t2a et chirurgie orbitopalpébrale : l’ambulatoire est-il vraiment rentable pour...

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Journal français d’ophtalmologie (2010) 33, 312—318 ARTICLE ORIGINAL T2A et chirurgie orbitopalpébrale : l’ambulatoire est-il vraiment rentable pour l’établissement ? Activity-based financing: Is ambulatory care profitable for the institution? M. Souchier a , A. Muselier a , M. Vourch b , H. Aubé b , A. Juniot c , C. Creuzot-Garcher a , A.-M. Bron a,a Service d’ophtalmologie, hôpital Général, centre hospitalier universitaire de Dijon, 3, rue du Faubourg-Raines, BP 1519, 21000 Dijon cedex, France b Département d’information médicale, centre hospitalier universitaire de Dijon, 21000 Dijon, France c Département d’anesthésie-réanimation, centre hospitalier universitaire de Dijon, 21033 Dijon, France Rec ¸u le 23 d´ ecembre 2009 ; accepté le 16 f´ evrier 2010 MOTS CLÉS T2A ; Chirurgie ambulatoire ; Chirurgie palpébrale ; Chirurgie lacrymale ; Chirurgie de l’orbite Résumé Introduction. — Une nouvelle version de la tarification à l’activité (T2A) a été publiée le 1 er mars 2009. Nous avons cherché à évaluer son retentissement sur les recettes liées aux chirurgies des paupières, des voies lacrymales, des cavités et de l’orbite antérieure dans un service hospitalier d’ophtalmologie. Patients et méthodes. — Nous avons recueilli le nombre d’actes effectués en 2008 ainsi que les codes correspondant à ces chirurgies. Nous avons utilisé les tarifs des trois groupes homogènes de séjour (GHS) de la V11, pour ces codes et avons comparé la totalité des recettes directes obtenues pour un acte pratiqué en ambulatoire ou en hospitalisation d’une ou plusieurs nuits. Résultats. — Deux cent quarante-huit patients opérés entre janvier et décembre 2008 ont été inclus. Pour 87,5 % des patients, l’intervention s’est déroulée en ambulatoire. La moins bonne rétribution des actes en ambulatoire entraînerait un manque à gagner pour la structure hospi- talière d’environ 184 500 euros sur un an (soit 79 % des recettes liées à ces types de chirurgie sur l’année). Discussion. — À l’aide d’une organisation rigoureuse, il est possible de faire bénéficier la majorité de nos patients d’une prise en charge en ambulatoire. Néanmoins, la T2A ne favorise Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A.-M. Bron). 0181-5512/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.jfo.2010.03.008

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ournal français d’ophtalmologie (2010) 33, 312—318

RTICLE ORIGINAL

2A et chirurgie orbitopalpébrale : l’ambulatoirest-il vraiment rentable pour l’établissement ?

ctivity-based financing: Is ambulatory care profitable for the institution?

M. Souchiera, A. Museliera, M. Vourchb, H. Aubéb,A. Juniotc, C. Creuzot-Garchera, A.-M. Brona,∗

a Service d’ophtalmologie, hôpital Général, centre hospitalier universitaire de Dijon,3, rue du Faubourg-Raines, BP 1519, 21000 Dijon cedex, Franceb Département d’information médicale, centre hospitalier universitaire de Dijon,21000 Dijon, Francec Département d’anesthésie-réanimation, centre hospitalier universitairede Dijon, 21033 Dijon, France

Recu le 23 decembre 2009 ; accepté le 16 fevrier 2010

MOTS CLÉST2A ;Chirurgieambulatoire ;Chirurgie palpébrale ;Chirurgie lacrymale ;Chirurgie de l’orbite

