les ‘’worosworos’’ a cocody (abidjan-cote...
Post on 11-Sep-2018
256 Views
Preview:
TRANSCRIPT
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5- Oct. 2016, Vol. 2 201
LES ‘’WOROSWOROS’’ A COCODY (ABIDJAN-COTE
D’IVOIRE): ENTRE REPOSITIONNEMENT DE
POUVOIRS PUBLICS ET PÉRENNISATION DU
DÉSORDRE URBAIN
DINDJI Médé Roger1, BROU Emile Koffi
2 et BOHOUSSOU Séraphin
2
1Université de Korhogo / Labo VST, Côte d’Ivoire, E-mail : dindjiroger@gmail.com 2Université de Bouaké / Labo VST, Côte d’Ivoire, E-mail : koffi_brou@yahoo.fr et
bohounse@yahoo.fr
RESUME
Abidjan, 1er pôle économique de la Côte d’Ivoire, compte plus de trois
millions d’habitants. Pour répondre à sa fonction de transport, l’Etat a créé, en 1963,
la société des transports abidjanais (SOTRA). Mais, très vite, cette société est
débordée, puisque son parc automobile ne peut répondre aux besoins d’une
population en perpétuelle croissance. D’où l’émergence et la consolidation des
transports sociocollectifs (gbakas et wôrôswôrôs) dans les communes d’Abidjan
dont Cocody. Cette commune est desservie par un réseau de 19 lignes de transports
socio collectifs. Le fonctionnement d’un wôrôswôrôs exige son identification à la
municipalité. À la réalité, les organisations syndicales de chauffeurs et de
propriétaires sont les véritables maîtres du jeu, puisqu’elles perçoivent régulièrement
des « taxes informelles » dans les gares et points de stationnement. Cependant, en
décembre 2014, la municipalité a mis fin à cette hégémonie en supprimant les gares
sur son territoire. Elle décide finalement de prendre le jeu en main. Malgré tout, le
désordre urbain lié au transport demeure, notamment la transformation de trottoirs
en gares et points de stationnement.
Les résultats de cet article s’appuient sur une documentation, des
observations et des enquêtes de terrain menées depuis 2011. S’appuyant sur la
méthode ci-dessus, cette réflexion analyse la politique municipale liée aux
wôrôswôrôs en mettant en exergue les rôles assignés à chaque acteur d’une part et,
l’impact de cette politique sur l’environnement spatio-économique dans la commune
d’autre part.
Mots clefs : wôrôswôrôs, municipalité, organisation syndicale, désordre urbain,
Cocody.
LES ‘’WOROSWOROS’’ A COCODY (ABIDJAN-COTE D’IVOIRE): ENTRE
REPOSITIONNEMENT DE POUVOIRS PUBLICS ET PÉRENNISATION DU
DÉSORDRE URBAIN
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5- Oct. 2016, Vol. 2 202
ABSTRACT
The worosworos at cocody (abidjan-cote d'ivoire): between repositioning of
public authorities and perennisation of the urban disorder
Abidjan, first economic center of the Ivory Coast, has over three million
inhabitants. To meet its transport function, the state created in 1963, the
Abidjan Transport company (SOTRA). But soon, this company is
overwhelmed, since his fleet can’t meet the needs of a constantly population
growth. Hence the emergence and consolidation of socio collective transport
(gbakas and wôrôswôrôs) in the municipalities of Abidjan Cocody that. This
town is served by a network of 19 lines of collective socio transport. The
work of a wôrôswôrôs requires its identification at the municipality. In
reality, the trade unions of drivers and owners are the real masters of the
game, since they regularly receive "informal taxes" in the stations and
parking points. However, in December 2014, the municipality has ended this
hegemony by removing the stations on its territory. It finally decides to take
the game in hand. However, the urban disorder linked to transport remains,
including the transformation of sidewalks in stations and parking points.
The results of this paper are based on documentation, observations and field
surveys conducted since 2011. Based on the above method, this reflection
analyzes the municipal policy related to wôrôswôrôs highlighting the roles
assigned to each actor on the one hand and the impact of this policy on the
spatial and economic environment in the other town.
Keywords: worosworos, municipality, union, urban disorder, Cocody.
INTRODUCTION
Abidjan, 1er
pôle économique et démographique de la Côte d’Ivoire,
compte au moins 3 millions d’habitants (avant le début des crises socio
politiques en 2002), soit près de 20 % de la population totale de ce pays. La
ville s’est urbanisée avec le temps, suivant un schéma basé sur une répartition
des espaces autours de trois fonctions majeures : administrative, industrielle,
commerciale et résidentielle. En outre, la forte croissance de la population
urbaine (4 % en moyenne par an), le déséquilibre spatial important entre
logements et emplois, l’extension rapide de la ville et la spécialisation de
l’espace urbain, constituent les facteurs traditionnels d’une demande
DINDJI Médé Roger, BROU Emile Koffi et BOHOUSSOU Séraphin
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5, Oct. 2016, Vol. 2 203
soutenue de déplacements. Ils induisent un accroissement des distances de
transport. Pour répondre à la fonction de transport de la ville d’Abidjan,
l’Etat crée en 1963, la société des transports abidjanais (SOTRA). Ainsi, la
convention de concession de service public signé entre l’Etat ivoirien et la
SOTRA accorde à cette entreprise l’exclusivité de transport en commun de
voyageurs dans la ville d’Abidjan. Elle prévoie également la suppression des
fourgonnettes et des autres modes de transport public, à l’exclusion des taxis-
compteurs qui recevaient des compensations sous forme d’autorisation pour
l’exploitation du service de transport public (Aka, 2006). Mais, très vite, cette
société est débordée, puisque son potentiel en bus ne peut répondre aux
besoins d’une population en perpétuelle croissance. D’où l’émergence et la
consolidation des transports socio collectifs à Abidjan dans la décennie 1990,
notamment les wôrôswôrôs. Les wôrôswôrôs1 ou taxis communaux, confinés
au départ dans les quartiers périphériques de cette ville, ont pris de l’ampleur
au fil des ans (Aka, 2006). Ils se sont « imposés » dans d’autres communes
centrales y compris Cocody. Située au Nord-est d’Abidjan (cf. carte 1 ci-
dessous), cette commune est desservie par un grand réseau de 19 lignes de
transports socio collectifs (nos enquêtes, 2013).
Dans la commune, le fonctionnement d’un wôrôswôrôs exige de son
propriétaire le paiement de frais de stationnement à la municipalité. Mais, à la
réalité, l’union des fédérations des syndicats de chauffeurs de Cocody
(UFESC-CO) et le collectif des syndicats des transporteurs de Cocody
(CSTC) sont les véritables maîtres du jeu (Dindji, 2014). Les syndicats
affiliés à ces deux organisations perçoivent régulièrement des « taxes
informelles » dans les gares et points de stationnement de la commune.
Cependant, en décembre 2014, la municipalité a supprimé gares et points de
stationnement sur tout son territoire. Elle décide finalement de prendre le
« jeu » en main. Du coup, les syndicats sont privés de leurs principales
sources de financement. Mais, le désordre dans le transport n’a pas pris fin.
En effet, plusieurs problèmes demeurent, notamment la transformation de
trottoirs en gares et points de stationnement. Dès lors, ces interrogations
trouvent leur raison d’être : Pourquoi malgré la suppression des gares par la
municipalité, le désordre lié à l’activité des wôrôswôrôs persiste dans la
commune ? Quels sont les rôles assignés aux principaux acteurs du transport
socio-collectif par la municipalité ?
1Il convient de préciser qu’il existe deux types de wôrôswôrôs à Abidjan : les (1)
taxis communaux et les (2) taxis inter communaux. Les taxis communaux desservent
à l’intérieur d’une même commune. Tandis que les seconds assurent la mobilité de
personnes d’une commune à une autre. Cet article porte principalement sur le
fonctionnement des taxis communaux dans la commune de Cocody.
