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Ainsi font font fontDe la première Crèche de Vevey à la Garderie Les Marionnettes

Michael Lanza

...la bâtisse n’a que peu changé en plus de septante ans.

De l’extérieur...

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Cet ouvrage a été imaginé et conçu par la Direction des Affaires sociales et familiales de la Ville de Vevey.Conception et réalisation graphique: Point Carré sàrl - Vevey.Impression: I-Press SA Montreux; couverture: Soraprint sàrl - Vuadens.

Impressum

Préface 5

Le jour se lève aux Marionnettes 6

La première crèche de Vevey 7

La Pouponnière Nestlé – Fondation Louis Dapples 12

Quand la couleur apparut 22

Quand la Pouponnière Nestlé devint la Garderie Les Marionnettes 26

Des réseaux régionaux pour créer de nouvelles places d’accueil 41

Le soleil se couche aux Marionnettes 43

Bibliographie, crédits photos, biographies et remerciements 44

Sommaire

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5 Cet ouvrage, tout en retraçant de manière ludique et complète la genèse et le chemin parcouru ayant permis de fêter les septante ans de l’édifi ce jadis construit pour accueillir la Pouponnière Nestlé et depuis 1974 abritant la garderie les Marionnettes, nous permet de survoler le système de garde des enfants depuis plus d’un siècle. Il est passionnant de découvrir que le progrès de la société, de la technologie, de la médecine, la diminution des décès infantiles et l’augmentation de l’espérance de vie ont eu un effet sur l’appréhension que nous avons de la famille et de son environnement.

Si nous constatons qu’entre 1874 et nos jours nous sommes passés d’une crèche destinée aux plus nécessiteux et aux plus fragiles dans leur santé à un lieu essentiel à l’épanouissement harmonieux de la cellule familiale, nous nous devons aussi de prendre conscience de l’important changement de mentalités subvenu depuis lors. Sans avoir la prétention de retracer un siècle de l’histoire des sociétés et de l’évolution de la famille, il convient malgré tout de s’arrêter quelques instants sur ce que nous pouvons imaginer pour demain, à la lumière des décisions et des événements d’hier et d’aujourd’hui.

La deuxième partie du 20e siècle a permis de créer une collectivité axée sur le développement de l’individu et de son confort. Cette manière de dessiner notre civilisation a généré de nombreux effets dommageables tant au niveau écologique que social mais a aussi offert de nouvelles possibilités quant à la façon de concevoir les relations entre les individus et les générations. Nous nous trouvons désormais à un moment crucial qui nous offre la possibilité d’améliorer et de corriger les décisions du passé. La course effrénée à la recherche du bien-être individuel a eu comme effet, entre autres, de limiter la solidarité intergénérationnelle et de diminuer sensiblement le taux de natalité, mais aujourd’hui, comme hier, les enfants restent l’avenir de notre société.

La famille demeure l’endroit permettant à chaque individu de se construire et d’ancrer ses racines. Si cette affi rmation a traversé les années depuis 1874, et bien avant, pour être toujours d’actualité à notre époque, il n’est par contre pas possible de comparer les familles de ces deux périodes. Peu à peu, la famille est devenue cosmopolite et de ce fait a de nouveaux besoins. Dès lors, il n’est plus envisageable de nier la nécessité de créer suffi samment de structures d’accueil de jour pour les enfants afi n de donner clairement une impulsion en faveur d’une politique familiale cohérente qui permette de conjuguer vie de famille et vie active.

Lionel Girardin, Municipal en charge des Affaires sociales et familiales de la Commune de Vevey.

Préface

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76 Il est tôt, environ six heures, mais déjà on s’active pour accueillir les dizaines d’hôtes de marque qui franchiront dans quelques instants la porte du 6, avenue Louis-Levade à Vevey.

Comme chaque matin de la semaine, depuis des décennies, le va-et-vient des parents déposant leur enfant à la garderie est un spectacle qui semble réglé comme du papier à musique, avec toute une gamme de graves, d’aigus et de profonds silences. Parents et éducatrices se donnent le relais le temps de quelques heures, un passage de témoin qui nécessite une attention particulière de tout le personnel de la garderie qui s’apprête à vivre encore une fois une journée riche en émotions.

Si, aujourd’hui, les voitures ont modernisé la tâche et le profi l des bambins et de leurs parents n’est plus tout à fait le même, comme toute belle histoire à raconter, il y a toujours un «il était une fois» dont on connaît déjà la fi n: «ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants».

La garderie des Marionnettes qui accueille désormais plus de cent têtes blondes, brunes et rousses par jour, est née Pouponnière-Nestlé, Fondation Louis Dapples en 1937, avant d’élargir sa vocation au début des années 1970. Nous allons évoquer quelques bribes du destin de cette institution qui a marqué la vie des veveysans, parler de son illustre prédécesseur et nous pencher au préalable sur la toute première structure d’accueil pour enfants que connut la Ville. Remontons le temps dans le Vevey du 19ème siècle. L’histoire, comme vous l’imaginez, commence donc ainsi: il était une fois...

Le jour se lève aux Marionnettes

Genèse de l’accueil de l’enfance à Vevey

Il était une fois, des parents qui travaillaient sans relâche pour éviter tant bien que mal de sombrer dans une pauvreté certaine. Diffi cile pour bon nombre de femmes de se cantonner à leur rôle de maman, le salaire de leur mari étant souvent insuffi sant, voire inexistant. Chômage et maladie étaient monnaie courante et l’absence de couverture sociale obligeait ces mères à rapporter un peu d’argent à la maison. Les ennuis fi nanciers s’accumulant, le temps consacré à leurs enfants rétrécissait comme peau de chagrin. Il était dès lors diffi cile, voire impossible, de subvenir aux besoins de leurs petits. Face à ce dilemme, les parents n’avaient que peu de choix.

La misère sociale guettait une société qui se développait à grande vitesse. Vevey, ville de moins de huit mille habitants, vivait un important essor industriel, avec des fi rmes naissantes qui entreront bientôt dans l’histoire économique de la région et qui, pour certaines, connaîtront un rayonnement international. Mais pas l’ombre d’une structure pour accueillir les enfants de ces mères ouvrières. Alors de-ci, de-là, germaient des idées pour venir en aide à ces «cas sociaux» et offrir à leurs petits de quoi mener une vie décente. La philanthropie de certaines démarches était certes authentique mais la majorité des initiatives visait avant tout à réprimer l’abus de la mendicité, à cacher cette précarité que les concitoyens n’auraient su voir et accepter. Le progrès était aussi une question d’image.

Seule une personnalité charismatique, sensible aux souffrances de ses pairs et prête à s’engager sans compter pouvait écrire la toute première page de l’accueil de la petite enfance à Vevey. Le pasteur Alfred Cérésole n’aura de cesse durant toute son existence d’œuvrer au bien-être des enfants. Comme le dira plus tard Jules Monnerat, Syndic de Vevey: «Nous lui devons des tributs de reconnaissance, car chaque fois qu’il s’agit d’une vente, d’une souscription, de faire quelque chose en un mot pour la Crèche, c’est toujours M. Cérésole que nous avons vu à la brèche» (Feuilles d’Avis de Vevey, édition du 19.11.1888). Son engagement sera déterminant, car la Commune maintiendra pendant des années une position de second plan.

Trouver des fonds n’était qu’une partie du problème, c’était justifi er l’idée même d’une crèche pour enfants de parents pauvres qui était une tâche relativement ardue. Si au 18e siècle on avait beaucoup discrédité l’éducation maternelle en confi ant les enfants à des nourrices, la moitié du 19e marque un changement de mentalité progressif avec la réhabilitation du rôle de mère, exalté jadis par des écrits comme «l’Emile ou de l’éducation» de Jean-Jacques Rousseau. C’était sans compter sur l’appui de notables pragmatiques, acquis à l’idée de solutions de garde, dans le principal but de s’assurer une main d’œuvre féminine indispensable à une industrie en pleine expansion. Les détracteurs, quant

La première Crèche de Vevey

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8 9à eux, brandissaient le spectre de l’implosion de la famille et de la menace d’une dérive socialisante. Ils s’imaginaient encore que cela favoriserait «la paresse ou le désordre des mères et détournerait les parents de l’accomplissement de leurs devoirs les plus élémentaires et sacrés» (Appel à la Bienfaisance, Comité de la Crèche de Vevey, 1887). Ce à quoi le pasteur rétorquait inlassablement: «Nul plus que nous ne tient à la famille… mais oublie-t-on qu’il existe au milieu de nous des familles désorganisées par la maladie, le vice ou la mort, et dont les enfants souffrent et languissent? (…) Or, c’est à ceux-là que nous voulons porter secours! (…)» (Feuilles d’Avis de Vevey, édition du 19.11.1888).

Les premiers contacts avec l’administration publique étant vains, l’idée d’une institution indépendante sembla l’unique solution. Cérésole créa ainsi en 1874 le Comité de la Crèche de Vevey. Il se lança aussitôt dans une véritable campagne de communication,

un plaidoyer en faveur de l’ouverture d’une crèche, qui devait non seulement susciter la compassion des veveysans mais également les inciter à faire preuve de générosité en déliant leur bourse. Il organisa alors des conférences et des lectures qui se terminaient toujours par une collecte. Parallèlement, sa femme menait le Comité des dames patronnesses qui confectionnaient notamment les layettes des futurs résidents, prospectaient pour des locaux et enrôlaient de nouvelles recrues. Une organisation sans faille et une volonté inébranlable leur permirent d’inaugurer le 1er avril 1875, à quatorze heures, à la Rue des Anciens Moulins (actuelle rue du Conseil), la première Crèche de Vevey, l’une des rares en Suisse.