RésuméIntroduction. — Une nouvelle version de la tarification à l’activité (T2A) a été publiée le 1er mars2009. Nous avons cherché à évaluer son retentissement sur les recettes liées aux chirurgies despaupières, des voies lacrymales, des cavités et de l’orbite antérieure dans un service hospitalierd’ophtalmologie.Patients et méthodes. — Nous avons recueilli le nombre d’actes effectués en 2008 ainsi que lescodes correspondant à ces chirurgies. Nous avons utilisé les tarifs des trois groupes homogènesde séjour (GHS) de la V11, pour ces codes et avons comparé la totalité des recettes directesobtenues pour un acte pratiqué en ambulatoire ou en hospitalisation d’une ou plusieurs nuits.Résultats. — Deux cent quarante-huit patients opérés entre janvier et décembre 2008 ont étéinclus. Pour 87,5 % des patients, l’intervention s’est déroulée en ambulatoire. La moins bonne

rétribution des actes en ambulatoire entraînerait un manque à gagner pour la structure hospi-talière d’environ 184 500 euros sur un an (soit 79 % des recettes liées à ces types de chirurgiesur l’année). Discussion. — À l’aide d’une organisation rigoureuse, il est possible de faire bénéficier lamajorité de nos patients d’une prise en charge en ambulatoire. Néanmoins, la T2A ne favorise

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (A.-M. Bron).

181-5512/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.oi:10.1016/j.jfo.2010.03.008

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actuellement pas financièrement ce mode de prise en charge dans le domaine de la chirurgieorbitopalpébro-lacrymale, et il faut espérer à l’avenir une évolution de cette tarification versplus de cohérence.© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDSActivity-basedfinancing;Ambulatory;Palpebral surgery;Lacrimal surgery;Orbital surgery

SummaryIntroduction. — The aim of this study was to evaluate the impact of the 11th version of the Natio-nal Health System’s Activity-Based Financing on the income of a University Hospital departmentfor palpebral, lacrimal, and orbital surgeries.Patients and methods. — The number of such surgeries in 2008 was based on the MedicalizationProgram of the Information System. Using the 11th version of the Activity-Based Financing forDiagnosis-Related Groups, we compared the income in both inpatient and outpatient settings.Results. — Two hundred and forty-eight patients undergoing palpebral, lacrimal, or orbital sur-gery between January and December 2008 were included, with 87% treated on an outpatientbasis. The lower reimbursement for outpatient surgery resulted in a loss of 184,500 euros (79%)for our department compared to the inpatient procedure.Discussion. — With rigorous organization, ambulatory surgery is feasible for palpebral, lacri-mal, and orbital surgery. Nonetheless, with department incomes related to activity, ambulatorycare seems financially disadvantageous. Many departments are trying to develop an ambulatory

alance their budget requires improved coherence.All rights reserved.

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structure, but the need to b© 2010 Elsevier Masson SAS.

Introduction

Le financement des structures hospitalières publiques etprivées a grandement évolué ces dernières années. Afinde favoriser les coopérations entre établissements, maisaussi le contrôle de gestion, l’Assurance maladie a choisi decréer un modèle unique de financement, lié exclusivement àl’estimation de l’activité, et qui devrait être identique pourle privé et le public à l’horizon 2018.

Une nouvelle version de la tarification à l’activité (T2A)est publiée au moins une fois par an, et ainsi supposéerépondre à l’évolution des besoins et des coûts engendréspar chaque acte.

Le centre hospitalier universitaire (CHU) de Dijon achoisi de transformer en 2007 le service d’ophtalmologie enunité d’ambulatoire pour plusieurs raisons : les progrès destechniques anesthésiques et chirurgicales permettaient deminimiser les suites opératoires, la prise en charge en ambu-latoire conduisait à une réduction des coûts qui était prônéepar l’Assurance maladie, et enfin la demande de ce type deséjour par les patients était croissante.

Malheureusement, ce mode d’hospitalisation est actuel-lement nettement moins bien valorisé sur le plan financier.Creuzot et al. [1] ont ainsi montré que ce typed’hospitalisation dans le domaine de la chirurgie vitréo-rétinienne avait été responsable d’un manque à gagnerpour l’hôpital d’environ 400 000 euros sur l’exercice 2007.Plus récemment, Muselier et al. [2] ont chiffré le manqueà gagner dans le domaine de la chirurgie du glaucomeà 100 000 euros sur l’année 2009, mais également mis enlumière les nombreuses discordances de rétribution finan-

cière observées selon les actes.

