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SOMMAIRE AVANT PROPOS 1 LE FILM - LE GENERIQUE 2 - LE SYNOPSIS 3 - LE REALISATEUR 4 APPROCHES DU FILM - LA GENESE 5 - LES PERSONNAGES 7 - L’ACCUEIL CRITIQUE 10 PISTES PEDAGOGIQUES - LA SEQUENCE INAUGURALE 14 - UN PLAIDOYER FEMINISTE 15 - UN REQUISITOIRE CONTRE L’INTEGRISME 17 - UN CINEMA REALISTE 18 - L’ESPACE 20

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SOMMAIRE

AVANT PROPOS 1

LE FILM

- LE GENERIQUE 2

- LE SYNOPSIS 3

- LE REALISATEUR 4

APPROCHES DU FILM

- LA GENESE 5

- LES PERSONNAGES 7

- L’ACCUEIL CRITIQUE 10

PISTES PEDAGOGIQUES

- LA SEQUENCE INAUGURALE 14

- UN PLAIDOYER FEMINISTE 15

- UN REQUISITOIRE CONTRE L’INTEGRISME 17

- UN CINEMA REALISTE 18

- L’ESPACE 20

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The Magdalene Sisters

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AVANT PROPOS

Lorsqu’au mois de mai on m’a proposé de rédiger le dossierde Magdalene Sisters, j’avais déjà projeté d’emmener des élèvesde seconde au cinéma pour voir ce film. C’est donc riche decette expérience que j’ai réalisé ce travail. Je ne prétends pasoffrir une lecture exhaustive du film mais plutôt présentermodestement ce que j’ai expérimenté avec ma classe. Il s’agitplus d’une démarche pédagogique que théorique.

Cette 14ème édition du Festival du Film d’Histoire a pourthème «!Les Fanatiques!», un sujet toujours d’actualité et sur lequelVOLTAIRE s’était déjà penché. Dans son D i c t i o n n a i r ephilosophique (1769) il nous donne la définition suivante!: «!Lefanatisme est à la superstition ce que le transport est à la fièvre, ceque la rage est à la colère. Celui qui a des extases, des visions, quiprend des songes pour des réalités, et ses imaginations pour desprophéties, est un enthousiaste!; celui qui soutient sa folie par lemeurtre, est un fanatique.!» Et il ajoute!:!«!Je pense avec vous quele fanatisme est un monstre mille fois plus dangereux quel’athéisme philosophique. SPINOSA n’a pas commis une seulemauvaise action!: CHASTEL et RAVAILLAC, tous deux dévots,assassinèrent HENRY IV.!»

1769 – 1964 – 2003!: les époques changent mais les maux etles mots restent.

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The Magdalene Sisters

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LE FILM

LE GENERIQUE

FICHE TECHNIQUE

Scénario et réalisation Peter MULLANProductrice déléguée Frances HIGSONCo-producteur Alan J.WANDSProducteurs Ed GUINEY et Paul TRIJBITSImage Nigel WILLOUGHBYDécors Mark LEESEMontage Colin MONIEMusique Craig ARMSTRONGCostumes Trisha BIGGARMaquillage Dianne JAMIESONSon Colin NICOLSONDistribution des rôles Lenny MULLAN

FICHE ARTISTIQUE

Sœur Bridget Géraldine McEWANMargaret Anne-Marie DUFFBernadette Nora-Jane NOONERose!/Patricia Dorothy DUFFYCrispina Eileen WALSHUna Mary MURRAYKaty Britta SMITHSœur Jude Frances HEALYSœur Clémentine Eithne MCGUINNESSSœur Augusta Phyllis MCMAHONJosephine Rebecca WALSHEamonn Eamonn OWENSBrendan Chris SIMPSONSeamus Sean COLGANLe Père Fitzroy Daniel COSTELLO

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LE SYNOPSIS

Irlande, comté de Dublin, 1964.Europe, les débuts du féminisme, de la liberté sexuelle et l’explosion du rock’n roll.

Lors d’un mariage, alors que la fête bat son plein, Margaretest violée par son cousin. La nouvelle se propage comme unetraînée de poudre, son père est alerté et la honte s’abat sur lafamille. On décide aussitôt de l’éloigner du clan!: au petit matin, lecuré de la paroisse vient chercher Margaret.

Bernadette est pensionnaire dans un orphelinat. Engrandissant, devenue jolie, elle attire les regards et le désir desjeunes gens du quartier. Considérant que sa nature et soncaractère la destinent au pire, la direction de l’orphelinat la confiealors à l’unique institution susceptible de la maintenir dans le droitchemin.

Rose vient de donner naissance à un petit garçon. Elle n’estpas mariée. À l’hôpital, tandis que sa mère refuse de lui adresser laparole, le prêtre, dépêché par son père, lui annonce que sonenfant sera bien plus heureux élevé au sein d’une famillecatholique, digne et respectable. Séparée de son nouveau-né,Rose est emmenée au couvent des sœurs de Marie-Madeleine.