Les locaux étaient exigus mais il y avait foule lors de cette journée d’ouverture. De nombreux veveysans s’étaient massés pour voir «leur» Crèche et assister à la bénédiction, puis aux discours offi ciels de circonstance.

Si la remise en cause de pareilles structures sera une constante durant des décennies, leurs succès ne se démentira quasiment jamais. Ainsi, bien avant

l’inauguration, une quantité de demandes d’admission avait d’ores et déjà été enregistrée. Ces dernières furent gelées jusqu’au premier avril. En un an, ce ne seront pas moins de cinquante

familles qui placeront leurs enfants à la Crèche, moyennant une contribution minimum de vingt centimes par jour; plus de vingt autres seront refusées par manque de place. La nécessité d’une telle institution était sans appel.

«La Crèche de Vevey (…) est un établissement de bienfaisance destiné à recevoir pendant le jour ou les heures de travail de petits enfants dont les mères sont obligées pour gagner leur vie, de travailler hors de chez elles, ou dont les parents, atteints par la maladie, se trouveront dans l’incapacité d’entretenir et de surveiller leurs familles.

La Crèche offre ses avantages aux familles pauvres sans distinction de religion ni de nationalité. Toutefois, en cas d’encombrement, elle admet avant tout autre les enfants ressortissants du Canton.»

Extrait des statuts et règlements de la Crèche de Vevey, 1er avril 1875.

L’étroitesse des locaux poussera assez rapidement le Comité à trouver un lieu plus propice au développement de la Crèche. L’acquisition d’un terrain fut particulièrement diffi cile et ne put se faire qu’après plusieurs années. Ce n’est qu’en 1887, suite à dix-sept tentatives infructueuses que le Comité de la Crèche réussit à acheter une parcelle sise à la rue de la Madeleine. Là encore, il fallut lancer une campagne pour récolter des fonds auprès de généreux donateurs, afi n d’offrir aux petits veveysans une infrastructure moderne. On souhaitait qu’elle réponde à des exigences semblant mieux correspondre à l’épanouissement des enfants, telles qu’un environnement spacieux et lumineux, doté d’un jardin attenant. La nouvelle crèche prit ses quartiers en 1888 et fut inaugurée en novembre de la même année.

La Crèche collaborera par la suite avec le Foyer-Refuge pour enfants de mères malades, fondé en 1908. Les deux entités d’abord séparées qu’étaient le Foyer et le Refuge ne tardèrent pas à regrouper leurs activités. Pour la première fois à Vevey une structure d’accueil pour enfants fonctionnait aussi bien de jour que de nuit. Ce lieu était non seulement un partenaire important pour la Crèche mais aussi l’esquisse de la création d’une pouponnière. L’idée faisait petit à petit son chemin. En effet, on se rendait compte que les mères durablement atteintes dans leur santé ne pouvaient guère effectuer leurs tâches quotidiennes et s’adjoindre les services d’une aide ménagère, laissant ainsi leurs enfants

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sans une assistance appropriée. Le Foyer-Refuge et la Crèche jouaient un rôle-clé pour de nombreuses familles de la région. Ces structures fi nirent par fusionner en 1938, quelques mois seulement après l’ouverture de la Pouponnière Nestlé, qui allait devenir pendant plus de trente ans le pilier de l’accueil des nourrissons défavorisés.

Au fi l des ans, la Crèche-Foyer-Refuge souffrira d’un manque de place et de moyens pour la rénover. Sur avis du Service de Protection de la Jeunesse du Canton de Vaud, elle fermera défi nitivement ses portes en 1974, presque un siècle après sa naissance.

L’histoire de la crèche à l’aube de la Pouponnière Nestlé

1874 Fondation par le pasteur Alfred Cérésole du Comité de la Crèche de Vevey et du Comité des dames patronnesses qui lui est rattaché.

1874/5 Campagne pour récolter des fonds destinés à l’ouverture de la Crèche de Vevey.

1875 Inauguration de la première Crèche de Vevey à la rue des Anciens Moulins 11 (actuellement rue du Conseil), le 1er avril.

1880 La Crèche se constitue en association.

1887 On aboutit enfi n à l’achat d’un terrain devant accueillir des locaux plus modernes et spacieux pour la Crèche.

1887/8 Récolte de fonds pour l’aménagement du nouvel édifi ce de la Crèche qui est inaugurée le 18 novembre 1888, à la rue de la Madeleine.

1908 Ouverture d’un Foyer-Refuge pour enfants de mères malades qui fonctionne aussi bien de jour que de nuit. Il joue un rôle-clé dans la société veveysanne et sera le précurseur de la Pouponnière Nestlé.

1937 Création de la Pouponnière Nestlé – Fondation Louis Dapples à l’avenue Louis-Levade 6.

1938 Fusion de la Crèche avec le Foyer-Refuge, désormais tous réunis dans les locaux de la rue de la Madeleine.

10 Puis elle disparut, en marge de l’ouverture de la garderie Les Marionnettes

1965 Afi n d’étoffer l’offre destinée à l’accueil des enfants, la Commune de Vevey lance une halte-garderie à ouverture restreinte, au chemin du Point du jour.

1969 Ouverture le 1er juillet de la Garderie d’enfants interentreprises à l’Avenue Général Guisan 68, pour pallier à la demande excessive que doit affronter la Crèche-Foyer-Refuge. Contacts étroits entre les deux structures.

1972 Devant la vétusté du bâtiment de la Crèche-Foyer-Refuge, le Service de Protection de la Jeunesse (SPJ) du Canton de Vaud ordonne la fermeture de la structure pour la fi n 1973.

1973/4 L’activité de la Crèche-Foyer-Refuge est prolongée de quelques mois encore en ce qui concerne la garde des enfants, mais la section nurserie est fermée dès le 31 décembre 1973.

1974 Fermeture défi nitive de la Crèche-Foyer-Refuge et de la Pouponnière Nestlé, reconvertie en Garderie-Nurserie-Jardin d’enfants dénommée «Les Marionnettes» qui ouvre ses portes en septembre.

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12 13Entre «hospitalisme» et «maternage insolite»

L’enfant abandonné ou confi é durant une période prolongée à une institution collective souffrirait-il for-cément de problèmes de développement psychomoteur, conduisant à des situations parfois critiques? La question était au cœur de nombreuses recherches menées par les psychiatres des années 1940.

Le bébé, que l’on considérait jusque-là comme un simple «tube» qu’il fallait nourrir, langer et faire dormir, devenait peu à peu le centre de l’attention des psychanalystes. Le poupon était bien une personne, avec qui il fallait interagir, comme le soulignaient Thomas B. Brazelton ou Françoise Dolto*. Les nouvelles théories accordaient une importance fondamentale à la période post-natale, déterminante pour une évolution physique et psychique harmonieuse du bambin.

Au-delà des besoins nécessaires à sa survie, on identifi a que le nourrisson devait aussi être entouré de l’affection sécurisante des adultes. Comment un bébé éloigné de sa mère et partageant sa gardienne avec d’autres petits pouvait-il de ce fait recevoir les égards indispensables à son épanouissement? Le danger qui guettait les enfants placés en institution alimentait des critiques récurrentes, étayées par les études d’éminents psychiatres tels que Donald Winnicott ou René Spitz*. L’inquiétude grandissante poussait certains à contrecarrer les initiatives visant à construire des homes pour petits enfants. Tout se jouerait les dix-huit premiers mois de la vie du bébé au moment où, selon les termes de Winnicott, une maman «suffi samment bonne» est sensée créer autour du bambin un environnement sans failles. Le psychanalyste britannique décrivait cette dévotion spontanée de la génitrice à son enfant, comme les «cent jours de folie amoureuse».

Etait-il possible alors de substituer une mère, ou plus largement le cadre familial, a priori seul apte à offrir au bébé des conditions affectives suffi santes pour son bien-être? L’institution, d’apparence froide et impersonnelle, arriverait-elle à palier à l’absence des parents? En 1945, René Spitz élaborait sa thèse sur l’«hospitalisme», caractérisant des troubles psychosomatiques du jeune enfant privé à long terme de la présence et du réconfort de ses parents. Un état dépressif qui conduit le petit, entre autres, à ne plus vouloir se nourrir, ni jouer ou exprimer ses sentiments, et à effectuer des gestes répétitifs. Cette position bouleversa le regard que l’on portait sur les enfants et souligna l’importance de prendre en compte leurs sentiments dès la naissance. Ainsi, dans les années d’après-guerre, ce courant de pensée qui s’articule autour de Winnicott, Spitz, ou John Bowlby* avec sa théorie de «l’attachement», incita bon nombre de pédiatres et de responsables de structures d’accueil de l’enfance à prêter plus d’attention à cette dimension affective dans l’encadrement du bébé.

La Pouponnière Nestlé - Fondation Louis Dapples

Personne n’imaginait qu’une institution puisse remplacer une mère ou un père; toutefois, il fallait bien appliquer ces théories aux structures d’encadrement pour petits enfants, car ces derniers continueraient d’être abandonnés, orphelins ou délaissés par des parents inaptes à les élever. Dans la pratique, on essayait dans les lieux d’accueil de changer le moins souvent l’enfant d’environnement en lui permettant de se constituer des points de repères fi xes. Il fallait faire en sorte, par exemple, que la même nurse s’occupe du bébé aussi longtemps que possible et qu’elle l’entoure suffi samment. On devait alors limiter le nombre de poupons par nurse, ce qui n’était pas chose aisée. Etre proche du bébé, tout en respectant une certaine distance, et favoriser progressivement son autonomie faisaient partie des nouveaux préceptes d’encadrement des enfants qui s’imposaient dans les principales institutions européennes.

