vieilles, il fait la conquête pour le plaisir de les ajou-
ter à la liste ;
Sa passion prédominante, c’est la jeune débutante.
Peu lui importe qu’elle soit riche, laide, belle,
Qu’elle soit riche, belle, laide :
Pourvu qu’elle porte jupon, vous savez ce qu’il fait
Vous savez ce qu’il fait, pourvu qu’elle porte jupon,
Vous savez, vous savez ce qu’il fait,
Ce qu’il fait, ce qu’il fait, vous savez ce qu’il fait.
(Il sort.)
61
PREMIER ACTE SCÈNE V
SCENA VI
Recitativo
DONNA ELVIRA
In questa forma dunque mi tradì il scellerato! È questo il
premio che quel barbaro rende all’amor mio? Ah vendicar
vogl’io l’ingannato mio cor: pria ch’ei mi fugga... si ricor-
ra... si vada... Io sento in petto sol vendetta parlar, rabbia
e dispetto.
(Parte.)
SCENA VII
No 5. Coro
ZERLINA
Giovinette che fate all’amore, che fate all’amore,
Non lasciate che passi l’età, che passi l’età, che passi l’età:
Se nel seno vi bulica il core, vi bulica il core,
Il rimedio vedetelo qua...
Che piacer, che piacer che sarà!
CORO DI CONTADINE
Aaaa che piacer, che piacer che sarà,
La la la ra la, la la la ra la!
MASETTO
Giovinetti leggeri di testa, leggeri di testa,
Non andate girando qua e là, qua e là, e qua e là.
Poco dura dé matti la festa, dé matti la festa,
Ma per me cominciato non ha, cominciato non ha...
Che piacer, che piacer che sarà!
MOZART DON GIOVANNI
62
SCÈNE VI
Récitatif
DONNA ELVIRA
C’est ainsi donc que le scélérat m’a trahie! Voilà la récom-
pense que ce barbare réserve à mon amour ? Ah, je veux
venger mon cœur trompé: avant qu’il ne me fuie... j’aurais
recours... allons... En mon cœur je n’entends que la voix
de la vengeance, de la rage et du dépit.
(Elle sort.)
SCÈNE VII
No 5. Chœur
ZERLINA
Jeunes filles faites pour l’amour, faites pour l’amour,
Ne laissez pas passer le temps, passer le temps :
Si dans votre sein, votre cœur bouillonne, votre cœur
bouillonne,
Le remède, il est là, regardez...
Quel plaisir quel plaisir ce sera !
CHŒUR DES PAYSANNES
Aaaa quel plaisir, quel plaisir ce sera,
La la la ra la, la la la ra la !
MASETTO
Jeunes gens étourdis, étourdis,
Ne papillonnez pas ici et là, ici et là
Elle dure peu la fête des fous, la fête des fous,
Mais pour moi elle n’a pas commencé, commencé...
Quel plaisir, quel plaisir ce sera !
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PREMIER ACTE SCÈNES VI & VII
CORO DI CONTADINI
Aaaa che piacer, che piacer che sarà,
La la la ra la, la la la ra la!
ZERLINA E MASETTO
Vieni, vieni, carino, e godiamo,
E cantiamo e balliamo e saltiamo;
Vieni, vieni, carino, e godiamo,
Che piacer, che piacer che sarà!
Aaaa che piacer, che piacer che sarà!
CORO DI CONTADINE ET CONTADINI
Aaaa che piacer, che piacer che sarà,
La la la ra la la ra la la ra la,
La la la ra la la ra la la ra la!
SCENA VIII
Recitativo
DON GIOVANNI
Manco male, è partita: oh guarda, guarda che bella gio-
ventù! che belle donne!
LEPORELLO
Fra tante per mia fè vi sarà qualche cosa anche per me.
DON GIOVANNI
Cari amici, buon giorno: seguitate a stare allegramente,
seguitate a suonar, o buona gente. C’è qualche sposalizio?
ZERLINA
Si signore, e la sposa son io.
DON GIOVANNI
Me ne consolo. Lo sposo?
MOZART DON GIOVANNI
64
CHŒUR DES PAYSANS
Aaaa quel plaisir, quel plaisir ce sera,
La la la ra la, la la la ra la !
ZERLINA & MASETTO
Viens, viens, chéri, et jouissons,
Et chantons, dansons, sautons ;
Viens, viens, chéri et jouissons,
Quel plaisir, quel plaisir ce sera !
Aaaa quel plaisir, quel plaisir ce sera !
CHŒUR DES PAYSANNES & DES PAYSANS
Aaaa quel plaisir, quel plaisir ce sera,
La la la ra la la ra la la ra la,
La la la ra la la ra la la ra la !
SCÈNE VIII
Récitatif
DON GIOVANNI
Heureusement, elle est partie : oh, regarde, regarde quelle
belle jeunesse ! quelles belles femmes !
LEPORELLO
Ma foi, parmi tant, il y en aura aussi une pour moi.
DON GIOVANNI
Chers amis, bonjour : continuez dans la joie, continuez à
jouer, ô brave gens. C’est une noce ?
ZERLINA
Oui monsieur, et je suis la mariée.
DON GIOVANNI
J’en suis heureux. Le marié ?
65
PREMIER ACTE SCÈNE VIII
MASETTO
Io, per servirla.
DON GIOVANNI
Oh bravo! per servirmi: questo è vero parlar da galantuomo!
LEPORELLO
Basta che sia marito.
ZERLINA
Oh il mio Masetto è un uom d’ottimo core.
DON GIOVANNI
Oh anch’io, vedete! voglio che siamo amici: il vostro
nome?
ZERLINA
Zerlina.
DON GIOVANNI
E il tuo?
MASETTO
Masetto.
DON GIOVANNI
O caro il mio Masetto! cara la mia Zerlina! v’esibisco la
mia protezione...
(A Leporello che fai dei scherzi alle altre contadine:)
Leporello... cosa fai lì, birbone?
LEPORELLO
Anch’io, caro padrone, esibisco la mia protezione.
DON GIOVANNI
Presto, va’ con costor: nel mio palazzo conducili sul fatto;
MOZART DON GIOVANNI
66
MASETTO
C’est moi, pour vous servir.
DON GIOVANNI
Oh bravo ! pour me servir : c’est vraiment parler en gen-
tilhomme !
LEPORELLO
Il suffit qu’il soit le mari.
ZERLINA
Oh, mon Masetto est un excellent homme.
DON GIOVANNI
Oh moi aussi, voyez ! je veux que nous soyons amis : votre nom ?
ZERLINA
Zerlina.
DON GIOVANNI
Et le tien ?
MASETTO
Masetto.
DON GIOVANNI
Ô mon cher Masetto ! ma chère Zerline ! je vous offre ma
protection...
(À Leporello qui taquine les autres paysannes :)
Leporello... que fais-tu, coquin ?
LEPORELLO
Moi aussi, cher maître, j’offre ma protection.
DON GIOVANNI
Vite, pars avec ceux-là : conduis-les tout de suite à mon
67
PREMIER ACTE SCÈNE VIII
ordina ch’abbiano cioccolata, caffè, vini, presciutti; cerca
divertir tutti, mostra loro il giardino, la galleria, le camere;
in effetto fa’ che resti contento il mio Masetto. Hai capito?
LEPORELLO
Ho capito: andiam!
MASETTO
Signore...
DON GIOVANNI
Cosa c’è?
MASETTO
La Zerlina senza me non può star.
LEPORELLO
In vostro loco vi sarà sua Eccellenza: e saprà bene fare le
vostre parti.
DON GIOVANNI
Oh la Zerlina è in man d’un Cavalier: va’ pur, fra poco ella
meco verrà.
ZERLINA
Va’, non temere! nelle mani son io d’un Cavaliere.
MASETTO
E per questo?
ZERLINA
E per questo non c’è da dubitar.
MASETTO
Ed io, cospetto...
MOZART DON GIOVANNI
68
palais ; fais-leur servir du chocolat, du café, des vins, du
jambon ; essaye de tous les divertir, montre-leur le jardin,
la galerie, les chambres ; fais vraiment en sorte que mon
Masetto soit satisfait. Tu as compris ?
LEPORELLO
J’ai compris : allons-y !
MASETTO
Seigneur...
DON GIOVANNI
Qu’est-ce qu’il y a ?
MASETTO
Zerlina ne peut demeurer sans moi.
LEPORELLO
Son Excellence prendra votre place : et il saura bien tenir
votre rôle.
DON GIOVANNI
Oh, Zerlina est entre les mains d’un chevalier : sous peu,
elle viendra avec moi.
ZERLINA
Va, n’aie pas peur ! je suis entre les mains d’un chevalier.
MASETTO
Et alors ?
ZERLINA
Et alors pas de méfiance.
MASETTO
Et moi, parbleu...
69
PREMIER ACTE SCÈNE VIII
DON GIOVANNI
Olà, finiam le dispute: se subito senz’ altro replicar non te
ne vai, (mostrandogli la spada) Masetto, guarda ben, ti
pentirai.
No 6. Aria
MASETTO
Ho capito, signor sì, signor sì,
Chino il capo, e me ne vò:
Già che piace a voi così.
Altre repliche non fo, no, no, no, no, no, no, non fo.
Cavalier voi siete già,
Dubitar non posso affè:
Me lo dice la bontà
Che volete aver per me, aver per me, aver per me.
(Da parte a Zerlina) Bricconaccia, malandrina,
Fosti ognor la mia ruina, fosti ognor la mia ruina.
(A Leporello che lo vuol condur seco)
Vengo, vengo!
(A Zerlina) Resta, resta!
È una cosa molto onesta:
Faccia il nostro cavaliere cavaliera ancora te,
Cavaliera ancora te.
(Da parte a Zerlina) Bricconaccia, malandrina,
Fosti ognor la mia ruina, fosti ognor la mia ruina.
(A Leporello che lo vuol condur seco)
Vengo, vengo!
(A Zerlina) Resta, resta!
È una cosa molto onesta:
Faccia il nostro cavaliere cavaliera ancora te,
Cavaliera ancora te,
Faccia il nostro cavaliere cavaliera ancora te,
Faccia il nostro cavaliere cavaliera ancora te,
Cavaliera ancora te, cavaliera ancora te.
(Via.)
MOZART DON GIOVANNI
70
DON GIOVANNI
Holà, finissons la dispute : si tu ne pars pas sur-le-champ
et sans rien dire (montrant son épée) Masetto, prends
garde, tu t’en repentiras.
No 6. Air
MASETTO
J’ai compris, oui seigneur, oui seigneur,
Je m’incline et je m’en vais :
Puisque tel est votre plaisir
Je ne dirai plus rien, non, non, non, non, plus rien.
Vous êtes chevalier,
Je ne peux en douter :
Me le disent les bontés
Que pour moi vous avez, pour moi, pour moi.
(À part, à Zerline) Canaille, coquine,
Tu as toujours été ma ruine, tu as toujours été ma ruine.
(À Leporello qui veut l’emmener avec lui)
Je viens, je viens !
(À Zerlina) Reste, reste !
C’est une chose bien honnête
Que notre chevalier fasse de toi une dame,
De toi une dame.
(À part, à Zerline) Canaille, coquine,
Tu as toujours été ma ruine, tu as toujours été ma ruine.
(À Leporello qui veut l’emmener avec lui)
Je viens, je viens !
(À Zerlina) Reste, reste !
C’est une chose bien honnête
Que notre chevalier fasse de toi une dame,
De toi une dame.
Que notre chevalier fasse de toi une dame,
Que notre chevalier fasse de toi une dame,
De toi une dame, de toi une dame.
(Il s’en va.)
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PREMIER ACTE SCÈNE VIII
SCENA IX
DON GIOVANNI
Alfin siam liberati, Zerlinetta gentil, da quel scioccone:
che ne dite, mio ben, so far pulito?
ZERLINA
Signore, è mio marito...
DON GIOVANNI
Chi? colui? Vi par che un onest’uomo, un nobil Cavalier,
come io mi vanto, possa soffrir che quel visetto d’oro, quel
viso inzuccherato, da un bifolcaccio vil sia strapazzato?
ZERLINA
Ma signor, io gli diedi parola di sposarlo.
DON GIOVANNI
Tal parola non vale un zero; voi non siete fatta per essere
paesana: un’ altra sorte vi procuran quegli occhi briccon-
celli, quei labbretti sì belli, quelle ditucce candide e odo-
rose: parmi toccar giuncata, e fiutar rose.
ZERLINA
Ah non vorrei...
DON GIOVANNI
Che non vorreste?
ZERLINA
Alfine ingannata restar; io so che raro colle donne voi altri
cavalieri siete onesti e sinceri.
MOZART DON GIOVANNI
72
SCÈNE IX
DON GIOVANNI
Enfin nous sommes débarrassés, gentille Zerlinetta, de ce
grand sot : qu’en dites-vous, ma chère, je sais faire place nette ?
ZERLINA
Seigneur, c’est mon mari...
DON GIOVANNI
Qui ? Lui ? Pensez-vous que l’honnête homme, le noble
chevalier que je me flatte d’être pourrait souffrir que ce
minois doré, ce visage poudré de sucre soit maltraité par
un vulgaire paysan.
ZERLINA
Mais seigneur, je lui ai promis de l’épouser.
DON GIOVANNI
Une telle promesse ne vaut rien ; vous n’êtes pas faite pour
être paysanne : un autre destin vous réservent ces yeux
charmeurs, ces lèvres si belles, ces petits doigts blancs et
parfumés : il me semble toucher le velours d’un roseau,
respirer des roses.
ZERLINA
Ah je ne voudrais pas...
DON GIOVANNI
Que ne voudrais-tu pas ?
ZERLINA
Être finalement trompée ; je sais qu’avec les dames, vous
autres chevaliers êtes rarement honnêtes et sincères.
73
PREMIER ACTE SCÈNE IX
DON GIOVANNI
Eh, un’ impostura della gente plebea! La nobilità ha dipin-
ta negl’ occhi l’onestà. Orsù, non perdiam tempo: in ques-
to istante io ti voglio sposar.
ZERLINA
Voi?
DON GIOVANNI
Certo, io. Quel casinetto è mio: soli saremo, e là, gioiello
mio, ci sposeremo.
No 7. Duettino
DON GIOVANNI
Là ci darem la mano, là mi dirai di sì;
Vedi, non è lontano, partiam, ben mio, da qui.
ZERLINA
Vorrei, e non vorrei, mi trema un poco il cor;
Felice, è ver, sarei, ma può burlarmi ancor,
Ma può burlarmi ancor.
DON GIOVANNI
Vieni, mio bel diletto;
ZERLINA
Mi fa pietà Masetto;
DON GIOVANNI
Io cangerò tua sorte.
ZERLINA
Presto non son più forte,
Non son più forte, non son più forte.
MOZART DON GIOVANNI
74
DON GIOVANNI
Eh, c’est un mensonge des gens du peuple ! La noblesse a
l’honnêteté peinte dans le regard. Donc, ne perdons pas de
temps : sur-le-champ je veux t’épouser.
ZERLINA
Vous ?
DON GIOVANNI
Bien sûr. Ce petit pavillon est à moi : nous serons seuls et
là, mon bijou, nous nous marierons.
No 7. Duettino
DON GIOVANNI
Là, nous nous donnerons la main, là tu me diras oui ;
Vois, ce n’est pas loin, mon amour, partons d’ici.
ZERLINA
Je voudrais et ne voudrais pas, mon cœur tremble un peu ;
Je serais heureuse, c’est vrai, mais il peut se jouer de moi,
Mais il peut encore se jouer de moi.
DON GIOVANNI
Viens, mon bel amour ;
ZERLINA
Masetto me fait pitié ;
DON GIOVANNI
Je changerai ta destinée.
ZERLINA
Vite, je n’ai plus la force,
Je n’ai plus la force, je n’ai plus la force.
75
PREMIER ACTE SCÈNE IX
DON GIOVANNI
Vieni, vieni!
DON GIOVANNI
Là ci darem la mano,
ZERLINA
Vorrei, e non vorrei,
DON GIOVANNI
Là mi dirai di sì;
ZERLINA
Mi trema un poco il cor;
DON GIOVANNI
Partiam, ben mio, da qui.
ZERLINA
Ma può burlarmi ancor
DON GIOVANNI
Vieni, mio bel
Diletto;
ZERLINA
Mi fa
Pietà Masetto
DON GIOVANNI
Io cangierò
Tua sorte;
ZERLINA
Presto
MOZART DON GIOVANNI
76
DON GIOVANNI
Viens, viens !
DON GIOVANNI
Là, nous nous donnerons la main,
ZERLINA
Je voudrais et ne voudrais pas
DON GIOVANNI
Là tu me diras oui ;
ZERLINA
Mon cœur tremble un peu ;
DON GIOVANNI
Mon amour, quittons ces lieux.
ZERLINA
Il peut encore se jouer de moi.
DON GIOVANNI
Viens, mon bel
Amour ;
ZERLINA
J’ai
Pitié de Masetto.
DON GIOVANNI
Je changerai
Ton destin ;
ZERLINA
Vite
77
PREMIER ACTE SCÈNE IX
Non son più forte, non son più forte,
Non son più forte;
DON GIOVANNI
Andiam, andiam!...
ZERLINA
Andiam!...
DON GIOVANNI E ZERLINA
Andiam, andiam, mio bene,
A ristorar le pene d’un innocente amor.
Andiam, andiam, mio bene,
A ristorar le pene d’un innocente amor.
DON GIOVANNI
Andiam!
ZERLINA
Andiam! Andiam!
DON GIOVANNI
Andiam!
DON GIOVANNI E ZERLINA
Andiam, mio bene, andiam
Le pene a ristorar d’un innocente amor.
(Vanno verso il casino di Don Giovanni, abbracciati, etc.)
SCENA X
DONNA ELVIRA
Fermati, scellerato: il ciel mi fece udir le tue perfidie; io
sono a tempo di salvar questa misera innocente dal tuo
barbaro artiglio.
MOZART DON GIOVANNI
78
Je n’ai plus la force, je n’ai plus la force,
Je n’ai plus la force ;
DON GIOVANNI
Allons, allons !...
ZERLINA
Allons !...
DON GIOVANNI & ZERLINA
Allons, allons, mon amour,
Apaiser les peines d’un innocent amour.
Allons, allons, mon amour,
Apaiser les peines d’un innocent amour.
DON GIOVANNI
Allons !
ZERLINA
Allons ! Allons !
DON GIOVANNI
Allons !
DON GIOVANNI & ZERLINA
Allons, mon amour, allons,
Apaiser les peines d’un innocent amour.
(Ils se dirigent vers le pavillon de Don Giovanni, enlacés, etc.)
SCÈNE X
DONNA ELVIRA
Arrête scélérat : le ciel m’a fait entendre tes perfidies :
j’arrive à temps pour sauver cette pauvre innocente de ta
griffe barbare.
79
PREMIER ACTE SCÈNE X
ZERLINA
Meschina, cosa sento!
DON GIOVANNI (da parte)
Amor, consiglio!
(A Donna Elvira piano)
Idol mio, non vedete, ch’io voglio divertirmi...
DONNA ELVIRA
Divertiti? è vero! divertiti! Io so, crudele, come tu ti diverti...
ZERLINA
Ma signor Cavaliere... è ver quel ch’ella dice?
DON GIOVANNI (piano a Zerlina)
La povera infelice è di me innamorata, e per pietà deggio
fingere amore; ch’io son per mia disgrazia uom di buon core.
No 8. Aria
DONNA ELVIRA
Ah fuggi il traditor, non lo lasciar più dir:
Il labbro è mentitor, fallace il ciglio.
Da’ miei tormenti impara a creder a quel cor,
E nasca il tuo timor dal mio periglio.
Ah fuggi, fuggi, ah fuggi il traditor,
Non lo lasciar più dir: il labbro è mentitor,
Fallace il ciglio, il labbro è mentitor,
Fallace il ciglio, fallace il ciglio.
(Parte conducendo seco Zerlina.)
MOZART DON GIOVANNI
80
ZERLINA
Malheureuse, qu’entends-je !
DON GIOVANNI (à part)
Amour aide-moi !
(À Donna Elvira, à voix basse)
Mon amour, vous ne voyez pas que je veux me divertir...
DONNA ELVIRA
Te divertir ? vraiment ! te divertir ! Cruel, je sais comment
tu te divertis...
ZERLINA
Mais seigneur Chevalier... c’est vrai ce qu’elle dit ?
DON GIOVANNI (à voix basse à Zerlina)
La pauvre malheureuse m’aime, et je dois faire semblant
de l’aimer, par pitié ; car pour mon malheur, j’ai bon cœur.
No 8. Air
DONNA ELVIRA
Ah, fuis ce traître, ne le laisse plus parler :
Ses lèvres sont menteuses, ses yeux sont faux.
De mes tourments apprends à croire ce cœur,
Et que ta crainte naisse des périls où je suis.
Ah fuis, fuis, ah fuis ce traître,
Ne le laisse plus parler, ses lèvres sont menteuses,
Ses yeux sont faux, ses lèvres sont menteuses,
Ses yeux sont faux, ses yeux sont faux.
(Elle sort, emmenant Zerlina.)
81
PREMIER ACTE SCÈNE X
SCENA XI
Recitativo
DON GIOVANNI
Mi par ch’oggi il demonio si diverta d’opporsi a’ miei pia-
cevoli progressi; vanno mal tutti quanti.
DON OTTAVIO
Ah ch’ora, idolo mio, son vani i pianti! Di vendetta si
parli... Ah Don Giovanni!
DON GIOVANNI (a parte)
Mancava questo inver!
DONNA ANNA
Signore, a tempo vi ritroviam: avete core, avete anima
generosa?
DON GIOVANNI (a parte)
Sta’ a vedere che il diavolo gli ha detto qualche cosa.
(A Donna Anna)
Che domanda! perchè?
DONNA ANNA
Bisogno abbiamo della vostra amicizia.
DON GIOVANNI (a parte)
Mi torna il fiato in corpo.
(A Donna Anna)
Comandate: i congiunti, i parenti, questa man, questo ferro
i beni, il sangue spenderò per servivi: ma voi, bella
Donn’Anna, perché così piangete? II crudele chi fu, che
osò la calma turbar del viver vostro...
MOZART DON GIOVANNI
82
SCÈNE XI
Récitatif
DON GIOVANNI
Il me semble qu’aujourd’hui, le diable se divertit à contra-
rier mes plaisirs ; tout tourne mal.
DON OTTAVIO
Ah, à présent, mon amour, les pleurs sont inutiles ! Parlons
de vengeance... Ah, Don Giovanni !
DON GIOVANNI (à part)
Vraiment, il ne manquait que cela !
DONNA ANNA
Seigneur, nous vous retrouvons au bon moment : avez-vous
du courage, une âme généreuse ?
DON GIOVANNI (à part)
Vous allez voir que le diable lui a dit quelque chose.
(À Donna Anna)
Quelle question ! pourquoi ?
DONNA ANNA
Nous avons besoin de votre amitié.
DON GIOVANNI (à part)
Je respire.
(À Donna Anna)
Ordonnez : amis, parents, ma main, mon épée, mes biens,
mon sang, je les mets à votre service : mais, belle Donna
Anna, pourquoi pleurez-vous ainsi ? Qui est le cruel qui a
osé troubler votre sérénité...
83
PREMIER ACTE SCÈNE XI
SCENA XII
DONNA ELVIRA
Ah ti ritrovo ancor, perfido mostro!
No 9. Quartetto
DONNA ELVIRA
Non ti fidar, o misera, di quel ribaldo cor!
Me già tradì quel barbaro: te vuol tradire ancor.
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
Cieli! che aspetto nobile! che dolce maestà!
II suo pallor, le lagrime m’empiono di pietà,
M’empiono di pietà.
DON GIOVANNI (a parte, Donna Elvira ascolta)
La povera ragazza è pazza, amici miei, è pazza amici miei;
Lasciatemi con lei, forse si calmerà, forse si calmerà.
DONNA ELVIRA
Ah non credete al perfido!
DON GIOVANNI
È pazza, non badate,
DONNA ELVIRA
Restate ancor, restate!
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
A chi si crederà!
DON GIOVANNI
È pazza.
MOZART DON GIOVANNI
84
SCÈNE XII
DONNA ELVIRA
Ah, je te retrouve encore, monstre perfide !
No 9. Quatuor
DONNA ELVIRA
Ne te fie pas, ô malheureuse, à ce cœur scélérat !
Ce barbare m’a déjà trahie : il te trahira aussi.
DONNA ANNA & DON OTTAVIO
Ciel ! quel noble aspect ! quelle douce grandeur !
Sa pâleur, ses larmes m’emplissent de pitié,
M’emplissent de pitié.
DON GIOVANNI (à part, Donna Elvira écoutant)
La pauvre fille est folle, mes amis, folle, mes amis ;
Laissez-moi avec elle, elle se calmera peut-être.
DONNA ELVIRA
Ah ne croyez pas ce perfide !
DON GIOVANNI
Ne faites pas attention, elle est folle,
DONNA ELVIRA
Restez encore, restez !
DONNA ANNA & DON OTTAVIO
Qui croire ?
DON GIOVANNI
Elle est folle.
85
PREMIER ACTE SCÈNE XII
DONNA ANNA E DON OTTAVIO,
A chi se crederà!
DONNA ELVIRA
Restate!
DONNA ANNA E DON OTTAVIO,
A chi se crederà, si
Crederà!
DONNA ELVIRA
Ah non
Credete al perfido, restate!
DONNA ANNA, DON OTTAVIO E DON GIOVANNI
Certo moto d’ignoto tormento,
DONNA ELVIRA
Sdegno, rabbia, dispetto, tormento,
DONNA ANNA, DON OTTAVIO E DON GIOVANNI
Dentro l’alma girare mi sento,
DONNA ELVIRA
Dentro l’alma girare mi sento,
DONNA ANNA
Che mi dice,
Per quell’infelice, cento cose
Che intender, che intender non sa, no, no,
DONNA ELVIRA
Che mi dice, di quel traditore,
Cento cose che intender non sa, no, che mi dice...
MOZART DON GIOVANNI
86
DONNA ANNA & DON OTTAVIO,
Qui croire ?
DONNA ELVIRA
Restez !
DONNA ANNA & DON OTTAVIO,
Qui croire, qui
Croire ?
DONNA ELVIRA
Ah ne
Croyez pas le perfide, restez !
DONNA ANNA, DON OTTAVIO & DON GIOVANNI
L’émotion d’un tourment ignoré,
DONNA ELVIRA
Indignation, rage, dépit, tourment,
DONNA ANNA, DON OTTAVIO & DON GIOVANNI
Je la sens tournoyer en mon âme
DONNA ELVIRA
Je les sens tournoyer en mon âme,
DONNA ANNA
Qui me dit,
Mille choses de cette malheureuse
Que je ne peux comprendre, non, non,
DONNA ELVIRA
Qui me dit, de ce traître,
Mille choses que je ne peux comprendre, qui me dit...
87
PREMIER ACTE SCÈNE XII
DON OTTAVIO E DON GIOVANNI
Che mi dice per quell’infelice
Cento cose che intender non sa, no, no,
DONNA ELVIRA
... Di quel traditore,
Di quel traditore cento cose che intender non sa,
DON GIOVANNI
Cento cose che intender non sa
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
Che intender non sa,
DONNA ELVIRA
Che mi dice, mi dice di
Quel traditore
Cento cose che intender non sa.
DON GIOVANNI
Cento cose che intender non sa.
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
Che intender non sa.
DON OTTAVIO (a parte)
Io di qua non vado via, se non scopro questo affar.
DONNA ANNA (a parte)
Non ha l’aria di pazzia iI suo volto il suo parlar.
DON GIOVANNI
Se men vado, si potria qualche cosa sospettar.
DONNA ELVIRA
Da quel ceffo si dovria la ner’alma giudicar.
MOZART DON GIOVANNI
88
DON OTTAVIO & DON GIOVANNI
Qui me dit, de cette malheureuse,
Mille choses que je ne peux comprendre, non, non,
DONNA ELVIRA
... De ce traître,
De ce traître, mille choses que je ne peux comprendre,
DON GIOVANNI
Mille choses que je ne peux comprendre
DONNA ANNA & DON OTTAVIO
Que je ne peux comprendre,
DONNA ELVIRA
Qui me disent, me disent de
Ce traître,
Mille choses que je ne peux comprendre.
DON GIOVANNI
Mille choses que je ne peux comprendre.
DONNA ANNA & DON OTTAVIO
Que je ne peux comprendre.
DON OTTAVIO (à part)
Je ne partirai pas d’ici sans avoir éclairci cette affaire.
DONNA ANNA (à part)
Son visage, ses paroles, ne sont pas ceux d’une folle.
DON GIOVANNI
Si je pars, on pourrait avoir quelque soupçon.
DONNA ELVIRA
À sa mine, on devrait voir la noirceur de son âme.
89
PREMIER ACTE SCÈNE XII
DON OTTAVIO (a Don Giovanni)
Dunque quella?...
DON GIOVANNI
È pazarella:
DONNA ANNA (a Donna Elvira)
Dunque quegli?
DONNA ELVIRA
È un traditore:
DON GIOVANNI
Infelice!
DONNA ELVIRA
Mentitore! Mentitore! Mentitore!
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
Incomincio a dubitar.
DON GIOVANNI (piano a Donna Elvira)
Zitto, zitto, che la gente si raduna a noi d’intorno, siate un
poco più prudente, vi farete criticar.
DONNA ELVIRA (forte, a Don Giovanni)
Non sperarlo, o scellerato, ho perduta la prudenza;
Le tue colpe ed il mio stato voglio a tutti palesar,
Voglio a tutti palesar.
DON GIOVANNI
Zitto, zitto che la gente si raduna a noi d’intorno,
Siate un poco più prudente, vi farete criticar,
Siate un poco più prudente!
Zitto, zitto che la gente si raduna a noi la gente,
Zitto, zitto, zitto,
MOZART DON GIOVANNI
90
DON OTTAVIO (à Don Giovanni)
Cette femme, donc ?...
DON GIOVANNI
Est un peu folle :
DONNA ANNA (à Donna Elvira)
Donc, cet homme ?
DONNA ELVIRA
C’est un traître :
DON GIOVANNI
Malheureuse !
DONNA ELVIRA
Menteur ! Menteur ! Menteur !
DONNA ANNA & DON OTTAVIO
Je commence à douter.
DON GIOVANNI (bas à Donna Elvira)
Chut, chut, car les gens s’attroupent autour de nous, soyez
un peu plus discrète, on va jaser de vous.
DONNA ELVIRA (fort, à Don Giovanni)
Ne l’espère pas, scélérat, j’ai perdu toute prudence ;
À tous je vais révéler tes mauvais coups et mon état,
Je vais les révéler à tous.
DON GIOVANNI
Chut, chut, car les gens s’attroupent autour de nous,
Soyez un peu plus discrète, on va jaser de vous,
Soyez un peu plus discrète !
Chut, car les gens s’attroupent autour de nous
Chut, chut, chut,
91
PREMIER ACTE SCÈNE XII
Siate un poco più prudente,
Vi farete criticar, vi farete criticar.
DONNA ANNA E DON OTTAVIO (a parte, guardando Don Giovanni)
Quegli accenti sì sommessi,
Quel cangiarsi di colore,
Son indizi troppo espressi,
Che mi fan determinar,
Che mi fan determinar, che mi fan determinar.
DONNA ELVIRA
Non sperarlo, o scellerato, ho perduta la prudenza;
Le tue colpe ed il mio stato voglio a tutti palesar,
Ho perduta la prudenza; non sperarlo,
Ho perduta la prudenza; non sperarlo, o scellerato!
Le tue colpe ed il mio stato voglio a tutti palesar.
(Parte.)
Recitativo
DON GIOVANNI
Povera sventurata! i passi suoi voglio seguir: non voglio
che faccia un precipizio. Perdonate, bellissima Donn’
Anna; se servirvi poss’io, in mia casa v’aspetto: Amici,
addio!
(Parte.)
SCENA XIII
No 10. Recitativo accompagnato ed Aria
DONNA ANNA
Don Ottavio, son morta!
DON OTTAVIO
Cosa è stato?
MOZART DON GIOVANNI
92
Soyez un peu plus discrète,
On va jaser de vous, on va jaser de vous.
DONNA ANNA & DON OTTAVIO (à part, regardant Don Giovanni)
Ces paroles si étouffées
Ce changement de teint,
Sont des indices évidents,
Qui emportent mon jugement,
Qui emportent mon jugement, mon jugement.
DONNA ELVIRA
Ne l’espère pas, scélérat, j’ai perdu toute prudence ;
À tous je vais révéler tes mauvais coups et mon état,
J’ai perdu toute prudence, ne l’espère pas,
J’ai perdu toute prudence ; ne l’espère pas, scélérat !
À tous je vais révéler tes mauvais coups et mon état.
(Elle sort.)
Récitatif
DON GIOVANNI
Pauvre malheureuse ! je vais suivre ses pas : je veux pas
qu’il lui arrive malheur. Pardonnez, très belle Donna
Anna ; si je puis vous servir, je vous attendrai chez moi :
adieu mes amis !