Arrivées ensemble, les trois jeunes filles sont immédiatementconfrontées à Sœur Bridget qui dirige l’établissement et leurexplique comment ici, par la prière et le travail, elles expierontleurs péchés et sauveront leur âme.

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LE REALISATEUR

Scénariste, réalisateur et comédien, Peter MULLAN est né en1959 à Glasgow. C’est en 1993 qu’il fait ses débuts de réalisateuravec Close, court-métrage pour lequel il gagne le MichaelSamuelson Award du Meilleur Film et qui marque le début de sacollaboration avec la productrice Frances HIGSON. Good day forhe bad guys en 1995 et Fridge en 1996 sont récompensés àtravers le monde (Bilbao, Palm Springs, etc…) et en 1999, sonpremier long métrage, Orphans, est primé à Venise, Barcelone,Angers.

Comédien, Peter MULLAN a reçu le Prix d’InterprétationMasculine à Cannes en 1998 pour son rôle dans le film de KenLOACH, My name is joe. Il avait débuté au théâtre dans lesannées 80, se produisant en particulier dans les prisons. Aucinéma, on a pu le voir dans Riff Raff de Ken LOACH, Rédemptionde Michael WINTERBOTTOM, Mademoiselle Julie de Mike FIGGIS,Braveheart de Mel GIBSON, Ordinary Decent Criminals de TaddeusO’SULLIVAN, ou Petits meurtres entre amis et Trainspotting deDanny Boyle.

On le verra prochainement dans Young Adam de DavidMACKENZIE, et Helen of Peckham, premier long-métrage d’EmilyYOUNG. Pour la B.B.C, Peter MULLAN a également réalisé plusieursépisodes de la série Cardiac Arrest et joué dans Taggart, RuffianHearts et Rab C Nesbitt.

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APPROCHES DU FILM

LA GENESE (Notes de production)

The Magdalene Sisters s’inspire de l’histoire de milliers defemmes rejetées par leur famille et livrées à l’Eglise. Déclarées«!filles perdues!», incarcérées sans avoir commis de crime, ellesétaient pauvres, orphelines, victimes de viol, «!fille-mères!», parfoisjolies, donc dangereuses ou bien pas assez intelligentes, voirehandicapées. Les «! Magdalene Homes!» ont été créés dansl’Irlande de XIXème siècle. Ils doivent leur nom à Marie-Madeleine,pécheresse devenue Sainte femme après s’être repentie auxpieds de Jésus qui la laissa les lui laver. À l’aube du XXème siècle,ces institutions sont reprises par l’Eglise, placées sous la directiondes Sœurs de la Miséricorde, à la discipline de fer, et transforméesen laveries. Les pensionnaires y travaillent sans rémunération dixheures par jour, sept jours sur sept, coupées du monde, lavant lelinge des hôtels, des universités et autres institutions des alentours.L’état irlandais, ne pouvant alors assumer une politique sociale,encourage les familles à incarcérer illégalement leurs «!fillesperdues!», tandis que la société y voit pour celles-ci une pénitencesalvatrice.

Grâce à la puissance du clergé, ces institutions sontmaintenues jusque dans les années 70. Il faudra cependantattendre 1996 pour que le dernier de ces couvents-prisons soitfermé. Ce n’est qu’en 1992, grâce au succès de la pièce dethéâtre Eclipsed que l’attention du public se porte sur la situationdésespérée des pensionnaires. L’auteur de la pièce Patricia BURKEBROGAN, elle-même ancienne pensionnaire, tenait à briser lesilence autour de cette partie de l’histoire de la société irlandaisequi condamna nombre de ses filles à passer leur vie dans desconditions dignes d’un roman de Dickens!: malnutrition, violencesphysiques, interdiction de tout contact avec l’extérieur. Lespensionnaires n’avaient aucun droit, si ce n’est celui de travailleret d’expier. Des émeutes éclatent dans les années 60 et plusieursdes dix couvents irlandais ferment dans les années 70.

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Mais si l’Eglise perd un peu de son influence, c’est surtout leprogrès économique permettant aux ménages de s’acheter unemachine à laver, qui aidera à la libération de ces femmes. En1996, une cinquantaine d’entre elles vivaient encore dans ledernier couvent. À ce jour, l’Eglise n’a formulé aucune excuse, niproposé aucun dédommagement aux femmes qui, des annéesdurant, ont travaillé pour son compte.

En 1994, la chanteuse Joni MITCHELL enregistre la chansonThe Magdalene Laundries, devenue depuis l’hymne dessurvivantes des laveries.

C’est après avoir vu sur Channel Four le documentaire Sex InA Cold Climate, consacré à la détresse des femmes prisonnièresde ces couvents, que Peter MULLAN a écrit le scénario de TheMagdalene Sisters. Révolté par l’injustice faite à ces femmes, il avoulu raconter l’histoire des couvents de Marie-Madeleine à unlarge public. Les témoignages filmés des victimes ont été saprincipale source d’information. Peter MULLAN est fasciné parl’incroyable mainmise que l’Eglise a exercée à l’époque sur lasociété irlandaise!: «!Quand j’ai demandé à une de ces femmes àquoi ressemblait l’Irlande des années 60 pour une jeune fille, ellem’a répondu!: «!Pensez au K.G.B!». Elle a raison, il y a de ça. Si lecuré déclarait qu’il voulait votre enfant, vous deviez le lui confieret ne plus jamais poser de questions. La situation était insensée.Personne ne questionnait l’Eglise.!»

