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  • 8/20/2019 C2 Chap08 - LONGROIS

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    40ANESTHÉSIE DU CARDIAQUEPOUR CHIRURGIE NON CARDIAQUE

    Dan LONGROIS et Jean-Pol DEPOIX

    Identifier les patients ayant une cardiopathie comme étant «   à part

     

    » dans la pratique de l’anesthésie et de la médecine péri-opé-ratoire pourrait être justifié par

     

    : 1) le fait que la présence d’unecardiopathie est un facteur de risque indépendant de compli-cations péri-opératoires

     

    ; 2) les changements de prise en chargediminuent l’incidence ou la gravité des complications.

    Il existe des preuves que ces deux affirmations sont vraies.Nous avons fait le choix de présenter de manière individualiséela physio pathologie et l’évaluation préopératoire pour les cardio-

     pathies les plus fréquentes. La conduite de l’anesthésie et la priseen charge postopératoire ont été présentées en commun.

    Épidémiologie

    Données épidémiologiques concernantles pathologies cardiovasculairesLes pathologies cardiovasculaires représentent la première causede mortalité dans les pays développés, en grande partie en rela-

    tion avec le vieillissement de la population [1]. Les principalescardiopathies sont 

    : 1) les coronaropathies 

    ; 2) les valvulopathies 

    ;3)

     

    l’insuffisance cardiaque 

    ; 4) les cardiopathies rythmiques dontla plus fréquente est la fibrillation atriale soit 1 % de la populationdans les pays occidentaux [2].

    Selon les statistiques nord-américaines de 2012 [1], la préva-lence des maladies cardiovasculaires chez les sujets caucasiensde plus de 18

     

    ans est de 11,7 

    ; 6,4 

    % ont une coronaropathie,23,6

     

    % une hypertension artérielle et 2,5 

    % ont fait un accidentischémique cérébral. La prévalence est légèrement plus faible

     pour les asiatiques et les hispaniques et plus importante pour lessujets d’origine africaine et amérindienne. Les projections sontqu’en 2030, environ 40

     

    % des habitants des États-Unis aurontune pathologie cardiovasculaire [1]. La prévalence des maladiescardio vasculaires en Europe et en France est moindre.

    Données épidémiologiques concernantla chirurgie, les complicationscardiovasculaires péri-opératoireset le risque chirurgicalPlus de 250 millions de patients bénéficient annuellement d’unechirurgie majeure (incision/excision nécessitant une anesthésie

    générale ou locorégionale) dans le monde [3] ; dans les pays déve-loppés (73

     

    % des interventions chirurgicales majeures faites dansle monde) ceci correspond à 11

     

    000 interventions par an pour100

     

    000 habitants [3].La définition des complications cardiovasculaires péri-opéra-

    toires n’est pas standardisée. Elle peut aller de la survenue d’une

    hypotension artérielle peranesthésique (jusqu’à 80 

    % des patientsen fonction des seuils utilisés pour définir l’hypotension [4] maisdont les conséquences sur les complications graves postopéra-toires restent controversées), à l’augmentation asymptomatiquedes concentrations sériques de troponine en postopératoire,à l’infarctus du myocarde, à l’insuffisance cardiaque, à l’arrêtcardiorespiratoire et jusqu’au décès. Globalement, les complica-tions graves concernent 3

     

    % des chirurgies et la mortalité globale postopératoire est estimée à 0,5 % [3].

    Dans beaucoup de recommandations concernant l’évaluation préopératoire des patients ayant une cardiopathie [5, 6, 7], lerisque de complications cardiovasculaires en fonction du type dechirurgie est classé en faible, modéré ou élevé [6] (Tableau 40-I).Plus en détail, sur une cohorte de 3,7

     

    millions de patients, la mor-

    talité postopératoire (ajustée sur les comorbidités préopératoires)était en moyenne de 1,85 % mais avec une dispersion allant, sur

    Tableau 40-I Risque de complications cardiovasculaires postopératoiresen fonction du type de chirurgie, d’après [5, 6, 7].

    Risque de complications cardiovasculaires en fonction du type de chirurgie 

    Élevé Incidence des complications > 5 %• Interventions chirurgicales majeures, en urgence,

    surtout chez les patients âgés• Chirurgie aortique ou vasculaire majeure• Chirurgie vasculaire périphérique• Interventions chirurgicales avec variations

    importantes de volémie

    Intermédiaire Incidence des complications < 5 %• Endartériectomie carotidienne• Chirurgie tête et cou• Chirurgie intrapéritonéale et intrathoracique• Chirurgie orthopédique• Chirurgie prostatique

    Faible Incidence des complications < 1 %• Procédures endoscopiques• Chirurgie superficielle• Cataracte• Chirurgie du sein

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    218   ANESTHÉSIE

    11 

    catégories de chirurgies, de 0,07 

    % (chirurgie du sein) à 5,9 

    %(chirurgie vasculaire) [8]. Lorsque 37

     

     procédures chirurgicalesont été analysées, le risque de mortalité le plus élevé (entre 15 et20

     

    %) était associé à la transplantation pulmonaire ou hépatique[8]. Ces résultats suggèrent que la classification du risque chirur-gical en faible, modéré et élevé est une simplification, mais néan-moins acceptable car l’aire sous la courbe ROC (receiver operatingcharacteristic ) de la classification complexe est de 0,88 alors quecelle de la classification simplifiée est quand même de 0,83, ce quiest acceptable pour la pratique quotidienne.

    Il faut souligner que pour le même type de chirurgie, les événe-ments/complications peropératoires ne sont pas pris en consi-dération [8]. Un score (score Apgar chirurgical) (Tableau 40-II)

     prenant en compte les pertes sanguines peropératoires estimées,les valeurs les plus basses de pression artérielle et de fréquence car-diaque pendant la chirurgie, permet de stratifier le risque chirur-gical en fonction d’événements peropératoires [9]. Il a été montréque même après ajustement sur 27

     

     variables préopératoires, le scoreApgar chirurgical est discriminant dans plusieurs types de chirur-gies en mono- ou multicentrique. La mortalité et les complicationsà 30

     

     jours étaient de 7,9 

    % et 33 

    % respectivement lorsque le score

    Apgar chirurgical était entre 0-4 et de 0,5 

    % et 3 

    % respectivement pour un score de 10 [9]. Sur la cohorte initiale, la valeur médiane duscore était de 7 ce qui était associé à une mortalité de 1,1  % et à unefréquence des complications de 9,1

     

    % [9]. L’avantage théorique dela prise en compte simultanée du risque a priori (voir  Tableau 40-I)et a posteriori (voir  Tableau

     

    40-II) est une classification globale durisque pouvant aboutir à des modifications de la prise en charge enfin d’intervention (parcours patients spécifiques pour les patientsdéfinis comme à risque) mais cette démarche n’a pas encore faitl’objet d’études prospectives.

    L’ensemble de ces données épidémiologiques suggère quel’interaction entre une prévalence élevée des cardiopathies etun nombre élevé et croissant d’interventions chirurgicales inva-sives, dans les pays développés, peut aboutir à un nombre élevé

    de patients ayant une cardiopathie devant bénéficier d’une inter- vention chirurgicale et qui nécessitent une attention particulière.

    Données épidémiologiques historiquesdu risque lié au patientHistoriquement, un antécédent de cardiopathie (risque lié au

     patient) augmentait le risque de complications cardiovasculaires péri-opératoires mais une interaction existe entre le risque lié au patient et le risque lié à la chirurgie

     

    ; même si le risque patient estélevé, l’incidence des complications cardiovasculaires graves estfaible pour les chirurgies à faible risque. Ceci a abouti au fait quel’ACC/AHA ( American college of cardiology/ American heart asso-ciation) [6], l’ESC ( European society of cardiology) [7] et la Sfar/

    SFC (Société française d’anesthésie et de réanimation/Sociétéfrançaise de cardiologie) [5] recommandent l’utilisation du scorede Lee (Tableau 40-III) [10] pour la stratification du risque decomplications cardiovasculaires péri-opératoires. Dans le score deLee initial [10] publié en 1999, la présence d’une insuffisance car-diaque ou d’une coronaropathie (quelles qu’en soient les manifes-tations cliniques de ces deux types de cardiopathies) augmentaitle risque de survenue de complications cardiovasculaires péri-opé-ratoires [10]. Les autres cardiopathies n’étaient pas mentionnées,

     probablement parce que le nombre de patients dans la cohorte de

    développement et de validation du score de Lee n’était pas suffi-sant. La discrimination et la calibration du score de Lee, qui a étéadopté par les recommandations Sfar/SFC de 2011 [5] ont étéanalysées dans une revue systématique [11]. Il a été montré que ladiscrimination était acceptable (aire sous la courbe ROC de 0,75)

     pour la chirurgie non vasculaire et médiocre pour la chirurgie vas-culaire (aire sous la courbe ROC à 0,69). Les auteurs de la revuesystématique [11] concluaient qu’il était néanmoins raisonnabled’utiliser le score de Lee pour la stratification du risque cardiovas-culaire péri-opératoire. La performance médiocre du score de Leechez les patients de chirurgie vasculaire pourrait être améliorée parl’utilisation des biomarqueurs comme le peptide natriurétique detype B [12] ou l’échocardiographie de dépistage [13] mais la Sfar/SFC en 2011 n’a pas fait de recommandations dans ce sens [5]. Enattendant la validation de scores de prédiction plus élaborés [14]dont le calcul sera facilité par l’utilisation des dossiers médicauxélectroniques, le score de Lee, de par sa simplicité d’utilisation etses performances discriminatives acceptables, permettra au moinsd’homogénéiser les pratiques d’anesthésie et c’est probablementla principale raison pour laquelle il a été adopté par les sociétéssavantes dont la Sfar/SFC.

    Données épidémiologiques récentesconcernant le risque lié au patientDans la publication qui a analysé le plus grand nombre de patients(183

     

    069) qui ont bénéficié d’une chirurgie non cardiaque [15],les complications analysées ont été l’arrêt cardiaque et l’infarc-tus du myocarde (IDM) dans les trente jours postopératoires.

    Tableau 40-II Score Apgar chirurgical, d’après [9].

    0 point 1 point 2 points 3 points 4 points  

    Pertes sanguinesestimées (mL)

    > 1000 601-1000 101-600 < 100

    PAM la plusbasse (mmHg)

     70

    Fréquencecardiaque laplus basse (bpm)

    > 85 76-85 66-75 56-65 2 mg . dL–1 1 point

    Chaque item correspond (hormis la chirurgie) à une pathologie existante ou à unantécédent. La valeur de créatininémie est celle mesurée lors de la consultation.

