charles journet et vatican ii

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Charles Journet et Vatican II Autor(en): Chenaux, Philippe Objekttyp: Article Zeitschrift: Schweizerische Zeitschrift für Religions- und Kulturgeschichte = Revue suisse d'histoire religieuse et culturelle = Rivista svizzera di storia religiosa e culturale Band (Jahr): 104 (2010) Persistenter Link: http://dx.doi.org/10.5169/seals-327768 PDF erstellt am: 20.03.2015 Nutzungsbedingungen Mit dem Zugriff auf den vorliegenden Inhalt gelten die Nutzungsbedingungen als akzeptiert. Die ETH-Bibliothek ist Anbieterin der digitalisierten Zeitschriften. Sie besitzt keine Urheberrechte an den Inhalten der Zeitschriften. Die Rechte liegen in der Regel bei den Herausgebern. Die angebotenen Dokumente stehen für nicht-kommerzielle Zwecke in Lehre und Forschung sowie für die private Nutzung frei zur Verfügung. Einzelne Dateien oder Ausdrucke aus diesem Angebot können zusammen mit diesen Nutzungshinweisen und unter deren Einhaltung weitergegeben werden. Das Veröffentlichen von Bildern in Print- und Online-Publikationen ist nur mit vorheriger Genehmigung der Rechteinhaber erlaubt. Die Speicherung von Teilen des elektronischen Angebots auf anderen Servern bedarf ebenfalls des schriftlichen Einverständnisses der Rechteinhaber. Haftungsausschluss Alle Angaben erfolgen ohne Gewähr für Vollständigkeit oder Richtigkeit. Es wird keine Haftung übernommen für Schäden durch die Verwendung von Informationen aus diesem Online-Angebot oder durch das Fehlen von Informationen. Dies gilt auch für Inhalte Dritter, die über dieses Angebot zugänglich sind. Ein Dienst der ETH-Bibliothek ETH Zürich, Rämistrasse 101, 8092 Zürich, Schweiz, www.library.ethz.ch http://retro.seals.ch

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Charles Journet Et Vatican II

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  • Charles Journet et Vatican II

    Autor(en): Chenaux, Philippe

    Objekttyp: Article

    Zeitschrift: Schweizerische Zeitschrift fr Religions- und Kulturgeschichte =Revue suisse d'histoire religieuse et culturelle = Rivista svizzera distoria religiosa e culturale

    Band (Jahr): 104 (2010)

    Persistenter Link: http://dx.doi.org/10.5169/seals-327768

    PDF erstellt am: 20.03.2015

    NutzungsbedingungenMit dem Zugriff auf den vorliegenden Inhalt gelten die Nutzungsbedingungen als akzeptiert.Die ETH-Bibliothek ist Anbieterin der digitalisierten Zeitschriften. Sie besitzt keine Urheberrechte anden Inhalten der Zeitschriften. Die Rechte liegen in der Regel bei den Herausgebern.Die angebotenen Dokumente stehen fr nicht-kommerzielle Zwecke in Lehre und Forschung sowie frdie private Nutzung frei zur Verfgung. Einzelne Dateien oder Ausdrucke aus diesem Angebot knnenzusammen mit diesen Nutzungshinweisen und unter deren Einhaltung weitergegeben werden.Das Verffentlichen von Bildern in Print- und Online-Publikationen ist nur mit vorheriger Genehmigungder Rechteinhaber erlaubt. Die Speicherung von Teilen des elektronischen Angebots auf anderenServern bedarf ebenfalls des schriftlichen Einverstndnisses der Rechteinhaber.

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    http://dx.doi.org/10.5169/seals-327768

  • Charles Journet et Vatican II

    Philippe Chenaux

    Le sujet peut paratre, en apparence, rebattu. Pas moins de quatre colloques,depuis 1991, l'ont abord plus ou moins directement. Je ne voudrais donc pasrpter ici, en moins bien, ce qui a t dit par le P. Torrell, lors du colloque quej'avais organis Genve en 1991 pour le centenaire de la naissance du cardinal,et par le P. Bedouelle, lors du colloque que j'avais organis l'Universit duLatran Rome en 2002 l'occasion du quarantime anniversaire de l'ouverturedu concile. Tous deux ont abord, de faon diffrente mais complmentaire, ense basant la fois sur les textes publis (Torrell) et sur les notes et la correspondance (Bedouelle) le rle du thologien cardinal Vatican II.' Si l'on y ajoute lesinterventions de Guy Boissard (sur les relations Montini-Journet) et de MichelCagin (sur les origines de la Profession de Foi de Paul VI) lors du colloque deMolsheim (1999), et celles de Charles Morerod (sur la rforme des indulgences)et de Barbara Hallensleben (sur les glises orthodoxes) lors du colloque de Fri

    bourg d'avril 2002, on s'aperoit qu'l'on est en prsence d'un ensemble d'tudesparticulirement riches qui sembleraient premire vue me dispenser d'unenouvelle communication." La vise du colloque qui nous runit aujourd'hui (larception du concile Vatican II par les thologiens suisses) justifie pourtant quel'on reprenne le sujet nouveaux frais. L'approche que sera la mienne sera donc