(Il sort.)
SCÈNE XIII
No 10. Récitatif accompagné & Air
DONNA ANNA
Don Ottavio, je suis morte !
DON OTTAVIO
Que se passe-t-il ?
93
PREMIER ACTE SCÈNE XIII
DONNA ANNA
Per pietà, soccorretemi!
DON OTTAVIO
Mio bene... fate coraggio!
DONNA ANNA
Oh Dei! Oh Dei! Quegli è il carnefice del padre mio.
DON OTTAVIO
Che dite...
DONNA ANNA
Non dubitate più: gli ultimi accenti che l’empio proferì
tutta la voce richiamar nel cor mio di quell’indegno che
nel mio appartamento...
DON OTTAVIO
O ciel! possibile che sotto il sacro manto d’amicizia... Ma
come fu, narratemi lo strano avvenimento.
DONNA ANNA
Era già alquanto avanzata la notte, quando nelle mie stan-
ze, ove soletta mi trovai per sventura, entrar io vidi, in un
mantello avvolto un uom che al primo istante avea preso
per voi: ma riconobbi poi che un inganno era il mio:
DON OTTAVIO (con affanno)
Stelle! seguite...
DONNA ANNA
Tacito a me s’appressa, e mi vuole abbracciar: sciogliermi
cerco, ei più mi stringe; io grido: non viene alcun. Con una
mano cerca d’impedire la voce, e coll’altra m’afferra stret-
ta così, che già mi credo vinta.
MOZART DON GIOVANNI
94
DONNA ANNA
Par pitié, secourez-moi !
DON OTTAVIO
Mon amour... du courage !
DONNA ANNA
Oh dieux ! Oh dieux ! C’est lui le bourreau de mon père.
DON OTTAVIO
Que dites-vous...
DONNA ANNA
Ne doutez plus : les dernières paroles de l’impie ont rap-
pelé à mon cœur la voix de ce misérable qui, dans mes
appartements...
DON OTTAVIO
Ô ciel ! est-il possible, sous le voile sacré de l’amitié ?
Que s’est-il passé, racontez-moi l’étrange affaire.
DONNA ANNA
La nuit était déjà avancée, quand dans ma chambre, où
par malheur je me trouvai seule, je vis entrer, enveloppé
dans une cape, un homme qu’au premier abord j’ai pris
pour vous : mais j’ai reconnu ensuite que je me trompais :
DON OTTAVIO (avec angoisse)
Ciel ! poursuivez...
DONNA ANNA
Silencieux il s’approche de moi et veut m’ e m b r a s s e r : je
cherche à m’ é c h a p p e r, il me serre davantage ; je crie : per-
sonne ne vient. D’une main, il cherche à étouffer ma voix et
de l’autre, il me tient si serrée que déjà je me crois perdue.
95
PREMIER ACTE SCÈNE XIII
DON OTTAVIO
Perfido! e alfin?
DONNA ANNA
Alfine il duol, l’orrore dell’infame attentato accrebbe sì la
lena mia, che a forza di svincolarmi, torcermi e piegarmi,
da lui mi sciolsi.
DON OTTAVIO
Ohimè, respiro!
DONNA ANNA
Allora rinforzo i stridi miei, chiamo soccorso, fugge il fel-
lon, arditamente il seguo fin nella strada per fermarlo, e
sono assalitrice d’assalita. Il padre v’accorre, vuol conos-
cerlo, e l’iniquo, che del povero vecchio era più forte, com-
pie il misfatto suo, compie il misfatto suo col dargli morte.
Aria
Or sai chi l’onore rapire a me volse,
Chi fu il traditore che il padre,
Che il padre mi tolse;
Vendetta ti chiedo,
La chiede il tuo cor, la chiede il tuo cor.
Rammenta la piaga del misero seno,
Rimira di sangue
Coperto, coperto il terreno,
Se l’ira in te langue d’un giusto furor,
D’un giusto furor.
Or sai chi l’onore rapire a me volse,
Chi fu il traditore che il padre,
Che il padre mi tolse;
Vendetta ti chiedo,
La chiede il tuo cor, la chiede il tuo cor.
Rammenta la piaga, rimira di sangue...
Vendetta ti chiedo,
MOZART DON GIOVANNI
96
DON OTTAVIO
Perfide ! et après?
DONNA ANNA
Après, la douleur, l’horreur de l’ignoble attentat accroît si
bien mon ardeur qu’à force de me débattre, de me tordre
et de me courber, je lui échappe.
DON OTTAVIO
Ah, je respire !
DONNA ANNA
Alors, je crie plus fort, j’appelle au secours, le traître fuit,
pour l’arrêter, je le poursuis hardiment dans la rue, je
donne l’assaut à l’assaillant. Le père accourt, veut le
démasquer et le cruel, plus fort que le pauvre vieillard,
accomplit son forfait en lui donnant la mort.
Air
Tu sais maintenant qui a voulu prendre mon honneur,
Qui fut le traître qui
Qui m’a enlevé mon père ;
Je te demande vengeance,
Ton cœur l’exige, ton cœur l’exige.
Souviens-toi de la blessure de cette pauvre poitrine,
Revois, le sang
Recouvrant, recouvrant le sol,
Si faiblit en toi la colère d’une juste fureur,
D’une juste fureur.
Tu sais maintenant qui a voulu prendre mon honneur,
Qui fut le traître qui
Qui m’a enlevé mon père ;
Je te demande vengeance,
Ton cœur l’exige, ton cœur l’exige.
Souviens-toi de la blessure, revois le sang...
Je te demande vengeance,
97
PREMIER ACTE SCÈNE XIII
La chiede il tuo cor, la chiede il tuo cor,
Vendetta ti chiedo, la chiede il tuo cor,
Vendetta ti chiedo, la chiede il tuo cor,
La chiede il tuo cor, la chiede il tuo cor,
La chiede il tuo cor, la chiede il tuo cor,
Vendetta ti chiedo, la chiede il tuo cor,
Vendetta ti chiedo, la chiede il tuo cor.
(Parte.)
SCENA XIV
Recitativo
DON OTTAVIO
Come mai creder deggio di sì nero delitto capace un cava-
liero! Ah di scoprire il vero ogni mezzo si cerchi; io sento
in petto e di sposo e d’amico il dover che mi parla: disin-
gannarla voglio, o vendicarla.
No 10a. Aria
DON OTTAVIO
Dalla sua pace la mia dipende,
Quel che a lei piace vita mi rende,
Quel che le incresce morte mi dà,
Morte, morte mi dà.
S’ella sospira, sospiro anch’io;
È mia quell’ira, quel pianto è mio;
E non ho bene, s’ella non l’ha,
E non ho bene, s’ella non l’ha,
E non ho bene, s’ella non l’ha.
Dalla sua pace la mia dipende,
Quel che a lei piace vita mi rende,
Quel che le incresce morte mi dà,
Morte, morte mi dà.
MOZART DON GIOVANNI
98
Ton cœur l’exige, ton cœur l’exige.
Je te demande vengeance, ton cœur l’exige.
Je te demande vengeance, ton cœur l’exige.
Ton cœur l’exige, ton cœur l’exige.
Ton cœur l’exige, ton cœur l’exige.
Je te demande vengeance, ton cœur l’exige.
Je te demande vengeance, ton cœur l’exige.
(Elle sort.)
SCÈNE XIV
Récitatif
DON OTTAVIO
Pourrais-je jamais croire un chevalier capable d’un crime
si noir ! Cherchons tous les moyens de dévoiler la vérité ;
j’entends parler en moi le devoir de l’époux, de l’ami; je
veux la détromper ou la venger.
No 10a. Air
DON OTTAVIO
De sa sérénité dépend la mienne,
Ce qu’elle aime me rend la vie,
Ce qui lui fait mal me fait mourir,
Mourir, me fait mourir.
Quand elle soupire, je soupire aussi
Sa colère est la mienne, ses pleurs les miens ;
Et je ne suis pas heureux, si elle ne l’est pas,
Et je ne suis pas heureux, si elle ne l’est pas,
Et je ne suis pas heureux, si elle ne l’est pas.
De sa sérénité dépend la mienne,
Ce qu’elle aime me rend la vie,
Ce qui lui fait mal me fait mourir,
Mourir, me fait mourir.
99
PREMIER ACTE SCÈNE XIV
Dalla sua pace la mia dipende,
Quel che a lei piace vita mi rende,
Quel che le incresce morte mi dà,
Morte, morte mi dà, morte mi dà
Quel che le incresce morte mi dà.
(Parte.)
SCENA XV
LEPORELLO
Io deggio ad ogni patto per sempre abbandonar questo bel
matto! Eccolo qui: guardate con qual indifferenza se ne
viene!
DON GIOVANNI
Oh Leporello mio, va tutto bene!
LEPORELLO
Don Giovannino mio, va tutto male!
DON GIOVANNI
Come va tutto male?
LEPORELLO
Vado a casa, come voi l’ordinaste, con tutta quella gente...
DON GIOVANNI
Bravo!
LEPORELLO
A forza di chiacchiere, di vezzi e di bugie, ch’ho imparato
sì bene a star con voi, cerco d’intrattenerli...
DON GIOVANNI
Bravo!
MOZART DON GIOVANNI
100
De sa sérénité dépend la mienne,
Ce qu’elle aime me rend la vie,
Ce qui lui fait mal me fait mourir,
Mourir, me fait mourir, me fait mourir,
Ce qui lui fait mal me fait mourir.
(Il sort.)
SCÈNE XV
LEPORELLO
À tout prix, il me faut abandonner ce fou ! Le voici : voyez
avec quelle désinvolture il arrive !
DON GIOVANNI
Oh mon Leporello, tout va bien !
LEPORELLO
Mon Don Giovannino, tout va mal !
DON GIOVANNI
Comment tout va mal ?
LEPORELLO
Je suis allé à la maison, comme vous l’avez ordonné, avec
tous ces gens...
DON GIOVANNI
Bravo !
LEPORELLO
À force de bavardage, de flatteries et de mensonges, appris
auprès de vous, je cherche à les retenir...
DON GIOVANNI
Bravo !
101
PREMIER ACTE SCÈNE XV
LEPORELLO
Dico mille cose a Masetto per placarlo, per trargli dal pen-
sier la gelosia...
DON GIOVANNI
Bravo, bravo in coscienza mia!
LEPORELLO
Faccio che bevano e gli uomini e le donne: son già mezzo
ubbriachi, altri canta, altri scherza, altri seguita a ber; in
sul più bello chi credete che capiti?
DON GIOVANNI
Zerlina!
LEPORELLO
Bravo! e con lei chi viene?
DON GIOVANNI
Donna Elvira!
LEPORELLO
Bravo! e disse di voi...
DON GIOVANNI
Tutto quel mal che in bocca le venia.
LEPORELLO
Bravo, bravo in coscienza mia!
DON GIOVANNI
E tu cosa facesti?
LEPORELLO
Tacqui.
MOZART DON GIOVANNI
102
LEPORELLO
Je dis mille choses à Masetto, pour lui plaire, pour lui faire
sortir la jalousie de la tête...
DON GIOVANNI
Bravo, bravo, sincèrement !
LEPORELLO
J’incite les hommes et les femmes à boire : ils sont déjà à
moitié saouls, il y en a qui chantent, d’autres rigolent,
d’autres continuent à boire ; au meilleur moment, qui
croyez-vous qui arrive ?
DON GIOVANNI
Zerlina !
LEPORELLO
Bravo ! et avec qui ?
DON GIOVANNI
Donna Elvira !
LEPORELLO
Bravo ! elle a dit de vous...
DON GIOVANNI
Tout le mal qu’elle a pu dire.
LEPORELLO
Bravo, bravo, sincèrement !
DON GIOVANNI
Et toi, qu’as-tu fait ?
LEPORELLO
Je n’ai rien dit.
103
PREMIER ACTE SCÈNE XV
DON GIOVANNI
Ed ella?
LEPORELLO
Seguì a gridar.
DON GIOVANNI
E tu?
LEPORELLO
Quando mi parve che già fosse sfogata, dolcemente fuor
dell’orto la trassi, e con bell’arte chiusa la porta a chiave
io mi cavai, e sulla via soletta la lasciai.
DON GIOVANNI
Bravo, bravo, arcibravo! L’affar non può andar meglio:
incominciasti, io saprò terminar. Troppo mi premono
queste contadinotte: le voglio divertir fin che vien notte.
No 11. Aria
DON GIOVANNI
Fin ch’han dal vino calda la testa,
Una gran festa fa’ preparar.
Se trovi in piazza qualche ragazza,
Teco ancor quella cerca menar,
Teco ancor quella cerca menar,
Cerca menar, cerca menar.
Senza alcun ordine la danza sia,
Chi’l minuetto, chi la follia, chi l’alemanna farai ballar,
Chi’l minuetto farai ballar,
Chi la follia farai ballar,
Chi l’alemanna farai ballar.
Ed io frattanto dall’altro canto
Con questa e quella vo’ amoreggiar.
MOZART DON GIOVANNI
104
DON GIOVANNI
Et elle ?
LEPORELLO
Elle a continué à crier.
DON GIOVANNI
Et toi ?
LEPORELLO
Quand il m’a semblé qu’elle était calmée, je l’ai menée
doucement hors du jardin, et habilement j’ai fermé la porte
à clé, j’ai filé et l’ai laissée seule dans la rue.
DON GIOVANNI
Bravo, bravo, archibravo ! L’affaire ne peut aller mieux: tu
as commencé, je saurai terminer. Ces petites paysannes
me plaisent trop : je veux les amuser jusqu’à la nuit.
No 11. Air
DON GIOVANNI
Tant que le vin échauffe les têtes
Fais préparer une grande fête.
Si sur la place, tu trouves quelque fille,
Avec toi, essaye de la prendre aussi,
Avec toi, essaye de la prendre aussi,
Essaye de la prendre, essaye de la prendre.
Que l’on danse librement,
Tu feras danser qui le menuet, qui la follia, qui l’allemande,
Tu feras danser qui le menuet,
Tu feras danser qui la follia,
Tu feras danser qui l’allemande.
Et moi, d’autre part et entre-temps
Avec telle ou telle, je parlerai d’amour.
105
PREMIER ACTE SCÈNE XV
Vo’ amoreggiar, vo’ amoreggiar.
Ah! la mia lista doman mattina
D’una decina devi aumentar.
Ah! la mia lista d’una decina devi aumentar.
Se trovi in piazza qualche ragazza,
Teco ancor quella cerca menar.
Ah! la mia lista doman mattina
D’una decina devi aumentar.
Senza alcun ordine la danza sia,
Chi’l minuetto, chi la follia, chi l’alemanna farai ballar.
Ah! la mia lista doman mattina
D’una decina devi aumentar,
D’una decina devi aumentar,
D’una decina devi aumentar,
devi aumentar, devi aumentar,
Devi, devi aumentar.
Partono.
SCENA XVI
Giardino con due porte chiuse a chiave per di fuori.
Due nicchie.
Recitativo
ZERLINA
Masetto: senti un po’! Masetto, dico!
MASETTO
Non mi toccar!
ZERLINA
Perché?
MOZART DON GIOVANNI
106
Je parlerai d’amour, je parlerai d’amour.
Ah ! que demain matin ma liste
Augmente d’une dizaine.
Ah ! que ma liste augmente d’une dizaine.
Si sur la place, tu trouves quelque fille,
Avec toi, essaye de la prendre aussi.
Ah ! que demain matin ma liste
Augmente d’une dizaine.
Que l’on danse librement,
Tu feras danser qui le menuet, qui la follia, qui l’allemande.
Ah ! que demain matin ma liste
Augmente d’une dizaine,
Augmente d’une dizaine,
Augmente d’une dizaine,
Augmente, augmente,
Qu’elle augmente, qu’elle augmente.
Ils sortent.
SCÈNE XVI
Jardin avec deux portes fermées à clé de l’extérieur.
Deux niches.
Récitatif
ZERLINA
Masetto, écoute un peu ! Masetto, je te parle !
MASETTO
Ne me touche pas !
ZERLINA
Pourquoi ?
107
PREMIER ACTE SCÈNE XVI
MASETTO
Perché mi chiedi? Perfida! il tatto sopportar dovrei d’una
man infedele?
ZERLINA
Ah no: taci, crudele! io non merto da te tal trattamento.
MASETTO
Come! ed hai l’ardimento di scusarti? Star sola con un
uom: abbandonarmi il dì delle mie nozze! porre in fronte a
un villano d’onore questa marca d’infamia! Ah, se non
fosse, se non fosse lo scandalo! vorrei...
ZERLINA
Ma se colpa io non ho! ma se da lui ingannata rimasi... E
poi che temi? Tranquillati, mia vita: non mi toccò la punta
della dita. Non me lo credi? Ingrato! vien qui, sfogati;
ammazzami, fa tutto di me quel che ti piace; ma poi,
Masetto mio, ma poi fa’ pace.
No 12. Aria
ZERLINA
Batti, batti, o bel Masetto, la tua povera Zerlina:
Starò qui come agnellina le tue botte ad aspettar.
Batti, batti la tua Zerlina: starò qui,
Starò qui le tue botte ad aspettar.
Lascerò straziarmi il crine,
Lascerò cavarmi gli occhi,
E le care tue manine lieta poi saprò baciar,
Saprò baciar, baciar, saprò, saprò baciar.
Batti, batti, o bel Masetto, la tua povera Zerlina:
Starò qui come agnellina le tue botte ad aspettar.
O bel Masetto, batti, batti, starò qui,
Starò qui le tue botte ad aspettar.
Ah lo vedo, non hai core,
MOZART DON GIOVANNI
108
MASETTO
Tu me demandes pourquoi ? Perfide ! je devrais supporter
qu’une main infidèle me touche ?
ZERLINA
Ah non: tais-toi, cruel ! je ne mérite pas un tel traitement.
MASETTO
Comment ! tu as l’audace de te disculper ? Rester seule
avec un homme : me laisser le jour de mes noces ! porter
au front d’un honorable paysan cette marque d’infamie !
Ah, si n’était, si n’était le scandale ! tu verrais...
ZERLINA
Mais si je n’ai pas fauté ! si c’est lui qui m’avait trompée...
Et puis de quoi as-tu peur ? Calme-toi mon amour : il ne
m’a touché le bout du doigt. Tu ne me crois pas ? Ingrat !
viens ici, lâche-toi, tue-moi, fais de moi ce que tu veux ;
mais après, mon Masetto, mais après fais la paix.
No 12. Air
ZERLINA
Bats-la, bats-la, ô beau Masetto, ta pauvre Zerlina :
Je resterai là, comme un agneau, attendant tes coups.
Bats-la, bats-la ta Zerlina : je resterai là
Je resterai là, attendant tes coups.
Je me laisserai déchirer les cheveux,
Je me laisserai arracher les yeux,
Et tes chères mains, heureuse, je saurai les baiser,
Je saurai les baiser, je saurai les baiser.
Bats-la, bats-la, ô beau Masetto, ta pauvre Zerlina :
Je resterai là, comme un agneau, attendant tes coups.
Ô beau Masetto, bats-la, bats-la, je resterai là
Je resterai là, attendant tes coups.
Ah, je le vois, tu n’en as pas le cœur,
109
PREMIER ACTE SCÈNE XVI
Ah non hai core, ah lo vedo, non hai core:
Pace, pace, o vita mia, pace, pace, o vita mia;
In contenti ed allegria notte e dì vogliam passar,
Notte e dì vogliam passar, notte e dì vogliam passar,
Notte e dì vogliam passar.
Pace, pace, o vita mia, pace, pace, o vita mia;
In contenti, in allegria notte e dì vogliam passar,
Sì, sì, sì, sì, sì, sì, notte e dì vogliam passar,
Sì, sì, sì, sì, sì, sì, notte e dì vogliam passar,
Vogliam passar, vogliam passar.
(Parte)
Recitativo
MASETTO
Guarda un po’ come seppe questa strega sedurmi! siamo
pure i deboli di testa!
DON GIOVANNI (di dentro)
Sia preparato tutto a una gran festa!
ZERLINA (rientrando)
Ah Masetto, Masetto! odi la voce del monsù cavaliero!
MASETTO
Ebben che c’è?
ZERLINA
Verrà!
MASETTO
Lascia che venga.
ZERLINA
Ah se vi fosse un buco da fuggir!
MOZART DON GIOVANNI
110
Ah tu n’as pas le cœur, je le vois :
Paix, paix, ô mon amour paix, ô mon amour ;
Dans le bonheur et la joie, passons nos nuits et nos jours,
Passons nos nuits et nos jours, nos nuits et nos jours,
Passons nos nuits et nos jours.
Paix, paix, ô mon amour, paix, ô mon amour ;
Dans le bonheur et la joie, passons nos nuits et nos jours,
Oui, oui, oui, oui, passons nos nuits et nos jours,
Oui, oui, oui, oui, passons nos nuits et nos jours,
Passons, passons.
(Elle sort.)
Récitatif
MASETTO
Voyez un peu comme cette sorcière a su me séduire ! nous
sommes vraiment pauvres d’esprit !
DON GIOVANNI (de l’intérieur)
Que tout soit préparé pour une grande fête !
ZERLINA (rentrant)
Ah Masetto ! écoute, la voix de monsieur le chevalier !
MASETTO
Eh bien, et alors ?
ZERLINA
Il va venir !
MASETTO
Laisse-le venir.
ZERLINA
Ah, s’il y avait un petit trou pour fuir !
111
PREMIER ACTE SCÈNE XVI
MASETTO
Di cosa temi? Perché diventi pallida? Ah, capisco, capis-
co, bricconcella! Hai timor ch’io comprenda com’è tra voi,
passata la faccenda.
No 13. Finale
MASETTO
Presto presto pria ch’ei venga,
Por mi vo’ da qualche lato:
C’è una nicchia... qui celato cheto cheto mi vo’ star.
ZERLINA
Senti senti... dove vai! Ah, non t’asconder, o Masetto,
Se ti trova, poveretto, tu non sai quel che può far, poveretto!
Tu non sai quel che può far.
MASETTO
Faccia, dica quel che vuole!
ZERLINA
Ah non giovan le parole!
MASETTO
Parla forte, e qui t’arresta!
ZERLINA
Che capriccio ha nella testa!
Che capriccio ha nella testa!
MASETTO
Parla forte, e qui t’arresta!
MASETTO
Capirò...
MOZART DON GIOVANNI
112
MASETTO
De quoi as-tu peur ? Pourquoi pâlis-tu? Ah, je comprends,
je comprends, coquine ! Tu crains que je comprenne com-
ment la chose s’est passée entre vous.
No 13. Finale
MASETTO
Vite, vite, avant qu’il vienne,
Je vais me mettre dans un coin :
Voici une niche... caché là, je vais rester silencieux.
ZERLINA
Écoute, écoute, où vas-tu ! Ah ne te cache pas, Masetto,
S’il te trouve, mon pauvre, tu ne sais pas de quoi il est
capable,
Tu ne sais pas de quoi il est capable.
MASETTO
Qu’il fasse et dise ce qu’il veut !
ZERLINA
Ah les mots sont inutiles !
MASETTO
Parle haut et reste là !
ZERLINA
Quel caprice a-t-il en tête ?
Quel caprice a-t-il en tête ?
MASETTO
Parle haut et reste là !
MASETTO
Je saurai...
113
PREMIER ACTE SCÈNE XVI
ZERLINA
Quell’ingrato,
MASETTO
Se m’è fedele,
ZERLINA
Quel crudele...
MASETTO
E in qual modo...
ZERLINA
Oggi vuol...
MASETTO
Andò l’affar.
ZERLINA
Precipitar.
MASETTO
Capirò
Se m’è fedele,
ZERLINA
Quell’ingrato,
Quel crudele oggi vuol
Precipitar.
MASETTO
Se m’è fedele, e in qual
Modo andò l’affar,
ZERLINA
Quell’ingrato, quel crudele...
MOZART DON GIOVANNI
114
ZERLINA
Quel ingrat,
MASETTO
Si elle m’est fidèle,
ZERLINA
Quel cruel...
MASETTO
Et comment...
ZERLINA
Il veut aujourd’hui...
MASETTO
S’est passée la chose.
ZERLINA
Se perdre.
MASETTO
Je saurai
Si elle m’est fidèle,
ZERLINA
Quel ingrat,
Quel cruel, il veut aujourd’hui
Se perdre.
MASETTO
Si elle m’est fidèle, et comment
S’est passée la chose,
ZERLINA
Quel ingrat, quel cruel...
115
PREMIER ACTE SCÈNE XVI
MASETTO
In qual
Modo andò l’affar.
(Entra nella nicchia.)
ZERLINA
Oggi vuol precipitar.
SCENA XVII
DON GIOVANNI
Sù svegliatevi, da bravi,
Sù coraggio, o buona gente!
Vogliam stare allegramente,
Vogliam rider e scherzar.
(Ai servi)
Alla stanza della danza
Conducete tutti quanti,
Ed a tutti in abbondanza
Gran rinfreschi fate dar,
Gran rinfreschi fate dar.
CORO DI SERVI
Sù svegliatevi, da bravi,
Sù coraggio, o buona gente!
Vogliam stare allegramente,
Vogliam rider e scherzar,
Vogliam stare allegramente,
Vogliam rider e scherzar,
(Partendo)
Vogliam rider e scherzar,
Vogliam rider e scherzar,
(Entrano.)
Vogliam rider e scherzar.
MOZART DON GIOVANNI
116
MASETTO
Comment
S’est passée la chose.
(Il entre dans la niche.)
ZERLINA
Il veut se perdre aujourd’hui.
SCÈNE XVII
DON GIOVANNI
Allons réveillez-vous, les braves,
Allons du cœur, bonnes gens !
Nous voulons être joyeux,
Nous voulons rire, nous amuser.
(Aux serviteurs)
À la salle du bal
Conduisez-les tous,
Et à tous, à profusion,
Faites offrir les boissons,
Faites offrir les boissons.
CHŒUR DES SERVITEURS
Allons réveillez-vous, les braves,
Allons du cœur, bonnes gens !
Nous voulons être joyeux,
Nous voulons rire, nous amuser,
Nous voulons être joyeux,
Nous voulons rire, nous amuser,
(En sortant)
Nous voulons rire, nous amuser,
Nous voulons rire, nous amuser,
(Ils passent à l’intérieur.)
Nous voulons rire, nous amuser.
117
PREMIER ACTE SCÈNE XVII
SCENA XVIII
ZERLINA (vuol nascondersi)
Tra quest’arbori celata si può dar che non mi veda.
DON GIOVANNI
Zerlinetta mia garbata,
(La prende.) T’ho già visto, t’ho già visto, non scappar!
ZERLINA
Ah lasciatemi andar via...
DON GIOVANNI
No no, resta, gioia mia!
ZERLINA
Se pietade avete in core...
DON GIOVANNI
Sì, ben mio, son tutto amore. Vieni un poco in questo loco,
fortunata io ti vo’ far.
ZERLINA
Ah...
S’ei vede il sposo mio,
So ben io quel che può far,
DON GIOVANNI
Vieni un poco in questo loco,
Fortunata io ti vo’ far,
ZERLINA
So ben io, so ben
Io, so quel che può far,
MOZART DON GIOVANNI
118
SCÈNE XVIII
ZERLINA (voulant se cacher)
Il ne me verra peut-être pas, cachée parmi ces arbres.
DON GIOVANNI
Zerlinetta, ma charmante,
(Il la saisit.) Je t’ai vue, je t’ai vue, ne t’échappe pas !
ZERLINA
Ah, laissez-moi m’en aller...
DON GIOVANNI
Non non, reste, ma joie !
ZERLINA
Si votre cœur a pitié...
DON GIOVANNI
Oui, ma chérie, je suis tout amour. Viens un peu dans ce
coin, je veux faire ton bonheur.
ZERLINA
Ah...
Si mon époux le voit,
Je sais bien de quoi il est capable,
DON GIOVANNI
Viens un peu dans ce coin,
Je veux faire ton bonheur.
ZERLINA
Je sais bien, je sais bien
De quoi il est capable,
119
PREMIER ACTE SCÈNE XVIII
DON GIOVANNI
Fortunata io ti vo’ far,
ZERLINA
So ben io, so ben
Io, so quel che può far!
DON GIOVANNI
Fortunata io ti vo’ far!
DON GIOVANNI (nell’aprire la nicchia e vedendo Masetto,
fa un moto di stupore)
Masetto!
MASETTO
Sì Masetto.
DON GIOVANNI (un poco confuso)
È chiuso là, perchè?
La bella tua Zerlina non può, la poverina,
(Riprende ardir.)
Più star senza di te, non può più star senza di te.
MASETTO (un poco ironico)
Capisco, sì, signore.
DON GIOVANNI (a Zerlina)
Adesso fate core, fate core:
(Si sente il preludio della danza.)
I suonatori udite; venite omai con me.
ZERLINA
Sì, sì, facciamo core,
ZERLINA E MASETTO
Sì, sì, facciamo core,
MOZART DON GIOVANNI
120
DON GIOVANNI
Je veux faire ton bonheur,
ZERLINA
Je sais bien, je sais bien,
Je sais de quoi il est capable !
DON GIOVANNI
Je veux faire ton bonheur !
DON GIOVANNI (ouvrant la niche et voyant Masetto,
a un mouvement de stupeur)
Masetto !
MASETTO
Oui, Masetto.
DON GIOVANNI (un peu troublé)
Enfermé là, pourquoi ?
Ta belle Zerline ne peut plus, la pauvre
(Il reprend de l’assurance.)
Demeurer sans toi, elle ne peut demeurer sans toi.
MASETTO (un peu ironique)
Je comprends, oui, seigneur.
DON GIOVANNI (à Zerlina)
Maintenant haut les cœurs, haut les cœurs :
(On entend le prélude de la danse.)
Écoutez les musiciens ; venez donc avec moi.
ZERLINA
Oui, oui, haut les cœurs,
ZERLINA & MASETTO
Oui, oui, haut les cœurs,
121
PREMIER ACTE SCÈNE XVIII
Ed a ballar cogli altri
Andiamo tutti tre,
Andiamo, andiamo tutti tre,
Andiamo, andiamo tutti tre,
Andiamo tutti tre,
Andiamo tutti tre.
DON GIOVANNI
Venite omai,
Venite omai con me,
Venite, venite omai con me,
Venite, venite omai con me,
Venite omai con me,
Venite omai con me.
Partono.
SCENA XIX
DONNA ELVIRA
Bisogna aver coraggio, o cari amici miei,
E i suoi misfatti rei scoprir,
Scoprir potremo allor.
DON OTTAVIO
L’amica dice bene: coraggio aver conviene;
Discaccia, o vita mia, l’affanno ed il timor.
DONNA ANNA
Il passo è periglioso,
Può nascer qualche imbroglio:
Temo pel caro sposo, pel caro sposo,
E per noi temo ancor,
Temo pel caro sposo, pel caro sposo,
E per noi temo ancor.
MOZART DON GIOVANNI
122
Et pour danser avec les autres,
Allons-y tous les trois,
Allons-y, allons-y tous les trois,
Allons-y, allons-y tous les trois,
Allons-y tous les trois,
Allons-y tous les trois.
DON GIOVANNI
Venez donc,
Venez donc avec moi,
Venez, venez donc avec moi,
Venez, venez donc avec moi,
Venez donc avec moi,
Venez donc avec moi.
Ils sortent.
SCÈNE XIX
DONNA ELVIRA
Il nous faut avoir du courage, ô mes chers amis,
Et ses coupables méfaits,
Nous pourrons alors les dévoiler.
DON OTTAVIO
Notre amie a raison : il faut avoir du courage ;
Dissipe, ô mon amour, ton angoisse et ta peur.
DONNA ANNA
La démarche est dangereuse,
Il en peut naître quelque complication :
J’ai peur pour mon cher époux, cher époux,
Et j’ai peur aussi pour nous,
J’ai peur pour mon cher époux, cher époux,
Et j’ai peur aussi pour nous.
123
PREMIER ACTE SCÈNE XIX
Menuetto
LEPORELLO (apre la finestra)
Signor, guardate un poco che maschere galanti!
DON GIOVANNI (alla finestra)
Falle passar avanti, di’ che ci fanno onor.
DONNA ANNA, DON OTTAVIO E DONNA ELVIRA (a parte)
Al volto ed alla voce si scopre il traditore.
LEPORELLO
Zì, zì! signore maschere! zì, zì...
DONNA ANNA E DONNA ELVIRA (a Don Ottavio piano)
Via, rispondete!
LEPORELLO
Zì, zì, signore maschere!
DON OTTAVIO
Cosa chiedete?
LEPORELLO
Al ballo, se vi piace, v’invita il mio signor.
DON OTTAVIO
Grazie di tanto onore; andiam, compagne belle.
LEPORELLO
L’amico anche su quelle prove farà d’amor.
(Entra e chiude.)
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
Protegga il giusto cielo
MOZART DON GIOVANNI
124
Menuet
LEPORELLO (ouvre la fenêtre)
Seigneur, voyez un peu ces masques élégants !