LES ‘’WOROSWOROS’’ A COCODY (ABIDJAN-COTE D’IVOIRE): ENTRE
REPOSITIONNEMENT DE POUVOIRS PUBLICS ET PÉRENNISATION DU
DÉSORDRE URBAIN
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5- Oct. 2016, Vol. 2 204
Cette réflexion a donc pour finalité d’analyser la politique municipale
des transports vis-à-vis des wôrôswôrôs à Cocody. Sur le plan
méthodologique, l’étude combine les deux approches : qualitative et
quantitative. Elle s’appuie sur des données d’enquêtes et des observations de
terrain menées depuis 2011. Elle s’articule autour des points suivants. Elle
analyse, d’abord l’organisation fonctionnelle des wôrôswôrôs à Cocody de
1990 à décembre 2014. Ensuite, elle cherche à comprendre la nouvelle vision
du transport municipale vis-à-vis des wôrôswôrôs depuis décembre 2014.
Pour finir, elle évalue l’impact du fonctionnement actuel des wôrôswôrôs sur
l’environnement spatio-économique de Cocody depuis décembre 2014.
Carte 1 : Localisation de la commune de Cocody dans la ville d'Abidjan
DINDJI Médé Roger, BROU Emile Koffi et BOHOUSSOU Séraphin
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5, Oct. 2016, Vol. 2 205
1. ORGANISATION FONCTIONNELLE DES WÔRÔSWÔRÔS À
COCODY DE 1990 À DÉCEMBRE 2014
L’exercice d’un wôrôswôrôs dans la commune de Cocody exige à son
propriétaire une démarche précise. Celle-ci consiste à l’identification de son
véhicule auprès des entités majeures impliquées dans l’organisation et le
fonctionnement des transports socio collectifs à Cocody. Il s’agit de la
mairie, l’Etat (les impôts), le CSTC et l’UFESC-CO. L’identification à la
mairie comporte plusieurs étapes dont l’enregistrement.
LES ‘’WOROSWOROS’’ A COCODY (ABIDJAN-COTE D’IVOIRE): ENTRE
REPOSITIONNEMENT DE POUVOIRS PUBLICS ET PÉRENNISATION DU
DÉSORDRE URBAIN
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5- Oct. 2016, Vol. 2 206
À ce stade, le propriétaire fournit la photocopie de sa carte d’identité
et son registre de commerce. À cela, s’ajoute la présentation des pièces du
véhicule, à savoir la carte grise, l’assurance taxi, la patente et la visite
technique datant de moins de six mois. Il précise également aux autorités la
ligne souhaitée pour son auto. Son véhicule doit être peint en jaune2, la
couleur réservée aux wôrôswôrôs de Cocody. Ensuite, il paie les frais de
stationnement ou frais d’identification dont le coût s’élève à 45 000 FCFA.
En retour, l’autorité municipale lui délivre les documents attestant sont
identification : une carte de stationnement (qui coûte 35 000 FCFA), une
autorisation de transport, une paire de macaron. Les macarons sont collés sur
les deux portières avant du véhicule. Il reçoit également une antenne pour
laquelle il débourse la somme de 25 000 FCFA. Celle-ci est posée sur la
toiture du véhicule. L’identification du propriétaire auprès des services des
impôts revient au paiement de la vignette professionnelle. Son coût oscille
entre 25 000 et 30 000 FCFA, selon la puissance fiscale du véhicule. Le
propriétaire du véhicule y paie également la patente dont le coût s’élève à
135 000 FCFA. Après l’identification à la mairie et aux impôts vient celle du
CSTC.
Le propriétaire y paie un droit d’exploitation de ligne dont le coût
s’élève à 58 000 FCFA (sur les lignes jaunes) et 61 000 FCFA (sur les lignes
« inter3 » et les « sans couleurs
4 »). Le dossier d’identification à l’UFESC-
CO renferme les mêmes documents que celui présenté à la mairie, y compris
une photo et la copie du permis de conduire du chauffeur. Il paie 1 500 FCFA
comme frais de dossier. Après, il lui est établit une carte de membre. Le
propriétaire y paie également d’autres frais dont le macaron de l’UFESC-CO
(500 FCFA) et la « tenue chauffeur » (4 000 FCFA). Il s’agit d’une chemise
que le syndicat fait porter à tous ses adhérents/syndiqués, notamment les
chauffeurs. Elle est faite en vert et blanc, les couleurs de cette organisation.
Le macaron collé sur la poche de la chemise comporte des informations
essentielles du chauffeur (numéro d’immatriculation à l’UFESC-CO) et de
son véhicule (l’immatriculation). Pour cette fédération syndicale ce projet
vise principalement deux objectifs. D’abord, les chauffeurs font
2Une couleur est réservée aux taxis communaux par commune. Les couleurs sont les
suivantes : Port-Bouët (jaune), Koumassi (vert), Marcory (bleu), Cocody (jaune),
Yopougon (vert), Abobo (orange), Adjamé (sans couleurs). 3Une façon pratique de dire ligne de wôrôswôrôs inter communaux. 4L’une de leur caractéristique des wôrôswôrôs intercommunaux, c’est qu’ils n’ont
pas de couleurs précises. Dans le langage des transporteurs, ils sont dits « sans
couleurs ». N’empêche que certains, taxis communaux sont sans couleurs. Très
souvent, il s’agit de nouvelles lignes.
DINDJI Médé Roger, BROU Emile Koffi et BOHOUSSOU Séraphin
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5, Oct. 2016, Vol. 2 207
quotidiennement la promotion de leur organisation. Enfin, les
usagers/passagers sont rassurés. Ainsi, devant toutes situations (disputes avec
les forces de l’ordre, plaintes de clients, pertes de bagages, etc.) il est facile
de mettre la main sur le chauffeur. Cependant, de nos enquêtes, il ressort que
les chauffeurs/syndiqués dans leur majorité ne portent pas cette tenue. La
réponse est donnée par Zouhoula Bi (2010). Pour lui contrairement aux
coutumes syndicales, l’adhésion à la corporation des transporteurs n’est pas
volontaire. La qualité de chauffeur confère automatiquement le statut de
syndiqué. Comprenons que sur cette période aucun wôrôswôrôs ne pouvait
exercer à Cocody sans une identification au CSTC et à l’UFESC-CO.
Autrement dit, il ne s’agit pas d’une adhésion (syndicale) forcément voulue.
D’où la négligence de la tenue chauffeur proposé.
Par ailleurs, cette identification/enregistrement signifie que le
propriétaire et son chauffeur acceptent les conditions de cette association.
Devenus donc des syndiqués, ils s’engagent à s’acquitter des différentes taxes
auxquelles ils seront soumis sur le terrain, notamment dans les gares5 de la
commune. Quels commentaires pouvons-nous faire du tableau I ci-dessous ?
De nos enquêtes, nous retenons qu’il n’y a pas d’ordre institutionnel dans
l’identification ou l’obtention d’autorisation auprès des principaux acteurs
impliqués dans le fonctionnement des taxis communaux à Cocody. Du moins,
l’ordre institutionnel n’est pas respecté.
Cependant, avant l’exécution d’un projet d’exploitation d’un véhicule à des
fins commerciales, le propriétaire veille à l’obtention de pièces : carte grise,
patente, assurance, etc. Si donc l’ordre institutionnel est ignoré, c’est que la
municipalité ne vient pas forcément en premier dans l’octroi des autorisations
d’exploitation d’un véhicule comme wôrôswôrôs.
D’ailleurs, sur la période (1990-décembre 2014), la réalité est la suivante.
