biom' #2, automne-hiver 2014

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DOSSIER Rebondir après une crise : qu'apprendre des écosystèmes ? BIOM' N°2 | AUTOMNE-HIVER 2014 | REVUE DE L ASSOCIATION BIOMIMICRY EUROPA

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La revue bi-annuelle de l'association Biomimicry Europa se propose d'explorer diverses problématiques liées au biomimétisme par des interviews et des dossiers thématiques. Ce nouveau numéro de Biom' a pour thématique "Rebondir après une crise, qu'apprendre des écosystèmes ?".

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Dossier

Rebondir après

une crise :

qu'apprendre des

écosystèmes ?

BIOM'n°2 | automne-hiver 2014 | revue de l’association biomimicry europa

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Biomimicry Europa est une association à but non lucratif née en 2006 à Bruxelles et qui se consacre à la promotion du biomimétisme. Devant l’intérêt croissant de nombreux acteurs en France, le Comité Français

de Biomimicry Europa est créé en 2010 à Paris (association Loi 1901) en vue de promouvoir le biomimétisme en France.

Biomimicry Europa rassemble des profils d’une grande diversité allant des biologistes aux designers et artistes en passant par les métiers

de l’ingénieur, de la gestion des entreprises ou des collectivités locales. Tous partagent une même conviction : l’observation des systèmes vivants peut être source d’inspiration pour accélérer les innovations, nous mettant

en marche vers une humanité réconciliée avec le vivant et les grands cycles bio-géochimiques de notre planète.

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SOMMAIrE

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Du côté de l'association

Edito

DOSSIER : rebondir après une crise : qu'apprendre des écosystèmes ?

La chronique arbres sauveurs

La bibliothèque idéale

In Fine

Biomiméticiens de demain

Le veilleur

Notre second dossier, mené par Tarik Chekchak, est consacré au concept de résilience, cette capacité du vivant à récupérer un fonctionnement normal après avoir subi une perturbation, et comment s'en inspirer pour l'appliquer à notre société contemporaine.

Une chronique de Daniel Rodary sur le projet Arbres Sauveurs, notre programme humanitaire en Haïti.

A chaque numéro, l'association présente un livre de ce qui pourrait constituer la bibliothèque idéale de Biomimicry Europa. Dans ce numéro, une chronique de Amandine de Schaetzen sur Vive la Co-révolution ! de Anne-Sophie Novel et Stéphane Riot.

Pour ce numéro sur la résilience, l'artiste américain Dan McCarthy nous a aimablement autorisé à reproduire l'une de ces très belles sérigraphies.

Un focus sur des travaux d’étudiants en lien avec le biomimétisme. Dans ce numéro, Kenza Benkirane nous présente son projet d'architecture régénérative au coeur d'un oasis, ou comment lutter contre la désertification par une approche écosystémique.

Olivier Allard nous présente en quelques brèves l’actualité du biomimétisme à travers le monde.

Des nouvelles de l’association

28 Second regardUne nouvelle rubrique, qui se propose d'apporter un regard critique sur un projet bio-inspiré existant. Dans ce numéro, Michka Mélo nous livre ses réflexions sur la moquette modulaire Entropy, de Interface Inc.

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EditoEmmanuel Delannoy

Quel enfant n’a pas été émerveillé par la capacité qu’ont les poissons d’accélérer de manière fulgurante, puis de faire demi-tour quasi instantanément ? Quel enfant n’est pas resté admiratif devant les voltiges des libellules ? Qui n’est pas resté captivé, parfois des heures durant, devant une colonie de fourmis, s’étonnant de leur organisation à la fois complexe et fluide ? Lequel d’entre nous n’a pas été saisi par le calme apaisant d’une forêt, où la douce lueur du sous-bois s’harmonise avec les sons diffus du vent et des cris étouffés des animaux lointains ? Devenus plus grands, certains des enfants que nous étions se dotent d’outils pour voir l’infiniment petit, et s’étonnent alors de l’incroyable plasticité de la cellule vivante, des capacités d’adaptation des bactéries, ou encore de la complexité des réseaux sous-terrain de ces forêts ou nous allions chercher repos et sérénité. Ces réseaux complexes, sièges d’interactions et de coopération

entre des myriades d’organismes différents, confèrent aux écosystèmes ce qui nous fait peut-être aujourd’hui le plus défaut : résilience et capacité d’adaptation aux changement imprévus. Pour nous qui restons, sauf à faire appel à des artifices technologiques, désespérément lents, maladroits, rivés au sol, avec une acuité visuelle, sonore et surtout olfactive très limitée, il y aurait, à contempler les prouesses des organismes vivants les plus divers, des champignons filamenteux aux oiseaux migrateurs, de quoi concevoir quelque amertume d’avoir été ainsi façonnés par les caprices de l’évolution. Fort heureusement nous sommes doté d’une grande capacité d’observation et d’émerveillement, qui caractérise en particulier ceux d’entre nous qui n’ont pas oublié qu’ils ont un jour été enfants. Ne nous privons donc pas, comme nous y invite la revue Biom’, de mobiliser ces talents qui nous permettent d’apprendre de la nature.

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Du côté de l’association

Faire passer le mot du biomimétismeRencontre Mycélium et nouveau partenariat

Les membres de Biomimicry Europa ont ensuite enchaîné plusieurs interventions à propos du Biomimétisme. Tarik intervient tout d’abord le 11 février 2014, dans le cadre de la LAB Session de l’Institut des Futurs souhaitables. Il a ensuite animé un stage d’initiation au biomimétisme et à la cohérence avec le vivant à l’Ecocentre du Bouchot (Sologne) le 22-23 février 2014. Il a également participé à la rencontre « Le Biomimétisme au service de la Nature », à l’occasion des Mardis de l’Environnement de l’Institut océanographique Paul Ricard et la Société Européenne des Réalisateurs de l’Environnement du 4 mars 2014 et à la conférence « Le Biomimétisme vous donne rendez-vous avec l’avenir » du 13 mars 2014. Il s’est ensuite adressé aux étudiants de l’école des Mines de Nancy lors d’une conférence TedX ayant eu lieu en mai. Avec Kalina, il intervient aussi le 3 juin à la conférence “Le biomimétisme, comment la nature nous aide à innover.” à l’école Polytechnique.Le 10 et 11 juin, Gauthier Chapelle s’est s’adressé au public du colloque intitulé « Modélisation, construction et imitation des processus vitaux. Approche pluridisciplinaire du biomimétisme » au Collège de France.Pour finir, Kalina a participé à l’évènement «Vive l’économie circulaire » à La Bellevilloise, le 28 et 29 juin.

Quatre nouvelles rencontres Mycélium ont eu lieu au cours de ces derniers mois. Caroline Zaoui a été accueillie pour la Rencontre Mycélium « Affreuses bestioles ! » du 15 janvier 2014, où elle avait pour objectif de nous convaincre que les bactéries sont peut être plus que « d’affreuses bestioles » et s’avèrent même indispensables pour l’être humain. Cette rencontre marque aussi le début d’un partenariat avec le Moulin à Café, un café associatif fondé en 2006 par les habitants du 14e arrondissement de Paris qui souhaitaient faire vivre au cœur de leur quartier un lieu d’échange, de partage et de solidarité. Merci à eux de leur accueil ! La quatrième rencontre a eu lieu le 19 mars 2014 autour du sujet du projet Arbres Sauveurs de l’association avec pour intervenant Daniel Rodary. Dans le cadre de la cinquième rencontre (25 juin), Stéphane Riot et David Meyers ont proposé une discussion au sujet du vivant comme source d’inspiration pour inspirer les nouveaux modèles de business et d’organisation. Enfin, le 24 septembre, Tarik Chekchak est intervenu sur la capacité de la nature à resister aux crises, thème qui fait directement écho à son article pour le dossier du présent numéro de Biom'.

L’hiver et le printemps n’ont pas été de tout repos pour les membres de Biomimicry Europa. Voici un petit aperçu de l’activité de l’association au cours de ces derniers mois.

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Interventions fin 2013 Biomimétisme et politiques

Formation au CEEBIOS

Arbres Sauveurs

Nous avons collaboré à la Fête de la Science de Senlis à travers une exposition en co-production et une dédicace de Gauthier Chapelle suivie d’une conférence. Gauthier Chapelle intervenait également (avec Kalina Raskin) à la SDDX (Semaine du Développement Durable de l'école Polytechnique) le 10 octobre, avant d'animer un atelier aux Entretiens de Sologne, événement auquel participait Tarik Chekchak en tant qu'intervenant à une table ronde. De son côté, Michka Mélo intervenait lors des Rencontres CNRS Jeunes à Poitiers les 18 et 19 octobre. Enfin, les fondateurs de la méthode BioTRIZ (clés de résolution d’un problème en s’inspirant du vivant) ont animé un atelier le 28 octobre au CFI à Paris, en partenariat avec Biomimicry Europa.

