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Études Économiques Groupe http://etudes-economiques.credit-agricole.com Trimestriel N°17/091 31 mars 2017 MONDE Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps Le temps politique est long. Celui des marchés financiers extrêmement court. Enfin, celui de l’économie réelle pourrait être qualifié de temps intermédiaire. Il faut réconcilier ces trois temps différents pour composer un scénario économique et financier sans trop de discordances. Un scénario dans lequel le cycle prospère, voire se raffermit, sous réserve que les risques politiques ne se matérialisent pas par un resserrement drastique des conditions financières. Zoom vidéo Délicate partition Un scénario d’accélération et de diffusion de la croissance sans risque inflationniste ni tensions financières qui suppose que les Banques centrales s’orientent vers une politique monétaire moins accommodante à petits pas, voire à reculons. Sommaire Pays développés Amélioration et synchronisation..................3 Pays émergents Jusqu’ici tout va bien ? .............................. 14 Pétrole Vers une nouvelle confrontation entre l’OPEP et les États-Unis ..................................................................... 17 Politique monétaire Les resserrements ? À pas comptés, voire à reculons ...................................................................... 19 Taux d’intérêt – En hausse, mais pas de sell-off massif .......... 22 Taux de change De la politique monétaire à la politique tout court ................................................................................ 25 Prévisions économiques et financières ................................... 27 Brexit, élection de Donald Trump aux États- Unis, programmes de rupture proposés aux électeurs en Europe : les ambitions politiques sont grandes, les solutions radicales, les histoires séduisantes. Une histoire américaine enthousiasmante au point de séduire les marchés, crédules, puis de les décevoir. Les agents, notam- ment les ménages, semblent faire preuve d’une plus grande perspicacité. Ils savent que la potion peut être amère avant que de très (très) éventuelles améliorations concrètes, en termes notamment d’emploi, de salaires, ne se dessinent. Le cycle se raffermit donc de façon « spontanée », sans stimuli budgétaires, mais sous le regard nécessairement bienveillant des Banques centrales. Un raffermissement plus synchrone Les performances respectives des différentes gran- des économies ou grandes zones ne sont pas toutes aussi brillantes, mais elles s’améliorent toutes. La consommation demeure le moteur puis- sant de ce raffermissement plus synchrone et dans lequel la légère accélération de l’inflation ne constitue pas un danger. Créations d’emplois, progression des salaires, coût de l’endettement et

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Page 1: MONDE Scénario macro-économique 2017-2018 concordance des temps Le temps politique est long. Celui des marchés financiers extrêmement court. Enfin, celui de l économie réelle

Études Économiques Groupe http://etudes-economiques.credit-agricole.com

Trimestriel – N°17/091 – 31 mars 2017

MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018

La concordance des temps

Le temps politique est long. Celui des marchés financiers extrêmement court. Enfin, celui de l’économie réelle pourrait être qualifié de temps intermédiaire. Il faut réconcilier ces trois temps différents pour composer un scénario économique et financier sans trop de discordances. Un scénario dans lequel le cycle prospère, voire se raffermit, sous réserve que les risques politiques ne se matérialisent pas par un resserrement drastique des conditions financières.

Zoom vidéo

Délicate partition

Un scénario d’accélération et de

diffusion de la croissance sans

risque inflationniste ni tensions

financières qui suppose que les

Banques centrales s’orientent

vers une politique monétaire

moins accommodante à petits

pas, voire à reculons.

Sommaire

Pays développés – Amélioration et synchronisation .................. 3

Pays émergents – Jusqu’ici tout va bien ? .............................. 14

Pétrole – Vers une nouvelle confrontation entre l’OPEP et les États-Unis ..................................................................... 17

Politique monétaire – Les resserrements ? À pas comptés, voire à reculons ...................................................................... 19

Taux d’intérêt – En hausse, mais pas de sell-off massif .......... 22

Taux de change – De la politique monétaire à la politique tout court ................................................................................ 25

Prévisions économiques et financières ................................... 27

Brexit, élection de Donald Trump aux États-Unis, programmes de rupture proposés aux électeurs en Europe : les ambitions politiques sont grandes, les solutions radicales, les histoires séduisantes. Une histoire américaine enthousiasmante au point de séduire les marchés, crédules, puis de les décevoir. Les agents, notam-ment les ménages, semblent faire preuve d’une plus grande perspicacité. Ils savent que la potion peut être amère avant que de très (très) éventuelles améliorations concrètes, en termes notamment d’emploi, de salaires, ne se dessinent. Le cycle se raffermit donc de façon « spontanée », sans stimuli

budgétaires, mais sous le regard nécessairement bienveillant des Banques centrales.