L’Institut national de méthodologie des maisons d’enfants de 0 à 3 ans, fondé en 1946 à Budapest par Emmi Pikler, réunissait ces doctrines et ne tarda pas à faire école. Cette pédiatre hongroise prouvait qu’avec des soins adéquats et une attention particulière, les jeunes enfants pouvaient tout aussi bien s’épanouir, se sentir en sécurité et exprimer de la joie dans un cadre institutionnel. On favorisa grandement la stimulation et la créativité de l’enfant afi n d’éviter qu’il ne tombe dans l’apathie. Myriam David et Geneviève Appell, auteures de «Lócsy ou le maternage insolite» furent éblouies lors de leur première visite de l’Institut en 1971 d’y trouver des «bébés fl orissants, bronzés et animés», une façon en quelque sorte de dédramatiser en partie l’absence de la mère.

«Parce qu’ils sont en institution, il ne faut pas leur promettre plus qu’on peut donner, mais ce qui est offert doit être constant et sûr.»

Emmi Pikler, citée dans «Le Maternage insolite», de Myriam David et Geneviève Appell, 1974

L’enfant, disait-on, peut alors s’attacher à d’autres fi gures rassurantes qui ne sont ni la mère ni le père, et passer quelques mois ou quelques années hors du cadre familial n’est pas signe d’un sombre avenir. L’exemple de Lócsy montre aussi qu’un tel succès n’est pas le fruit du hasard et d’actions spontanées mais bien d’une organisation rigoureuse et adaptable, qui met le bébé-sujet et non le bébé-objet au centre de toutes les actions de l’institution.

Lors de la fondation de la Pouponnière Nestlé en 1937, quelques années avant la thèse de Spitz et l’expérience de Pikler, la priorité était d’assurer la bonne santé physique des poupons. On ne niait pas l’importance de préserver des liens avec la famille du bébé, s’il en avait encore une, toutefois les

* Vignettes biographiques à la fi n de l’ouvrage.

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14 15visites étaient fortement restreintes. La peur d’une contamination était trop grande et voir grandir des bébés sains, ne manquant d’aucun confort, nourris et aérés en suffi sance, était déjà satisfaisant. Rien de surprenant en parcourant le document de présentation de la Pouponnière, datant de 1938, d’y trouver avant tout une énumération des précautions destinées à neutraliser une quelconque menace de maladie ainsi qu’une liste exhaustive des aménagements modernes dont bénéfi ciait l’infrastructure. Un survol en somme de mesures rassurantes pour les adultes.

«(…) tout nourrisson qui arrive doit être considéré comme suspect et par conséquent doit être soumis à une quarantaine en box fermé, ceci pendant une durée minimum de vingt et un jours (…).»

«(…) les visites sont un mal inévitable. (…) il est humainement impossible de [les] interdire. On obviera (…) à ces inconvénients qui peuvent être grands, par différentes mesures.»

Dr. J. Taillens, Professeur de Clinique infantile à l’Université de Lausanne, Médecin-Chef de la Pouponnière Nestlé, document de présentation de la Pouponnière Nestlé – Fondation Louis Dapples, 1938.

On avait jadis critiqué la Crèche de Vevey, car les parents qui y plaçaient leurs enfants étaient bien portants et personne ne devait légitimement se subordonner à leur rôle, ne fut-ce que quelques heures par jour. La Pouponnière trouvait quant à elle plus de grâce aux yeux de la population, car elle visait à accueillir des bébés qui pour la plupart étaient orphelins, abandonnés ou avec des parents rencontrant des diffi cultés de toute sorte. Dans le contexte des théories qui traversèrent ce premier tiers de siècle, sa fonction initiale était donc plutôt de remplacer «techniquement» les géniteurs man-quants, que de se substituer à eux affectivement.

Une structure d’avant-garde

«Unique au monde» écrivait sur le registre des visites Jacinto Vilardell, médecin de Barcelone. On pouvait également y lire «La plus moderne des pouponnières», sous la plume d’un notable de Hongkong, ou «An example of the fi nest effi cency and progress»1 disait encore un habitant du New Jersey, jusqu’à cette très enthousiaste britannique de Bombay qui releva qu’il s’agissait: «The [most] wonderful place I have ever seen for babies»2!

D’innombrables messages élogieux saluèrent ainsi l’ouverture en 1937 de la Pouponnière Nestlé – Fondation Louis Dapples. Ce dernier, président de la célèbre société, étant décédé peu avant l’achèvement du projet, l’inauguration fut reportée d’une année. Louis Dapples s’était particulièrement investi dans la réalisa-tion de la Pouponnière en prenant à sa charge la moitié des dépenses nécessaires à sa construction. Il souhaitait par ailleurs qu’une fois en fonction, celle-ci fut cédée à l’Etat de Vaud. Un legs auquel s’ajoutait une dotation de deux cent cinquante mille francs offerts par Nestlé qui garantirait en outre, jusqu’à dénonciation du contrat, le payement des frais d’exploitation et d’entretien de la Pouponnière. Un cadeau pour Vevey dont le rayonnement international n’en serait qu’accru, mais avant tout un lieu d’accueil pour bambins défavorisés qui jouiraient dans un cadre optimal de l’attention des plus grands médecins.

Comme soixante ans plus tôt, lors de l’ouverture de la Crèche de Vevey, quelques critiques remirent une nouvelle fois en cause l’idée de placer un enfant bien portant hors du noyau familial. Le rapporteur de la commission ad hoc du Grand Conseil vaudois n’eut néanmoins aucun mal à faire approuver par les députés, en août 1938, le décret autorisant le Conseil d’Etat à accepter la donation. Les arguments des détracteurs étaient contrecarrés par les nombreuses et diverses retombées positives attendues. On alla par exemple jusqu’à évoquer la possibilité d’enrayer par ce biais la baisse du taux de natalité favorisée par le stress de parents ne pouvant s’occuper de leurs enfants, faute de moyens ou en raison d’un travail trop contraignant. Or la Pouponnière n’était pas une crèche de plus; elle revêtait la fonction spécifi que d’« hospice de nourrissons non alimentés par leur mère », une structure où les bébés, privés de leur maman pour un temps ou pour toujours, passeraient quelques mois avant de retourner chez leurs parents, tuteur ou famille d’accueil. Elle s’inscrivait d’une certaine manière dans le prolongement du Foyer-Refuge pour enfants de mères malades.

Une telle réalisation ne pouvait émaner que du secteur privé. De l’avis largement répandu chez les politiques, l’Etat aurait pu diffi cilement ériger lui-même une telle structure et encore moins en

1 Un exemple de la meilleure effi cacité et de progrès (traduction libre).

2 Le plus bel endroit que j’ai vu pour des bébés (traduction libre).

Installation du système de chauffage par rayonnement; procédé moderne permettant de camoufl er la tuyauterie.

1 Un exemple de lameilleure effi cacité et deprogrès (traduction libre).progrès (trad ction libre)e

2 Le plus bel endroit quej’ai vu pour des bébés (traduction libre).

1 Un exemple de la meilleure effi cacité et de progrès (traduction libre).

2 Le plus bel endroit que j’ai vu pour des bébés (traduction libre).

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16 assumer les frais. L’emplacement de la Pouponnière en terres veveysannes motivait d’autant plus les élus qui voyaient là l’occasion d’amorcer une meilleure répartition territoriale des infrastructures de soins au niveau du canton. Pour toutes ces raisons et bien d’autres encore, la proposition de Madame Louis Dapples et de la Société Nestlé était une offre qui ne se refusait pas.

«Le cycle des institutions hospitalières décentralisées se complète, nous n’aurons bientôt plus besoin de sortir de Vevey pour naître, grandir, se soigner et mourir ; je pense que pour beaucoup de nos concitoyens, c’est un sérieux progrès (…).»

David Deneraz, syndic de Vevey, lors du discours inaugural de la Pouponnière Nestlé - Fondation Louis Dapples, 09 septembre 1938.

Sous le soleil exactement

Conçue par les architectes veveysans Comte et Franel, qui avaient intégré les idées du professeur Taillens, médecin-chef de la Pouponnière Nestlé, la bâtisse sur trois niveaux se voulait lumineuse,

spacieuse et dotée des meilleurs équipements. De là, on jouissait d’une vue exceptionnelle sur le lac et les vignes. La maison aux lignes épurées, de style à la fois contemporain et indémodable, était entourée d’un magnifi que jardin arborisé.

L’intérieur était à l’image de l’extérieur: sobre et moderne. Souhaitant préserver au maximum les lieux du moindre microbe, les locaux aseptisés avaient une allure clinique, loin des chambres bigarrées qui accueillent les poupons d’aujourd’hui. Pour éviter tout risque de contamination, on avait prévu notamment des box pour la mise en quarantaine des nouveaux pensionnaires et des bébés malades. Les prématurés quant à eux bénéfi ciaient de chambres chauffables spéciales. Un monte-charge permettait aussi d’évacuer immédiatement les linges souillés renfermés dans des seaux, alors qu’un autre servait à remonter le linge propre.

«Rose tendre, comme une bonbonnière de bon goût, la maison s’ouvrit toute grande aux invités. Partout des couleurs claires, faites à la mesure des étonnements des petits.»

Article du journal La Revue, édition du 10 et 11 septembre 1938.

Terrasse, galerie-solarium, cuisine et buanderie dotées des machines les plus récentes, laboratoire d’analyses et chambres confortables pour tout le personnel encadrant complétaient cette infrastructure de premier choix. Il n’en fallait pas tant pour émerveiller les invités lors de l’inauguration de la Pouponnière Nestlé.