    Jean-Pierre Torrell, Prsence de Journet Vatican II, dans: Philippe Chenaux (dir.), CharlesJournet (1891-1975). Un thologien en son sicle, Paris 1992, 41-68; Guy Bedouelle, Lesinterventions du cardinal Journet au Concile Vatican II, CVII. Centro Vaticano II. Ricerche edocumenti, 5 (2005/2), 41-50.Guy Boissard, La relation Journet - Montini, dans: Montini, Journet, Maritain: une familled'esprit, Brescia/Roma 2000, 10-47; Michel Cagin, Maritain, du Paysan de la Garonne laprofession de foi de Paul VI, dans: ibid., 48-88; Charles Morerod, La contribution du cardinal Journet au dbat sur la rforme des indulgences (1965-1967), dans: Marta RossignottiJaeggi/Guy Boissard (dir.), Charles Journet: un tmoin du XXe sicle, Actes de la Semainethologique de l'Universit de Fribourg (8.-12. avril 2002), Paris 2003, 147-177; BarbaraHallensleben, Les glises orthodoxes: (glises dissidentes) ou (glises surs>? Une question Charles Journet, dans: ibid., 265-285.

    SZRKG, 104(2010), 227-237

  • 228 Philippe Chenaux

    donc une approche essentiellement historique. Elle me parat poser un double

    problme (de sources et de mthode) que je voudrais rapidement voquer avantd'entrer dans le vif du sujet.

    Les sources dont dispose l'historien pour traiter un tel sujet sont de deuxordres: les sources publies (ouvrages, articles, correspondances, etc.) et les

    sources indites (manuscrits, notes, correspondances). Une tude de la rceptiondu concile par le cardinal Journet, partir de ses propres archives conserves laFondation Journet, sur le modle de la remarquable thse de doctorat que l'abb

    Jacques Rime a consacre la premire partie de la vie du cardinal, est sansdoute souhaitable.' Je l'ai pour ma part dlibrment cart, non seulement parcequ'il m'tait difficile depuis Rome d'accder ces archives, mais aussi parce queje crois qu'un thologien se rvle d'abord par ses publications. C'est d'autantplus vrai lorsque ce mme thologien dispose, comme c'est le cas de Journet,d'une vritable tribune intellectuelle pour s'exprimer. On ne redira jamais assezde ce point de vue l'importance de la revue Nova et Vetera, fonde par lui en1926, comme source pour l'tude de l'volution de sa pense. Comme je l'crivais dans ma communication au colloque de Fribourg (2002), tout Journet setrouve pour ainsi dire dans Nova avec l'avantage, non ngligeable pour l'historien, d'une datation prcise des diffrents tats de sa pense.4 Reprenant l'ouv

    rage, par ailleurs discutable, que lui a consacr Lucien Mroz sous le titre LeCardinal Journet ou la sainte thologie j'ai t heureux de trouver cette notation qui m'a confort dans mon approche:

    De retour du Concile, le cardinal Journet continua s'exprimer principalementdans sa revue Nova et Vetera dont, suivant un avis de Maritain, il s'tait refus changer le statut. Il faisait lui-mme les comptes-rendus d'une quantit de livres etc'est souvent par ce truchement qu'au fil des nouvelles parutions il portait ses jugements critiques sur les courants thologiques et philosophiques qui se faisaientjour. Pour viter de mettre tout le poids de son titre dans ces jugements qui pouvaient atteindre des personnes, il cessa simplement de les signer de sorte que seulel'autorit de la revue dans son ensemble tait engage.

    Le second problme, de mthode celui-l, concerne le statut du thologien Charles Journet dans le dbat post-conciliaire. la diffrence de presque tous les autres thologiens voqus dans ce colloque, Charles Journet n'tait pas seulementun thologien priv, il tait devenu, par la volont de Paul VI, un vque et uncardinal de la Sainte glise romaine. C'est ce titre qu'il a pu participer, de pleindroit, la dernire session du concile et y faire les interventions remarques quel'on sait (notamment sur la libert religieuse). On sait par ailleurs que le papen'hsitera pas le consulter sur plusieurs dossiers chauds (la rforme des in

    dulgences, l'affaire du catchisme hollandais) dans l'immdiat aprs-concile. Lesarchives du pontificat, lorsqu'elles seront accessibles, et les archives prives ducardinal nous permettront de faire toute la lumire sur cet aspect de son activit,

    Jacques Rime. Charles Journet. Vocation et jeunesse d'un thologien, Fribourg 2010.4

    Philippe Chenaux. Le thologien Charles Journet et le magistre de Pie XII. dans: CharlesJournet: un tmoin du XXe sicle (voir note 2). 36-37.Lucien Meroz, Le Cardinal Journet ou la sainte thologie. Lausanne 1981. 127.