D’abord, le wôrôswôrôs commence à travailler avant son
identification/enregistrement auprès des autorités institutionnelles (mairie,
impôt). Ensuite, le propriétaire fait le choix de déclarer son véhicule à la
mairie et aux impôts. Enfin, il y a la déclaration sous contrainte. Elle
intervient, lorsque le chauffeur, épinglé par les contrôleurs du service
transport de la mairie, sa voiture est mise en fourrière. D’où la contrainte.
Après régularisation, la voiture sort de fourrière et le chauffeur exerce son
activité librement dans la commune.
5 Dans le milieu des transports socio collectifs, c’est un site d’embarquement de
passagers d’un point de départ vers un point d’arrivée ; sous la supervision de
représentants de syndicats (chauffeurs ou propriétaires). Sur cette période, seule la
gare de l’espace Saint Jean était reconnue comme telle par la municipalité. Ce qui
n’est pas le cas pour les « transporteurs ».
LES ‘’WOROSWOROS’’ A COCODY (ABIDJAN-COTE D’IVOIRE): ENTRE
REPOSITIONNEMENT DE POUVOIRS PUBLICS ET PÉRENNISATION DU
DÉSORDRE URBAIN
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5- Oct. 2016, Vol. 2 208
Aussi, entre les deux fédérations syndicales, le collectif des propriétaires
détient plus d’autorité. En fait, c’est l’entité qui autorise la mise en activité
d’un taxi communal.
Tableau I : synthèse du processus de mise en circulation d’un wôrôswôrôs à
Cocody de 1990 à décembre 2014
Pouvoirs
publics
Documents présentés par
le propriétaire du véhicule
Documents
proposés par la
mairie
Coût de
réalisation
(FCFA)
Indicateurs de
vérification
Mairie
Copie CNI, registre de
commerce, carte grise,
assurance taxi, patente,
visite technique,
proposition de ligne
Paire de
macaron,
antenne
45 000
Carte de
stationnement,
autorisation de
transport, voiture
peinte aux couleurs
de la commune
Etat (impôts)
Copie CNI, Permis de
conduire chauffeur,
assurance taxi
Vignette
professionnelle,
patente
162 500
Macaron, carte
CSTC
Néant Droit de ligne 58 000 ou
61 000
Intégration
d’une ligne
UFESC-CO
Copie CNI, registre de
commerce, carte grise,
assurance taxi, patente,
visite technique,
proposition de ligne,
permis de conduire
(chauffeur)
2 000
Macaron,
tenue-chauffeur
Source : nos enquêtes de terrain, 2014
Ce propos est confirmé par le droit de ligne (58 000 ou 61 000 FCFA)
qu’elle encaisse. Or, le paiement de ce droit est synonyme d’autorisation de
circuler. Dans le tableau I, l’UFESC-CO n’encaisse pas grande chose (2 000
FCFA). Mais, au-delà, elle ne fait que l’enregistrement du chauffeur, puisque
l’essentiel a été accordé par le collectif des propriétaires.
Par ailleurs, l’organisation fonctionnelle ou la régulation de l’activité des
taxis communaux dans les gares relève de la compétence de plusieurs
acteurs : un chef de gare, deux représentants du collectif des transporteurs, un
représentant de l’UFESC-CO et les chauffeurs. Le chef de gare ne joue pas
un rôle particulier, sauf qu’il est reconnu comme le propriétaire du site, c'est-
à-dire la gare. Par conséquent, des taxes (non officielles) lui sont versées par
les chauffeurs de wôrôswôrôs, puisqu’ils exploitent son site6.
6 Généralement, il s’agit de la personne qui découvre l’espace qui devient la gare.
Les frais qu’il perçoit sont une sorte de reconnaissance à son endroit.
DINDJI Médé Roger, BROU Emile Koffi et BOHOUSSOU Séraphin
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5, Oct. 2016, Vol. 2 209
Quant aux représentants du collectif des transporteurs (CSTC), l’organisation
journalière du travail est de leur ressort. Ils organisent les entrées et départs
des véhicules. Le représentant de l’UFESC-CO représente son organisation
syndicale à la gare d’une part et, encaisse la taxe journalière payée par tous
les chauffeurs/syndiqués de son association d’autre part.
En effet, chaque jour, tous les chauffeurs wôrôswôrôs payent 700 FCFA
comme frais (taxes) d’exploitation permanente de ligne. Trois indicateurs
sont pris en compte : UFESC-CO (200f), CSTC (200f) et ticket chauffeur
(300f). Ici, le ticket chauffeur représente une synthèse des frais de
chargement. Dans le fonctionnement des transports socio collectifs, une fois
qu’un véhicule quitte la gare, son chauffeur paie des frais de chargement. Le
coût est de 10% du montant du chargement (Brou, 2008). À Cocody, ces frais
sont pris en compte dans les frais ou taxe d’exploitation journalière.
Cependant, sur les 700f la répartition est la suivante : 250f pour la caisse de
l’UFESC-CO et 450f pour le CSTC.
Quant à la municipalité, elle perçoit une taxe de stationnement. En fait, c’est
la taxe perçue par l’autorité municipale sur toutes les activités liées aux
transports dans la commune. Elle se paie tous les trois mois. Son coût s’élève
à 13 500 FCFA/trimestre, soit 4 500 f/mois et 150 f/jour. Ce mode de
paiement (trimestriel) a été instauré seulement depuis 2009. Il a été adopté
pour plusieurs raisons. La première, c’est que la municipalité accorde un
mois aux contribuables pour le paiement de leurs redevances. La seconde
raison, c’est que les services transports de la mairie disposent de deux mois
pour le contrôle du paiement par les contribuables. Dès lors, le contrôle
devient moins coûteux pour elle. De plus, les situations de détournements
sont plus évitées (mairie de Cocody, 2011). Sur cette période, la création des
gares et des lignes de desserte résultent de la communication de trois entités :
les populations, la municipalité et les transporteurs. Qu’est ce à dire ?
Les populations, en cas de besoin, l’expriment à la municipalité locale
ou aux transporteurs de leur zone d’habitation. À l’issue de leurs plaidoyers,
plusieurs lignes ont été ouvertes : Riviera-Angré, Cocody-Angré et Cocody-
Gobelet. Une fois sollicitée, la municipalité a recours au syndicat des
chauffeurs pour la satisfaction des besoins des populations. Cependant,
l’initiative peut venir de l’UFESC-CO elle-même. Lorsqu’elle constate un
besoin dans le périmètre de la commune, elle prend l’initiative de créer une
ligne pour faciliter la mobilité des personnes et de leurs biens. Lors de nos
enquêtes, nous avons pu recueillir ces données : 12 gares, 27 lignes de
dessertes et 42 points de stationnements. Tous (gares et points de
stationnement) sont greffés aux principales voies de la commune (cf. carte2).
Finalement, ils se confondent aux différents carrefours. Il convient de
préciser que certaines données recueillies sur le terrain ne coïncideraient pas
avec celles recueillies lors de nos entretiens avec les organisations syndicales.
LES ‘’WOROSWOROS’’ A COCODY (ABIDJAN-COTE D’IVOIRE): ENTRE
REPOSITIONNEMENT DE POUVOIRS PUBLICS ET PÉRENNISATION DU
DÉSORDRE URBAIN
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5- Oct. 2016, Vol. 2 210
Nous avons dénombré 27 lignes contre 19 pour les syndicats de transporteurs
de la commune. L’explication nous est donnée par Koffi N. de l’UFESC-CO.
Pour ce faire, il s’est appuyé sur l’exemple de la ligne Cocody centre-Angré.