Que ce soit la Commission Européenne, le CESE ou le Ministère du développement durable, il semble que le Biomimétisme fait parler de lui au niveau des décideurs politiques !- Ministère du développement durable Dans sa Stratégie Nationale pour la Transition écologique 2014-2020, le Ministère du développement durable à cité le biomimétisme comme argument en faveur de la préservation de la biodiversité, mais aussi comme levier du renouveau de la politique industrielle et agricole économe en ressources. Biomimicry Europa a répondu à la consultation, aux côtés du CEEBIOS et du Centre Francilien de l’Innovation.- CESE Le Conseil Economique, Social et Environnemental va lancer une saisine interne sur le biomimétisme fin 2014.- Commission EuropéenneKalina a récemment été nommée experte pour la Commission européenne dans le cadre du groupe de travail Horizon 2020 "Nature based solutions for environmental transition".

Une session de formation professionnelle en Biomimétisme au CEEBIOS a eu lieu du 20 mai au 20 juin 2014 et la prochaine verra le jour au premier semestre 2015. L’ordre du jour y est la découverte du potentiel et la mise en oeuvre de l'approche dans des domaines aussi variés que le design, l'architecture, la chimie ou encore l'agriculture.

Daniel Rodary a présenté le programme de reforestation Arbres Sauveurs, le 4 décembre 2013 dans le cadre des Rencontres de l’Innovation Citoyenne, évènement annuel organisé par l’Association ICDD Innovation Citoyenne et Développement Durable afin de « promouvoir l’initiative et la créativité dont font preuve les pionniers d’une nouvelle économie. » Le projet Arbres Sauveurs fût également le sujet de la rencontre Mycélium du 19 mars 2014.

Pour vérifier régulièrement les actualités liées à l'association et au biomimétisme, ou consulter l'agenda de nos événements, n'hésitez pas à vous rendre sur :www.facebook.com/comitefrancais.biomimicryeuropa

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En fin janvier 2014, je suis parti sur une mission en Haïti accompagné de Jean Philippe Beau-Douëzy, auditeur terrain pour la Fondation Yves Rocher. La mission a été très intense, avec le besoin d'un aperçu global du programme pour l'auditeur, en 10 jours vols compris... nous avons donc passé l'essentiel de notre temps en trajets sur des pistes taillées dans la roche vive, sillonnant Haïti du nord au sud en passant par le plateau central. Là, des partenariats avec trois organisations paysannes nous donnent maintenant « accès » à environs 3000 paysans membres ! Nous avons visité une de leurs pépinières et avons été impressionnés par notre rencontre avec quatre agronomes-bénévoles (depuis 3 ou 5 ans !), avec une force de caractère et une conviction chevillées au corps...

Bonne nouvelle, nous « perdons » le contrôle ! Ils ont entendu parler du programme par notre coordinateur terrain de l'association partenaire Article29, lui ont demandé des plants, et seront formés par lui lors des prochaines sessions de distribution de plants. Dans tout ça notre rôle se bornera à financer l’importation des graines, encore nécessaire, et l’approbation du processus... pour le reste c'est « de Haïtien à Haïtien » ! Il ne reste plus qu'à produire des graines de Noyer

Depuis 2011, Biomimicry Europa coordonne un programme de reforestation en Haïti et en Inde, qui totalise maintenant près de 80 000 arbres plantés. Le Programme est soutenu par la société Jean Hervé, la Fondation Yves rocher, la Fondation Lemarchand et la société Bio-Ingrédients pour Haïti, et par le bureau de conseil Inddigo pour l'Inde. Le Laboratoire de Bio-Géosciences de l'Université de Lausanne, dirigé par le professeur Verrecchia, est notre partenaire scientifique, après avoir collaboré avec le bureau d'études Greenloop au projet européen CO2SolStock, qui a inspiré le programme haïtien.Retrouvez cette chronique dans chaque numéro de Biom', et pour des nouvelles plus fréquentes visitez le blog http://arbressauveurs.wordpress.com

Maya « made in Haïti » et la boucle sera fermée, et commencera à tourner d'elle-même pour Haïti. Globalement l'audit a révélé des approximations et des manques inhérents à un « jeune » programme et aux difficultés exceptionnelles de développement en Haïti, mais a rendu hommage à notre travail de terrain, et au dévouement des personnes impliquées sur place, en concluant qu'il recommandait de poursuivre le financement.

Autre rencontre clé, celle avec Fednard Duquesne, entrepreneur social Haïtien qui a lancé la production d'un réchaud à charbon économe, produit en Haïti. Là où la plupart des ONG produisent des réchauds coûtant de 30 à 60$, lui a placé la barre très haut, ou plutôt très bas, car son réchaud coûte 8$ et peut permettre d'économiser jusqu'à 50% du charbon utilisé pour la cuisine. C'est un prix réellement à la portée des ménages haïtiens même les plus modestes, comme le prouvent ses chiffres de 30 000 réchauds distribués en 3 ans. Il assure de plus une garantie portée par un réseau de distributeurs agréés parmi les petits épicier de village, offre à ses employés un repas par jour sur place, et met en place une forme d'assurance maladie, toutes choses qui en font un pionnier sur la scène haïtienne.

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La chroniqueArbres SauveursDaniel rodary

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En rapport direct, Chloé Lequette et Guillian Graves, deux jeunes designers membres actifs de Biomimicry Europa, aidés de l'ingénieur Pierre Hauteville, ont repris le projet de réchaud à biochar qui était intégré au programme Arbres Sauveurs, et ont mis toutes leurs capacités à son service, produisant rapidement plusieurs hypothèse de travail, pour les confronter à mes apports sur la réalité haïtienne, et affinant à chaque étape les modèles vers lesquels ils se dirigent. Ils sont maintenant en rapport avec Duquesne, et intègrent dans leurs hypothèses les possibilités offertes par sa petite unité de production, avec les machines outils et compétences qu'il nous a communiquées. En conclusion le programme poursuit son intégration à la réalité haïtienne, et devient de moins en moins

« le programme de Biomimicry Europa », ce qui nous paraît une excellente nouvelle ! Nous allons essayer d'accompagner ce mouvement en répondant mieux aux demandes des participants, avec plusieurs autres espèces d'arbres distribués, plus de travail vers l'agroforesterie, plus de partenariats avec des groupes autonomes.

Par ailleurs, un article paru en mai 2014 dans National Geographic France a produit plusieurs retombées médiatiques mais surtout de collaborations possibles, avec des interlocuteurs au Québec ou en Guyane, et cela aussi, se faisant naturellement sans démarche spécifique de notre part, nous encourage pour la suite. ●

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Les arbres grandissent à Anse-à-Pitre : Daniel (1m80) à côté d’un Chokogou

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Il y a tout juste 100 ans, le 28 juin 1914 à Sarajevo un nationaliste Serbe du nom de Gavrilo Princip tire deux coups de feux sur la voiture de l’archiduc François-Ferdinand, héritier de l’Empire Austro-Hongrois, et de son épouse la duchesse de Holenberg. Cet événement aux motivations politiques locales et loin des préoccupations de la France de l’époque fût l’élément déclencheur de la première guerre mondiale qui mit notre pays, et tout le reste de l’Europe, à feu et à sang conduisant des millions de personnes à la mort. En 1918 à la fin de la guerre, les empires Austro-Hongrois, Russe, Allemand et Ottoman s'effondrent et les germes de la seconde guerre mondiale sont semés...

Le 6 août 1980, Allen, l’un des plus puissants ouragans jamais observés frappe les Caraïbes provoquant 2.6 milliards de dollars de dommages et de nombreuses victimes avec des vents terrifiants atteignant les 305 km/h. Sur son chemin, l’île de la Jamaïque. Très peuplée, ses récifs de coraux étaient néanmoins dans un bon état écologique jusque dans les années 1970. Puis l’urbanisation et une augmentation d’un tiers supplémentaire de la population ont conduit à une

surpêche des récifs et à une pollution plus importante venant de la côte. Année après année, la pêche préleva aussi bien les espèces prédatrices les plus recherchées que les poissons brouteurs d’algues. Cette « guilde » au rôle écologique important fut remplacée peu à peu par des oursins, également brouteurs, qui profitèrent de la baisse de la compétition avec les poissons. Telle était la situation des coraux de l’île lorsque Allen frappa. Ce fut extrêmement violent pour les hommes comme pour la Nature : les récifs de surface furent complètement dévastés, mais les scientifiques remarquèrent avec surprise que ceux plus profonds résistèrent remarquablement bien, permettant même aux récifs de se reconstituer pendant les 3 années qui suivirent. Une belle illustration de leur capacité de résilience. Mais en 1983, un événement inattendu survint : un pathogène décima sévèrement et très rapidement les populations d’oursins ! Souvenez vous, depuis la baisse des poissons brouteurs, ce sont les oursins qui broutent les algues, maintenant leur présence à un niveau compatible avec l’existence d’un récif de corail. En l’absence d’oursins, très rapidement les algues recouvrirent 92% de la surface des récifs, étouffant ces écosystèmes en l’espace de quelques semaines. Avec la perte des récifs, les derniers poissons

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Dossier thématique

Rebondir après une criseQu’apprendre des écosystèmes ?Depuis 3,8 milliards d'années, la vie sur notre planète a connu de nombreuses crises plus ou moins intenses ou violentes. Certaines espèces ont complétement disparu, d'autres ont su s'adapter... Quoi qu'il arrive, le Vivant trouve toujours un moyen de rebondir après une crise. Comment ? Et quelles leçons en tirer ? C'est à ces questions que va tenter de répondre ce nouveau dossier de Biom'.