  • Charles Journet et Vatican II 229

    totalement indit pour lui, de conseiller thologique de Paul VI. Il n'est pasbesoin de revenir sur les liens d'estime et mme d'affection rciproques qui unissaient les deux hommes. Leurs deux secrtaires, Mgr Macchi et Mgr Mamie,nous ont donn sur ce point des tmoignages d'une inestimable valeur.6 Le problme qui se pose l'historien est diffrent: dans quelle mesure est-il possibled'isoler les prises de position du thologien de celles du cardinal? En devenantvque et cardinal, charge qui lui pesa et qu'il n'accepta qu' contrecur, lethologien Charles Journet ne perdait-il pas sa (relative) libert de parole, n'tait-il pas contraint d'afficher sa solidarit avec tous les actes du pontificat, donc ycompris avec tous les actes et documents du concile? En d'autres termes, le

    thologien cardinal qu'il tait devenu ne pouvait pas apparatre comme un dudu concile.7 Or, on sait bien qu'il se montra, en priv, trs svre, lors de la dernire session, sur certains documents de Vatican II, comme par exemple sur laconstitution pastorale Gaudium et Spes en gestation.8 Les tmoignages d'AntoineWenger, dans son livre Les trois Rome. L'glise des annes soixante ( la datedu 29 septembre 1965) et du P. Congar, dans son Journal du Concile ( la datedu 7 octobre 1965), sont concordants: le schma XIII le faisait souffrir, il le trouvait trop teilhardien, comme si le Christ venait la fin, au terme d'un mouvement. Les crits de ses plus fidles disciples aprs sa mort ne contriburent paspeu imposer l'image d'un Journet, sinon intgriste, du moins fortementrfractaire aux innovations de Vatican IL J'ai parl de l'ouvrage de LucienMroz, spcialiste de Ren Gunon et trs li la mouvance traditionaliste catholique. Celui que lui consacra le P. Pierre-Marie Emonet, Le Cardinal CharlesJournet. Portrait intrieur, conu l'origine comme un contre-feu, n'apporta pasla rectification d'image escompte en dpit de la postface de Mgr Mamie pourqui le concile avait t ses yeux l'une des grandes grces faites l'glise denotre temps.10 Dans quelle mesure cette image est-elle conforme la ralit?C'est ce que je voudrais rapidement essayer de dmontrer partir d'une lecturede la revue Nova et Vetera dans les annes post-conciliaires (jusqu' la mort ducardinal en avril 1975). J'ai divis mon expos en trois parties en prenant pourcritre le type d'articles analyss: les ditoriaux, les articles de fond, les notesbibliographiques.

    Pasquale Macchi, La correspondance Jacques Maritain - Pasquale Macchi, dans: Montini,Journet, Maritain (voir note 2), 192-194; Pierre Mamie, Ombres et lumires chez Montini,Nova et Vetera, 1998/3. 17-21.Voir l'article de Giuseppe Ruggieri. Delusioni alla fine del concilio. Qualche atteggiamentonell'ambiente cattolico francese, dans: J. Dor/A. Melloni (dir.). Volti di fine concilio. Studidi storia e teologia sulla conclusione del Vaticano IL Bologne 2000. 193-224.Nous renvoyons le lecteur au sixime et demier volume de la Correspondance en italiqueavec Jaques Maritain, concernant les annes 1965-1973 (Saint Maurice. 2008). Voir cepropos l'article dj cit de Cagin. Maritain, du Paysan de la Garonne la profession de foide Paul VI (voir note 2). 55.Antoine Wenger. Les trois Rome. L'glise des annes soixante. Paris 1991. 173; Yves Congar. Mon Journal du Concile, t. II. Paris 2002. 426.Pierre Mamie. Postface, dans: Pierre-Marie Emonet, Le Cardinal Journet. Portrait intrieur,Chambray-ls-Tours 1983. 166.

  • 230 Philippe Chenaux

    La dfense de la foi

    La clture des travaux du concile, laquelle le cardinal Journet a pris part, nedonne lieu aucune rflexion particulire alors mme que l'annonce de sa convocation, en janvier 1959, et son ouverture officielle, en octobre 1962, par lepape Jean XXIII avaient t longuement commentes dans la revue." Cet tonnant silence est rompu un an plus tard par la prsentation de l'ouvrage de Jac

    ques Maritain, Le Paysan de la Garonne. Un vieux lac s'interroge propos dutemps prsent. Le cardinal Journet a suivi pas pas la gense du livre. Le sentiment de libration qu'il en prouve se ressent dans l'article en forme d'dito-rial qu'il lui consacre dans le dernier numro de Nova de l'anne 1966. Je voudrais qu'on me cite un livre, un article de Maritain qui n'ait pas t, qui ne soitpas explosif. S'il commence par en excuser le ton polmique (c'est un champde mines o le lecteur saute chaque page), c'est pour mieux en faire ressortirle contenu, ses yeux, prcieux. Le thologien ne se fait pas faute de reproduireles formules choc du philosophe, qui vont alimenter la controverse, surl'apostasie immanente, les coryphes de notre no-modernisme [qui] se dclarent chrtiens, l'agenouillement devant le monde, la complte temporali-sation du christianisme. L'expos des thses de l'ouvrage se veut mthodique etobjectif, Journet laisse parler Maritain qu'il cite abondamment. La conclusion nelaisse pourtant planer aucun doute sur les sentiments de l'auteur: Il faut se taireet rendre grces'J crit sobrement Charles Journet (qui signe C. J.).