Le réalisateur a choisi de situer The Magdalene Sisters dansles environs de Dublin, en 1964. À une époque où bien desfemmes, à travers le monde, découvraient la liberté, des jeunesfilles se battaient quotidiennement pour survivre dans ces laveriescontrôlées par l’Eglise. Peter MULLAN interprète lui-même le rôledu père d’Una, une des pensionnaires du couvent qui tente des’échapper. «!L’Eglise, la foi, la famille et sa réputation lui importentplus que sa propre fille. Voilà tout le problème.!» À une époque oùla condition sociale d’une famille était déterminée par sonhonneur et sa réputation, beaucoup de gens comme lui devaientlittéralement se battre pour maintenir leur rang.

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Lui-même acteur, Peter MULLAN sait que les comédiens ontbesoin d’espace pour nourrir leur personnage. «!Il faut parfois leslaisser chercher, faire des erreurs, trouver lentement.!»

Pour compléter la distribution, il a engagé deux femmes quiont vécu dans les laveries, une pensionnaire et une religieuse, quiont veillé à l’authenticité du film. «!J’ai pris certaines libertésartistiques, mais leur présence sur le plateau me permettait de nepas m’égarer. Je pouvais me dire que ce que nous faisions étaitaussi proche de la réalité que possible!».

LES PERSONNAGES

Peter MULLAN s’est focalisé sur trois figures emblématiques!:la victime sacrifiée (Margaret), la Vénus révoltée (Bernadette) etla soumise (Rose-Patricia).

MARGARET

Adolescente devenue trop vite femme par le crime dont ellea été victime. Le viol semble ici moins grave que le fait d’avoirgrandi si vite et indépendamment de l’Eglise. En l’envoyant aucouvent, le prêtre la renvoie à son statut d’enfant dépendant quine peut grandir sans l’aval catholique. Mais son visage estdéfinitivement marqué par la souffrance qui l’a fait vieillirprématurément.

BERNADETTE

Élevée dans un orphelinat, la jolie jeune fille suscite laconvoitise des garçons qui viennent s’agglutiner devant les grillesde l’école. Des fenêtres, le proviseur la regarde et voit en elle unepotentielle diablesse et pécheresse. Elle sera enfermée aucouvent pour ainsi anticiper la faute. Révoltée d’être punie pourun crime qu’elle n’a pas commis, Bernadette est prête à tout poursortir de cette prison!: ce système pervers pousse à la faute.

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ROSE

Elle vient d’accoucher et admire son magnifique bébé. Àcôté d’elle, sa mère ignore l’enfant né en dehors des liens dumariage parce qu’il déshonore sa famille. Catholique, Rosedemande pardon d’avoir commis ce péché mortel, croit en larédemption et en l’amour de ses parents. Elle se laisse convaincrequand on lui demande de donner son fils à l’institution religieuse,tente de le reprendre et hurle sa colère dans les bras de son pèrequi la maîtrise avec une froide puissance.

Trois jeunes filles, trois vies bouleversées par trois faits quiauront la même conséquence. Trois courtes séquences régléesavec une précision mathématique, qui ouvrent le film pour menerà la même image et au même résultat. Toutes trois serontrépudiées, cachées de la bonne société irlandaise, recluses auMagdalene Home, dirigé par Sœur Bridget.

SŒUR BRIDGET

Terrifiante mère supérieure du couvent qui cache derrièreson sourire tranquille un sadisme raffiné. Pour elle, toutes lesfemmes sont coupables!: des tentatrices face aux faibles hommes.Il faut donc supprimer la tentation au plus vite. Séquestrées parcette organisation cléricale, les jeunes femmes subissent brimadeset humiliations tandis que le couvent se pare de vertusprétendument humanistes. Cette femme qui commet desatrocités s’identifie cependant au personnage évangéliqued’Ingrid BERGMAN dans Les Cloches de Sainte-Marie, versant deslarmes pendant la projection du film. Peter MULLAN précise!: «!Tousles oppresseurs que j’ai connus étaient d’une incroyable sérénité.Parce qu’ils avaient le pouvoir, bien sûr. Pourquoi auraient-ils eupeur!? Ce sont les victimes qui font tout le travail, qui tremblent,qui sont terrorisées. J’ai travaillé dans ce sens avec l’interprète durôle, Géraldine McEWAN. Je lui disais!: plus tu souris, plus c’estintéressant, plus c’est fidèle à la réalité»(1).