Dossier réalisé par Tarik Chekchak

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de récifs disparurent et l’écosystème si divers et si productif de récif corallien, qui prévalait en Jamaïque depuis des temps immémoriaux, fut remplacé par des algues illustrant ce que l’on appelle en écologie un « effet en cascade » conduisant à un effondrement. Sur un récif en pleine santé, un pathogène détruisant une seule espèce n’aurait pu avoir de telles conséquences, mais sur les récifs fragilisés de la Jamaïque, ce petit événement écologique fut suffisant pour faire disparaître en quelques semaines la majorité des récifs.

Ces deux exemples illustrent les concepts au cœur de la compréhension de n’importe quel système complexe, qu’il soit écologique, politique, social ou économique. Le principal étant celui de Résilience, définit par le réseau de chercheurs « Resilience Alliance » comme : « la capacité d'absorber une perturbation et de se réorganiser dans le changement tout en conservant essentiellement les mêmes fonctions, la même structure et les mêmes boucles de rétroaction, et donc la même identité. » De la notion de résilience découle la notion de seuil et de bassin d’attraction, champ des possibles de tout système complexe. Il s’agit d’une représentation topologique de la façon dont toutes ses variables interagissent dans le temps (par exemple la

composition en espèces du récifs, les dynamiques de leurs populations, mais aussi l’influence des paramètres physico-chimiques, climatiques, socio-économiques, etc).

Figure 1. Illustration de bassins d’attractions. Source : Walker et al. 2004

résilience d'un arbre. Malgré sa chute, de nouvelles branches poussent (Photo : Graham Horn. Licence Creative Commons CC BY-SA 2.0)

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Par exemple si le bassin d’attraction du système de droite représente les variations d’états au cours du temps des récifs jamaïcains, la position du point noir représente l’état du système récif à un moment particulier (disons en 1980 juste avant l’ouragan Allen). Si cette position est loin du seuil du bassin (ligne pointillée), le système peut relativement bien absorber les chocs, c’est le cas de l’effet d’un ouragan sur un écosystème récifal sain. Par contre, si comme en 1980 du fait de la surpêche puis de l’ouragan, le système est près d’un seuil, un événement en apparence insignifiant peut faire basculer l’ensemble du système d’une identité (un bassin d’attraction) à une autre, passant dans notre cas d’un récif corallien à des algues. Et il sera très difficile, voir impossible, de revenir au système précédent, car nous sommes à présent dans un nouveau bassin d’attraction qui possède sa propre dynamique et capacité de résilience (le point est passé, après l’épidémie de 1983 touchant les oursins, dans le bassin de gauche correspondant

à « prairies marines »). Toujours selon Résilience Alliance, la résilience dépend:a) De la quantité de perturbation qu’un système peut absorber et cependant se maintenir au sein du même état ou domaine d’attraction. On dit qu’un système résilient fait preuve d’hystérésis : c’est sa capacité à retrouver un certain état quand la cause extérieure qui a produit le changement d'état a cessé (par exemple un récif sain détruit par un ouragan mais capable de se reconstruire en quelques années).b) Du degré auquel le système est capable d’auto-organisation (versus manque d’organisation, ou organisation contrôlée par des facteurs extérieurs)c) Du degré auquel le système peut construire et développer sa capacité d’apprentissage et d’adaptation.Comme on peut le voir, loin d’être statique, un système complexe vivant est dynamique, en constante évolution tout en conservant au mieux une certaine identité qui fait que malgré les variations, nous pouvons reconnaître un récif de coraux comme tel. Pour mieux comprendre

récif de corail (Photo : ©The Cousteau Society)

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ce jeu dynamique, permettez moi d’introduire de nouvelles notions : celles de Cycles Adaptatifs et de Panarchie. Si nous reprenons l’exemple de notre récif jamaïcain, juste avant l’impact d’Allen ou même de la surpêche, il était probablement dans une phase « K », dite de conservation ou de maturité. Puis survient un choc plus ou moins fort, plus ou moins récurrent, et c’est la phase Omega (Ω) de destruction rapide (ex. impact de l’ouragan) elle même suivie d’une phase de réorganisation pour peu qu’un seuil n’ait pas été franchi du fait de la crise, c’est la phase Alpha (α) qui permet le renouveau et la réorganisation du système au cours de laquelle émergent de nouvelles structures. C’est d’ailleurs durant cette phase que des innovations sont souvent possibles. La phase alpha est elle-même suivie d’une phase R de croissance rapide permettant de retrouver la phase K qui correspond à la maturité. À noter également que plus on monte sur l’axe des abscisses, plus les flux de matières et d’énergies accumulées sont importants, une augmentation sur l’axe des ordonnées correspond elle à un réseau de plus en plus complexe et à des relations qui se stabilisent.

Figure 2. Cycles adaptatifs des systèmes complexes. Source : d'après Gunderson et Holling, 20021

Mais le « grand système » récif corallien héberge en son sein tout un ensemble de sous-systèmes (par exemples les brouteurs, les prédateurs, les coraux bâtisseurs de récifs, etc.) pouvant connaître le même type de cycles adaptatifs. Et particulièrement si l’écosystème est proche d’un seuil, une crise dans un sous-système (par 1. Gunderson, Lance and C. S. Holding. Panarchy: Understanding Transformations in Human and Natural Systems. Washington: Island Press, 2002.

exemple les brouteurs d’algues) peut ne pas mettre en danger la résilience du système récif corallien ou au contraire provoquer son effondrement (ce que l’on nomme « révolte » en Panarchie). À l’opposé, un écosystème qui a affronté au cours de sa longue histoire des crises récurrentes, comme des ouragans pour des récifs en zone tropicales, développe des adaptations que l’on nomme « mémoires ». Ainsi certaines espèces de coraux sont stimulées et fortifiées dans leur régénération par le passage d’un ouragan, un peu comme les espèces d’arbres qui ont besoin d’un feu pour germer, celui-ci contribuant donc in-fine au démarrage de la phase alpha de réorganisation de l’ensemble de l’écosystème « forêt ».. Comprendre cette dynamique entre systèmes / sous-systèmes constitue le cœur de la notion de Panarchie.

Il y aurait beaucoup plus à dire sur ces notions et nous proposerons quelques références à explorer pour ceux qui désirent creuser ces concepts. Après ces bases théoriques, à la lumière de ces dynamiques, quelles leçons peuvent donc nous apprendre les écosystèmes qui ont su traverser les changements parfois violents ? Quelles sont les grandes leçons qui semblent émerger de la complexité et de la diversité de ces écosystèmes ? Que peut-on apprendre d’un récif ou d’une forêt résilients pour gérer de façon soutenable une ville ou une organisation ? Nous allons explorer ensemble quelques pistes fascinantes de cette nouvelle science en plein développement et qui voit une fécondation croisée entre l’écologie et de nombreuses autres disciplines.

Leçon N°1 : Une interdépendance organisée

Tout système vivant, social ou écologique (on parle de plus en plus de système socio-écologique) est un réseau. Ce réseau présente une architecture où l’on retrouve des éléments clefs, comme les espèces proies

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très utilisées par de nombreuses espèces du réseau (espèces clef), ou un acteur social incontournable. On y retrouve également des éléments fondateurs, comme les coraux bâtisseurs de récifs ou un castor construisant un petit lac avec son barrage, ou Google et Yahoo pour l’écosystème internet naissant. Ces réseaux complexes conduisent à des distributions particulières de flux de matières, d’énergies et d’information, décrites par exemple par des lois mathématiques comme la distribution de Pareto qui stipule que dans de nombreux réseaux, 80% des effets sont le produit de 20 % des causes. Par exemple 80 % des flux sont dus à 20 % des espèces ; 80 % du CA d’une société est réalisé grâce à 20 % des clients.Dans un système résilient, plus de connexions n’est pas forcément la règle, et bien penser la modularité est important. Par exemple plusieurs récifs de coraux peuvent être connectés par des flux d’espèces qui se déplacent ou qui sont emportées par les courants, mais la connexion est moins importante qu’au sein d’un récif

Quel avenir pour l’ours blanc si la banquise d’été disparait complètement ?Photo : Tarik Chekchak

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particulier. Cela permet en cas de crise (par exemple une épidémie) d’éviter une propagation trop rapide des problèmes et offre également des possibilités de « coupe-circuits ». Pour les mêmes raisons, la résilience demande un certain degré de redondance afin que, en cas de défaillance d’un élément clef, la même fonction puisse être remplie par un autre élément.

Cette première leçon des systèmes naturellement résilients permet de prendre conscience de notre interdépendance radicale avec notre environnement, illustrée par les services que les écosystèmes nous fournissent sans que nous en ayons toujours bien conscience. Elle permet aussi de stimuler des innovations organisationnelles permettant de créer des opportunités d’auto-organisation du réseau, passant ainsi d’une vision très hiérarchique de l’organisation à une vision plus organique illustrée par exemple par les nouveaux business models tels que l’économie collaborative en ligne, qu'internet et les objets connectés permettent.