Un raffermissement plus synchrone

Les performances respectives des différentes gran-des économies ou grandes zones ne sont pas toutes aussi brillantes, mais elles s’améliorent toutes. La consommation demeure le moteur puis-sant de ce raffermissement plus synchrone et dans lequel la légère accélération de l’inflation ne constitue pas un danger. Créations d’emplois, progression des salaires, coût de l’endettement et

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MONDE : Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

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inflation toujours contenus mais, point important, dont la hausse est anticipée : les ménages arbitrent et, finalement, semblent ne rien sacrifier. Tardive-ment, modestement et inégalement, l’investisse-ment vient raffermir le cycle. Enfin, la demande de ceux qui font la course en tête (dont les États-Unis) apporte un soutien à ceux dont la croissance est moins vive et moins gourmande en importations (dont la zone euro). Le cycle économique se renforce et prospère. Au Royaume-Uni, aux États-Unis, il semble avoir digéré les chocs politiques avérés que sont le référendum en faveur du Brexit et, surtout, l’élection de D. Trump. En zone euro, il ne paraît pas altéré par l’imminence d’élections décisives.

Choc politique, frémissement financier, « résilience » réelle

Qu’il s’agisse du Brexit mais surtout de l’élection de D. Trump, les changements politiques récents constituent pourtant bien des chocs. Il ne s’agit plus de simplement déplacer le curseur de la politique économique vers un peu moins d’État, d’impôts et de protection sociale. Il s’agit de panser les blessures d’un grand corps social malade en désignant des boucs émissaires et en diabolisant notamment le « Reste du monde ». Les objectifs sont ambitieux. Sans même qu’il soit nécessaire de se prononcer sur l’efficacité des solutions proposées, il suffit déjà de constater qu’elles sont surtout radicales. Paradoxalement tellement radicales qu’elles ne se concrétisent pas aussi rapidement qu’on pourrait l’espérer pour ceux qui parient sur leur efficacité, le redouter pour ceux qui les jugent inappropriés et dangereuses. L’impact direct sur l’économie réelle, sur les comportements des agents est à court terme mineur car il faut franchir des obstacles institutionnels et/ou obtenir l’assentiment des parlements nationaux. L’impact se fait par « ricochet ». Les recettes proposées sont certes susceptibles d’affecter les anticipations des agents. Mais, surtout, elles exercent une influence décisive et immédiate sur les marchés.

Ainsi l’élection de D. Trump. Outre l’abrogation de l’Obamacare (Affordable Care Act ou ACA), l’assez présomptueux « Make America Great Again » promet une baisse des impôts dans le cadre d’une ambitieuse réforme fiscale, une forte réduction de la règlementation pour « libérer » les entreprises, le

lancement d’un vaste programme de travaux d’infrastructures et une politique protectionniste en termes de commerce international. Les marchés ont acheté ce discours revigorant sans discernement. Ils se sont lancés dans ce désormais fameux « Reflation Trade » alors même que le calendrier, la nature et l’ampleur de la relance budgétaire étaient incertains, si ce n’est inconnus. Relance budgétaire (sans même aborder la question de son finan-cement et encore moins s’interroger sur son ampleur et son impact) et accélération de la crois-sance au risque d’un soupçon d’inflation supplé-mentaire : un scénario propice à une appréciation du dollar, aux marchés actions, mais porteur d’une remontée des taux d’intérêt. Leurs spéculations enthousiastes ont été largement déçues par une première déconvenue. D. Trump éprouve des difficultés à fédérer les différentes factions du Parti républicain, afin de mener à bien la réforme de la protection sociale qui doit remplacer l’ACA. La marge de manœuvre est en effet étroite : il faut satisfaire les Républicains les plus radicaux qui jugent les modifications proposées insuffisamment audacieuses, tout en ne s’aliénant pas les élus modérés. Une déconvenue et un mauvais signal sur la capacité de l’administration à mettre en œuvre son programme. Les marchés actions n’ont pas apprécié. Le resserrement des conditions finan-cières était un risque mentionné en décembre. Il reste à l’ordre du jour et justifie que la Federal Reserve se montre vigilante.