Avec la même méthode d’analyse, nous avons souhaitéexplorer le retentissement financier de la dernière version11 de la T2A, sur l’activité de chirurgie orbitopalpébro-

acrymale, en prenant comme valeur de référence l’activitée l’ensemble de l’année 2008 dans ce domaine.

atients et méthodes

e travail rétrospectif, mené dans le service’ophtalmologie du CHU de Dijon, a porté sur l’étudee l’activité orbitopalpébro-lacrymale du 2 janvier 2008 au1 décembre 2008. Tous les patients hospitalisés pourhirurgie des paupières, des voies lacrymales ou de l’orbitent été inclus.

Les données suivantes les concernant ont été analysées :démographiques : âge, sexe, origine géographique (dépar-tementale ou pas) ;organisationnelle : nombre de patients hospitalisés etmotifs d’hospitalisation, nombre de patients ayant béné-ficié d’une structure d’accueil (maison des parents) ;suivi : nombre de patients ayant consulté en urgence aprèsl’intervention chirurgicale en dehors des consultationsprogrammées.

rganisation de l’ambulatoire et sélection desatients

’organisation de la chirurgie ambulatoire reposait sur desritères précis :

une exclusion des patients qui présentaient :◦ un isolement social (impossibilité d’être accompagné

par un tiers à la sortie du service et la nuit suivant

l’intervention),

◦ des comorbidités lourdes associées,◦ une observance prévisible insuffisante des soins post-

opératoires ;

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314 M. Souchier et al.

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igure 1. Codage du groupe homogène de malades (GHM) en oph

un accompagnement du patient par contact téléphoniqueétait systématiquement réalisé le jour avant la chirur-gie afin de vérifier la bonne compréhension des consignesd’antisepsie, l’horaire d’arrivée à l’hôpital et le len-demain de la chirurgie pour s’assurer de l’absence dedouleurs, de l’observance des traitements, des signes cli-niques devant conduire à une consultation d’urgence ;des documents écrits détaillés sur la chirurgie, ses modali-tés, les ordonnances et le courrier de sortie à transmettreau médecin étaient remis au patient.

Ont été exclus de l’étude les patients ayant eu une chi-urgie palpébrale, mais non hospitalisés (cure de chalazion,éalisation d’une tarsorraphie, etc.).

arification à l’activité

epuis 2008, l’Assurance maladie paie 100 % du prix duéjour à la structure hospitalière, sous réserve du taux derise en charge dont bénéficie le patient.

Ce prix de séjour et donc la rétribution allouée à latructure repose sur une valorisation du groupe homogènee séjour (GHS) actualisée au minimum tous les ans et quiient compte de la durée d’hospitalisation. En ophtalmolo-ie, chaque GHS équivaut à un groupe homogène de maladeGHM). Le GHM est déterminé grâce à un algorithme infor-atisé, dit « fonction de groupage », à partir du résumé de

ortie anonyme (RSA). Ce RSA regroupe le codage de la clas-ification commune des actes médicaux (CCAM) et le codageiagnostique (CIM 10). Le code GHM est constitué commeécrit sur la Fig. 1, les diagnostics associés au diagnosticrincipal ophtalmologique peuvent être des complicationsu morbidités associées (CMA) qui déterminent le niveau duHM représenté par le dernier caractère de son code.

La nouvelle version de la fonction de groupage (version1) applique des tarifs qui dépendent du GHM correspon-

ant au patient, de ses comorbidités et du nombre de nuitsassées à l’hôpital.

Afin d’évaluer l’impact financier de la V11 sur l’activitée la chirurgie des paupières, des voies lacrymales et de’orbite, nous avons recueilli les nombres d’actes réalisés

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ologie.

n 2008 en comparant les tarifs des GHS en ambulatoire oun hospitalisation avec un ou deux nuits, tarifs indiqués para version 11 de la T2A [3].