Cette ligne rallie la gare saint Jean, située à Cocody-centre (départ) au
quartier Angré (destination finale), au Nord de la commune. Le wôrôswôrôs
qui part de saint Jean, une fois à Angré peut prendre trois directions : aller
soit à Angré Mahou/station Mobil à partir du 22ème
arrondissement, soit à
Angré château, soit à Angré terminus des bus 81 et 82. Pour les transporteurs,
il s’agit d’une seule ligne. Ce qui n’a pas été le cas pour nous. La même
situation se présente sur des lignes à la gare Palmeraie. L’important à retenir,
c’est la grande implication des wôrôswôrôs dans le déplacement des
populations locales, à travers un réseau d’au moins 19 lignes de desserte (cf.
carte 2).
En outre, abordant dans le même sens, Kassi (2007) estime plutôt que les
lignes des transports populaires (wôrôswôrôs et gbakas) naissent
généralement de quatre situations. Premièrement, une ligne naît en principe
de l’absence totale de desserte de bus. Ces types de transport, constituent de
ce fait les seuls moyens collectifs disponibles pour les déplacements des
habitants d’une telle zone. Deuxièmement, elle peut naître également d’une
insuffisance des bus à assurer une liaison parfaite entre les quartiers d’une
même commune ou entre des communes. Troisièmement, elle peut naître
aussi pour raccourcir le temps et la distance de parcours d’un itinéraire
d’autobus. Enfin, une ligne peut naître à la demande des travailleurs d’une
zone d’emploi. Insuffisamment desservis par les autobus, certains bassins
d’emploi demeurent difficilement accessibles pour les travailleurs qui
expriment des besoins aux transporteurs privés. Sur ce point, nos assertions
ne sont pas diamétralement opposées. Toutefois, notre classification s’est
basée sur l’implication directe de ces trois acteurs (mairie, transporteurs et
populations) dans la création de gares et de lignes de desserte des
wôrôswôrôs à Cocody.
La gestion d’une gare renferme trois réalités : l’hygiène et la salubrité,
la sécurité, et la programmation des départs des véhicules une fois en gare.
Cette gestion relève de la responsabilité exclusive des « transporteurs7 » eux-
mêmes. Il en est de même pour les tarifs par lignes. Ils donnent les tarifs en
se référant aux indicateurs suivants : le coût des pièces automobiles, le coût
7Pour nous, cette notion se rapporte à tous les acteurs qui pratiquent et vivent du
transport socio collectif à Abidjan. Il s’agit entre autre de chefs de gares, syndicats
de propriétaires et de chauffeurs, chauffeurs et gnambros, etc. Dans le contexte
actuel, ils sont opposés à la municipalité.
DINDJI Médé Roger, BROU Emile Koffi et BOHOUSSOU Séraphin
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5, Oct. 2016, Vol. 2 211
du carburant, le coût des pièces administratives (patentes, vignettes, etc.), la
distance (ou le kilométrage) des points desservis et l’état de la voirie. Sur
cette période, pour le bon fonctionnement du transport communal, la
municipalité a mis sur pied un comité de réflexion multipartite. Il comprend
le maire (ou son représentant), un représentant du district d’Abidjan et deux
membres de chaque syndicat. Ce comité se rencontre en séance
extraordinaire. Il s’agit, en effet, d’un cadre formel de réflexion pour
anticiper sur les crises du transport dans la commune. Pour la conception du
tableau II ci-dessous, nous avons eu recours au schéma8 de Meite (2014). Il y
fait l’inventaire des parties prenantes au transport urbain à Abidjan. Il en a
identifié 15 contre 08 pour nous.
Tableau II : synthèse des acteurs impliqués dans le transport à Cocody de
1990 à décembre 2014
Acteurs
Fondements juridiques
Territoires/zones de
compétences
Commune de Cocody Décrets, lois de la
décentralisation
Territoire communal
Syndicats de
transporteurs
Autorisation de la commune Gares, points de
stationnement
SOTRA Convention de concession de
service public signée avec
l’Etat
Territoire du district
d’Abidjan
Taxis compteurs Autorisation de l’Etat Territoire du district
d’Abidjan
Minibus gbakas Autorisation de transporteurs Village de Cocody,
commues de Yopougon,
Abobo, Anyama et
Bingerville
Wôrôswôrôs Autorisation de la commune et
de transporteurs
Cocody, ville d’Abidjan
Commerçants Autorisation de transporteurs Gares et points de
stationnement
Usagers/populations Décrets et lois de l’Etat Territoires du district
Source : nos enquêtes (2014) inspirées de la thèse de MEITE (2014, p. 105)
Les parties prenantes ou acteurs que nous avons omis sont les
suivantes : Etat, l’agence des transports urbains (AGETU), District
d’Abidjan, bailleurs de fonds, associations d’usagers, forces de l’ordre
(police et gendarmerie) et riverains. Ils sont 07 et ont forcément un impact
sur le transport à Cocody. Toutefois, au niveau local, leurs fortes implications
8Il s’est lui-même appuyé sur la théorie du modèle de Freeman (1984, p .55).
LES ‘’WOROSWOROS’’ A COCODY (ABIDJAN-COTE D’IVOIRE): ENTRE
REPOSITIONNEMENT DE POUVOIRS PUBLICS ET PÉRENNISATION DU
DÉSORDRE URBAIN
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5- Oct. 2016, Vol. 2 212
s’incrustent au travers certains acteurs que nous avons pris en compte. Ainsi,
la commune de Cocody rassemble à elle seule toutes les institutions en
charge de l’organisation et de la régulation du transport. Il s’agit entre autre
de l’Etat, l’AGETU, le district d’Abidjan, les bailleurs de fonds
(internationaux ou nationaux) et les forces de l’ordre (police et gendarmerie).
Dans le tableau II, syndicats de transporteurs, SOTRA, taxis compteurs,
minibus gbakas et wôrôswôrôs renvoient aux opérateurs de transports. Ils
sont de deux ordres. Ceux qui sont reconnus (SOTRA et taxis compteurs) et
ceux qui ne le sont pas (wôrôswôrôs et gbakas). Certains auteurs les ont
nommé transports informels. Pourtant, leur action couvre tout le périmètre du
district d’Abidjan.
Enfin, les commerçants, les usagers/populations peuvent être considérés
comme d’autres acteurs. À ce groupe, nous pouvons joindre les riverains.
DINDJI Médé Roger, BROU Emile Koffi et BOHOUSSOU Séraphin
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5, Oct. 2016, Vol. 2 213
Carte 2 : Le réseau des transports socio collectifs en 2013
Il s’agit des bénéficiaires de l’action des opérateurs et des acteurs
institutionnels. L’analyse du tableau II révèle également que la zone de
compétence de l’autorité communale couvre tout son territoire. Cependant,
LES ‘’WOROSWOROS’’ A COCODY (ABIDJAN-COTE D’IVOIRE): ENTRE
REPOSITIONNEMENT DE POUVOIRS PUBLICS ET PÉRENNISATION DU
DÉSORDRE URBAIN
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5- Oct. 2016, Vol. 2 214
elle n’a pas grande autorité dans le fonctionnement des gares et points de
stationnement, points d’ancrage de l’activité des wôrôswôrôs. Ces espaces
sont plutôt des zones de « compétences » des syndicats de transporteurs.
Du moins, il s’agirait de « territoires » qu’ils contrôlent. En fait, ces
syndicats, se vantant d’ententes communales (autorisation communale),
élaborent une régulation basée sur le paiement de plusieurs droits et opèrent
des installations payantes (Zouhoula Bi, 2010). Le faisant, ils confèrent à ces
lieux un intérêt financier d’une part et, démontre qu’ils en sont les « maîtres »
d’autre part. À l’évidence, l’autorité municipale qui leur accorde
l’autorisation d’existence n’a pas grand effet sur ces espaces.