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    ANESTHÉSIE DU CARDIAQUE POUR CHIRURGIE NON CARDIAQUE 219

    L’incidence de ces complications cardiovasculaires graves était de1,29

     

    % (soit 2362 sur 183 

    069 patients) mais avec une mortalité àtrente jours de 60

     

    % [15]. Pour comparaison, l’incidence des com- plications respiratoires était de 3 % [16] et celle des complicationsthromboemboliques de 0,63

     

    % avec une mortalité à trente joursde 11

     

    % [17]. Si d’autres complications cardiovasculaires péri-opératoires sont prises en compte (par exemple l’insuffisance car-

    diaque aiguë, les troubles du rythme dont la fibrillation atriale 

    etles accidents vasculaires cérébraux), leur fréquence augmente.Ces résultats démontrent que les complications cardiovasculairesgraves sont moins fréquentes que d’autres types de complicationsmais leur survenue est accompagnée d’une mortalité très élevée.Même lorsqu’elles n’entraînent pas le décès en postopératoireimmédiat, les complications cardiovasculaires augmentent ladurée de séjour, les dépenses de santé et sont probablement res-

     ponsables d’une diminution de la survie à distance.L’accumulation des études de cohorte, sur un nombre de plus

    en plus important de patients qui permet l’ajustement sur de plusnombreuses variables préopératoires, modifie l’épidémiologie descomplications cardiovasculaires péri-opératoires chez les patientsayant une cardiopathie. Dans l’étude de Davenport et al. publiée

    en 2007 [15], en analyse multivariée, la présence de plusieurstypes de cardiopathies (Tableau 40-IV) n’était pas statistique-ment associée à la survenue de complications péri-opératoires. Lesfacteurs statistiquement associés à un risque accru de survenue decomplications cardiovasculaires graves étaient le type de chirurgieet le statut fonctionnel ASA ( American society of anesthesiologists)[15]. Les auteurs concluaient que les antécédents de cardiopa-thie diagnostiquée et traitée ne sont pas associés à la survenuedes complications cardiovasculaires graves péri-opératoires. Cesaffirmations sont probablement acceptables pour la cardiopathieischémique car elle a été analysée en tenant compte de son his-toire naturelle (angor, IDM, revascularisation coronaire). Ceci estaussi probablement vrai en ce qui concerne l’hypertension arté-rielle traitée. Il faut souligner que les valvulopathies n’avaient pas

    été identifiées (autrement que par leur évolution vers une insuffi-sance cardiaque) [15]. D’autres cardiopathies (hypertension arté-rielle pulmonaire ou HTAP, cardiomyopathies hypertrophiquesobstructives ou CMO) n’avaient pas été analysées non plus.

    L’étude de Davenport et al. [15] a le mérite d’avoir la puis-sance statistique nécessaire pour retrouver (ou infirmer) uneassociation statistique entre les antécédents de cardiopathie et lasurvenue de complications cardiovasculaires graves péri-opéra-toires mais ne répond pas aux préoccupations quotidiennes des

     praticiens lorsqu’il faut prendre en charge un patient donné avecune cardiopathie et ses traitements. Il semble donc importantd’analyser également la littérature à partir de cardiopathies plusrares et mieux définies mais dans des études avec un nombre de

     patients beaucoup plus faible. Cette analyse non exhaustive de lalittérature est présentée dans le Tableau 40-V.

    La difficulté, en 2012 et dans les années à venir, est de concilier

    d’un côté les données historiques qui ont permis la formulationdes recommandations d’utiliser le score de Lee pour la stratifica-tion du risque préopératoire (dans un objectif d’homogénéisationdes pratiques) et les résultats plus récents, obtenus sur de grandescohortes de patients, qui ne montrent pas de relation statistiqueentre les antécédents de cardiopathie et la survenue de compli-cations graves péri-opératoires. Par exemple, historiquement,une attention particulière a été portée aux coronaropathies etbeaucoup de recommandations, y compris récentes, sur l’évalua-tion préopératoire et la prise en charge péri-opératoire ont sur-tout concerné ces patients [5, 7]. De manière surprenante, destravaux plus récents [18] montrent que la mortalité postopéra-toire à trente jours des patients ayant une coronaropathie dia-gnostiquée et traitée (6,6

     

    %) est similaire à celle de patients sans

    coronaro pathie documentée (6,2 

    %) alors que la présence d’uneinsuffisance cardiaque, quelle qu’en soit l’étiologie, est associéeà une augmentation (11,7

     

    %) statistiquement significative durisque de mortalité. Ces résultats ont été confirmés par une autreétude publiée en 2011 [19] qui a montré que la mortalité à trente

     jours ajustée pour de nombreuses covariables était 2-3 

    fois plusimportante pour les patients ayant une insuffisance cardiaqueischémique ou non ischémique ou une fibrillation atriale parrapport aux patients ayant une coronaropathie. Il existe plusieursexplications possibles à ces discordances

     

    : 1) beaucoup de car-diopathies (surtout ischémiques) sont infracliniques et l’absenced’antécédents identifiés de coronaropathie dans le score de Leen’exclue pas l’existence d’une coronaropathie pouvant décom-

     penser en péri-opératoire 

    ; 2) beaucoup de cardiopathies sont

    correctement traitées et les soins péri-opératoires modernes ne lesdécompensent pas 

    ; 3) la prise en charge péri-opératoire (fondéesurtout sur des raisonnements physiopathologiques) est correcteet permet de prévenir beaucoup de complications péri-opéra-toires ; 4) enfin, de très nombreux biais méthodologiques peuventcontribuer à expliquer ces différences

     

    : biais d’échantillonnagedans les études monocentriques ou multicentriques prospectivesqui ont exclu beaucoup de patients de la «

     

     vie réelle 

    » 

    ; cohortesanciennes (comme celle du score de Lee) qui ne bénéficiaient

     pas des prises en charge modernes 

    (médicales et chirurgicales) 

    ;l’imperfection des outils statistiques avec surtout le nombre defacteurs d’ajustement dans les analyses multivariées qui ont étéutilisées pour définir les scores. L’absence de relation statistiqueentre la présence de certaines cardiopathies et les complicationscardiovasculaires graves péri-opératoires pourrait être une incita-

    tion à déplacer l’attention et les efforts des cliniciens de la strati-fication exclusivement préopératoire du risque vers une stratégiestratification pré- (score de Lee) et peropératoire (score Apgarchirurgical) associée à une surveillance ciblée des patients iden-tifiés comme étant à haut risque avec prévention et traitementrapide per- et surtout postopératoire des anomalies pouvant dés-tabiliser la cardiopathie (activation excessive du système nerveuxsympathique par l’hypovolémie, l’hypoxémie, la douleur, l’infec-tion, etc.). Cette stratégie semble confortée par une étude publiéeen 2010 [20] et sera développée ultérieurement.

    Tableau 40-IV Types de cardiopathies préopératoires qui n’étaientpas statistiquement associées à un risque accru de complicationspostopératoires, d’après [15].

    Insuffisance cardiaque congestive

    Angor d’effort

    Infarctus du myocarde

    Hypertension artérielle traitée

    Angioplastie coronaire

    Chirurgie cardiaque avant la chirurgie non cardiaque

    Artériopathie des membres inférieurs

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    220   ANESTHÉSIE

    Tableau 40-V Estimation du risque de complications cardiovasculaires péri-opératoires (chirurgie non cardiaque) en fonction du type de cardiopathie.

    Pathologie Nombre de

    patients Complications

    analysées Risque de complications

    péri-opératoires Remarques 

    Kertai et al.2004 [90]

    RA sévèreet modéré

    108 RA versus216 contrôles

    Mortalité péri-opératoire et IDM

    AjustéOR : 5,2 (IC 95 % : 1,6-17)

    14 % de complications dans le groupeRA versus 2 % de complications dans legroupe contrôle

    Calejja AMet al. [91] RA sévèreasymptomatique 30 Décès, IDM, ICC,TDRV, hTAIO Complications : 33 % RA versus23 

    % contrôle, P 

    0,06

    Ho et al. [92] RA modéréasymptomatique

    22 Cardiovasculaires,rénales

    Pas de complications Anesthésie péridurale 

    ; chirurgieorthopédique

    Zahid et al.[93]

    RA 5149 RA versus10 284 contrôles

    Mortalité péri-opératoire et IDM

    Ajusté :IDM : OR : 1,55 (IC 95 % : 1,27-

    1,90), P 

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    ANESTHÉSIE DU CARDIAQUE POUR CHIRURGIE NON CARDIAQUE 221

    stable, un cadre de réflexion, de définir les meilleures approchesdiagnostiques et thérapeutiques, de démontrer que des interven-tions diagnostiques et thérapeutiques sont rarement nécessaires

     pour « 

    faire passer le cap de l’intervention chirurgicale et del’anesthésie  » et de limiter la prescription d’examens complé-mentaires cardiologiques coûteux

     

    ; 3) de formaliser la réflexion pour une troisième catégorie de patients, les patients asymptoma-

    tiques, sans facteurs de risque de complications cardiovasculaires péri-opératoires identifiés par le score de Lee mais ayant d’autresfacteurs de risque cardiovasculaires (hypercholestérolémie, hyper-tension artérielle, obésité). La Sfar/SFC a considéré qu’en France,la consultation d’anesthésie et l’évaluation préopératoire réaliséeà ce moment ne pouvaient pas servir d’évaluation cardiovasculairechez les patients asymptomatiques [5].

    En consultation d’anesthésie, l’interrogatoire est centré surla recherche des facteurs de risque cardiovasculaires, des antécé-dents (hospitalisations pour décompensation d’une insuffisancecardiaque, angor d’effort, IDM, souffle cardiaque, palpitations,artériopathie des membres inférieurs), des interventions diagnos-tiques ou thérapeutiques (coronarographie, revascularisationcoronaire, stimulateurs ou défibrillateurs cardiaques), des traite-

    ments cardiovasculaires et des comorbidités. L’estimation de lacapacité à l’effort du patient en fonction d’une échelle commecelle de Duke (Tableau 40-VII) est une étape essentielle de l’éva-luation préopératoire [5]. Dans le score de Duke, l’activité phy-sique est exprimée en METs (metabolic equivalents). Pour chaquetype d’activité physique, la dépense énergétique correspond à uncertain nombre de METs. La capacité fonctionnelle est considé-rée comme excellente (>

     

    METs), modérée (4-7 

    METs), mau- vaise (<

     

    METs) ou inconnue. Les complications cardiaques péri-opératoires surviennent plus fréquemment chez les patientsdont les capacités fonctionnelles sont inférieures à 4 METs.