Le jour du baptême

Cela faisait bientôt un an que les cris, rires et ronfl ements des petits retentissaient à la Pouponnière. Le tout premier pensionnaire était arrivé le 11 octobre 1937. Pendant quelques jours, il avait pu profi ter à lui tout seul d’un essaim de nurses dévouées à son bien-être. Un luxe qu’il dut bientôt partager avec d’autres bambins, car si le nombre d’admissions fut d’abord modeste, ces dernières ne tardèrent pas à se multiplier : quatre-vingts bébés, en majorité suisses et âgés de moins de trois mois, furent recueillis au cours du premier exercice, nonante-trois lors du suivant.

«(…) le lendemain deux autres admissions et le surlendemain une quatrième, accueillies avec joie par le personnel qui, jusqu’alors, s’était activement occupé de travaux de tricotage et de la préparation des layettes.»

Extrait du Rapport du premier exercice de la Pouponnière Nestlé – Fondation Louis Dapples; 1939.

Les festivités marquant l’inauguration eurent lieu les 09 et 10 septembre 1938. Cet événement majeur réunit des invités prestigieux en provenance de toute la Suisse et du monde entier. Les médecins côtoyaient les politiques et les notables dans une ambiance d’enthousiasme et de totale admiration pour l’œuvre accomplie.

Le premier enfant accueilli à la Pouponnière Nestlé.

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18 19Parmi les hôtes se trouvaient entre autres, le Conseil d’Etat vaudois in corpore, le Conseiller fédéral Marcel Pilet-Golaz, le Colonel Commandant de Corps Guisan, le vice-président du Conseil national,

Maître Henri Vallotton, le Syndic de Vevey, Henri Deneraz, cent quatre-vingts médecins et professeurs internationaux, les dirigeants de la Société

Nestlé et Madame Louis Dapples, dont le mari aura été le fer de lance du projet.

Après la visite le matin des établissements hospitaliers cantonaux de Lausanne, les convives assistèrent à la cérémonie inaugurale, sous un soleil radieux. Les discours relevaient l’importance d’une telle institution et le besoin qu’elle soit légitimée par la population, pour qu’elle puisse s’épanouir harmonieusement. Pour les uns, l’Etat ne devait pas créer des structures qui se seraient «substituées» au rôle des parents, pour les autres, c’est la participation du privé qui suscitait des craintes. Les interventions se voulaient toutes rassurantes et résolument positives.

«Notre but ne sera pleinement atteint si l’inauguration d’aujourd’hui et la belle et sympathique réunion de ce soir pouvaient

convaincre la communauté de notre idéal et nous valoir votre collaboration confi ante dans la recherche constante du progrès mis au service de l’armée des tout-petits.»

Edouard Muller, président de Nestlé Anglo-Swiss holding, discours inaugural de la Pouponnière Nestlé – Fondation Louis Dapples, 09 septembre 1938.

«S’il est entendu que l’industrie et la clinique doivent chacune garder leur indépendance et suivre leur propre [chemin], il est non moins vrai que nous ne pouvons plus nous passer les uns des autres. (…) La nature même de votre industrie vous confère un rôle éminemment social.»

Dr Rohmer, Clinique infantile de Strasbourg, discours inaugural de la Pouponnière Nestlé – Fondation Louis Dapples, 09 septembre 1938.

«On aimerait pouvoir redevenir bébé, Mesdames et Messieurs, afi n de profi ter, sous l’œil paternel de mon ami Taillens [le directeur médical de la Pouponnière] des agréments délicats et raffi nés de la puériculture veveysanne et vaudoise (…).»

Dr Wieland, ancien directeur de la Clinique infantile de Bâle, discours inaugural de la Pouponnière Nestlé – Fondation Louis Dapples, 09 septembre 1938.

Le lendemain, un autre voyage emmena les hôtes de marque en terres fribourgeoises pour la visite de l’entreprise de chocolat de Broc et du village de Gruyère. Puis ils repartirent, en passant par les Mosses, boire un dernier verre de l’amitié offert par la Municipalité de Vevey.

Pouvait-on fêter plus dignement cette institution dont le succès, après moins d’une année d’activité, était déjà largement reconnu? Ces débuts prometteurs ne se démentirent pas au fi l des ans. Bien au contraire, les visites se multiplièrent et des centaines de nouveaux bébés prirent place dans les moïses de la Pouponnière Nestlé. On venait aussi s’y former, comme ces nurses et sages-femmes vaudoises, fribourgeoises ou valaisannes qui passaient régulièrement par l’institution pour parfaire leurs connaissances auprès des grands spécialistes qu’étaient les Docteurs Taillens et Rivier, ce dernier étant le médecin de référence de la Pouponnière pour le jour.

L’infrastructure et le cadre idyllique impressionnaient tout autant que cette formidable alchimie qui s’était opérée entre les fondateurs, la population et le personnel encadrant. La Pouponnière modèle revêtira un rôle majeur jusqu’à la fi n des années 1960. L’essor des services de pédiatrie dans les hôpitaux de la région, de même que les besoins changeants des parents vinrent sonner le glas de l’institution, au début des années 1970.

De nombreux petits séjournèrent à l’avenue Louis-Levade numéro 6. Des centaines de bébés dont on ignore aujourd’hui le nom. Mais le destin, qui joue parfois bien des tours, en a ramené justement un tout près de l’ancienne pouponnière…

Les sages-femmes valaisannes posent devant la Pouponnière.

Visite médicale des docteurs Taillens et Rivier.

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20 21Comme un air de rêve américain

Jour après jour, des liens s’étaient tissés entre le personnel encadrant de la Pouponnière et ses petits hôtes. Des liens dont les bébés devenus grands ne se souvenaient plus, du moins pas consciemment. Trop jeunes certes pour se rappeler de cette période, et pourtant leur passage à la Pouponnière a marqué leurs premiers pas dans la vie et sans doute leur vie toute entière. Le personnel quant à lui a vu passer des centaines de visages en se demandant souvent au fi l du temps ce que tous ces enfants

avaient bien pu devenir. Étaient-ils en bonne santé? Avaient-ils trouvé leur voie? La vie avait-elle été plus clémente avec eux? Mystère, ou presque…

Parmi les premiers pensionnaires recueillis par la structure, il en est un dont la trajectoire ne cessera de croiser celle de la Pouponnière Nestlé. Digne des meilleurs «happy end» hollywoodiens, sa vie commence toutefois par quelques notes mélancoliques.

De père buraliste à Bottens et de mère nurse à Vevey ayant déjà beaucoup voyagé pour son métier, Pierre Aguet est né le 2 mars 1938 à l’Hôpital de Saint-Loup. Comme d’autres membres de sa famille, sa maman était sujette à des problèmes respiratoires. Son diffi cile accouchement de près de quarante-huit heures, à une époque où l’on ne soulageait que très peu la douleur de la future mère, l’affaiblit encore et elle décéda deux jours plus tard. La situation était donc extrêmement douloureuse pour le jeune papa qui trouva, en la toute nouvelle Pouponnière, l’opportunité de garantir dans l’immédiat une meilleure existence à son fi ls. Pierre, âgé seulement de dix jours, fut placé à la Pouponnière pendant plus d’un an. Comme les autres, il bénéfi ciait des soins prodigués par les nurses et les médecins, il profi tait du soleil pénétrant les nombreuses vitres de cette bâtisse orientée plein sud et il était régulièrement emmené dans son petit moïse sur la vaste terrasse, pour une bonne et saine «cure d’air». Comme disait un journaliste danois en visite à la Pouponnière en 1947: «Tous les beaux bébés ne sont pas des bébés Nestlé, mais tous les bébés

Nestlé sont tous de beaux bébés»; Pierre Aguet devait donc être de ceux-là!

C’est un enfant aguerri qui rejoindra dans un premier temps son grand-papa, puis son père et sa belle-mère à Bottens où il passera son enfance avec son demi-frère André. Son destin sera encore

marqué par d’autres séparations prématurées; son père décèdera lorsqu’il n’avait que dix ans et sa belle-mère cinq ans plus tard. On connaît des enfances plus insouciantes mais point de repli sur soi pour Pierre. Au contraire, après l’école de commerce il travaillera, comme ses aïeux, pour les PTT en tant que postier breveté. Son parcours le conduira à Lausanne, Bex et Vevey où il retournera après un mandat de deux ans auprès du siège bernois de la Poste. Titillé par la chose publique, ce futur conseiller national sera d’abord élu en 1964 conseiller communal à Vevey, puis en 1982, municipal en charge des travaux publics et des affaires sociales.

Ironie du destin, sa fonction de municipal le conduisit à s’occuper directement des struc tures de la petite enfance, dont la garderie Les Marionnettes qui succèdera à la Pouponnière Nestlé en 1974. Retourner pour la première fois dans ces locaux lui a sans doute laissé une curieuse impression de déjà-vu, un sentiment qu’il qualifi era de «positif mais mêlé de picotements diffi ciles à défi nir». Alors même que sa femme renoncera à travailler pour s’occuper de leurs enfants, Pierre Aguet restera un fervent défenseur du développement des places d’accueil de la petite enfance. Un choix nécessaire selon lui pour des mères qui, par besoin ou par envie, souhaitaient continuer de travailler.

L’âge de la retraite ayant sonné, c’est dans une maison sur les hauts de Vevey qu’il élira domicile avec vue sur l’ancienne Pouponnière, sa toute première demeure. La boucle est ainsi bouclée! Les fées se penchent aussi sur les bébés arrachés trop vite aux bras de leurs parents, en leur prêtant des bras de substitution de personnes qu’ils ne connaîtront sans doute jamais, mais qui les auront bercés et leur auront apporté cette chaleur humaine si indispensable à leur bien-être.

Pierre Aguet dans les bras de son papa.

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Quand la couleur apparut...

...la bâtisse n’a que peu changé en plus de septante ans.

...aux espaces d’éveil des petits d’aujourd’hui.

De l’extérieur...

De l’alignement des dizaines de lits pour poupons...

...à ceux bigarrés de 2009.

Des couloirs aseptisés de 1937...