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CRISPINA

Pauvre fille-mère, simple d’esprit, elle est condamnée à volerquelques instants fugaces pour regarder son enfant grandir àtravers la grille. Elle n’a finalement pour toute richesse qu’unemédaille bénite de Saint Christophe et qui tentera de se suiciderlorsqu’elle en sera dépossédée. C’est à elle que reviendra lemoment le plus intense du film, lorsqu’elle prendra la parole pourcrier au prêtre qui, pris d’insupportables démangeaisons, ôtefrénétiquement sa soutane : «!You’re not a man of God!! You’renot a man of God!!…!» Ses cris déchirants font basculer cetteséquence comique en véritable tragédie puisqu’elle signe là sonarrêt de mort.

(1) Florence COLOMBANI Le Monde 05/02/03

Activité proposéeÉtudier le rôle des objets symboliques !: la médaille de Saint Christophe qui relieCrispina au monde extérieur a le pouvoir de lui procurer un apaisement idéal et delui faire oublier la réalité. Elle maintient un équilibre fragile entre rêve et réalité, folieet lucidité!: sa perte sera fatale. Voir aussi l’importance des clefs!: symbole de libertépour les fugitives qui arrivent à s’emparer du trousseau ou symbole d’aliénation pourSœur Bridget qui a égaré la clef du coffre.

Activité proposéeÉtudier les registres dans cette séquence! où se confrontent le prêtre et Crispina!: lacomédie, la farce et la tragédie.

Quant aux personnages masculins, ils sont tous dévalorisés,qu’il s’agisse des pères de famille, des hommes d’Eglise pervertis,des adolescents provocateurs ou du cousin, ou plus encore,ridiculisés comme le prêtre chargé de célébrer l’office lors de lacérémonie du Saint-Sacrement. Cette satire des hommes a pourbut de révolter le public contre la condition des femmes et lesdiscriminations qu’elles continuent de subir.

À côté de cette figure symbolique et emblématique du PERE-guide spirituel ou pater familias- il n’existe qu’une seulereprésentation masculine positive, celle du frère de Margaret quiose, un court instant, défier cette autorité et libérer sa sœur.

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L’ACCUEIL CRITIQUE (Extraits de presse)

«!Dans son album Turbulent Indigo, Joni Mitchell chantaitdéjà la tristesse de Magdalene Laundries!: «!Femmesdéchues/Condamnées aux corvées sans rêve/ Pourquoi nomme-t-il ce lieu impitoyable/Notre-Dame de Charité!?!» Le contexte historique de la chanson devait échapper à bien desauditeurs. Le film de Peter MULLAN, son deuxième après Orphans,restitue à la complainte toute la richesse et la violence de cesinstitutions coercitives qui pullulèrent en Irlande jusqu’en 6, date deleur fermeture définitive.!»

Didier PERON, Libération, 04/02/03

«!Le froid qui engourdit le corps et l’esprit!; la cruauté dessœurs!; la folie qui, lentement mais sûrement, gangrène l’âme defilles victimes d’un engrenage purificateur zinzin… Pour soulever latriple chape de plomb de la connerie pseudo morale et de sesalibis religieux, MULLAN fuit les lourdeurs du film à thèse et privilégiel’humain, la notation intimiste, la description clinique d’unquotidien devenu torture. La mise en scène, sèche et précise,enregistre impassiblement l’effroi et tire le meilleur parti decomédiennes aussi méconnues qu’excellentes. À l’image de lascène de viol inaugurale, muette et terrifiante, Peter MULLAN nebavarde pas et châtie le chantage émotionnel. La force de TheMagdalene Sisters n’en est que plus intense.!»

Olivier DE BRUYN, Première, février 2003

«!Tous les comédiens se sont surpassés. La mise en scène est,comme on pouvait s’y attendre, dans le goût classique, mais untel sujet n’en appelait pas une autre. Il suffisait pour Peter MULLANd’un regard à hauteur d’homme pour que son indignation passe,sans forcer un trait qui n’en avait pas besoin, sans rien minorer nonplus.!»

Jean ROY, l’Humanité, 04/02/03

Activité proposéeÉtudier l’éloge et le blâme dans les extraits de presse.Travailler sur l’argumentation et rédiger une critique du film.

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«!Habité par une révolte intense contre le sort de cesfemmes, Peter MULLAN a réalisé ce film tout d’une pièce, commeun réquisitoire. Le Lion d’Or à Venise est venu récompenser cecombat, plus sans doute qu’un film d’une efficacité nondépourvue de maladresses. The Magdalene Sisters tire sesprincipales qualités de la force de son sujet et d’une vraie sincéritédu regard. Le réalisateur, en évidente symbiose avec son trio depersonnages, porte leur souffrance avec une compassion infinie. Illes accompagne dans leur chemin de croix, épouse leur douleur,la fait sienne. On verra donc par le menu un quotidien infernal!: letravail éreintant, les brimades, les coups, les larmes ravalées, lessuicides manqués. Cette précision exhaustive rend assurémentcompte de la violence des faits. Mais elle étouffe trop souventl’intrigue et les personnages, prive le film de la dimensionuniverselle à laquelle il aspire. L’accumulation de preuves,l’indignation, l’emphase font une bonne plaidoirie, mais laisse troppeu de place au cinéma, à la vie même. Il est frappant deconstater à quel point l’ouverture et l’épilogue, hors du fameuxcouvent, paraissent faibles, dépourvus de la force réaliste quicaractérise le film. Dans un contexte normal, délivré des murs ducouvent-prison, MULLAN semble perdre tout réel intérêt pour sespersonnages, et, partant, sa capacité à les filmer!».