    L’interrogatoire et l’examen clinique réalisés lors de la consul-tation d’anesthésie ainsi que la connaissance du type de chirurgie(voir  Tableau 40-I) permettent de calculer le score de Lee (voir  Tableau 40-III) et de définir pour chaque patient un risque a

     priori faible (moins de 1 

     point), intermédiaire (1 ou 2 

     points) ouélevé (3

     

     points ou plus). Les patients à risque faible n’ont, en géné-ral, pas besoin d’explorations complémentaires [7]. Les patients àrisque élevé nécessitent souvent une optimisation du traitement,habituellement réalisée par les cardiologues [7]. Les examens com-

     plémentaires éventuels permettent, après analyse des résultats, dereclasser surtout les patients à risque intermédiaire et d’affinerl’estimation du risque [7].

    Principes généraux de priseen charge péri-opératoire despatients ayant une cardiopathie

    La prise en charge péri-opératoire des patients ayant une cardio-

     pathie a pour but principal de ne pas aggraver, voire d’améliorer,l’histoire naturelle de la cardiopathie. Malgré des différencesimportantes dans la physiopathologie, les manifestations cli-niques et l’histoire naturelle des cardiopathies, il existe des prin-cipes généraux pour la prise en charge péri-opératoire des patientsayant une cardiopathie.

    Les principales étapes de la prise en charge péri-opératoire sont 

    :1) l’évaluation et la prise en charge préopératoire avec la décisionde pratiquer/reporter l’acte anesthésique et les ajustements destraitements chroniques

     

    ; 2) le choix d’une stratégie anesthésique(choix du monitorage, de la technique d’anesthésie, des médica-ments anesthésiques, des modalités de maintien de l’homéosta-sie)

     

    ; 3) le choix d’une stratégie de surveillance postopératoire,de prévention, diagnostic et traitement des complications et de

    réinstitution des traitements chroniques préopératoires.Les principes de l’évaluation préopératoire des patients ayantune cardiopathie et devant bénéficier d’une chirurgie non car-diaque ont été exposés dans les recommandations de l’ACC/AHA en 2007 [6], de l’ESC en 2009 [7] et de la Sfar/SFC en 2011[5]. Ces recommandations définissent comme buts

     

    : 1) d’identi-fier les patients ayant une cardiopathie instable (Tableau

     

    40-VI)devant, en dehors de l’urgence chirurgicale vitale, bénéficier d’une

     prise en charge spécialisée avant l’intervention de chirurgie noncardiaque

     

    ; 2) de créer, pour les patients ayant une cardiopathie

    Tableau 40-VI Situations cliniques qui nécessitent une évaluation/prise

    en charge cardiologique avant une intervention réglée, d’après [5, 6, 7].

    Situation clinique Exemples  

    Syndrome coronarienaigu

    Angor instable ou angor sévère (CCS classe IIIou IV)

    Infarctus du myocarde récent (entre 7 et 30 jours)

    Insuffisance cardiaquedécompensée (NYHAIV) ou insuffisancecardiaque aiguë

    Troubles du rythmeou de la conduction

    Bloc auriculo-ventriculaire de haut degré (MobitzII, III)

    Troubles du rythme ventriculaire symptomatiquesArythmies supraventriculaires avec fréquence

    ventriculaire non contrôlée (fréquence

    cardiaque de repos 

    100 

    bpm)Bradycardie symptomatiqueTachycardie ventriculaire de diagnostic récent

    Valvulopathies sévères Rétrécissement aortique sévère (gradient moyen> 40 mmHg, surface aortique 

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    222   ANESTHÉSIE

    Prise en charge des patientscoronariens

    Physiopathologie et préventiondes complications ischémiques myocardiquespéri-opératoiresLa principale étiologie des coronaropathies est l’athérome coro-narien. Les manifestations cliniques de l’athérome coronarien

     peuvent prendre la forme de l’angor chronique stable en relationavec des sténoses des artères coronaires qui empêchent l’augmen-tation du débit sanguin coronaire (DSC) lors des augmentationsde la consommation en oxygène du myocarde (MvO2) ou biendes syndromes coronariens aigus (SCA) dont l’IDM pour lequelexistent des définitions internationales, applicables aussi aucontexte péri-opératoire (Tableau 40-VIII) [21].

    L’ischémie myocardique et les SCA péri-opératoires peuventêtre conçus comme le résultat d’une interaction complexe entrel’athérome coronarien préexistant et des causes extracardiaquesqui le déstabilisent en péri-opératoire (Tableau 40-IX). À par-tir de ces concepts physiopathologiques, il existe deux stratégiesqui ne s’excluent pas mais qui ont polarisé l’attention des clini-ciens et sont reflétées dans la littérature. La première est cen-trée sur le dépistage et la correction préopératoire de l’athéromesévère aboutissant à des sténoses coronariennes stables (pouvant

     justifier d’une revascularisation myocardique) avec l’espoir de«

     

    faire passer le cap 

    » de l’intervention. Il n’existe pas de preuvesconvaincantes que cette stratégie coûteuse diminue la morbiditéet la mortalité péri-opératoires. Les recommandations Sfar/SFCde 2011 [5] stipulent que la décision de revascularisation myo-cardique avant une chirurgie non cardiaque doit être collégiale ettracée dans le dossier médical (bénéfices/risques/alternatives avecoptimisation du traitement médical) et clairement expliquée au

     patient 

    ; elle doit rester une décision exceptionnelle fondée soitsur la survenue d’un SCA (avec ou sans sus-décalage du segmentST), soit sur l’existence d’une coronaropathie stable avec statut

    anatomique particulier (sténose du tronc commun coronairegauche ou des trois troncs coronaires ou pluritronculaire impli-quant l’artère interventriculaire antérieure). La technique de réfé-rence pour la revascularisation avant une chirurgie non cardiaqueest le pontage coronarien en cas de sténose du tronc commun.Si une angioplastie coronaire est choisie, elle doit faire appel aux

     prothèses endocoronaires nues à cause des délais de seulement sixsemaines avant de pouvoir pratiquer une chirurgie non cardiaque.

    La deuxième stratégie est centrée sur la prévention de la survenuedes situations qui risquent de déstabiliser l’athérome coronarien(tachycardie, hypothermie, anémie, hypoxémie, douleur) en acti-

     vant le système sympathique ainsi que sur la prévention médica-menteuse des conséquences de l’activation sympathique excessive.

    Tableau 40-VIII Définitions internationales de l’infarctusdu myocarde, d’après [102].

    Le terme infarctus du myocarde (IDM) devrait être utilisé lorsqu’il existe uneaugmentation de la troponine sérique (au moins une valeurs supérieureau 99e percentile de la limite haute de référence) AVEC au moins un deséléments suivants :– symptômes d’ischémie– signes ECG évocateurs d’ischémie (modifications du segment ST ou

    apparition d’un bloc de branche gauche)– apparition d’une nouvelle onde Q– imagerie compatible avec une perte de novo de myocarde viable ou

    l’apparition de novo d’anomalies de la contractilité segmentaireLe terme d’IDM ne peut pas être utilisé pour désigner les dommages

    myocardiques associés à la chirurgie cardiaque ni les dommagesmyocardiaques secondaires à des pathologies comme l’insuffisancerénale chronique, l’insuffisance cardiaque chronique, la cardioversion, lesablations des procédudes d’électrophysiologie, le sepsis, la myocardite, lestoxines cardiaques, les pathologies infiltratives

    Type 1

    IDM spontané en relation avec une ischémie myocardique secondaire à unévénement coronarien primaire (érosion de plaque et/ou rupture/fissure/dissection)

    Type 2IDM secondaire soit à une ischémie myocardique secondaire, soit à une

    augmentation de la demande myocardique en oxygène ou à unediminution de l’apport myocardique en oxygène (spasme coronarien,embolie coronaire, anémie, arythmie, hyper- ou hypotension artérielle)

    Type 3Mort subite, y compris arrêt cardiaque, souvent avec des symptômes

    suggérant une ischémie myocardique, accompagnés par des anomaliesprésumées de novo comme un sus-décalage du segment ST, un bloc debranche gauche ou des preuves de l’existence d’un thrombus coronaire(angiographie et/ou autopsie). Le décès survient avant le prélèvementd’échantillons permettant de mesurer les enzymes cardiaques (ou leprélèvement est fait avant l’augmentation des enzymes cardiaques)

    Type 4aIDM associé à une angioplastie coronaire (l’augmentation de la troponinedoit être supérieure, par convention, à trois fois la valeur du 99e percentile,en cas de valeur normale de la troponine avant la procédure)

    Type 4bIDM associé à une thrombose du s tent documentée en angiographie

    ou à l’autopsie

    Type 5IDM survenant après un pontage aortocoronarien (l’augmentation de la troponine

    doit être supérieure, par convention, à cinq fois la valeur du 99e percentile)

    IDM : infarctus du myocarde

    Tableau 40-IX Déterminants de la balance apport/demandemyocardique en oxygène.