    Moins de deux mois plus tard, dans sa troisime livraison de l'anne 1968, larevue publie intgralement, avec un titre en gros caractres, la profession de foiprononce par Paul VI la clture de l'anne de la foi le 30 juin 1968. Le textepontifical est suivi d'un bref article de prsentation de l'encyclique HumanaeVitae (La lumire de l'encyclique Humanae Vitae) o le thologien cardinals'attache souligner qu'il engage la conscience de chaque fidle.

    C'est un non-sens pour un enfant de l'Eglise d'opposer l'autorit de l'Encyclique l'infaillibilit de sa conscience. La conscience demande tre forme; chacunest responsable devant Dieu de la formation mme de sa propre conscience.14

    On sait aujourd'hui que le texte de la profession de foi de Paul VI reprenait,pratiquement mot pour mot, un texte prpar par Jacques Maritain. Michel Cagina bien montr, dans son importante intervention au colloque de Molsheim djcite, le rle d'intermdiaire jou par le cardinal Journet dans cette affaire. Lorsd'une audience avec Paul VI, en janvier 1967, il avait qualifi la situation del'glise de tragique et lui avait remis une note de Maritain suggrant que le

    pape proclame une profession de foi complte et dtaille. la fin de l'anne,

    C.J. [Charles Journet], Qu'est-ce qu'un concile cumnique?, Nova et Vetera, 1959/3; C.J.,Ouverture du Concile, Nova et Vetera, 1965/4.

    " Cagin, Maritain, du Paysan de la Garonne la profession de foi de Paul VI (voir note 2).13 Charles Journet, Le paysan de la Garonne, Nova et Vetera, 1966/4, 241-245.14 Charles Journet, La lumire de l'encyclique Humanae Vitae, Nova et Vetera, 1968/3, 17.

  • Charles Journet et Vatican II 231

    lors d'une nouvelle audience, Paul VI lui demanda de prparer un schma dansce sens. Journet fit aussitt appel l'aide de Maritain, qui lui envoya un textequ'il s'empressa d'adresser tel quel au Saint-Pre.

    Il ressort clairement de tous ces documents, crit Michel Cagin, que le projet deMaritain ne se voulait tre qu'un essai destin au seul Cardinal Journet. C'est l'initiative de Journet qu'il se retrouve entre les mains du Pape et qu'il pourra ainsi passer trs largement dans la Profession de foi de Paul VI.15

    Le texte de la profession de foi prpar par Maritain et repris pratiquement sanschangement par Paul VI contenait un long dveloppement sur l'eucharistie. Lepape avait publi sur ce thme une encyclique, Mysterium Fidei, date du 3

    septembre 1965. Cette proccupation est apparemment centrale dans la pensedu cardinal au lendemain du concile. Il n'y consacrera pas moins de quatre dito-riaux de Nova entre 1969 et 1971. Au cur de ses proccupations, on trouve ladlicate question de l'intercommunion. Journet y voyait une atteinte intolrable la conception catholique de l'eucharistie, cur de l'glise. Il n'hsite pas dslors prendre publiquement position dans sa revue sur ce thme. Le titre del'ditorial qu'il lui consacre en fvrier 1969 est sans quivoque: L'Eucharistien'est pas mallable, elle est adorable.16 L'article, repris dans VOsservatoreRomano, sera largement diffus.'7 Le thologien y dnonait la confusion doctrinale qui tait la base de la pratique des intercommunions. Accepter l'inter-communion entre l'glise catholique d'une part et les communions protestantesd'autre part, c'est, - qu'on se le dise bien, - accepter l'quivalence de l'Eucharistie catholique et de la Cne protestante. Le thologien s'en prenait tout particulirement un petit livre dit Taiz et diffus par les ditions du Seuil, LePain unique, coupable, selon lui, de propager l'ide d'un accord essentiel entrela doctrine catholique de la transsubstantiation et les doctrines de la Rforme

    protestante. Le jour o elle [l'glise] l'accepterait [cette quivalence], elleaurait cess d'exister, elle serait devenue protestante. Le directeur de Nova reviendra sur le sujet, l'anne suivante, aprs la publication d'un nouveau texte duSecrtariat pour l'unit des chrtiens.18 Partant des documents conciliaires, ils'applique dmonter la logique de ceux qui, au prix d'une exgse aberrante dufameux principe de subsistance nonc dans la constitution Lumen Gentium, enviennent postuler l'essentielle quivalence des glises et communauts dis

    jointes, et partant l'essentielle quivalence des Eucharisties clbres en cesglises, pour en arriver logiquement convenir de l'quivalence des ministres. Aucun de ces thologiens n'est explicitement nomm dans le texte, mais lethologien dominicain de Nimgue Edward Schillebeeck, l'auteur du fameuxCatchisme hollandais, que le cardinal thologien avait dj pingle dans un pr-

    Cagin. Maritain, du Paysan de la Garonne la profession de foi de Paul VI (voir note 2). 63.16 Nova et Vetera, 1969/1. 1-6.