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Leçon N° 2 : miser sur la diversité

C’est certainement l'une des leçons les plus importantes sur la résilience des systèmes naturels. Elle se traduit soit par une diversité en espèces lorsque les conditions le permettent comme dans les milieux tropicaux, ou tout au moins par une diversité génétique lorsque le nombre d’espèces est limité comme dans les zones terrestres de l’Antarctique. Le scientifique David Tilman de l’Université St-Paul (Minnesota, états-Unis) a mis en évidence dans les

prairies de sa région l’importance fondamentale de la biodiversité. À partir de 1982, il a mesuré la productivité de la prairie sur 207 parcelles plantées d'espèces locales. Certaines parcelles étaient monospécifiques, les autres contenant des quantités croissantes d’espèces. En 1988, une très grave sécheresse toucha la région des prairies et impacta très fortement les récoltes agricoles générant plus de trois milliards de dollars de pertes pour les agriculteurs. L'équipe de D. Tilman constata que certaines parcelles avaient spectaculairement résisté au désastre et il s'agissait toujours des parcelles

les plus riches en biodiversité ! La productivité de parcelles n'abritant qu'une ou deux espèces de plantes était six fois moins importante que celles composées de 15 à 25 espèces !

Du point de vue de l’écosystème, on distingue :

- La diversité fonctionnelle : diversité des espèces au sein d’une fonction commune pour leur écosystème. (ex: fixateur d’azote, décomposeur, brouteurs, prédateur des brouteurs, etc.)

- La diversité de réponses : au sein d’un groupe fonctionnel, diversité de réponses à un même stimulus (ex: les producteurs primaires ne sont pas égaux face à la sécheresse, ou les oursins et les poissons ne vont pas brouter les algues de la même façon).

Les observations du Dr Tilman, confirmées par la suite par d’autres études, montrent que plus les diversités fonctionnelle et de réponse des espèces sont importantes, plus l’écosystème est productif et résilient face aux perturbations.

2. The Nature of Business. Redesigning for resilience. Giles Hutchins Green Books Ltd 2012.

Figure 3. Passer d’une organisation conventionnelle à une organisation hybride permettant l’auto-organisation. Source : d’après Hutchins, 20122

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Leçon N° 3 : Optimiser plutôt que maximiser.

Cette leçon découle de la précédente mais elle est suffisamment lourde de conséquences pour la distinguer. L’industrie comme la finance ont une tendance à rechercher les meilleurs rendements et à définir des stratégies visant à augmenter au maximum l’efficacité et la performance. C’est également une stratégie que l’on retrouve dans la nature, mais essentiellement dans des écosystèmes pionniers ou en phase de ré-organisation (phases alpha ou r) ou lorsque la survie est en jeu face à une crise. Un écosystème mature optimise sa résilience en trouvant un compromis entre efficacité et durabilité. En effet, un système très efficace (par exemple une production céréalière avec un haut rendement à l’hectare) nécessite forcément de réduire la diversité, en sélectionnant par exemple les variétés de blés les plus productives. En appauvrissant sa diversité, le système devient automatiquement plus sensible aux changements comme le montre l’expérience de Tilman. Le réduction de la diversité fonctionnelle conduit à une dépendance accrue aux apports extérieurs (le sol a par exemple perdu sa capacité naturelle de régénération), et une sensibilité intrinsèque aux changements. Une variété de blé très productive peut être parfaitement adaptée à un climat

mais grandement souffrir d’un changement climatique. Comme le système « efficace » a perdu sa plasticité environnementale, il est exposé à un grand risque d’effondrement si son environnement change. Ce principe peut être résumé par l’adage populaire « on ne met pas tous ses œufs dans le même panier ». Une partie de nos enjeux de société, lorsque l’on traite de durabilité, consiste donc pour nos socio-écosystèmes à trouver une position optimale conciliant bonne efficacité et résilience.

Leçon N°4 : Interagir dans un contexte plutôt collaboratif.

Jusqu'à très récemment, la plupart des manuels de biologie et d’écologie mettaient principalement l’accent sur la compétition et la sélection des espèces pour expliquer l’existence et les performances des systèmes vivants. Cette vision a bien sûr été très influencée par l’impact des découvertes de Darwin, mettant en avant le rôle central de la compétition et de la sélection naturelle. Cette analyse a conduit à des positionnements dans la sphère économique et sociale à travers le Darwinisme Social de Herbet Spencer, que Darwin lui même désapprouva en son temps, et qui influença à son tour la théorie des marchés et le

3. Lieter and Ulanowicz. 2010. "Is Our Monetary structure a systemic cause for financial instability ? Evidence and remedies from Nature." Journal of Futures Studies, April 2010.

Figure 4. Courbe de soutenabilité entre les deux polarités : efficacité et résilience (d’après Lietaer et al. 20103).

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libéralisme. Les chercheurs ont depuis découvert que la symbiose et la coopération expliquaient bien mieux les plus grandes innovations de l’histoire de la vie sur Terre. Ainsi la cellule eucaryote, qui constitue les tissus de toutes les plantes et des animaux, est le résultat d’une symbiose bactérienne ayant conduit à l’apparition de ces « usines à énergie » : les chloroplastes pour les plantes ou les mitochondries pour les cellules animales (théorie endosymbiotique de Lynn Margulis). Des études montrent également que lorsque les ressources viennent à manquer, il est beaucoup plus avantageux de coopérer que d’exacerber la compétition qui a un coût en énergie et en stress élevé. Ainsi des oiseaux peuvent tout a fait être en compétition lors de la reproduction et commencer à collaborer lorsqu’il s’agit de repérer des ressources en période de disette, en hiver par exemple. Les exemples de partage de nourriture, y compris

entre individus non apparentés, sont nombreux dans la nature. La chauve-souris Desmodus rotundus ou vampire d’Azara vit en Amérique du sud et se nourrit de sang d’équidés. Elles vivent en groupe de 8 à 12 femelles avec leurs petits dans des arbres creux. Chaque année, de nouvelles femelles sont accueillies dans le groupe et sans être apparentées au reste du groupe. La chauve-souris est très vulnérable et ne peut survivre au jeûne plus de 2 nuits consécutives. Wilkinson en 19844 a montré qu’une chauve-souris bien alimentée partage parfois sa nourriture avec sa voisine, perdant sa propre autonomie de 6% mais augmentant celle du receveur jusqu'à 30%. Sans cette coopération, le taux de mortalité annuel atteindrait 82% alors qu’il n’est que de 24%. L’échange suppose que le bénéficiaire deviendra un jour donneur à son tour.

4.Wilkison, G. S. 1984. "reciprocal food sharing in vampire bats." Nature, 309, 181-184.

Chauve-souris vampire d'Amérique du Sud. Dessin du naturaliste Allemand Eduard Oscar Schmidt (1823-1886). Domaine public.

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Leçon N°5 : Miser sur une meilleure gestion de l’information.

Pour les organismes comme les écosystèmes, une grande partie de leur fonctionnement est liée à une gestion performante de l’information. Selon une étude américaine datant de 2007, les capacités de stockage de l’ensemble de l’humanité (295 exaoctets à l’époque) représentaient à peine 1 % de la capacité de stockage du génome humain. Dans un écosystème l’information circule également dans tous les sens : à travers les réseaux alimentaires, les vecteurs chimiques comme les hormones, et bien d’autres formes de communications sensorielles qu’elles soient intentionnelles ou non. Savez-vous par exemple qu’un acacia brouté par des gazelles produit des phéromones qui conduisent les autres acacias à proximité à augmenter leur taux de toxines de façon préventive ? D’un certain point de vue, on peut dire que des mécanismes de « mémoire » existent non seulement à l’échelle des individus mais également à celle des écosystèmes. Pensons aux effets intégrés par les plantes et les animaux de l’alternance des saisons par exemple, ou même de « crises » moins prédictibles mais néanmoins régulières comme les feux de forêt. Certaines espèces comme le pin d’Alep bénéficient du feu pour sa germination s’il n’est pas trop intense, et l’écosystème forestier est donc maintenu même s’il est temporairement et localement modifié par le feu. De nombreux mécanismes de résilience impliquent ce que l’on appelle les boucles de rétroaction (feedback en anglais). Un système comportant une boucle de rétroaction agit sur lui-même et on distingue : Une rétroaction positive qui amplifie le phénomèneUne rétraction négative qui le réduit et permet une régulationCe sont les rétroactions qui expliquent en grande partie les comportements de systèmes complexes et selon la force du signal, des délais de transmission et de l’inertie du système, on observera des effets très variés allant de cycles plus ou moins réguliers à des comportements chaotiques. Un système résilient présente généralement des boucles de rétroaction à l’intensité ni trop forte, ni trop faible.D’un point de vue plus sociologique, il est très important de nourrir la mémoire des crises du passé afin d’adapter nos stratégies en fonction de ces risques avérés puisqu’ils sont déjà survenus par le passé.