    Diminution de l’apport en oxygèneau niveau myocardique 

    Situation clinique associée 

    Diminution de la pressionde perfusion coronarienne

    Diminution du contenu artérielen oxygène

    Vasospasme coronarien

    Hypotension artérielle

    Anémie Anomalies de la vasomotricité

    coronarienne sur athéromepréexistant

    Augmentation de la demandeen oxygène myocardique 

    Situation clinique associée 

    Augmentation de la fréquencecardiaque

     Augmentation de la pré-

    ou postcharge ventriculaire

    Augmentation de la contractilité

    Troubles hémodynamiques(hypovolémie) ou anesthésieinsuffisante

    Troubles hémodynamiques(surcharge volémique)ou anesthésie insuffisante

    Inotropes ou niveau d’anesthésieinadéquat

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    ANESTHÉSIE DU CARDIAQUE POUR CHIRURGIE NON CARDIAQUE 223

    Évaluation préopératoire des patients ayantune coronaropathieAu terme de l’évaluation préopératoire réalisée selon les prin-cipes généraux décrits précédemment, l’algorithme décisionnel(Figure

     

    40-1) de la Sfar/SFC [5], simplifié par rapport aux précé-dentes recommandations internationales [7], permet de répondreaux questions pratiques (faut-il reporter l’anesthésie  ?  ; faut-iladresser le patient à un cardiologue

     

    ?) posées lors de la consulta-tion d’anesthésie préopératoire. À la fin de l’évaluation clinique

     préopératoire, en utilisant des critères cliniques simples et enconnaissant le risque lié au type d’intervention, trois types d’atti-tudes peuvent être adoptées

     

    : 1) le patient doit bénéficier d’unechirurgie pour laquelle le risque de complications cardiovascu-laires peropératoires est faible (<

     

    %). Les recommandationsACC/AHA, ESC et Sfar/SFC [5, 6, 7] stipulent que les examenscomplémentaires et la consultation de cardiologie ne sont pasutiles, surtout lorsque la cardiopathie est stable. Le médecin anes-thésiste-réanimateur peut néanmoins obtenir de la part du car-diologue l’ensemble du dossier médical du patient

     

    ; 2) le patienta une cardiopathie dont la gravité, la stabilité et la thérapeutiquesont documentées, est suivi par un cardiologue et doit bénéficier

    d’une chirurgie à risque élevée. Dans cette situation, le patient estclassé comme étant à haut risque et le principal souci doit êtrenon pas les examens complémentaires cardiologiques mais l’opti-misation du traitement. Le médecin anesthésiste-réanimateur etle cardiologue doivent décider si le patient peut bénéficier d’un

    traitement curatif à cause de l’évolution ou de la gravité de la car-diopathie (exemple : revascularisation coronarienne ou chirurgie

     valvulaire), indépendamment de l’intervention pour laquelle le patient est adressé. Le message important des recommandations[5, 6, 7] est que la correction éventuelle (avant la chirurgie noncardiaque) de la cardiopathie doit être indiquée sur sa gravité etnon sur la nécessité de «

     

     protéger le patient 

    » pour lui faire passer

    le cap de l’intervention. Lorsque la cardiopathie n’est pas suffi-samment évoluée pour justifier une correction spécifique, il fauts’assurer que le traitement médical est optimal, conformémentaux recommandations pour les différents types de cardiopathies.Il a été montré que plus de 30

     

    % des patients pouvaient bénéfi-cier d’une optimisation préopératoire de leur traitement médical(prescription de nouveaux médicaments cardiovasculaires ouoptimisation des doses) [13]

     

    ; 3) le patient a plusieurs facteursde risque de maladies cardiovasculaires, la cardiopathie n’est

     pas connue, la capacité à l’effort du patient ne peut pas être éva-luée (atteinte vasculaire périphérique par exemple) et le patientdoit bénéficier d’une intervention chirurgicale à risque élevé ouintermédiaire. Dans cette situation, les explorations complé-mentaires réalisées par le cardiologue peuvent permettre soit de

    classer le patient comme étant à faible risque, soit au contrairecomme étant à risque élevé auquel cas l’optimisation du traite-ment doit être envisagée. Ce problème concerne surtout l’iden-tification des patients ayant une atteinte coronarienne pauci- ouasymptomatique.

    Figure 40-1 Algorithme de prise en charge préopératoire des patients ayant une cardiopathie et devant bénéficier d’une intervention nécessitant uneanesthésie proposé par la Société française d’anesthésie et de réanimation et par la Société française de cardiologie, d’après [5].

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    224   ANESTHÉSIE

    Rôle de la consultation de cardiologieet des examens complémentairesdans l’évaluation anesthésiqueavant une chirurgie non cardiaqueLe choix des examens complémentaires pour affiner l’estimationdu risque cardiaque péri-opératoire est du ressort du cardiologue.

    La Sfar/SFC a fait [5] des recommandations concernant la pres-cription d’examens complémentaires pour détecter une ischémiemyocardique avant une intervention. Les examens complémen-taires le plus fréquemment prescrits sont l’ECG de repos, l’écho-cardiographie de repos, l’ECG ambulatoire, l’ECG d’effort, lascintigraphie myocardique d’effort ou sensibilisée (dipyridamoleou dobutamine), l’échocardiographie d’effort ou sensibilisée(dobutamine avec ou sans atropine). Pour la pratique quotidienne,la Sfar/SFC a restreint les indications de l’ECG de débrouillage[5, 22] (Tableau 40-X)

     

    ; la prescription d’un ECG de repos n’est pas recommandée, quel que soit l’âge du patient, en cas

     

    : 1) d’inter- vention à faible risque chirurgical

     

    ; 2) quel que soit le risque lié à lachirurgie, si un ECG est disponible depuis moins d’un an et en l’ab-sence de modifications cliniques [22]. La Sfar/SFC a sévèrement

    restreint la prescription de l’échocardiographie de repos de dépis-tage chez les patients asymptomatiques avec une possible exception(mais non validée) pour la chirurgie vasculaire où il a été montré,dans une étude [23], que la présence d’une dysfonction systo-lique ou diastolique échocardiographique, asymptomatiques, étaitun facteur de risque indépendant de survenue de complicationscardio vasculaires après chirurgie vasculaire à ciel ouvert mais pasaprès chirurgie vasculaire endoluminale [23]. En ce qui concerneles autres examens cardiologiques spécialisés, les recommandationsSfar/SFC laissent les cardiologues définir et interpréter les examens

    appropriés pour diagnostiquer une coronaropathie infraclinique[5, 6, 7]. Il faut néanmoins que les médecins anesthésistes-réanima-teurs connaissent la sensibilité, la spécificité et les valeurs prédic-tives positives et négatives de ces examens complémentaires pourla prédiction des complications cardiovasculaires postopératoires(Tableau 40-XI). De manière générale, les valeurs prédictives néga-

    tives sont élevées et les valeurs prédictives positives (très) faibles.Une fiche de liaison a été proposée en 2011 dans les recommanda-tions Sfar/SFC [5] (Figure

     

    40-2).

    Tableau 40-X Indications de l’électrocardiogramme préopératoire dedépistage, d’après [5].

    Risque patient/risquechirurgical 

    Faible Intermédiaire Majeur  

    Faible Non Non À discuter

    Intermédiaire À discuter À discuter Oui

    Majeur Oui Oui Oui

    Pour les patients âgés de plus de 65 ans, il faut probablement prescrire un ECG  12 dérivationsde repos avant toute intervention à risque intermédiaire ou élevé, même en l’absence designes cliniques, de facteurs de risque ou de pathologies cardiovasculaires [22].

    Figure 40-2 Exemple de fiche de liaison entre l’équipe d’anesthésie-réanimation et l’équipe de cardiologie (proposée par la Société françaised’anesthésie et de réanimation et par la Société française de cardiologie,d’après [5]).

    Étiquette du patient : ...........................................................................................

    Coordonnées du patient : .....................................................................................Date de demande : ...............................................................................................Nom et téléphone de l’anesthésiste : ...................................................................

    Antécédents cardiaques connus (préciser et joindre les comptes rendus,cardiologue traitant) :

    Coronaires : ...................................................................................................... Autres : RA, autres valves, HTA, FA, antécédents vasculaires…Présence d’un stent coronaire : Oui  Non Si oui, détails (type, date, actif ?, correspondant) : ... ..................... .................... ....

    Interrogatoire :

    Angor : Non  Oui  Possible  Dyspnée : Non  Oui  Stade NYHA : 1 2 3 4Capacité à l’effort : (le patient peut-il monter 2 étages ?)Examen clinique : FC TAAutre information utile : ........................................................................................ECG (à joindre) : ....................................................................................................Type d’intervention programmée : ... ................... Date prévue : ....................... ....Chirurgie risque : élevé  intermédiaire  faible Motif de l’intervention (oncologie, hémorragie, menace vitale, fracture,

    fonctionnelle, etc.) : ..........................................................................................La chirurgie peut-elle être repoussée ? : Oui  Non  Traitement actuel (dont antiagrégants, bêtabloquant, médicaments de l’IC,

    statines…) : ......................................................................................................Si traitement par antiplaquettaire, la chirurgie peut-elle être réalisée sous

    aspirine et/ou clopidogrel ?

    Score de risque (à remplir par l’anesthésiste) : ......................................................

    Score de Lee :Chirurgie à haut risque

     Cardiopathie ischémique  ATCD AVC/AIT  Diabète

     ATCD IC congestive  Insuffisance rénale Total :

    Motif spécifique de la demande : ..........................................................................

    CONSULTATION DE CARDIOLOGIE (joindre le compte rendu)Nom du cardiologue : ............................................................................................Coordonnées du cardiologue : ......... ..................... .................... ..................... .......Date de consultation : ...........................................................................................Des examens ont-ils été réalisés en consultation ?Des examens complémentaires sont-ils recommandés ?ECG d’effort : ........................................................................................................Scintigraphie myocardique : ..................................................................................Échographie sous dobutamine : ............................................................................Coronarographie : .................................................................................................

    Autres : .................................................................................................................Prévoir le dosage de la troponine I postopératoire : Oui  Non Recommandations thérapeutiques :Bêtabloquants : .....................................................................................................Statines : ...............................................................................................................Anti-agrégants plaquettaires : ...............................................................................Autres : .................................................................................................................

    Tableau 40-XI Performances diagnostiques des principaux examenscomplémentaires de cardiologie pour la prédiction des complicationscardiovasculaires péri-opératoires, d’après [5, 6, 7].

    Type de test  Sensibilité(%) Spécificité(%) VPP(%) VPN(%)

    ECG d’effort 74 69 10 98

    Thallium avecdipyridamole

    83 47 11 97

    Échocardiographiede stress (effort,dobutamine,dipyridamole)

    85 70 25-45 90-100

    ECG : électrocardiogramme ; VPN : valeur prédictive négative ; VPP : valeur prédictive positive.

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    ANESTHÉSIE DU CARDIAQUE POUR CHIRURGIE NON CARDIAQUE 225

    Prophylaxie médicamenteuse des complicationsischémiques péri-opératoiresUne des approches utilisées pour tenter de diminuer l’incidencedes épisodes d’ischémie myocardique péri-opératoires et de sesconséquences a été l’administration à titre prophylactique demédicaments connus pour leurs effets anti-ischémiques myo-

    cardiques (les bêtabloquants) ou de stabilisation des plaquesd’athérome (les statines). Les principales classes de médicamentsutilisés dans cette indication sont les antagonistes des récepteursbêta-adrénergiques (-bloquants), les agonistes 2-adrénergiques(clonidine, dexmédétomidine, mivazérol), les dérivés nitrés, lesantagonistes des canaux calciques et les statines.

    Les effets cliniques des différentes classes thérapeutiques utili-sées dans la prévention de l’ischémie myocardique péri-opératoiresont présentés dans le Tableau 40-XII.