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Des nurses en uniforme des années 1930...

...aujourd’hui, la garderie Les Marionnettes est entourée de maisons.

Depuis l’Eglise St-Martin, on distinguait sans peine la Pouponnière...

... aux éducatrices de ce début de 21e siècle.

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26 27Mères au foyer: heureux bébés?

A l’aube des années 1970, il était rare pour les mères de confi er leur enfant à une nurse, nourrice ou gardienne, sans éprouver un sentiment de culpabilité. Une époque qui mélangeait pêle-mêle émancipation de la femme, boom économique et défense de l’organisation familiale classique. Des slogans tels que «tout se joue dans les six premières années de la vie de l’enfant; restez autant que possible avec votre petit» se heurtaient aux «Mesdames, socialisez-le au plus vite et libérez-vous tout aussi vite»! L’idée de sortir les bambins du nid familial pour une saine découverte de l’autre avait certes ses partisans mais elle était combattue avec vigueur par de farouches détracteurs, pour qui le rôle de mère au foyer demeurait immuable. L’économie, quant à elle, avait bien du mal à combler son manque de personnel, encourageant subrepticement les mères actives à garder leur emploi.

Le besoin de travailler, l’envie de s’émanciper, la nécessité de fournir des bras aux entreprises qui réclamaient des forces vives étaient autant d’indicateurs qui auraient dû pousser l’Etat à créer des places en garderie. Jusque-là, les autorités n’avaient pas jugé prioritaire de développer des structures d’accueil de jour pour enfants. Il était même assez «politiquement incorrect» de le faire. Toutefois, fournir un certain nombre de places en garderie, en offrant ainsi une alternative à qui le désirait, par choix ou par obligation, était progressivement considéré comme un service public à pourvoir absolument.

Cet extrait du Bulletin patronal de 1959 est l’illustration d’une sorte de «politique de l’autruche» qui régnera jusqu’au début des années 1970: «(…) au moment où le manque de personnel se faisait particulièrement sentir, quelques médecins vaudois s’étaient émus du grand nombre de mères de famille exerçant une activité lucrative et faisaient remarquer les fâcheuses conséquences de la séparation de la mère et de l’enfant en bas âge (…). Ils demandaient aux chefs d’entreprise de ne pas favoriser l’embauchage des mères de famille pour lesquelles l’engagement salarié n’est pas une absolue nécessité».

Quand la Pouponnière Nestlé devint la Garderie Les Marionnettes

De ce constat, naîtra une étude menée par la Société vaudoise de médecine (SVM) pour le compte du Secrétariat Patronal, qui exhortera les mères à rester autant que possible près de leurs petits. Or, la SVM admettra que les crèches étaient un mal nécessaire qui se justifi ait dans des cas bien spécifi ques. On y évoquait par exemple la situation des fi lles-mères, des veuves sans ressources, des femmes divorcées avec une pension insuffi sante, des mères débordées ou névrosées. Cette main d’œuvre était utile au patronat qui ne pouvait guerre l’admettre si ouvertement. Il mettait ainsi l’accent sur les mères nécessiteuses, contraintes de travailler. Dans la pratique, l’accueil de la petite enfance n’était néanmoins pas l’apanage des mères modestes qui, d’après l’étude du secrétariat patronal, avaient la légitimité de confi er leur enfant à une gardienne. Bon nombre de femmes aisées revendiquaient elles aussi le droit de placer leurs enfants dans ce type de structures.

A Vevey, on avait vite fait l’inventaire des possibilités d’accueil, peu nombreuses et inadaptées aux critères du moment. La Ville allait pourtant lentement amorcer en ces temps-là le renouveau de sa politique destinée à la petite enfance, en imaginant peu à peu des solutions de garde complètes, préscolaires et parascolaires. Souhaitant faire un point de situation et envisager quelques lignes directrices pour le futur, la Municipalité constitua un groupe de travail qui réunit les représentants d’institutions existantes, telles que la Crèche-Foyer-Refuge ou la Garderie d’enfants interentreprises et les représentants de la Commune.

«Votre enfant craint-il ou se réjouit-il de venir à la garderie?[Réponse d’une mère]: „Il ne comprend pas pourquoi samedi et dimanche il ne peut aller à la garderie.” [Une autre réponse]: „Si un jour il n’y va pas, il pleure et réclame ses petits copains et la demoiselle.”Une autre question encore: „Avez-vous remarqué une certaine évolution depuis que votre enfant fréquente la garderie?” [Réponse d’une maman]: „Oui, il est beaucoup plus discipliné et moins capricieux, surtout pour les repas. Il est moins craintif, commence à savoir jouer seul et avec d’autres enfants.»

Extrait de réponses apportées au questionnaire de la garderie interentreprises, paru dans l’édition n°4 du Bulletin Nestlé de 1969. Ce passage illustre bien les retombées positives d’un placement en garderie, souvent décrié mais petit à petit reconnu, au moins par les clients de ces structures.

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28 29Inventaire des structures d’accueil à Vevey, à la veille de la création des Marionnettes

La Crèche-Foyer-Refuge

Cette bâtisse vétuste, gérée par une fondation privée, souffrait depuis sa création d’un manque de places chronique. Âgée de 86 ans, elle ne répondait plus aux normes cantonales de sécurité, ce qui la condamnait à une disparition imminente. Ni les habitants nostalgiques de l’œuvre du pasteur Cérésole, ni les parents inquiets de ne pouvoir trouver une alternative pour la garde de leurs enfants, ne réussirent à infl échir la position du Service de Protection de la Jeunesse (SPJ) qui ordonna la cessation des activités

de la Crèche-Foyer-Refuge pour la fi n de l’année 1973. Les quel-ques solutions esquissées pour la sauver furent vite abandonnées. L’exigüité des lieux ne permettait pas une réfection adéquate et une reconstruction sur le même terrain était quant à elle impossible. La fermeture de cette structure entraînait à court terme la disparition quasi-totale des places d’accueil disponibles en ville: une pénurie qui inquiétait les Veveysans.

La garderie interentreprises

Diminuer l’absentéisme des parents tout en les motivant à la tâche, c’était un pas que les anglo-saxons franchissaient sans peine en créant les premières crèches d’entreprise. Les Scandinaves les sui-vaient de près mais pour de tous autres motifs, qui visaient avant tout une meilleure intégration de la mère active dans la société du progrès. Les entreprises veveysannes étaient plus sceptiques quant à la possibilité de gérer elles-mêmes des infrastructures analogues. En 1969, elles mirent sur pied une solution hybride: une garderie interentreprises, administrée par une association largement fi nancée par les grands noms de l’économie régionale et qui bénéfi ciait de locaux prêtés par la Commune, bien contente de pouvoir déléguer cette responsabilité.

Cette garderie connaissait des taux d’occupation assez variables, avec une moyenne proche de soixante pour cent. Après son

déménagement dans les locaux provisoires de l’Avenue de Lavaux 8, la fréquentation s’améliora sensiblement avant de stagner une nouvelle fois au moment de la transformation de la Pouponnière Nestlé en garderie.

La Société d’assistance technique pour produits Nestlé (NESTEC) avait par ailleurs mis sur pied, dès avril 1974, une structure d’accueil parascolaire pour écoliers de six à seize ans. Elle n’entrait pas à proprement parlé dans l’équipement social de la petite enfance mais elle était l’une des seules à répondre à un besoin très peu couvert dans la région: occuper les élèves en dehors des heures de cours, pendant l’absence de leurs parents. Cet établissement ouvra ses portes à la Chaussée de la Guinguette, dans le bâtiment des Bosquets et son taux de fréquentation était, comme pour la garderie interentreprises, bien en dessous des attentes.

La halte-garderie communale

Ce dispositif plutôt maigre était encore complété par une halte-garderie communale, située au chemin du Point-du-Jour. Sa capacité d’accueil limitée et son ouverture restreinte, seulement quelques après-midis par semaine, en faisait une structure d’appoint, mais néanmoins très sollicitée. Cette halte-garderie, aujourd’hui privée, existe toujours.

L’avenir des garderies communales allait passer par une bâtisse qui dominait la ville, dans un quartier que d’aucuns jugeaient périphérique: la Pouponnière Nestlé. Jadis haut lieu de la pédiatrie ayant fait la fi erté de Vevey, son maintien était à présent remis en question. L’infrastructure demeurait certes dans un parfait état, mais son rôle était considéré obsolète par une majorité d’habitants. D’une part, les cas cliniques étaient soignés dans les hôpitaux de la région, d’autre part l’idée d’éloigner les enfants de leur famille pendant des mois entiers était devenue impopulaire. Par ailleurs, les assurances-maladie s’étant généralisées aux différentes catégories sociales de la population, il était plus facile de faire face aux problèmes fi nanciers causés par des enfants souffrants.

Quand les poupons accueillirent leurs aînés

Le bâtiment de la Pouponnière avait été cédé à l’Etat de Vaud en 1938, à la condition qu’il ne change pas d’affectation. La Société Nestlé avait jusqu’ici pris en charge tous les frais de fonctionne-ment, faisant du lieu une structure totalement gratuite pour la collectivité publique. Le Canton était

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30 31initialement plutôt défavorable à la transformation de la Pouponnière en crèche, au grand dam de la Municipalité de Vevey qui y voyait une occasion unique de remplacer les structures de l’époque par une garderie répondant mieux aux attentes de ses administrés. La Ville était d’autant plus pressée par le temps que le SPJ avait ordonné la fermeture de la Crèche-Foyer-Refuge.