Pourtant, pour les organisations syndicales (CSTC, UFESC-CO) « la mairie
est l’administrateur réel du transport » dans la commune. Autrement dit, elle
est l’autorité légale habilitée à administrer/réguler (gestion et organisation)
cette activité sur son territoire. Mais, qu’en est-il réellement ? S’agirait-il de
propos de façade ? L’analyse ci-dessus atteste-t-elle cette réalité ?
Nous retenons déjà que sur cette période, l’organisation fonctionnelle des
transports socio collectifs à Cocody repose sur une collaboration municipalité
et syndicats de transporteurs. La municipalité, entité institutionnelle, définie
la politique communale des transports. Quant aux autres, recevant
l’autorisation d’existence de la première entité, leur action contribue à la
satisfaction des besoins en mobilité de la population. Cependant, les
problèmes issus de leur implication dans la gouvernance/gestion des gares et
points de stationnements ont poussé l’autorité locale à revoir sa politique vis-
à-vis des wôrôswôrôs depuis décembre 2014.
2. LA NOUVELLE POLITIQUE MUNICIPALE DES TRANSPORTS
VIS-À-VIS DES WÔRÔSWÔRÔS DEPUIS DÉCEMBRE 2014
La nouvelle vision municipale vis-à-vis des wôrôswôrôs repose sur le
bilan de 24 ans de fonctionnement de ce type de transport dans la commune.
Sur cette période, l’organisation fonctionnelle des wôrôswôrôs a tenu compte
de la « règle 07 ». Cette règle fut initiée par la municipalité. À ce titre, elle a
souhaité que le nombre de syndicats se limite à sept. Elle souhaitait éviter à
cette commune résidentielle, la récurrence de violences liés aux transports
socio collectifs. En fait, la source principale des conflits dans les gares, c’est
lorsqu’on y retrouve plusieurs syndicats. Ce pléthore de syndicats rend
difficile le partage des taxes qu’ils y perçoivent. Comme nous l’avons déjà
souligné, une fois reconnus, ces organisations s’érigent en instance parallèle
de régulation. Elles perçoivent donc des taxes syndicales aux points de
DINDJI Médé Roger, BROU Emile Koffi et BOHOUSSOU Séraphin
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5, Oct. 2016, Vol. 2 215
chargements de véhicules et sur les lignes car si le syndicat te dit que tu ne
charges pas, tu ne va pas charger ! Tu vas monter, tu vas descendre, tu ne
vas pas charger. Tu es obligé de te soumettre9 (Zouhoula Bi, 2010).
Ainsi, avec cette « règle 07 », une journée est consacrée à la gestion d’un
syndicat (de chauffeurs et des propriétaires) sur le « terrain ». Concrètement,
le représentant du syndicat de service recouvre les « taxes d’exploitation
journalière » auprès des chauffeurs dans les gares et points de stationnement
dans la commune. Cette règle a permis la consolidation du déplacement des
populations communales sur le réseau des wôrôswôrôs à Cocody. Dans un tel
contexte, les transports socio collectifs (wôrôswôrôs et gbakas) permettent
ainsi de décloisonner certains compartiments de l’espace urbain (cocodyen)
par le biais des lignes régulières entre les quartiers périphériques et les
quartiers centres10
. Aussi, assiste-t-on à un renforcement du processus
d’étalement de l’agglomération et à une influence grandissante des
prestataires de ces transports populaires, qui profitent de l’essor de leur
activité pour s’imposer progressivement comme des acteurs urbains
incontournables. C’est ce que montre la carte 2, puisque la commune est
couverte dans son entièreté par leur réseau.
Photo 1 : Une vue lointaine de l’ex-gare du carrefour la vie après sa
fermeture
Cliché : DINDJI Roger, 2015
9 Zouhoula Bi rapportant les propos de l’un de ses enquêtés, un syndicaliste et chef
de ligne sur une gare. 10 Kassi Djodjo I. citant Aloko (2002).
L’ex-gare du carrefour la vie
Un wôrôswôrôs de Cocody
Un taxi compteur
Un gbakas
LES ‘’WOROSWOROS’’ A COCODY (ABIDJAN-COTE D’IVOIRE): ENTRE
REPOSITIONNEMENT DE POUVOIRS PUBLICS ET PÉRENNISATION DU
DÉSORDRE URBAIN
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5- Oct. 2016, Vol. 2 216
De ce qui précède, on retient l’apport considérable des wôrôswôrôs
dans la mobilité de la population communale. Cependant, la municipalité a
trouvé des failles dans l’application de cette norme.
Ainsi, pour elle, la « règle 07 » a montré ces limites. Interrogé sur la
question, la réponse du responsable municipale en charge des transports est la
suivante : « dans certaines gares, notamment celle des « Deux-Plateaux
Mobil », les syndicalistes se disputaient fréquemment en fin de journée lors
du partage de leur argent recouvré. Ils ne cessaient de troubler la quiétude
des pauvres riverains. Devant une telle situation, les autorités municipales
ont pris les décisions suivantes : la fermeture des gares (lieu de
regroupement des syndicalistes), les syndicats ne doivent plus prendre de
l’argent aux chauffeurs lorsqu’ils sont en service, leurs cotisations devraient
se faire dans leurs propres locaux, la suppression de lignes de desserte dans
la commune. Tous les chauffeurs ont la liberté de desservir la commune, du
nord au sud et de l’est à l’ouest ». Cette mesure trouve son fondement
juridique principalement dans deux arrêtés municipaux.
Ainsi, les organisations de transporteurs désignées11
, au nombre de vingt-six
(26), réparties en deux groupes de treize (13) sont autorisées à exercer pour
une durée de trois (03) ans leurs activités sur toute l’étendue du territoire de
la commune (ARTICLE 1, arrêté municipal du 12 décembre 2014). Dans le
second arrêté, de façon tacite, il est marqué ceci : À compter de la signature
du présent arrêté, les activités ci-après des syndicats de transporteurs et de
chauffeurs de la commune de Cocody sont suspendues sur toute l’étendue du
territoire de la commune de Cocody : les encaissements liés à l’activité
syndicale dans les gares et sur la voie publique, toute autre activité syndicale
dans les gares et sur la voie publique (ARTICLE 1, arrêté municipal du 30
avril 2015). Comprenons que pour l’autorité municipale « syndicats de
transporteurs » renvoie à « syndicats de propriétaires ».
Depuis lors, le cadre institutionnel de fonctionnement des wôrôswôrôs à
Cocody connait un changement notable qui mérite d’être étalé. Mais, qu’en
est-il exactement ?
La réponse à la question s’appuiera sur le tableau III. Il en ressort que
les organisations syndicales sont complètement proscrites de la
gouvernance/régulation de l’activité des transports socio collectifs dans la
commune. Autrement dit, plus question de faire enregistrer un wôrôswôrôs à
l’UFESC-CO et au CSTC. Dès lors, pour la mise en service d’un wôrôswôrôs
11Dans cet arrêté, à travers deux tableaux la municipalité fait l’inventaire des
organisations (fédérations, syndicats, groupements, unions, comités) de
transporteurs autorisées sur son territoire.
DINDJI Médé Roger, BROU Emile Koffi et BOHOUSSOU Séraphin
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5, Oct. 2016, Vol. 2 217
à Cocody, son chauffeur se fait enregistrer/identifier uniquement à la mairie
et aux impôts.
Cette nouvelle identification à la mairie n’est différente de la première
qu’en quelques points, notamment l’établissement d’une pré visite technique.
L’identification du propriétaire du véhicule est également prise en compte.
Cependant, cette nouvelle réforme met les chauffeurs en première ligne.