Ainsi par exemple, est-il bien sage de construire sur les flancs d’un volcan ayant régulièrement montré sa dangerosité, y compris si les éruptions sont espacées de plusieurs siècles ? De même pour les zones inondables ? Chez les peuples premiers, les tabous et les légendes sont de puissants vecteurs d’information contribuant parfois à expliquer la résilience du groupe. Dans toutes les sociétés, la transmission du savoir est essentielle à la résilience, mais la façon dont ce savoir est transmis est tout aussi importante. Jamais l’accès à l’information n’a été aussi large que depuis l’apparition de l’économie numérique. Pourtant l’information clef pouvant répondre à un besoin précis et urgent n’est pas toujours mobilisable selon des modalités contribuant réellement à la résilience. L’avènement des objets connectés et du Big Data est certes en train de changer la donne, mais sans pour autant intégrer les enjeux environnementaux au cœur de la stratégie. Les partages d’information sur les réseaux sociaux nous rappellent que ce sont des dynamiques sociales basées sur la confiance et la crédibilité qui in fine s’avèrent décisives.

Leçon N°6 : Prendre en compte les limites

En 2009, un groupe de scientifiques sous la direction du professeur Rockström publie dans la revue Nature une série de neuf critères environnementaux pouvant mettre en péril la résilience de l’humanité sur notre planète. Ils partirent du principe que durant les 10 000 dernières années une certaine stabilité environnementale a permis d’expliquer le succès de l’humanité et que les changements actuels, provoqués par l’humain, la mettent en question. Exercer une pression excessive sur ces processus cruciaux pourrait selon eux nous mener à des points de basculement dont le dépassement entraînerait des changements environnementaux irréversibles et aux conséquences imprévisibles. Rockström et ses collègues proposent dès lors une « zone de sécurité », ce qu’ils appellent un "espace de manœuvre sûr pour l'humanité". L’Ong international d’aide au développement Oxfam sur la base de ces travaux a ajouté la dimension sociale, partant du postulat qu’après tout, pouvons nous parler d’espace sûr pour l’humanité si la résilience sociale n’était pas incluse ?

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Figure 5. Un espace de manœuvre sûr et juste pour l’humanité. Oxfam, d’après rockström et al. (2009).rockström et al. Nature, 2009, 461. A safe operating space for humanity.472-475.

De même qu'il existe un plafond environnemental au-delà duquel la dégradation de l'environnement atteint un degré irréversible, il existerait donc un plancher social sous lequel les privations humaines sont tellement inacceptables qu’elles font également prendre un risque à la résilience de l’ensemble.Comprendre les limites et ne pas forcément chercher à les transgresser n’est pas une loi d’airain. Par exemple c’est en transgressant les limites imposées par l’influence de la gravité sur la planète Terre que l’humanité a pu s’élancer vers l’espace. Mais il est néanmoins important de noter que le positivisme technologique cherche bien souvent l’innovation avant tout du côté de la transgression des limites et que cela présente parfois une stratégie très risquée. Si l’on regarde du coté des innovations du monde vivant, on s’aperçoit que les plus grandes innovations se sont servies des conditions limites comme support et n’ont

pas cherché à les transgresser. Par exemple, un animal nocturne ne développe pas des lumières artificielles pour mieux percevoir son environnement, mais des organes sensoriels qui permettent plutôt de « voir » sans lumière. Au niveau systémique par contre, il s’est passé depuis l’aube de la vie sur Terre quelque chose de remarquable, la Vie a semblé favoriser des conditions propices à la diversification de la Vie, une magnifique tautologie illustrée par la Théorie de Gaïa de James Lovelock.

Bien intégrer les limites dans nos réflexions stratégiques peut donc permettre de stimuler grandement l’apparition d’innovations en phase avec les conditions qui nous sont proposées, sans pour autant nécessairement ouvrir en grand la boîte de Pandore de risques nouveaux aux conséquences systémiques imprévisibles.

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Fin du dossier

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- résilience alliance : http://www.resalliance.org/

- raphaël Mathevet et François Bousquet, Résilience et environnement, Buchet Chastel, 2014

- Zolli and Healy, Résilience : Why Things Bounce Bask, Free Press, 2010.

- Gunderson and Holding, Panarchy: Understanding Transformations in Human and Natural Systems, Island Press, 2002.

- Giles Hutchins, The Nature of Business. Redesigning for resilience, Green Books Ltd 2012.

Pour en savoir plus

Conclusion L’histoire de 3,8 milliards d’années d’existence de la vie sur notre belle planète a été une succession constante de crises et d’innovations. Lors de l’extinction massive du Permien, il y a 245-252 millions d’années, près de 95 % de la vie marine a disparu ainsi que 70% des espèces terrestres. La célèbre extinction des dinosaures au Crétacé permit pourtant l’avènement des mammifères et donc notre propre apparition. Nous sommes une espèce extrêmement jeune qui se comporte souvent avec une grande immaturité et qui provoque à présent la 6e extinction de masse. La vie sur Terre s’en remettra probablement, cela prendra peut être des millions d’années mais il n’y a aucune raison pour que le dynamisme du vivant ne conduise pas à terme à l’apparition de nouvelles espèces. Mais nous, humains, dépendons pour notre propre résilience des services que des écosystèmes en bonne santé sont capables de nous rendre. Penser que la technologie résoudra les problèmes que nous avons créés est à mon sens un leurre, tout simplement car la technologie est un outil et que chez un être capable de réflexion comme Homo sapiens, l’intention éclairée de l’éthique est un guide indispensable. Si une meilleure compréhension de la résilience nourrit cette éthique, alors nos actions dans le monde auront une meilleure chance de prendre en compte une interdépendance qu’il convient de célébrer, non de craindre. Car en effet, dans un système résilient, le changement permet la nouveauté, le développement et l'innovation. Par contre, dans un système vulnérable, même de petits changements peuvent avoir des effets dévastateurs… ●

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Fonte des glaces dans les régions polaires (photo : © Tarik Chekchak)

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Ci-dessus, la maquette d'étude de l'oasis aménagée, et ci-contre, une visualisation 3D. Page de droite : un diagramme de l'écosystème du projet

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Biomiméticiensde demainARChItECtURE RégéNéRAtIvE : LUttE CONtRE LA DéSERtIFICAtION Par Kenza Benkirane

Dans le cadre de son diplôme de fin d'études à l'Ecole Spéciale d'Architecture, Kenza Benkirane a travaillé sur le lien entre biomimétisme et architecture. Ce travail de recherche l'a menée à s'intéresser à l'aménagement de zones arides menacées par la désertification,

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Agriculture et formation agricole

Aliments

Composte

Reservoir d’eau propre50% Aquifère / 50% eau de pluie et de rosée

Living machine Systeme de purification des eaux usées

Preparation de repas locaux en cuisine

Atelier de formation / Magasin produits destinés aux touristes

Lutte contre la désertification

Récupération de l’eau de pluie et de rosée

Eaux usées de la douche réutilisées pour l’irrigation

Eau pour la douche

Savon produit locallement

Touristes

+ =

Restaurant

Artisanat

Artisanat

Main d’oeuvre

PROJET VILLAGE

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L' objectif du projet est de lutter contre la désertification grâce à une approche écosystémique favorisant la régénération de l'Oasis Ferkla dans le Sahara Marocain. En effet l'Oasis Ferkla comme de nombreuses Oasis connaît une véritable crise sous l'effet conjugué d'un modèle de développement inapproprié et des changements climatiques qui exercent une trop grande pression sur les ressources naturelles, l'eau en particulier.

Le site pourtant dispose d'un fort potentiel touristique en raison de sa valeur naturelle, géographique et historico-culturelle. L'idée est donc de créer un projet

combinant tourisme, artisanat et agriculture pouvant s'intégrer durablement dans l'environnement du site et avec de fortes retombées socio économiques.

Le plan du projet s'est voulu libre et l'architecture légère de telle sorte que le projet puisse migrer pour régénérer une autre zone désertifiée ou être réapproprié par la population locale une fois la zone régénérée. La prolifération des pompages durant les dernières périodes de sécheresse a conduit à l'épuisement des ressources aquifères. Les ressources actuelles de Ferkla étant de plus en plus rare il a fallu trouver un autre système de récupération d'eau.

En m'inspirant du système de récupération des gouttes de rosée par les toiles d'araignées et du diagramme de Voronoi , j'ai conçu sur le site un réseau de collecte, de stockage et d' acheminement des eaux de pluie et de rosée. En effet l'eau de pluie et de rosée est captée par une membrane en toile sur ossature de bois de récupération. La pente de la toiture dirige l'eau naturellement vers des zones de stockage souterraines où l'eau est purifiée et réutilisée pour l'irrigation des palmeraies. Ce système de récupération économise de moitié les sources aquifères. ●

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Le veilleurDe la couleur par structuration

On observe parmi les espèces biologiques une grande proportion à utiliser la structuration de la matière pour obtenir des propriétés utiles, comme des propriétés optiques pour la parade sexuelle ou la communication inter et intra espèces. Certaines couleurs - comme celles des plumes de paon, des ailes de papillon ou des exosquelettes de scarabée – sont obtenues sans pigment, mais à partir de la structure de la surface seule. De nombreux chercheurs se sont donc penchés sur la structuration de la chitine ou de la kératine au sein de ces animaux. Ce qui a donné lieu à nombre de publications voir d’innovation (cf technologie Mirasol par Qualcom).