ésultats

aractéristiques des patients

e janvier à décembre 2008, 2671 patients ont eu une chi-urgie dans le service d’Ophtalmologie du CHU de Dijon.eux cent quarante huit patients opérés des paupières,es voies lacrymales ou de l’orbite ont été inclus. L’âgeoyen était 59,4 ± 24,9 (moyenne ± écart-type) ans. Vingt-

ix patients étaient mineurs, pour 222 adultes. Le nombre deemmes opérées était strictement égal à celui des hommesn = 124 dans chaque groupe). Soixante-neuf pour cent desatients habitaient dans le département (Côte-d’Or), 20,9 %enaient d’autres départements de la région et 10,1 %taient issus d’autres régions. Deux cent dix-sept patients87,5 %) ont bénéficié d’une prise en charge en ambulatoirelors que 31 patients (12,5 %) ont été hébergés en hospita-isation traditionnelle. Pour ces derniers, l’hospitalisationtait motivée par le très jeune âge, le contexte d’urgence,es raisons anesthésiques ou encore par le contexte social.

aractéristiques des chirurgies

ent soixante-quatre patients ont été opérés pour unroblème purement palpébral, quatre ont bénéficié d’uneste combiné sur les paupières et voies lacrymales,4 ont été opérés des voies lacrymales, et 17 de l’orbiteTableaux 1 et 2). Un questionnaire anonyme a permis’apprécier la satisfaction des patients à l’issue de leuréjour.

omplications postopératoires

n examen postopératoire était réalisé pour tous lesatients avant la sortie du service, pour dépister notammentne éventuelle amaurose ou un hématome postopératoire.

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T2A et chirurgie orbitopalpébrale

Tableau 1 Actes orbitopalpébro-lacrymaux réalisés en2008 et ouvrant droit à un GHS.

Codes CCAM Nombred’actes en2008

Paupières BABA001 24BABA001 + BADA003 1BABA001 + BAFA008 3BACA003 3BACA006 2BADA003 40BADA003 + BAFA004 2BADA003 + BAFA008 1BADA003 + BAFA011 1BADA003 + BAMA012 1BADA006 1BAEA002 2BAFA004 14BAFA004 + BAFA008 1BAFA008 21BAFA009 6BAFA011 4BAFA013 10BAFA014 3BAFA014 + BBMA003 1BAMA012 1BAMA013 20BAMA016 1

Voies lacrymales BBCA003 22BBCA003 + BBMA003 4BBFA002 2BBLD003 14BBLD004 4BBMA003 14BBMA002 1BBMA004 3

Chirurgiescombinéespaupières + voieslacrymales

BACA003 + BBLD003 1BACA006 + BBMA002 1BADA003 + BBLD004 1BAFA014 + BBLD004 1

Orbite BHGA006 4BHGA007 9BKHA002 4

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aede séjour hospitalier court limite le temps d’exposition aux

Total 248

Des informations précises étaient données aux patientsquant aux signes d’alerte éventuels nécessitant une consul-tation en urgence. Une consultation dans le service étaitprogrammée dans les six à dix jours suivant la chirurgie,pour contrôler l’état local, et réaliser l’ablation de sutureséventuelles. Une seconde consultation était programméeenviron 30 jours après la chirurgie, soit dans le service,soit auprès de l’ophtalmologiste traitant. Trois patients (soit

1,2 % des patients) sont revenus consulter prématurément :l’un présentait un hématome palpébral préseptal survenusous traitement anticoagulant et qui a été évacué, lesdeux autres présentaient une extériorisation du matériel

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315

’intubation canaliculaire. Aucune surinfection ni douleurésistante au traitement prescrit n’ont été constatées.

ilan financier de l’année 2008 (avec les tarifsHS de la version 11)

’ensemble de nos patients ont selon la version 11 de la T2Até regroupés en trois GHM (Tableau 3) :racine 02C03 : intervention sur l’orbite ;racine 02C07 : correspondant aux actes effectués sur lespaupières et voies lacrymales chez des patients de moinsde 18 ans ;racine 02C08 : correspondant aux mêmes actes effectuéschez des patients d’au moins 18 ans [3].

Le tarif GHM pour les interventions réalisées sur’orbite varie de 1478,77 euros pour une nuit ou moins’hospitalisation à 2730,59 euros pour deux ou trois nuits. Il’élève à 5737,27 euros pour au moins quatre nuits à condi-ion que soient associées des comorbidités ou que l’âge duatient soit supérieur 79 ans.