Changer l’affectation de la Pouponnière posait pour le Canton un problème juridique et pécuniaire. Il fallait non seulement que la Société Nestlé consente à se défaire du contrat et abandonner cette belle vitrine pour permettre la reconversion du bâtiment, mais aussi que Vevey propose un plan adéquat pour fi nancer la future garderie. Les instigateurs du projet pensaient que cette nouvelle structure servirait de moteur pour la création à moyen terme de plusieurs autres garderies ailleurs en ville. En s’inspirant du modèle de la garderie interentreprises, la Commune se disait d’ailleurs disposée à fournir des locaux à des tiers, en leur laissant le soin de les exploiter. Le projet prévoyait de remplacer les poupons par une quinzaine de nourrissons, une quarantaine d’enfants de deux à six ans, auxquels s’ajoutaient une dizaine d’enfants qui auraient dû fréquenter l’école enfantine. Hormis les aménagements indispensables

pour accueillir les nouveaux locataires, l’excellent état de la bâtisse rassurait les partenaires quant à l’effort fi nancier à consentir pour permettre ces rénovations.

La mue qui allait s’opérer sous l’égide de la Ville de Vevey satisfaisait pleinement le SPJ. Ce dernier privilégiait l’ouverture de structures de garde de jour au détriment de pensions pour séjours de longue durée. La conversion de la Pouponnière en garderie suscitait ainsi de plus en plus d’adhésions, y compris celles de Nestlé et des pouvoirs publics. Pourtant les débats n’en fi nissaient pas de perdurer. Les uns craignaient que le nouvel établissement ne coûte trop cher aux contribuables, les autres, en revanche, redoutaient que la fermeture de la Pouponnière ne détériore inévitablement la qualité de vie de l’enfant et de sa mère. Dans sa motion au Conseil communal du 08 février 1974, Madame Nicole Keller s’était faite la porte-parole des veveysans qui appréhendaient cette disparition: «(…) quelle sera la vie des nourrissons? Départ de la maman avec son bébé de la maison vers six heures trente ou sept heures dans la précipitation, l’énervement, dispositions d’esprit habituelles des mamans lorsqu’elles doivent se rendre au travail tôt le matin. Journée douillette à la Pouponnière puis, vers dix-huit heures trente, retour à la maison, souper rapide puis coucher du bébé. Je ne pense pas que cette vie favorise

l’épanouissement des nourrissons». La motion Keller demandait, entre autres, à ce que la future structure puisse fonctionner jour et nuit et qu’on y accueille encore des nouveau-nés. Les exigences du SPJ étant claires, l’ouverture de nuit demeurait exclue. Quant au rôle à proprement parlé de pouponnière, il serait dorénavant exclusivement assuré dans la région par le home-pouponnière de Clarens, alors que la nouvelle institution de Vevey accueillerait pour sa part une section nurserie (garde journalière).

«Nous sommes donc à la merci, dans ce domaine et certainement bien d’autres de décisions irrévocables prises à la suite de publication d’étu-des et de rapports de psychologues qui ne font pas toujours l’unanimité dans ces savants milieux et la font encore moins lorsqu’ils s’affrontent au bon sens populaire…»

Rapport de la Commission du Conseil communal de Vevey chargée d’étudier le préavis concernant la Crèche-garderie Les Marionnettes, octobre 1974.

Malgré les innombrables positions qui s’étaient exprimées de part et d’autre, la transformation éclaire de la Pouponnière sembla être l’issue la plus opportune. Elle permettait à la Commune d’éviter à court terme une carence en places d’accueil et de lui laisser le temps pour réfl échir à un développement à moyen terme. L’avis juridique favorable leva toutes les principales oppositions au projet qui put ainsi voir le jour dans les mois qui suivirent. L’Etat de Vaud remit à titre gratuit à la Commune de Vevey la jouissance de l’immeuble, pour une durée de vingt ans. A son tour, la Commune mettait à disposition gratuitement ces mêmes locaux à la future association en charge de l’exploitation de la garderie.

Dès 1974, on constitua ainsi le comité provisoire de l’Association veveysanne des garderies nurseries et jardins d’enfants (Donation Louis Dapples), présidé par Jean Hofmann, mandataire de la Société Nestlé et administrateur de la Pouponnière. Chaque institution veveysanne de la petite enfance y était représentée, de même que l’Etat de Vaud, la Ville de Vevey et des délégués du secteur privé. Ce groupe fi t avancer très rapidement le dossier : le 31 mars 1974 la Pouponnière cessa défi nitivement ses activités et les travaux de transformation durèrent jusqu’en août. Bien que certaines questions relatives à l’adoption des statuts et à la défi nition de la contribution des communes avoisinantes ou de la politique tarifaire ne fussent pas encore tranchées, il fallait d’ores et déjà trouver un nom à cette toute nouvelle entité. Des vingt-six propositions soumises aux membres du comité, parmi

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32 33lesquelles de nombreuses références aux héros de Disney, ce fut «Les Marionnettes» qui s’imposa.

Avec Les Marionnettes, Vevey tournait la page de la prestigieuse Pouponnière Nestlé pour ouvrir une garderie, certes plus confi dentielle et moins avant-gardiste, mais au combien attendue par la population. Le 02 septembre 1974, huit enfants investirent les lieux mais aucun nourrisson. Des débuts timides, semblables à ceux de la Pouponnière, marquèrent la naissance de la garderie, mais allait-elle connaître le même succès que son illustre prédécesseur?

«Le but de cette Association est de recevoir dans ses locaux (garderie, nurserie et jardin d’enfants) des enfants dont la mère exerce une activité hors du foyer ou dont les parents ne peuvent s’en occuper pour des raisons justifi ées.»

Article 2 du statut de l’Association veveysanne des garderies-nuseries-jardins d’enfants (Donation Louis Dapples), 1974.

Des premières années en dents de scie

L’activité des Marionnettes démarra au ralenti. Pendant les premières années le taux de fréquentation resta relativement bas: en moyenne entre trente et quarante pour cent de 1974 à 1977. On avait pourtant soigné le volet communication en publiant diverses annonces dans la presse, en réalisant différents supports d’informations en plusieurs langues que l’on disposait dans les entreprises, les salons-lavoirs et chez les pédiatres. Il avait même été décidé de créer une commission de publicité afi n d’accroître les chances de succès de ces nombreuses actions de communication que l’on couplait avec des événements de relations publiques, comme cette journée portes-ouvertes pour l’inauguration sans faste de l’établissement, en décembre 1974.

Alors pourquoi la forte demande perçue depuis des mois ne venait-elle pas garnir les rangs des Marionnettes? La crise économique jouait un rôle, de même que l’introduction de l’horaire variable qui avait permis à certains parents d’adapter leur temps de travail au rythme scolaire, en prenant par exemple une pause plus longue à midi ou en par-tant plus tôt l’après-midi. Pour Rachèle Golliard, à l’époque directrice de l’institution,

la raison principale de cette désaffection était ailleurs: les tarifs avaient découragé de nombreux parents. Des tarifs qui avaient d’ailleurs suscité de vives discussions: fallait-il aider les plus démunis, prendre en compte les revenus des ménages, pratiquer un prix de lancement adaptable ensuite, tout en veillant à ne pas s’endetter, ou encore à combien fi xer la contribution des entreprises? On se trouvait devant le dilemme d’une institution largement sous-exploitée qui devait au moins s’autofi nancer, à défaut de dégager des bénéfi ces.

«D’aucuns diront: il est normal qu’une telle entreprise ne „tourne” pas par elle-même… On imagine assez facilement le tollé général si les parents devaient payer le montant réel de pension de leur enfant. Dès lors, il faut accepter qu’une garderie d’enfants fasse partie de l’équipement social et éducatif de la cité, au même titre que l’école, l’hôpital…»

Article d’Elizabeth Fontanaz, Feuille d’Avis de Vevey, édition du 03 décembre 1974.

Devant l’impossibilité d’affronter les diffi cultés fi nancières qui se présentaient à elle, l’Association fut rapidement dissoute, en 1975. Elle assura l’intérim un an de plus, le temps de trouver une solution qui garantirait une exploitation plus rationnelle de la structure. Personne ne souhaitait que les Marionnettes disparaissent car cette garderie offrait des avantages indéniables, tels qu’une situation exceptionnelle, une infrastructure de qualité et un personnel compétent. Or, le défi cit demeurait trop élevé pour entrevoir la pérennité de l’établissement. L’exemple de la crèche-garderie de l’Hôpital du district de Nyon prouvait quant à lui qu’une institution de ce type pouvait être bénéfi ciaire. On n’imaginait pas que les Marionnettes puissent être rentables en quelques mois seulement, mais la situation du moment ne laissait pas présager un avenir prospère. De plus, Vevey n’envisageait point de se soustraire à son rôle social et désirait continuer à soutenir les ménages les moins aisés, excluant de ce fait une augmentation de tarif inconsidérée.

Pour éviter la fermeture de cette toute jeune garderie, deux axes se dégagèrent: confi er la gestion à la Commune ou à une entité intercommunale, demander une contribution aux collectivités avoisinantes, dont les habitants plaçaient leurs enfants à Vevey. Si la Commune de Vevey accepta de reprendre à son compte l’administration de cette structure, les communes de l’agglomération refusèrent quant

Brève interview de Mme Golliard [sic] dans la Feuille d’Avis de Vevey du 03 décembre 1974, quelques jours avant l’inauguration de la garderie des Marionnettes.

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34 35à elles de participer à l’effort fi nancier. En conséquence, dès 1977, les Marionnettes devinrent la première garderie publique de Vevey et les prix facturés aux parents domiciliés hors de la commune furent nettement rehaussés. Parallèlement à cela, la Ville exigea la fermeture de la garderie interen-treprises afi n d’éviter que ne coexistent deux infrastructures à moitié remplies. Le taux d’occupation de cette dernière ayant encore baissé, les responsables de la garderie interentreprises acceptèrent de la condamner.