DON GIOVANNI (à la fenêtre)
Fais-les entrer, dis-leur qu’ils nous honoreraient.
DONNA ANNA, DON OTTAVIO & DONNA ELVIRA (à part)
Par son visage et sa voix le traître se découvre.
LEPORELLO
Pst, pst ! messieurs les masques ! pst, pst...
DONNA ANNA & DONNA ELVIRA (bas, à Don Ottavio)
Allons, répondez !
LEPORELLO
Pst, pst, messieurs les masques !
DON OTTAVIO
Que désirez-vous ?
LEPORELLO
Au bal, s’il vous plaît, mon maître vous invite.
DON OTTAVIO
Merci de tant d’honneur ; allons, belles compagnes.
LEPORELLO
À elles aussi, l’ami donnera des preuves d’amour.
(Il rentre et ferme la fenêtre.)
DONNA ANNA & DON OTTAVIO
Que le ciel de justice protège
125
PREMIER ACTE SCÈNE XIX
Il zelo del mio cor.
Protegga il giusto cielo il zelo del mio cor,
Il zelo, il zelo del mio cor.
DONNA ELVIRA
Vendichi il giusto cielo
Il mio tradito amor. Vendichi il giusto cielo
Il mio tradito amor, il mio tradito amor.
DONNA ANNA
Protegga
Il giusto cielo il zelo del mio cor.
DON OTTAVIO
Protegga il giusto cielo
Il zelo del mio cor, il zelo,
Il zelo del mio cor.
DONNA ELVIRA
Vendichi il giusto cielo
Il mio tradito amor,
Il mio, il mio tradito amor.
Vendichi, vendichi il giusto
Cielo...
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
Protegga
Il giusto cielo...
DONNA ELVIRA
... Il mio tradito, tradito
Amor, tradito amor.
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
... Il zelo del mio cor.
Partono.
MOZART DON GIOVANNI
126
L’ardeur de mon cœur.
Que le ciel de justice protège l’ardeur de mon cœur,
L’ardeur, l’ardeur de mon cœur.
DONNA ELVIRA
Que le ciel de justice venge
Mon amour trahi. Que le ciel de justice venge
Mon amour trahi, mon amour trahi.
DONNA ANNA
Que protège
Le ciel de justice l’ardeur de mon cœur.
DON OTTAVIO
Que protège le ciel de justice
L’ardeur de mon cœur, l’ardeur,
L’ardeur de mon cœur.
DONNA ELVIRA
Que le ciel de justice venge
Mon amour trahi,
Mon, mon amour trahi.
Que venge, que venge le ciel
De justice...
DONNA ANNA & DON OTTAVIO
Que protège
Le ciel de justice...
DONNA ELVIRA
... Mon amour trahi, trahi,
Mon amour trahi.
DONNA ANNA & DON OTTAVIO
... L’ardeur de mon cœur.
Ils sortent.
127
PREMIER ACTE SCÈNE XIX
SCENA XX
Sala illuminata e preparata per una gran festa da ballo.
Don Giovanni fa seder le ragazze, e Leporello i ragazzi
che saranno in atto d’aver finito un ballo.
DON GIOVANNI
Riposate, vezzose ragazze,
LEPORELLO
Rinfrescatevi, bei giovinotti,
DON GIOVANNI E LEPORELLO
Tornerete a far presto le pazze,
Tornerete a scherzar e ballar, a scherzar e ballar.
DON GIOVANNI
Ehi caffè!
LEPORELLO
Cioccolata!
MASETTO (piano a Zerlina)
Ah Zerlina, giudizio!
DON GIOVANNI
Sorbetti!
LEPORELLO
Confetti!
MASETTO
Ah Zerlina, giudizio!
MOZART DON GIOVANNI
128
SCÈNE XX
Salle illuminée et aménagée pour un grand bal.
Don Giovanni fait asseoir les jeunes filles et Leporello
les jeunes gens qui viennent d’arrêter de danser.
DON GIOVANNI
Reposez-vous, belles jeunes filles,
LEPORELLO
Rafraîchissez-vous, beaux jeunes gens,
DON GIOVANNI & LEPORELLO
Puis vous irez vite refaire les fous,
Vous irez plaisanter et danser, plaisanter et danser.
DON GIOVANNI
Eh café !
LEPORELLO
Chocolat !
MASETTO (bas à Zerlina)
Ah Zerlina, prudence !
DON GIOVANNI
Sorbets !
LEPORELLO
Dragées !
MASETTO
Ah Zerlina, prudence !
129
PREMIER ACTE SCÈNE XX
ZERLINA E MASETTO (a parte)
Troppo dolce comincia la scena, in amaro potria terminar, sì,
In amaro potria terminar.
DON GIOVANNI (fa carezze a Zerlina)
Sei pur vaga, brillante Zerlina!
ZERLINA
Sua bontà!
MASETTO (fremendo)
La briccona fa festa.
LEPORELLO (imita il padrone colle altre ragazze)
Sei pur cara, Giannotta, Sandrina!
MASETTO
Tocca pur, che ti cada la testa.
ZERLINA (a parte)
Quel Masetto mi par stralunato, brutto, brutto si
Fa quest’affar.
DON GIOVANNI E LEPORELLO
Quel Masetto
Mi par
Stralunato,
ZERLINA
Quel Masetto
Mi par stralunato,
MASETTO
Ah briccona
Fa festa.
MOZART DON GIOVANNI
130
ZERLINA & MASETTO (à part)
Trop doucement débute la scène, elle pourrait finir amère-
ment, oui,
Elle pourrait finir amèrement.
DON GIOVANNI (caressant Zerlina)
Tu es gracieuse, éclatante Zerlina !
ZERLINA
C’est trop de bonté !
MASETTO (frémissant)
La crapule est à la fête.
LEPORELLO (imitant son maître avec les autres filles)
Tu es tendre, Jeannette, Sandrine !
MASETTO
Touche donc, et ta tête tombe.
ZERLINA (à part)
Ce Masetto me semble mal luné, bien mal
S’annonce cette affaire.
DON GIOVANNI & LEPORELLO
Ce Masetto
Me semble
Mal luné,
ZERLINA
Ce Masetto
Me semble mal luné,
MASETTO
Ah la crapule
Est à la fête.
131
PREMIER ACTE SCÈNE XX
DON GIOVANNI E LEPORELLO
Qui bisogna
Cervello
Adoprar.
ZERLINA
Brutto
Brutto, si fa quest’affar.
MASETTO
Tocca pur, che ti cada la testa!
ZERLINA
Quel Masetto mi par stralunato,
Brutto, brutto si fa quest’affar,
Si fa quest’affar.
DON GIOVANNI E LEPORELLO
Quel Masetto mi par stralunato,
Qui bisogna cervello adoprar,
Cervello adoprar.
MASETTO
Tocca
Tocca!
Ah briccona! Ah briccona,
Mi vuoi disperar,
Ah briccona, mi vuoi disperar.
ZERLINA
Quel Masetto mi par stralunato,
Brutto, brutto si fa quest’affar,
Si fa quest’affar,
Brutto, brutto si fa quest’affar.
MOZART DON GIOVANNI
132
DON GIOVANNI & LEPORELLO
À présent il faut
Faire marcher
Son cerveau.
ZERLINA
Bien mal
Bien mal, s’annonce cette affaire.
MASETTO
Touche donc, et ta tête tombe !
ZERLINA
Ce Masetto me semble mal luné,
Bien mal s’annonce cette affaire,
S’annonce cette affaire.
DON GIOVANNI & LEPORELLO
Ce Masetto me semble mal luné,
À présent il faut faire marcher son cerveau,
Faire marcher son cerveau.
MASETTO
Touche
Touche !
Ah crapule ! Ah crapule,
Elle veut faire mon désespoir,
Ah crapule, elle veut faire mon désespoir.
ZERLINA
Ce Masetto me semble mal luné,
Bien mal s’annonce cette affaire,
S’annonce cette affaire,
Bien mal, bien mal s’annonce cette affaire.
133
PREMIER ACTE SCÈNE XX
DON GIOVANNI E LEPORELLO
Quel Masetto mi par stralunato,
Qui bisogna cervello adoprar,
Cervello adoprar,
Qui bisogna cervello adoprar.
LEPORELLO
Venite pur avanti, vezzose mascherette!
DON GIOVANNI
È aperto a tutti quanti, viva la libertà!
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO
Siam grati a tanti segni di generosità, di generosità.
DON GIOVANNI
È aperto a tutti,
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO
Siam
Grati
DON GIOVANNI
A tutti
Quanti,
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO
A tanti segni di generosità, di generosità.
Don Giovanni
Viva, viva la libertà,
LEPORELLO
Viva la
Liberta
MOZART DON GIOVANNI
134
DON GIOVANNI & LEPORELLO
Ce Masetto me semble mal luné,
À présent il faut faire marcher son cerveau,
Faire marcher son cerveau,
Maintenant, il faut faire marcher son cerveau,
LEPORELLO
Entrez donc, beaux masques !
DON GIOVANNI
C’est ouvert à tous, vive la liberté !
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO
Merci pour tant de témoignages de générosité.
DON GIOVANNI
C’est ouvert à tous,
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO
Nous vous
Remercions
DON GIOVANNI
À
Tous,
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO
De tant de témoignages de générosité.
DON GIOVANNI
Vive, vive la liberté,
LEPORELLO
Vive la
Liberté
135
PREMIER ACTE SCÈNE XX
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO E DON GIOVANNI
Viva la libertà
TUTTI
La libertà,
LEPORELLO
Viva la
Libertà
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO E DON GIOVANNI
Viva la libertà
TUTTI
La libertà, viva, viva la libertà,
Viva, viva la libertà, la libertà, la libertà!
DON GIOVANNI
Ricominciate il suono!
(A Leporello)
Tu accoppia i ballerini.
Menuetto
Don Ottavio balla Menuetto con Donna Anna.
LEPORELLO
Da bravi, via, ballate!
Ballano.
DONNA ELVIRA (a Donna Anna)
Quella è la contadina.
DONNA ANNA
Io moro!
MOZART DON GIOVANNI
136
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO & DON GIOVANNI
Vive la liberté
TOUS
La liberté,
LEPORELLO
Vive la
Liberté
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO & DON GIOVANNI
Vive la liberté
TOUS
La liberté, vive, vive la liberté,
Vive, vive la liberté, la liberté, la liberté !
DON GIOVANNI
Recommencez à jouer !
(À Leporello)
Toi, accouple les danseurs.
Menuet
Don Ottavio danse le menuet avec Donna Anna.
LEPORELLO
Allons vite, à la danse !
Ils dansent.
DONNA ELVIRA (à Donna Anna)
Voici la paysanne.
DONNA ANNA
Je meurs !
137
PREMIER ACTE SCÈNE XX
DON OTTAVIO (a Donna Anna)
Simulate!
DON GIOVANNI E LEPORELLO
Va bene in verità!
MASETTO (ironicamente)
Va bene, va bene, va bene in verità!
DON GIOVANNI (a Leporello)
A bada tien Masetto.
LEPORELLO (a Masetto)
Non balli, poveretto! Poveretto!
DON GIOVANNI (a Zerlina)
Il tuo compagno io
Sono, Zerlina,
Zerlina, vien pur qua.
(Si mette a ballar con Zerlina una contradanza.)
LEPORELLO
Vien quà, Masetto caro, caro,
Facciam quel ch’altri fa.
MASETTO
No no, ballar non voglio.
LEPORELLO
Eh balla, amico mio!
MASETTO
No!
LEPORELLO
Sì! caro Masetto,
MOZART DON GIOVANNI
138
DON OTTAVIO (à Donna Anna)
Faites semblant !
DON GIOVANNI & LEPORELLO
Tout va bien vraiment !
MASETTO (ironiquement)
Tout va bien, tout va bien vraiment !
DON GIOVANNI (à Leporello)
Aie Masetto à l’œil.
LEPORELLO (à Masetto)
Tu ne danses pas, mon pauvre ! Mon pauvre !
DON GIOVANNI (à Zerlina)
Je suis ton cavalier,
Zerlina,
Zerlina, viens par ici.
(Il commence une contredanse avec Zerlina.)
LEPORELLO
Viens là, cher Masetto, mon cher,
Faisons comme les autres.
MASETTO
Non non, je ne veux pas danser.
LEPORELLO
Eh danse mon ami !
MASETTO
Non !
LEPORELLO
Si ! cher Masetto,
139
PREMIER ACTE SCÈNE XX
DONNA ANNA (a Donna Elvira)
Resister non poss’io!
LEPORELLO
Balla!
MASETTO
No no, non voglio!
DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO (a Donna Anna)
Fingete...
LEPORELLO
Balla!
DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO
... per pietà!
MASETTO
No non, non voglio!
LEPORELLO (fa ballar per forza Masetto)
Eh balla, amico mio, facciam quel qu’altri fa.
(Balla la Teitsch con Masetto.)
DON GIOVANNI
Vieni con
Me, vita mia;
MASETTO
Lasciami... ah no...
DON GIOVANNI (conducendola via quasi per forza)
Vieni vieni...
MOZART DON GIOVANNI
140
DONNA ANNA (à Donna Elvira)
Je ne puis résister...
LEPORELLO
Danse !
MASETTO
Non non, je ne veux pas!
DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO (à Donna Anna)
Faites semblant...
LEPORELLO
Danse !
DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO
... de grâce !
MASETTO
Non je ne veux pas !
LEPORELLO (force Masetto à danser)
Eh danse, mon ami, faisons comme les autres.
(Il danse une allemande avec Masetto.)
DON GIOVANNI
Viens avec
Moi, mon amour ;
MASETTO
Laisse-moi... ah non...
DON GIOVANNI (l’emmenant presque de force)
Viens viens...
141
PREMIER ACTE SCÈNE XX
MASETTO (si cava delle mani di Leporello e seguita la Zerlina)
Zerlina!
ZERLINA
Oh Numi! son tradita!
LEPORELLO
Qui nasce una ruina.
(Sorte in fretta.)
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO
L’iniquo da se stesso nel laccio se ne và.
ZERLINA (di dentro ad altra voce; strepito di piedi a destra)
Gente aiuto, aiuto gente!
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO
Soccorriamo l’innocente!
Soccorriamo l’innocente!
I suonatori e gli altri partono confusi.
MASETTO (di dentro)
Ah Zerlina! ah Zerlina!
ZERLINA
Scellerato!
Si sente il grido e lo strepito dalla parte opposta.
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO
Ora grida da quel lato, da quel lato!
ZERLINA
Scellerato!
MOZART DON GIOVANNI
142
MASETTO (s’arrache des mains de Leporello et suit Zerlina)
Zerlina !
ZERLINA
Oh Dieux ! je suis trahie !
LEPORELLO
Voilà la catastrophe.
(Il sort en hâte.)
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO
Le méchant se prend à son prend piège.
ZERLINA (de l’intérieur, d’une voix altérée ; piétinements à droite)
Quelqu’un, à l’aide, quelqu’un, à l’aide !
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO
Secourons cette innocente !
Secourons cette innocente !
Les musiciens et les autres sortent dans la confusion.
MASETTO (de l’intérieur)
Ah Zerlina ! ah Zerlina !
ZERLINA
Scélérat !
On entend les cris et les piétinements de l’autre côté.
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO
On crie maintenant de ce côté, de ce côté !
ZERLINA
Scélérat !
143
PREMIER ACTE SCÈNE XX
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO
Ah gittiamo giù la porta, giù la porta!
(Gittano giù la porta.)
ZERLINA
Soccorretemi,
(Esce da un’altra parte.)
Ah soccorretemi, o son morta!
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO E MASETTO
Siam qui noi per tua difesa. Siam qui noi per tua difesa,
per tu difesa, per tua difesa.
Don Giovanni esce con spada in mano. Conduce seco per
un braccio Leporello, e finge di voler ferirlo; ma la spada
non esce dal fodero.
DON GIOVANNO
Ecco il birbo che t’ha offesa: ma da me la pena avrà, la
pena avrà! Mori, iniquo!
LEPORELLO
Ah cosa fate!
DON GIOVANNI
Mori iniquo!
LEPORELLO
Ah cosa fate!
DON GIOVANNI
Mori, dico!
LEPORELLO
Ah cosa fate!
MOZART DON GIOVANNI
144
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO
Ah enfonçons la porte !
(Ils enfoncent la porte.)
ZERLINA
Aidez-moi,
(Elle entre par un autre côté.)
Ah aidez-moi ou je suis morte !
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO & MASETTO
Nous sommes là pour te défendre. Nous sommes là pour te
défendre, te défendre.
Don Giovanni entre, l’épée à la main. Il mène Leporello
par le bras, et feint de vouloir le frapper; mais il ne sort
pas l’épée du fourreau.
DON GIOVANNI
Voici le gredin qui t’a outragée : mais je vais le châtier, le
châtier ! Meurs, infâme !
LEPORELLO
Ah que faites-vous !
DON GIOVANNI
Meurs infâme !
LEPORELLO
Ah que faites-vous !
DON GIOVANNI
Meurs, te dis-je !
LEPORELLO
Ah que faites-vous !
145
PREMIER ACTE SCÈNE XX
DON OTTAVIO (pistola in mano)
Nol sperate! nol sperate!
(Si cava la maschera.)
L’empio crede con tal
Frode, con tal....
DONNA ELVIRA (si cava la maschera)
L’empio crede con tal...
DON OTTAVIO
... Frode,
DONNA ELVIRA
... Frode,
DONNA ANNA (si cava la maschera)
L’empio
Crede
Con tal frode
Di nasconder l’empietà,
L’empietà.
DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO
Con tal frode
Di nasconder l’empietà,
L’empietà.
DON GIOVANNI
Donna Elvira!
DONNA ELVIRA
Sì malvagio!
DON GIOVANNI
Don Ottavio!
MOZART DON GIOVANNI
146
DON OTTAVIO (un pistolet à la main)
N’y comptez pas ! n’y comptez pas !
(Il enlève son masque.)
L’impie croit, par cette
Ruse, par cette...
DONNA ELVIRA (enlève son masque)
L’impie croit, par cette...
DON OTTAVIO
... Ruse,
DONNA ELVIRA
... Ruse,
DONNA ANNA (enlève son masque)
L’impie
Croit
Par cette ruse
Cacher son crime,
Son crime.
DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO
Par cette ruse
Cacher son crime,
Son crime.
DON GIOVANNI
Donna Elvira !
DONNA ELVIRA
Oui, malfaisant !
DON GIOVANNI
Don Ottavio !
147
PREMIER ACTE SCÈNE XX
DON OTTAVIO
Sì signore!
DON GIOVANNI (a Donna Anna)
Ah credete!...
DONNA ANNA
Traditore,
Traditore, traditore!
DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO E MASETTO
Traditore, traditore!
ZERLINA
Tutto tutto già
Si sa, tutto tutto già si sa
....
Tutto, tutto, tutto!
MASETTO, DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO
Tutto tutto già si sa,
Tutto tutto già si sa
....
Tutto, tutto, tutto!
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Trema, trema, o scellerato!
DON GIOVANNI
È confusa la mia...
LEPORELLO
È confusa la sua...
MOZART DON GIOVANNI
148
DON OTTAVIO
Oui seigneur !
DON GIOVANNI (à Donna Anna)
Ah croyez !...
DONNA ANNA
Traître,
Traître, traître !
DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO & MASETTO
Traître, traître !
ZERLINA
Tout tout on sait
Déjà tout on sait déjà tout, tout,
....
Tout, tout, tout !
MASETTO, DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO
Tout tout, on sait déjà tout
Tout tout, on sait déjà tout
....
Tout, tout, tout !
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Tremble, tremble, ô scélérat !
DON GIOVANNI
Quel désordre dans ma...
LEPORELLO
Quel désordre dans sa...
149
PREMIER ACTE SCÈNE XX
DON GIOVANNI E LEPORELLO
... Testa
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Trema
Trema, o scellerato!
DON GIOVANNI
Non so più quel ch’io...
LEPORELLO
Non sa più quel ch’ei...
DON GIOVANNI
... Mi faccia,
E un’ orribile tempesta
Minacciando, oh Dio, mi va.
LEPORELLO
... Si faccia,
E un’ orribile tempesta
Minacciando, oh Dio, lo va.
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Saprà tosto il mondo intero
Il misfatto orrendo e nero la tua
Fiera crudeltà, la tua fiera crudeltà!
DON GIOVANNI
È confusa...
LEPORELLO
È confusa...
MOZART DON GIOVANNI
150
DON GIOVANNI & LEPORELLO
... Tête
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Tremble
Tremble, ô scélérat !
DON GIOVANNI
Je ne sais plus ce qu’il faut...
LEPORELLO
Il ne sait plus ce qu’il faut...
DON GIOVANNI
... Faire
C’est une horrible tempête
Qui me menace oh Dieu.
LEPORELLO
... Faire,
C’est une horrible tempête
Qui le menace oh Dieu.
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Bientôt le monde entier saura
L’horrible et sombre crime, ta
Sauvage cruauté, ta sauvage cruauté !
DON GIOVANNI
Quel désordre...
LEPORELLO
Quel désordre...
151
PREMIER ACTE SCÈNE XX
DON GIOVANNI
... La mia testa,
LEPORELLO
... La sua
Testa,
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Trema!
DON GIOVANNI
Non so più
Quel ch’io mi faccia...
LEPORELLO
Non sa più quel ch’ei si...
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Trema!
DON GIOVANNI
E un orribile tempesta minacciando, oh
Dio, mi va.
LEPORELLO
Faccia, e un orribile tempesta minacciando, oh
Dio, lo va.
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Trema,
Trema, trema, trema o scellerato!
MOZART DON GIOVANNI
152
DON GIOVANNI
... Dans ma tête,
LEPORELLO
... Dans sa
Tête,
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Tremble !
DON GIOVANNI
Je ne sais plus
Ce qu’il faut faire...
LEPORELLO
Il ne sait plus ce qu’il faut...
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Tremble !
DON GIOVANNI
C’est une horrible tempête qui me menace oh
Dieu.
LEPORELLO
Faire, c’est une horrible tempête, oh
Dieu.
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Tremble,
Tremble, tremble, tremble ô scélérat !
153
PREMIER ACTE SCÈNE XX
DON GIOVANNI
È confusa la mia testa, non so più quel ch’io mi
Faccia,
LEPORELLO
È confusa la sua testa, non sa più quel ch’ei si
Faccia,
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Odi
Il tuon della vendetta,
DON GIOVANNI
E un orribile tempesta minacciando, oh Dio, mi
Va.
LEPORELLO
E un orribile tempesta minacciando, oh Dio, lo
Va.
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Odi
Il tuon della vendetta,
Che ti fischia intorno intorno;
Sul tuo capo in questo giorno
Il suo fulmine cadrà, il suo fulmine cadrà.
DON GIOVANNI
È confusa...
LEPORELLO
È confusa...
MOZART DON GIOVANNI
154
DON GIOVANNI
Quel désordre dans ma tête je ne sais plus ce qu’il faut
Faire
LEPORELLO
Quel désordre dans sa tête il ne sait plus ce qu’il faut
Faire
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Entends
La voix de la vengeance,
DON GIOVANNI
C’est une horrible tempête qui me menace, oh mon
Dieu.
LEPORELLO
C’est une horrible tempête qui le menace, oh mon
Dieu.
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Entends
La voix de la vengeance
Qui siffle autour de toi ;
Sur ta tête aujourd’hui même,
Sa foudre frappera, sa foudre frappera.
DON GIOVANNI
Quel désordre...
LEPORELLO
Quel désordre...
155
PREMIER ACTE SCÈNE XX
DON GIOVANNI
... La mia testa,
LEPORELLO
... La sua
Testa,
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Trema!
DON GIOVANNI
Non so più
Quel ch’io mi faccia...
LEPORELLO
Non sa più quel ch’ei si...
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Trema!
DON GIOVANNI
E un orribile tempesta minacciando, oh
Dio, mi va.
LEPORELLO
... Faccia, e un orribile tempesta minacciando, oh
Dio, lo va.
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Trema,
Trema, trema, trema o scellerato!
MOZART DON GIOVANNI
156
DON GIOVANNI
... Dans ma tête,
LEPORELLO
... Dans sa
Tête,
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Tremble !
DON GIOVANNI
Je ne sais plus
Ce qu’il faut faire...
LEPORELLO
Il ne sait plus ce qu’il faut...
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Tremble !
DON GIOVANNI
C’est une horrible tempête qui me menace, oh
Dieu.
LEPORELLO
... Faire, c’est une horrible tempête qui le menace, oh
Dieu.
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Tremble,
Tremble, tremble, tremble, ô scélérat !
157
PREMIER ACTE SCÈNE XX
DON GIOVANNI
È confusa la mia testa, non so più quel ch’io mi
Faccia,
LEPORELLO
È confusa la sua testa, non sa più quel ch’ei si
Faccia,
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Odi
Il tuon della vendetta,
DON GIOVANNI
E un orribile tempesta minacciando, oh Dio, mi
Va.
LEPORELLO
E un orribile tempesta minacciando, oh Dio, lo
Va.
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Odi
Il tuon della vendetta,
Che ti fischia intorno intorno;
Sul tuo capo in questo giorno
Il suo fulmine cadrà, sì cadrà, il suo fulmine cadrà.
DON GIOVANNI
Ma non manca in me coraggio,
LEPORELLO
Ma non manca in lui coraggio,
MOZART DON GIOVANNI
158
DON GIOVANNI
Quel désordre dans ma tête je ne sais plus ce qu’il faut
Faire,
LEPORELLO
Quel désordre dans sa tête il ne sait plus ce qu’il faut
Faire,
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Entends
La voix de la vengeance,
DON GIOVANNI
C’est une horrible tempête qui me menace, oh
Dieu.
LEPORELLO
C’est une horrible tempête qui le menace, oh
Dieu.
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Entends
La voix de la vengeance,
Qui siffle autour de toi ;
Sur ta tête aujourd’hui même,
Sa foudre frappera, frappera, sa foudre frappera.
DON GIOVANNI
Je ne manque pas de courage,
LEPORELLO
Il ne manque pas de courage,
159
PREMIER ACTE SCÈNE XX
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Odi il tuon!
DON GIOVANNI
Non mi perdo o mi confondo,
LEPORELLO
Non si perde o si confonde,
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Odi il tuon!
DON GIOVANNI E LEPORELLO
Se cadesse...
DON GIOVANNI
... Ancor il mondo, cadesse ancor il mondo,
Nulla mai temer, temer mi fa,
...
Nulla mai temer mi fa, nulla mai temer mi fa.
LEPORELLO
... Ancor il mondo, cadesse ancor il mondo
Nulla mai temer, temer lo fa,
...
Nulla mai temer lo fa, nulla mai temer lo fa.
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Sul tuo capo in questo giorno
Il suo fulmine cadrà, il suo fulmine cadrà,
...
Il suo fulmine cadrà, il suo fulmine cadrà.
MOZART DON GIOVANNI
160
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Entends la voix !
DON GIOVANNI
Je ne me perds ni ne me trouble,
LEPORELLO
Il ne se perd ni ne se trouble,
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Entends la voix !
DON GIOVANNI & LEPORELLO
Même si s’effondrait...
DON GIOVANNI
... Le monde, même si le monde s’effondrait,
Je n’aurai jamais peur de rien,
...
Je n’aurai jamais peur de rien, peur de rien.
LEPORELLO
... Le monde, même si le monde s’effondrait,
Il n’aura jamais peur de rien,
...
Il n’aura jamais peur de rien, peur de rien.
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Sur ta tête aujourd’hui même,
Sa foudre frappera, sa foudre frappera.
...
Sa foudre frappera, sa foudre frappera.
161
PREMIER ACTE SCÈNE XX
ATTO SECONDO
SCENA I
Strada.
No 14. Duetto
DON GIOVANNI
Eh via, buffone, eh via buffone, non mi seccar!
LEPORELLO
No no, padrone, no no padrone, non vo’ restar
DON GIOVANNI
Sentimi, amico:
LEPORELLO
Vo’ andar, vi dico.
DON GIOVANNI
Ma che ti ho fatto, che vuoi lasciarmi?
LEPORELLO
O niente affatto! quasi ammazzarmi
162
SECOND ACTE
SCÈNE I
Rue.
No 14. Duo
DON GIOVANNI
Allons, drôle, allons, drôle, ne m’embête pas !
LEPORELLO
Non non, maître, non non maître, je ne resterai pas.
DON GIOVANNI
Écoute, mon ami :
LEPORELLO
Je veux partir je vous dis.
DON GIOVANNI
Mais que t’ai-je fait pour que tu veuilles me laisser ?
LEPORELLO
Oh rien en fait ! me tuer presque.
163
DON GIOVANNI
Va’ che sei matto! Va’ che sei matto,
Matto, matto! fu per burlar.
LEPORELLO
Ed io non burlo, ed io non burlo,
Burlo, burlo, ma voglio
Andar.
DON GIOVANNI
Eh
Via
Buffone, sentimi, amico, va’ che sei matto!
Va’ che sei matto! Va’ che sei matto!
Va che sei matto, matto, matto, matto!
LEPORELLO
No no padrone, vo’ andar, vi dico
No! no! no! no!
No no no no no no no no no no no
Non vo’ restar, no! non
Vo’restar, sì!
Sì! sì! sì! sì...
DON GIOVANNI
Va’ che sei matto! Va’ che sei matto!
Va’ che sei matto!
Va che sei matto, matto, matto, matto!
LEPORELLO
... Sì sì sì sì sì sì sì sì sì sì sì!
Voglio andar, sì! sì! voglio
Andar!
No no padrone, no no padrone,
Non vo’ restar.
Ed io non burlo, ed io non burlo,
MOZART DON GIOVANNI
164
DON GIOVANNI
Allons, tu es fou ! Allons, tu es fou,
Fou, fou ! C’était pour rire.
LEPORELLO
Et moi je ne ris pas, et moi je ne ris pas,
Je ne ris pas, mais je veux
M’en aller.
DON GIOVANNI
Eh
Allons
Drôle, écoute, mon ami, allons tu es fou !
Allons tu es fou ! Allons tu es fou !
Allons tu es fou, fou, fou, fou !
LEPORELLO
Non non maître, je ne resterai pas, je vous dis
Non ! non ! non ! non !
Non non non non non non non non non
Je ne resterai pas ! je
Ne resterai pas, oui !
Oui ! oui ! oui...
DON GIOVANNI
Allons tu es fou ! Allons tu es fou !
Allons tu es fou !
Allons tu es fou, fou, fou, fou !
LEPORELLO
... Oui oui oui oui oui oui !
Je veux m’en aller, oui ! je veux
M’en aller !
Non non maître, non non maître,
Je ne veux pas rester.
Et je ne ris pas, et je ne ris pas,
165
SECOND ACTE SCÈNE I
Ma voglio andar, ma voglio andar,
Ma voglio andar, ma voglio andar.
DON GIOVANNI
Eh via, buffone, buffone, non mi seccar!
Va’ che sei matto! va’ che sei matto!
Fu per burlar, fu per burlar
Fu per burlar, fu per burlar.
Leporello va per partire. Don Giovanni lo richiama.
Recitativo
DON GIOVANNI
Leporello.
LEPORELLO
Signore.
DON GIOVANNI
Vien qui, facciamo pace: prendi...
LEPORELLO
Cosa?
DON GIOVANNI (gli da del danaro)
Quattro doppie.
LEPORELLO
Oh! Sentite, per questa volta la cerimonia accetto: ma non
vi ci avvezzate; non credete di sedurre i miei pari, come le
donne, a forza di danari.
DON GIOVANNI
Non parliam più di ciò; ti basta l’animo di far quel ch’ i o
ti dico?
MOZART DON GIOVANNI
166
Mais je veux m’en aller,
Mais je veux m’en aller.
DON GIOVANNI
Allons, drôle, drôle, ne m’embête pas !
Allons tu es fou ! allons tu es fou !
C’était pour rire, c’était pour rire
C’était pour rire, c’était pour rire.
Leporello s’apprête à sortir. Don Giovanni le rappelle.
Récitatif
DON GIOVANNI
Leporello.
LEPORELLO
Seigneur.
DON GIOVANNI
Viens ici, faisons la paix : prends...
LEPORELLO
Quoi ?
DON GIOVANNI (lui donne de l’argent)
Quatre doublons.
LEPORELLO
Oh ! Écoutez, pour cette fois, j’accepte la bonne manière :
mais n’en faites pas une habitude ; ne croyez pas séduire
mes semblables comme les femmes : par l’argent.
DON GIOVANNI
Ne parlons plus de ça ; as-tu assez de cœur pour faire ce
que je te dis ?
167
SECOND ACTE SCÈNE I
LEPORELLO
Purchè lasciam le donne.
DON GIOVANNI
Lasciar le donne? pazzo! lasciar le donne! Sai ch’elle per
me son necessarie più del pan che mangio, più dell’aria
che spiro!
LEPORELLO
E avete core d’ingannarle poi tutte?