La pré visite technique se fait dans les locaux des services techniques de la
mairie de Cocody, à la Riviera golfe. Cette mesure a été prise en
collaboration avec la société ivoirienne de contrôle technique automobile et
industrielle (SICTA) pour extraire de la circulation les wôrôswôrôs
vieillissants.
Tableau III : Synthèse du processus de mise en circulation d’un wôrôswôrôs
à Cocody depuis décembre 2014
Pouvoirs
publics
Documents
présentés par le
propriétaire du
véhicule
Documents
proposés par la
mairie
Coût de
réalisation
(FCFA)
Indicateurs de
vérification
Mairie
Copie CNI, registre
de commerce, carte
grise, assurance taxi,
patente, visite
technique,
proposition de ligne
Paire de
macaron,
antenne, pré
visite technique
45 000 +
55 000
Idem que tableau 1
+ avis technique et
attestation
d’exploitation
Etat
(impôts)
Copie CNI, Permis
de conduire
chauffeur, assurance
taxi
Vignette
professionnelle,
patente
162 500
Macaron, carte
CSTC Néant Néant Néant Néant
UFESC-CO Néant Néant Néant Néant
Source : nos enquêtes, 2014
Lors de cette pré visite, les indicateurs suivants sont pris en compte :
la carrosserie, la couleur (jaune panama à Cocody), l’état physique du
véhicule, le parallélisme, l’état des sièges, la présence d’instincteurs et de
triangles de signalisation dans le véhicule, le niveau d’émission de fumée par
le véhicule. Elle est payante (55 000 FCFA) et assortie de l’émission d’un
avis technique et la pose d’une antenne sur le wôrôswôrôs (nos enquêtes,
LES ‘’WOROSWOROS’’ A COCODY (ABIDJAN-COTE D’IVOIRE): ENTRE
REPOSITIONNEMENT DE POUVOIRS PUBLICS ET PÉRENNISATION DU
DÉSORDRE URBAIN
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5- Oct. 2016, Vol. 2 218
2015). L’avis émis à l’issue de cette visite, est pris en compte par le service
de visite technique de l’Etat.
Quant à l’identification, elle est assortie par l’octroie au chauffeur
d’une attestation d’exploitation (anciennement droit de ligne). À la date du 02
août 201512
, 3 200 wôrôswôrôs ont été enregistrés par le service technique de
la mairie de Cocody. De ce qui précède, nous faisons un constat. La
municipalité ne reconnaît qu’un seul interlocuteur dans l’activité des taxis
communaux à Cocody : le chauffeur. Du coup, les fédérations de syndicats de
chauffeurs et de propriétaires de véhicules sont écartées (cf. tableau IV).
Tableau IV : synthèse des acteurs impliqués dans le transport à Cocody
depuis décembre 2014
Acteurs
Fondement(s) juridique(s)
Territoires/zones de
compétences
Commune de
Cocody
Décrets, lois de la
décentralisation
Territoire communal
Syndicats de
transporteurs
Inexistant Inexistant
SOTRA Convention de concession
de service public signée
avec l’Etat
Territoire du district
d’Abidjan
Taxis compteurs Autorisation de l’Etat Territoire du district
d’Abidjan
Minibus gbakas
Inexistant
Village de Cocody,
commues de Yopougon,
Abobo, Anyama et
Bingerville
Wôrôswôrôs Autorisation de la commune Cocody, ville d’Abidjan
Commerçants Inexistant Gares et points de
stationnement
Usagers/populations Citoyenneté Territoires du district
Source : nos enquêtes (2014) inspirées de la thèse de MEITE (2014, p. 105)
La réforme de la politique locale des transports est justifiée par le
tableau IV ci-dessus. En effet, ce tableau révèle que l’acteur (commune de
Cocody) s’appuie sur des décrets, des textes de lois, notamment ceux de la
décentralisation. C’est d’ailleurs ce que confirme Meite (2014). Pour lui,
12 Date d’entretien avec le responsable du service transport de la mairie de Cocody.
DINDJI Médé Roger, BROU Emile Koffi et BOHOUSSOU Séraphin
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5, Oct. 2016, Vol. 2 219
dans le cadre de la politique de décentralisation qui vise à rapprocher les
centres décisions aux populations, l’Etat a attribué aux villes et communes de
Côte d’Ivoire certaines compétences en matière d’organisation et de
définition de la politique des transports urbains/communaux. En matière
d’organisation des transports, il nous rappelle ici quelques missions
importantes des villes et communes de Côte d’Ivoire, au terme des différentes
lois de la communalisation depuis 1980 : la délivrance d’autorisation,
l’approbation des tarifs, la création de redevances relatives à l’exploitation
des transports publics ne dépassant pas leurs limites territoriales, la
planification et l’aménagement du territoire, la lutte contre l’insécurité, etc.
Cocody est une commune de plein exercice depuis 1980. Pourquoi la
municipalité n’a-t-elle pas fait preuve d’autorité absolue depuis lors ? Selon
la loi, elle est l’autorité locale qui a aussi pour mission l’amélioration des
conditions et cadres de vie de toutes les populations du territoire qui lui est
reconnu. À ce titre, elle est tenue de concilier des intérêts et des attentes
variées et contradictoires de divers opérateurs dont les transporteurs.
Lesquels répondent à la demande en mobilité d’une frange importante de la
population. Raison pour laquelle, avant décembre 2014, la municipalité a
formalisé sa collaboration avec les syndicats de transporteurs (cf. tableau I).
Ces derniers abusant du laisser-faire des autorités locales ont fini par
déranger la quiétude des populations locales.
Quel est cependant l’effet de cette nouvelle vision municipale du transport
vis-à-vis des wôrôswôrôs dans la commune ? Quelle est la réaction de
l’UFESC-CO et du CSTC vis-à-vis de cette politique municipale ? Que reste-
t-il de leurs activités dans la commune ?
3. L’IMPACT DE L’ORGANISATION FONCTIONNELLE DES
WÔRÔSWÔRÔS SUR L’ENVIRONNEMENT SPATIO-
ÉCONOMIQUE DE LA COMMUNE DEPUIS DÉCEMBRE 2014
Cette étude d’impact se fera avec plusieurs indicateurs dont l’analyse
de la réaction des transporteurs dès la mise en application de la politique
municipale en rapport avec les transports socio collectifs. De toute évidence,
cette initiative n’a pas eu l’assentiment des syndicats affiliés à l’UFESC-CO
et au CSTC. Ce désintérêt/mécontentement a influé négativement sur
l’activité des wôrôswôrôs à Cocody. En conséquence, ces derniers ont exigé
la grève des taxis communaux. À ce propos, par moment ils ont eu recours à
la violence pour obliger les chauffeurs à suivre leur mot d’ordre. En fait, ils
furent contrariés par deux réalités. D’abord, il eut l’opposition de certains
chauffeurs qui approuvaient d’une certaine façon les nouvelles décisions
LES ‘’WOROSWOROS’’ A COCODY (ABIDJAN-COTE D’IVOIRE): ENTRE
REPOSITIONNEMENT DE POUVOIRS PUBLICS ET PÉRENNISATION DU
DÉSORDRE URBAIN
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5- Oct. 2016, Vol. 2 220
municipales. Enfin, il eut l’opposition de nouveaux syndicats de chauffeurs
nouvellement constitués et exerçant dans la commune.
