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Appréciation de l’approche multicritère – M. Nussenbaum - AFFIC 28 01 14 – V 4 2 14 1 MATINALE AFFIC Le 28 JANVIER 2014 APPRECIATION DE L’APPROCHE MULTICRITERE Maurice NUSSENBAUM Professeur de Finance à l’Université Paris Dauphine Expert financier agréé par la Cour de Cassation Président de Sorgem Evaluation I- L’ORIGINE DE L'APPROCHE MULTICRITERES 1- Que signifie l’approche multicritères ? Elle consiste à évaluer l’entreprise en se référant simultanément à plusieurs critères ou méthodes différentes .La question est ensuite de savoir ce qu’on fait avec les résultats différents auxquelles ces méthodes peuvent conduire. Il existe deux solutions au problème : -soit établir une moyenne des résultats avec des pondérations appropriée -soit déterminer une valeur pertinente dans l’intervalle défini par les méthodes. La gestion est donc de savoir quel est l’éventail des méthodes admissibles et quelle est la signification d’une éventuelle pondération. 2- Il faut d’abord rappeler qu’à l’origine, l’approche multicritère a été définie sans pondération. On peut à cet égard, se référer à la doctrine telle qu’elle a été énoncée par la COB. Celle-ci avait élaboré une doctrine en matière d'évaluation dès 1977 sous la forme d'une recommandation publiée au bulletin mensuel de la C.O.B en juillet- août 1977 dans le cadre des évaluations réalisées par les commissaires à la fusion afin de déterminer les parités dans les fusions de sociétés cotées. Dans cette recommandation, la C.O.B. insistait sur la nécessité d'utiliser plusieurs critères d'évaluation mais indiquait que leur nombre ne devrait pas être excessif. Cet article est toujours valable dans le contexte de la détermination des parités de fusion. Les critères doivent de plus être réellement distincts et ne pas faire double emploi entre eux.

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Appréciation de l’approche multicritère – M. Nussenbaum - AFFIC 28 01 14 – V 4 2 14

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MATINALE AFFIC

Le 28 JANVIER 2014

APPRECIATION DE L’APPROCHE MULTICRITERE

Maurice NUSSENBAUM Professeur de Finance à l’Université Paris Dauphine

Expert financier agréé par la Cour de Cassation Président de Sorgem Evaluation

I- L’ORIGINE DE L'APPROCHE MULTICRITERES 1- Que signifie l’approche multicritères ?

Elle consiste à évaluer l’entreprise en se référant simultanément à plusieurs critères ou méthodes différentes .La question est ensuite de savoir ce qu’on fait avec les résultats différents auxquelles ces méthodes peuvent conduire.

Il existe deux solutions au problème : -soit établir une moyenne des résultats avec des pondérations appropriée -soit déterminer une valeur pertinente dans l’intervalle défini par les méthodes. La gestion est donc de savoir quel est l’éventail des méthodes admissibles et quelle est la signification d’une éventuelle pondération. 2- Il faut d’abord rappeler qu’à l’origine, l’approche multicritère a été définie sans

pondération. On peut à cet égard, se référer à la doctrine telle qu’elle a été énoncée par la COB. Celle-ci avait élaboré une doctrine en matière d'évaluation dès 1977 sous la forme d'une recommandation publiée au bulletin mensuel de la C.O.B en juillet- août 1977 dans le cadre des évaluations réalisées par les commissaires à la fusion afin de déterminer les parités dans les fusions de sociétés cotées. Dans cette recommandation, la C.O.B. insistait sur la nécessité d'utiliser plusieurs critères d'évaluation mais indiquait que leur nombre ne devrait pas être excessif. Cet article est toujours valable dans le contexte de la détermination des parités de fusion. Les critères doivent de plus être réellement distincts et ne pas faire double emploi entre eux.