DON GIOVANNI
È tutto amore. Chi a una sola è fedele verso l’altre è cru-
dele; io, che in me sento sì esteso sentimento, vo’ bene a
tutte quante: le donne poiche calcolar non sanno, il mio
buon natural chiamano inganno.
LEPORELLO
Non ho veduto mai naturale più vasto, e più benigno. Orsù,
cosa vorreste?
DON GIOVANNI
Odi, vedesti tu la cameriera di Donna Elvira?
LEPORELLO
Io no.
DON GIOVANNI
Non hai veduto qualche cosa di bello, caro il mio
Leporello: ora io con lei vo’ tentar la mia sorte; ed ho pen-
sato, giacche siam verso sera, per aguzzarle meglio l’appe-
tito, di presentarmi a lei col tuo vestito.
LEPORELLO
E perché non potreste presentarvi col vostro?
MOZART DON GIOVANNI
168
LEPORELLO
Si nous laissons les dames.
DON GIOVANNI
Laisser les dames ? fou ! laisser les dames ! Sache qu’elles
me sont plus nécessaires que le pain que je mange, que
l’air que je respire !
LEPORELLO
Et vous avez le cœur de les tromper toutes ?
DON GIOVANNI
C’est par amour. Qui est fidèle à une seule est cruel pour
les autres ; je sens en moi un sentiment si vaste que je
veux les aimer toutes ; mon bon naturel, les femmes qui ne
savent pas penser l’appellent tromperie.
LEPORELLO
Je n’ai jamais vu naturel plus large et plus bienveillant.
Alors, que voulez-vous ?
DON GIOVANNI
Écoute, as-tu vu la camériste de Donna Elvira ?
LEPORELLO
Moi, non.
DON GIOVANNI
Tu n’as jamais vu une telle beauté, mon cher Leporello :
aujourd’hui je veux tenter ma chance avec elle ; et pour
mieux lui aiguiser l’appétit, comme c’est le soir, j’ai pensé
me présenter à elle avec tes vêtements.
LEPORELLO
Et pourquoi pas vous présenter avec les vôtres ?
169
SECOND ACTE SCÈNE I
DON GIOVANNI
Han poco credito con genti di tal rango gli abiti signorili:
(si cava il proprio abito e si mette quello di Leporello)
Sbrigati... via...
LEPORELLO
Signor... per più ragioni...
DON GIOVANNI (con collera)
Finiscila, non soffro opposizioni!
Leporello si mette l’abito di Don Giovanni.
SCENA II
Si fa notte a poco a poco.
No 15.. Terzetto
DONNA ELVIRA (alla finestra)
Ah taci, ingiusto core,
Non palpitarmi in seno;
È un empio, è un traditore,
È colpa aver pietà, è colpa aver pietà.
LEPORELLO
Zitto! di Donna Elvira, signor, la voce io sento!
DON GIOVANNI
Cogliere io vo’ il momento; tu fermati un po’ là!
(Si mette dietro Leporello e parla a Donna Elvira.)
Elvira, idolo mio... Elvira, idolo mio...
DONNA ELVIRA
Non è costui l’ingrato?
MOZART DON GIOVANNI
170
DON GIOVANNI
Les vêtements de seigneur ont peu de crédit auprès de ces
gens : (il enlève son habit et met celui de Leporello) Dé-
pêche-toi... allons...
LEPORELLO
Seigneur... pour plusieurs raisons...
DON GIOVANNI (avec colère)
Finissons-en, je ne tolère aucune objection !
Leporello revêt l’habit de Don Giovanni.
SCÈNE II
La nuit se fait peu à peu.
No 15. Trio
DONNA ELVIRA (à la fenêtre)
Ah silence, cœur injuste,
Ne palpite pas en mon sein,
C’est un impie, c’est un traître,
C’est une faute d’avoir pitié, c’est une faute d’avoir pitié.
LEPORELLO
Chut ! seigneur, j’entends la voix de Donna Elvira !
DON GIOVANNI
Je vais saisir l’instant ; toi, reste un peu là !
(Se place derrière Leporello et s’adresse à Donna Elvira.)
Elvira, mon amour... Elvira, mon amour...
DONNA ELVIRA
Serait-ce l’ingrat ?
171
SECOND ACTE SCÈNE II
DON GIOVANNI
Si, vita mia, son io, e chiedo
Carità.
DONNA ELVIRA
Numi,
Che strano
Affetto...
LEPORELLO
State a
veder la
Pazza, che ancor gli crederà, gli crederà, gli crederà!
DONNA ELVIRA
Mi si risveglia in petto, mi si risveglia in petto!
DON GIOVANNI
Discendi, o gioia bella, o gioia bella:
Vedrai che tu sei quella che adora l’alma mia;
Pentito io sono
Già.
DONNA ELVIRA
No,
Non ti credo, o barbaro!
No, non...
DON GIOVANNI
Ah credimi,
Donna Elvira
... Ti credo, o barbaro!
DON GIOVANNI
Ah
MOZART DON GIOVANNI
172
DON GIOVANNI
Oui, ma vie, c’est moi, et je demande
Pardon.
DONNA ELVIRA
Dieu,
Quel étrange
Émoi...
LEPORELLO
Vous allez
Voir que la
Folle va encore le croire, le croire, le croire !
DONNA ELVIRA
Se réveille en mon cœur, se réveille en mon cœur !
DON GIOVANNI
Descends, ô ma belle, ô ma belle :
Tu verras que tu es celle que mon âme adore ;
Plein de remords je suis
Déjà.
DONNA ELVIRA
Non,
Je ne te crois pas, ô cruel !
Non, je ne...
DON GIOVANNI
Ah crois-moi,
DONNA ELVIRA
... Te crois pas ; ô cruel !
DON GIOVANNI
Ah
173
SECOND ACTE SCÈNE II
Credimi!
DONNA ELVIRA
No, non
Ti credo, o barbaro!
DON GIOVANNI
Ah credimi,
DONNA ELVIRA
Non ti credo!
DON GIOVANNU (con trasporto e quasi piangendo)
O m’uccido!
LEPORELLO (piano a Don Giovanni)
Se seguitate, io rido!
DON GIOVANNI
Io m’uccide
LEPORELLO
Se seguitate, io rido!
DON GIOVANNI
Ah m’uccido!
LEPORELLO
Se seguitate, io rido, rido, rido,
Rido, rido, rido, rido, rido, rido, rido.
DON GIOVANNI
Idolo mio, vien qua!
DONNA ELVIRA (a parte)
Dei, che cimento è questo!
MOZART DON GIOVANNI
174
Crois-moi !
DONNA ELVIRA
Non, je ne
Te crois pas, ô cruel !
DON GIOVANNI
Ah, crois-moi,
DONNA ELVIRA
Je ne te crois pas !
DON GIOVANNI (avec passion et pleurant presque)
Ou je me tue !
LEPORELLO (bas à Don Giovanni)
Si vous continuez, moi je ris !
DON GIOVANNI
Je me tue
LEPORELLO
Si vous continuez, moi je ris !
DON GIOVANNI
Ah je me tue !
LEPORELLO
Si vous continuez, moi je ris, je ris, je ris,
Je ris, je ris, je ris, je ris, je ris, je ris.
DON GIOVANNI
Mon amour, viens là !
DONNA ELVIRA (à part)
Dieux, quelle épreuve !
175
SECOND ACTE SCÈNE II
Non so s’io vado o resto;
Ah proteggete voi
La mia credulità, credulità.
DON GIOVANNI (a parte)
Spero che cada presto!
Che bel colpetto è questo;
Più fertile talento
Del mio no, non si dà.
Più fertile talento, no, del mio non si dà!
LEPORELLO (a parte)
Già quel mendace labbro!
Torna a sedur costei;
Deh proteggete, oh Dei,
La sua credulità, credulità.
DONNA ELVIRA
Dei! che cimento è questo!
Dei! che cimento è questo!
DON GIOVANNI
Spero che cada presto!
DONNA ELVIRA
Non
So s’io vado! Non so s’io resto!
Dei! che cimento è questo!
Non so s’io vado, o resto;
Ah proteggete voi la mia credulità, credulità,
DON GIOVANNI
Che bel colpetto è questo!
Che bel colpetto!
Spero che cada presto!
MOZART DON GIOVANNI
176
Partir ou rester, je ne sais ;
Ah protégez-moi
De ma crédulité.
DON GIOVANNI (à part)
Pourvu qu’elle tombe vite !
Quel beau coup ;
Talent plus ingénieux
Que le mien, non, il n’y en a pas.
Talent plus ingénieux que le mien, non il n’y en a pas !
LEPORELLO (à part)
Déjà son discours menteur
À nouveau la séduit ;
De grâce, protégez-la, oh dieux,
De sa crédulité.
DONNA ELVIRA
Dieux ! quelle épreuve !
Dieux ! quelle épreuve !
DON GIOVANNI
Pourvu qu’elle tombe vite !
DONNA ELVIRA
Je ne sais
S’il faut partir ! Je ne sais s’il faut rester !
Dieux ! quelle épreuve !
Je ne sais s’il faut partir ou rester ;
Ah protégez-moi de ma crédulité,
DON GIOVANNI
Quel beau coup que celui-ci !
Quel beau coup !
Pourvu qu’elle tombe vite !
177
SECOND ACTE SCÈNE II
Che bel colpetto è questo!
Piu fertile talento del mio no, non si da,
Più fertile talento, no, del mio, non si da,
LEPORELLO
Già quel mendace labbro
Torna a sedur costei!
Già quel mendace labbro
Torna a sedur costei;
Deh proteggete, oh Dei,
La sua credulità, credulità,
DONNA ELVIRA
La mia
Credulità,
DON GIOVANNI
No, non si da,
LEPORELLO
Credulità,
DONNA ELVIRA
La mia
Credulità.
DON GIOVANNI
No, non si da.
LEPORELLO
Credulità.
Donna Elvira parte dalla finestra.
MOZART DON GIOVANNI
178
Quel beau coup que celui-ci !
Talent plus ingénieux que le mien, non il n’y en a pas !
Talent plus ingénieux que le mien, non il n’y en a pas !
LEPORELLO
Déjà son discours menteur
À nouveau la séduit !
Déjà son discours menteur
À nouveau la séduit ;
De grâce, protégez-la, oh dieux,
De sa crédulité.
DONNA ELVIRA
De ma
Crédulité,
DON GIOVANNI
Non, il n’y en a pas,
LEPORELLO
De sa crédulité,
DONNA ELVIRA
De ma
Crédulité
DON GIOVANNI
Non, il n’y en a pas.
LEPORELLO
De sa crédulité.
Donna Elvira quitte la fenêtre.
179
SECOND ACTE SCÈNE II
Recitativo
DON GIOVANNI (allegrissimo)
Amico, che ti par?
LEPORELLO
Mi par che abbiate un’anima di bronzo.
DON GIOVANNI
Va là, che sei il gran gonzo! Ascolta bene: quando costei
qui viene, tu corri ad abbracciarla, falle quattro carezze,
fingi la voce mia, poi con bell’arte cerca teco condurla in
altra parte.
LEPORELLO
Ma, Signore...
DON GIOVANNI (mette presso il naso una pistola a Leporello)
Non più repliche!
LEPORELLO
Ma se poi mi conosce?
DON GIOVANNI
Non ti conoscerà, se tu non vuoi... Zitto, ell’apre: ehi giudizio.
(Va in disparte.)
SCENA III
DONNA ELVIRA
Eccomi a voi!
DON GIOVANNI (a parte)
Veggiamo che farà.
MOZART DON GIOVANNI
180
Récitatif
DON GIOVANNI (très joyeux)
Mon ami qu’en penses-tu ?
LEPORELLO
Je pense que vous avez une âme de bronze.
DON GIOVANNI
Va donc, tu es un grand sot! Écoute bien : quand elle arri-
vera, tu cours l’embrasser, caresse-la un peu, imite ma
voix, puis, avec art, essaye de l’emmener avec toi, ailleurs.
LEPORELLO
Mais, seigneur...
DON GIOVANNI (lui mettant un pistolet sous le nez)
Pas d’objection !
LEPORELLO
Mais si elle me reconnaît ?
DON GIOVANNI
Elle ne te reconnaîtra pas, si tu ne le veux pas... Chut, elle
ouvre : eh prudence.
(Il se met à l’écart.)
SCÈNE III
DONNA ELVIRA
Me voici à vous !
DON GIOVANNI (à part)
Voyons ce qu’il va faire.
181
SECOND ACTE SCÈNE III
LEPORELLO (a parte)
Che imbroglio!
DONNA ELVIRA
Dunque creder potrò che i pianti miei abbian vinto quel
cor? Dunque pentito l’amato Don Giovanni al suo dovere e
all’amor mio ritorna...
LEPORELLO
Sì, carina!
DONNA ELVIRA
Crudele! se sapeste, quante lagrime, e quanti sospir voi mi
costaste!
LEPORELLO
Io, vita mia?
DONNA ELVIRA
Voi.
LEPORELLO
Poverina! quanto mi dispiace!
DONNA ELVIRA
Mi fuggirete più?
LEPORELLO
No, muso bello.
DONNA ELVIRA
Sarete sempre mio?
LEPORELLO
Sempre.
MOZART DON GIOVANNI
182
LEPORELLO (à part)
Quelle embrouille !
DONNA ELVIRA
Ainsi je pourrais croire que mes pleurs ont vaincu ce
cœur ? Ainsi repentant, Don Giovanni, l’aimé, revient à
son devoir et à mon amour...
LEPORELLO
Oui, chérie !
DONNA ELVIRA
Cruel ! si vous saviez combien de larmes et de soupirs
vous m’avez coûté !
LEPORELLO
Moi, mon amour ?
DONNA ELVIRA
Vous.
LEPORELLO
Pauvrette ! combien je regrette !
DONNA ELVIRA
Vous ne fuirez plus ?
LEPORELLO
Non, beau masque.
DONNA ELVIRA
Vous serez toujours à moi ?
LEPORELLO
Toujours.
183
SECOND ACTE SCÈNE III
DONNA ELVIRA
Carissimo!
LEPORELLO
Carissima! (A parte) La burla mi dà gusto.
DONNA ELVIRA
Mio tesoro!
LEPORELLO
Mia Venere!
DONNA ELVIRA
Son per voi tutta foco.
LEPORELLO
Io tutto cenere.
DON GIOVANNI (a parte)
Il birbo si riscalda.
DONNA ELVIRA
E non m’ingannerete?
LEPORELLO
No, sicuro.
DONNA ELVIRA
Giuratemi.
LEPORELLO
Lo giuro a questa mano che bacio con trasporto... e a que’
bei lumi...
DO N GI OVA N N I (finge di uccider qualcheduno colla spada alla mano)
Ih, Eh, Ih, Ah sei morto!
MOZART DON GIOVANNI
184
DONNA ELVIRA
Mon adoré !
LEPORELLO
Mon adorée ! (À part) Je prends goût à la farce.
DONNA ELVIRA
Mon trésor !
LEPORELLO
Ma Vénus !
DONNA ELVIRA
Pour vous, je suis toute flamme.
LEPORELLO
Et moi toute cendre.
DON GIOVANNI (à part)
Le coquin s’échauffe.
DONNA ELVIRA
Et vous ne me tromperez pas ?
LEPORELLO
Non, bien sûr.
DONNA ELVIRA
Jurez-moi.
LEPORELLO
Je le jure sur cette main que je baise avec passion... et sur
ces beaux yeux...
DON GIOVANNI (feint de tuer quelqu’un avec son épée)
Oh, eh, oh, ah tu es mort !
185
SECOND ACTE SCÈNE III
DONNA ELVIRA (fugge con Leporello)
Oh Numi!
LEPORELLO
Oh Numi!
DON GIOVANNI
Ih, Eh, Ih, Eh, Ih, Ah! Purché la sorte mi secondi: veggia-
mo... le finestre son queste: ora cantiamo.
No 16. Canzonetta
DON GIOVANNI
Deh, vieni alla finestra, o mio tesoro,
Deh, vieni a consolar il pianto mio:
Se neghi a me di dar qualche ristoro,
Davanti agli occhi tuoi morir vogl’io.
Tu ch’hai la bocca dolce più che il miele,
Tu che il zucchero porti in mezzo al core,
Non esser, gioia mia, con me crudele:
Lasciati almen veder, mio bell’amore.
Recitativo
DON GIOVANNI
V’è gente alla finestra! Sarà dessa: zi, zi!
SCENA IV
MASETTO (armato d’archibuso e pistola ai contadini)
Non ci stanchiamo; il cor mi dice che trovarlo dobbiam!
DON GIOVANNI (a parte)
Qualcuno parla.
MOZART DON GIOVANNI
186
DONNA ELVIRA (fuit avec Leporello)
Oh dieux !
LEPORELLO
Oh dieux !
DON GIOVANNI
Oh, eh, oh, eh, ah ! C’est que le sort me sourit : voyons...
voici les fenêtres : maintenant chantons.
No 16. Canzonetta
DON GIOVANNI
De grâce, viens à la fenêtre, ô mon trésor,
De grâce, viens apaiser mes soupirs,
Si tu me refuses ton réconfort,
Sous tes yeux, je veux mourir.
Toi dont la bouche est plus douce que le miel
Toi dont le cœur est empli de douceur,
Ne sois pas, ma joie, cruelle avec moi :
Au moins, montre-toi, mon bel amour.
Récitatif
DON GIOVANNI
Il y a du monde à la fenêtre ! Elle, sans doute : pst, pst !
SCÈNE IV
MASETTO (armé d’un mousquet et d’un pistolet, aux paysans)
Poursuivons ; mon cœur me dit que nous le trouverons !
DON GIOVANNI (à part)
Quelqu’un parle.
187
SECOND ACTE SCÈNE IV
MASETTO
Fermatevi: mi pare che alcuno qui si muova!
DON GIOVANNI (piano, a parte)
Se non fallo è Masetto!
MASETTO (forte)
Chi va là? Non risponde: animo; schioppo al muso!
(Più forte) Chi va là?
DON GIOVANNI (a parte)
Non è solo: ci vuol giudizio!
(Cerca d’imitar la voce di Leporello.)
Amici... (A parte) Non mi voglio scoprir.
Sei tu, Masetto?
MASETTO (in collera)
Appunto quello! e tu?
DON GIOVANNI
Non mi conosci? Il servo son io di Don Giovanni.
MASETTO
Leporello! servo di quell’ indegno cavaliere!
DON GIOVANNI
Certo, i quel briccone...
MASETTO
Dì, quell’uom senza onore... Ah dimmi un poco dove pos-
siam trovarlo: lo cerco con costor per trucidarlo.
DON GIOVANNI
(A parte) Bagattelle!
MOZART DON GIOVANNI
188
MASETTO
Arrêtez-vous : je crois que quelqu’un bouge !
DON GIOVANNI (bas, à part)
Si je ne me trompe, c’est Masetto !
MASETTO (d’une voix forte)
Qui va là ? Pas de réponse : allons ; en joue !
(Plus fort) Qui va là ?
DON GIOVANNI (à part)
Il n’est pas seul : soyons prudent !
(Cherchant à imiter la voix de Leporello.)
Mes amis... (À part) Je ne veux pas me découvrir.
C’est toi, Masetto ?
MASETTO (en colère)
En personne ! et toi ?
DON GIOVANNI
Tu ne me reconnais pas ? Je suis le valet de Don Giovanni.
MASETTO
Leporello ! valet de cet indigne chevalier !
DON GIOVANNI
Oui, de ce brigand...
MASETTO
Dis, cet homme sans honneur... Ah dis-moi un peu où
nous pouvons le trouver : je le recherche avec ceux- l à
pour le tuer.
DON GIOVANNI
(À part) Une bagatelle !
189
SECOND ACTE SCÈNE IV
Bravissimo, Masetto! anch’io con voi m’unisco per farglie-
la a quel birbo di padrone: or senti un po’ qual è la mia
intenzione.
No 17. Aria
DON GIOVANNI (accennando a destra)
Metà di voi qua vadano, e gli altri vadan là,
E pian pianin lo cerchino, lontan non fia di qua,
No, lontan, lontan non fia di qua.
Se un uom e una ragazza passeggian per la piazza,
Se sotto a una finestra fare all’amor sentite:
Ferite pur, ferite, ferite pur, ferite, iI mio padron sarà.
In testa egli ha un cappello con candidi pennacchi,
Addosso un gran mantello, e spada al fianco egli ha,
E spada al fianco egli ha, e spada al fianco egli ha,
E spada al fianco egli ha, e spada al fianco egli ha.
Se un uom e una ragazza passeggian per la piazza,
Se sotto a una finestra fare all’amor sentite:
Ferite, ferite, ferite pur, ferite, ferite pur, ferite, ferite!
II mio padron sarà.
Metà di voi qua vadano, e gli altri vadan là,
E pian pianin lo cerchino, lontan non fia di qua,
No, lontan, lontan non fia di qua, no,
Lontan, lontan non fia di qua.
Andate, fate presto, andate, fate presto, fate presto,
Fate presto, presto, presto, presto, presto!
(I contadini partono. A Masetto)
Tu sol verrai con me, verrai con me, verrai con me.
Noi far dobbiamo il resto, e già vedrai cos’è, cos’è, cos’è.
Noi far dobbiamo il resto, e già vedrai cos’è, cos’è, cos’è,
E già vedrai cos’è, cos’è, cos’è, e già vedrai cos’è,
E già vedrai cos’è, e già vedrai cos’è, e già vedrai cos’è.
(Prende seco Masetto e parte.)
MOZART DON GIOVANNI
190
Bravissimo, Masetto ! moi aussi, je me joins à vous, pour
faire la peau à ce coquin de maître : écoute un peu main-
tenant quel est mon plan.
No 17. Air
DON GIOVANNI (montrant la droite)
Moitié d’entre vous va par ici, et les autres par là,
Et doux, tout doux, cherchez-le, il ne peut être loin,
Non, il ne peut, il ne peut être loin.
Si un homme et une fille se promènent sur la place,
Si, sous une fenêtre, vous entendez roucouler :
Frappez donc, frappez, frappez donc, ce sera mon maître.
Il porte un chapeau avec des plumes blanches,
Il a sur le dos une grande cape, une épée au côté,
Une épée au côté, au côté, une épée,
Une épée au côté, au côté, une épée.
Si un homme et une fille se promènent sur la place,
Si, sous une fenêtre, vous entendez roucouler :
Frappez, frappez, frappez donc, frappez, frappez !
Ce sera mon maître.
Moitié d’entre vous va par ici, et les autres par là,
Et doux, tout doux, cherchez-le, il ne peut être loin,
Non, il ne peut, il ne peut être loin, non,
Il ne peut, il ne peut être loin.
Allez, faites vite, allez, faites vite, faites vite,
Faites vite, vite, vite, vite, vite !
(Les paysans sortent. À Masetto)
Toi, tu viens avec moi, avec moi, avec moi.
Nous devons faire le reste, bientôt tu verras quoi, quoi,
Nous devons faire le reste, bientôt tu verras quoi, quoi,
Bientôt tu verras quoi, quoi, bientôt tu verras quoi,
Bientôt tu verras quoi, bientôt tu verras quoi.
(Il sort, emmenant Masetto.)
191
SECOND ACTE SCÈNE IV
SCENA V
Ritorna in scena Don Giovanni conducendo seco Masetto
per la mano.
Recitativo
DON GIOVANNI
Zitto! lascia ch’io senta: ottimamente; dunque dobbiam
ucciderlo!
MASETTO
Sicuro.
DON GIOVANNI
E non ti basteria rompergli l’ossa... fracassargli le spalle...
MASETTO
No no, voglio ammazzarlo; vo’ farlo in cento brani...
DON GIOVANNI
Hai buon’ arme?
MASETTO
Cospetto! ho pria questo moschetto;
(Da il moschetto e la pistola a Don Giovanni.)
E poi questa pistola...
DON GIOVANNI
E poi?
MASETTO
Non basta?
MOZART DON GIOVANNI
192
SCÈNE V
Don Giovanni rentre en scène, conduisant Masetto
par la main.
Récitatif
DON GIOVANNI
Chut ! laisse-moi écouter : très bien ; donc nous devons le
tuer !
MASETTO
Bien sûr.
DON GIOVANNI
Et ça ne te suffirait pas de lui rompre les os... lui fracas-
ser les épaules... ...
MASETTO
Non non, je veux le tuer ; je veux le déchirer en mille
m o r c e a u x . . .
DON GIOVANNI
Tu es bien armé ?
MASETTO
Dame ! d’abord j’ai ce mousquet ;
(Il donne le mousquet et le pistolet à Don Giovanni.)
Et puis ce pistolet...
DON GIOVANNI
Et puis ?
MASETTO
Ça ne suffit pas ?
193
SECOND ACTE SCÈNE V
DON GIOVANNI
Oh basta certo! Or prendi:
(Batte col rovescio della spada Masetto.)
Questa per la pistola... questa per il moschetto...
MASETTO
Ahi! chi soccorso! ahi!
DON GIOVANNI
Taci, o sei morto!
(Minacciandolo colle armi alla mano)
Questa per ammazzarlo... questi per farlo in brani...
Villano, mascalzon, ceffo da cani!
(Parte.)
SCENA VI
MASETTO (gridando forte)
Ahi ahi! la testa mia! ahi ahi! le spalle, e il petto!
ZERLINA (con lanterna)
Di sentire mi parve la voce di Masetto.
MASETTO
O Dio! Zerlina, Zerlina mia! soccorso!
ZERLINA
Cosa è stato?
MASETTO
L’iniquo! il scellerato mi ruppe l’ossa e i nervi!
ZERLINA
Oh poveretta me! chi?
MOZART DON GIOVANNI
194
DON GIOVANNI
Oh bien sûr, ça suffit ! Maintenant prends ça :
(Il bat Masetto avec le plat de l’épée.)
Celle-là pour le pistolet... celle-là pour le mousquet...
MASETTO
Aïe ! au secours ! aïe !
DON GIOVANNI
Tais-toi ou tu es mort !
(Le menaçant, les armes à la main)
Celle-là pour le tuer... celle-là pour les mille morceaux...
Malotru, salaud, tête de chien !
(Il sort.)
SCÈNE VI
MASETTO (avec de grands cris)
Aïe aïe ! ma tête ! Aïe aïe ! mes épaules, et ma poitrine !
ZERLINA (avec une lanterne)
J’ai cru entendre la voix de Masetto.
MASETTO
Ô Dieu ! Zerlina, ma Zerlina ! à l’aide !
ZERLINA
Que s’est-il passé ?
MASETTO
Le mauvais ! le scélérat m’a cassé les os et les nerfs !
ZERLINA
Oh pauvre de moi ! qui ?
195
SECOND ACTE SCÈNE VI
MASETTO
Leporello! o qualche diavol che somiglia a lui.
ZERLINA
Crudel! non tel diss’io che con questa tua pazza gelosia ti
ridurresti a qualche brutto passo? Dove ti duole?
MASETTO
Qui.
ZERLINA
E poi?
MASETTO
Qui... e ancora... qui...
ZERLINA
E poi non ti duol altro?
MASETTO
Duolmi un poco questo piè’, questo braccio, e questa mano.
ZERLINA
Via, via, non è gran mal, se il resto è sano. Vientene meco
a casa; purché tu mi prometta d’essere men geloso, io, io
ti guarirò, caro il mio sposo.
No 18. Aria
ZERLINA
Vedrai, carino, se sei buonino,
Che bel rimedio ti voglio dar.
È naturale, non dà disgusto, e lo speziale non lo sa far, no
Non lo sa far, no, non lo sa far.
MOZART DON GIOVANNI
196
MASETTO
Leporello ! ou quelque démon qui lui ressemble.
ZERLINA
Cruel ! je ne t’avais pas dit qu’avec ta folle jalousie tu te
mettrais dans un mauvais pas ? Où as-tu mal ?
MASETTO
Ici.
ZERLINA
Et puis ?
MASETTO
Ici... et encore... ici...
ZERLINA
Et tu n’as pas mal ailleurs ?
MASETTO
Ce pied me fait un peu mal, ce bras et cette main.
ZERLINA
Va, va, ce n’est pas grand mal si le reste n’a rien. Viens
chez moi ; moi, je te guérirai, mon cher époux, pourvu que
tu me promettes d’être moins jaloux.
No 18. Air
ZERLINA
Tu verras, amour, si tu es sage,
Le beau remède que je te donnerai.
Il est naturel, ne donne pas la nausée, le pharmacien ne
sait pas le faire, non,
Ne sait pas le faire, ne sait pas le faire.
197
SECOND ACTE SCÈNE VI
È un certo balsamo che porto addosso:
Dare te’l posso, se’l vuoi provar.
Saper vorresti dove mi sta,
Dove, dove, dove mi sta?
Sentilo battere,
(Facendogli toccar il core)
Toccami qua. Sentilo battere, sentilo battere, toccami qua.
Sentilo battere, sentilo battere, sentilo battere,
Toccami qua, qua, qua.
Sentilo battere, toccami qua, qua,
Toccami qua, qua, toccami qua, qua, toccami qua.
(Parte con Masetto.)
SCENA VII
Atrio terreno oscuro con tre porte in casa di Donna Anna.
LEPORELLO
Di molte faci il lume s’avvicina, o mio ben: stiamci qui
ascosi, fin che da noi si scosta.
DONNA ELVIRA
Ma che temi, adorato mio sposo?
LEPORELLO
Nulla, nulla... certi riguardi... io vo’ veder se il lume è già
lontano... (A parte) Ah, come da costei liberarmi!
Rimanti, anima bella...
(S’allontana.)
DONNA ELVIRA
Ah! non lasciarmi!
No 19. Sestetto.
MOZART DON GIOVANNI
198
C’est un certain baume que j’ai sur moi :
Je peux t’en donner si tu veux l’essayer.
Sais-tu où je l’ai,
Où, où, où je l’ai ?
(Elle lui fait toucher son cœur.)
To u c h e-moi, là. Sens-le battre, sens-le battre, touche-moi là.
Sens-le battre, sens-le battre, sens-le battre,
Touche-moi là, là, là.
Sens-le battre, touche-moi là, là,
Touche-moi là, là, Touche-moi là, là, touche-moi là.
(Elle sort avec Masetto.)
SCÈNE VII
Vestibule sombre avec trois portes chez Donna Anna.
LEPORELLO
De nombreux flambeaux s’approchent, mon amour :
cachons-nous ici jusqu’à ce qu’ils s’éloignent.
DONNA ELVIRA
Mais de quoi as-tu peur, mon époux adoré ?
LEPORELLO
De rien, de rien... certains regards... je vais voir si la
lumière s’est éloignée... (À part) Ah, comment me débar-
rasser d’elle !
Reste là, mon cœur...
(Il s’éloigne.)
DONNA ELVIRA
Ah ! ne m’abandonne pas !
No 19. Sextuor.
199
SECOND ACTE SCÈNE VII
DONNA ELVIRA
Sola sola in buio loco, palpitar il cor io sento,
E m’assale un tal spavento, che mi sembra di morir,
Che mi sembra di morir.
LEPORELLO (andando a tentone)
Più che cerco, men ritrovo
Questa porta, questa porta sciagurata!
Piano piano: l’ho trovata, l’ho trovata,
Ecco il tempo di fuggir, ecco il tempo di fuggir,
Ecco il tempo, ecco il tempo, ecco il tempo di fuggir.
(Sbaglia la porta.)
Donna Anna e Don Ottavio entrano vestiti a lutto.
DON OTTAVIO
Tergi il ciglio, o vita mia, e da’ calma a tuo dolore:
L’ombra omai del genitore pena avrà de’ tuoi martir, de’ tuoi
Martir.
DONNA ANNA
Lascia,
Lascia alla mia pena questo picciolo ristoro,
Sol la morte, sol la morte, o mio tesoro,
II mio pianto può finir, il mio pianto può finir.
DONNA ELVIRA (senza esser vista)
Ah dov’è lo sposo mio?
LEPORELLO (dalla porta, senza esser visto)
Se mi trova son perduto!
DONNA ELVIRA
Una porta là vegg’io,
Cheta cheta vo’ partir,
Cheta cheta vo’ partir.
MOZART DON GIOVANNI
200
DONNA ELVIRA
Seule, seule en ce lieu obscur, je sens mon cœur palpiter,
Et un tel effroi m’assaille, qu’il me semble que je meure,
Qu’il me semble que je meure.
LEPORELLO (avançant à tâtons)
Plus je cherche, moins je retrouve
Cette porte, cette maudite porte !
Doucement, doucement, je l’ai trouvée,
Voici le moment de fuir, le moment de fuir,
Voici le moment, voici le moment de fuir.
(Il se trompe de porte.)
Donna Anna et Don Ottavio entrent en habits de deuil.
DON OTTAVIO
Sèche tes yeux, ô ma vie, et calme ta douleur ;
L’ombre même de ton père souffrira de ton martyre, de ton
Martyre.
DONNA ANNA
Laisse,
Laisse à ma peine ce pauvre réconfort,
La mort seule, la mort seule, ô mon trésor,
Pourra sécher mes pleurs, pourra sécher mes pleurs.
DONNA ELVIRA (sans être vue)
Ah où est mon époux ?