A l’aube des années 1980, les Marionnettes allaient connaître une augmentation rapide de leurs effectifs jusqu’à atteindre un taux de fréquentation maximal, resté inchangé jusqu’à aujourd’hui. La Commune attendra les années 1990 pour ouvrir de nouvelles garderies et esquisser des projets de partenariat privé-public plus aboutis.

La naissance de la garderie Les Marionnettes et ses premières années d’exploitation

1974 En avril, ouverture de la garderie scolaire Nestec sise dans le bâtiment des Bosquets, chaussée de la Guinguette. Elle accueille des enfants de 6 à 16 ans.

Fermeture en juin de la Crèche-Foyer-Refuge et transformation de la Pouponnière Nestlé en garderie-nurserie-jardin d’enfants.

En septembre, ouverture de la garderie-nurserie-jardin d’enfants «Les Marionnettes». Constitution du comité provisoire de l’Association veveysanne des garderies, nurseries, jardins d’enfants (Donation Louis Dapples). Ce dernier réunit tant des partenaires publics que privés et s’occupe de l’exploitation de la structure, dans l’attente de la création d’une association.

1975 On entérine la création de l’Association veveysanne des garderies, nurseries, jardins d’enfants (Donation Louis Dapples) représentée jusqu’ici par un comité provisoire.

1976 En janvier, lors de l’assemblée générale de l’Association, les membres de cette dernière démissionnent en bloc, faute de moyens pour surmonter les diffi cultés fi nancières auxquelles doivent faire face Les Marionnettes. Création d’un groupe d’étude dont le but est de défi nir comment exploiter cette structure d’accueil plus rationnellement. Il en assure provisoirement la gestion.

En juin, le groupe d’étude remet son rapport et recommande vivement une exploitation communale, voire intercommunale. Cette proposition trouve un bon écho auprès de la Municipalité de Vevey.

1977 L’Association est dissoute le 31 décembre 1976 et la gestion des Marionnettes est reprise au 1er janvier par la Commune de Vevey.

De nouvelles garderies et structures d’accueil parascolaires se créent dès les années 1990

1989 Ouverture de la structure parascolaire La Pomme d’Or, à la rue du Conseil 6.

1992 Ouverture de la garderie Les Sapins, à l’avenue Général Guisan 69.

1995 Fermeture des Sapins et transfert des effectifs dans la nouvelle garderie La Barcarolle, au quai Ernest Ansermet 1-2.

1997 Ouverture de la crèche-association Les Galopins à la rue du Conseil 21.

1999 Réouverture de la garderie Les Sapins.

2001 Extension de la garderie Les Sapins, qui occupe désormais aussi le deuxième étage de la maison de l’avenue Général Guisan 69. Ouverture de la structure parascolaire La Campanule, à l’avenue Louis-Levade 3.

2003 Ouverture de la Garderie Les Cèdres, à la rue du Midi 11.

2007 Ouverture de la structure parascolaire Crédeiles, à l’avenue de Crédeiles 4.

2008 Ouverture de la structure parascolaire Les Petits Pois, à la rue d’Italie 29.

2009 Lancement du réseau REVE, Réseau enfance Vevey et environs; un partenariat privé-public qui réunit, entre autres, plusieurs communes avoisinantes et le groupe Nestlé.

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36 37Petit coup d’oeil derrière la porte des Marionnettes, un jour de 2009

Aujourd’hui les éducatrices ont troqué leur blouse blanche contre une tenue de ville décontractée. Autrefois stoppés net à l’entrée du bâtiment, les parents confi aient leur petit à la puéricultrice sur le pas de la porte, en suivant un cérémonial bien rodé, qui prévoyait par exemple que l’enfant change d’habits une fois introduit dans les lieux. Un rituel destiné à éloigner un ennemi de taille: les microbes! Les

locaux pastels ayant fait place peu à peu à des murs multicolores sont le symbole d’un changement d’état d’esprit qui caractérise les garderies de notre époque.

Germes et virus n’ont certes pas déserté la place, mais les lieux d’accueil pour l’enfance ne sont plus des milieux aseptisés, «coupés du monde». Hygiène, intervention rapide conduisant parfois à l’éviction du bambin, et médicaments, permettent de combattre les tracasseries que connaît chaque enfant. La vie en collectivité préoccupe moins les parents car les étu-des ont démontré qu’il n’y a guerre plus de risques à mélanger les enfants qu’à les surprotéger. Point de bulles stériles pour les petits du 21e siècle qui profi tent autant de l’environnement extérieur que des personnes qui les entourent. Comme le soulignent les pédiatres, au cours de la première année en garderie, l’enfant attrapera facilement toutes les maladies «classiques» qui lui permettront de se constituer plus rapide-ment une bonne immunologie, alors qu’un tel résultat

s’obtient après plusieurs années s’il reste à la maison. Les parents en ont conscience. Il n’y a rien de dramatique à cela, il s’agit avant tout d’une question d’organisation! A une époque où les rythmes s’ac-célèrent et les agendas se remplissent de mille-et-une activités, un enfant malade pose de nombreux problèmes «logistiques». S’absenter du travail pour s’occuper du petit souffrant est bien souvent une source de stress supplémentaire pour la maman. Cela ne l’empêche en tous cas pas de plébisciter les places en garderie et l’inévitable attente pour en obtenir une est parfois vécue comme une situation diffi cilement gérable pour les parents «hyperactifs».

On est bien loin des préoccupations qui animaient les contemporains du pasteur Cérésole et qui perdurèrent jusque dans les années septante. De nos jours, c’est bien le manque de places d’accueil de l’enfance qui est pointé du doigt par bon nombre de parents et ne pas déposer son petit à la garderie deviendrait presque l’exception à la règle. Quelle est la source d’un tel revirement?

Garder son enfant à la maison ou le confi er quelques heures à une éducatrice: l’éternelle question

D’un point de vue économique, faire garder son enfant quelques heures par semaine se justifi e pleinement. Il s’agit d’ailleurs de l’une des principales raisons évoquées depuis plus d’un siècle. Cela va de pair avec les besoins professionnels du couple, la nécessité d’engranger des revenus. L’apparition d’une femme moderne, petit à petit libérée des carcans d’une société gérée en grande partie par des hommes qui ne lui accordaient que peu de place en dehors du foyer, est aussi un des facteurs d’explication. Étudiante, engagée professionnel-lement, cette femme n’en demeure pas moins habitée par un réel désir d’enfants. Pourquoi donc renoncerait-elle à ce qui l’épanouit tant?

D’un point de vue pédiatrique, les spécialistes ont avancé depuis plus de vingt ans des théories qui ont largement contribué à déculpabiliserles mères actives. En effet, en Europe, rares sont les médecins qui soutiendraient encore que mettre son bambin en garderie est mauvais pour son développement psychomoteur. Bien au contraire, se mélan-ger aux autres enfants est important pour son éveil et lui permet de se confronter à de nouvelles situations. La relation mère-enfant reste quant à elle primordiale et le congé maternité, probablement trop bref pour beaucoup, traduit l’importance d’une maman qui doit être proche de son poupon, au moins au cours de ses premières semaines de vie. Il n’y a pas de règle, ni de moment propice pour confi er son enfant à une éducatrice, mais ne pas «détacher» le petit de sa maman avant ses six mois paraît un minimum idéal. Le personnel encadrant joue alors un rôle déterminant dans cette période d’adaptation, parfois plus nécessaire à la mère qu’au petit!

Fête des Marionnettes en septembre 2008, 70 ans après l’inauguration de la Pouponnière Nestlé.

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«Dans les crèches, les puéricultrices ont bien compris cette nécessité de se séparer en douceur, et elles invitent les mamans à une adaptation progressive(…).»

Marcel Rufo, «Détache-moi! Se séparer pour grandir», 2005.

Les éducatrices devenues partenaires

Ce ne sont pas moins de trente éducatrices qui se relayent désormais aux Marionnettes pour assurer le bien-être des petits. Toutes titulaires d’une formation ad-hoc, elles se doivent de cultiver des qualités essentielles d’écoute, de patience et de fl exibilité. Au timon d’un navire d’une centaine d’enfants, elles gèrent sans relâche la journée des petits en répondant à leurs besoins mais aussi en désamorçant les confl its de la vie en collectivité. Fines psychologues, savoir prendre du recul fait partie de leur quotidien et, pour y parvenir, les moments d’échanges de discussions entre collègues sont essentiels.

La mère veut le meilleur pour son enfant et doit se sentir en confi ance, raison pour laquelle elle pose parfois de nombreuses questions pour s’assurer que l’éducatrice sera à la hauteur. Cette dernière ne se

substitue en rien à la maman avec qui elle noue un rapport de collaboration fondamental. L’enfant sait très bien faire la part des choses et, s’il peut donner et recevoir de l’affection d’autres fi gures de référence, le lien avec sa mère reste lui unique. La rivalité demeure absente car chacune garde son rôle.

«Il y a différentes manières de faire les choses, sans mettre en opposition la mère et l’éducatrice. Celle-ci saura trouver les mots pour parler à la maman. La garderie ne symbolise pas l’autorité; c’est une connivence!»

Dr. François De Techtermann, pédiatre de référence des garderies communales de Vevey.

Comme le recommande la majorité des pédopsychiatres d’aujourd’hui, le rythme de l’enfant doit être respecté, un précepte que l’on retrouve dans les garderies

38 communales de Vevey. Néanmoins, notre société de la performance incite certains parents à vouloir des enfants qui apprennent très vite à marcher et parler, qui soient très réceptifs et en avance sur leurs camarades. Car la garderie est aussi un inévitable laboratoire de comparaisons où les parents mesurent les prouesses ou retards de leurs bambins. Or chacun évolue avec son propre tempo et les inquiétudes des adultes n’ont souvent pas lieu d’être.