    Meroz. Le Cardinal Journet ou la sainte thologie (voir note 5), 135.La dclaration du Secrtariat avait pour titre: Sur la position de l'glise catholique en matire d'Eucharistie commune entre chrtiens de diverses confessions. (Osservatore Romano,12-13 janvier 1970).

  • 232 Philippe Chenaux

    cdent numro de sa revue, est clairement vis. C'est prcisment pour rpondreau thologien flamand qu'il reprend la plume, en juillet 1971, pour raffirmeravec force la doctrine tridentine de la transsubstantiation.

    Sans la transsubstantiation, il n'y aurait dans l'Eucharistie que du pain et du vinpar le moyen desquels on chercherait s'unir au Christ, prsent seulement au ciel.Seule la transsubstantiation rend possible l'union au sacrifice du Christ, non seulement par lafoi et l'amour, mais encore par la consommation de la victime, prsente sous les signes des sacrements.'9.

    Revenant dans le dernier numro de l'anne 1971 sur le caractre sacrificiel de la

    messe, le thologien de Fribourg se montre assez sceptique sur l'accord auqueltait parvenue la Commission internationale de dialogue entre catholiques etanglicans sur le sujet, tout simplement parce que le texte ludait la question dela transsubstantiation.20

    Par rapport la question de l'eucharistie et de F intercommunion, celles relatives l'ecclsiologie semblent passer au second plan des proccupations du cardinal thologien mme si elles ne sont pas totalement oublies. La doctrine de la

    collgialit, telle que dfinie par la constitution Lumen Gentium, ne lui causeapparemment aucune difficult, mme s'il s'en tient, pour son application, strictement aux limites fixes par la Nota praevia explicativa. A la veille du Synodeextraordinaire des vques de 1969 consacr ce thme, il prendra ainsi positiondans sa revue pour s'opposer toute dilution de l'autorit de Pierre dans lecollge des aptres et pour rappeler la prrogative exceptionnelle et inalinable que les textes vangliques lui reconnaissent dans le sens que leur donnela foi catholique.21 Il est un autre sujet d'actualit brlant de l'aprs-concile quel'on s'attendrait voir traiter de manire plus approfondie dans Nova: celui de larforme liturgique. Le thologien laisse d'autres, comme Lucien Mroz dj cit,le soin d'exprimer leur dsappointement devant les excs de cette rforme, mais iln'intervient pas directement sur un sujet qu'il connat sans doute moins bien.

    Le vritable cumnisme

    Le point sur lequel l'uvre du concile a sans doute le plus interpell le travail duthologien Charles Journet est celui de l'cumnisme. Il s'agissait chez luid'une proccupation ancienne. Son premier ouvrage avait pour titre L'Esprit duprotestantisme en Suisse (1925). En 1927, il avait t l'un des premiers (sinon lepremier) thologiens catholiques s'intresser au mouvement cumnique naissant. Pour le meilleur et pour le pire, il restera longtemps, en la matire, l'auteurde L'Union des glises crit l'historien Etienne Fouilloux, c'est--dire, si l'ontraduit, un thologien hostile l'cumnisme.22 Le concile Vatican II, comme

    Charles Journet. Transsubstantiation. Nova et Vetera. 1971/3. 170.Charles Journet. Le sacrifice de la messe. Nova et Vetera. 1971/4. 250-251.Charles Journet. De la collgialit. Nova et Vetera. 1969/3, 164.Etienne Fouilloux, Face au mouvement cumnique naissant (1925-1927), dans: Chenaux(dir.). Charles Journet (1891-1975) (voir note 1). 12.

  • Charles Journet et Vatican li 233

    vnement autant que par ses enseignements, l'a-t-il conduit modifier sa perception des choses? Trouve-t-on, en d'autres termes, une ouverture cumniquedans les crits de Journet de l'aprs-concile? Le thologien avait pris bien soinde couper court toute esprance de concile d'union aprs l'annonce de JeanXXI11 de convoquer un concile cumnique:

    un concile cumnique, dclarait-il en juin 1959, est l'assemble solennelle desvques de tout l'univers, runis l'appel et sous l'autorit du Souverain Pontife,pour dlibrer en commun sur les choses qui intressent le sort de la chrtienttout entire.""'