LEPORELLO (à la porte, sans être vu)
Si on me trouve je suis perdu !
DONNA ELVIRA
Je vois là une porte,
Tout doucement je vais partir,
Tout doucement je vais partir.
201
SECOND ACTE SCÈNE VII
LEPORELLO
Una porta là vegg’io,
Cheto cheto, vo’ partir,
Cheto cheto cheto cheto cheto cheto vo’ partir.
Nel sortire s’incontranno in Zerlina e Masetto.
Leporello s’asconde la faccia.
SCENA VIII
ZERLINA E MASETTO
Ferma, briccone, dove ten vai?
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
Ecco il fellone!... Com’era qua?
DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO E MASETTO
Ah mora il perfido che m’ha tradito, che m’ha tradito!
DONNA ELVIRA
È mio marito! pietà, pietà, pietà, !
DONNA ANNA
È Donna Elvira,
ZERLINA
È Donna Elvira?
DON OTTAVIO, DONNA ANNA, ZERLINA E MASETTO
È Donna Elvira, Donna Elvira, è Donna Elvira
Quella ch’io vedo?Appena il credo!
Quella ch’io vedo? Appena il credo!
DONNA ELVIRA
Pietà, pietà!
MOZART DON GIOVANNI
202
LEPORELLO
Je vois là une porte,
Tout doucement je vais partir,
Tout doucement, tout doucement je vais partir.
En sortant, ils tombent nez à nez avec Zerlina et Masetto.
Leporello cache son visage.
SCÈNE VIII
ZERLINA ET MASETTO
Arrête, brigand, où vas-tu ?
DONNA ANNA ET DON OTTAVIO
Voici le traître !... Comment était-il là ?
DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO & MASETTO
Ah que meure le perfide qui m’a trahi(e), qui m’a trahi(e).
DONNA ELVIRA
C’est mon mari ! pitié, pitié, pitié !
DONNA ANNA
C’est Donna Elvira,
ZERLINA
C’est Donna Elvira ?
DON OTTAVIO, DONNA ANNA, ZERLINA & MASETTO
C’est Donna Elvira, Donna Elvira, c’est Donna Elvira,
Elle que je vois ? J’ai du mal à le croire !
Elle que je vois ? J’ai du mal à le croire !
DONNA ELVIRA
Pitié, pitié !
203
SECOND ACTE SCÈNE VIII
DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO E MASETTO
No, no, no, no! Morrà!
DONNA ELVIRA
Pietà!
DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO E MASETTO
No!
DONNA ELVIRA
Pietà!
DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO E MASETTO
No!
DONNA ELVIRA
Pietà!
DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO (in atto di ucciderlo)
E MASETTO
No, no, no, no! Morrà!
LEPORELLO (quasi piangendo)
Perdon, perdono,
(Si scopre e si mette in ginocchio davanti gli altri.)
Signori miei, quello io non sono, sbaglia costei;
Viver lasciatemi per carità,
Viver lasciatemi per carità, per carità, per carità!
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Dei! Leporello! Che inganno è questo!
Leporello! Che inganno è questo!
Stupida resto... Che mai sarà!
MOZART DON GIOVANNI
204
DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO & MASETTO
Non, non, non, non ! Qu’il meure !
DONNA ELVIRA
Pitié !
DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO & MASETTO
Non !
DONNA ELVIRA
Pitié!
DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO & MASETTO
Non !
DONNA ELVIRA
Pitié !
DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO (sur le point de le tuer)
& MASETTO
Non, non, non, non ! Qu’il meure !
LEPORELLO (pleurant presque)
Pardon, pardon,
(Il se découvre et s’agenouille devant les autres.)
Mes seigneurs, je ne suis pas celui-là, elle se trompe ;
Laissez-moi la vie, par pitié,
Laissez-moi la vie, par pitié, par pitié, par pitié !
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Dieux ! Leporello ! Quelle histoire !
Leporello ! Quelle histoire !
J’en reste stupide... Qu’est-ce qui se passe !
205
SECOND ACTE SCÈNE VIII
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Che mai sarà! Che mai sarà!
Che mai sarà! che mai sarà!
LEPORELLO
Mille torbidi
Pensieri...
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Mille
Torbidi pensieri...
LEPORELLO
Mi s’aggiran per la
Testa;
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Mi
S’aggiran per la testa...
LEPORELLO
Mille torbidi pensieri mi s’aggiran per la testa:
Se mi salvo in tal tempesta, è un prodigio in verità!
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Che
Giornata, o stelle, è questa, o stelle è questa!
LEPORELLO
È un prodigio in verità!
Se mi salvo in tal tempesta, è un prodigio in verità,
MOZART DON GIOVANNI
206
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Qu’est-ce qui se passe ! Qu’est-ce qui se passe !
Qu’est-ce qui se passe ! Qu’est-ce qui se passe !
LEPORELLO
Mille troubles
Pensées...
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Mille
Troubles pensées...
LEPORELLO
Tournent dans ma
Tête ;
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Tournent
Dans ma tête...
LEPORELLO
Mille troubles pensées tournent dans ma tête :
Si je réchappe de cette tempête, ce sera prodige en vérité !
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Quelle
Journée, ô ciel, que celle-là, ô ciel que celle-là !
LEPORELLO
Ce sera prodige en vérité !
Si je réchappe de cette tempête, ce sera prodige en vérité,
207
SECOND ACTE SCÈNE VIII
È un prodigio in verità, in verità, in verità,
È un prodigio in verità!
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Che impensata...
LEPORELLO
Mille torbidi pensieri...
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
... Novità!
LEPORELLO
... Mi s’aggiran per la teste:
Se mi salvo in tal tempesta,
è un prodigio in verità,
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Che impensata
Che impensata novità
Che impensata
Novità!
LEPORELLO
È un prodigio in verità!
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
Mille torbidi pensieri...
DONNA ELVIRA
Mille mille...
MOZART DON GIOVANNI
208
Ce sera prodige en vérité, en vérité, en vérité,
Ce sera prodige en vérité !
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Imprévue...
LEPORELLO
Mille troubles pensées...
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
... Cette nouvelle !
LEPORELLO
... Tournent dans ma tête ;
Si je réchappe de cette tempête,
Ce sera prodige en vérité,
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Imprévue
Imprévue cette nouvelle
Imprévue cette
Nouvelle !
LEPORELLO
Ce sera prodige en vérité !
DONNA ANNA & DON OTTAVIO
Mille troubles pensées...
DONNA ELVIRA
Mille, mille...
209
SECOND ACTE SCÈNE VIII
ZERLINA E MASETTO
Mille torbidi pensieri
DONNA ELVIRA
... Torbidi pensieri...
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
... Mi s’aggiran per la testa...
DONNA ELVIRA
... Mi s’aggiran per la testa...
ZERLINA E MASETTO
Mi s’aggiran per la testa...
LEPORELLO
Mille torbide pensieri mi s’aggiran per la testa:
Se mi salvo un tal tempesta, è un prodigio in verità!
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Che
Giornata, o stelle, è questa, o stelle, è questa!
LEPORELLO
È un prodigio in verità,
Se mi salvo in tal tempesta, è un prodigio in verità
È un prodigio in verità, in verità, in verità
È un prodigio in verità!
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Che impensata...
LEPORELLO
Mille torbide
MOZART DON GIOVANNI
210
ZERLINA & MASETTO
Mille troubles pensées
DONNA ELVIRA
... Troubles pensées...
DONNA ANNA & DON OTTAVIO
... Tournent dans ma tête...
DONNA ELVIRA
... Tournent dans ma tête...
ZERLINA & MASETTO
Tournent dans ma tête...
LEPORELLO
Mille troubles pensées tournent dans ma tête :
Si je réchappe de cette tempête, ce sera prodige en vérité !
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Quelle
Journée, ô ciel, que celle-là, ô ciel, que celle-là !
LEPORELLO
Ce sera prodige en vérité,
Si je réchappe de cette tempête, ce sera prodige en vérité !
Ce sera prodige en vérité, en vérité, en vérité
Ce sera prodige en vérité !
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Imprévue...
LEPORELLO
Mille troubles
211
SECOND ACTE SCÈNE VIII
Pensieri mi s’aggiran per la testa:
Se mi salvo in tal tempesta, è un prodigio in verità!
...
È un prodigio in verità!
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Novità! Che impensata, che impensata novità!
...
Che impensata novità!
Donna Anna parte.
SCENA IX
Recitativo
ZERLINA
Dunque quello sei tu che il mio Masetto poco fa crudel-
mente maltrattasti?
DONNA ELVIRA
Dunque tu m’ingannasti, o scellerato, spacciandoti con me
da Don Giovanni?
DON OTTAVIO
Dunque tu in questi panni venisti qui per qualche tradi-
m e n t o !
ZERLINA
A me tocca punirlo!
DONNA ELVIRA
Anzi a me.
MOZART DON GIOVANNI
212
Pensées tournent dans ma tête :
Si je réchappe de cette tempête, ce sera prodige en vérité !
...
Ce sera prodige en vérité !
DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Cette nouvelle ! Imprévue, imprévue cette nouvelle !
...
Imprévue cette nouvelle !
Donna Anna sort.
SCÈNE IX
Récitatif
ZERLINA
Donc tu es celui qui vient de cruellement maltraiter mon
Masetto ?
DONNA ELVIRA
Donc tu m’as trompée, scélérat, te faisant passer auprès de
moi pour Don Giovanni ?
DON OTTAVIO
Donc tu es venu ici, sous ces vêtements, pour quelque
t r a î t r i s e !
ZERLINA
C’est à moi de le punir !
DONNA ELVIRA
À moi plutôt.
213
SECOND ACTE SCÈNE IX
DON OTTAVIO
No no, a me.
MASETTO
Accoppatelo meco tutti tre.
No 20. Aria
LEPORELLO (a Don Ottavio e Donna Elvira)
Ah, pietà, signori miei, ah pietà,
Pietà di me, pietà di me, pietà!
Do ragione a voi e lei, a voi e lei,
Ma, ma il delitto, il delitto mio non è, mio non è.
II padron con prepotenza,
L’innocenza mi rubò, l’innocenza mi rubò.
(Piano a Donna Elvira)
Donna Elvira, compatite! già capite come andò,
Già capite, già capite, già capite come andò.
(A Zerlina) Di Masetto non so nulla,
Non so nulla, nulla, nulla, nulla, nulla;
(Accennando Donna Elvira)
Vel dirà questa fanciulla, questa fanciulla:
È un’ oretta circumcirca,
Che con lei girando vo, che con lei girando vo.
(A Don Ottavio, con confusione)
A voi, signore, non dico niente...
Certo timore...certo accidente...
Di fuori chiaro... di dentro oscuro...
Non c’è riparo... la porta... il muro... lo... il... la...
(Additando la porta dov’era si chiuso per errore)
Vo da quel lato... poi qui celato...
L’affar si sa... oh, si sa...
(S’avvicina con destrezza alla porte e fugge.)
Ma s’io sapeva fuggia per qua, fuggia per qua
Fuggia per qua, fuggia per qua.
MOZART DON GIOVANNI
214
DON OTTAVIO
Non non, à moi.
MASETTO
Tous les trois, assommez-le avec moi.
No 20. Air
LEPORELLO (à Don Ottavio et Donna Elvira)
Ah pitié, mes seigneurs, ah pitié,
Pitié pour moi, pitié pour moi, pitié !
Je vous donne raison, à vous et à elle, à vous et à elle,
Mais ce forfait, ce forfait n’est pas le mien.
Mon maître, par violence
A volé mon innocence, a volé mon innocence.
(Bas, à Donna Elvira)
Donna Elvira, comprenez ! vous savez ce qu’il en est,
Vous savez, vous savez, vous savez ce qu’il en est.
(À Zerlina) Pour Masetto, je ne sais rien,
Je ne sais rien, rien, rien, rien, rien ;
(Montrant Donna Elvira)
Cette jeune fille vous le dira, cette jeune fille :
Ça fait une petite heure environ
Qu’avec elle je me balade, qu’avec elle je me balade.
(À Don Ottavio, troublé)
À vous, seigneur, je ne dis rien...
Une crainte... un hasard...
Dehors la lumière... dedans l’obscurité...
Aucun refuge... la porte... le mur... le... le... la...
(Désignant la porte où il était entré par erreur)
Je vais de ce côté...puis caché ici...
Ça s’est vu... oh, ça c’est vu...
(Il se rapproche adroitement de la porte et s’enfuit.)
Mais si j’avais su, j’aurais fui par là
J’aurais fui par là, j’aurais fui par là.
215
SECOND ACTE SCÈNE IX
SCENA X
Recitativo
DONNA ELVIRA
Ferma, perfido, ferma...
MASETTO
Il birbo ha l’ali ai piedi...
ZERLINA
Con qual arte si sottrasse l’iniquo!...
DON OTTAVIO
Amici miei, dopo eccessi sì enormi, dubitar non possiam
che Don Giovanni non sia l’empio uccisore del padre di
Donn’Anna: in questa casa per poche ore fermatevi... un
ricorso vo’ far a chi si deve, e in pochi istanti vendicarvi
prometto; così vuole dover, pietade, affetto.
No 21. Aria
DON OTTAVIO
Il mio tesoro intanto andate, andate a consolar,
E del bel ciglio il pianto cercate di asciugar,
Cercate, cercate, cercate di asciugar,
Cercate di asciugar.
Ditele che i suoi torti a vendicar io vado,
A vendicar io vado: che sol di stragi e morti
Nunzio vogl’io tornar, nunzio vogl’io tornar,
Sì, nunzio vogl’io tornar.
Il mio tesoro intanto andate, andate a consolar,
E del bel ciglio il pianto cercate di asciugar,
Cercate, cercate, cercate di asciugar,
MOZART DON GIOVANNI
216
SCÈNE X
Récitatif
DONNA ELVIRA
Arrête, coquin, arrête...
MASETTO
Le gredin a des ailes aux pieds...
ZERLINA
Avec quel art la canaille s’est enfuie !...
DON OTTAVIO
Mes amis, après de telles outrances, nous ne pouvons dou-
ter que Don Giovanni soit l’infâme assassin du père de
Donna Anna : demeurez un peu dans cette maison... je
vais recourir à qui de droit, et je promets de vous venger
sous peu ; ainsi le veulent le devoir, la piété et l’affection.
No 21. Air
DON OTTAVIO
En attendant, allez, allez consoler mon amour
Et tentez de sécher les larmes de ces beaux yeux,
Tentez, tentez, tentez de les sécher,
Tentez de les sécher.
Dites-lui que je vais venger les outrages qu’elle a subis,
Je vais les venger : hécatombe et mort
Je reviendrai les annoncer, les annoncer,
Je reviendrai les annoncer.
En attendant, allez, allez consoler mon amour
Et tentez de sécher les larmes de ces beaux yeux,
Tentez, tentez, tentez de les sécher,
217
SECOND ACTE SCÈNE X
Cercate di asciugar.
Ditele che i suoi torti a vendicar io vado,
A vendicar io vado: che sol di stragi e morti
Nunzio vogl’io tornar, nunzio vogl’io tornar,
Che sol di stragi e morti nunzio vogl’io tornar,
Sì, nunzio vogl’io tornar.
Zerlina, Don Ottavio e Masetto partono.
No 21b. Recitativo accompagnato ed Aria
DONNA ELVIRA
In quali eccessi, o Numi, in quai misfatti orribili, tremen-
di è avvolto il sciagurato! Ah no, non puote tardar l’ira del
cielo!... la giustizia tardar! Sentir già parmi la fatale saet-
ta, che gli piomba sul capo!... aperto vegg’io il baratro
mortal... Misera Elvira, che contrasto d’affetti, in sen ti
nasce!... Perchè questi sospiri, e queste ambasce?
Aria
Mi tradì quell’alma ingrata, quell’alma ingrata:
Infelice, oddio! mi fa, infelice, oddio! mi fa,
Infelice, oddio! oddio! mi fa.
Ma tradita e abbandonata, provo ancor per lui pietà,
Provo ancor per lui pietà, provo ancor per lui, per lui pietà.
Mi tradì quell’alma ingrata, quell’alma ingrata:
Infelice, oddio! mi fa, infelice oddio! mi fa,
Infelice, oddio! oddio! mi fa.
Quando sento il mio tormento, il mio tormento,
Di vendetta il cor favella: ma se guardo il suo cimento,
Palpitando il cor mi va, palpitando il cor mi va, palpitando!
Mi tradì quell’alma ingrata, quell’alma ingrata:
Infelice, oddio! mi fa, infelice, oddio! mi fa,
Infelice, oddio! oddio! mi fa.
Ma tradita, abbandonata, provo ancor per lui pietà,
Per lui pietà, provo ancor per lui, per lui pietà,
MOZART DON GIOVANNI
218
Tentez de les sécher.
Dites-lui que je vais venger les outrages qu’elle a subis,
Je vais les venger : hécatombes et mort
Je reviendrai les annoncer, les annoncer,
Hécatombe et mort, je reviendrai les annoncer,
Oui, je reviendrai les annoncer.
Zerlina, Don Ottavio et Masetto sortent.
No 21b. Récitatif accompagné & Air
DONNA ELVIRA
Dans quels outrances, ô dieux, dans quels horribles et ter-
ribles méfaits s’est vautré le misérable ! Ah non, la colère et
la justice divines ne peuvent tarder ! Je crois entendre déjà
la foudre fatale tomber sur sa tête !... je vois ouvert l’abîme
de la mort... Pauvre Elvira, quels sentiments opposés nais-
sent dans ton cœur! Pourquoi ces soupirs et cette angoisse ?
Air
Elle m’a trahie, cette âme ingrate, ingrate:
Elle m’a rendue malheureuse, ô Dieu,
Malheureuse, ô Dieu, ô Dieu.
Mais trahie, abandonnée, j’ai encore pitié de lui,
J’ai encore pitié de lui, j’ai encore pitié de lui, pitié de lui.
Elle m’a trahie, cette âme ingrate, ingrate :
Malheureuse, ô Dieu, elle m’a rendue malheureuse, ô Dieu,
Elle m’a rendu malheureuse, ô Dieu, ô Dieu.
Quand mon tourment me fait souffrir, mon tourment,
Mon cœur parle de vengeance: mais voyant le danger,
Mon cœur palpite, mon cœur palpite, palpite!
Elle m’a trahie, cette âme ingrate, ingrate:
Elle m’a rendu malheureuse, ô Dieu, malheureuse
M’a rendu malheureuse, malheureuse, ô Dieu.
Mais trahie, abandonnée, j’ai encore pitié de lui,
Pitié, j’ai encore pitié de lui, pitié de lui.
219
SECOND ACTE SCÈNE X
Provo ancor per lui, per lui pietà,
Per lui pietà per lui pietà per lui pietà
(Parte.)
SCENA XI
Recitativo
Loco chiuso in forma di sepolcreto.
Diverse statue equestri; statua del Commendatore.
DON GIOVANNI (ridendo forte, entra pel muretto)
Ah, ah, ah, ah, questa è buona: or lasciala cercar! Che
bella notte! È più chiara del giorno; sembra fatta per gir a
zonzo a caccia di ragazze. (Guarda sull’orologio.) È tardi?
Oh ancor non sono due della notte; avrei voglia un po’ di
saper come è finito l’affar tra Leporello e Donna Elvira.
S’egli ha avuto giudizio...
LEPORELLO (in strada)
Alfin vuole ch’io faccia un precipizio!
DON GIOVANNI
È desso; oh Leporello!
LEPORELLO (dal muretto)
Chi mi chiama?
DON GIOVANNI
Non conosci il padron?
LEPORELLO
Così nol conoscessi!
DON GIOVANNI
Come? birbo!
MOZART DON GIOVANNI
220
J’ai encore pitié de lui, pitié de lui,
Pitié de lui, pitié de lui, pitié de lui.
(Elle sort.)
SCÈNE XI
Récitatif
Lieu clos de murs ressemblant à un cimetière.
Plusieurs statues équestres; statue du Commandeur.
DON GIOVANNI (riant fort, entre en sautant le mur)
Ah, ah, ah, ah, elle est bonne celle-là : maintenant laisse-
la chercher ! Quelle belle nuit ! Plus claire que le jour ;
elle paraît faite pour chasser les filles. ( Regarde sa montre.)
Il est tard ? Oh, pas encore deux heures ; j’aimerais savoir
comment s’est finie l’affaire entre Leporello et Donna
Elvira, s’il a été malin.
LEPORELLO (dans la rue)
Finalement, il veut que je me perde !
DON GIOVANNI
C’est lui ; oh Leporello !
LEPORELLO (du mur)
Qui m’appelle ?
DON GIOVANNI
Tu ne reconnais pas ton maître ?
LEPORELLO
Si seulement je ne l’avais pas connu !
DON GIOVANNI
Comment ? Gredin !
221
SECOND ACTE SCÈNE XI
LEPORELLO
Ah siete voi? scusate!
DON GIOVANNI
Cosa è stato?
LEPORELLO
Per cagion vostra io fui quasi accoppato.
DON GIOVANNI
Ebben, no era questo un onore per te?
LEPORELLO
Signor, vel dono.
DON GIOVANNI
Via via, vien qua: che belle cose ti deggio dir!
LEPORELLO
Ma cosa fate qui?
DON GIOVANNI
Vien dentro; e lo saprai.
(Leporello entra; si cangiano d’abito.)
Diverse istorielle, che accadute mi son da che partisti, ti
dirò un’ altra volta: or la più bella ti vo’ solo narrar.
LEPORELLO
Donnesca al certo.
DON GIOVANNI
C’è dubbio? Una fanciulla, bella, giovin, galante, per la
strada incontrai; le vado appresso, la prendo per la mano,
fuggir mi vuole; dico poche parole, ella mi piglia... sai
per chi?
MOZART DON GIOVANNI
222
LEPORELLO
Ah, c’est vous ? excusez !
DON GIOVANNI
Que s’est-il passé ?
LEPORELLO
Par votre faute, j’ai été presque assommé.
DON GIOVANNI
Eh bien, n’était-ce pas un honneur pour toi ?
LEPORELLO
Seigneur, je vous le laisse.
DON GIOVANNI
Allez allez, viens là : que de belles choses j’ai à te dire!
LEPORELLO
Mais que faites-vous ici ?
DON GIOVANNI
Viens et tu le sauras.
(Leporello entre ; ils échangent leurs habits.)
Les petites histoires qui me sont arrivées depuis ton
départ, je te les dirai une autre fois : je ne vais te raconter
que la plus belle.
LEPORELLO
De femme, bien sûr.
DON GIOVANNI
Tu en doutes ? J’ai rencontré dans la rue une fille belle,
jeune, gracieuse ; je m’approche d’elle, je la prends par la
main, elle veut me fuir ; je lui dis peu de choses, elle me
prend... tu sais pour qui ?
223
SECOND ACTE SCÈNE XI
LEPORELLO
Non lo so.
DON GIOVANNI
Per Leporello.
LEPORELLO
Per me?
DON GIOVANNI
Per te.
LEPORELLO
Va bene.
DON GIOVANNI
Per la mano essa allora mi prende...
LEPORELLO
Ancora meglio.
DON GIOVANNI
M’accarezza, mi abbraccia... “Caro il mio Leporello, Lepo-
rello, mio caro...” Allor m’accorsi ch’era qualche tua bella.
LEPORELLO (a parte)
Oh maledetto!
DON GIOVANNI
Dell’inganno approfitto; non so come mi riconosce: grida;
sento gente; a fuggire mi metto; e pronto pronto, per quel
muretto in questo loco io monto.
LEPORELLO
E mi dite la cosa con tale indifferenza?
MOZART DON GIOVANNI
224
LEPORELLO
Je ne sais pas.
DON GIOVANNI
Pour Leporello.
LEPORELLO
Pour moi ?
DON GIOVANNI
Pour toi.
LEPORELLO
Très bien.
DON GIOVANNI
Elle me prend alors par la main...
LEPORELLO
Encore mieux.
DON GIOVANNI
Me caresse, m’embrasse... « Mon cher Leporello, Lepo-
rello, mon chéri...» Je m’aperçois alors qu’elle était une de
tes belles.
LEPORELLO (à part)
Oh maudit !
DON GIOVANNI
Je profite de la méprise ; elle me reconnaît, je ne sais
c o m m e n t : elle crie ; j’entends des gens, je prends la
fuite et vite vite, j’arrive ici par ce mur.
LEPORELLO
Et vous me dites la chose avec une telle indifférence ?
225
SECOND ACTE SCÈNE XI
DON GIOVANNI
Perché no?
LEPORELLO
Ma se fosse costei stata mia moglie?
DON GIOVANNI (ride molto forte)
Meglio ancora!
IL COMMENDATORE
Di rider finirai pria dell’aurora.
DON GIOVANNI
Chi ha parlato?
LEPORELLO (con atti di paura)
Ah! qualche anima sarà dell’altro mondo! che vi conosce a
fondo.
DON GIOVANNI
Taci, sciocco!
(Metta mano alla spada, cerca qua e là pel sepolcreto,
dando diverse percosse alle statue.)
Chi va là! chi va là!
IL COMMENDATORE
Ribaldo, audace, lascia a’ morti la pace.
LEPORELLO
Ve l’ho detto!
DON GIOVANNI (con indifferenza e sprezzo)
Sarà qualcun di fuori che si burla di noi... Ehi? del
Commendatore non è questa la statua? Leggi un poco
quella iscrizion.
MOZART DON GIOVANNI
226
DON GIOVANNI
Pourquoi pas ?
LEPORELLO
Mais si elle avait été ma femme ?
DON GIOVANNI (rit très fort)
Encore mieux !
LE COMMANDEUR
Avant le lever du jour, tu cesseras de rire.
DON GIOVANNI
Qui a parlé ?
LEPORELLO (avec des gestes apeurés)
Ah ! ça doit être une âme de l’autre monde ! qui vous
connaît à fond.
DON GIOVANNI
Tais-toi, imbécile !
(Il saisit son épée, cherche çà et là dans le cimetière,
frappant quelques statues.)
Qui va là ? Qui va là ?
LE COMMANDEUR
Scélérat, insolent, laisse les morts en paix.
LEPORELLO
Je vous l’ai dit !
DON GIOVANNI (avec indifférence et mépris)
Ce sera quelqu’un à l’extérieur qui se joue de nous... Eh ?
n’est-ce pas la statue du Commandeur ? Lis un peu cette
inscription.
227
SECOND ACTE SCÈNE XI
LEPORELLO
Scusate... non ho imparato a leggere a’ raggi della luna...
DON GIOVANNI
Leggi dico!
LEPORELLO (legge)
“Dell’empio che mi trasse al passo estremo qui attendo la
vendetta.” Udiste? Io tremo!
DON GIOVANNI
O vecchio buffonissimo! Digli che questa sera l’attendo a
cena meco.
LEPORELLO
Che pazzia! Ma vi par... oh Dei, mirate! che terribili
occhiate egli ci dà! Par vivo! par che senta! e che voglia
parlar...
DON GIOVANNI
Orsù, va là, o qui t’ammazzo, e poi ti seppellisco!
LEPORELLO (tremando)
Piano piano, signore, ora ubbidisco.
No 22. Duetto
LEPORELLO
O statua gentilissima del gran Commendatore...
(A Don Giovanni)
Padron... mi trema il core,
Non posso, non posso terminar.
DON GIOVANNI
Finiscila, o nel petto ti metto questo acciar, ti metto ques-
to acciar.
MOZART DON GIOVANNI
228
LEPORELLO
Excusez... je n’ai pas appris à lire à la lumière de la lune...
DON GIOVANNI
Lis te dis-je !
LEPORELLO (lit)
« J’attends ici la vengeance sur l’impie qui m’a mené au
trépas. » Vous entendez ? Je tremble !
DON GIOVANNI
Ô vieux bouffonissime ! Dis-lui que je l’attends ce soir à
ma table.
LEPORELLO
Quelle folie ! Mais il me semble... oh dieux, regardez ! il
lance de terribles regards ! On dirait qu’il vit ! qu’il
entend ! et qu’il veut parler...
DON GIOVANNI
Allons, va, ou je te tue ici et je t’enterre ensuite !
LEPORELLO (tremblant)
Tout doux, tout doux, seigneur, j’obéis.
No 22. Duo
LEPORELLO
Ô très noble statue du grand Commandeur...
(À Don Giovanni)
Maître... mon cœur tremble,
Je ne peux, je ne peux pas achever.
DON GIOVANNI
Termine ou je te plonge ce fer dans le cœur, je te plonge
ce fer.
229
SECOND ACTE SCÈNE XI
LEPORELLO
Che impiccio, che capriccio!
DON GIOVANNI
Che gusto, che spassetto!
LEPORELLO
Io sentomi gelar,
DON GIOVANNI
Lo voglio far
Tremar,
Lo voglio far tremar.
LEPORELLO
Io sentomi
Gelar
LEPORELLO
O statua gentilissima benchè di marmo siate...
(A Don Giovanni)
Ah padron... padron mio, mirate, mirate
Che seguita a guardar, che seguita a guardar.
DON GIOVANNI
Mori, mori!...
LEPORELLO
No no... no no, attendete... attendete...
(Alla statua)
Signor, il padron mio... badate ben, non io...
Vorria con voi cenar...
(La statua china la testa.)
Ah , ah, ah, che scena è questa!
Ah , ah, che scena è questa!
Oh ciel, chinò la testa!
MOZART DON GIOVANNI
230
LEPORELLO
Quelle affaire, quel caprice !
DON GIOVANNI
Quel plaisir, quelle joie !
LEPORELLO
Je me sens glacé,
DON GIOVANNI
Je veux le faire
Trembler,
Je veux le faire trembler.
LEPORELLO
Je me sens
Glacé.
LEPORELLO
Ô très noble statue, bien que vous soyez de marbre...
(À Don Giovanni)
Ah maître... mon maître, voyez, voyez...
Il continue à regarder, il continue à regarder.
DON GIOVANNI
Meurs, meurs !...
LEPORELLO
Non non... non non, attendez... attendez...
(À la statue)
Seigneur, mon maître... non pas moi notez bien,
Voudrait dîner avec vous...
(La statue incline la tête.)
Ah, ah, ah, mais quelle histoire !
Ah, ah, mais quelle histoire !
Oh ciel, il a incliné la tête !
231
SECOND ACTE SCÈNE XI
DON GIOVANNI
Va là, che se’ un buffone, va là, che se’ un buffone,
Se un buffone, se un buffone...
LEPORELLO
Guardate, guardate, guardate ancor, padrone!
DON GIOVANNI
E che degg’io guardar,
Degg’io guardar degg’io guardar?
LEPORELLO
Colla marmorea testa,
(Imita la statua.)
Ei fa così, così!
La statua china qui la testa.
DON GIOVANNI (vedendo il chino)E LEPORELLO
Colla marmorea testa,
Ei fa così, così!
DON GIOVANNI (alla statua)
Parlate se potete: verrete a cena? Verrete a cena?
IL COMMENDATORE
Sì!
LEPORELLO
Mover mi posso
Appena... mi manca, o Dei, la lena!
Mi manca, o Dei, la lena...
DON GIOVANNI
Bizzarra è inver la scena...Verrà il
Buon vecchio, il buon vecchio a cena...
MOZART DON GIOVANNI
232
DON GIOVANNI
Va donc, tu es fou, va donc, tu es fou,
Tu es fou, tu es fou...
LEPORELLO
Regardez, regardez, regardez encore, maître !
DON GIOVANNI
Et que devrais-je regarder,
Devrais-je regarder, devrais-je regarder ?
LEPORELLO
Avec sa tête en marbre
(Il imite la statue.)
Il fait comme ça, comme ça !
Ici, la statue incline la tête.
DON GIOVANNI (voyant le mouvement) & LEPORELLO
Avec sa tête en marbre
Il fait comme ça, comme ça !
DON GIOVANNI (à la statue)
Parlez si vous pouvez : viendrez-vous pour le dîner ?
LE COMMANDEUR
Oui !
LEPORELLO
Je peux à peine
Bouger... Ô dieux, le souffle me manque !
Ô dieux, le souffle me manque...
DON GIOVANNI
L’histoire est étrange en vérité... Le bon
Vieux, le vieux va venir pour le dîner...
233
SECOND ACTE SCÈNE XI
LEPORELLO
Per carità...
Partiamo, per carità, partiamo,
Andiamo via di qui, andiamo, andiamo via di qui.
DON GIOVANNI
A prepararla andiamo,
A prepararla andiamo, partiamo, via di qui.
LEPORELLO
Per carità,
Partiamo, andiamo via di qui.
DON GIOVANNI
Bizarra è inver la scena...
LEPORELLO
Per carità,
Partiamo, andiamo via di qui,
Andiamo via di qui, andiamo via di qui,
Andiamo, andiamo, andiamo, andiamo, andiamo,
Andiamo via di qui, via di qui,
DON GIOVANNI
Verrà il buon vecchio a cena...
A prepararla andiamo, partiamo via di qui,
Partiamo via di qui.
LEPORELLO
Di qui, di qui, di qui.
Partono.