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Dans la majorité des cas, précisait la COB, bénéfice brut, marge brute d'autofinancement et bénéfice net constituent sous des éclairages différents une seule et même approche. Les mêmes critères doivent être appliqués aux sociétés en cause et de manière homogène par les deux sociétés. Cette instruction précise même que l'emploi d'abattements forfaitaires, de moyenne, de ratios ou sauf justification pertinente, de coefficients de pondération est à écarter comme de nature à déformer l'appréciation des actionnaires. Il est préférable d'indiquer les résultats donnés par les critères retenus en déterminant la fourchette à l'intérieur de laquelle va se situer la parité. De plus le choix de celle- ci à l'intérieur de la fourchette doit être justifié. 3- Comment est arrivée la pondération ?

La pondération trouve son origine dans une exigence formulée par le conseil constitutionnel à propos des privatisations dans ses décisions des 25 et 26 juin 1986 dont les termes furent repris tant par la loi du 6 août 1986 sur les privatisations et par la loi du 31 décembre 1993 sur le retrait obligatoire. C'est à cette occasion que la pondération fait son entrée dans les règles de l'évaluation. L'autorité du conseil constitutionnel explique sans doute l'apparent consensus à propos de la pondération quant à son impérativité et son opportunité. C'est ainsi à propos des offres publiques de retrait obligatoire que le conseil des bourses de valeur a été amené dans le cadre de son article 5-2-7 du règlement général à se prononcer sur les méthodes d'évaluation à mettre en œuvre pour déterminer le prix offert aux actionnaires dans le cadre du retrait qui dans ce contexte avait un caractère d'ordre public puisque les actionnaires sont obligés d'apporter leur titre. Au départ, l’art 5-2-7 ne prévoyait pas la pondération mais c'est l'interprétation qui en a été donnée qui l’a introduite. En effet, dans sa formulation initiale, aucune indication n'était donnée sur la nécessité d'une éventuelle pondération des critères. Mais dans le cadre des offres publiques de retrait, le conseil a été amené à préciser la nécessité d'une pondération des critères. Cette interprétation précise que le prix doit être déterminé en fonction de critères d'évaluation objectifs, usuellement retenus, et des caractéristiques de la société visée c'est-à-dire selon une méthode d'évaluation multicritères appropriée . Elle a été précisée notamment par la jurisprudence. On citera en particulier l'arrêt relatif aux biscuits Poult de 1992 pour laquelle il est souligné clairement que le prix doit être déterminé à l’aide d’une appréciation multicritère de la valeur de la société selon les méthodes objectives pratiquées en cas de cession d'actifs prenant en compte selon une

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pondération appropriée à chaque cas , de la valeur boursière , de la valeur des actifs, des bénéfices réalisés, de l'existence de filiales, et des perspectives d'avenir. Est également précisé que ces critères ne sont pas exclusifs et que d'autres paramètres peuvent être utilisés et doivent être relativisés en fonction de la spécificité de chaque société. On a donc en fait assisté à un double glissement par rapport à l'esprit de la recommandation de 1977 de la COB : d'une part la multiplication du nombre des critères et leur pondération. C'était là le résultat de la mainmise des juristes sur la finance qui ont pensé apporter plus de sécurité en multipliant les critères et réduire l'arbitraire en les pondérant.

4- Que doit-on en penser ? Ce souci d'objectivité apparaît comme un leurre car toute évaluation d'entreprise suppose une hypothèse sur son avenir. L'Utilisation comme référence des seuls résultats passés n'échappe pas à cette règle puisqu'elle revient supposer que l'avenir sera au moins à la hauteur du passé ce qui dans certains cas s'avère non seulement optimiste mais tout aussi subjectif que les prévisions de résultats futurs. Dès lors que l'on multiplie le nombre des critères et que l'on adopte une pondération, on introduit une double subjectivité : celle du choix du nombre des critères et celle de leur pondération. Le recours à plusieurs critères donne le sentiment de limiter les risques d'erreurs mais ce sentiment est illusoire : soit on a une valeur de l'entreprise qui s'impose naturellement alors toutes les méthodes devraient converger, soit les différentes méthodes conduisent à des valeurs différentes, ce qui ne fait que révéler les différentes situations probables futures et les différents modes d'emploi des actifs par leurs acquéreurs éventuels1. La moyenne pondérée obtenue ne traduit alors qu'une moyenne entre des situations différentes non explicitées. Elle risque de ne représenter qu'une entreprise théorique sans réalité.