De ce fait, les déplacements des populations « cocodyennes » furent
perturbés sur une bonne période. L’UFESC-CO et le CSTC n’apprécient pas
le traitement dont ils sont l’objet de la part de la municipalité, leur ancien
allié. À cela, s’ajoute les problèmes fonctionnels et organisationnels auxquels
ils doivent faire face. À l’UFESC-CO par exemple une grande partie des
activités a été suspendue. Ainsi, selon ses responsables interviewés lors de
nos enquêtes, l’association ne perçoit plus de droits syndicaux ; lesquels
provenaient des taxes perçues dans les gares et points de stationnements par
leurs agents. Ainsi, au siège de cette organisation, seul le service minimum
est assuré. Le volet social est donc proscrit, puisqu’il exige des ressources
financières. Quant au collectif de propriétaires (CSTC), il a dû quitter le local
qui lui servait de siège. Certains membres de son bureau dont Ralph D. ont
repris le volant. Ils cumulent donc les fonctions de propriétaires et
chauffeurs.
En somme, l’UFESC-CO et le CSTC sont en train d’être mis « hors jeu » par
les autorités municipales dans l’organisation et le fonctionnement des
wôrôswôrôs à Cocody.
Toutefois, devant la vive opposition des transporteurs face au projet de
réforme du transport par la municipalité, une question mérite d’être posée. En
effet, plus haut nous rapportions que ces derniers reconnaissaient la
compétence des autorités municipales locales en la matière. Alors, quelles
explications données à leur mouvement de contestation/rébellion des mesures
de « l’autorité » ? Leur première réponse nous semble relative et
circonstancielle. Autrement dit, ils adhèrent à la légalité/légitimité tant
qu’elle préserve leurs intérêts.
Photo 2 : Une vue lointaine de l’ex-gare saint Jean en 2013
DINDJI Médé Roger, BROU Emile Koffi et BOHOUSSOU Séraphin
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5, Oct. 2016, Vol. 2 221
Cliché : DINDJI Roger, 2013
Pour montrer sa volonté, la municipalité a fermé la gare du carrefour
la vie (nos enquêtes, 2015). Comme le démontre la photo 1. Or, elle fut créée
(en janvier 2014) en lieu et place de celle de saint Jean, précédemment
principal point d’ancrage de la mobilité des populations abidjanaises (cf.
photos 2 et 3). Celle de saint Jean fut fermée un an plus tôt, précisément en
novembre 2013. Cependant, après la fermeture de la nouvelle (gare du
carrefour la vie), les autorités locales n’ont pas proposé à la communauté un
équipement approprié. Comme solution/réponse alternative, les chauffeurs
ont eu recours au trottoir (en face de la gare fermée) comme gare et point de
stationnement. Comprenez que la gare qui a été fermée possédait une
profondeur, à l’image de la photo 2 (ex-gare saint Jean).
À cause de la mauvaise planification municipale, on est passé d’une
gare avec profondeur à une gare-rue ou une gare-étalement. C’est ce que
montre la photo 3 (ci-dessous). Sur son extrémité gauche, sont alignés
plusieurs véhicules. Il s’agit là de warrens13
inter communaux.
Photo 3 : Un aperçu du désordre créé après la fermeture de la gare du
« carrefour la vie »
13Autre appellation des jeunes ivoiriens des wôrôswôrôs.
Activités commerciales Wôrôswôrôs banalisés
LES ‘’WOROSWOROS’’ A COCODY (ABIDJAN-COTE D’IVOIRE): ENTRE
REPOSITIONNEMENT DE POUVOIRS PUBLICS ET PÉRENNISATION DU
DÉSORDRE URBAIN
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5- Oct. 2016, Vol. 2 222
Cliché : DINDJI Roger, 2015
Ces warrens ou wôrôswôrôs « banalisés »14
assurent la mobilité des
populations de Cocody en directions des autres communes (Port-Bouët,
Koumassi, Marcory, Treichville, Plateau, Yopougon, Abobo) de la ville
d’Abidjan.
Ce même espace sert de lieu de débarquement de passagers en provenance de
certains quartiers de la commune dont Angré et les-deux-Plateaux (nos
enquêtes, 2015). En conséquence, cet espace est régulièrement embouteillé.
Pourtant, en face il y avait une gare dont la morphologie et la localisation
paraissaient meilleures (cf. photo 1). Zouhoula Bi (2010) perçoit cela à
travers deux types de structures : une gare-rue, étalée le long de la rue et une
gare-accotement de voirie. La municipalité n’a donc pas pris la pleine mesure
de la situation avant de lancer sa nouvelle politique de restructuration de
l’activité des wôrôswôrôs dans la commune. Dès lors, on est passé du
« désordre au désordre ».
Par ailleurs, sur tout le territoire communal, les gares et points de
stationnements n’ont pas disparu (cf. carte2). Dans l’ensemble, ces espaces
demeurent. Il en est de même pour l’action des syndicats. En fait, les
14 Autre appellation de wôrôswôrôs sans couleurs. Les chauffeurs de ces lignes (inter
communales) paient à la municipalité locale une « carte de stationnement » et une
« taxe de stationnement ». Cette taxe est payée en deux tranches. Cependant,
l’organisation et le fonctionnement des taxis inter communaux, des taxis compteurs
(taxis avec compteurs holométriques) et bâchés relèvent de la compétence du
District d’Abidjan (nos enquêtes, 2014).
Trottoir transformé en gare
Ex-gare fermée
DINDJI Médé Roger, BROU Emile Koffi et BOHOUSSOU Séraphin
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5, Oct. 2016, Vol. 2 223
chauffeurs ne paient plus de frais d’embarquement dans les gares et points de
stationnements encore existant.
Toutefois, certains espaces résistent au nouveau modèle proposé. En
fait, en ces points dont le « carrefour la vie », la gare « Mobil » au deux-
Plateaux, des frais sont payés à des syndicats (nos enquêtes, 2015). Sur la
carte 2, les principales gares sont visibles. À l’exception des gares de saint
Jean et du carrefour la vie, toutes les gares créées avant décembre 2014 sont
fonctionnelles. Elle nous montre bien les gares des quartiers suivants :
Riviera 2, Riviera Palmeraie et celles qui desservent les villages de la
commune. Sur ce point (de suppression de gares) également, la municipalité
n’a pas fait un bon diagnostic de la situation avant de rentrer dans
l’opérationnalité de sa nouvelle vision du transport municipal en rapport avec
les wôrôswôrôs.
À cela, s’ajoute certaines réalités propres à la prolifération de ces ouvrages
informels. En fait, les ouvrages informels de transport public sont de
puissants facteurs de désordre spatiaux (Zouhoula Bi, 2010). Ce désordre qui
se spatialise se rapporte aux activités commerciales informelles ou activités
de « débrouillardise » (cf. photo 1). Il s’agit entre autre de la tenue de
kiosques à journaux et à café, vente de cigarettes, vente de banane braisé,
vente de galette, vente d’eau, le cirage de chaussure, vente de fruits (oranges,
mangues, etc.), etc.
Concernant les tarifications, elles ne sont pas maîtrisées par les autorités
municipales. Les tarifs pratiqués en ce moment s’appuient plutôt sur les tarifs
initiaux. Le tableau V ci-dessous confirme nos propos. En d’autres termes,
sur ce pan important du transport par wôrôswôrôs, l’action municipale n’a
pas encore grand effet.
Carte 3 : Le réseau des transports socio collectifs en 2015
LES ‘’WOROSWOROS’’ A COCODY (ABIDJAN-COTE D’IVOIRE): ENTRE
REPOSITIONNEMENT DE POUVOIRS PUBLICS ET PÉRENNISATION DU
DÉSORDRE URBAIN
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5- Oct. 2016, Vol. 2 224
Au regard de la configuration du réseau actuel de transport, la
mobilité actuelle de la population communale repose toujours sur le réseau de
desserte des transports socio collectifs d’avant décembre 2014 (cf. cartes 2 et
3).
DINDJI Médé Roger, BROU Emile Koffi et BOHOUSSOU Séraphin
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5, Oct. 2016, Vol. 2 225
Autrement dit, la mesure municipale souhaitant la suppression des lignes de
dessertes n’est pas entièrement prise en compte. De plus, lorsqu’elle
s’applique, elle s’appuie sur la tarification du modèle de lignes de dessertes
(cf. tableau V).