MOZART DON GIOVANNI
234
LEPORELLO
Par pitié...
Partons, par pitié, partons,
Allons-nous en d’ici, allons, allons-nous en d’ici.
DON GIOVANNI
Allons le préparer,
Allons le préparer, allons-nous en d’ici.
LEPORELLO
Par pitié,
Partons, allons-nous en d’ici.
DON GIOVANNI
L’histoire est étrange en vérité...
LEPORELLO
Par pitié,
Partons, allons-nous en d’ici.
Allons-nous en d’ici, allons-nous en d’ici
Allons, allons, allons, allons, allons,
Allons-nous en d’ici, d’ici,
DON GIOVANNI
Le bon vieux viendra pour le dîner...
Allons le préparer, allons-nous en d’ici
Allons-nous en d’ici.
LEPORELLO
D’ici, d’ici, d’ici.
Ils sortent.
235
SECOND ACTE SCÈNE XI
SCENA XII
Camera tetra.
Recitativo
DON OTTAVIO
Calmatevi, idol mio; di quel ribaldo vedrem puniti in
breve i gravi eccessi; vendicati sarem.
DONNA ANNA
Ma il padre, oddio!
DON OTTAVIO
Convien chinare il ciglio ai voleri del ciel; respira, o cara,
di tua perdita amara fia domani, se vuoi, dolce compenso
questo cor; questa mano... che il mio tenero amor...
DONNA ANNA
O Dei, che dite?... In sì tristi momenti...
DON OTTAVIO
E che? vorresti con indugi novelli accrescer le mie pene?
Crudele!
No 23. Recitativo accompagnato e Rondo
DONNA ANNA
Crudele! Ah no, mio bene! Troppo mi spiace allontanarti
un ben che lungamente la nostr’alma desia...
Ma il mondo... oh Dio... non sedur la costanza del sensibil
mio core! Abbastanza per te mi parla amore.
Rondo
Non mi dir, bell’idol mio, che son io crudel con te;
Tu ben sai quant’io t’amai, tu conosci la mia fè,
MOZART DON GIOVANNI
236
SCÈNE XII
Une pièce obscure.
Récitatif
DON OTTAVIO
Calmez-vous, mon amour ; nous verrons bientôt punis les
graves outrages de ce scélérat ; nous serons vengés.
DONNA ANNA
Mais mon père, ô Dieu !
DON OTTAVIO
Face aux volontés du ciel, il faut s’incliner ; reprends ton
souffle, tu auras demain, si tu veux, douce réparation de ton
amère perte, ce cœur... cette main... que mon tendre amour. . .
DONNA ANNA
Ô dieux, que dites-vous ? En de si tristes instants...
DON OTTAVIO
Eh quoi ? voudrais-tu, par de nouvelles hésitations,
accroître mes peines ? Cruelle !
No 23. Récitatif accompagné & Rondo
DONNA ANNA
C r u e l l e ! Ah non, mon amour ! Il me déplaît trop d’éloigner
de toi un bonheur que notre âme désire depuis longtemps...
Mais le monde... oh Dieu... ne détourne pas la constance de
mon cœur sensible ! L’amour me parle assez pour toi.
Rondo
Ne me dis pas, mon bel amour, que je suis cruelle avec toi ;
Tu sais bien combien je t’aime, tu connais ma fidélité,
237
SECOND ACTE SCÈNE XII
Tu conosci la mia fè.
Calma, calma il tuo tormento,
Se di duol non vuoi ch’io mora,
Se di duol non vuoi ch’io mora, non vuoi ch’io mora!
Non mi dir, bell’idol mio, che son io crudel con te.
Calma, calma il tuo tormento,
Se di duol non vuoi ch’io mora, non vuoi ch’io mora!
Forse, forse un giorno il cielo ancora
Sentirà, sentirà pietà di me.
Forse un giorno il cielo ancora sentirà pietà di me,
Sentirà pietà, pietà di me, sentirà pietà di me.
Forse, forse il cielo un giorno sentirà pietà di me.
Sentirà pietà, di me, pietà di me.
(Parte.)
Recitativo
DON OTTAVIO
Ah, si segua il suo passo: io vo’ con lei dividere i martiri;
saran meco men gravi i suoi sospiri.
(Parte.)
SCENA XIII
No 24. Finale
Sala: una mensa preparata per mangiare; alcuni suonatori.
DON GIOVANNI
Già la mensa è preparata.
Voi suonate, amici cari:
Già che spendo i miei danari,
Io mi voglio divertir.
Leporello, presto in tavola!
MOZART DON GIOVANNI
238
Tu connais ma fidélité.
Apaise, apaise ton tourment,
Si tu ne veux pas que la douleur me tue,
Si tu ne veux pas que la douleur me tue, si tu ne veux pas
que je meure.
Ne me dis pas, mon bel amour, que je suis cruelle avec toi.
Apaise, apaise ton tourment,
Si tu ne veux pas que la douleur me tue, si tu ne veux pas
que je meure !
Peut-être, peut-être un jour le ciel encore aura pitié de moi.
Peut-être un jour le ciel encore aura pitié de moi,
Aura pitié, pitié de moi, aura pitié de moi.
Peut-être, peut-être un jour le ciel aura pitié de moi.
Aura pitié, de moi, pitié de moi.
(Elle sort.)
Récitatif
DON OTTAVIO
Ah, suivons ses pas : je veux partager son martyre ; en ma
compagnie, ses soupirs seront allégés.
(Il sort.)
SCÈNE XIII
No 24. Finale
Une salle : une table dressée; quelques musiciens.
DON GIOVANNI
La table est déjà dressée,
Vous, chers amis, jouez :
Puisque que je dépense mes deniers
Je veux me divertir.
Leporello, vite, à la table !
239
SECOND ACTE SCÈNE XIII
LEPORELLO
Son prontissimo a servir, son prontissimo a servir.
I servi portano in tavola, mentre Leporello vuol uscire.
DON GIOVANNI
Già che spendo i miei danari,
Io mi voglio divertir.
Voi suonate, amici cari:
Già che spendo i miei danari,
Io mi voglio divertir, io mi voglio divertir.
(Mangia; i suonatori cominiciano a suonare.)
LEPORELLO
Bravi! “Cosa rara”
DON GIOVANNI
Che ti par del bel concerto?
LEPORELLO
È conforme, è conforme al vostro merto.
DON GIOVANNI
Ah che piatto saporito! Ah che piatto saporito, saporito,
saporito!
LEPORELLO (a parte)
Ah che barbaro appetito! Che bocconi da gigante!
Mi par proprio di svenir. Mi par proprio di svenir.
DON GIOVANNI (a parte)
Nel veder i miei bocconi gli par proprio di svenir,
Gli par proprio di svenir.
MOZART DON GIOVANNI
240
LEPORELLO
Je suis tout prêt à vous servir, je suis tout prêt à vous servir.
Les serviteurs apportent les plats alors que Leporello
fait mine de sortir.
DON GIOVANNI
Puisque je dépense mes deniers,
Je veux me divertir.
Vous, chers amis, jouez :
Puisque je dépense mes deniers,
Je veux me divertir, je veux me divertir.
(Il mange ; les musiciens commencent à jouer.)
LEPORELLO
Bravo ! Cosa rara
DON GIOVANNI
Que dis-tu de ce beau concert ?
LEPORELLO
Il est digne, il est digne de votre valeur.
DON GIOVANNI
Ah quel plat savoureux ! Ah quel plat savoureux, savou-
reux, savoureux !
LEPORELLO (à part)
Ah, quel appétit de barbare ! Quels morceaux de géant !
Je suis près de défaillir. Je suis près de défaillir.
DON GIOVANNI (à part)
À la vue de ces morceaux, il est près de défaillir,
Il est près de défaillir.
241
SECOND ACTE SCÈNE XIII
LEPORELLO
Ah che barbaro appetito! Che bocconi da gigante!
DON GIOVANNI
Nel veder i miei bocconi gli par proprio,
Gli par proprio di svenir,
LEPORELLO
Ah che barbaro appetito!
DON GIOVANNI
Gli par proprio di svenir,
LEPORELLO
Che bocconi da gigante!
DON GIOVANNI
Gli par proprio di svenir,
Gli par proprio di svenir,
Gli par proprio di svenir!
LEPORELLO
Mi par proprio di svenir,
Mi par proprio di svenir!
DON GIOVANNI
Piatto.
LEPORELLO
Servo.
Evvivano i “Litiganti.”
DON GIOVANNI
Versa il vino!
(Leporello versa il vino nel bicchiere.)
Eccellente marzimino!
MOZART DON GIOVANNI
242
LEPORELLO
Ah, quel appétit de barbare ! Quels morceaux de géant !
DON GIOVANNI
À la vue de ces morceaux, il est près de défaillir,
Il est près de défaillir.
LEPORELLO
Ah, quel appétit de barbare !
DON GIOVANNI
Il est près de défaillir.
LEPORELLO
Quels morceaux de géant !
DON GIOVANNI
Il est près de défaillir.
Il est près de défaillir,
Il est près de défaillir !
LEPORELLO
Je suis près de défaillir.
Je suis près de défaillir.
DON GIOVANNI
Assiette.
LEPORELLO
À votre service.
Vive Les Plaideurs.
DON GIOVANNI
Verse le vin !
(Leporello verse du vin dans le verre.)
Excellent Marzemino !
243
SECOND ACTE SCÈNE XIII
Leporello cangia il piatto a Don Giovanni e mangia in fretta.
LEPORELLO (a parte)
Questo pezzo di fagiano piano piano piano piano piano vo’
inghiottir.
DON GIOVANNI (a parte)
Sta mangiando, quel marrano; fingerò di non capir.
LEPORELLO
Questa poi la conosco pur troppo...
DON GIOVANNI (senza guardarlo)
Leporello!
LEPORELLO (colla bocca piena)
Padron mio...
DON GIOVANNI
Parla schietto, parla schietto mascalzone!
LEPORELLO
Non mi lascia una flussione le parole proferir.
DON GIOVANNI
Mentre io mangio, fischia un poco.
LEPORELLO
Non so far!
DON GIOVANNI (s’accorge che mangia)
Cos’è?
LEPORELLO
Scusate, scusate; sì eccellente è il vostro cuoco,
MOZART DON GIOVANNI
244
Leporello change l’assiette de Don Giovanni et mange à la hâte.
LEPORELLO (à part)
Ce morceau de faisan, en douce, en douce, en douce, je
vais l’engloutir.
DON GIOVANNI (à part)
Voilà qu’il mange, ce renégat ; faisons semblant de ne rien voir.
LEPORELLO
Celle-là, je ne la connais que trop...
DON GIOVANNI (sans le regarder)
Leporello !
LEPORELLO (la bouche pleine)
Mon maître...
DON GIOVANNI
Articule, articule, malotru !
LEPORELLO
Une fluxion m’empêche de bien prononcer les mots.
DON GIOVANNI
Pendant que je mange, siffle un peu.
LEPORELLO
Je ne sais pas faire !
DON GIOVANNI (s’aperçoit qu’il mange)
Alors ?
LEPORELLO
Excusez, excusez ; votre cuisinier est si excellent,
245
SECOND ACTE SCÈNE XIII
Sì eccellente, sì eccellente è il vostro cuoco,
Che lo volli anch’io provar,
Che lo volli anch’io provar.
DON GIOVANNI
Sì eccellente è il cuoco
Mio,
LEPORELLO
Sì
Eccellente,
DON GIOVANNI
Che lo volle
Anch’ei provar.
LEPORELLO
Che lo volli ch’io provar.
SCENA XIV
DONNA ELVIRA (entra disperata)
L’ultima prova dell’amor mio ancor vogl’io fare con te.
Più non rammento gl’inganni tuoi, gl’inganni tuoi,
Pietade io sento...
DON GIOVANNI (sorgendo) E LEPORELLO
Cos’è? cos’è?
DONNA ELVIRA (s’inginocchia)
Da te non chiede quest’alma oppressa
Della sua fede qualche mercé.
DON GIOVANNI
Mi meraviglio! Cosa volete? cosa volete?
MOZART DON GIOVANNI
246
Votre cuisinier est si excellent, si excellent,
Que j’ai voulu goûter aussi,
Que j’ai voulu goûter aussi.
DON GIOVANNI
Mon cuisinier est si
Excellent,
LEPORELLO
Si
Excellent,
DON GIOVANNI
Qu’il a voulu
Goûter aussi.
LEPORELLO
Qu’il a voulu goûter aussi.
SCÈNE XIV
DONNA ELVIRA (entre, au désespoir)
Je veux te donner encore la dernière preuve de mon amour.
J’oublie tes tromperies, tes tromperies,
Je ressens de la pitié...
DON GIOVANNI (se levant) & LEPORELLO
Qu’y a-t-il ? Qu’y a-t-il ?
DONNA ELVIRA (s’agenouille)
Mon âme oppressée ne te demande
Aucun merci pour sa fidélité.
DON GIOVANNI
Je suis surpris ! Que voulez-vous ? que voulez-vous ?
247
SECOND ACTE SCÈNE XIV
Se non sorgete non resto in piè,
(S’inginocchia.)
Non resto in piè!
DONNA ELVIRA
Ah non deridere gli affanni miei.
LEPORELLO (fra sé)
Quasi da
Piangere mi fa costei.
DON GIOVANNI (sorgendo fa sorgere Donna Elvira)
Io te deridere?
DONNA ELVIRA
Ah non deridere...
LEPORELLO
Quasi da
Piangere
Mi fa costei.
DONNA ELVIRA
Ah non deridere...
DON GIOVANNI (con affettata tenerezza)
Io te deridere?
Cieli! Perchè?
Che vuoi, mio bene!
DONNA ELVIRA
Che vita cangi.
DON GIOVANNI
Brava!
MOZART DON GIOVANNI
248
Relevez-vous ou je m’abaisse,
(S’agenouille.)
Je m’abaisse !
DONNA ELVIRA
Ah ne vous moquez pas de mes tourments.
LEPORELLO (à part)
Elle me
Fait presque pleurer.
DON GIOVANNI (se relevant et relevant Donna Elvira)
Moi me moquer de toi ?
DONNA ELVIRA
Ah ne te moque pas...
LEPORELLO
Elle
Me fait
Presque pleurer.
DONNA ELVIRA
Ah ne te moque pas...
DON GIOVANNI (avec une tendresse affectée)
Moi, me moquer de toi ?
Ciel ! pourquoi ?
Que veux-tu, mon trésor !
DONNA ELVIRA
Que tu changes de vie.
DON GIOVANNI
Bravo !
249
SECOND ACTE SCÈNE XIV
DONNA ELVIRA
Cor perfido!
DON GIOVANNI
Brava!
DONNA ELVIRA
Cor perfido!
Cor perfido!
LEPORELLO
Cor perfido!
DON GIOVANNI
Lascia ch’io mangi, lascia ch’io mangi;
(Torna a sedere a mangiare.)
E se ti piace, mangia con me.
DONNA ELVIRA
Restati,
Barbaro! Nel lezzo immondo,
Esempio orribile d’iniquità!
LEPORELLO
Se non si muove del suo dolore,
Di sasso ha il core, o cor non ha!
DON GIOVANNI (bevendo)
Vivan le femmine, viva il buon vino,
Sostegno e gloria d’umanità,
Sostegno e gloria d’umanità,
DONNA ELVIRA
Restati
MOZART DON GIOVANNI
250
DONNA ELVIRA
Cœur perfide !
DON GIOVANNI
Bravo !
DONNA ELVIRA
Cœur perfide !
Cœur perfide !
LEPORELLO
Cœur perfide !
DON GIOVANNI
Laisse-moi manger, laisse-moi manger ;
(Il retourne s’asseoir à table.)
Et s’il te plaît, mange avec moi.
DONNA ELVIRA
Reste donc,
Barbare ! Dans la fange immonde,
Horrible exemple d’infamie !
LEPORELLO
S’il ne s’émeut pas de sa douleur,
Il a un cœur de pierre, ou pas de cœur du tout !
DON GIOVANNI (buvant)
Vivent les femmes, vive le bon vin,
Soutien et gloire de l’humanité,
Soutien et gloire de l’humanité.
DONNA ELVIRA
Reste donc
251
SECOND ACTE SCÈNE XIV
Barbaro nel lezzo immondo,
Restati, barbaro, nel lezzo immondo,
Esempio orribile d’iniquità,
LEPORELLO
Se non si muove del suo dolore,
Di sasso ha il core, di sasso ha il core,
O cor non ha,
DON GIOVANNI
Vivan le femmine,
Viva il buon vino, vivan le femmine,
Viva il buon vino sostegno e gloria d’umanità,
Sostegno e gloria d’umanità,
Sostegno e gloria d’umanità, d’umanità
D’umanità, sostegno e gloria d’umanità!
DONNA ELVIRA
Esempio orribile d’iniquità, d’iniquità, d’iniquità,
Esempio orribile d’iniquità!
(Sorte.)
LEPORELLO
Di sasso ha il core, o cor non ha, o cor non ha, o cor non ha,
Di sasso ha il core, o cor non ha!
DONNA ELVIRA (rientra e fugge dall’altre parte)
Ah!
DON GIOVANNI
Che grido è
Questo mai! Che grido, che grido è questo mai!
LEPORELLO
Che grido è questo mai! Che grido è questo mai!
MOZART DON GIOVANNI
252
Barbare ! Dans la fange immonde,
Reste donc, barbare, dans la fange immonde,
Horrible exemple d’infamie.
LEPORELLO
S’il ne s’émeut pas de sa douleur,
Il a un cœur de pierre, il a un cœur de pierre
Ou pas de cœur du tout !
DON GIOVANNI
Vivent les femmes,
Vive le bon vin, vivent les femmes,
Vive le bon vin, soutien et gloire de l’humanité,
Soutien et gloire de l’humanité,
Soutien et gloire de l’humanité, de l’humanité
De l’humanité, soutien et gloire de l’humanité !
DONNA ELVIRA
Exemple horrible d’infamie, d’infamie, d’infamie,
Exemple horrible d’infamie !
(Elle sort.)
LEPORELLO
Il a un cœur de pierre, ou pas de cœur du tout, du tout,
Il a un cœur de pierre, ou pas de cœur du tout !
DONNA ELVIRA (rentre et s’enfuit de l’autre côté)
Ah !
DON GIOVANNI
Quel est donc
Ce cri ! Quel est donc ce cri, ce cri !
LEPORELLO
Quel est donc ce cri ! Quel est donc ce cri !
253
SECOND ACTE SCÈNE XIV
DON GIOVANNI
Va’ a veder, va’ a veder che cosa è stato!
Leporello sorte e prima di tornare, mette un grido.
LEPORELLO
Ah!
DON GIOVANNI
Che grido indiavolato! Che grido indiavolato!
(Leporello entra spaventato e chiude l’uscio.)
Leporello, che cos’è? che cos’è? che cos’è?
LEPORELLO
Ah signor... per carità!... non andate fuor di qua!...
L’uom... di... sasso... l’uomo... bianco...
Ah padrone!... io gelo... io manco...
Se vedeste che figura!...
Se sentiste come fa: ta ta ta ta!
DON GIOVANNI
Non capisco niente affatto:
LEPORELLO
Ta ta ta ta!
DON GIOVANNI
Tu sei matto in verità, in verità, in verità.
Si sente battere alla porta.
LEPORELLO
Ah sentite!
DON GIOVANNI
Qualcun batte! Apri...
MOZART DON GIOVANNI
254
DON GIOVANNI
Va voir, va voir ce qui arrive !
Leporello sort et avant de revenir, pousse un cri.
LEPORELLO
Ah !
DON GIOVANNI
Quel cri d’enfer ! Quel cri d’enfer !
(Leporello entre épouvanté et ferme les issues.)
Leporello, que se passe-t-il ? que se passe-t-il ?
LEPORELLO
Ah seigneur... de grâce... ne sortez pas d’ici !...
L’homme... de... pierre... l’homme... blanc...
Ah maître !... je suis glacé... je manque...
Si vous voyiez quelle figure !...
Si vous entendiez ce qu’il fait : ta ta ta ta !
DON GIOVANNI
Je ne comprends rien du tout :
LEPORELLO
Ta ta ta !
DON GIOVANNI
En vérité, tu es fou, vraiment, vraiment.
On entend frapper à la porte.
LEPORELLO
Ah écoutez !
DON GIOVANNI
Quelqu’un frappe ! Ouvre...
255
SECOND ACTE SCÈNE XIV
LEPORELLO (tremando)
Io tremo...
DON GIOVANNI
Apri, dico!
LEPORELLO
Ah...
DON GIOVANNI
Apri!
LEPORELLO
Ah...
DON GIOVANNI
Matto! Per togliermi d’intrico
Ad aprir io stesso andrò, io stesso andrò.
(Piglia lume e va per aprire.)
LEPORELLO
Non vo’ più veder l’amico;
Pian pianin m’asconderò, m’asconderò.
(S’asconde sotto la tavola.)
(Don Giovanni apre.)
SCENA XV
IL COMMENDATORE
Don Giovanni, a cenar teco m’invitasti, e son venuto!
DON GIOVANNI
Non l’avrei giammai creduto, ma farò quel che potrò!
Leporello, un’ altra cena fa che subito si porti!
MOZART DON GIOVANNI
256
LEPORELLO (tremblant)
J’ai peur...
DON GIOVANNI
Ouvre, te dis-je !
LEPORELLO
Ah...
DON GIOVANNI
Ouvre !
LEPORELLO
Ah...
DON GIOVANNI
Fou ! Pour tirer ça au clair
Je vais ouvrir moi-même, moi-même.
(Il prend un flambeau et va ouvrir.)
LEPORELLO
Je ne veux plus voir le camarade ;
En douce, je vais me cacher, je vais me cacher.
(Il se cache sous la table.)
(Don Giovanni ouvre.)
SCÈNE XV
LE COMMANDEUR
Don Giovanni, tu m’as invité à dîner avec toi, et je suis venu !
DON GIOVANNI
Jamais je ne l’aurais cru, mais je ferai mon possible !
Leporello, fais apporter tout de suite un autre couvert !
257
SECOND ACTE SCÈNE XV
LEPORELLO (mezzo fuori col capo della mensa)
Ah padron! ah padron! ah padron siam tutti morti!
(Con molti atti di paura esce e va per partire.)
DON GIOVANNI
Vanne dico...
IL COMMENDATORE
Ferma un po’. Non si pasce di cibo mortale chi si pasce di
cibo celeste.
Altre cure più gravi di queste, altra brama quaggiù mi
guidò!
LEPORELLO
La terzana
D’avere mi sembra
DON GIOVANNI
Parla dunque:
LEPORELLO
E le membra fermar più
Non so.
DON GIOVANNI
Che chiedi,
LEPORELLO
La terzena d’avere
Mi sembra,
DON GIOVANNI
Che vuoi?
LEPORELLO
E le membra fermar più non
MOZART DON GIOVANNI
258
LEPORELLO (sortant la tête à moitié de sous la table)
Ah maître! ah maître! ah maître nous sommes tous morts !
(Il sort avec beaucoup de gestes de frayeur et s’apprête à partir. )
DON GIOVANNI
Va te dis-je...
LE COMMANDEUR
Arrête un peu. Il ne se nourrit pas de nourritures terrestres
celui qui se nourrit de nourritures célestes.
D’autres soins, plus graves que ceux-là, d’autres volontés
m’ont mené ici bas !
LEPORELLO
Je crois
Que j’ai la fièvre
DON GIOVANNI
Parle donc :
LEPORELLO
Et je ne peux m’arrêter
De trembler.
DON GIOVANNI
Que demandes-tu,
LEPORELLO
Je crois
Que j’ai la fièvre
DON GIOVANNI
Que veux-tu ?
LEPORELLO
Et je ne peux m’arrêter
259
SECOND ACTE SCÈNE XV
So.
IL COMMENDATORE
Parlo,
Ascolta, più tempo non ho.
DON GIOVANNI
Parla, parla, ascoltando ti sto.
IL COMMENDATORE
Tu m’invitasti a cena, il tuo dover or sai;
Rispondimi, rispondimi: verrai tu a cenar meco?
LEPORELLO (da lontano, tremando)
Oibò, oibò! tempo non ha, scusate.
DON GIOVANNI
A torto di viltate tacciato mai sarò!
IL COMMENDATORE
Risolvi:
DON GIOVANNI
Ho già risolto.
IL COMMENDATORE
Verrai?
LEPORELLO (a Don Giovanni)
Dite di no! dite di no!
DON GIOVANNI
Ho fermo il cuore in petto: non ho timor, verrò!
MOZART DON GIOVANNI
260
De trembler.
LE COMMANDEUR
Je parle,
Écoute, je n’ai plus le temps.
DON GIOVANNI
Parle, parle, je t’écoute
LE COMMANDEUR
Tu m’as invité à dîner, tu connais maintenant ton devoir ;
Réponds-moi, réponds-moi : viendras-tu dîner avec moi ?
LEPORELLO (de loin, tremblant)
Ah non, ah non ! il n’a pas le temps, excusez !
DON GIOVANNI
Jamais on ne m’accusera de lâcheté !
LE COMMANDEUR
Décide-toi :
DON GIOVANNI
J’ai déjà décidé.
LE COMMANDEUR
Tu viendras ?
LEPORELLO (à Don Giovanni)
Dites non ! dites non !
DON GIOVANNI
Mon cœur est solide dans ma poitrine : je n’ai pas peur,
je viendrai !
261
SECOND ACTE SCÈNE XV
IL COMMENDATORE
Dammi la mano in pegno!
DON GIOVANNI
Eccola!
(Grida forte.)
Oimè!
IL COMMENDATORE
Cos’hai?
DON GIOVANNI
Che gelo è questo mai?
IL COMMENDATORE
Pentiti, cangia vita: è l’ultimo momento!
DON GIOVANNI (vuol sciogliersi, ma invano)
No no, ch’io non mi pento vanne lontan da me!
IL COMMENDATORE
Pentiti, scellerato!
DON GIOVANNI
No, vecchio infatuato!
IL COMMENDATORE
Pentiti!
DON GIOVANNI
No!
IL COMMENDATORE
Pentiti!
MOZART DON GIOVANNI
262
LE COMMANDEUR
En gage, donne moi ta main !
DON GIOVANNI
La voici !
(Il pousse un cri violent.)
Hélas !
LE COMMANDEUR
Qu’as-tu ?
DON GIOVANNI
Quel est ce froid ?
LE COMMANDEUR
Repens-toi, change de vie : c’est le dernier moment !
DON GIOVANNI (voulant se dégager, en vain)
Non non, je ne me repens pas, éloigne-toi de moi !
LE COMMANDEUR
Repens-toi, scélérat !
DON GIOVANNI
Non, vieux fat !
LE COMMANDEUR
Repens-toi !
DON GIOVANNI
Non !
LE COMMANDEUR
Repens-toi !
263
SECOND ACTE SCÈNE XV
DON GIOVANNI
No!
IL COMMENDATORE
Sì!
DON GIOVANNI
No!
IL COMMENDATORE
Sì!
DON GIOVANNI
No!
LEPORELLO
Sì!
Sì!
IL COMMENDATORE
Sì!
DON GIOVANNI
No! No!
IL COMMENDATORE
Ah tempo più non v’è!
(Parte.)
Foco da diverse parti, tremuoto.
DON GIOVANNI
Da qual tremore insolito... Sento assalir gli spiriti...
Donde escono quei vortici di foco pien d’orror!
MOZART DON GIOVANNI
264
DON GIOVANNI
Non !
LE COMMANDEUR
Si !
DON GIOVANNI
Non !
LE COMMANDEUR
Si !
DON GIOVANNI
Non !
LEPORELLO
Si !
Si !
LE COMMANDEUR
Sì !
DON GIOVANNI
Non ! Non !
LE COMMANDEUR
Ah, le temps est écoulé !
(Il sort.)
Feu de plusieurs côtés, tremblement de terre.
DON GIOVANNI
Quel étrange frisson assaille mes esprits...
D’où sortent ces tourbillons de feu et d’horreur ?
265
SECOND ACTE SCÈNE XV
CORO (di sotterra, con voci cupe)
Tutto a tue colpe è poco.
Vieni: c’è un mal peggior!
DON GIOVANNI
Chi l’anima mi lacera! Chi m’agita le viscere?
Che strazio, ohimè, che smania! Che inferno,
LEPORELLO
Che ceffo disperato!
Che gesti da dannato!
Che gridi, che lamenti!
DON GIOVANNI
Che terror!
LEPORELLO
Come mi fa terror, mi fa terror!
CORO
Tutto a tue colpe
È poco
DON GIOVANNI
Chi l’anima mi lacera!
LEPORELLO
Che ceffo
Disperato!
CORO
Vieni: c’è un mal peggior!
DON GIOVANNI
Chi ma’agita le viscere!
MOZART DON GIOVANNI
266
CHŒUR (de sous la terre, aux voix sombres)
C’est peu pour toutes tes fautes.
Viens : voici un mal plus grand !
DON GIOVANNI
Qui déchire mon âme ? Qui secoue mes entrailles ?
Quelle torture, hélas, quel tourment ! Quel enfer,
LEPORELLO
Quelle mine désespérée !
Quels gestes de damné !
Quels cris, quelles lamentations !
DON GIOVANNI
Quelle terreur !
LEPORELLO
Je suis terrifie, terrifié !
CHŒUR
Pour toutes tes fautes
C’est peu.
DON GIOVANNI
Qui déchire mon âme !
LEPORELLO
Quelle mine de
Désespoir !
CHŒUR
Viens : voici un mal plus grand !
DON GIOVANNI
Qui secoue mes entrailles !
267
SECOND ACTE SCÈNE XV
Che strazio, oimè, che smania!
LEPORELLO
Che gesti da dannato
Che gridi,
LEPORELLO
Che
Lamenti!
DON GIOVANNI
Ah!
LEPORELLO
Che
Gridi, che lamenti!
Come mi fa terror!
CORO
Vieni! Vieni!
Vieni: c’è un mal peggior!
DON GIOVANNI
Che inferno! Che terror!
(Il foco cresce; si sprofonda.)
DON GIOVANNI
Ah!
(Resta inghiotitto dalla terra.)
LEPORELLO
Ah!
MOZART DON GIOVANNI
268
Quelle torture, hélas, quel tourment !
LEPORELLO
Quels gestes de damné !
Quels cris,
LEPORELLO
Quelles
Lamentations !
DON GIOVANNI
Ah !
LEPORELLO
Quels
Cris, quelles lamentations !
Je suis terrifié !
CHŒUR
Viens ! Viens !
Viens : voici un mal plus grand !
DON GIOVANNI
Quel enfer ! Quelle terreur !
(Le feu grandit, Don Giovanni s’enfonce dans le sol.)
DON GIOVANNI
Ah !
(Il est englouti par la terre.)
LEPORELLO
Ah !
269
SECOND ACTE SCÈNE XV
SCENA ULTIMA
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO
E MASETTO (con ministri di giustizia)
Ah, dove è il perfido, dov’è l’indegno?
Tutto il mio sdegno sfogar io vo’, sfogar io vo’.
DONNA ANNA
Solo mirandolo stretto in catene, alle mie pene alma darò.
LEPORELLO
Più non sperate... di ritrovarlo... più non cercate:
Lontano andò, lontano andò.
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Cos’è?
Favella! Cos’è? favella!
Via presto, sbrigati...
LEPORELLO
Venne un colosso... venne un colosso... Ma
Se non
Posso... Ma se...
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Via presto, sbrigati!
LEPORELLO
... Non posso, ma se non posso,
Ma se non posso, ma se non posso...
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Presto! favella! sbrigati!
MOZART DON GIOVANNI
270
DERNIÈRE SCÈNE
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO
& MASETTO (avec des officiers de justice)
Ah, où est le perfide, où est l’infâme ?
Je vais faire éclater ma colère.
DONNA ANNA
Le voir chargé de chaînes apaiserait toutes mes peines.
LEPORELLO
N’espérez plus... le retrouver... ne cherchez plus :
Il est parti loin, il est parti loin.
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Comment ?
Parle ! Comment ? parle !
Allez vite, dépêche-toi...
LEPORELLO
Un colosse est venu... un colosse est venu... Mais
Si je ne
Peux... Mais si...
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Allez vite, dépêche-toi !
LEPORELLO
... Je ne peux pas, mais si je ne peux pas,
Mais si je ne peux pas, mais si je ne peux pas...
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Vite ! parle ! dépêche-toi !
271
SECOND ACTE DERNIÈRE SCÈNE
LEPORELLO
Tra fumo e foco... badate un poco... l’uomo di sasso...
Fermate il passo... giusto là sotto... diede il gran botto...
Giusto là il diavolo, se ’l trangugiò.
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO
E MASETTO
Stelle! che sento!
LEPORELLO
Vero è l’evento!
DONNA ELVIRA
Ah certo è
L’ombra che m’incontrò,
DONNA ANNA
Ah certo è l’ombra che l’incontro,
ZERLINA E DON OTTAVIO
Ah certo è l’ombra,
MASETTO
Ah
Certo è
L’ombra, è
L’ombra che l’incontrò,
Ah certo è l’ombra, ah certo è l’ombra che l’incontro!
DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO
Ah, certo è
L’ombra che l’incontrò.
Ah certo è l’ombra, ah certo è l’ombra che l’incontro!
DONNA ELVIRA
Ah, certo è
MOZART DON GIOVANNI
272
LEPORELLO
Dans la fumée et le feu... écoutez un peu... l’homme de pierre...
Arrêtez-vous... juste là-dessous... il a frappé un grand coup...
Juste là, le diable se l’est englouti.
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO
& MASETTO
Ciel ! qu’entends-je !
LEPORELLO
La chose est vraie !
DONNA ELVIRA
Ah c’est sûrement
L’ombre que j’ai rencontrée,
DONNA ANNA
Ah c’est sûrement l’ombre qu’elle a rencontrée,
ZERLINA & DON OTTAVIO
Ah, c’est sûrement l’ombre,
MASETTO
Ah
C’est sûrement
L’ombre, c’est
L’ombre qu’elle a rencontrée,
Ah c’est sûrement l’ombre, l’ombre qu’elle a rencontrée !
DONNA ANNA, ZERLINA & DON OTTAVIO
Ah, c’est sûrement
L’ombre qu’elle a rencontrée
Ah c’est sûrement l’ombre, l’ombre qu’elle a rencontrée !
DONNA ELVIRA
Ah, c’est sûrement
273
SECOND ACTE DERNIÈRE SCÈNE
L’ombra che m’incontrò.
Ah certo è l’ombra, ah certo, ah certo è l’ombra che
m’ i n c o n t r o !
DON OTTAVIO
Or che tutti, o mio tesoro, vendicati siam dal cielo,
Porgi, porgi a me un ristoro: non mi far languire ancor.
DONNA ANNA
Lascia, o caro, un anno ancora allo sfogo del mio cor.
DON OTTAVIO
Al desio di chi
M’adora
DONNA ANNA
Al
Desio di chi
T’adora
DON OTTAVIO
Ceder
Deve un fido amor,
DONNA ANNA
Ceder deve un fido amor;
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
Ceder deve, ceder deve un fido amor.
DONNA ANNA
Al desio di chi
T’adora
DON OTTAVIO
Al
MOZART DON GIOVANNI
274
L’ombre que j’ai rencontrée.
Ah c’est sûrement l’ombre, sûrement l’ombre que j’ai
r e n c o n t r é e !
DON OTTAVIO
Mon amour, maintenant que le ciel nous a tous vengés,
Donne-moi consolation : ne me fais pas languir encore.
DONNA ANNA
Ô cher, laisse encore une année à mon cœur pour s’épancher.
DON OTTAVIO
Au désir de qui
M’adore
DONNA ANNA
Au
Désir de qui
T’adore
DON OTTAVIO
Doit
Céder un fidèle amour,
DONNA ANNA
Doit céder un fidèle amour ;
DONNA ANNA & DON OTTAVIO
Doit céder, doit céder un fidèle amour.
DONNA ANNA
Au désir de qui
T’adore
DON OTTAVIO
Au
275
SECOND ACTE DERNIÈRE SCÈNE
Desio di chi
M’adora
DONNA ANNA
Ceder
Deve un fido
Amor,
DON OTTAVIO
Ceder
Deve un fido amor,
DONNA ANNA E DON OTTAVIO
Ceder deve, ceder deve un fido amor,
Un fido, un fido amor.
DONNA ELVIRA
Io men vado in un ritiro a finir la vita mia.
ZERLINA
Noi, Masetto, a casa andiamo, a cenar in compagnia.
MASETTO
Noi, Zerlina, a casa andiamo, a cenar in compagnia.
LEPORELLO
Ed io vado all’osteria a trovar padron miglior.
ZERLINA, MASETTO E LEPORELLO
Resti dunque quel birbon
Con Proserpina e Pluton, con Proserpina e Pluton.
E noi tutti, o buona gente, ripetiam allegramente
L’antichissima canzon, l’antichissima canzon:
DONNA ANNA E DONNA ELVIRA
Questo è il fin di chi fa mal, di chi fa mal,
MOZART DON GIOVANNI
276
Désir de qui
M’adore
DONNA ANNA
Doit
Céder un fidèle
Amour,
DON OTTAVIO
Doit
Céder un fidèle amour,
DONNA ANNA & DON OTTAVIO
Doit céder, doit céder un fidèle amour,
Un fidèle, un fidèle amour.
DONNA ELVIRA
Moi je vais finir ma vie en un lieu retiré.
ZERLINA
Nous, Masetto, allons à la maison, pour dîner ensemble.
MASETTO
Nous, Zerlina, allons à la maison, pour dîner ensemble.
LEPORELLO
Et moi, à l’auberge, pour trouver un meilleur maître.
ZERLINA, MASETTO & LEPORELLO
Que cette canaille reste donc
Avec Proserpine et Pluton, Proserpine et Pluton.
Et nous tous, ô bonnes gens, répétons allègrement,
La très ancienne chanson, la très ancienne chanson :
DONNA ANNA ET DONNA ELVIRA
Ainsi finissent les méchants, les méchants,
277
SECOND ACTE DERNIÈRE SCÈNE
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO, MASETTO
E LEPORELLO
Questo è il fin!
ZERLINA
Questo è il fin di chi fa mal, di chi fa mal,
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA E DON OTTAVIO
Questo è il
Fin! Questo è il fin di chi fa mal, di chi fa mal!
MASETTO E LEPORELLO
Questo è il fin di chi fa mal,
Di chi fa mal, di chi fa mal!
TUTTI
Questo è il fin di chi fa mal, di chi fa mal!
E de’ perfidi la morte
Alla vita è sempre, è sempre ugual, è sempre ugual!
E de’ perfidi la morte
Alla vita è sempre, è sempre, è sempre ugual,
Alla vita è sempre ugual, alla vita è sempre ugual,
È sempre ugual, è sempre ugual, è sempre ugual!
Fine dell’opera
MOZART DON GIOVANNI
278
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO, MASETTO
& LEPORELLO
Ainsi finissent !
ZERLINA
Ainsi finissent les méchants, les méchants,
DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA & DON OTTAVIO
Ainsi
Finissent ! Ainsi finissent les méchants, les méchants !
MASETTO & LEPORELLO
Ainsi finissent les méchants,
Les méchants, les méchants !
TOUS
Ainsi finissent les méchants, les méchants !
Et la mort des trompeurs
À leur vie toujours ressemble, toujours, toujours ressemble !
Et la mort des trompeurs
À leur vie toujours ressemble, toujours, toujours ressemble !
À leur vie toujours ressemble,
Toujours ressemble, toujours ressemble !
Fin de l’opéra
Traduction française : Jean Spenlehauer
279
SECOND ACTE DERNIÈRE SCÈNE
CAHIER de LECTURES
Molière
Un cœur à aimer toute la terre
Ivan Nagel
L’incarnation du bonheur
André Tubeuf
La chasse & la fuite
Alfred de Musset
Sérénade de Don Juan
Lorenzo Da Ponte
Don Juan n’eut aucun succès
E.T.A. Hoffmann
Don Juan
Jean Genet
Parmi les morts
Alexandre Blok
Les pas du Commandeur
Charles Baudelaire
Don Juan aux enfers
Quand on fait ricocher une pierre à la surface de l’eau,
elle y court un certain temps en bonds légers, mais au
dernier, elle plonge d’un coup dans l’abîme : Don Giovanni
danse de même au-dessus de l’abîme, tout à l’allégresse du
court délai qui lui est accordé.
SOREN KIERKEGAARD
(1813-1855)
’ ’
283
MOLIÈRE
Un cœur à aimer toute la terr e
DOM JUAN (à Sganarelle)
Quoi ? tu veux qu’on se lie à demeurer au premier objet
qui nous prend, qu’on renonce au monde pour lui, et qu’on
n’ait plus d’yeux pour personne ? La belle chose de vouloir se
piquer d’un faux honneur d’être fidèle, de s’ensevelir pour
toujours dans une passion, et d’être mort dès sa jeunesse, à
toutes les autres beautés qui nous peuvent frapper les yeux :
non, non, la constance n’est bonne que pour des ridicules,
toutes les belles ont droit de nous charmer, et l’avantage d’être
rencontrée la première, ne doit point dérober aux autres les
justes prétentions qu’elles ont toutes sur nos coeurs. Pour moi,
la beauté me ravit partout, où je la trouve ; et je cède facile-
ment à cette douce violence, dont elle nous entraîne ; j’ai beau
être engagé, l’amour que j’ai pour une belle, n’engage point
mon âme à faire injustice aux autres ; je conserve des yeux
pour voir le mérite de toutes, et rends à chacune les hom-
mages, et les tributs où la nature nous oblige. Quoi qu’il en
TITRE COURANT
MOLIÈRE
soit, je ne puis refuser mon coeur à tout ce que je vois d’ai-
mable, et dès qu’un beau visage me le demande, si j’en avais
dix mille, je les donnerais tous. Les inclinations naissantes
après tout, ont des charmes inexplicables, et tout le plaisir de
l’amour est dans le changement. On goûte une douceur extrê-
me à réduire par cent hommages le coeur d’une jeune beauté,
à voir de jour en jour les petits progrès qu’on y fait ; à com-
battre par des transports, par des larmes, et des soupirs, l’in-
nocente pudeur d’une âme, qui a peine à rendre les armes, à
forcer pied à pied toutes les petites résistances qu’elle nous
oppose, à vaincre les scrupules, dont elle se fait un honneur,
et la mener doucement, où nous avons envie de la faire venir.
Mais lorsqu’on en est maître une fois, il n’y a plus rien à dire,
ni rien à souhaiter, tout le beau de la passion est fini, et nous
nous endormons dans la tranquillité d’un tel amour ; si
quelque objet nouveau ne vient réveiller nos désirs, et pré-
senter à notre coeur les charmes attrayants d’une conquête à
faire. Enfin, il n’est rien de si doux, que de triompher de la
résistance d’une belle personne ; et j’ai sur ce sujet l’ambition
des conquérants, qui volent perpétuellement de victoire en
victoire, et ne peuvent se résoudre à borner leurs souhaits. Il
n’est rien qui puisse arrêter l’impétuosité de mes désirs, je me
sens un coeur à aimer toute la terre; et comme Alexandre, je
souhaiterais qu’il y eût d’autres mondes, pour y pouvoir
étendre mes conquêtes amoureuses.
Extrait de Dom Juan , acte I, scène 2 (1665)
285
IVAN NAGEL
L’INCARNATION DU BONHEUR
Don Giovanni va en enfer – parce que jusqu’à la fin il
lance à la face du ciel la devise des opéras bouffes de Mozart :
« Le ciel, c’est les autres. » Il ne connaît que les hommes, il
est assoiffé de les voir, de les sentir, de les toucher. Comme mû
par le génie déchaîné du buffa, il cherche la présence d’autrui
la plus pleine, la plus proche, à savoir celle des femmes.
Certes, ses ardeurs supposent souffrance, lutte et mort d’au-
trui ; et son dialogue avec le Convive de pierre fait finalement
éclater souffrance, lutte et mort en ce gigantesque rictus d’ago-
nie que ni drame ni musique ne donnent généralement à voir,
mais seulement les cauchemars. Cependant, des Noces à Don
Giovanni, la cohérence et l’élan expressif des personnages,
leur présence sans réserve dans les ensembles n’ont en rien
diminué. Le Dramma giocoso (Mozart dans son catalogue le
dénomma « opera buffa ») déborde, autant que la Commedia
per musica, d’un bonheur sonore. Oui, il constitue la tentative
d’un bonheur immanent au terrestre. Que le héros le prenne
IVAN NAGEL
au sens littéral ou fondamental, qu’importe. Car le principe
fondamental de Don Giovanni est le littéral ; son bonheur –
comme Kierkegaard l’a compris n’est pas la femme ni toutes
les femmes, mais chaque femme. Au milieu de la structure de
la comédie s’entrouvre un paradoxe déconcertant : Don Gio-
vanni traque le bonheur d’autrui, non par avidité, jalousie ou
misanthropie, mais parce qu’il est l’incarnation du bonheur.
Extrait de Autonomie et grâce. Sur les opéras de Mozart
Traduit de l’allemand par Anne-Marie Lang
© Éditions de l’Aube, 1990
287
ANDRÉ TUBEUF
LA CHASSE & LA FUITE
Don Juan, visiblement, n’aime pas les livres. Le seul qu’ i l
traîne avec lui, ou plutôt fait porter par son valet, est un livre
aux pages blanches : et ce qu’il y écrit, ce sont ses a v e n t u r e s,
épisodes d’une vie supposée, d’une vie amoureuse, et où un
nom de plus inscrit figure une place forte conquise, une vertu
convertie. Pascal n’avait pas encore écrit son étude sur le diver-
tissement quand Tirso de Molina, le premier, fixa les traits du
Séducteur de Séville. Mais ce sont Les Pensées de Pascal que
Don Juan pourrait avoir comme livre de chevet, comme bré-
viaire, comme bible – s’il pouvait lire. À quoi se résume le mal-
heur de l’homme selon Pa s c a l ? À ce qu’il ne peut se tenir seul
et tranquille dans une chambre. Sa propre société ne l’assomme
pas seulement, elle l’inquiète. Il faudra bien qu’il s’en délivre
par quelque chose qui l’agite : une meute qui passe sous sa
fenêtre, un manège qui tourne dans la rue, même une mouche
qui bourdonne dans sa chambre. En chasse, alors ! Mais pour
quoi faire ? Pas pour prendre. Pour s’étourdir, pour s’oublier,
pour tuer le temps, faute de pouvoir se tuer soi-même – ce pour
quoi on ne s’aime pas assez. Préférer la chasse à la prise, telle
est la leçon que Pascal tire de l’examen de ce divertissement qui
nous chasse nous-mêmes sur les chemins, gibier plutôt que
chasseurs, et sûrement victimes avant de jouer nous-mêmes au
b o u r r e a u ; et c’est une leçon nihiliste. À quoi mènent, en effet,
tant d’efforts ? Christophe Colomb ambitionnait de révéler et
d’imposer à la ferveur des hommes une figure neuve du monde ;
les Croisés allaient délivrer Constantinople, ou Jérusalem ;
même Don Quichotte, avec sa Rossinante et ses moulins à vent,
pouvait espérer retrouver un jour son preux entre les preux,
Amadis de Gaule, son modèle. Qui chasse ne cherche rien qu’ à
fuir en avant. Sûrement il tuera son lièvre, ou son perdreau.
Sûrement il ne fera pas grâce à la victime, si elle le regarde avec
ses yeux suppliants, soudain humains, comme dans les contes
du folklore. Et sûrement il ne mangera pas de gibier, ni ce soir
ni demain. Ainsi Don Juan court ce qui reste à courir dans ce
monde sans aventure : les femmes.
Ce n’est honorable ni pour lui, ni pour elles. L’Occident –
Denis de Rougemont l’a assez montré dans son illustre essai
L’Amour et l’Occident – a formé sa spiritualité, il l’a fixée et
sublimée autour de la figure des femmes, créatures plus faibles
et plus gracieuses, offertes à la convoitise du soudard et du
pillard. La courtoisie consiste précisément à respecter ce que la
Nature a fait sans force (la force, elle, se faisant respecter d’elle-
même). Intouchable, insensible même, doit être la femme.
Q u’elle reste sourde aux déclarations, qu’elle refuse jusqu’à son
oreille. Ainsi l’amant rebuffé s’en ira courir l’aventure ; au
r e t o u r, après sept ans d’épreuve, on l’entendra peut-être, faute
de l’exaucer déjà. Mais comment supporter cette présence de la
femme, l’intouchable, dans une Espagne, et une France, et une
Allemagne, désormais redevenues provinces, où il n’y a plus
rien à faire, de tout le jour, que passer et repasser sur la place
(comme au prélude de Carmen en cette même Séville), guettant
une œillade, assiégeant les vertus ? Depuis qu’on ne se bat plus
contre les infidèles, il n’y a plus que les femmes qui soient, der-
rière balcons et jalousies, places fortes.Un barbon, Bartolo, dans
cette même Séville, croira toujours tenir les clés d’une place
forte, dans Le Barbier q u’on sait. Et Don Juan, désoeuvré, chasse
en ville : et ce qu’il chasse l’ennuie autant que ce qu’il fuit.
Extrait de L’Offrande musicale, Collections Bouquins
© Robert Laffont, 2007
ANDRÉ TUBEUF
289
ALFRED DE MUSSET
SÉRÉNADE de DON JUAN
Vous souvient-il, lecteur, de cette sérénade
Que don Juan, déguisé, chante sous un balcon ?
– Une mélancolique et piteuse chanson,
Respirant la douleur, l’amour et la tristesse.
Mais l’accompagnement parle d’un autre ton.
Comme il est vif, joyeux ! avec quelle prestesse
Il sautille ! – On dirait que la chanson caresse
Et couvre de langueur le perfide instrument,
Tandis que l’air moqueur de l’accompagnement
Tourne en dérision la chanson elle-même,
Et semble la railler d’aller si tristement.
Tout cela cependant fait un plaisir extrême. –
C’est que tout en est vrai, – c’est qu’on trompe et qu’on aime ;
C’est qu’on pleure en riant ; – c’est qu’on est innocent
Et coupable à la fois ; – c’est qu’on se croit parjure
Lorsqu’on n’est qu’abusé ; c’est qu’on verse le sang
Avec des mains sans tache, et que notre nature
A de mal et de bien pétri sa créature:
Tel est le monde, hélas !...
Extrait de Namouna , Chant 1, Strophe 13 (1832)
290
LORENZO DA PONTE
Don Juan n’eut aucun succès
Je pensai qu’il fallait réveiller ma muse endormie, que ces
deux récents échecs avaient paralysée. Les trois maestri
Martini, Mozart et Salieri m’en fournirent l’occasion en venant
simultanément me demander un libretto. Je les aimais et les
appréciais également tous les trois. J’espérais, avec leur aide,
me relever de mes dernières chutes. Je n’entrevoyais d’autre
moyen de les contenter en même temps que de composer trois
drames à la fois. Salieri ne me demandait pas une pièce origi-
nale. Il avait écrit à Paris la musique de l’opéra Tarare ; il
désirait adapter cette musique à des paroles italiennes. Ce
n’était donc qu’une traduction libre qu’il lui fallait. Quant à
Mozart et Martini, ils s’en remettaient à moi pour le choix du
sujet. Je destinai Don Juan au premier qui en fut ravi, et
L’Arbre de Dianeà Martini, comme sujet mythologique en har-
monie avec son talent, si plein de cette douce mélodie dont
plus d’un compositeur a le sentiment inné, mais que de rares
exceptions seules savent traduire.
291
Mes trois sujets arrêtés, je me présentai à l’empereur et lui
exprimai mon intention de les faire marcher de front. Il se
r é c r i a : « Vous échouerez », me dit-il. « Peut-être, mais j’es-
sayerai. J’écrirai pour Mozart la nuit en lisant quelques pages
d e L’ E n f e r de Dante ; le matin pour Martini en lisant Pétrarque
et le soir pour Salieri avec l’aide du Tasse. J’étais content de ma
comparaison, et à peine rentré chez moi, je me mis à l’œuvre.
Je m’asseyais devant ma table de travail vers l’heure de
minuit : une bouteille d’excellent vin de Tokay était à ma
droite, mon écritoire devant moi, une tabatière pleine de tabac
de Séville à ma gauche. En ce temps-là, une jeune et belle
personne de seize ans, que je ne n’aurais voulu aimer que
comme un père, habitait avec ma mère dans ma maison.
[...]
C’est ainsi qu’entre le vin de Tokay, le tabac de Séville, la
sonnette sur ma table et la belle Allemande semblable à la
plus jeune des muses, j’écrivis la première nuit pour Mozart
les deux premières scènes de Don Juan , deux actes de L’Arbre
de Diane, plus de la moitié du premier acte de Tarare, titre
que je changeait en celui d’Assur. Dans la matinée, je portais
mon travail aux trois compositeurs qui n’en pouvaient croire
leurs yeux. En soixante-trois jours, Don Juan et L’Arbre de
Diane étaient terminés.
[...]
Je n’avais pas à Prague assisté à la représentation de Don
Juan , mais Mozart n’avait pas tardé à m’instruire qu’il avait
fait merveille. L’impresario Guardassoni m’avait également
écrit à ce sujet : « Vive Da Po n t e ! vive Mozart ! les imprésari,
ainsi que les artistes, doivent les bénir. Tant qu’ils vivront, la
misère n’osera plus approcher des théâtres. »
L’empereur me fit appeler, et, avec les plus gracieux
éloges, me fit un nouveau don de cent sequins en me disant
qu’il brûlait du désir d’entendre Don Juan . J’écrivis à Mozart,
qui accourut et donna les partitions au copiste, lequel s’em-
pressa de les distribuer. Le départ prochain de Joseph II en
DON JUAN N’EUT AUCUN SUCCÈS
hâta la mise en scène et, le dirai-je ? DON JUAN N’EUT AUCUN
SUCCÈS ! Tout le monde, Mozart seul excepté, s’imagina que la
pièce avait besoin d’être retouchée. Nous y fîmes des addi-
tions, nous changeâmes divers morceaux ; une seconde fois :
DON JUAN N’EUT AUCUN SUCCÈS ! Ce qui n’empêcha pas l’em-
pereur de dire : « Cette œuvre est divine, elle est peut-être
encore plus belle que Les Noces de Figaro : mais ce n’est pas
un morceau pour mes Viennois. » Je répétai ces paroles à
Mozart qui, sans se déconcerter, me répondit : « Laissons leur
le temps de le goûter. » Il ne s’est pas trompé. D’après son
conseil, je cherchai à faire jouer Don Juan le plus souvent
possible ; à chaque représentation, le succès grandissait. Peu
à peu, les Viennois s’habituèrent à savourer ce morceau et à
l’apprécier, et finirent par le goûter au point d’élever Don Juan
au rang des chefs-d’œuvre dramatiques.
Extrait des Mémoires (1749-1838)
Traduction de Roger Vèze, 1931
© Éditions d’Aujourd’hui, Collection Les Introuvables, 1983
LORENZO DA PONTE
293
E.T.A. HOFFMANN
DON JUAN
I. Aventure romanesque d’un voyageur enthousiaste
Une sonnerie stridente et le cri retentissant : « Le spec -
tacle commence ! » me réveillèrent du doux sommeil dans
lequel j’étais enseveli. Des basses se répondaient en bourdon-
nant... un coup de timbale... des éclats de trompette, un la pur
soutenu par le hautbois... les violons qui s’accordent... Je me
frotte les yeux. Est-ce que le Diable, qui toujours veille, m’au-
rait... dans quelque ivresse ? Non ! je me trouve bien dans la
chambre de l’hôtel où je suis descendu hier soir, à moitié
éreinté. Juste au-dessus de mon nez pend précisément la
houppe brillante d’un cordon de sonnette : je le tire violem-
ment, le garçon paraît.
– Mais, au nom du ciel, que signifie cette musique con-
fuse que j’entends juste à côté ? Donne-t-on donc un concert
dans la maison ?
– Votre Excellence (j’avais bu du champagne au dîner de
la table d’hôte !)... Votre Excellence ne sait peut-être pas
encore que cet hôtel est attenant au théâtre. Cette porte de
tapisserie donne sur un petit corridor qui vous mène directe-
ment au no 23 ; c’est la loge des étrangers.
294
– Comment !... un théâtre ?... une loge pour les étrangers ? . . .
– Oui, la petite loge des étrangers, pour deux personnes,
trois au plus, mais réservée aux personnes de distinction
comme vous ; toute tapissée de vert, avec une grille sur le
devant, tout contre la scène ! S’il plaît à Votre Excellence...
Nous donnons aujourd’hui le Don Juan du célèbre M. Mozart,
de Vienne. Nous porterons sur la note le prix de la loge, un
thaler huit groschen.
Il ouvrait déjà la loge en prononçant ces derniers mots, tant
au seul nom de Don Juan j’avais mis de précipitation à gagner
le corridor par la porte dérobée. La salle était spacieuse, pour
une ville de second ordre, décorée avec beaucoup de goût, et
brillamment éclairée. Loges et parterre étaient combles.
Les premiers accords de l’ouverture me convainquirent
qu’un orchestre tout à fait excellent, pour peu que les chan-
teurs fussent bons, allait me procurer la plus exquise jouis-
sance de ce chef-d’œuvre.
Dès le premier andante, les terreurs de l’effroyable regno
al pianto des Enfers me saisissent... les frissonnants pressen-
timents de l’horreur me pénètrent l’âme. Puis résonne à mes
oreilles, comme un cri de joie sacrilège, la fanfare triomphale
de la septième mesure de l’allégro... Je vois des profondeurs
de la nuit ces démons enflammés menacer de leurs griffes
flamboyantes des groupes qui dansent gaiement sur une mince
voûte, au-dessus des abîmes sans fond. Le conflit du genre
humain avec les horribles puissances inconnues qui l’assiè-
gent en guettant sa chute se présente dans toute sa lumière
aux yeux de mon esprit.
Enfin la tempête se calme, le rideau se lève. Transi, plein
d’humeur, Leporello, enveloppé de son manteau, fait les cents
pas dans la nuit sombre, devant le pavillon.
– Notte e giorno faticar !
Q u o i ! de l’italien ? De l’italien dans cette ville allemande ?
Ah che piacere !je vais donc entendre tous les récitatifs, tout
l’opéra, tel que le maître génial l’a conçu et élaboré !
E.T.A. HOFFMANN
295
Voici Don Juan qui s’élance hors du pavillon ; et voici der-
rière lui, Donna Anna qui retient énergiquement le criminel par
son manteau... Ah ! quelle ex p r e s s i o n ! Elle pourrait être plus
grande, plus svelte, plus majestueuse dans sa démarche, mais
quelle tête ! Des yeux d’où l’amour, la colère, la haine, le déses-
poir lancent, comme d’un foyer unique, des éclairs de feu gré-
geois, étincelants, qui pénètrent et consument inex t i n g u i b l e-
ment le plus profond de l’âme ! Les tresses dénouées de la
sombre chevelure roulent en boucles ondoyantes le long du cou.
Le blanc vêtement de nuit découvre traîtreusement des charmes
que l’on ne surprend jamais sans danger... Déchiré par l’hor-
rible crime, son sein se soulève en violentes palpitations...
Et puis, quelle voix !
– Non sperar se non m’uccidi...
À travers la tempête des instruments, ces accents, qui
brillent encore comme autant d’éclairs, semblent coulés dans
un métal céleste. En vain Don Juan cherche à s’arracher à ses
mains... Mais le veut-il vraiment ? Pourquoi de son poing
vigoureux ne repousse-t-il pas cette femme, pourquoi ne
s’échappe-t-il pas ? Son crime lui a-t-il ôté la force d’agir ? À
moins que le combat de haine et d’amour qui se livre en son
cœur ne l’ait soudain privé de son énergie et de son courage ?
Le vieux père a expié de sa vie la folie qui l’a conduit à atta-
quer dans l’obscurité ce robuste adversaire. Don Juan et
Leporello, dialoguant en récitatif, s’avancent vers la rampe. Don
Juan défait son manteau, et apparaît superbement vêtu de
velours rouge tailladé et brodé d’argent. C’est une forte, superbe
f i g u r e : le visage, d’une beauté virile, le nez ferme, les yeux
pénétrants, les lèvres délicatement dessinées. L’étrange jeu
d’un muscle du front, juste au-dessus des sourcils, donne pen-
dant une seconde à sa physionomie quelque chose de méphis-
tophélique qui sans ravir au visage la beauté éveille pourtant
une involontaire horreur. On le croirait doué de la puissance
fascinatrice que possède le serpent à sonnettes ; il semble que
les femmes sur qui il a jeté les yeux ne puissent plus se détacher
DON JUAN
296
de lui, et doivent forcément, soumises à son sinistre pouvoir, con-
sommer elles-mêmes leur perte. Long et maigre, dans son habit
rayé de rouge et de blanc, son petit manteau rouge, son chapeau
blanc orné d’une plume rouge elle aussi, Leporello trottine
autour de lui. Les traits de son visage expriment un singulier
mélange de bonhomie, de friponnerie, de convoitise et d’impu-
dence ironique. Avec ses cheveux et sa barbe grise, ses sourcils
noirs font un étrange contraste. On voit tout de suite que le
vieux coquin mérite bien d’être le valet complice de Don Juan.
Ils ont fui heureusement par-dessus le mur... Des flam-
beaux... Donna Anna et Don Ottavio paraissent. Celui-ci est
coquet, propret petit jeune homme de vingt et un ans tout au
plus. En qualité de fiancé d’Anna, il était vraisemblablement
logé dans la maison pour qu’on ait pu l’appeler si vite. Au pre-
mier bruit – qu’il a dû entendre – il aurait pu accourir et peut-
être sauver le père; mais il lui fallait d’abord s’ajuster ; et sur-
tout il ne doit pas volontiers s’exposer à sortir la nuit...
– Ma qual mai s’offre, o Dei, spettacolo funesto agl’ occhi miei !
Les accents effroyables et déchirants de ce récitatif et du duo
suivant expriment plus que le désespoir inspiré par un crime
affreux. L’odieux attentat de Don Juan, qui ne fut pour elle qu’ u n e
menace, même s’il cause la mort de son père, ne peut suffire
à arracher de tels accents à son cœur angoissé. Un combat
funeste, mortel, tout au fond de l’âme, peut seul les faire retentir.
Voici la longue et maigre Donna Elvira, splendide encore
des restes manifestes d’une grande beauté aujourd’hui flétrie.
Elle invective le traître Don Juan : – Tu nido d’inganni...
Mais juste au moment où le compatissant Leporello
remarque fort judicieusement : Parla come un libro stampato,
je crus sentir la présence de quelqu’un à côté de moi, ou plu-
tôt derrière moi.
On avait pu aisément ouvrir la porte de la loge et s’y glis-
ser à mon insu. – Ce fut pour moi comme un coup de poignard
dans le cœur. J’étais si heureux de me trouver seul dans cette
loge, libre d’étreindre de toutes mes fibres sensitives, pa-
E.T.A. HOFFMANN
297
reilles aux tentacules d’un poulpe, ce chef-d’œuvre si parfai-
tement interprété, afin de le faire pénétrer parfaitement en
moi ! Un seul mot (qui risquait par-dessus le marché d’être
une sottise) m’aurait arraché d’une si douloureuse façon à ce
moment sublime d’enthousiasme poétique et musical ! Je réso-
lus donc de ne faire aucune attention à mon voisin, et, com-
plètement enfoncé dans la représentation, d’éviter tout mot,
tout regard. La tête appuyée sur ma main, tournant le dos au
nouveau venu, je rivais mes yeux sur la scène.
La suite de la représentation répondait à son remarquable
début. La petite, l’appétissante, l’amoureuse Zerlina console
avec des accents et des manières toutes gracieuses cet excel-
lent maladroit de Masetto. Don Juan laisse voir à nu le fond
ulcéré de son âme, son mépris pour la canaille qui l’entoure,
tout juste bonne à satisfaire en lui le désir de séduire et de
corrompre. C’était l’air impétueux Fin ch’han dal vino... Le
muscle de son front soulignait tout ceci plus énergiquement
encore qu’auparavant.
Mais voici que les masques paraissent. Leur trio est une
prière qui monte au ciel en un pur et brillant rayon. Maintenant
la toile de fond se lève. Quelle gaieté soudain : les verres
r é s o n n e n t ; les paysans et toutes sortes de masques conviés à
la fête de Don Juan tourbillonnent en foule joyeuse... Mais sur-
viennent les trois conjurés, prêts à la vengeance. Tout prend un
air plus solennel, jusqu’au moment où la danse reprend...
Voici Zerlina sauvée, et, dans le puissant et foudroyant
finale, Don Juan qui se jette hardiment, l’épée haute, contre
ses ennemis. Il fait sauter des mains du fiancé son acier de
parade, et se fraie un passage à travers la vile canaille qu’il
bouscule comme fit le vaillant Roland triomphant de l’armée
du tyran Cimosco, si bien que tous culbutent pêle-mêle le plus
comiquement du monde...
J’avais déjà cru sentir plusieurs fois, tout contre moi, une
légère, une chaude haleine, et distinguer le bruissement d’une
étoffe de soie : cela me fit bien supposer le voisinage d’une
DON JUAN
298
f e m m e ; mais, tout plongé dans le monde de poésie que m’ o u-
vrait l’opéra, je n’y prêtais pas attention. La toile étant mainte-
nant tombée, je voulus examiner ma voisine... Non ! aucun mot
ne pourrait dire quelle fut ma stupéfaction : Donna Anna, en
costume, telle absolument que je venais de la voir sur le théâtre,
se tenait auprès de moi, ses yeux pleins d’expression appuyant
sur moi le regard le plus troublant. Sans voix aucune, je la
regardai fixe m e n t : sa bouche (il me parut ainsi) se crispa en un
léger et ironique sourire, où je me vis moi-même et quelle sotte
figure je faisais. Je sentais la nécessité de lui parler, et pourtant
je ne pouvais remuer ma langue paralysée par l’étonnement et
même, je devrais bien le dire, par une sorte d’effroi.