1 Ct. Notamment Marie-Anne Frison-Roche et Maurice Nussenbaum « Les Méthodes d’évaluation financière

dans les offres publiques de retrait et les retraits obligatoires : d’Avenir Havas Média à Sogénal - Juin 1995 -

Cahiers de Droit et de la finance – Revue de Droit bancaire et de la Bourse – N°48 – pp 56-69

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II- QUE PRECISE AUJOURD’HUI L'AMF (LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION NAULOT2) ?

1- Dans son rapport sur le renforcement de l'évaluation financière indépendante dans

le cadre des offres publiques et des rapprochements d'entreprises cotées à la suite du groupe de travail présidé par Jean Michel Naulot , l'AMF précise son analyse de l'approche multicritères.

Tout d'abord le groupe de travail réaffirme le principe de l'analyse multicritères, considérant qu'il s'agit d'un moyen privilégié pour éclairer le conseil d'administration d'une société visée par une offre publique et les actionnaires minoritaires sur les choix qu’ils doivent effectuer. Il faut rappeler que pour les évaluateurs professionnels, il n'existe que deux familles de méthodes d'évaluation : - des approches analogiques qui consistent à évaluer une entreprise par référence à des

entreprises comparables - et des approches intrinsèques qui consistent à déterminer la valeur de l'entreprise à partir

des éléments de rentabilité et le risque propre à celle-ci qui s'agisse des méthodes de flux de trésorerie, de flux dividendes ou -même dans certains cas d'actif net réévalué.

Le groupe de travail précise également qu'il faut se référer à des références de valorisation pour compléter l'analyse de l'évaluateur en la confrontant à des indicateurs de valeurs : – La valeur comptable des actifs – Le cours de bourse de l'entreprise – Les opérations significatives réalisées sur les titres objet de l'évaluation – Les cours cible

des analystes.

2 AMF « Pour un renforcement de l’évaluation financière indépendante dans le cadre des offres publiques et des

rapprochements d’entreprises cotées » - 2005 et recommandations AMF N°2006-15 – Expertise indépendante dans le cadre d’opérations financières – sept. 2006 modifiées le 19 oct. 2006 et 27 juillet 2010

Maurice Nussenbaum et Thierry Vassogne - Editions LITEC – 2009- Les attestations d’équité et expertise

indépendante – Ouvrage collectif sur les offres publiques

Maurice Nussenbaum - L’expertise Indépendante - Revue Actes Pratiques et Ingénierie sur « le retrait de la

cote » – N°130 – juillet/août 2013

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2- Dans ce contexte que signifie l'approche multicritères. Son exigence est précisée dans le rapport : L’Expert doit adopter une démarche multicritères qui le conduit à : – Mettre en œuvre, lorsqu'elles sont pertinentes les deux familles de méthodes définies ci-dessus. – Confronter les résultats obtenus aux références disponibles – Expliquer clairement la démarche qui l’a conduit à privilégier ou à exclure telle ou telle méthode ou référence par rapport à une autre.

3- On voit que le rapport, qui n’est pas très éloigné de l’esprit de la recommandation de 1977 n'évoque jamais la notion de pondération.

En effet, il s'agit de choisir l'approche qui va le mieux refléter la valeur des titres tels que l'expert la considère. Ce sont souvent des éléments contextuels qui vont conduire l'expert à privilégier telle ou telle approche en fonction du faisceau d'indices qu'il aura réunis au cours de l'analyse. Cette analyse devra de plus respecter les principes suivants : – Le principe d'examen critique, – Le principe de transparence, – Les principes de cohérence et de pertinence. En conséquence on note que l'approche multicritères doit être utilisée pour fournir des regards différents sur la valeur et l'expert ne doit pas se laisser enfermer par une pondération a priori. Il doit mais choisir dans l'éventail des valeurs obtenues celles qui lui paraît refléter le mieux les circonstances adéquates de l'évaluation.