Resserrement monétaire graduel et remontée modérée des taux longs

La mise en œuvre de politiques monétaires moins généreuses est dans l’air du temps. Les États-Unis ont ouvert le bal. Le resserrement monétaire est cependant un exercice autrement plus périlleux que l’assouplissement. Les risques ne sont pas symé-triques. Même si le cycle le justifie, priver une économie et, surtout, des marchés financiers d’un ingrédient essentiel de leur succès ne peut se faire que très (vraiment très) graduellement. Les Banques centrales seront donc vigilantes, ne reti-rant ou n’envisageant de retirer qu’à dose homéo-pathique leur soutien monétaire. Elles ne peuvent prendre le risque de voir remonter violemment les taux longs. Ceux-ci s’inscrivent sur une pente ascendante : une pente douce.

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 3

Pays développés – Amélioration et synchronisation

Les performances respectives des différentes grandes économies restent diverses, mais elles s’améliorent toutes. La consommation demeure le moteur de ce raffermissement plus synchrone dans lequel la légère accélération de l’inflation ne constitue pas un danger. Tardivement, modestement, l’investissement vient (enfin) soutenir le cycle.

États-Unis : des fondamentaux solides, des incertitudes fortes

Une accélération sensible de la croissance se profile en 2017 (2,2%, contre 1,6% en 2016). La consommation des ménages est solide et reste le principal moteur de la croissance : les consommateurs sont confiants, ont un emploi, dépensent facilement, d’autant plus que les revenus réels disponibles progressent.

Le dynamisme de la consommation des ménages est intimement lié à l’amélioration continue du marché de l’emploi. Le taux de chômage (4,7% en février) est proche de la plupart des estimations du taux de plein emploi. Plus de 2,2 millions d’emplois ont été créés en 2016 et les statistiques mensuelles de créations d’emplois disponibles pour 2017 ont été supérieures à la moyenne de 2016. Même en tenant compte du ralentissement des créations d’emplois que nous attendons pour le reste de 2017, le taux de chômage devrait se replier à 4,4% en fin d’année.

Le taux de démission progresse : cela suggère que les travailleurs considèrent que le marché du travail est porteur et leur permettra de trouver rapidement un autre emploi, probablement mieux payé et à de meilleures conditions. Par ailleurs, la stabilité du taux de participation, en dépit de facteurs démographiques exerçant une pression fortement baissière, illustre la capacité d’un marché du travail dynamique à inciter les travailleurs à rejoindre la population active. Une nouvelle baisse des ressources inemployées sur le marché du travail devrait conduire à une progression plus rapide des salaires, en hausse de 2,8% sur un an.

La situation financière des ménages est saine : cela favorise le financement d’achats importants. Le poids du service de la dette est faible. La progression du patrimoine net agrégé des ménages se poursuit, avec un effet de richesse positif sur les dépenses.

L’investissement des entreprises, confronté à un environnement difficile, a été poussif ces dernières années. L’an dernier, l’investissement non résidentiel, déjà faible, a pâti du recul de l’activité dans le secteur de l’énergie. Une reprise modérée de l’investissement en 2017 est inscrite dans notre scénario et de bonnes surprises ne sont pas à exclure. La politique de la nouvelle administration soutient le climat des affaires. Son attitude générale, favorable aux entreprises, pourrait stimuler le goût d’entreprendre, les fameux « animal spirits ». Les entreprises, réagissant à des règlementations moins pesantes et à une baisse de la fiscalité sur leurs profits, pourraient ainsi procéder à de nouveaux investissements et embaucher. Toutefois, même si la bonne tenue des marchés financiers est favorable à l’investissement, les entreprises attendront probablement des gestes concrets de Washington, avant de prendre de nouvelles initiatives.