Enfin, enfin ces paroles m’échappèrent :
– Comment est-ce possible, comment pouvez-vous être ici ?
À quoi elle répondit aussitôt dans le plus pur toscan que, si
je ne comprenais ni ne parlais l’italien, elle était obligée de se
refuser le plaisir de m’ e n t r e t e n i r, ne parlant elle-même d’autre
langue que celle-là... Comme un chant résonnaient les douces
paroles. En même temps, l’expression de son œil d’un bleu
sombre s’accentua, et chaque éclair qui en jaillissait versait un
torrent de flammes dans mon être, dont toutes les pulsations
s’accéléraient, dont toutes tressaillaient. C’était Donna Anna
sans aucun doute... Examiner la possibilité qu’elle pût être tout
ensemble sur scène et dans ma loge ne me vint même pas à
l’esprit. De même que les rêves heureux combinent ensemble
les choses les plus étranges, de même qu’une foi pieuse com-
prend l’inaccessible et l’associe sans hésiter aux phénomènes
s o i -disant naturels de la vie, ainsi tombai-je aussi auprès de
cette merveilleuse femme, dans une sorte de somnambulisme,
où je reconnus les secrètes relations qui m’attachaient à elle,
relations si intimes que, dès son apparition sur le théâtre, elle-
même n’avait pu détourner ses yeux de moi...
Avec quel bonheur je te redirais ici, mon cher Théodore,
chaque mot de la remarquable conversation qui commença
entre la signora et moi : mais hélas ! quand je veux transcrire
E.T.A. HOFFMANN
299
en allemand ce qu’elle dit, je trouve chaque mot froid et terne,
chaque phrase lourde, alors qu’elle s’exprimait avec tant de
légèreté et de charme en toscan.
Tandis qu’elle parlait de Don Juan et de son rôle, il me
semblait que la profondeur de ce chef-d’œuvre se dévoilait à
moi pour la première fois, que j’y pouvais enfin regarder clai-
rement, percevoir à plein les fantastiques apparitions d’un
monde inconnu. Elle disait que toute sa vie était musique, et
que souvent en chantant elle croyait saisir mille choses enfer-
mées mystérieusement au fond d’elle-même, de celles que
nulle parole ne saurait exprimer.
– Oui, poursuivit-elle l’œil étincelant et en élevant la voix,
je comprends fugitivement ces secrets, mais tout reste froid et
mort autour de moi, et lorsqu’on applaudit un trille difficile,
une fioriture réussie, des mains de glace étreignent mon cœur
brûlant ! Mais toi... tu me comprends ? Car je sais que pour
toi aussi s’est ouvert le merveilleux, le romantique royaume
que peuple la céleste magie des sons.
– Comment, toi, charmante et merveilleuse femme... toi...
tu me connais donc ?
– Oui ! À travers le rôle de... dans ton dernier opéra. Ce
rôle où s’exprime le magique délire de l’amour, l’ardeur infi-
nie du désir, ne l’as-tu pas tiré de tes entrailles ? Je t’ai com-
pris : ton âme s’est révélée à moi à travers ces harmonies. –
Oui (ici elle dit mon prénom), oui je t’ai chanté et je me suis
retrouvée dans tes mélodies !
La cloche du théâtre se fit entendre. Une rapide pâleur
décolora la figure non fardée de Donna Anna ; elle appuya
sa main sur son cœur, comme si elle ressentait une soudaine
d o u l e u r, et sur ces mots prononcés à voix basse : « M a lh e u r-
euse Anna, c’est maintenant qu’arrivent tes plus terribles
m o m e n t s ! . . . », elle disparut de la loge.
Le premier acte m’avait enthousiasmé, mais après cette
merveilleuse aventure, la musique agit sur moi d’une bien
autre et extraordinaire manière. Il semblait que l’accomplis-
DON JUAN
300
sement, dès longtemps promis, des plus beaux rêves venus
d’un autre monde dût réellement se produire dans ma vie ; il
semblait que les plus secrets pressentiments de mon âme
enthousiasmée eussent pris corps sous forme de sons et dus-
sent se façonner étrangement pour la plus merveilleuse révé-
lation. Dans la scène de Donna Anna, je me sentis frémir sous
une douce et chaude haleine qui glissait autour de moi, m’en-
veloppant d’une délicieuse ivresse ; involontairement mes
yeux se fermèrent ; un ardent baiser semblait brûler mes
lèvres : mais ce baiser était comme le son longuement soute-
nu d’un désir éternellement altéré.
Voici le finale commencé, dans sa gaieté effrontée : Già la
mensa e preparata ! Don Juan, attablé, caresse deux jeunes
filles et fait sauter bouchon sur bouchon, libérant les esprits
pétillants hermétiquement enfermés dans leur étroite prison.
La salle est peu profonde, avec une grande fenêtre gothique à
l’arrière-plan, par laquelle on aperçoit au loin la nuit. Déjà,
pendant qu’Elvire rappelle à l’infidèle tous ses serments, des
éclairs sillonnent les ténèbres, et l’on entend le sourd gronde-
ment de l’orage qui se rapproche. Enfin voici les formidables
coups à la porte. Elvire, les jeunes filles s’enfuient ; et, aux
effrayants accords venus du monde souterrain, on voit entrer
le terrible colosse de marbre, auprès duquel Don Juan n’est
plus qu’un pygmée. Le sol frémit sous les pas tonnants du
géant. Don Juan crie à travers la tempête, le tonnerre, les hur-
lements des démons, son terrible « No ! » L’heure de la mort
est arrivée. La statue s’enfonce, une épaisse vapeur obscurcit
la salle du festin, envahie par d’effroyables fantômes. Don
Juan, que l’on aperçoit par intervalles luttant contre les
démons, se tord dans les angoisses de l’enfer. Une explosion
comme si des milliers d’éclairs éclataient ensemble !... Don
Juan, les démons, tout a disparu, on ne sait comment !
Leporello gît évanoui dans un coin de la salle.
Quel effet bienfaisant apporte maintenant l’apparition des
autres personnages, qui cherchent en vain Don Juan dérobé à
E.T.A. HOFFMANN
301
la vengeance terrestre par les puissances souterraines. Il
semble que de ce moment seulement, l’on échappe au cercle
terrible des esprits infernaux. Donna Anna m’apparut toute
changée : une pâleur mortelle recouvrait son visage ; ses yeux
étaient éteints, sa voix tremblante et inégale. Mais dans son
petit duetto avec son suave fiancé – qui sitôt dispensé par le
ciel de sa dangereuse besogne de vengeur ne songe plus qu’à
la noce –, elle produisit en effet qui déchirait le cœur.
Le chœur fugué avait superbement couronné l’œuvre
entière et je me hâtais, vu l’état des plus exaltés où je me trou-
vais, de regagner ma chambre, quand le garçon vint me pré-
venir que le souper était servi ; je le suivis machinalement. Il
y avait brillante société à cause de la foire, et la représenta-
tion de Don Juan était le sujet de toutes les conversations. On
prisait généralement les artistes italiens et l’énergie de leur
jeu : pourtant, de petites remarques jetées par-ci par-là d’un
air malin, montraient que personne n’avait seulement soup-
çonné les sens secret de l’opéra des opéras. Don Ottavio avait
beaucoup plu. Donna Anna avait semblé trop passionnée à
l’un des interlocuteurs : il fallait, disait-il, se modérer un peu
plus sur scène, et éviter les excès d’émotion. Le récit par
Donna Anna de l’attentat de Don Juan l’avait absolument
consterné. Là-dessus, il prit une prise de tabac et jeta un
regard indescriptible de sotte malice à son voisin, qui avança
que l’Italienne était du reste une fort belle femme, mais par
trop insoucieuse de ses vêtements et de sa toilette; ainsi, dans
cette scène, une boucle de cheveux s’était déroulée et avait
mis dans l’ombre le demi-profil de son visage ! Ici un autre se
mit à fredonner : « Fin ch’han dal vino... », sur quoi une dame
opina qu’elle était bien peu satisfaite de Don Juan : cet Italien
était beaucoup trop sombre, beaucoup trop grave ; il n’avait
absolument pas su rendre le caractère frivole et gai du rôle...
Seule l’explosion finale eut tous les suffrages.
Écœuré par ce verbiage, je me sauvai dans ma chambre.
DON JUAN
302
II. Dans la loge des étrangers, n o 23
J’étais si oppressé, si à l’étroit, dans ma chambre étouffante !
À minuit, il me sembla entendre ta voix, mon cher Theodor ;
tu prononçais nettement mon nom, et un frôlement d’étoffe sem-
blait venir de la porte dérobée... Qui me retient de visiter une
fois encore le lieu de ma merveilleuse aventure ? Peut-être te
v e r r a i s-je, et Elle, qui remplit tout mon être ! Il est bien facile
d’y apporter la petite table... deux bougies... l’écritoire !
Le garçon me cherche avec le punch commandé, et trouve la
chambre vide, la porte de tapisserie ouverte... Il me suit jusque
dans la loge, et m’ examine d’un œil indécis. Sur mon signe, il
place la boisson sur la table et s’éloigne, une question sur la
langue, non sans se retourner une dernière fois pour me consi-
d é r e r. Je m’accoude à la balustrade de la loge en lui tournant le
dos, et je contemple la salle déserte, dont l’architecture, magi-
quement éclairée par mes deux bougies, s’élance en perspec-
tives merveilleuses d’un style étrange et féerique. Le courant
d’air qui traverse la salle agite le rideau... S’il allait se lever ? si
Donna Anna allait paraître, angoissée par de hideux fantômes ?
– Donna Anna ! ai-je crié malgré moi.
Mon cri expire dans l’espace désert, mais les esprits des ins-
truments de l’orchestre se réveillent... un son vibre dans l’air et
semble murmurer le nom de mon adorée ! Je ne puis me défendre
d’un secret effroi, mais ce frisson apaise salutairement mes nerfs.
[...] Deux heures sonnent... Une tiède haleine électrique
glisse vers moi et m’enveloppe... Je respire l’odeur subtile du fin
parfum italien qui m’avait révélé la présence de ma voisine lors
de la représentation du soir. Un sentiment de lourdeur me sai-
sit, que seule la musique, il me semble, serait capable d’ex p r i-
m e r. Un air plus vif traverse la salle... Les cordes du piano fré-
missent dans la fosse d’orchestre... Ciel ! comme venue du loin-
tain, portée sur les ailes vibrant en crescendo d’un orchestre
aérien, je crois entendre la voix de Donna Anna :
– Non mi dir bell’ idol mio !...[...]
E.T.A. HOFFMANN
III. Conversation de midi à la table d’hôte
en manière d’épilogue
Un homme entendu (tapotant bruyamment le couvercle de sa
tabatière) :
– Il était fatal que nous ne puissions plus de sitôt entendre
un seul opéra comme il faut ! Voilà où mène cette manie
de tout exagérer !
Une figure de mulâtre :
– Oui, oui! Je le lui ai assez souvent dit! Le rôle de Donna
Anna l’épuisait toujours !... Hier encore, elle était comme
possédée. Tout l’entracte elle l’a passé étendue sans connai-
sance, et dans la scène du second acte, elle a eu jusqu’à
des attaques de nerfs...
Un insignifiant :
– Eh bien !...
La figure de mulâtre :
– Parfaitement des attaques de nerfs, et si violentes qu’il
n’y a pas eu moyen de la transporter hors du théâtre.
Moi :
–Pour l’amour du ciel ! J’espère que tout cela n’aura pas de
suites trop graves ? Nous réentendrons bientôt la signora ?
L’homme entendu à la tabatière (prenant une prise):
– Difficilement, car la signora est morte cette nuit, sur le
coup de deux heures.
Extrait des Fantaisies dans la manière de Callot. Don Juan
Traduction française de Henri de Curzon
© Éditions Phébus, 1979
DON JUAN
JEAN GENET
Parmi les morts
Dans les villes actuelles, le seul lieu – hélas encore vers
la périphérie – où un théâtre pourrait être construit, c’est le
cimetière. Le choix servira aussi bien le cimetière que le
théâtre. L’architecte de théâtre ne pourra pas supporter les
niaises constructions où les familles enferment leurs morts.
Raser les chapelles. Peut-être conserver quelques ruines :
un morceau de colonne, un fronton, une aile d’ange, une urne
cassée, pour indiquer qu’une indignation vengeresse a voulu ce
premier drame afin que la végétation, peut-être aussi une
herbe forte, nées dans l’ensemble des corps pourrissant, égali-
sent le champ des morts. Si un emplacement est réservé pour
le théâtre, le public devra passer par des chemins (pour y venir
et s’en aller) qui longeront les tombes. Qu’on songe à ce que
serait la sortie des spectateurs après le Don Juan de Mozart,
s’en allant parmi les morts couchés dans la terre, avant de ren-
trer dans la vie profane. Les conversations ni le silence ne
seraient les mêmes qu’à la sortie d’un théâtre parigot.
La mort serait à la fois plus légère et plus grave.
Il y a d’autres raisons. Elles sont plus subtiles. C’est à
vous de les découvrir en vous sans les définir ni les nommer.
Extrait de L’Etrange Mot d’... in Œuvres complètes, tome IV
© Gallimard, 1968
304
305
ALEXANDRE BLOK
Les pas du Commandeur
À W.A. Zorgenfrei
À l’entrée un rideau épais et lourd,
Au carreau de la nuit – la brume.
Que fais-tu de ta vaine liberté,
Toi, Don Juan, qui as connu la peur ?
L’alcôve luxueuse est vide et froide,
Dorment les serviteurs, la nuit est sourde.
D’un pays bienheureux, inconnu, lointain
Parvient le chant d’un coq.
Mais ce chant bienheureux n’atteint pas l’infidèle.
Car sont comptés les instants de sa vie.
Donna Anna repose, les deux mains sur le cœur,
Donna Anna se plonge dans les songes...
Quels sont ces traits qui se figent, cruels,
Dans les reflets des miroirs ?
Anna, vous est-il doux de dormir dans la tombe ?
Et ces songes d’ailleurs, sont-ils doux ?
La vie est vide, folle, et insondable !
Viens ferrailler, ô vieux destin !
Mais en réponse – triomphante, enamourée –
La trompe sonne dans la brume.
Éclaboussant la nuit de feu, s’élance
Le moteur silencieux et noir, tel un hibou.
D’un pas silencieux, d’un pas pesant,
Le Commandeur entre dans la maison.
La porte est grande ouverte. Dans le frimas intense,
Comme une horloge rauque de la nuit –
L’horloge sonne : « Tu m’as convié à dîner.
Je suis venu. Toi tu es prêt ? »
Point de réponse à la question brutale,
Point de réponse – le silence.
Terrible est l’aube dans la riche alcôve,
Dorment les serviteurs, la nuit est blême.
L’aube est étrange et l’aube est froide,
La nuit vers l’aube va troublée.
Fille de la lumière ! Où es-tu, donna Anna ?
Anna ? Anna ? – Que le silence.
Et seule, dans la brume menaçante,
Sonne l’horloge une dernière fois.
À l’heure de ta mort, Anna se lèvera.
Anna se lèvera à l’heure de la mort.
1910-1912
ALEXANDRE BLOK
307
CHARLES BAUDELAIRE
DON JUAN aux ENFERS
Quand Don Juan descendit vers l’onde souterraine
Et lorsqu’il eut donné son obole à Charon,
Un sombre mendiant, l’œil fier comme Antisthène,
D’un bras vengeur et fort saisit chaque aviron.
Montrant leurs seins pendants et leurs robes ouvertes,
Des femmes se tordaient sous le noir firmament,
Et, comme un grand troupeau de victimes offertes,
Derrière lui traînaient un long mugissement.
Sganarelle en riant lui réclamait ses gages,
Tandis que Don Luis avec un doigt tremblant
Montrait à tous les morts errant sur les rivages
Le fils audacieux qui railla son front blanc.
Frissonnant sous son deuil, la chaste et maigre Elvire,
Près de l’époux perfide et qui fut son amant,
Semblait lui réclamer un suprême sourire
Où brillât la douceur de son premier serment.
Tout droit dans son armure, un grand homme de pierre
Se tenait à la barre et coupait le flot noir ;
Mais le calme héros, courbé sur sa rapière,
Regardait le sillage et ne daignait rien voir.
Extrait des Fleurs du mal (Spleen et idéal, XV), 1857
CARNET de NOTES
Wolfgang Amadeus Mozart
Repères biographiques
& Notice bibliographique
—
Don Giovanni
Orientations discographiques
WOLFGANG AMADEUS MOZART REPÈRES BIOGRAPHIQUES
310
H I S T O I R E M O Z A RT
1756.
Début de la guerre de Sept Ans
opposant les principales
puissances européennes
sur le vieux continent,
en Amérique du Nord et
aux Indes. L’Autriche y est
alliée à la France.
1762.
Avènement de Catherine II
de Russie.
1763.
Le Traité de Paris termine
la guerre de Sept Ans.
La France abandonne
notamment le Canada.
1756.
Naissance le 27 janvier
à Salzbourg.
1759.
Premiers essais musicaux sur
le clavier du clavecin de sa
sœur Maria Anna et premières
manifestations de ses talents :
oreille, mémoire, concentration.
Son père Leopold se charge de
son éducation musicale.
1762.
Munich et Vienne : première
des tournées que le père de
Mozart organise pour exposer
les dons de son enfant prodige.
Compose ses premières pièces
pour clavecin.
1763.
Début d’une tournée de trois
années : Allemagne, Belgique,
France (il séjourne et se produit
à Lyon en août 1766),
Angleterre, Hollande, Suisse.
1765.
Compose sa première
symphonie (K. 16).
1768.
Création à Vienne de Bastien
et Bastienne. (K. 50).
LETTRES, ARTS
& SCIENCES
MOZART & SON TEMPS
311
M U S I Q U E
1757.
Mort de Domenico Scarlatti.
1759.
Mort de Haendel.
1761.
Premiers quatuors de
Luigi Boccherini.
1762.
Gluck, Orfeo ed Euridice.
1764.
Mort de Rameau.
1767.
Mort de Telemann.
Rousseau publie son
Dictionnaire de la musique.
1756.
À Lyon, inauguration d’un
nouvel opéra conçu par
l’architecte Soufflot.
1762.
Rousseau, Le Contrat social
et Émile ou de l’éducation.
1763.
Mort de Marivaux.
1764.
Voltaire,
Dictionnaire philosophique.
1768.
Naissance de Chateaubriand.
WOLFGANG AMADEUS MOZART REPÈRES BIOGRAPHIQUES
312
H I S T O I R E M O Z A RT
1769.
Naissance de Bonaparte.
1770.
Mariage de Marie-Antoinette,
fille de l’impératrice
Marie-Thérèse d’Autriche
avec le Dauphin de France,
futur Louis XVI.
1773.
Interdiction de l’ordre des
Jésuites dans l’empire autrichien.
1774.
Avènement de Louis XVI
en France.
1776.
Déclaration d’indépendance
des États-Unis d’Amérique.
1769.
Début du premier voyage
en Italie.
1770.
Création de Mitridate,
re di Ponto (K 87) à Milan.
1772.
Élection de Colloredo au titre de
p r i n c e-archevêque de Salzbourg .
Création de Lucio Silla
(K. 135) au Teatro Regio Ducal
de Milan.
1773.
Retour à Salzbourg.
1775.
Compose ses cinq concertos
pour violons.
1777.
Démission du poste de
Konzermeister qu’il occupait
à Salzbourg au service du
prince-archevêque Colloredo.
LETTRES, ARTS
& SCIENCES
MOZART & SON TEMPS
313
M U S I Q U E
1770.
Naissance de Beethoven.
1774.
Gluck, Iphigénie en Aulide.
1775.
Premier oratorio de Haydn,
Il Ritorno di Tobia.
1776-78.
Construction de la Scala
de Milan.
1770-85.
Sturm und Drang en Allemagne.
1770.
Cugnot réalise la première
voiture automobile à vapeur.
1772.
Achèvement de la rédaction
de L’Encyclopédie.
1773.
Diderot, Paradoxe
sur le comédien.
1774.
Goethe, Les Souffrances
du jeune Werther.
1775.
Fragonard, La Fête à Saint-C l o u d .
Beaumarchais, Le Barbier
de Séville.
WOLFGANG AMADEUS MOZART REPÈRES BIOGRAPHIQUES
314
H I S T O I R E M O Z A RT
1780.
Mort de l’impératrice
Marie-Thérèse d’Autriche.
Avènement de Joseph II.
1781.
Réformes de Joseph II :
abolition du servage,
Édit de tolérance, interdiction
de tous les ordres religieux
hormis ceux pratiquant
l’enseignement et la charité.
1778.
Séjour à Paris avec sa mère,
qui y meurt le 3 juillet.
Symphonie no31 “Paris”
(K. 297), Concerto pour flûte
et harpe (K. 299 ).
Sonates nos
8 et 11,
“Marche turque”.
1779.
Reprend son service auprès
de Colloredo.
1781.
Création d’Idoménéeau
Cuvilliès-Theater de Munich.
Sérénade pour 13 instruments
à vent “Gran Partita” (K. 361).
Rupture définitive avec
Colloredo.
1782.
Création de L’Enlèvement au
sérail au Burgtheater de Vienne.
Épouse Constance Weber,
le 4 août.
1783.
Grand Messe en ut mineur
(K. 427).
1784.
Devient franc-maçon.
LETTRES, ARTS
& SCIENCES
MOZART & SON TEMPS
315
M U S I Q U E
1782.
Paisiello, Le Barbier de Séville.
1783.
Antonio Salieri, Les Danaïdes.
1778.
Mort de Voltaire.
1781.
Kant, Critique de la raison pure.
1782.
Laclos, Les Liaisons dangereuses.
1783.
Naissance de Stendhal.
1784.
B e a u m a rchais, Le Mariage
de Fig a r o .
WOLFGANG AMADEUS MOZART REPÈRES BIOGRAPHIQUES
316
H I S T O I R E M O Z A RT
1785-1786.
En France, l’Affaire du collier
compromet Marie-Antoinette.
1786.
Mort de Frédéric II de Prusse.
1789.
Prise de la Bastille.
Déclaration des Droits
de l’homme et du citoyen.
1785.
Concertos pour piano nos
20
& 21 (K. 466 et 467).
Musique funèbre maçonnique
(K. 477).
1786.
Création des Noces de Figaro au
Burgtheater de Vienne (K. 492).
Symphonie no38, “Prague” .
1787.
Séjourne à Prague pour
les représentations des
Noces de Figaro.
Reçoit le jeune Beethoven
à Vienne au mois d’avril.
Mort de son père le 28 mai.
Sérénade no13, “Une petite
musique de nuit”.
Création de Don Giovanni
(K. 52) au Gräflich Nostitzsches
National-Theater de Prague.
Nommé compositeur de
la chambre par Joseph II.
1788.
Débuts des années de pauvreté
et de maladie. Trois dernières
symphonies : nos
39, 40 & 41,
“Jupiter” (K. 543, 550 et 551).
1789.
Quintette pour clarinette
et cordes(K. 581 ).
LETTRES, ARTS
& SCIENCES
MOZART & SON TEMPS
317
M U S I Q U E
1786.
Naissance de Carl-Maria
von Weber.
1787.
Création à Paris de Tarare de
Salieri (livret de Beaumarchais)
qui sera repris à Vienne
l’année suivante, sous le titre
Assur et avec un livret adapté
par Da Ponte.
1785.
David, Le Serment des Horaces.
Watt invente la machine
à vapeur.
1787.
Goethe, Faust.
Schiller, Don Carlos.
WOLFGANG AMADEUS MOZART REPÈRES BIOGRAPHIQUES
318
H I S T O I R E M O Z A RT
1790.
Mort à Vienne de l’empereur
Joseph II.
Avènement de Leopold II.
1791.
Leopold II est couronné roi
de Bohême et de Hongrie.
Tentative de fuite à l’étranger
du roi Louis XVI, qui est arrêté
à Varennes.
1790.
Création de Cosi fan tutte ( K. 588)
au Burgtheater de Vienne.
1791.
Création du 27e
concerto pour
piano (K. 595) à Vienne,
Mozart est au clavier.
Composition en trois semaines
et création de La Clémence
de Titus (K. 621) au National
Theater de Prague.
Création de La Flûte enchantée
(K. 620) au Theater an der
Wien de Vienne.
Concerto pour clarinette
(K. 622) et Requiem (K. 626)
qui demeure inachevé.
Mozart meurt le 5 décembre
à Vienne. Il est enterré dans
la fosse commune.
LETTRES, ARTS
& SCIENCES
MOZART & SON TEMPS
319
M U S I Q U E
1790-95.
Haydn, Douze Symphonies
londoniennes.
1790.
Naissance de Lamartine.
1791.
Sade, Justine ou les Malheurs
de la vertu.
WOLFGANG AMADEUS MOZART NOTICE BIBLIOGRAPHIQUE
320
Correspondance
W.A. MOZART. Lettres des jours ordinaires (1756-1791),
établi par Anne Paradis, Fayard, 2005.
Sur le compositeur
JEAN-VICTOR HOCQUARD. Mozart, l’amour, la mort.
Libraire Séguier / Archimbaud, 1987.
H.C ROBBINS LANDON. 1791 – La dernière année de Mozart.
Éditions Jean-Claude Lattès, 1988.
JEAN & BRIGITTE MASSIN. Mozart. Fayard, 1990.
ALFRED EINSTEIN. Mozart, l’homme et l’œuvre. Gallimard, 1991.
THÉODORE DE WYZEWA & GEORGES DE SAINT-FOIX.
Mozart, sa vie musicale et son œuvre.
Robert Laffont, Collection Bouquins (2 volumes), 1991.
NORBERT ELIAS. Mozart, sociologie d’un génie. Seuil, 1991.
PHILIPPE SOLLERS. Mystérieux Mozart. Plon, 2001.
ANDRÉ TUBEUF. Mozart, Chemins et chants.
Actes Sud / Classica, 2005.
COLLECTIF sous la direction de BERTRAND DERMONCOURT.
Tout Mozart. Robert Laffont, Collection Bouquins, 2005.
MICHEL PAROUTY. Mozart, aimé des dieux. Gallimard,
Collection Découvertes, 2006.
DANIEL ELOUARD. Un autre Mozart. Desclée de Brouwer, 2008.
Sur l’œuvre lyrique
Sous la direction de BRIGITTE MASSIN. Guide des opéras de Mozart.
Fayard, 1991.
IVAN NAGEL. Autonomie et grâce, Sur les opéras de Mozart.
Éditions de l’Aube, 1990.
RÉMY STRICKER. Mozart et ses opéras, Fiction et vérité.
Gallimard, Collection Tel, 1991.
DON GIOVANNI NOTICE BIBLIOGRAPHIQUE
321
Sur Don Giovanni
Don Giovanni. L’Avant-Scène / Opéra, nos
24 (1979, réédition 1989)
& 172 (1996).
CHARLES GOUNOD. Le Don Juan de Mozart (1882).
Librairie Séguier/Garamont-Archimbaud, 1984.
JEAN-VICTOR HOCQUARD. Le Don Giovanni de Mozart. Aubier, 1992.
Sur le mythe de Don Juan
Don Juan. Revue Obliques nos
1-2 (1981).
JEAN ROUSSET. Le mythe de Don Juan. Armand Colin, 1976.
COLLECTIF sous la direction de PIERRE BRUNEL.
Dictionnaire de Don Juan.
Robert Laffont, Collection Bouquins, 1999.
DON GIOVANNI ORIENTATIONS DISCOGRAPHIQUES
322
DIMITRI MITROPOULOS
Orchestre philharmonique de Vienne. Chœur de l’Opéra de Vienne
Cesare Siepi (Don Giovanni), Gottlob Frick (Le Commandeur),
Elisabeth Grümmer (Donna Anna), Léopold Simoneau
(Don Ottavio), Lisa della Casa (Donna Elvira), Fernando Corena
(Leporello), Walter Berry (Masetto), Rita Streich (Zerlina)
Enregistrement public. Festival de Salzbourg – 1956
Sony Classical– 1994
CARLO MARIA GIULINI
Orchestre & Chœur Philharmonia de Londres
Eberhard Waechter (Don Giovanni), Gottlob Frick
(Le Commandeur), Joan Sutherland (Donna Anna), Luigi Alva
(Don Ottavio), Elisabeth Schwarzkopf (Donna Elvira),
Giuseppe Taddei (Leporello), Piero Cappuccilli (Masetto),
Graziella Sciutti (Zerlina)
EMI – 1959
GEORG SOLTI
Orchestre philharmonique de Londres. London Opera Chorus
Bernd Weikl (Don Giovanni), Kurt Moll (Le Commandeur),
Margaret Price (Donna Anna), Stuart Burrows (Don Ottavio),
Sylvia Sass (Donna Elvira), Gabriel Bacquier (Leporello),
Alfred Skramek (Masetto), Lucia Popp (Zerlina)
Decca – 1979
RENÉ JACOBS
Orchestre baroque de Fribourg. Chœur de chambre du RIAS de Berlin
Johannes Weisser (Don Giovanni), Alessandro Guerzoni
(Le Commandeur), Olga Pasichnyk (Donna Anna),
Kenneth Tarver (Don Ottavio), Alexandrina Pendatchanska
(Donna Elvira), Lorenzo Regazzo (Leporello), Nikolay Borchev
(Masetto), Sunhae Im (Zerlina)
Harmonia Mundi – 2007
COLLECTION OPÉRA de LYON
BÉLA BARTÓK Le Château de Barbe-Bleue, 2007
LUDWIG VAN BEETHOVEN Fidelio, 2003
ALBAN BERG Wozzeck, 2003
Lulu, 2009
GEORGES BIZET Djamileh, 2007
BENJAMIN BRITTEN Curlew River, 2008
Le Songe d’une nuit d’été, 2008
Mort à Venise, 2009
EMMANUEL CHABRIER Le Roi malgré lui, 2005, 2009
DIMITRI CHOSTAKOVITCH Moscou, quartier des cerises, 2004
CLAUDE DEBUSSY Pelléas et Mélisande, 2004
PASCAL DUSAPIN Faustus, The last night, 2006
PETER EÖTVÖS Lady Sarashina, 2008
GEORGE GERSHWIN Porgy and Bess, 2008
PHILIP GLASS Dans la colonie pénitentiaire, 2008
GE O R G- FR I E D R I C H HA E N D E L Alcina, 2006
HANS WERNER HENZE L’Upupa & le triomphe de l’amour filial, 2 0 0 5
TOSHIO HOSOKAWA Hanjo, 2008
LEOS JANÁCEK Jenufa, 2005
Kátia Kabanová, 2005
L’Affaire Makropoulos, 2005
FRANZ LEHÁR La Veuve joyeuse, 2006
MICHAËL LEVINAS Les Nègres, 2004
FRANK MARTIN Le Vin herbé, 2008
CLAUDIO MONTEVERDI L’Orfeo, 2004
Le Couronnement de Poppée, 2005
COLLECTION OPÉRA de LYON
WO L F GA N G AM A D E U S MO Z A RT La Flûte enchantée, 2004
Cosi fan tutte, 2006
Les Noces de Figaro, 2007
La Clémence de Titus, 2008
JACQUES OFFENBACH Les Contes d’Hoffmann, 2005
La Vie parisienne, 2007
FRANCIS POULENC La Voix humaine, 2007
GIACOMO PUCCINI Il Tabarro, 2007
SERGE PROKOFIEV Le Joueur, 2009
JEAN-PHILIPPE RAMEAU Les Boréades, 2004
SALVATORE SCIARRINO Luci mie traditrici, 2007
JOHANN STRAUSS La Chauve-Souris, 2008
RICHARD STRAUSS Ariane à Naxos, 2005
IGOR STRAVINSKY The Rake’s Progress, 2007
TAN DUN Tea, 2004
PIOTR ILLITCH TCHAÏKOVSKI Mazeppa, 2006
Eugène Onéguine, 2007
La Dame de pique, 2008
GIUSEPPE VERDI Falstaff, 2004
La Traviata, 2009
RICHARD WAGNER Lohengrin, 2006
Siegfried, 2007
KURT WEILL Le Vol de Lindbergh,
Les Sept Péchés capitaux, 2006
ALEXANDER VON ZEMLINSKY Une tragédie florentine, 2007
Chargé d’édition
Jean Spenlehauer
Conception & Réalisation
Brigitte Rax / Clémence Hiver
Impression
Imprimerie Lussaud
Opéra national de Lyon
Saison 2009/10
Directeur général
Serge Dorny
OPÉRA NATIONAL DE LYON
Place de la Comédie
69001 Lyon
Renseignements & Réservation
0.826.305.325 (0,15 e/ m n )
www.opera-lyon.com
L’Opéra national de Lyon est conventionné par le ministère de la Culture et
de la Communication, la Ville de Lyon, le conseil régional Rhône-Alpes
et le conseil général du Rhône.