    Dfinition gnrique qui semblait exclure toute participation de ceux qu'on appelait alors les acatholiques (ou les dissidents) aux assises romaines. Cependant, l'accueil qu'il rserve au dcret de Vatican II sur l'cumnisme est pluttpositif.24 Dans la recension d'une dition commente des trois documents surl'glise, l'cumnisme et les glises orientales, adopts lors de la troisime session, il distingue deux notions de l'cumnisme: celle

    qui a trouv sa place dans le Conseil cumnique et qui se conoit comme un rseau de relations tisses sans pralable ecclsiologique, sans qu'aucune Eglise sepose au centre, entre des communauts-surs parlant sur un pied d'galit,

    celle

    qui se conoit comme plaant au centre de sa proccupation l'Eglise telle que leChrist l'a fonde et la conserve au cours du temps, et qui se propose d'en prendreune conscience toujours plus pure, par un effort simultan soit de rnovationintrieure, soit d'ouverture toujours plus attentive tout ce qui survient dans lemonde entier de motions et d'inspirations authentiques de l'Esprit saint.

    Faut-il dire de la premire notion qu'elle reprsente l'(cumnisme authentique)? Faut-il dire que le (Dcret sur l'cumnisme) chappe la proccupationd'un pralable ecclsiologique? Journet (qui vient d'tre nomm cardinal et quine signe pas la recension) ne tranche pas propos du texte conciliaire, il se contente d'affirmer que le seul cumnisme authentique plnier est celui quiplace l'glise que le Christ a fonde (donc l'glise catholique) au centre de saproccupation."3

    La question est reprise de manire plus ample dans un article sur la Rforme

    protestante publi dans la revue en juin 1967. Le propos est, semble-t-il, detemprer les enthousiasmes qu'une lecture trop superficielle du dcret sur l'cumnisme a pu faire natre dans certains milieux catholiques. Le thologien prendbien soin de prciser le vritable sens qu'il convient de donner la notiond'aggiornamento. Il s'appuie, pour ce faire, la fois sur les grands discours conciliaires de Jean XXIII (11 octobre 1962) et de Paul VI (18 novembre 1965), etsur le texte d'une confrence faite Rome, la fin du concile, par le thologienprotestant Oscar Cullmann. Il en arrive ainsi dmontrer la divergence entre

    Journet, Qu'est-ce qu'un concile cumnique? (voir note 11), 161.Barbara Hallensleben va jusqu' parler d'un accueil enthousiaste (voir note 2, 273).

    25Nova et Vetera, 1965/1,77.

  • 234 Philippe Chenaux

    deux conceptions du renouvellement conciliaire. Tandis que la premire, la catholique, laisse inchange la substance de son message, la seconde, la protestante, envisage au contraire une modification de la (substance) du message catholique. Une telle divergence semble rendre vue humaine impossible cequ'il appelle la jonction du catholicisme et du protestantisme. La seule espranceen l'avenir d'un cumnisme digne de ce nom, qui se refuse de sculariser lechristianisme, de trahir son scandale et sa folie, repose ici plus encore qu'ailleurs sur les imprvisibles et miraculeuses descentes de l'Esprit Saint.26

    Tant par le vocabulaire utilis (la dissidence protestante) que par les ides(l'ide du retour, certes non un mouvement de retour au pass, mais un retourquand mme l'glise catholique) qu'il exprime, l'article semble dmontrer quele thologien n'a pas fondamentalement modifi sa faon de concevoir la ralisation de l'unit chrtienne. Toute forme d'cumnisme authentique implique, ses yeux, la reconnaissance du pralable ecclsiologique de l'existence de lavritable glise du Christ qu'est l'glise catholique. La proccupation fondamentale de Journet dans l'aprs-concile, qui traverse toutes ses interventions, mesemble tre celle de prvenir la mise en uvre d'une forme 'aggiornamento quialtrerait la substance du message catholique, autrement dit de lutter contre laprotestantisation de l'glise. Dans ce combat pour la dfense de la foi et del'identit catholique, il allait trouver de nouveaux allis thologiens avec lesquels, auparavant, les relations avaient t plutt difficiles: le P. Hans Urs vonBalthasar, le P. Henri de Lubac, le P. Jean Danilou.

    Les nouveaux Pres de l'Eglise

    Les relations entre Charles Journet et Hans Urs von Balthasar n'avaient pas t,jusqu'au concile, d'une grande cordialit. Le nom du thologien blois apparatpour la premire fois, dans la correspondance avec Maritain, en 1941. Il y estquestion d'un jeune et remarquable jsuite de Bale (qui a une grande influencesur Bguin), qui vient de faire un livre sur Barth, apprci par ce dernier,mais dont l'orientation thomiste parat insuffisante.27 Quatre ans plus tard, lejugement se veut plus svre: j'ai reu un mot d'un religieux jsuite von Balthasar, qui est un trs gentil garon, et qui se dvoue corps et me la cause del'glise, mais qui estime qu'il faut revenir la thorie origniste de l'apoca-tastase. Ce jeune Pre est aumnier des tudiants Bale, o il fait un trsgrand bien, mais vous voyez dans quel sens [...]. Une lettre du thologienblois conserve dans les archives Journet tmoigne de son estime pour le

    courage et la franchise du directeur de Nova durant la guerre: J'essaye d'enfaire autant du haut de ma chaire - depuis assez longtemps. Vous tes bien in-

    ' Charles Journet, De la Rforme protestant, Nova et Vetera, 1967/3, 185.~7 Lettre du 7 novembre 1941, dans: Correspondance Journet - Maritain, d. Claude Favez et

    al, t. III (1940-1949), Saint-Maurice 1998, 227.Lettre du 9 aot 1945, dans: Correspondance Journet - Maritain (voir note 27), 336-337.