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nov.-10 déc.-11 janv.-13 févr.-14 mars-15 avr.-16

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États-Unis : la consommation et les ventes au détail tirent la croissance

Ventes au détail

Conso. personnelleSource : Crédit Agricole CIB

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T1-10 T1-11 T1-12 T1-13 T1-14 T1-15 T1-16

Ryhtme an., %

Investissement non résidentiel en % du PIB

Source : Crédit Agricole CIB

Etats-Unis : investissement des entreprisesdécevant par sa faiblesse

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 4

Les acquisitions de logements devraient continuer à progresser. À en juger par les données démographiques, les mises en chantier de logements restent inférieures à ce qui serait nécessaire pour faire face à la demande émanant des nouveaux foyers. Bien que plus coûteux (compte tenu de la tendance haussière des taux hypothécaires), l’accès au crédit hypothécaire s’est amélioré.

Le commerce extérieur devrait se dégrader et contribuer négativement à la croissance réelle de l’année 2017 (aux alentours de 0,4%). L’appréciation passée du dollar et la faiblesse de la croissance dans le reste du monde rendent les exportations américaines moins compétitives, tandis que la consommation domestique favorise les importations. Nos prévisions sur la demande extérieure nette n’intègrent ni les frictions croissantes autour du commerce international, ni les taxes d’ajustement aux frontières (BAT) proposées par les Républicains dans leur projet de réforme fiscale pour les entreprises n’auraient pas d’impact sur le commerce extérieur.

La baisse de la croissance réelle observée au premier trimestre devrait n’être que temporaire. Les données disponibles concernant cette période suggèrent que la croissance a ralenti (1,0% à 1,5%). La faiblesse régulière de la croissance au premier trimestre reflète moins de dépenses par les ménages pour le chauffage avec un hiver doux et des distorsions liées à des effets saisonniers résiduels ou simplement à un écart trimestriel normal d’une série statistique « bruitée ». Nous tablons sur le retour de la tendance de fond, plus solide, dans les trimestres suivants.

À 1,7% sur un an en janvier, l’inflation PCE1 sous-jacente reste

inférieure à l’objectif de 2% de la Fed. Elle devrait rester basse à court terme, puis augmenter avec la poursuite de l’amélioration du marché du travail et les hausses de salaires. Supérieures à la productivité, ces dernières exercent une pression haussière sur le coût unitaire du travail. Les entreprises tenteront de relever leurs prix, si les conditions de marché le leur permettent, afin de préserver leurs marges. Les anticipations d’inflation restent relativement bien ancrées. La mesure d’inflation privilégiée par la Fed atteindra 2% en fin d’année ou en début d’année prochaine.

Un plan de relance de Washington pourrait augmenter la

croissance d’environ 0,3% en 2018. Le calendrier, la nature et

l’ampleur du plan sont cependant très incertains.

Les perspectives budgétaires réduisent la visibilité

La majorité républicaine du Congrès a insisté sur deux promesses importantes pendant la campagne :

l’abrogation de l’Obamacare (Affordable Care Act ou ACA) et une baisse des impôts dans le cadre d’une

ambitieuse réforme fiscale. En outre, le président Trump a appelé de ses vœux une forte réduction de la

règlementation qui pèse sur les entreprises, le lancement d’un vaste programme de travaux d’infrastructure et

une politique plus combattive (protectionniste) en termes de commerce international. Ces initiatives faisaient

partie du plan républicain pour « rendre sa grandeur à l’Amérique » (‘Make America Great Again’).

Face à cette politique, les marchés se sont lancés dans ce qu’ils ont appelé le « Reflation Trade ». Dans

l’optique des marchés, la nouvelle politique budgétaire aura pour effet de soutenir la croissance via les baisses

d’impôts, les allègements de règlementation et les dépenses d’infrastructure financées en partie par le

gouvernement fédéral.

1 Indice de prix des dépenses de consommation personnelle (Personal Consumption

Expenditure)

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Etats-Unis : pressions inflation-nistes modérées, mais en hausse

Déflateur de l’indice PCE

Déflateur de l’indice PCE sous-jacent

Source :CA CIB

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T1-10 T1-11 T1-12 T1-13 T1-14 T1-15 T1-16

Ryhtme an., cvs, %

Etats-Unis : contribution à la croissance des exportations nettes

Exportations nettes : contributionà la croissance réelleSource : CA CIB

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 5

Le calendrier, la nature et l’ampleur de la relance budgétaire sont cependant très incertains. Il nous semble

que les prix de marché ont sur-réagi aux projets de Donald Trump et des Républicains du Congrès. La

suppression des certaines règlementations pesantes sera certes favorable à la croissance. Nous n’attendons

cependant guère d’effet de la relance budgétaire cette année et rien ne garantit un effet important en 2018.