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III- MAIS N’Y A-T-IL PAS UN RISQUE D’ARBITRAIRE DANS LA MISE EN ŒUVRE ? 1- Il est vraisemblable que la mise en œuvre des différentes méthodes va conduire à des

résultats différents mais il convient d'analyser les raisons des divergences :

À titre d'exemple : si la valeur obtenue par application d'un multiple au résultat d'une année donnée est supérieure à la valeur retenue par application d'un multiple au résultat d'une année antérieure, cela signifie que les résultats de la société à valoriser progressent plus rapidement entre ces deux années que ceux des sociétés du référentiel. A priori l'année la plus ancienne prend insuffisamment en compte le potentiel de croissance ou les perspectives de baisse du résultat et devrait donc être écartée au profit de l'application de la méthode au résultat prévisionnel. De même la valorisation par des multiples d'EBIT peut conduire à des résultats différents de la valorisation par des multiples d'EBITDA lorsque la société valorisée affiche des taux d'amortissement supérieur à ceux de l'échantillon de référence et vice versa. Que faut-il en déduire ? D'abord comprendre pourquoi le taux d'amortissement est différent entre la société à valoriser et celle du référentiel et s'interroger sur le caractère durable de cet écart. Dans tous les cas il convient donc de constituer un référentiel présentant une rentabilité opérationnelle et une intensité capitalistique aussi proche que possible de la société à valoriser, et de retraiter les éventuels éléments exceptionnels et non récurrents. De même on peut observer des différences entre les méthodes de multiples appliqués notamment à l’EBIT et les valeurs données par la méthode des DCF. Là encore il faut comprendre les raisons de ces différences. Il peut s'agir d'un problème de cohérence entre les perspectives de croissance de la société et du référentiel utilisé pour la méthode des multiples et le profil de croissance des flux utilisés dans la méthode du DCF. Ainsi une prévision de très forte croissance pourra pousser l'évaluateur à écarter les méthodes analogiques de multiples. Il peut aussi s'agir d'un problème de cohérence entre le niveau d'amortissement historique et les prévisions d'investissement de la société. On peut souvent voir des valorisations par la méthode des DCF gonflées par des prévisions d'investissement sous-estimées. Les investissements doivent être cohérents avec l'historique et avec les perspectives de croissance.

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De même on peut observer souvent des écarts entre les méthodes de flux du dividende actualisés et celle des discounted cash-flow. A priori les deux méthodes s'appuient sur des flux puisque la méthode des dividendes valorise directement les fonds propres de l'entreprise par la somme de tous les dividendes que l'entreprise va verser dans le futur jusqu'à l'infini actualisés au taux risqué. Dans le cas des discounted cash-flows il s'agit des flux futurs de cash-flow. Les différences vont résulter d'incohérences sur les hypothèses de distribution de dividendes, sur les taux d'actualisation retenus et les hypothèses sur l'endettement futur de la société. 2- Si on s'assure de la cohérence de ces paramètres entre les deux méthodes on devra

obtenir des valeurs très proches ou même équivalentes. S'il est à la fois fréquent et normal d'observer des écarts entre les méthodes analogiques par les multiples et les méthodes intrinsèques par les discounted cash-flow ou les dividendes, à l'intérieur de chaque famille de méthodes, les écarts doivent être expliqués par une analyse de la cohérence des paramètres utilisés. Entre les approches intrinsèques et analogiques, les écarts seront réduits si l'on parvient à déterminer un référentiel de sociétés comparables plus proche de la société à valoriser en terme de rentabilité, de structure financière, d'intensité capitalistique, et de perspectives de croissance. Ce référentiel servira à déterminer les multiples à appliquer dans les méthodes comparatives mais aussi les correctifs, par exemple pour définir les bêtas a appliquer pour définir les taux d'actualisation pour les méthodes de flux. Ainsi c'est surtout la rigueur méthodologique qui est nécessaire pour comprendre les écarts entre les résultats des méthodes et les réduire en prenant mieux en compte les spécificités de l'entreprise à évaluer. Ce n'est donc en aucun cas, la pondération des résultats obtenus qui permettra de résoudre l'incohérence apparente des valeurs.

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IV- UN RETOUR A LA THEORIE FINANCIERE : LA LOI DU PRIX UNIQUE. Y a-t-il une ou plusieurs valeurs pour un actif donné ?