Florence COLOMBANI, Le Monde, 05/02/03

«Juste et remarquablement joué, ce film se heurte aux limitesdes fictions dénonciatrices. Beau message, petit cinéma.(…) Fairede la fiction, même (surtout) réaliste, avec la souffrance depersonnes devenues personnages laisse sceptique quant auxémotions que ce spectacle peut éveiller!: le plan final sur l’une despensionnaires, internée en hôpital psychiatrique, la tête tordue, ledoigt dans la bouche, les yeux hagards, est révélateur d’unecertaine forme d’obscénité vers laquelle tend ce type de mise enscène pourtant pleine de bonnes intentions. Mais les bonnesintentions ne font jamais la matière première et noble d’un film.!»

Amélie DUBOIS, Les Inrockuptibles, 05/02/03

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«!Trois jeunes filles (interprétées par des comédiennesinconnues et formidables) paumées, bafouées, violentées, quivont vivre, avec d’autres, l’enfer sous la férule de ces sœurs sanscœur, dont la supérieure (formidable Géraldine McEWAN) est unmonstre de cruauté. Loin du mélodrame édifiant, Peter MULLANfilme comme un documentaire, avec talent et pudeur, cetteeffroyable histoire. Ultime choc!: le générique de fin nous apprendque ces institutions n’ont fermé qu’en 1996!!!».

Michel REBICHON, Studio, févier 2003

«!Quelques mois après l’édifiant Bloody Sunday, de PaulGREENGRASS, ces Magdalene Sisters apparaissent comme lanouvelle démonstration de force d’un cinéma britannique du réel,révolté et profondément honnête.!»

Arnaud MALHERBE, l’Express, 05/02/03

«!Baignées dans une atmosphère laiteuse, ces petites sœursMadeleine ont un arrière-goût rance qui se laisse difficilementoublier. Dans ce remake neurasthénique de Vol au-dessus d’unnid de coucou, bourreaux et victimes sont pareillement prisonniersd’une mise en scène à la fois pesante et maniérée qui maintienten permanence ses actrices sous éteignoir. Difficile, il est vrai,d’incarner à l’écran ce chapelet de caricatures (le curé lubrique,les nonnes frustrées, la demeurée sacrificielle).!»

P.B., Les cahiers du cinéma, février 2003

«!Que le cinéaste se soit focalisé sur trois figures-échantillons(la simplette, la soumise et la rebelle) n’entache pas la puissancedu film. Car certes typées, ces sœurs courages ne sont jamaisarchétypales. Elles sont de plus magnifiées avec une sidéranteénergie par de jeunes actrices inconnues. Heureuse nouvelle,l’œuvre triomphe en son pays. Mieux!: après des décennies desilence, vient enfin de se créer une commission consacrée auxdédommagements des victimes.!»

Laurent DJIAN, Cinélive, février 2003

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«!Calvaire dépeint sans fausse pudeur ni complaisance, avecau contraire toujours une distance, comme une froideur même,ce cinéma-là ayant compris depuis longtemps que, plus ce quel’on montre est épouvantable, plus il convient de demeurer sur saréserve. Alors, oui, on accompagne Margaret, Bernadette, Rose etles autres, car le film ne les lâche jamais, toujours à leurs côtés,toujours avec elles, parce que ainsi le spectateur ne peut pas lesquitter du regard. Qu’il les lâche un seul instant et le film, sansdoute, se perdrait. Mais non, rien à faire, les actrices sontextraordinaires de retenue et, en même temps, d’implication,d’incarnation (une qualité British, celle-là encore, nourrie par dessiècles de théâtre), le scénariste et réalisateur ne livre que ce qu’ila décidé de donner, gardant pour lui ce qu’il sait, ce qui lui a étédonné de raconter, qui pourrait être, pourtant, si «!dramatique!», sispectaculaire, il ne s’interdit pas quelques pointes d’humour etconduit son film au bout de sa logique, sans trembler ni sourcillerjamais. Émouvant, oui, mais sans tremblements, sans envolée, sanssollicitation, sans sentimentalisme. Intelligent, certainement,seulement voilà, ce n’est pas écrit dessus.!»

P. MERIGEAU, Nouvel Obs, 04/02/03

«!On ne sort pas indemne du film de Peter MULLAN, où laviolence faite aux spectateurs est à la mesure de celle subie parles personnages. Elles sont trois, dons le sort va être scellé en dixminutes avec une maîtrise et une efficacité diaboliques(…).Exploitant au maximum les effets qu’il a su créer, le film maltraite lespectateur avec les prisonnières sur un rythme qui ne laisse aucunrépit.!»