Vers un service à la carte?

Force est de constater également que les demandes indi-viduelles ont tendance à se multiplier. Dans un contexte de communauté, le service «à la carte» n’est cependant ni possible ni souhaitable. On tient bien sûr compte de tous les critères essentiels à la santé du petit, notamment en matière de régimes spéciaux, mais on ne cède en principe pas aux questions plus superfi cielles qui viseraient à recréer à la garderie des conditions identiques au cocon familial. Pas de marque d’eau scandinave pour tel enfant, ni de soda exotique pour tel autre: tout le monde est logé à la même enseigne, bien que la souplesse reste de rigueur.

La qualité des services rendus par la garderie Les Marionnettes, et plus généralement par les garderies communales, en ont fait leur succès. Les places ne sont pas suffi santes et le développement des structures d’accueil est une priorité pour la Commune. Chaque ouverture d’une garderie génère toutefois des coûts très élevés et demande une organisation rigoureuse. Dans un contexte de mobilité très soutenue, les partenariats sont essentiels pour mener une politique effi cace et rationnelle. C’est pourquoi ce début de siècle marque un tournant dans la constitution de réseaux, maintes fois imaginés dans le passé, mais jamais réalisés jusqu’ici.

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Quid des diverses formes d’accueil de l’enfance

Aujourd’hui les grandes communes disposent d’un éventail assez large de possibilités d’accueil pour les enfants en bas âge. Elles peuvent être aussi bien gérées par l’administration publique, une fondation privée ou mixte. Les terminologies utilisées pour les décrire ont souvent été sujettes au changement. On qualifi e à présent les principales formes comme suit:

Accueil préscolaire: des lieux d’accueil ouverts aux enfants dès la fi n du congé maternité jusqu’à l’âge de l’entrée à l’école enfantine. On y distingue plusieurs groupes d’enfants: de 0 à 18 mois (nurserie); de 18 à 30 mois (trotteurs); de 30 mois à 4 ans ½ (moyens).

Accueil parascolaire: des lieux d’accueil ouverts aux enfants du cycle initial et du cycle primaire (de 4 ½ à 10 ans).

Accueil en milieu familial: un réseau qui propose un placement de jour auprès d’une accueillante en milieu familial (autrefois appelée maman de jour) pour les enfants de zéro à douze ans. Elles sont chapeautées par une coordinatrice.

Les haltes-garderies: des établissements à temps d’ouverture restreint, qui servent de lieu d’accueil ponctuel pour des enfants. Il ne s’agit pas d’un accueil régulier à la journée, mais plus d’une situation de dépannage ou afi n de socialiser l’enfant.

40 Naissance du Réseau Enfance Vevey et Environs (REVE)

Concilier vie de famille et vie professionnelle est aujourd’hui non seulement un objectif des parents mais également du Canton de Vaud. Le développement des structures de l’enfance passe désormais inévitablement par les réseaux. Dans la région, plusieurs études avaient déjà été menées dans les années 1990, époque où l’on parlait d’une vaste zone allant de Vevey à Montreux, dotée d’un ensemble de mesures communes et d’une politique tarifaire unique.

Près de vingt ans plus tard, ce n’est pas un, mais trois réseaux qui ont vu le jour sur la Riviera, et vingt-huit sur l’ensemble du Canton. Le véritable accélérateur du processus a été l’adoption en 2006 par le Grand Conseil vaudois de la Loi sur l’Accueil de Jour des Enfants (LAJE). Cette dernière encourage notamment les synergies entre le secteur public et privé afi n de susciter les interactions nécessaires au développement optimal des places d’accueil pour les petits vaudois. Elle reprend par ailleurs l’idée d’une communauté tarifaire unique par réseau.

Pour pouvoir bénéfi cier des subventions de la Fondation pour l’Accueil de Jour des Enfants (FAJE) issue de la LAJE, les structures d’accueil ont dû s’organiser en réseaux susceptibles de proposer au moins deux des trois types d’accueil existant (préscolaire, parascolaire, familial de jour). C’est ainsi qu’est né en 2009 le REVE, Réseau Enfance Vevey et Environs. En font partie, les communes de Corseaux, Corsier-sur-Vevey, Chardonne, Jongny, La Tour-de-Peilz et Vevey; les associations l’Entraide familiale et Les Galopins; la Fondation des structures d’accueil de l’enfance de la Tour-de-Peilz; le groupe Nestlé.

Les structures du REVE gardent leur indépendance en termes d’organisation tout en ayant une gestion des demandes de placement centralisée. Les habitants des six communes concernées, soit un bassin de population de plus de trente-sept mille personnes et les employés du Groupe Nestlé ont accès à l’ensemble des places.

Des réseaux régionaux pour créer de nouvelles places d’accueil

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Voué à se développer très rapidement dans le futur, le REVE répond aux objectifs fi xés par la FAJE, en prévoyant notamment de créer des dizaines de nouvelles places d’accueil dans la région. Le partenariat avec l’économie privée a toujours revêtu un rôle fondamental à Vevey, étant bien souvent le fer de lance d’initiatives aussi importantes que la Pouponnière ou la garderie interentreprises. Étroitement imbriqués l’un dans l’autre, le secteur privé et le secteur public sont conscients qu’une collaboration étroite est primordiale et que chacun d’eux a avantage à développer des structures d’accueil. En quelques années seulement, plusieurs milliers de places supplémentaires verront le jour sur le territoire vaudois; une offre considérablement étoffée, avec un taux de croissance sans précédent. C’est ainsi que le Canton de Vaud peut se targuer d’avoir été désigné par l’Institut des hautes études en administration publique (IDHEAP) comme l’un des plus «familienfreundlich» de Suisse!

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Le soleil se couche aux Marionnettes

43Le soleil se couche peu à peu sur les Marionnettes. Le va-et-vient des parents, venus récupérer leurs enfants, a repris de plus belle. Des journées bien remplies pour chacun, heureux de se retrouver pour les uns, et se quittant avec la promesse de se revoir très vite pour les autres.

Depuis des années, ces lieux chargés d’histoire ont vu défi ler des centaines de petits d’ici ou d’ailleurs, des médecins réputés et des visiteurs prestigieux, sous l’œil de ces innombrables éducatrices qui ont toujours veillé sur les enfants avec la plus grande attention. Ces personnes ont donné ce supplément d’âme nécessaire à toute structure d’accueil, qu’elle soit ancienne ou moderne. Entourer l’enfant, lui prodiguer des soins, participer à son éveil, autant de missions qui se sont transformées au cours des années mais qui ont eu un seul et même objectif: le bien-être des enfants.

Plus de cent ans ont passé depuis l’ouverture de la première crèche de Vevey. Au fi l du temps, la création de places d’accueil pour enfants est devenue le pilier de la politique familiale promue par la Ville. Le contexte est différent, mais l’ardeur que l’on déploie pour y arriver n’est pas sans rappeler la détermination qui animait jadis le pasteur Cérésole. Aujourd’hui, ces initiatives sont heureusement largement soutenues par la population, car les structures d’accueil semblent essentielles à l’épanouissement des petits et de leurs parents. Vevey n’est plus démunie en la matière. La Commune possède désormais de nombreuses possibilités d’accueil et autant de projets qui verront bientôt le jour, dans le contexte fertile du réseau REVE.

La garderie Les Marionnettes est aujourd’hui encore la plus grande structure de la Ville et sa position privilégiée à l’avenue Louis-Levade en fait un lieu très apprécié des enfants et des adultes. Les Marionnettes continueront de jouer un rôle central dans la constellation des lieux d’accueil qui s’enrichissent chaque année de nouvelles places dans la région. Gageons pour leur futur qu’ils aient beaucoup d’enfants et qu’ils vivent heureux!

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Bibliographie

Archives communales de Vevey.

Archives historiques Nestlé, Vevey.

Alfred Cérésole, «Notes historiques de la Ville de Vevey»; Imprimerie de Vevey – Loertscher et fi ls, 1890.

Myriam David et Geneviève Appell, «Lócszy ou le maternage insolite»; éditions Érès, mai 2008.

FAJE, «Rapport annuel 2007»; juin 2008.

Marcel Rufo, «Détache-moi! Se séparer pour grandir»; éditions Anne Carrière, octobre 2007.

Sciences Humaines magazine, Grand Dossier n° 8 coordonné par Martine Fournier, «L’enfant du 21e siècle»; édition de septembre-octobre-novembre 2007.

Crédits photos

Archives communales de Vevey: pages 8-9, 11.

Archives historiques Nestlé, Vevey: pages 24, 32.; Emile Gos page 15; De Jongh pages 1, 16-17, 19, 22-23, 25; A. Marolf page 18.

Pierre-Yves Vonlanthen: pages 1, 22-23, 24-25.

Séverine Egger et le personnel éducatif des Marionnettes: pages 28, 30, 33, 36-37, 39, 41, 42.

Vignettes biographiques (page 12)

Thomas Berry Brazelton, pédiatre, Etats-Unis, né en 1918.

Françoise Dolto, pédiatre-psychanalyste, France (1908–1988).

Donald Wood Winnicott, pédiatre-psychanalyste, Grande Bretagne (1896–1971).

René A. Spitz, psychiatre-psychanalyste, Etats-Unis (1887–1974).

John Bowlby, psychiatre-psychanalyste, Grande Bretagne (1907–1990).

Bibliographie, crédits photos, biographies et remerciements

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Un remerciement spécial pour leur aimable disponibilité à: Christiane Devaud, directrice de la garderie communale «Les Marionnettes»; Docteur François De Techtermann, médecin-pédiatre référent des garderies communales de Vevey, Pierre Aguet, Christophe Bornand, chef de service de la Direction des Affaires sociales et familiales, et Christophe Gerber, son adjoint.

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