    Depuis la précédente édition de ce livre qui dans ce chapitrerecommandait l’utilisation prophylactique des -bloquants chezles patients à risque de développer une ischémie myocardique

     péri-opératoire, l’étude Poise [24] et plusieurs méta-analyses[25, 26] ont montré que l’administration péri-opératoire pro-

     phylactique des -bloquants diminuait de manière significativel’incidence des complications ischémiques myocardiques péri-opératoires mais augmentait ou ne modifiait pas la mortalitéglobale, probablement en relation avec une incidence accrue desaccidents vasculaires cérébraux, une hypotension artérielle et unebradycardie péri-opératoires. Les recommandations actuellesde la Sfar/SFC concernant la prophylaxie médicamenteuse descomplications ischémiques péri-opératoires sont résumées dansle Tableau 40-XIII [5]. Ces recommandations soulèvent le pro-blème de la durée minimale préopératoire de prophylaxie médi-camenteuse qui a un effet bénéfique démontré sur la diminutiondes complications cardiovasculaires péri-opératoires. Une étudesuggère que le délais minimum entre le début de la prescriptiondes -bloquants et l’intervention chirurgicale, associé avec un

    effet bénéfique sur la diminution de l’incidence des complicationscardiovasculaire postopératoires, est de 7 jours [27].

    Tableau 40-XII Mécanismes d’action et effets cliniques desprincipaux médicaments utilisés dans la prophylaxie des complicationscardiovasculaires péri-opératoires, d’après [5, 6, 7].

    Diminutiondes épisodesd’ischémie

    myocardique 

    Diminutiondes autres

    complicationscardiovasculaires

    graves 

    Diminutionde la

    mortalité

    Antagonistes

    -adrénergiques

    Oui Non Non

    Agonistes2-adrénergiques

    OuiDonnées

    insuffisantesDonnées

    insuffisantes

    Dérivés nitrés Oui Non Non

    Antagonistescalciques

    Oui Non Non

    Statines Oui Oui Oui

    Tableau 40-XIII Recommandations de la Sfar/SFC concernant lagestion péri-opératoire des médicaments cardiotropes chez les patientsayant une coronaropathie, d’après [5].

    Bêtabloquants 

    GRADE 1+Continuer dans la période péri-opératoire un traitement -bloquant lorsqu’il

    est prescrit pour une insuffisance coronaire, associée ou non à unantécédent de troubles du rythme ou à une insuffisance cardiaque

    Mettre en route en préopératoire un traitement -bloquant est recommandéchez les patients ayant une insuffisance coronaire clinique ou des signesd’ischémie myocardique sur un examen non invasif 

    Utiliser pour une première prescription un agent cardiosélectif sans activitésympathique intrinsèque. Le début d’un traitement de novo en préopératoirepar un -bloquant doit être réalisé entre 7-30 jours avant la date prévuepour la chirurgie et la dernière prise avant l’opération est le matin dela chirurgie. Les doses doivent être titrées pour obtenir une fréquencecardiaque entre 60-80 bpm tout en évitant une hypotension artérielle. Lerisque de bradycardie et d’hypotension artérielle péri-opératoire doit êtregéré par le monitorage et la correction appropriée de ces deux types decomplications

    GRADE 2+Chez les patients stratifiés à risque cardiovasculaire élevé ou intermédiaire,

    estimé par un score de Lee clinique (hors facteur lié à la chirurgie) supérieurou égal à 2, il peut être recommandé de débuter un t raitement -bloquantsi le patient est opéré de chirurgie à haut risque. L’indication doit tenircompte du risque lié à l’hypotension et aux bradycardies peropératoires

    GRADE 1-Il n’est pas recommandé de débuter un t raitement -bloquant si le patient est

    opéré de chirurgie à faible risque, ni s’il est à faible risque

    Agonistes alpha 2-adrénergiques 

    GRADE 2-Les agonistes alpha 2-adrénergiques (clonidine, dexmédétomidine et mivazérol) ne

    sont pas recommandés pour la prophylaxie des complications cardiovasculairespéri-opératoires en raison de leur retentissement hémodynamique

    Statines

    GRADE 1+Un traitement par statine doit être poursuivi dans la période péri-opératoire

    lorsqu’il est prescrit de façon chronique. Celui-ci doit être administré le soirprécédant l’intervention et repris le soir de l’intervention

    Si un traitement par statine est indiqué, mais non prescrit au patient, il estrecommandé de le débuter avant une chirurgie vasculaire, si possible aumoins une semaine auparavant

    GRADE 2+Les patients devant subir une chirurgie vasculaire artérielle pourraient

    bénéficier de l’introduction d’un traitement par statine, si possible au moinsune semaine auparavant

    Inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC)et antagonistes des récepteurs de l’angiotensine 2 (ARA2)

    GRADE 1+Chez les patients coronariens, il est recommandé de maintenir les IEC ou les

    ARA2 dans la période péri-opératoire, lorsque ceux-ci sont prescrits dansle cadre d’une insuffisance cardiaque et de tenir compte du r isque accrud’hypotension artérielle péri-opératoire

    Il est recommandé d’interrompre un IEC ou un ARA2 au moins 12 heuresavant une intervention lorsque ceux-ci constituent un traitement de fond del’hypertension artérielle

    Antagonistes calciques et dérivés nitrés 

    GRADE 1-Ces deux classes de médicaments ne sont pas recommandées pour la

    prophylaxie des complications ischémiques périopératoires

    GRADE désigne : grades of recommendations, assessment, development, and evaluation  [103]. GRADE 1+ : il faut faire ; GRADE 1- : il ne faut pas faire ; GRADE 2+ ; il fautprobablement faire ; GRADE 2- : il ne faut probablement pas faire.

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    226   ANESTHÉSIE

    Gestion péri-opératoire des traitementspar agents antiplaquettairesLa majorité des patients ayant une coronaropathie reçoivent desagents antiplaquettaires (AAP). La gestion péri-opératoire desAAP a fait l’objet des recommandations publiées en 2012 [28]qui figurent dans les Tableaux 40-XIV et 40-XV.

    Traitement des épisodes d’ischémiemyocardique péri-opératoireLe traitement de l’ischémie myocardique péri-opératoire doitd’abord être étiologique. Les facteurs responsables de la balanceentre demande/apport en oxygène au niveau myocardique sontreprésentés dans le Tableau 40-IX. Un algorithme de traitementdes épisodes d’ischémie myocardique en fonction des différentsfacteurs étiologiques est proposé dans la Figure 40-3.

    Prise en charge péri-opératoiredes patients ayant une valvulopathie

    Des problèmes communs à la majorité des patients ayant une valvulopathie concernent la connaissance de la physiopathologiede la valvulopathie, l’évaluation préopératoire, la prophylaxie del’endocardite bactérienne, dont les indications ont été restreintes,et la gestion du traitement anticoagulant chez les patients qui ontdes indications d’anticoagulation au long cours. Le problème de

    la gestion du traitement anticoagulant chronique est similaire pour les patients ayant une indication d’anticoagulation pourune fibrillation atriale (ou un flutter atrial) ou une pathologiethromboembolique veineuse.

    Tableau 40-XIV Recommandations pour la gestion péri-opératoiredes agents antiplaquettaires, d’après [5, 38].

    Chez les patients recevant de l’aspirine pour la prévention secondaire despathologies cardiovasculaires et devant bénéficier de soins dentairesmineurs ou de chirurgie superficielle ou de chirurgie pour cataracte, il estrecommandé de continuer le traitement par aspirine

    Chez les patients recevant de l’aspirine pour la prévention secondaire età risque élevé ou modéré de complications postopératoires et devantbénéficier d’une chirurgie non cardiaque, il est recommandé de continuerle traitement par aspirine

    L’interruption du traitement par aspirine, 7-10 jours avant l’intervention,est recommandé chez les patients à faible risque de complicationscardiovasculaires postopératoires

    Chez les patients porteurs de s tents coronariens et recevant un traitementpar aspirine et clopidogrel et devant bénéficier d’une chirurgie non

    cardiaque, il est recommandé de reporter la chirurgie réglée pour unepériode de 6 semaines en cas de stent nu et de 6 mois en cas de stentpharmacologiquement actif 

    En cas de chirurgie qui doit avoir lieu pendant les 6 semaines (stents nus) ou6 mois (stents actifs), il est recommandé de continuer le traitement paraspirine et clopidogrel

    Tableau 40-XV Prise en charge pratique du traitement péri-opératoire par agents antiplaquettaires, d’après [5, 38].

    Traitement préopératoire Quoi faire Exception Comment gérer l’exception  

    Type de chirurgie

    Mineure Continuer AAP

    Majeure Prévention primaire avec aspirineou clopidogrel

    Arrêter aspirine ou clopidogrel5-7 jours avant l’interventionsans relais par HBPM ou HNF

    Prévention secondaire paraspirine ou clopidogrel

    Continuer aspirine ou clopidogrelNe pas prescrire de

    prophylaxie de la maladiethromboemboliquepostopératoire par HBPMou anticoagulants oraux

    En cas de chirurgie dans unespace fermé (neurochirurgie,chirurgie médulaire, chambrepostérieure de l’œil)

    Arrêter aspirine ou clopidogrel5-7 jours avant l’interventionprogrammée

    Réintroduction de l’aspirine oudu clopidogrel le lendemainde la chirurgie en l’absence decontre-indication

    Aspirine et clopidogrel chez lespatients à haut risque

    1. Reporter la chirurgie réglée jusqu’à ce que le traitementpar les deux agentsantiplaquettaires ne soit plusnécessaire

    2. En cas de chirurgie semi-urgente, continuer l’aspirineavec ou sans clopidogrelau cas par cas

    3. En cas de chirurgie urgente,continuer les deux agentsantiplaquettaires. Ne pasprescrire de prophylaxie dela maladie thromboemboliquepostopératoire par HBPMou anticoagulants oraux

    En cas de chirurgie dans unecavité fermée (neurochirurgie,chirurgie médulaire, chambrepostérieure de l’œil)

    Continuer l’aspirine et arrêterle clopidogrel 5 jours avantl’intervention programmée

    Considérer l’utilisation d’un AAPtype anti IIb/IIIa de courtedurée d’action

    Chez certains patients envisagerégalement l’arrêt de l’aspirine

    Réintroduire les deux AAP lelendemain de la chirurgie enl’absence de contre-indications

    AAP : agents antiplaquettaires ; HBPM : héparine de bas poids moléculaire ; HNF : héparine non fractionnée.