C. AXELRAD, Positif, février 2003

«!!Aucun misérabilisme chez Peter MULLAN!; Aucunnaturalisme. The Magdalene Sisters (Lion d’Or au dernier festivalde Venise), porté par des interprètes toutes fabuleuses, atteintune brutalité rappelant celle que filmait Arthur PENN au débutdes années 60 dans Miracle en Alabama (…).!»

Pierre MURAT, Télérama, 05/02/03

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PISTES PEDAGOGIQUES

LA SEQUENCE INAUGURALE

La première séquence est sans aucun dialogue!: lespectateur n’a pas à connaître ce qui se dit. Il assiste à une fêtede mariage!: on boit, on joue de la musique et on chante.Margaret ne se méfie pas de son cousin qui l’emmène à l’écartpour la violer. La musique se fait de plus en plus obsédante etsouligne l’intensité dramatique. Ce malaise sonore renvoie aumalaise des personnages. Cette séquence muette est terrifiante!:mots que l’on n’entend pas, regards lourds, gestes graves.Entourée de femmes qui la consolent, Margaret regarde lesadultes discuter du crime, du coupable et de la faute. Dans sesyeux, l’espoir de la réparation de l’outrage et de la peine. Leshommes, gardiens de cette société patriarcale, règlent leproblème entre eux, en se murmurant à l’oreille la nature ducrime. Les mots et les actes s’enchaînent dans un engrenageimplacable, une machine infernale qu’elle a mise en marche sansle savoir et qu’elle regarde, impuissante.

Le châtiment sera non pour l’agresseur, mais pour la victimecar les mots de Margaret dénonçant le viol sont icicondamnables. Dire est une prise de position individuelle, c’estaussi un crime. La parole défie les lois implicites de la communautéoù tous doivent taire les malheurs individuels au profit du groupe.Déclarer le traumatisme brise l’harmonie apparente de lacollectivité et du cercle familial et l’entache d’une faute quiébranle sa force. Seule la répudiation, le refoulement del’événement honteux permettent la survie. Margaret est envoyéeau couvent avec l’assentiment de la famille et la complicité duprêtre. Ainsi, il ne lui suffit pas seulement d’être la victime de sonvioleur, il faut encore qu’elle soit celle de sa famille puis celle del’Eglise!: les deux s’allient pour nier l’individu. Cette premièreséquence donne le ton.

Activité proposéeTravailler sur les horizons d’attente du spectateur.

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UN PLAIDOYER FEMINISTE

Selon Didier PERON (Libération 5 février 2003) «!Le film décritla misogynie structurante d’une société patriarcale!». C’est ce quesemble aussi penser Peter MULLAN!: «!J’ai le sentiment que l’Etat, leClergé et les familles se sont très bien entendu contre les femmesqu’ils considéraient comme moralement dévoyées. La théocratie,et plus particulièrement l’Eglise, se considérait comme lagardienne de la moralité des jeunes femmes. Mon point de départest politique, je voulais savoir si on pouvait faire un film surl’oppression des femmes par d’autres femmes, elles-mêmesopprimées par des hommes, sur le triangle pervers Etat-famille-Eglise… Quelle que soit la religion, les jeunes filles semblent desfigures dangereuses, capables par leur seule existence de saperles bases de toute une civilisation. Avouez que c’est quand mêmeétrange!!!»(2).

Ainsi, le principal crime de ces pensionnaires est d’êtrefemme!?! C’est pourquoi on s’empressera de nier cette féminitéen les privant d’identité. Ces «!filles perdues!» perdent jusqu’à leurnom. À son arrivée au couvent, puisqu’il y a déjà une Rose dansson établissement, Sœur Bridget décide que la nouvelles’appellera Patricia, tout comme elle a choisi le prénom deCrispina pour Henriette, une autre malheureuse pensionnaire.

La perte du nom s’accompagne d’une disparition presquetotale de la prise de parole. Elles entrent dans une soumissionmuette!: interdiction de toute communication entre elles àl’intérieur comme de tout contact avec l’extérieur sous peine dechâtiment corporel.

Les jeunes filles n’ont donc plus d’existence sociale etdeviennent interchangeables. Elles sont d’ailleurs toutes revêtuesdu même habit grossier, uniforme qui les assimile à des lavandièresou des prisonnières. Elles sont exploitées, servant de main-d’œuvregratuite dix heures par jour et sept jours sur sept dans l’institutiontransformée en véritable laverie industrielle.

(2) Notes de production

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Traitées en esclaves, elles travaillent sans relâche, en silenceet subissent brimades et humiliations. Elles ont le devoir de laver,au sens propre comme au figuré!: laver le linge du comté deDublin et laver leurs péchés et leur cerveau. Jusqu’à l’usure, lafolie, le suicide. Totalement coupées du monde, sans espoir desortie. Les quelques tentatives d’évasion se soldent toujours par unéchec et leur valent d’avoir la tête rasée pour leur ôter toutnouveau désir de fuite. Et en perdant leurs cheveux, elles perdent

On arrive ainsi à la négation de leur humanité tout entièrecomme le confirme l’épilogue!: les rescapées ont beaucoup demal à retrouver leur place dans la société, en tant que femme,épouse et mère. Le réalisateur nous informe de l’itinéraire dequatre d’entre elles. Margaret est restée célibataire et a consacrésa vie aux enfants, d’abord institutrice puis sous-directrice d’uneécole. Bernadette a connu trois divorces. Rose, paradoxalement,semble avoir gardé la foi et trouvé un équilibre!: maman de deuxfilles, elle a retrouvé son fils bien des années plus tard, lorsqu’ilavait 33 ans. Mais pour la malheureuse Crispina, c’est ladégradation totale!: internement à l’asile psychiatrique où ellemeurt d’anorexie.