Les Républicains de la Chambre des Représentants sont peu enthousiastes à l’idée de grands projets

d’infrastructure, qui accroissent les déficits. Par ailleurs, des mesures protectionnistes créeraient des risques

baissiers pour la croissance, si les conflits commerciaux se multipliaient. D’éventuelles perturbations des

chaînes d’approvisionnement, en cas de restrictions sur les échanges mondiaux, pourraient peser sur la

profitabilité des entreprises et conduire à des prix plus élevés pour les consommateurs finaux. En conclusion :

des déceptions autour du « Reflation Trade » pourraient conduire à une dégradation des conditions sur les

marchés financiers.

La polarisation partisane limite les options en

termes de législation. Compte tenu des

procédures en vigueur, l’adoption de projets de

loi importants requiert 60 voix au Sénat. Les

Républicains, qui disposent de la majorité mais

pas des 60 voix requises, prévoient de recourir à

une procédure particulière (« le rapprochement

budgétaire », budget reconciliation en anglais)

qui leur permettrait d’adopter, avec une majorité

de seulement 51 voix, les réformes fiscales dans

le cadre de la loi de finances pour l’année fiscale

2018. En dépit de la majorité républicaine dans

les deux chambres et de la présence d’un

Républicain à la Maison-Blanche, les progrès

ont été lents.

Le projet de loi abrogeant l’Obamacare a été retiré car il a soulevé des objections de la part de

représentants républicains, conservateurs et modérés, surtout depuis que la publication d’un rapport du

CBO2 qui indiquait que le projet de loi ferait perdre leur assurance santé à 24 millions de personnes au

cours des dix prochaines années. Avec l’aide de Donald Trump, Paul Ryan (le président de la Chambre des

Représentants) espère obtenir les 216 voix nécessaires pour approuver l’abrogation, le mois prochain. La

question du Sénat va probablement retarder la résolution du problème de l’abrogation de l’Obamacare. Cela

retardera l’adoption des

mesures fiscales, qui

sont au cœur du projet

de relance budgétaire,

mais sont encore plus

contestées que l’abro-

gation de l’Obamacare.

Le projet de réforme

fiscale des Républicains

de la Chambre des

Représentants prévoit

une baisse de 35% à

20% de l’impôt sur les

sociétés. Les investisse-

ments des entreprises

pourraient être intégralement comptabilisés en charges, les intérêts nets ne seraient pas déductibles et les

pertes nettes d’exploitation ne seraient déductibles que dans certaines limites. La réforme créerait un

régime d’imposition territorial avec la mise en place d’une taxe d’ajustement aux frontières (Border

Adjustment Tax ou BAT) : les entreprises américaines qui exportent bénéficieraient d’une base d’imposition

plus basse, tandis que les importateurs devraient s’acquitter d’une taxe de 20% sur les importations.

2 Congressional Budget Office : bureau budgétaire du Congrès (groupe non-

partisan de fonctionnaires fédéraux chargés de fournir des données économiques au Congrès).

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Jan-16 Apr-16 Jul-16 Oct-16 Jan-17

Etats-Unis : incertitudes élevéessur la politique économique

Source : Crédit Agricole CIB

Le programme républicain est ambitieux, pas de droit à l’erreur…

24-mars Projet de loi abrogeant l’Obamacare retiré

28-avr.Expiration du budget provisoire permettant le financement de l’année

fiscale en cours

● Cette question doit être traitée pour éviter une fermeture partielle des

administrations américaines (shutdow n)…

Juillet ?Présentation par la Chambre des Représentants d’un projet de budget

pour l’année fiscale 2018. Version du Sénat au T4 ?

● Comprendra des propositions de réforme fiscale dans le cadre

du‘rapprochement budgétaire’

31-juil. Début de la trêve parlementaire, qui prend fin le 5 septembre

1-oct. Début de l’année fiscale 2018

* Jo int Committee on Taxation : comité mixte sur la fiscalité (comité non partisan issu du

Congrès qui aide les parlementaires sur les questions fiscales).