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    ANESTHÉSIE DU CARDIAQUE POUR CHIRURGIE NON CARDIAQUE 227

    Physiopathologie et histoire naturelledes valvulopathiesLa connaissance de la physiopathologie des valvulopathies, desmécanismes adaptatifs mis en jeu par l’anomalie valvulaire et deson histoire naturelle permet de définir la stratégie d’évaluation

     préopératoire, les objectifs thérapeutiques péri-opératoires pourassurer la stabilité hémodynamique ainsi que la mise en routed’un traitement adapté en cas d’anomalies hémodynamiques sur-

     venues en péri-opératoire. Ces éléments d’information sont résu-més dans le Tableau 40-XVI. Des éléments de physiopathologie,spécifiques à chaque type de valvulopathies, permettent d’affinerle raisonnement médical.

    RÉTRÉCISSEMENT AORTIQUE (RA)La surface valvulaire aortique normale est de 3-4 cm2. Un RAdevient hémodynamiquement significatif lorsque la surface val-

     vulaire aortique est < 

    1 cm2. Les RA sont classés en peu sévères(surface >  1,5  cm2), modérés (1  cm2 

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    228   ANESTHÉSIE

    CMO a comme conséquence une gène à l’éjection ventriculairegauche qui entraîne une hypertrophie ventriculaire et une dimi-nution de la compliance ventriculaire gauche. La CMO rend leVG sensible à l’hypovolémie et dépendant du remplissage auricu-laire et du rythme sinusal. Dans certaines situations, il existe undéplacement antérieur de la valve mitrale pendant la systole ven-triculaire ( systolic anterior motion ou SAM des Anglo-Saxons) qui

     peut entraîner une insuffisance mitrale et aggraver l’obstruction.Plusieurs facteurs comme l’hypovolémie, la tachycardie, les médi-caments inotropes positifs, l’anémie, la vasodilatation peuventaggraver l’obstruction intraventriculaire. La diminution chro-nique de la compliance ventriculaire a comme conséquence des

     pressions de remplissage ventriculaires élevées qui peuvent fausse-

    ment orienter le diagnostic vers une diminution de la contractilité,l’administration de médicaments inotropes positifs et l’aggrava-tion de la situation hémodynamique. Le diagnostic est fait parl’échographie qui permet d’objectiver l’obstruction intraventri-culaire, les anomalies de la cinétique de la valve mitrale (SAM)et l’hypovolémie éventuelle. Pour les patients avec une CMOdiagnostiquée en préopératoire, les objectifs pendant l’anesthésiesont similaires à ceux des patients ayant un RA. Dans une étuderétrospective sur des patients ayant une CMO et une chirurgienon cardiaque, les complications cardiovasculaires graves (décès,

    infarctus du myocarde, troubles du rythme menaçant le pronostic vital) étaient rares (1 IDM et un 1 trouble du rythme grave sur77

     

     patients) [35]. Néanmoins, 43 

    % des patients avaient fait unecomplication cardiovasculaire postopératoire (insuffisance car-diaque 16

     

    ; ischémie myocardique 12 

    ; troubles du rythmesans anomalies de la pression artérielle 25

     

    ; hypotension arté-rielle transitoire 14

     

    % [35]). L’incidence des complications péri-opératoires était plus importante en cas de chirurgie lourde, mais26

     

    % des patients ayant eu une chirurgie mineure avaient présentédes complications hémodynamiques péri-opératoires. Les carac-téristiques échographiques et l’ampleur de l’hypertrophie myo-cardique n’étaient pas statistiquement corrélées avec l’incidencedes complications hémodynamiques [35].

    RÉTRÉCISSEMENT MITRAL (RM)Le RM est le résultat de la diminution de la surface de l’orificemitral [29]. La surface mitrale normale chez l’adulte est de 4-6

     

    cm2.En dessous de 2-2,5

     

    cm2  (RM modéré), le flux transmitral estconservé par une augmentation modérée de la pression dans l’oreil-lette gauche (OG). Une surface mitrale >

     

    1,5 

    cm2  n’entraîne pasde symptômes au repos. L’histoire naturelle du RM est caractérisée

     par une longue période asymptomatique qui peut durer 20-40 

    ans.Après l’apparition des premiers symptômes, une période d’environ

    Tableau 40-XVI Physiopathologie des valvulopathies et objectifs hémodynamiques en péri-opératoire, d’après [29].

    Valvulopathie Adaptation  Conséquencesde l’adaptation 

    Histoire naturelle Facteurs hémodynamiques

    aggravantsObjectifs péri-opératoires 

    Rétrécissement aortique Hypertrophie VG Diminution dela compliance VG

    Augmentation de la MvO2Diminution de

    la perfusion coronaire

    Longtempsasymptomatique.

    Les manifestationscliniques (syncope)sont un signe degravité

    Hypotension artérielle(risque d’ischémiemyocardique)

    Perte du rythme sinusalTachycardie

    Maintien la préchargeventriculaire gauche,du rythme sinusal,de la pression deperfusion coronaire

    Prévenir l’augmentationde la MvO2 (FC et PAM)

    Rétrécissement mitral Augmentation de lapression dans l’OG

    En amont : dilatation,hypertension veineusepuis artériellepulmonaire postpuis précapillaire) ;insuffisanceventriculaire droite

    En aval : fibrose du VGet diminution de lacompliance

    Longtemps peusymptomatique

    Évolution rapide (en3 ans après apparitiondes premierssymptômes)

    Perte du rythmesinusal, tachycardie,hypovolémie

    Facteurs qui aggraventl’HTAP (hypoxémie,hypercapnie, acidose)

    Maintien du rythmesinusal et dela préchargeventriculaire gauche

    Correction rapide desfacteurs capablesd’aggraver l’HTAP

    Insuffisance mitrale Hypertrophie excentriquedu VG

    Augmentation de la taillede l’OG

    Diminution du gradientde pression entre VGet OG

    Maintien du VES

    Longtempsasymptomatique

    Hypertension artérielleFacteurs qui aggravent

    l’HTAP

    Diminution dela postcharge du VG

    Prévention et correctionrapide des facteurscapables d’aggraverl’HTAP

    Insuffisance aortique Dilatation du VGAugmentation de la

    compliance du VGHypertrophies

    excentrique etconcentrique (carsurcharge mixte envolume et en pression)

    Augmentation du volumetélédiastolique

    Maintien du VESvers l’aval par unéquilibre complexeentre maintien de laréserve de précharge,hypertrophie du VG etaugmentation de lapostcharge

    Longtempsasymptomatique

    Les signes cliniquesapparaissent lorsquela fonction systoliqueest altérée (FEVG

  • 8/20/2019 C2 Chap08 - LONGROIS

    13/79

    ANESTHÉSIE DU CARDIAQUE POUR CHIRURGIE NON CARDIAQUE 229

    10 

    ans s’écoule avant l’apparition des symptômes invalidants [29].Lorsque la surface mitrale est <

     

    cm2 (RM critique), le flux trans-mitral et le débit cardiaque au repos sont assurés par un gradientd’environ 20

     

    mmHg (ce qui correspond à une pression dans l’oreil-lette gauche de 25

     

    mmHg). Ceci retentit en amont (dilatation del’oreillette gauche, hypertension veineuse pulmonaire, hyperten-sion artérielle pulmonaire d’abord post- et ensuite précapillaire,

    distension puis insuffisance ventriculaire droite) et en aval (diminu-tion du remplissage ventriculaire gauche, fibrose, diminution de lacompliance). En cas d’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP)sévère (PAPS

     

    60 

    mmHg), la survie moyenne est inférieure à 3 

    ansen l’absence d’une correction chirurgicale du RM [29]. Tous lesfacteurs qui aggravent le gradient transmitral peuvent déstabiliserla cardiopathie en péri-opératoire.

    PROLAPSUS VALVULAIRE MITRAL (PVM)Le PVM est un syndrome défini par le prolapsus systolique d’uneou des deux valves mitrales dans l’oreillette gauche avec ou sansinsuffisance mitrale [29]. Il concerne entre 2 et 6

     

    % de la popu-lation et dans la majorité des cas il n’existe pas d’insuffisancemitrale. Néanmoins, le PMV est la première étiologie d’insuffi-

    sance mitrale dans les pays développés [29]. Les PVM primitifsseraient la conséquence d’anomalies du tissu conjonctif en rela-tion avec des anomalies de l’embryogenèse des lignées cellulairesmésodermiques [29]. Des anomalies similaires au PVM sontretrouvées sur les autres valves cardiaques. Une hyperactivitésympathique évaluée par des concentrations plasmatiques élevéesde noradrénaline et d’adrénaline a été rapportée chez les patientsayant un PVM. Les PVM secondaires peuvent être associés àdes cardiopathies ischémique, rhumatismale, hypertrophique,à des déformations thoraciques ( pectus excavatum). Les patientsayant une maladie de von Willebrand ont une incidence accruede PVM. En l’absence d’une insuffisance mitrale, le pronostic des

     patients ayant un PVM est bon avec une mortalité annuelle infé-rieure à 1 %. L’apparition de l’insuffisance mitrale peut s’accom-

     pagner d’une dilatation de l’OG et du VG, de l’apparition d’unehypertension artérielle pulmonaire.

    Le diagnostic de PVM doit être évoqué en présence d’un clicksystolique, éventuellement d’un souffle d’insuffisance mitrale, de

     palpitations, de douleurs thoraciques atypiques et d’antécédentsd’accidents ischémiques cérébraux. Le reste de l’examen cliniqueest habituellement normal, l’ECG de repos et la radiographie duthorax sont peu contributifs pour le diagnostic positif ou de gra-

     vité. L’échographie cardiaque couplée au Doppler est l’examen noninvasif de choix pour l’évaluation des patients ayant un PVM maisles critères diagnostiques échographiques restent contro versés [29].Une épaisseur des feuillets mitraux supérieure à 5 mm est un critèreéchographique de gravité associé à une augmentation de l’incidencedes complications cliniques (endocardite, embolie systémique,mort subite). L’existence d’une insuffisance mitrale, son retentisse-

    ment sur les cavités gauches et droites ainsi que les atteintes valvu-laires associées sont évalués par l’échographique cardiaque.

    Lorsqu’il existe une insuffisance mitrale, les patients ayantun PVM doivent être considérés comme des patients ayant une

     valvulopathie.Les patients ayant un PVM qui ont fait une complication embo-

    lique systémique ont souvent un traitement anticoagulant et anti-agrégant plaquettaire dont la gestion en période péri-opératoiredoit être réalisée en fonction du risque thrombotique/de saigne-ment excessif estimé (voir  Patients ayant une prothèse valvulaire).