Alors, les premières minutes du film nous reviennent à l’esprit!:une jeune fille violée, une autre trop convoitée, donc futurepécheresse et la dernière, fille-mère. Voilà les crimes qui les ontconduits au couvent des sœurs de Marie-Madeleine.Miraculeusement, elles ont pu mettre fin à leur calvaire, maistoutes n’ont pas eu cette chance. Et l’on estime à 30 000 lenombre de femmes décédées derrière les murs des MagdaleneHomes!: c’est ce que nous apprend le générique de fin, faisantdéfiler le nom de ces malheureuses. Le film de Peter MULLAN estun formidable hommage à toutes ces femmes qui résistèrent ouqui sombrèrent dans ces lieux de la honte.

Activité proposéeRéfléchir à la place de la femme dans notre société à partir de La déclaration desdroits de la femme et de la citoyenne d’Olympe DE GOUGES!: voir en annexe.

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UN REQUISITOIRE CONTRE L’INTEGRISME

Ancré dans l’Irlande catholique des années 60, le filmdépasse ce cadre très précis pour condamner toute attitudefanatique comme le confirme Peter MULLAN!:!«!Je n’ai pas voulufaire un film contre l’Eglise catholique ni un film sur l’Irlande!»(3). Lepropos du film tend à l’universalité et dénonce l’utilisationscandaleuse qui est faite de la religion. «!L’Eglise et la religionsouffrent toujours d’un complexe de supériorité qui les place au-dessus de l’autocritique!»(4) rappelle le réalisateur. C’est sansdoute pourquoi, lors de sa présentation à la Mostra de Venise où ila obtenu le Lion d’Or, le film a déclenché la polémique. Les liguescatholiques ont été outragées et selon l’Osservatore Romano, lequotidien du Vatican!: «!C’est une provocation pleine de haine etde rancœur!!!»(5). Peter MULLAN s’explique !: «!Pour moi, ce n’estpas seulement un film sur les crimes passés de l’Eglise!. Il parle de lacondition des femmes en général. En écrivant, bien avant le 11septembre 2001, j’avais les talibans à l’esprit!»(6).

Au-delà de cette polémique, il convient de rappeler quel’intégrisme existe parce qu’il se nourrit de l’ignorance despeuples. Cette ignorance est entretenue dans le couvent commele prouve, entre autres, le discours inepte sur la lèpre.

Aujourd’hui, il nous revient en mémoire que dans les paysmusulmans extrémistes les femmes violées ou adultères sontencore condamnées à la lapidation. Dernièrement, en Irak, dansla ville sainte, les chefs religieux ont refusé la propositionaméricaine de nommer une femme juge pour exercer unefonction judiciaire et religieuse. Et que dire de la condition de lafemme dans bien des pays du monde!? Songeons que certainesMarocaines seraient prêtes à reprendre le tchador pour s’assurerune relative tranquillité si un courant islamiste rigoureux venait às’imposer…

(3) Notes de production(4) Didier PERON Libération 04/02/03(5) Laurent DJIAN Cinélive(6) Florence COLOMBANI Le Monde 05/02/03

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Voilà peut-être pourquoi Laurent DIJAN (Cinélive février2003) écrit!: «!Aussi admirable formellement qu’indispensablepolitiquement, The Magdalene Sisters redore le blason d’un 7ème

Art souvent trop frileux. Car interpeller, bousculer, déterrer lestabous, c’est aussi ça le cinéma!».

Activité proposéeFaire référence à l’actualité!en évoquant, par exemple, la condition des femmesafghanes après la chute du régime des Talibans : cf A cinq heures de l’après-midi deSamira MAKHMALBAF.

Activité proposéeÉtudier le registre polémique d’un cinéma engagé et le rôle de l’artiste (cinéaste,écrivain, peintre…).

UN CINEMA REALISTE

La mise en scène immerge le spectateur dans un universcarcéral. Le lieu quasi unique du drame et les tons monochromesconfinent à la claustrophobie. La gravité du filmage frontal(visages terrifiés ou déformés par la douleur) et l’âpreté dumontage champ-contrechamp donnent souvent à l’ensembledes allures de documentaire. Dur, sans concession, filmantcertaines situations d’une violence psychologique ou physiquepresque insoutenable comme la séquence où toutes lespensionnaires sont nues, alignées face à la sœur qui détaille lecorps de chacune d’elles en se moquant de cette chair étaléesous ses yeux.