Fin mai dernier, des chercheurs de l'Université de Cambridge ont recréé pour la première fois en laboratoire un film structuré iridescents de couleurs vives en s’inspirant des baies marbrées (Pollia condensata). Ce qui est remarquable, c’est que ces films sont fabriqués à partir de la cellulose, soit de la pâte à papier. La cellulose est constituée de longues

Olivier Allard | www.biomimesis.fr

chaînes de molécules de sucre et constitue la biomasse la plus abondante dans la nature.Le deuxième résultat remarquable est l’utilisation de l’auto-assemblage pour la fabrication des films iridescents qui permet une économie substantielle de matière et d’énergie.

Pour obtenir les films, les chercheurs ont extrait des nano-cristaux de cellulose à partir de la pâte de bois. En suspension dans l'eau, les nano-cristaux s'assemblent spontanément en couches nano-structurées qui réfléchissent sélectivement une gamme de couleur. La couleur réfléchie est fonction des dimensions des couches. En variant le taux d'humidité au cours de la fabrication du film, les chercheurs ont réussi à changer la couleur réfléchie et à contrôler les différentes phases de la formation de la couleur. Ce procédé de fabrication à partir de cellulose pourrait remplacer les pigments toxiques traditionnels dans les industries du textile, de l’agroalimentaire, mais aussi dans l'étiquetage, la cosmétique et la sécurité via le cryptage.

Les résultats sont publiés dans la revue Advanced Optical Materials. http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/adom.201400112/abstract

De la couleur par structuration

On observe parmi les espèces biologiques une grande proportion à utiliser la structuration de

la matière pour obtenir des propriétés utiles, comme des propriétés optiques pour la parade

sexuelle ou la communication inter et intra espèces. Certaines couleurs - comme celles des

plumes de paon, des ailes de papillon ou des exosquelettes de scarabée – sont obtenu sans

pigment, mais à partir de la structure de la surface seule. De nombreux chercheurs se sont

donc penchés sur la structuration de la chitine ou de la kératine au sein de ses animaux. Ce qui

a donné lieu à nombre de publications voir d’innovation (cf technologie Mirasol par

Qualcom).

Fin mai dernier, des chercheurs de l'Université de Cambridge ont recréé pour la première fois

en laboratoire un film structuré iridescents de couleurs vives en s’inspirant des baies marbrées

(Pollia condensata). Ce qui est remarquable, c’est que ces films sont fabriqués à partir de la

cellulose, soit de la pâte à papier. La cellulose est constituée de longues chaînes de molécules

de sucre et constitue la biomasse la plus abondante dans la nature.

Le deuxième résultat remarquable est l’utilisation de l’auto-assemblage pour la fabrication des

films iridescents qui permet une économie substantiel de matière et d’énergie.

Pour obtenir les films, les chercheurs ont extrait des nano-cristaux de cellulose à partir de la

pâte de bois. En suspension dans l'eau, les nano-cristaux s'assemblent spontanément en

couches nano-structurées qui réfléchissent sélectivement une gamme de couleur. La couleur

réfléchie est fonction des dimensions des couches. En variant le taux d'humidité au cours de la

fabrication du film, les chercheurs ont réussi à changer la couleur réfléchie et à contrôler les

différentes phases de la formation de la couleur.

Ce procédé de fabrication à partir de cellulose pourrait remplacer les pigments toxiques

traditionnels dans les industries du textile, de l’agroalimentaire, mais aussi dans l'étiquetage,

la cosmétique et la sécurité via le cryptage.

Les résultats sont publiés dans la revue Advanced Optical Materials.

http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/adom.201400112/abstract

De la couleur par structuration

On observe parmi les espèces biologiques une grande proportion à utiliser la structuration de

la matière pour obtenir des propriétés utiles, comme des propriétés optiques pour la parade

sexuelle ou la communication inter et intra espèces. Certaines couleurs - comme celles des

plumes de paon, des ailes de papillon ou des exosquelettes de scarabée – sont obtenu sans

pigment, mais à partir de la structure de la surface seule. De nombreux chercheurs se sont

donc penchés sur la structuration de la chitine ou de la kératine au sein de ses animaux. Ce qui

a donné lieu à nombre de publications voir d’innovation (cf technologie Mirasol par

Qualcom).

Fin mai dernier, des chercheurs de l'Université de Cambridge ont recréé pour la première fois

en laboratoire un film structuré iridescents de couleurs vives en s’inspirant des baies marbrées

(Pollia condensata). Ce qui est remarquable, c’est que ces films sont fabriqués à partir de la

cellulose, soit de la pâte à papier. La cellulose est constituée de longues chaînes de molécules

de sucre et constitue la biomasse la plus abondante dans la nature.

Le deuxième résultat remarquable est l’utilisation de l’auto-assemblage pour la fabrication des

films iridescents qui permet une économie substantiel de matière et d’énergie.

Pour obtenir les films, les chercheurs ont extrait des nano-cristaux de cellulose à partir de la

pâte de bois. En suspension dans l'eau, les nano-cristaux s'assemblent spontanément en

couches nano-structurées qui réfléchissent sélectivement une gamme de couleur. La couleur

réfléchie est fonction des dimensions des couches. En variant le taux d'humidité au cours de la

fabrication du film, les chercheurs ont réussi à changer la couleur réfléchie et à contrôler les

différentes phases de la formation de la couleur.

Ce procédé de fabrication à partir de cellulose pourrait remplacer les pigments toxiques

traditionnels dans les industries du textile, de l’agroalimentaire, mais aussi dans l'étiquetage,

la cosmétique et la sécurité via le cryptage.

Les résultats sont publiés dans la revue Advanced Optical Materials.

http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/adom.201400112/abstract

De la couleur par structuration

On observe parmi les espèces biologiques une grande proportion à utiliser la structuration de

la matière pour obtenir des propriétés utiles, comme des propriétés optiques pour la parade

sexuelle ou la communication inter et intra espèces. Certaines couleurs - comme celles des

plumes de paon, des ailes de papillon ou des exosquelettes de scarabée – sont obtenu sans

pigment, mais à partir de la structure de la surface seule. De nombreux chercheurs se sont

donc penchés sur la structuration de la chitine ou de la kératine au sein de ses animaux. Ce qui

a donné lieu à nombre de publications voir d’innovation (cf technologie Mirasol par

Qualcom).

Fin mai dernier, des chercheurs de l'Université de Cambridge ont recréé pour la première fois

en laboratoire un film structuré iridescents de couleurs vives en s’inspirant des baies marbrées

(Pollia condensata). Ce qui est remarquable, c’est que ces films sont fabriqués à partir de la

cellulose, soit de la pâte à papier. La cellulose est constituée de longues chaînes de molécules

de sucre et constitue la biomasse la plus abondante dans la nature.

Le deuxième résultat remarquable est l’utilisation de l’auto-assemblage pour la fabrication des

films iridescents qui permet une économie substantiel de matière et d’énergie.

Pour obtenir les films, les chercheurs ont extrait des nano-cristaux de cellulose à partir de la

pâte de bois. En suspension dans l'eau, les nano-cristaux s'assemblent spontanément en

couches nano-structurées qui réfléchissent sélectivement une gamme de couleur. La couleur

réfléchie est fonction des dimensions des couches. En variant le taux d'humidité au cours de la

fabrication du film, les chercheurs ont réussi à changer la couleur réfléchie et à contrôler les

différentes phases de la formation de la couleur.

Ce procédé de fabrication à partir de cellulose pourrait remplacer les pigments toxiques

traditionnels dans les industries du textile, de l’agroalimentaire, mais aussi dans l'étiquetage,

la cosmétique et la sécurité via le cryptage.

Les résultats sont publiés dans la revue Advanced Optical Materials.

http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/adom.201400112/abstract

De la couleur par structuration

On observe parmi les espèces biologiques une grande proportion à utiliser la structuration de

la matière pour obtenir des propriétés utiles, comme des propriétés optiques pour la parade

sexuelle ou la communication inter et intra espèces. Certaines couleurs - comme celles des

plumes de paon, des ailes de papillon ou des exosquelettes de scarabée – sont obtenu sans

pigment, mais à partir de la structure de la surface seule. De nombreux chercheurs se sont

donc penchés sur la structuration de la chitine ou de la kératine au sein de ses animaux. Ce qui

a donné lieu à nombre de publications voir d’innovation (cf technologie Mirasol par

Qualcom).

Fin mai dernier, des chercheurs de l'Université de Cambridge ont recréé pour la première fois

en laboratoire un film structuré iridescents de couleurs vives en s’inspirant des baies marbrées

(Pollia condensata). Ce qui est remarquable, c’est que ces films sont fabriqués à partir de la

cellulose, soit de la pâte à papier. La cellulose est constituée de longues chaînes de molécules

de sucre et constitue la biomasse la plus abondante dans la nature.

Le deuxième résultat remarquable est l’utilisation de l’auto-assemblage pour la fabrication des

films iridescents qui permet une économie substantiel de matière et d’énergie.

Pour obtenir les films, les chercheurs ont extrait des nano-cristaux de cellulose à partir de la

pâte de bois. En suspension dans l'eau, les nano-cristaux s'assemblent spontanément en

couches nano-structurées qui réfléchissent sélectivement une gamme de couleur. La couleur

réfléchie est fonction des dimensions des couches. En variant le taux d'humidité au cours de la

fabrication du film, les chercheurs ont réussi à changer la couleur réfléchie et à contrôler les

différentes phases de la formation de la couleur.