  • Charles Journet et Vatican II 235

    dulgent pour la , mais c'est encore la bonne attitude.29 Il faudrait voir aussi l'accueil rserv par la revue Nova et Vetera l'uvre de Balthasar avant le concile. Mais les prventions, de part et d'autre, sont indiscutables. La situation change aprs 1965. Journet consacre une longue note trs positive son livre Cordula ou l'preuve dcisive, qui parat en traduction franaisechez Beauchesne en 1968. Il n'hsite pas situer l'ouvrage, conscration suprme, dans les parages du Paysan de la Garonne. Mme lumire, l'vangile;mme souci, la tragdie spirituelle de notre poque; mme solution, la saintet dela charit. Moins de richesses sans doute, de plnitude et de srnit; une teinted'angoisse, voire de .30 La mthode de recension est la mme que pourle Paysan: de larges extraits sont cits, sans beaucoup de commentaires. L'articlesuggre une relle convergence de pense entre les deux thologiens, tant sur le

    diagnostic que sur les remdes appliquer aux maux de l'glise. L'appartenanceou non de Balthasar l'cole n'a plus aucune importance, seule compte sa foiprofonde et sre qui fait toute la valeur de ce petit livre.

    Le rapprochement avec les deux thologiens jsuites franais Henri de Lubacet Jean Danilou s'inscrit dans la mme logique de ce combat pour la dfense dela foi. Aprs 1966, mes rapports avec le cardinal Journet ne furent plus jamaistroubls par une discussion pnible crit le cardinal de Lubac dans une note deson Mmoire sur l'occasion de mes crits?[ Les notes ou recensions que le cardinal Journet consacre ses ouvrages dans l'aprs-concile confirment son tmoi

    gnage. C'est une joie de recevoir en ce temps de confusion sur le Credo le beaulivre du P. de Lubac crit-il propos de La Foi chrtienne. Essai sur la structure du Symbole des Aptres.

    L'auteur, matre de son sujet comme l'accoutume, suit son chemin sansdvier, travers une galaxie de citations, anciennes et nouvelles, catholiques etprotestantes, presque toutes bienveillantes, il n'y aura gure que le pauvre Cajetan se trouver malmen.32

    Mais Journet ne s'y arrte pas. En 1971, il accueillera avec le mme enthousiasmeune mise au point du jsuite dans 1''Osservatore Romano sur le thme glise universelle et glises particulires qualifie d'importante et magistrale.

    Si l'on feint d'oublier que l'glise catholique est romaine en ce sens qu'elleest l'glise confie par le Christ Pierre et ses successeurs, si l'on prendromaine au sens non plus thologique mais socio-culturel, si l'on donne l'expression glise romaine le sens purement contingent d'glise locale, onparlera d'glise romaine tout comme on parlera d'glises hollandaise, ou germanique, on anglo-saxonne, etc. Ds lors l'glise catholique n'apparatra plus quecomme une confdration d'glises nationales dont les vques sont gaux entre

    La lettre, non date, se rfre ['editorial Coopration (septembre 1942) dnonant la politique antismite du gouvernement de Vichy. Interdit de publication par son vque MgrCharrire, il circulera sous le manteau. Je remercie Mlle Renata Latala, secrtaire de la Fondation Journet, qui m'a transmis ce document.Nova et Vetera, 1968/2, 147. Je remercie nouveau Mlle Renata Latala.Henri de Lubac, Mmoire sur l'occasion de mes crits, Paris 2006, 337.

    32Nova et Vetera, 1969/3, 237.

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    eux, il ne restera l'vque de Rome que d'tre un primus inter pares. L'conomie divine voulue par le Christ pour l'glise qu'il s'est acquise au prix de sonsang sombre tout entire dans une ralisation sociologique d'un vague sentimentchrtien/3

    Le mme accueil enthousiaste est rserv aux ouvrages du P. Jean Danilou.Le moins que l'on puisse dire est qu'il n'en avait pas toujours t ainsi dans lesannes d'immdiat aprs-guerre, au temps de la grande querelle sur la nouvellethologie, lorsque les Danilou et consorts (comme les appelait Journet dansses lettres Maritain) menaient leur croisade contre l'hgmonie du no-thomisme dans la thologie catholique. Aprs sa mort, en mai 1974, la revue rendrahommage, avec une certaine grandiloquence, ce vrai savant qui s'est jet sanscompter dans la mle, et dont Dieu a voulu faire au milieu de nous un tmoin dela foi comparable ceux des premiers sicles, avant de reproduire un texte delui sur la crise actuelle.34 La crise de l'glise amne des reclassements auxquels le thologien de Fribourg ne peut se soustraire. Les meilleurs dfenseurs dela foi ne sont plus forcment les plus fidles disciples de l'Aquinate. Il n'est pastonnant de retrouver, parmi les fondateurs de la revue Communio en 1972, celuiqui prendra la succession du cardinal Journet la direction de Nova aprs samort: le pre (aujourd'hui cardinal) Georges Cottier.35 La rception des enseignements de Vatican II est bel bien devenue, au-del des querelles d'coles, lenouvel enjeu de la thologie catholique.