Par exemple : pour se rendre du quartier Plateau Dokoui à celui de la Riviera
Palmeraie, l’un des trajets est le suivant : il fallait emprunter deux
wôrôswôrôs.
Tableau V : évolution des tarifs des wôrôswôrôs communaux sur les
principales lignes à Cocody
N° LIGNES Longueu
r
en Km
Tarif/trajet
en 2006
(FCFA)
Tarif/trajet
en 2010
(FCFA)
Tarif/trajet
en 2015
(FCFA) 1 Cocody– Campus 2 125 100 100
2 Cocody– Blockhaus 2 125 100 100
3 Palmeraie – Rosiers 3 150 150 150
4 Bonoumin– Lauriers 3 150 150 150
5 Akouédo - Riviera 2 4 200 200 200
6 Riviera 2 - Riviera 3 4 200 200 200
7 Attoban - Vallon/Zoo 4 200 200 200
8 Angré-Palmeraie 5 250 300 300
9 Cocody– Vallon 5 250 250 250
10 Carrefour 9 km -M’Badon 5 250 200 200
11 Agban– Vallon 6 200 200 200
12 Cocody - Riviera 2 6 250 250 250
13 Cocody - M’Pouto 6 250 250 250
14 Riviera - Attoban-Angré 6 300 300 300
15 Cocody– Palmeraie 7,5 350 350 350
16 Cocody - Riviera 3 8 300 300 300
17 Cocody–Angré 10 425 300 500
Sources : KASSY D. I. (2006), nos enquêtes 2015
Le passager dépensait 500 FCFA : 200 f du (1) Plateau Dokoui à la
gare de la Riviera Palmeraie (située à Angré terminus des bus 81 et 82),
ensuite, 300 f de cette (2) gare à la Riviera Palmeraie (sa destination finale/cf.
ligne n°8 dans le tableau V et carte 3 ci-dessus). Aujourd’hui, le trajet peut
être direct. Toutefois, le client dépensera 500 FCFA (nos enquêtes, 2015). Le
changement, c’est qu’il se déplace suivant un trajet direct (cf. carte 3 ci-
dessus). Sinon en termes de coût, il n’y a pas de gain. Par ailleurs, pour
Kassy (2007) la stratégie de maintien ou de sectionnement de trajets en lignes
par les chauffeurs vise l’accroissement de leurs gains journaliers.
LES ‘’WOROSWOROS’’ A COCODY (ABIDJAN-COTE D’IVOIRE): ENTRE
REPOSITIONNEMENT DE POUVOIRS PUBLICS ET PÉRENNISATION DU
DÉSORDRE URBAIN
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5- Oct. 2016, Vol. 2 226
Poursuivant, Kassy (2007) donne quelques facteurs explicatifs de la hausse
des prix au fil des ans, notamment à Cocody. Ainsi, le carburant reste une
dépense élevée qui pèse de toute son importance sur la tarification. À celui-ci
s’ajoutent d’autres facteurs liés aux caractéristiques des réseaux, notamment,
la longueur des lignes, leur densité, aussi les conditions de concurrence et le
racket policier.
CONCLUSION
À la réalité, cette contribution fait le bilan de l’existence de
wôrôswôrôs dans la cité résidentielle de Cocody depuis 1990. Il en ressort
que ce type de transport joue un rôle important dans la mobilité (intérieure et
extérieure) des populations de la commune. À ce jour, 3 200 wôrôswôrôs
communaux sont enregistrés aux services techniques de la mairie. Cependant,
dans leur organisation fonctionnelle à Cocody deux grandes périodes ont été
dégagées. La première (de 1990 à décembre 2014) marque une gestion
intégrée municipalité-corporations syndicales. Quant à la seconde (depuis
décembre 2014), elle est marquée par les décisions municipales suivantes :
fermeture de gares dans la commune, suppression des lignes de dessertes et
réduction du pouvoir des syndicats dans les gares. Cependant, dans la
commune plusieurs dysfonctionnements liés aux transports socio collectifs
demeurent, notamment la persistance de gares et points de stationnement
censés disparaître. La mobilité des populations se fait toujours suivant le
réseau des lignes de dessertes d’avant décembre 2014. En somme, la
municipalité n’a pas fait un bon diagnostic de l’existant avant d’exécuter sa
réforme liée à l’organisation et au fonctionnement des wôrôswôrôs dans la
commune.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
AKA KOUADIO (A.), 2006. « Les taxis communaux ou woroworo à
Abidjan-Cocody : caractéristiques, organisation et fonctionnement », in
Revue de Géographie Tropicale et d’Environnement, n°6. EDUCI
2006, Abidjan, pp 45-61.
ALOKO-N’GUESSAN (J.), 1989.Transports, communications et
organisation de l’espace en Côte d’Ivoire, Tome 1, Thèse de doctorat
d’Etat de Géographie, Abidjan-Flash, Université de Cocody, 786 p.
DINDJI Médé Roger, BROU Emile Koffi et BOHOUSSOU Séraphin
Revue de Géographie de l’Université Ouaga I Pr Joseph KI-ZERBO, N°5, Oct. 2016, Vol. 2 227
ALOKO (N.J.), AKA (K.A.) 1996. « Essai d’analyse des facteurs
d’émergence des taxis-ville ou woros-woros à Abidjan », in Revue
tunisienne de Géographie, n°29, Tunis, pp 41-64.
ALOKO-N’GUESSAN (J.), 2001. « Les taxis communaux à Abidjan-
Cocody : logiques de fonctionnement des réseaux, in RILSH, n°2-3,
Abidjan, pp 117-132.
BOIZO (O.), 1996. Crise municipale et participation populaire ou jeux de
pouvoirs dans la Ville, Orstom-Gidis-CI, Abidjan, 91 p.
BROU (E.K.), 2002. Urbanisation et Aménagement d’une commune : le cas
de la commune d’Adjamé, thèse de doctorat de Géographie, Abidjan-
IGT, 339 p.
BROU (E.K.), 2008. « Le transport de personnes et la structuration de
l’espace urbain à Daloa », in Le journal des Sciences Sociales, n°5,
Abidjan, pp 127-142.
DINDJI (R.), 2014. Décentralisation et développement local : cas de la
commune de Cocody, thèse unique de doctorat de Géographie, Abidjan-
IGT, 382 p.
GODARD (X.) et T. P., 1992. Les transports urbains en Afrique à l’heure de
l’ajustement : redéfinir les services publics, Editions Karthala, Paris,
246 p.
KASSY DJODJO (I.) 2007. Régulations des transports populaires et
recompositions du territoire urbain d’Abidjan, thèse de doctorat,
Université Michel de Montaigne Bordeaux 3 : Pessac, 309 p.
KASSY DJODJO (I.) 2010. « Rôle des transports populaires dans le
processus d’urbanisation à Abidjan », in Les cahiers d’Outre-Mer, Vol.
n°251, Paris, pp 391-402.
KIETTYETTA (J.Y.), 2012. « L’introuvable articulation transport-urbanisme
ou la face cachée de la décentralisation à Ouagadougou », in conférence
CODATU XV, 14 p.
MEITE (Y.). 2014. Gouvernance du transport urbain et mobilité durable dans
le district d’Abidjan, thèse de doctorat de Sociologie, Université de
Strasbourg, 326 p.
ZOUHOULA BI (M.R.) 2010. « Les fondements de la légitimité de l’emprise
des corporations syndicales sur la frange informelle des transports
urbains à Abidjan », In conférence CODATU XIV Buenos Aires
(Argentine) : transport durable et qualité de vie en ville, pp 1-16.
top related