Le tarif GHM 02C08 passe de 910 euros pour une hospitali-ation en ambulatoire à 1611,15 euros si une nuit est passéel’hôpital. Il peut monter à 4163 euros au-delà de trois nuitsn cas de comorbidités ou si le patient a plus de 79 ans.

Le tarif du GHM 02C07 débute à 835,51 euros pour unerise en charge en ambulatoire. Il passe à 1551,90 si uneuit est effectuée et peut s’élever à 3416,20 euros au-delàe trois nuits en présence de comorbidités et si l’âge estnférieur à deux ans.

Si l’on appliquait la version 11 de la T2A à l’activité008, et en considérant que tous nos patients ont été prisn charge en ambulatoire, la rémunération totale pour latructure hospitalière serait respectivement pour les racines2C03, 02C07, et 02C08 de 24 119, 19 217 et 189280 euros,oit un total de 232 616 euros. En revanche, si l’on avait hos-italisé au moins une nuit nos patients opérés de paupièrest voies lacrymales, et au moins deux nuits nos patients opé-és de l’orbite, la rémunération aurait été pour les mêmesacines de 46 420, 35 673 et 335119 euros, pour un total de17 212 euros. Le manque à gagner virtuel en rapport avec’activité orbitopalpébro-lacrymale pour l’année 2008, et liéu mode d’hospitalisation, s’élèverait donc à 184 596 euros,oit 79 % de la recette annuelle !

iscussion

a prise en charge en ambulatoire semble adaptée à unombre important de patients devant bénéficier d’une chi-urgie des paupières, des voies lacrymales ou de l’orbitentérieure. Cette proposition nécessite une sélection rigou-euse des patients et la prise en compte de l’aspect social :e patient vit-il seul ? Peut-il être joignable par téléphone ?

Il a été montré que le taux d’infection postopératoireprès chirurgie palpébrale réalisée en ambulatoire étaitxtrêmement faible (de l’ordre de 0,04 %) [4]. Le temps

ermes nosocomiaux et donc très probablement le risque’infection nosocomiale. Cela a été montré pour la chirur-ie de la cataracte, mais pas à notre connaissance poura chirurgie orbitopalpébro-lacrymale [5]. En outre, cette

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316 M. Souchier et al.

Tableau 2 Correspondance des codes CCAM et des intitulés des actes.

Code CCAM Intitulé

BABA001 Raccourcissement du muscle releveur de la paupière supérieureBACA003 Suture partielle ou totale des bords libres des paupières supérieure et inférieureBACA006 Suture de plaies cutanées multiples unilatérales ou bilatérales des paupières avec atteinte du bord

libre, du releveur de la paupière supérieure, sans repositionnement du ligament palpébralBADA003 Canthopexie latéraleBADA006 Suspension unilatérale de la paupière supérieure au muscle frontal, avec autogreffeBAEA002 Repositionnement du bord libre de la paupière, avec autogreffe ou lambeauBAFA004 Résection de la lame profonde du muscle releveur de la paupière supérieureBAFA008 Résection bilatérale cutanée, musculaire et/ou graisseuse au niveau des paupières supérieures, par

abord cutanéBAFA009 Résection bilatérale cutanée, musculaire et/ou graisseuse au niveau des paupières par abord cutanéBAFA011 Résection bilatérale cutanée, musculaire et/ou graisseuse au niveau des paupières inférieures, par

abord cutanéBAFA013 Exérèse de chalazionBAFA014 Exérèse transfixiante de lésion d’une paupière, sans libération du canthus latéralBAMA012 Reconstruction du bord libre de la paupière avec repositionnement des cils, sans autogreffe ni lambeauBAMA013 Réparation de perte de substance de la paupière inférieure par lambeau régional, avec autogreffeBAMA016 Reconstruction du bord libre de la paupière avec repositionnement des cils, avec autogreffe ou lambeauBBCA003 Dacryo-cysto-rhinostomie (DCR), par abord facialBBFA002 Exérèse et/ou plastie d’un point lacrymalBBLD003 Sondage des voies lacrymalesBBLD004 Intubation monocanaliculaire unilatérale ou bilatérale des voies lacrymalesBBMA002 Rétablissement de la continuité des canalicules lacrymaux pour ruptureBBMA003 Rétablissement de la continuité des canalicules lacrymaux pour sténose, avec intubation canaliculaireBBMA004 Rétablissement de la continuité des canalicules lacrymaux pour rupture, avec intubation canaliculaireBHGA006 Éviscération du bulbe (globe) oculaire, avec comblement de la cavité sclérale