Le film est construit à la source du réalisme britannique, àl’école du maître Ken LOACH. «!Quand j’ai tourné pour lapremière fois avec Ken, j’étais déstabilisé, se souvient PeterMULLAN. Comme il ne vous regarde pas, vous vous demandeztoujours si vous êtes nul ou pas… Je ne suis pas aussi fort que lui.Du coup, j’observais mes comédiennes!! J’ai retenu de LOACHcette nécessité de préserver la spontanéité des acteurs!: je nefaisais pas plus de trois prises pour chaque plan.!Et mes actricessavaient qu’il ne fallait pas en rajouter, ne jamais cabotiner!»(7).

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De plus, le hors-champ, l’image furtive ou encore la focalelongue sont là pour nous aider à aller plus loin que les images elles-mêmes comme le prouve cette scène intime entre le curé etCrispina, presque prise par inadvertance. Ou encore, quandMargaret, seule dans le jardin, s’aperçoit que la porte est ouverteet qu’elle pourrait s’enfuir. Le hors-champ est le lieu de tous lespossibles. Mais elle hésite à fuir et finalement n’a pas la force dequitter sa prison.

Les quelques bruits ou le silence qui souvent accompagnentces scènes fortes montrent l’importance du son, d’un réel sonore.«!L’austérité est un choix, insiste Peter MULLAN. Je ne voulais pasutiliser les recettes du mélodrame. Mon compositeur avait écritune très belle partition d’une heure, je n’en ai retenu que quatreminutes… Je voulais qu’on entende le bruit des lits qui grincent, lesparquets qui craquent!»(8). Un choix éminemment porteur quipermet de configurer l’espace.

(7), (8) Olivier DE BRUYN Première

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L’ESPACE

La première réaction de spectateur consiste à déterminer lelieu du film. Espace fermé!: couvent ou prison!? Confusion entreapparence et réalité!: un couvent qui cache une prison. Qu’est-iladvenu de l’ensemble des promesses qui conditionnent l’entréeen religion : vœu de pauvreté, de chasteté, de charité!? Quelleest cette société des masques où chacun a son rôle et sa place!?Plusieurs éléments contrastent avec la religion!: l’argent,l’opulence, le sexe, et renvoient aux sept péchés capitaux.

Apparence d’un couvent Réalité d’une prison

Rédemption et amour divin Dictature et travaux forcés

Pénitence salvatrice Incarcération arbitraire

Prières et lectures saintes Violence psychologique et physique

Bien-être et plénitude Malnutrition et fatigue

Silence religieux Bruits de clefs, de portes, de pas précipités lors des évasions

Activité proposéeRelever les actes et situations qui renvoient aux sept péchés capitaux.Étudier des textes extraits des 7 anthologies publiées aux éditions Librio.Hiérarchiser les fautes!: de la plus acceptable à la plus scandaleuse.

L’espace géographique conditionne l’espace mental si bienque l’attitude des personnages (soumission ou rébellion) varieselon la conscience qu’ils ont du lieu qu’ils occupent.L’emprisonnement physique engendre l’aliénation morale. Ainsi,

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Peter MULLAN explique!: «!Il était important de souligner à quelpoint le lavage de cerveau effectué dans ces lieux était efficace!.Pour cela, je me suis souvenu de quelques films que j’ai aimés. Enpremier lieu vol au-dessus d’un nid de coucou, de Milos FORMAN!;Il avait l’intelligence de montrer que ceux qui sont enfermés dansdes prisons ou des asiles n’ont parfois même plus envie d’ensortir»(9).

En effet, la personnalité des jeunes filles s’éteint peu à peu etla résignation semble l’emporter, comme le prouve la séquencedans le jardin, où Margaret seule pourrait s’enfuir grâce à la porteouverte qu’elle franchit timidement. L’espace, à perte de vue, quise présente à elle la paralyse et elle retourne dans sa prison.Accepterait-elle son châtiment!? C’est plus tard qu’elle va seréapproprier l’espace, au moment de sortir du couvent avec sonfrère venu en sauveur chercher sa grande sœur. Avecdétermination et ferveur, elle affronte la mère supérieure, dans cecouloir qui est son domaine réservé, et occupe l’espace puisquel’on va finalement se résoudre à lui laisser la place. Elle retrouveainsi son statut d’aîné face au petit frère. Enfin, l’espace s’ouvre etpermet une respiration. En effet, même pendant la procession duSaint Sacrement, encadrée par les bien-pensants dans les ruellesétroites du village, on était gagné par une sensationd’étouffement!: le malaise traverse l’écran.

(9) Olivier DE BRUYN Première

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Sonia PACIFICO

L’auteur de ce dossier est professeur de Lettres dans le secondairedepuis 1995. Passionnée de cinéma, elle a rejoint l’associationCINE MA PASSION et est membre du Conseil d’Administration duCinéma LE MELIES à Pau où elle réside depuis 7 ans.

Elle est aujourd’hui coordinatrice de l’opération «!Collège aucinéma!» pour le Béarn.

Ce dossier a été réalisé grâce à l’aide précieuse de CatherineCERRABURU et à la compétence informatique de Jean-FrançoisDEROUET.