Ce procédé de fabrication à partir de cellulose pourrait remplacer les pigments toxiques

traditionnels dans les industries du textile, de l’agroalimentaire, mais aussi dans l'étiquetage,

la cosmétique et la sécurité via le cryptage.

Les résultats sont publiés dans la revue Advanced Optical Materials.

http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/adom.201400112/abstract

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Plus fort que l'effet lotus

Une autre propriété bien connue, obtenue par structuration de la matière en surface, est la super-hydrophobicité ou effet lotus. Mais malgré plus d'une décennie de recherche intensive, les surfaces à effet lotus ont encore des problèmes qui limitent leurs applications pratiques: une oléo-phobicité limitée, des défaillances sous la pression, une incapacité à s'auto-réparer, une résistance limitée aux taches, à l’abrasion ou à la torsion et des coûts de production élevés.

Inspirée par la structure des surfaces utra-glissantes des plantes carnivores à pièges passifs de la famille des Népenthacées, l’équipe de recherche de Joanna Aizenberg de l’université de Harvard a réussi à dépasser les limites inhérentes aux stratégies actuelles utilisant l’effet lotus. La rugosité micro-texturée de surface des Nepenthes crée un réseau d’interstices dans lequel se loge un liquide qui forme un film stable en surface. Ce film est aqueux et cause un fort aquaplaning des pattes graisseuses des fourmis qui marchent sur la crête, les faisant glisser dans le suc digestif en contre bas.Sur cette base l’équipe de Harvard a créé des surfaces extrêmement glissantes, empêchant des liquides polaires (eau) ou organiques (sang), des substances très visqueuses (ketchup, huile) et même des matériaux solides (glace, poussière, insectes) d’y adhérer. Le secret est d'insuffler un matériau poreux avec un liquide qui repousse les huiles et l'eau. Les surfaces deviennent alors autolubrifiantes, autoréparatrices, autonettoyantes, fonctionnent sous des conditions extrêmes, et se fabriquent facilement à partir de matériaux à faibles coûts et non polluants.

Ce petit miracle inspiré de la nature date déjà de 2010, mais l’équipe à perfectionner son produit appelé SLIPS (slippery liquid-infused porous surface) et annonce en

fin d’année dernière dans la revue Nanotechnology avoir réussi à appliquer ce principe sur des tissus en coton ou en polyester. Après modification par la technologie SLIPS, les tissus arborent des propriétés protectrices exceptionnelles (antitache et super-hydrophobe), et les conservent même après frottement, torsion, ou lavage, de quoi économiser pas mal d’eau et de produits chimiques de nettoyage.L’équipe travaille actuellement à l’extension de leur technologie à la manipulation de fluides biomédicaux, le transport d’hydrocarbures en limitant les pertes, l’anti-givrage qui intéresse particulièrement l’aéronautique, l'imagerie optique et d'autres domaines où l’effet lotus n’apporte pas de solutions satisfaisantes.

A voir les vidéos impressionnantes des surfaces SLIPS sur internet : https://www.youtube.com/user/SlipperySurfaces.

Plus fort que l’effet lotus

Une autre propriété bien connue, obtenue par structuration de la matière en surface, est la

super-hydrophobicité ou effet lotus. Mais malgré plus d'une décennie de recherche intensive,

les surfaces à effet lotus ont encore des problèmes qui limitent leurs applications pratiques:

une oléo-phobicité limitée, des défaillances sous la pression, une incapacité à s'auto-réparer,

une résistance limitée aux taches, à l’abrasion ou à la torsion et des coûts de production

élevés.

Inspiré par la structure des surfaces utra-

glissantes des plantes carnivores à pièges

passifs de la famille des Népenthacées,

l’équipe de recherche de Joanna Aizenberg

de l’université de Harvard a réussi à

dépasser les limites inhérentes aux

stratégies actuelles utilisant l’effet lotus.

La rugosité micro-texturée de surface des

Nepenthes crée un réseau d’interstices dans

lequel se loge un liquide qui forme un film

stable en surface. Ce film est aqueux et

cause un fort aquaplaning des pâtes

graisseuses des fourmis qui marchent sur la

crête, les faisant glisser dans le suc digestif

en contre bas.

Sur cette base l’équipe de Harvard a créé

des surfaces extrêmement glissantes,

empêchant des liquides polaires (eau) ou

organiques (sang), des substances très

visqueuses (ketchup, huile) et même des

matériaux solides (glace, poussière,

insectes) d’y adhérer. Le secret est

d'insuffler un matériau poreux avec un

liquide qui repousse les huiles et l'eau. Les

surfaces deviennent alors autolubrifiantes,

autoréparatrices, autonettoyantes,

fonctionnent sous des conditions extrêmes,

et se fabriquent facilement à partir de

matériaux à faibles coûts et non polluants.

Ce petit miracle inspiré de la nature date déjà de 2010, mais l’équipe à perfectionner son

produit appelé SLIPS (slippery liquid-infused porous surface) et annonce en fin d’année

dernière dans la revue Nanotechnology avoir réussi à appliquer ce principe sur des tissus en

coton ou en polyester. Après modification par la technologie SLIPS, les tissus arborent des

propriétés protectrices exceptionnelles (antitache et super-hydrophobe), et les conservent

même après frottement, torsion, ou lavage, de quoi économiser pas mal d’eau et de produits

chimiques de nettoyage.

L’équipe travaille actuellement à l’extension de leur technologie à la manipulation de fluides

biomédicaux, le transport d’hydrocarbures en limitant les pertes, l’anti-givrage qui intéresse

particulièrement l’aéronautique, l'imagerie optique et d'autres domaines où l’effet lotus

n’apporte pas de solutions satisfaisantes.

A voir les vidéos impressionnantes des surfaces SLIPS sur internet :

https://www.youtube.com/user/SlipperySurfaces

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Quand on observe les écosystèmes matures, on voit que les organismes y « consomment les matériaux et ressources avec parcimonie, qu’ils optimisent plus qu’ils ne maximisent, qu’ils se nourrissent d’information, se fournissent localement, coopèrent ». C’est le comportement collectif et l’action de chaque organisme qui fait évoluer ces systèmes. Est-ce là le changement que nous devons opérer ? Aller vers d’avantage de collaboration, commencer à consommer et agir localement et de façon plus responsable, partager d’avantage d’information… J. Rifkin et d’autres penseurs tels que C. Anderson et M. Serres présentent (chacun à leur façon) une nouvelle vision de la société humaine basée sur la relation, l’interconnexion, le réseau, le pouvoir latéral, l’humain et sa relation avec son environnement… Ils remarquent d’ailleurs que ce changement de paradigme est déjà en cours.

C’est également dans cette perspective qu’est né l’ouvrage de Anne-Sophie Novel et Stéphane Riot Vive la Corévolution! Pour une société collaborative, un livre porteur d’espoir, entrainant et tenant un regard frais et résolument positif sur l’avenir !

Ce projet commun prend ses sources en 2009, alors que Stephane Riot travaille depuis 10 ans dans le développement durable et a créé NoveTerra, qui a pour objectif de redonner sa place à l’humain au

cœur des organisations. Anne-Sophie Novel de son côté a réalisé sa thèse en économie, blogue depuis 2006 et est investie dans divers projets associatifs ayant à cœur de mettre les outils du web au service du développement durable. Ils réalisent à ce moment à quel point la logique collaborative imprègne déjà nos sociétés.

En effet, autour de nous les initiatives collaboratives et de partage telles que le covoiturage, la colocation, le couchsurfing, le crowdfunding et le coworking se multiplient et depuis cette dernière décennie gagnent fortement en popularité. Ils remarquent d’ailleurs que toutes ces différentes notions de consommation collaborative, l’économie de partage, l’économie de fonctionnalité, le convivialisme etc. sont différents aspects d’un seul et même phénomène qu’ils baptisent, la « corévolution ». Stéphane Riot et Anne-Sophie Novel sont persuadés que cette corévolution peut devenir une solution pour répondre aux enjeux du développement durable.

À deux, ils créent donc cet ouvrage inspirant, qui se veut être une invitation au voyage pour faire découvrir au lecteur un monde où le partage, la collaboration et le don sont naturels ; un monde plus humain où règnent la convivialité et la confiance ; où les craintes de l’avenir sont remplacées par l’enthousiasme du lendemain et de ses opportunités, et par le plaisir d’agir et d’être ensemble. À travers ce voyage, ils veulent également

La bibliothèqueidéaleAmandine de Schaetzen

Vive la corévolution ! montre en quoi le phénomène collaboratif influence profondément nos organisations (groupes humains, associations, collectivités, entreprises, etc.). La collaboration peut renouveler nos façons de faire à différents niveaux de la société et nous permettre de construire le monde durable de demain.

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Anne-Sophie NOVEL et Stéphane riot Vive la corévolution ! Pour une société collaborative Editions Alternatives, 2012

nous faire prendre conscience que ce monde, si beau semble-t-il, est déjà en marche et que c’est à nous de prendre la vague ! Les auteurs nous invitent, à travers les chapitres, à partir à la découverte de ce nouveau modèle collaboratif qui s’exprime à tous les niveaux de la société : de l’individu à la société civile en passant par les interactions entre entreprises et au niveau du management de nos organisations. À chaque chapitre, ils décrivent les rouages de ce nouveau paradigme exprimé à un niveau différent et présentent des pistes pour amplifier le mouvement et le répliquer le plus largement possible.