    33 glises particulires et glises locales, Nova et Vetera, 1971/1, 58.34 Nova et Vetera, 1974/3, 224.35 Voir ce sujet mon article Georges Cottier (* 1922). Draison moderne et vrit chrtienne,

    dans: Stephan Leimgruber/Max Schoch (dir.), Gegen die Gottvergessenheit. SchweizerTheologen im 19. und 20. Jahrhundert, Bale 1990, 627-639.

  • Charles Journet et Vatican II 237

    C 'harles Journet et Vatican IIL'article tudie la rception des enseignements du concile par le thologien Charles Journet.L'analyse de ses crits dans sa revue Nova et Vetera, entre la fin du concile en dcembre 1965et la date de sa propre mort en avril 1975, rvle un thologien avant tout proccup dedfendre la foi qu'il estime menace. Directement l'origine de la fameuse Profession de foide Paul VI (30 juin 1968). il s'engage lui-mme publiquement sur la question dlicate de['intercommunion au nom de la dfense de la conception catholique de l'eucharistie, cur del'Eglise. Sur la question de l'cumnisme, le thologien, tout en prenant loyalement en compte les enseignements de Vatican II, s'emploie mettre en garde contre une fausse conception del'unit, de nature purement sociologique, qui conduirait l'Eglise renier son identit. L'accueilbienveillant qu'il rserve dans les colonnes de sa revue des thologiens non thomistes (vonBalthasar, de Lubac, Danilou), avec lesquels les relations n'avaient toujours t faciles avantle concile, dmontre, si besoin tait, que la rception des enseignements de Vatican IL au-deldes querelles d'coles, constitue bel et bien le nouvel enjeu de la thologie catholique.

    Charles Journet und das zweite Vatikanum

    Der Beitrag untersucht die Rezeption der Lehren des Konzils durch den Theologen CharlesJournet. Die Analyse seiner Schriften in der Zeitschrift Nova et Vetera zwischen dem Anschluss des Konzils im Dezember 1965 und seinem Tod im April 1975 zeigt einen Theologen,der vor allem damit beschftigt war, den Glauben, den er bedroht sah, zu verteidigen. Amunmittelbaren Anfang des berhmten Credo des Volkes Gottes von Paul VI. (30. Juni 1968)engagierte sich Journet ffentlich ber die heikle Frage der Interkommunion im Namen derVerteidigung der katolischen Eucharistievorstellung, coeur de l'Eglise. Hinsichtlich derFrage der kumene, usserte sich der Theologe, ohne den Lehren des Zweiten Vatikanums unloyal zu werden, gegen eine falsche Konzeption der Einheit, einer rein soziologischen Konzeption, welche dazu fhren wrde, dass die Kirche ihre Identitt verleugnen wrde. Die wohlwollende Aufnahme von nicht-thomistischen Theologen (von Balthasar, de Lubac, Danilou)in seiner Zeitschrift, zu denen das Verhltnis vor dem Konzil nicht immer einfach gewesenwar, zeigt, dass die Rezeption der Lehren des Zweiten Vatikanums jenseits von Auseinandersetzungen zwischen Schulen, ganz eigentlich die neue Herausforderung fr die katholischeTheologie darstellte.

    Charles Journet and Vatican IIThis paper focuses on the reception of the Second Vatican Council by the theologian CharlesJournet. Analysis of his writings in Nova et Vetera between the close of Vatican II in December1965 and his death in April 1975 reveal a theologian who was most of all concerned to defenda faith which he regarded as in danger. On 30lh June 1968 Pope Paul VI read his famous Credo.Journet became publicly involved with the issue of intercommunion or shared Eucharist,attempting to defend the Catholic conception of the Eucharist as the coeur de l'Eglise. As far asthe ecumenical issue is concerned, while remaining faithful to the teachings of Vatican II, thetheologian speaks against a false conception of unity, that is a purely sociological one, which ifadopted would mean that the church must deny its own identity. Although his relationship withthem had not always been easy in the period before Vatican II, Joumet's sympathetic admissionof non-Thomistic theologians such as von Balthasar, de Lubac and Danilou to his journalshows that the reception of the teachings of Vatican II had eclipsed the differences betweendifferent schools of theology and now represented the great new challenge for Catholictheology.

    Schlsse/begriffe - Mots cls - KeywordsKonzil - Concile - Council, Glauben - foi - belief. Eucharistie - eucharistie - Eucharist, Interkommunion - intercommunion - intercommunion, kumene - cumnisme - ecumenism,Theologie - thologie - theology.

    Philippe Chenaux, est professeur d'histoire de l'glise moderne et contemporaine l'universitdu Latran Rome.

  • Charles Journet et Vatican II