    Les patients ayant seulement des critères échographiques de gra- vité reçoivent souvent de l’aspirine [29]. L’avis du cardiologue lorsde la consultation préanesthésique est souhaitable si le patient estsymptomatique, s’il a déjà fait des complications (embolie, endo-cardite) ou s’il a un traitement anticoagulant/anti-agrégant pla-quettaire. Le cardiologue doit informer le médecin anesthésistesur l’évolution de l’insuffisance mitrale, de son retentissement sur

    les cavités cardiaques. Les indications opératoires (chirurgie répa-ratrice mitrale) sont posées de plus en plus tôt dans l’évolutiondes PVM.

    INSUFFISANCE MITRALE (IM)Les principales étiologies des IM sont le PVM, les coronaro-

     pathies, les cardites rhumatismales, les anomalies du collagène etdepuis quelques années certains médicaments anorexigènes [29].L’incompétence valvulaire mitrale est responsable d’une fuite sys-tolique. En cas d’IM chronique, il existe une hypertrophie myo-cardique excentrique compensatrice ayant comme résultat unedilatation du VG qui permet le maintien du volume d’éjectionsystolique (VES). Le résultat de la fuite mitrale est une augmenta-tion de la pression et de la taille de l’OG. L’augmentation des dia-

    mètres des cavités gauches diminue le gradient de pression entrele VG et l’OG ainsi que la pression pulmonaire. La dilatation duVG est responsable d’un VES global augmenté et d’un VES versl’aval normal. À cette phase de l’évolution, la fraction d’éjectionVG (FE VG) est supranormale (>

     

    60 

    %). Ceci expliquerait le faitqu’au début de l’évolution de l’IM, la majorité des patients sontasymptomatiques, même à l’effort [29]. En l’absence de correc-tion de l’IM, la dilatation du VG s’aggrave, le volume télésysto-lique augmente, la pression intra-VG également. Il s’ensuit uneaugmentation des pressions dans l’OG et dans la circulation

     pulmonaire responsable de la dyspnée, initialement à l’effort, etla diminution de la FE VG. Les indications de correction chirur-gicale de l’IM sont posées actuellement avant l’apparition de ladyspnée et des autres signes cliniques (Tableau 40-XVII).

    Les IM chroniques, surtout a- ou pauci-symptomatiques, posent relativement peu de problèmes hémodynamiques en péri-opératoire. Les agents anesthésiques diminuent la précharge et la

     postcharge, le diamètre du VG et favorisent l’éjection dans le sensantérograde. Il faut éviter les épisodes d’hypertension artérielle carils peuvent augmenter la postcharge du VG, entraîner une dilata-tion du VG et aggraver l’IM. Il est important de comprendre quele diamètre de l’anneau mitral et l’importance de la fuite mitralesont des phénomènes dynamiques. En présence d’une HTAP,tous les facteurs capables de l’aggraver (hypercapnie, hypoxémie,acidose, augmentation excessive des pressions intrathoraciques)doivent être corrigés rapidement.

    Le suivi cardiologique régulier de patients ayant une IM (bilanscliniques et échographiques annuels) [29] permet au médecinanesthésiste d’estimer l’évolution de l’IM. L’apparition des symp-

    tômes et des signes d’HTAP à l’examen clinique, sur l’ECG derepos et la radiographie de thorax sont des signes indiquant uneévolution de l’IM. Un patient ayant une IM qui est symptoma-tique doit être adressé au cardiologue pour correction chirurgi-cale de la valvulopathie. La présence d’une FE VG <

     

    60 

    % doittoujours alerter le médecin anesthésiste car la diminution mêmemodérée (FE VG = 50

     

    % par exemple) signe une évolution del’IM et une altération des conditions de charge du VG. Pour les

     patients ayant une IM asymptomatique, l’échographie permet demettre en évidence une dilatation du VG. Pour ces patients, la

  • 8/20/2019 C2 Chap08 - LONGROIS

    14/79

    230   ANESTHÉSIE

    chirurgie non cardiaque pose relativement peu de problèmes et ladiscussion avec le cardiologue doit porter sur le stade évolutif del’IM, le traitement médical et l’indication de la correction chirur-gicale de l’IM par rapport à la chirurgie non cardiaque.

    La décision de reporter la chirurgie non cardiaque doit être prise patient par patient. L’étiologie de l’IM doit être recherchée.Chez les patients âgés, ayant des facteurs de risque d’athérome

    coronarien, l’association avec une coronaropathie à l’origine del’IM doit être suspectée et recherchée [29].

    INSUFFISANCE AORTIQUE (IA) CHRONIQUEL’IA chronique est le résultat d’une surcharge volémique du VG.Les mécanismes adaptateurs sont

     

    : 1) l’augmentation progressivedu volume télédiastolique ventriculaire gauche (VTDVG)

     

    ; 2) de lacompliance du VG ayant pour but de maintenir une PTDVG basse ;3) l’hypertrophie excentrique et concentrique [29]. L’histoire natu-relle de l’IA chronique est caractérisée par une progression lente etune longue période pendant laquelle les patients sont asymptoma-tiques. Le diagnostic, évoqué par le souffle diastolique et les signescliniques habituels est confirmé par l’échographie qui permetd’explorer l’étiologie, les critères de gravité (équilibration rapide

    entre les pressions diastolique aortique et ventriculaire gauche donttémoignent un temps de décélération mitrale < 

    150 

    ms et la ferme-ture prématurée de la valve mitrale). L’échographie évalue aussi leretentissement de l’IA sur le diamètre du VG, sur les cavités droitesainsi que l’apparition d’une dysfonction systolique du VG (caracté-risée par une FE VG

     

    60 

    % au repos). La survie des patients ayantune IA diminue lorsque le VG est dilaté (DTDVG

     

    75 

    mm etDTSVG > 55  mm) et lorsqu’il existe une dysfonction systolique(FE VG

     

    45 

    %). Tous ces signes échographiques surviennentavant les signes cliniques et l’indication de correction chirurgicalede la valvulopathie est posée sur les critères échographiques [29]. Lerisque de complications péri-opératoires (chirurgie non cardiaque)des patients ayant une IA pour laquelle il n’existe pas d’indicationde correction chirurgicale n’est pas connu. La survenue d’une isché-mie myocardique fonctionnelle en relation avec une diminution

    de la pression artérielle diastolique redoutée est une complicationclassique.

    Évaluation préopératoire des patientsayant une valvulopathieL’évaluation préopératoire, fondée sur l’interrogatoire, l’examenclinique et des examens complémentaires (surtout l’échocar-diographie) doit documenter le diagnostic positif de valvulopa-thie et estimer sa gravité compte tenu de son histoire naturelle.À partir de l’auscultation cardiaque, c’est surtout les soufflesdiastoliques, holosystoliques ou les souffles associés à des signescliniques évocateurs de valvulopathie qui doivent attirer l’atten-tion en consultation préanesthésique [29]. À l’opposé, les soufflesmésosystoliques chez des patients asymptomatiques, non modi-

    fiés par la manœuvre de Valsalva sont moins évocateurs de valvu-lopathie [29]. Le diagnostic positif de valvulopathie est fait parl’échocardiographie [29] qui permet aussi d’établir le diagnosticétiologique, le retentissement de la valvulopathie sur les cavitéscardiaques, diamètres ventriculaires gauches, la présence d’uneHTAP avec retentissement sur la fonction ventriculaire droite,l’évaluation de la fonction systolique et diastolique du ventri-cule gauche. Seront recherchés les modifications récentes de lasymptomatologie, la présence de signes cliniques d’insuffisancecardiaque, (turgescence jugulaire, hépatomégalie, œdèmes des

    Tableau 40-XVII Principales indications de chirurgie valvulaire,d’après [29].

    Pour le rétrécissement mitral, le traitement de première intention est lavalvulotomie percutanée dont les indications sont : 1) la présence de symtômes(NYHA II-IV) et d’un RM modéré (gradient moyen 5-10

     

    mmHg, pressionartérielle pulmonaire systolique entre 30-50 mmHg, surface mitrale 1-1,5 cm2)à sévère (gradient moyen >

     

    10 

    mmHg, pression artérielle pulmonaire systolique

    50 

    mmHg, surface mitrale < 

    cm2 ) et une morphologie de la valve propiceainsi que l’absence de thrombus dans l’oreillette ou d’insuffisance mitralemodérée à sévère ; 2) une valvulotomie est également indiquée chez les patientsasymptomatiques avec PAPS de repos > 50 mmHg ou d’effort > 60 mmHg ;3) une valvulotomie est indiquée chez les patients ayant des symptômessévères (NYHA III ou IV) et pour lesquels le risque chirurgical est considérécomme trop élevé, même en présence d’une valve calcifiée. Les indicationschirurgicales (réparation ou remplacement valvulaire) sont : la présenced’une symptomatologie sévère (NYHA III-IV) en présence d’un rétrécissementmodéré ou sévère lorsqu’une valvulotomie par ballonnet n’est pas disponibleou est contre-indiquée à cause de la présence d’un thrombus atrial malgré untraitement anticoagulant ou à cause de la présence d’une insuffisance mitraleou lorsque l’anatomie de la valve mitrale n’est pas propice à une dilatation ; lespatients en classe NYHA I ayant une surface valvulaire > 1,5 cm2 mais ayant faitdes épisodes d’embolie systémique malgré une anticoagulation adéquate.

    Pour l’insuffisance mitrale, les indications chirurgicales (la réparation estpréférée au remplacement valvulaire) sont : 1) les patients symptomatiques(NYHA grades II-IV) ayant une insuffisance mitrale sevère (volume régurgitant> 60 mL par battement ou fraction régurgitante > 50 %) en l’absence d’unealtération sévère de la FEVG ( 55 mm ; 2) les patientsasymptomatiques ayant une insuffisance mitrale sévère altération modérée dela fonction ventriculaire gauche (30

     

    % < FEVG < 60 

    % et un DTSVG > 

    40 

    mm),les patients asymptomatiques ayant une fibrillation atriale et une fonctionVG préservée, les patients asymptomatiques ayant une fonction VG préservéeet une pression artérielle pulmonaire systolique (PAPS > 50 au repos et >60 mmHg à l’effort). Actuellement, les indications sont élargies aux patientsayant des insuffisances mitrales peu symptomatiques lorsqu’une chirurgie deréparation est possible. Les indications sont également élargies aux patientssymptomatiques (NYHA III ou IV) ayant une insuffisance mitrale sévère et unealtération sévère de la fonction systolique ventriculaire gauche (FEVG < 30 %).