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BHGA007 Énucléation du bulbe (globe) oculaire, aveBKHA002 Biopsie de lésion de l’orbite, par abord co

ttitude répond aux patients qui expriment de manièreroissante leur souhait de séjourner le moins longtemps pos-ible à l’hôpital. Tous nos patients se sont d’ailleurs avérésatisfaits des conditions de prise en charge comme l’avaientéjà décrit Henning et al. et Muselier et al. pour la chirurgiee la cataracte et/ou du glaucome [2,6].

La chirurgie ambulatoire est rendue possible par’amélioration des techniques chirurgicales, mais aussi par

es progrès anesthésiques, notamment pour la chirurgiees voies lacrymales ou de l’orbite [7—10]. La réalisa-ion de blocs anesthésiques locorégionaux, possible cheza majorité de nos patients, permet un acte chirurgi-

nd

s

Tableau 3 Rémunérations des GHM selon la durée d’hospital11 de la T2A [3].

Intitulé GHM Racine GHM Quel

Interventions surl’orbite

02CO3 0—11418

Autres interventionsextra-oculaires

02C08 (> 17 ans) 0 nui910,

02C07 (< 18 ans) 0 nui835,

CMA : comorbidités associées.

sertion d’un implant biocolonisablectivopalpébral

al avec un retentissement minimal sur l’état général.orsque les blocs ne sont pas réalisables (jeune âge, anxiétéajeure, état mental, barrière linguistique, localisation

umorale), l’emploi de drogues à courte durée d’action pour’anesthésie générale permet un réveil rapide et de bonneualité. Les anticoagulants n’ont pas été stoppés pour lahirurgie palpébro-lacrymale de nos patients, sans que cela’entraîne de difficulté per-opératoire ou de complication

otable, tout en évitant les problèmes liés au déséquilibreu traitement [11].

Par ailleurs, une consultation postopératoire à j1 neemble pas indispensable sur le plan médical, à condition

isation, des comorbidités ou de l’âge, d’après la version

s que soient l’âge et CMA CMA et/ou >79 ans

nuit ≥ 2 nuits ≥ 4 nuits,77D 2730,59D 5737,27D

t ≥ 1 nuit ≥ 3 nuits00D 1611,15D 4163,27D

t ≥ 1 nuit ≥ 3 nuits51D 1551,90D 3416,20D

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T2A et chirurgie orbitopalpébrale

que le suivi soit parfaitement organisé, que le personnelmédical et paramédical reste disponible et qu’une informa-tion éclairée soit transmise au patient [12,13].

Sur le plan financier, en revanche, le bilan est moins posi-tif, et ne favorise pas une prise en charge en ambulatoire, àl’inverse de l’intervention pour cataracte dont le GHS resteà 1513 euros, que le patient passe une nuit ou pas à l’hôpital.

À travers ces résultats, nous faisons également le constatque les GHM, dans ce domaine, regroupent en réalitéune population de malades très hétérogène ! La diffi-culté de l’acte opératoire ne semble aucunement priseen compte. Est-il cohérent de rétribuer la structure hos-pitalière de manière identique pour un sondage simpledes voies lacrymales sous masque ou pour une dacryo-cysto-rhinostomie qui engage nettement plus de temps, dematériel et de personnel ? Peut-on vraiment comparer chezl’adulte une plastie du point lacrymal et une exérèse largede tumeur palpébrale avec reconstruction ? Doit-on rému-nérer de la même facon une biopsie de tumeur orbitaireantérieure et une exentération ?