1- Sur un marché concurrentiel deux actifs équivalents ont le même prix.

Si leurs prix sont différents, ils vont faire l'objet d'achat et de vente par un processus d'arbitrage de manière à ce que leurs prix deviennent identiques. Cette loi de l'unicité du prix constitue un principe fondamental d'évaluation en finance. Mais attention pour que les biens soient considérés comme identiques il faut qu'ils le se soient à tous égards et en particulier qu’ils soient disponibles dans un même lieu à un même moment. De ce fait pour déterminer le prix d'un actif on sera conduit à rechercher des actifs comparables dont on connaît le prix pour en déduire celui de l'actif qu'on évalue. C’est ce qu’on fait de manière courante en matière immobilière. Il existe toujours des différences mais ces différences ne sont pas nécessairement significatives et on peut apprécier leur incidence sur la valeur.

2- Même si l'arbitrage n'est pas parfait il peut toujours faire l'objet d’approximation.

C'est d'ailleurs parce que les actifs ne sont pas totalement identiques et que la loi du prix unique ne peut pas être mise en œuvre directement que l'on a recours à des modèles d'évaluation. Le type de modèle dépend de l'objet de l'évaluation : Notamment si on a ou non une influence sur la valeur future de l'actif acquis. Ainsi un actionnaire minoritaire ne valorise pas de la même manière l'entreprise qu'un actionnaire qui va faire une OPA et réorganiser l'entreprise. Souvent la pluralité des méthodes va s'imposer, chacune d'elles traduisant une perspective différente quant à l'utilisation des actifs. La méthode des DCF est la mieux à même de rendre compte de la valeur que l'acquéreur va donner à l'actif dont il veut prendre le contrôle. La référence à des valeurs de marché correspond le mieux à celle que recherche un vendeur.

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3- Peut-il y avoir rencontre entre le prix observé sur le marché et la valeur

fondamentale d'un actif ?3

Pour cela il faut que le marché tienne compte de toutes les informations disponibles concernant les facteurs fondamentaux susceptibles d'affecter la valeur future de l'actif. C'est justement hypothèse d'efficience des marchés dont on sait qu'elle n'est jamais totalement réalisée. Les prix des actifs côtés reflètent toute l'information disponible sur les déterminants fondamentaux de leur valeur. En fait le prix de marché des actifs côté reflète la moyenne pondérée des opinions des analystes avec des pondérations qui sont fonction de l'importance des actifs détenus et la qualité de leurs informations elles-mêmes appréhendées par la force de leurs opinions. Ce sont d'ailleurs les analystes qui ont les opinions les plus fortes qui pensent disposer des meilleures informations. Les analystes sont eux-mêmes sélectionnés par le marché et ceux à qui sont confiées les plus grandes quantités d'actifs sont souvent ceux qui ont les opinions qui ont le plus influence sur le prix de marché.

3 Maurice Nussenbaum - Valeur et Prix - Mélanges AEDBF – Novembre 2013

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V- ET L'APPROCHE DE L'ADMINISTRATION FISCALE ? Le préambule du guide précise que « L’administration veille à recourir aux méthodes

d’évaluation les mieux adaptées et à utiliser l’ensemble des informations à sa disposition

pour parvenir à une estimation la plus fine et la plus complète possible. Ce guide n’a donc

pas pour objet de fournir des formules de calcul mécaniquement applicables mais bien une

ligne de conduite plus large …»

1- Cette approche répond à différents types de contraintes pour l’Administration

– Réduire autant que possible le caractère arbitraire et spéculatif de l'évaluation d'où la réticence à s'appuyer sur des prévisions qui par nature ne sont pas contrôlables et permettre à l’usager de connaitre les principes et méthodes de l’administration fiscale,

– Rendre le plus automatique possible le travail de l'inspecteur pour lui conférer le maximum d'objectivité apparente.

En partant de ces contraintes il n'est pas étonnant que l'administration ait mis en avant le principe de la pondération tel qu'il avait été défini par le conseil constitutionnel dans le cadre des privatisations. Il s'agissait là aussi d'avoir un maximum d'objectivité apparente tout au moins par rapport à des critères juridiques.