Lors de la dernière étape de ce voyage collaboratif, les auteurs nous font découvrir la logique collaborative au sein même de nos organisations, à travers le management collaboratif. Selon eux, « le management doit intégrer la création de ces communautés et accepter de ne pas tout contrôler. Concrètement, dans une organisation collaborative, l'enjeu est de lâcher prise : le manager doit coordonner des équipes sans centralisme et animer des projets sans hiérarchie. Déléguer ne réduit pas l'autorité et n'empêche pas la reconnaissance, au contraire. Le rôle du manager est celui d'un " facilitateur ", d'un " co-manager ". Il doit non pas dire ce qu'il faut faire mais donner des ressources (temps, moyens, informations...) aux équipes afin que celles-ci puissent s'organiser le mieux possible pour effectuer leur travail en accord avec la raison d'être du projet. »

En guise de conclusion, nous citerons nos co-auteurs qui après lui avoir mis l’eau à la bouche, appellent le lecteur à se laisser porter par cette vague collaborative :

« Gardons la tête sur les épaules et les pieds sur terre, soyons plus à l’écoute de notre cœur, de notre biosphère, observons les additions et les contradictions de notre monde et améliorons, ensemble, tout ce qui peut servir l’Être, et donc l’avenir de notre civilisation… Vive la corévolution ! »●

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Second regardMichka Mélo

L' entreprise Interface Inc., un des leader mondiaux de design, fabrication et distribution de moquettes pour particuliers et professionnels, a fait appel à la Biomimicry Guild il y a plus de 15 ans déjà pour intégrer le biomimétisme dans ses processus d'innovation1. Le produit né de cette collaboration, la moquette Entropy, est devenu depuis lors une des success stories du biomimétisme. Impact réel ou bonne stratégie de communication ? D'après les informations disponibles en ligne, les deux partenaires seraient partis du constat que, lorsqu’une partie de la moquette est abîmée (usure, tâches), la tendance est au remplacement total de la moquette, opération onéreuse et nécessitant le plus souvent l'appel à un professionnel. En effet, au moment d’intervenir pour remplacer la partie endommagée, le modèle original peut de plus être présent sur le marché. Dans le cas où il le serait encore, il est probable que la teinte disponible soit légèrement différente de celle installée, du fait du procédé de production incapable de garantir une réplicabilité parfaite de la teinte. Le changement de teinte cassant l’unité du sol, les utilisateurs sont encouragés à changer toute la moquette d’une pièce, même lorsque la quasi-totalité de celle-ci est encore pleinement fonctionnelle. C'est parfaitement contre-productif, du point de vue environnemental comme du point de vue économique2.

Interface et la Biomimicry Guild ont donc abordé le problème des teintes. S'inspirant des sols aux teintes variées, désordonnées mais harmonieuses, que l’on peut trouver dans la nature (forêt, rochers, ... ), les designers d’Interface ont développé une large palette de teintes librement combinables pour composer son propre sol de façon harmonieuse 2. Il est donc désormais facile de remplacer un simple fragment de moquette sans briser l'unité du sol.Restait à proposer une moquette à la vente sous un autre format que des grands rouleaux. Interface et la Biomimicry Guild ont donc imaginé un produit modulaire: une moquette constituée de tuiles d’un mètre carré. Chaque tuile de la moquette est facilement remplaçable en cas d'usure ou d'endommagement, sans avoir à lancer de travaux titanesques nécessitant l'intervention d'un professionnel. En standardisant les dimensions de tuiles et en les vendant en petites quantités, Interface offre un produit peu onéreux, et limite la production de chutes inhérentes au grands rouleaux traditionnels. La modularité, omniprésente dans le vivant jusque dans la notion de cellule, semble donc pouvoir induire des économies de matière (et d'argent) conséquentes. Entropy fut un véritable succès commercial. Il représentait 40 % des ventes parmi les produits modulaires d’Interface Inc. quatre ans après sa mise sur le marché, en 20003, 4.Résumons. D’un point de vue environnemental, ce

Cette nouvelle rubrique se propose d'apporter un regard critique sur les applications du biomimétisme dans la vie de tous les jours. Chaque chronique sera un focus sur un projet particulier et déjà existant, dont il s'agira d'analyser la portée biomimétique et durable. Il s'agit évidemment d'un point de vue, tout commentaire est le bienvenu, et les personnes impliquées dans les projets présentés ici ont bien-sûr la possibilité de répondre si elles le jugent nécessaires, réponse que nous publierons dans le numéro suivant. Dans ce numéro, Michka Mélo nous parle de la moquette Entropy, conçue par la société Interface Inc.

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Moquette Entropy (Interface Inc.). Cette image est propriété de Interface Inc. (http://www.interface.com/)

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produit est intéressant car il permet de limiter les déchets. Il les limite en évitant le remplacement total de la moquette en cas d’endommagement partiel, et en produisant moins de chutes qu’un grand rouleau2. Mais qu’en est-il des matériaux utilisés pour produire la moquette ? Sont-ils nocifs pour l’environnement ? Sont-ils recyclables ? Si oui, avec quelle efficacité ? Qu’en est-il des procédés de production ? Et de la chaîne de distribution? Une chaîne de récupération en fin de vie a-t-elle été mise en place ? Quelques éléments de réponse apparaissent sur le site de l’entreprise Interface. Celle-ci s’est engagée, dès 1996, dans un grand programme pour réduire ses déchets, à intégrer des matériaux recyclables dans ses produits, alimenter ses usines en énergies renouvelables et réduire sa consommation en eau5. On peut trouver les statistiques sur leur site internet, mais il ne semble pas possible de trouver des détails sur les progrès apportés par Entropy spécifiquement.D’après les informations mises à disposition du public, il ne semble pas qu’Interface Inc. et la Biomimicry Guild aient utilisé les principes du vivant à leur plein

potentiel lors de la conception du produit, notamment du côté de la production bio-inspirée. Il y a probablement de nombreuses raisons à ce choix.Toutefois, comme pour la plupart des success stories, les informations disponibles sur les produits sont parcellaires, distillées précautionneusement par les services de communication des entreprises concernées. Il serait pourtant intéressant de connaître les discussions ayant eu lieu pendant le design brief. Pourquoi le choix des teintes et la modularité ont-elles été privilégiées par rapport à d'autres critères d'amélioration du produit ? étaient-ils les meilleurs points de leviers pour réduire rapidement et efficacement l'impact environnemental ? Dans quelle mesure l'innovation de rupture est-elle encouragée et financée en complément de mesures plus rapidement mises en œuvre ? Espérons que les avancées en cours dans le domaine de l'innovation ouverte permettront de faire des ces success stories de véritables business case complets, accessibles à l'ensemble du secteur travaillant pour des produits plus durables, et accélérant ainsi la transition écologique6. ●

1. http://www.interfaceglobal.com/ 2. http://intercontinentalcry.org/biomimicry/ 3. http://usa.autodesk.com/adsk/servlet/index?siteID=123112&id= 12089990 4. http://www.interfaceglobal.com/Innovations/2001.aspx 5. http://www.interfaceglobal.com/getdoc/ 7e96b54e-ad49-4eff-9877-38a55df0396d/Global-EcoMetrics.aspx6. Nous pouvons néanmoins noter les efforts louables d'interface dans le sens du développement durable et du biomimétisme, ce qui est loin d'être fréquent.Par ailleurs, cette entreprise a pris un certain nombre de décisions destinées à réduire leurs coûts environnementaux telles que la réduction drastique (facteur de 100) de l'utilisation de colle avec leur technologie TacTiles ; la collecte de filets de pêche usagés auprès de communautés de pêcheurs ; la mise en place d'une "Mission Zero" pour 2020. En 2014 il avait déjà atteint : 40% de réduction de dépense énergétique (certains sites fonctionnant à 100% d'énergie renouvelable) ; réduction de 77% de la consommation d'eau sur leur site de production ; aucun déchet relâché dans la nature depuis 2013 ; quant à leurs dalles, elles contiennent en général au moins 43% de matière recyclée ou issue de la biomasse. Interface agit donc pleinement sur le cycle de vie de leur produit.

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In fine What once was, par Dan McCarthyhttp://www.danmccarthy.org

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Biom' est édité par le Comité Français de Biomimicry Europa99 rue des Poissonniers 75018 Paris | www.biomimicry.eu | [email protected]

Directeur de publication : Tarik ChekchakResponsable rédactionnel et éditorial : Damien Dion

Comité de rédaction : Gauthier Chapelle, Tarik Chekchak, Damien Dion, Chloé Lequette, Kalina raskin

Conception graphique et maquette : Damien Dion et Chloé LequetteOnt collaboré à ce numéro :

Olivier Allard, Kenza Benkirane, Tarik Chekchak, Emmanuel Delannoy, Dan McCarthyMichka Mélo, Kalina raskin, Daniel rodary, Amandine de Schaetzen

visuel de couverture : Chloé Lequette

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Biomimicry Europa | www.biomimicr y.eu