Étrangement, la T2A ne considère pas non plus, ni lacombinaison d’actes, ni leur caractère uni- ou bilatéral. Siau moins deux actes sont effectués, seul le GHM d’ordrehiérarchique le plus élevé (l’ordre n’étant pas forcémentdéfini par le montant financier attribué à l’acte) est prisen compte. Il peut ainsi s’avérer très avantageux d’associerdans le cas d’une paralysie faciale avec ulcère cornéen creu-sant, une greffe de membrane amniotique à la chirurgiepalpébrale. Une tarsorraphie simple, appartenant à la racine02C08 est normalement rétribuée 910 euros en ambulatoire.Si le geste est associé à une greffe de membrane amniotique(racine 02C09), seul ce dernier acte sera considéré, don-nant droit à une rémunération de 2740 euros ! La tarificationgarde finalement encore un caractère global et l’Assurancemaladie entend probablement compenser financièrementcertains actes par d’autres.

Nous avons vu que le CHU de Dijon, en proposant exclu-sivement de l’ambulatoire, perdait virtuellement par an,pour l’activité orbitopalpébro-lacrymale, et en fonction dela V11 de la T2A environ 185000 euros, soir 79 % de sesrecettes dans ce domaine, même s’il ne faut pas oublierque l’ambulatoire offre un coût d’opportunité : la libérationd’un lit permet de le réoccuper le lendemain voire l’après-midi même pour un même ou un autre GHM. Un même litpeut ainsi théoriquement être utilisé deux fois dans la mêmejournée.

Néanmoins, il est possible de retenir sur le plan comp-table que la structure hospitalière pour être « rentable »devrait :• privilégier les hospitalisations complètes ;• favoriser les actes simples, finalement mieux rémunérés

que les autres, en regard de la consommation en person-nel, matériel, occupation des blocs opératoires, et quipermettent une optimisation plus importante des lits ;

• ne plus proposer d’acte bilatéral ;• éviter les actes combinés ;• en cas de saturation des lits, privilégier les chirurgies plus

rentables comme par exemple la chirurgie de la cataracteou les greffes de membrane amniotique.

Le choix du mode d’hospitalisation pour un acte opéra-toire doit s’attacher à obtenir le meilleur résultat chirurgical

317

nal sans compromettre la santé du patient. Ce choixépend de critères médicaux mais aussi parfois sociaux. Unerise en charge en ambulatoire répond à ces exigences poura grande majorité des chirurgies des paupières, des voiesacrymales ou même de l’orbite [14].

Ce mode de prise en charge s’avère financièrement inté-essant pour l’Assurance maladie qui, en rétribuant moinshaque acte, incite à la rotation des malades, permettante soigner plus de patients pour un coût diminué. Il s’inscritarfaitement dans la politique générale de réduction desépenses de santé.

Malheureusement, nous sommes confrontés aux incohé-ences de la T2A qui ne récompense pas nos initiatives, voireompromet l’équilibre financier de la structure de soins. Enffet, la tarification liée à l’activité ambulatoire sous-évaluees actes, et ne tient pas compte des complications et morbi-ités associées, en sachant que les frais de fonctionnemente l’ambulatoire ne sont en réalité que peu réduits par rap-ort aux frais engendrés par l’hospitalisation traditionnelle1]. Les structures hospitalières publiques ou privées sontortement incitées à l’équilibre financier. Il est à craindrevec de telles incohérences de les voir délaisser certainsctes non rentables, et de garder hospitalisés injustementertains patients alors que médicalement ce n’est pas jus-ifié [15].

onclusion

près avoir étudié les rétributions financières de la T2A danse domaine de la chirurgie rétinovitréenne, des glaucomest maintenant de la chirurgie orbitopalpébro-lacrymale, ilpparaît en définitive que l’hospitalisation en ambulatoireessert financièrement les structures de soins qui ont fait lehoix de la privilégier dans le domaine de l’ophtalmologie.algré les mises à jour au minimum annuelles de la T2A,

’Assurance maladie reste bien la seule bénéficiaire de ceeu financier. Il faut espérer dans un avenir très proche unevaluation plus juste des actes, si nous ne voulons pas fragi-iser les structures de soins, ni favoriser des déviations danses pratiques qui seraient préjudiciables pour le patient.

onflit d’intérêt

ucun des auteurs n’a de conflit d’intérêt avec le contenue cet article.

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