2- C'est en partant de ces préoccupations que l'administration va définir les principes qu’elle affiche dans le guide de l'évaluation des entreprises publié par la direction générale des impôts en novembre 1006.

Elle rappelle tout d'abord que la valeur vénale est celle qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande dans un marché réel. C'est ainsi que l'administration ne recherche pas une valeur de détention mais cherche à cerner une valeur vénale c'est à dire une valeur de transmission et donc va prendre en compte les circonstances objectives qui peuvent affecter la libre cessibilité du bien à évaluer. Ce faisant elle s'inspire de la loi du prix unique indiquée précédemment puisque cette recherche de la valeur vénale va conduire à privilégier la méthode par comparaison puisqu'elle sous-tend l'observation du marché.

3- Cependant comme elle reconnaît que cette méthode est difficile à mettre en œuvre en pratique elle va de ce fait se reporter sur d'autres approches :

- l'approche patrimoniale qui vise à cerner et valoriser le patrimoine de l'entreprise. - et l'approche fondée sur la rentabilité dégagée par entreprise qui fait appel à différents

flux financiers ou économiques.

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Il s'agit donc des méthodes de productivité déterminée à partir du bénéfice, de la valeur de rendement à partir du dividende distribué et la marge brute d'autofinancement. D'autres méthodes de rentabilité peuvent également être mises en œuvre à partir de l'EBE ou du résultat d'exploitation. Elle évoque également la méthode de la survaleur qui associe une approche patrimoniale et une approche de rentabilité. Il s'agit donc d'une méthode un peu bâtarde puisque la méthode de rentabilité fait double emploi avec les approches reposant strictement sur la rentabilité.

4- L'Administration évoque également dans son guide la méthode des cash-flows actualisés.

Elle indique cependant qu'elle n'est pas en mesure de la mettre en œuvre directement car il ne lui revient pas d'établir des plans d'affaires car ceux-ci reposent sur des données prévisionnelles. Mais lorsque cette méthode est proposée, elle l'examine et éventuellement l'utilise pour affiner les résultats obtenus avec d'autres méthodes. Aussi l'évaluateur doit-il être en mesure d'apprécier la cohérence entre les flux futurs retenus et le taux d'actualisation utilisé.

5- La pondération par l'Administration fiscale Le guide présente ensuite des tableaux de pondération qui sont proposés, indique-t-il à titre purement indicatif. Ces tableaux proposent des pondérations des deux familles de méthodes : valeur mathématique et valeur de rentabilité, principalement en fonction, d'une part de la taille de l'entreprise, de son objet commercial ou industriel ou encore de son caractère de holding et également en fonction de la taille du bloc évalué qu'il s'agisse d'un paquet majoritaire ou minoritaire. Il apparaît ainsi que la valeur mathématique est privilégiée pour les petites entreprises et pour les holdings patrimoniaux et pour les paquets majoritaires par rapport aux paquets minoritaires. Dans le cas des grandes entreprises ce sera plutôt la valeur de rentabilité qui sera mise en avant ainsi que pour les paquets minoritaires. Que penser de cette approche de pondération ? Tout ce qui précède permet de conclure à son caractère tout à fait irréaliste et inadapté par rapport à la pratique professionnelle de l'évaluation. Il en résulte des difficultés entre les sociétés contrôlées et l'administration.

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Malheureusement le guide n'est pas toujours d'un usage aisé pour réduire ces conflits. Gardons cependant à l'esprit quelques principes de bases fondamentaux : -l'administration privilégie les comparables, mais uniquement français. Cette approche analogique est même obligatoire en cas de contestation de l'évaluation par l'administration. -Par ailleurs la méthode d'évaluation par excellence retenue par les professionnels, à savoir les discounted cash flows n'est généralement pas acceptée par l'administration sauf lorsque le business est suffisamment stable pour accorder une grande fiabilité aux prévisions. Mais attention aux discussions sur les taux d'actualisation pour lesquels l'administration peut retenir des options pas nécessairement favorables au contribuable.