    Pour le rétrécissement aortique, les indications chirurgicales concernent :1) les patients symptomatiques quelle que soit la gravité du rétrécissement ;2) les asymptomatiques ayant un rétrécissement sévère (surface de l’orifice

    aortique est < 

    à 0,6 

    cm2/m2 de surface corporelle ou 1 

    cm2 ; gradient moyen>

     

    40 

    mmHg ; vélocité du jet > 4 

    m/s) ; 3) les patients asymptomatiques ayantune altération de la fonction systolique du ventricule gauche, une réponseanormale à l’effort (hypotension artérielle), une hypertrophie ventriculairegauche (> 15 mm). Le remplacement valvulaire aortique est égalementrecommandé chez les patients ayant un rétrécissement aortique sévèreet devant bénéficier d’une chirurgie de revascularisation myocardique oud’une autre chirurgie valvulaire. Pour les patients dont le risque opératoiredu remplacement valvulaire aortique est considéré comme trop important(mortalité prédite par l’EuroSCORE > 20 %), la mise en place d’une valveaortique percutanée (transcatheter aortic valve implantation ) est une optionthérapeutique à envisager. Enfin, une dilatation de la valve aortique, chez lespatients hémodynamiquement instables ou en cas de chirurgie non cardiaqueurgente, peut être envisagée.

    Pour l’insuffisance aortique isolée, les indications chirurgicales concernent lespatients symptomatiques avec insuffisance considérée comme sévère (volume

    de régurgitation > 

    60 

    mL par battement ou fraction de régurgitation > 

    50 

    %)quelle que soit leur fonction s ystolique VG (préservée soit FEVG au repos> 50 % ou altérée soit FEVG au repos  75 mm ou un DTSVG > 55 mm ; les patientsasymptomatiques ayant une FEVG normale au repos, un DTDVG > 70 mm ouun DTSVG > 50 mm mais avec une réponse anormale à l’exercice physique ouen présence d’une dilatation rapide du VG.

    DTDVG : diamètre télédiastolique ventriculaire gauche ; DTSVG : diamètre télésystoliqueventriculaire gauche ; FEVG : fraction d’éjection ventriculaire gauche ; IA : insuffisanceaortique ; IM : insuffisance mitrale ; NYHA : New York heart association  ; PAPS: pressionartérielle pulmonaire systolique ; RA : rétrécissement aortique ; RM : rétrécissement mitral.

  • 8/20/2019 C2 Chap08 - LONGROIS

    15/79

    ANESTHÉSIE DU CARDIAQUE POUR CHIRURGIE NON CARDIAQUE 231

    membres inférieurs, œdème aigu du poumon), les médicamentset les doses nécessaires pour stabiliser la symptomatologie. Lesrecommandations concernant les doses moyennes et maximalesde diurétiques, d’inhibiteurs de l’enzyme de conversion, de dérivésnitrés et de digitaliques ont été publiées [29]. L’analyse des dosesde médicaments et de la symptomatologie permet d’apprécier s’ilest possible d’optimiser la fonction cardiaque par un traitement

    médical. Il est important de documenter le retentissement rénalet métabolique (baisse de la clairance de la créatinine, hyponatré-mie, hypokaliémie, hypomagnésémie) de la valvulopathie et deson traitement, les pathologies associées (hypertension artérielle,diabète, bronchopathie chronique obstructive, etc.), la présencede troubles du rythme chroniques (fibrillation atriale), ainsi quel’association avec une atteinte coronarienne qui peut concerner

     jusqu’à 10 

    % des patients ayant une valvulopathie [29].La symptomatologie doit être interprétée en fonction de l’acti-

     vité physique des patients. L’évaluation de l’activité physique peutfaire appel soit à la classification de la  New York heart association, soit à des critères plus quantitatifs comme le score de Duke (voir  Tableau 40-VII).

    À la fin de l’évaluation préopératoire, le médecin anesthé-

    siste-réanimateur peut classer le patient en une catégorie à risque(Tableau 40-XVIII). L’intervention chirurgicale et l’acte anes-thésique doivent être reportés si le patient a un souffle cardiaqueorganique (voir  les critères décrits plus haut) et n’a pas bénéficiéd’un bilan diagnostique du souffle ou lorsque la valvulopathiedéjà documentée n’a pas bénéficié du suivi adéquat (bilan cardio-logique datant de plus de 4-12  mois selon le type et la gravité dela valvulopathie) [29]. Cette attitude semble d’autant plus licitequ’il s’agit d’un souffle compatible avec le diagnostic de rétrécisse-ment aortique (a fortiori s’il est sévère et symptomatique) à causedu risque accru d’instabilité hémodynamique péri-opératoire. Sil’intervention est reportée et le patient adressé au cardiologue

     pour complément de bilan, celui-ci doit répondre aux questionsconcernant l’éventuel recours à une correction chirurgicale de la

     valvulopathie ainsi que le traitement médical optimum.Il est également licite de reporter l’intervention chirurgicale etl’anesthésie pour les patients pour lesquels le médecin anesthésistesuspecte que la valvulopathie a atteint le stade des indications decorrection chirurgicale. Les indications chirurgicales cardiaques communément admises pour les patients ayant des valvulopathiessont présentées dans le Tableau 40-XVII. Néanmoins, les indi-cations chirurgicales actuelles sont complexes et l’anesthésiste nedoit pas hésiter à demander l’avis des cardiologues avant de repor-ter la chirurgie non cardiaque. Ainsi, pour l’insuffisance aortiqueou mitrale, les indications de correction chirurgicale sont actuel-lement posées sur l’évolution échographique, avant l’apparitiondes symptômes et avant l’altération des fonctions ventriculaires

     pouvant poser un problème en péri-opératoire. Dans cette situa-tion, un patient peu- ou asymptomatique peut avoir une insuffi-

    sance valvulaire importante, une dilatation modérée des cavités ventriculaires gauches et une indication de correction chirurgi-cale de la valvulopathie. Ce type de patient possède néanmoinsune réserve fonctionnelle cardiaque qui pourrait lui permettre de

     passer le cap d’une chirurgie non cardiaque.En pratique, lors de la consultation d’anesthésie, il est impor-

    tant, à partir de l’examen clinique, de détecter les patients ayantune valvulopathie, de reporter l’intervention des patients pourlesquels la valvulopathie est suffisamment sévère pour béné-ficier d’une correction chirurgicale, d’optimiser le traitement

    des patients qui ont des signes d’insuffisance cardiaque systo-lique ou diastolique. Lorsque la valvulopathie n’est pas suffi-samment sévère pour nécessiter une correction chirurgicale, la

     prise en charge péri-opératoire est fondée sur un raisonnement physiopathologique.

    Prophylaxie de l’endocardite bactérienneLes indications d’antibioprophylaxie ont fait l’objet de recom-mandations récentes qui ont considérablement restreint les situa-tions où une prophylaxie est nécessaire (Tableau 40-XIX). Les

     protocoles d’antibioprophylaxie recommandés sont présentésdans le Tableau 40-XX.

    Prise en charge des patients ayant une prothèsevalvulaireCes patients ont un suivi cardiologique régulier [29]. La prise encharge péri-opératoire de ces patients est centrée sur la prophy-laxie de l’endocardite [29, 36] (voir  Tableaux 40-XIX et 40-XX)et la gestion du traitement anticoagulant dans la période péri-opératoire. L’évaluation préopératoire doit permettre d’estimerla capacité à l’effort du patient, de rechercher d’éventuels signesd’insuffisance cardiaque ainsi que les éventuelles complicationsliées au traitement. Tous les patients ayant une prothèse méca-nique ont un traitement anticoagulant oral [37]. Les patientsayant des bioprothèses reçoivent un traitement anticoagulant

     pendant les trois premiers mois qui suivent le remplacement val- vulaire et éventuellement par la suite en cas d’indications liées àla cardiopathie sous-jacente (dilatation de l’oreillette, fibrillationatriale, antécédents d’embolies systémiques).

    GESTION PÉRI-OPÉRATOIRE DU TRAITEMENT ANTICOAGULANT

    CHRONIQUEL’anticoagulation au long cours des patients ayant une prothèse

     valvulaire est codifiée [37]. La gestion de l’anticoagulation en période péri-opératoire a fait l’objet de recommandations en 2012[38]. Le traitement par antivitamines K (AVK) ou par anticoagu-lants oraux directs (AOD) comme le dabigatran, le rivaroxabanou l’apixaban dans la fibrillation atriale peut être interrompuchez les patients ayant un faible risque de complications throm-boemboliques péri-opératoire. Chez les patients ayant un risquethromboembolique élevé, le traitement par AVK ou AOD doit

    Tableau 40-XVIII Risque de complications cardiovasculaires péri-opératoires en fonction des valvulopathies et de leur gravité, d’après[6, 7].

    Risque élevé (> 5 % de morbidité et mortalité) :– insuffisance cardiaque congestive décompensée ;– valvulopathie sévère (rétrécissement aortique de surface < 0,75 cm2,

    rétrécissement mitral de surface < 1 cm2, insuffisance mitrale et

    insuffisance aortique > 3/4), a fortiori en cas de symptomatologieclinique et/ou d’hypertension artérielle pulmonaire.

    Risque modéré (< 5 % de morbidité et mortalité) :– antécédents de décompensation cardiaque mais fonction cardiaque

    stabilisée au moment de l’intervention ;– valvulopathies moins sévères que celles évoquées plus haut.

    Risque faible :– valvulopathie sans retentissement sur les cavités cardiaques (par

    exemple : insuffisance mitrale ou insuffisance aortique de grade I).

  • 8/20/2019 C2 Chap08 - LONGROIS

    16/79

    232   ANESTHÉSIE

    être relayé. Le relais est défini par la prescription d’anticoagulantsen intraveineux ou en sous-cutané, pour une période de plusieurs

     jours pendant la période d’interruption d’AVK pendant laquellela valeur d’INR (international normalised ratio) n’est pas dans leslimites thérapeutiques. Le relais est réalisé par un traitement anti-coagulant en intraveineux (héparine non fractionnée avec commeobjectif thérapeutique un temps de céphaline avec activateurde 1,5-2 fois les valeurs témoin ou une concentration de 0,3

     

    UIanti-Xa) ou en sous-cutané par héparine de bas poids moléculaire(par exemple énoxaparine 1

     

    mg  

    kg –1 deux fois par jour). L’arrêtde l’héparine non fractionnée doit être fait 4-6

     

    heures avant

    l’intervention 

    ; la dernière injection d’héparine de bas poids molé-culaire doit être réalisée 24

     

    heures avant l’interv