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 6

Le président de la Chambre des Représentants, Paul Ryan, et le rapporteur du Comité des voies et moyens

(Ways and Means Committee), Kevin Brady, sont déterminés à inclure la BAT dans la réforme, celle-ci

devant générer des revenus de 1 200 Mds USD en dix ans, selon les projections. Ce revenu permettrait de

compenser l’abaissement du taux de l’impôt sur les sociétés : il permettrait ainsi à la réforme fiscale d’être

plus ou moins neutre en termes de déficit budgétaire. Le dogme républicain a toujours été la réduction du

poids de l’État et de la dette publique. Les opposants à la BAT sont évidemment les entreprises dont la

facture fiscale augmenterait avec sa mise en place ; ce sont, par exemple, les entreprises de la grande

distribution, comme WalMart ou les raffineries de

pétrole qui achètent leurs produits à l’étranger et

vendent sur le marché domestique américain.

À l’heure actuelle, plusieurs sénateurs répu-

blicains sont opposés à la mise en place d’une

BAT. Cela pourrait remettre en cause le projet de

réforme et de nombreux acteurs réfléchissent à

un « plan B ». Le problème est que les autres

mesures élargissant la base fiscale sont

impopulaires et qu’une mise en œuvre progres-

sive des changements aggraverait probablement

le déficit budgétaire à court terme. Cela qui irait à

l’encontre de la réduction du déficit public

souhaitée par de nombreux membres du

Freedom Caucus3 de la Chambre des

Représentants.

Il est peu probable que les Républicains soient aidés par les Démocrates, dès lors les possibilités qui

s’offrent à eux sont soit de trouver d’autres moyens de « financer » la baisse de l’impôt sur les sociétés, soit

d’accepter que la réforme va gonfler le déficit, ce

qui irait à l’encontre de la « règle Byrd ». Cette

dernière est une règle du Sénat qui permet aux

sénateurs, pendant le processus de rappro-

chement budgétaire, de bloquer une loi si celle-ci

conduit à une augmentation significative du déficit

budgétaire fédéral sur une durée de plus de dix

ans. Cette règle explique que les baisses

d’impôts adoptées sous George W. Bush aient

été programmées pour s’arrêter au bout de dix

ans.

L’adoption de la réforme fiscale via le processus

de « rapprochement budgétaire » ne sera

possible que si un consensus entre Républicains

est trouvé sur plusieurs sujets épineux. Cela

prendra beaucoup de temps, sans garantie de

succès. Ceci est intégré dans nos prévisions macro-économiques : celles-ci prennent certes en compte des

mesures budgétaires favorables à la croissance pour l’année 2018, mais l’ampleur de l’impact budgétaire

final reste incertaine.

3 Groupe de Républicains conservateurs siégeant à la Chambre des Représentants

20

30

40

50

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90

1980 1990 2000 2010 2020D

ett

e e

n %

du P

IB

Etats-Unis : dette fédéraledétenue par le public

ProjectionsCBO

Source : Crédit Agricole CIB

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-1,5

-1,0

-0,5

0,0

0,5

1,0

2010T1

2011T1

2012T1

2013T1

2014T1

2015T1

2016T1

Etats-Unis : contribution des dépenses gouvernementales à la

croissance du PIB

Source : Crédit Agricole CIB

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 7

Zone euro : le cycle économique l’emporte sur le cycle politique

« Reprise modérée sans accélération » : le scénario dessiné en

décembre est conforté par les derniers chiffres de croissance qui nous

permettent, en outre, de légèrement réviser à la hausse notre

prévision de croissance pour 2017 et 2018 (à, respectivement, 1,7%

et 1,6%). Ainsi que cela était prévu, l’incertitude liée aux évènements

politiques de l’automne n’a pas impacté la croissance. La dynamique

de la demande intérieure a même été plus robuste qu’anticipé grâce,

notamment, à une croissance plus soutenue de la consommation

privée et de l’investissement. Ceci a permis de compenser une

contribution plus négative du commerce extérieur principalement due

à la croissance des importations. Si en moyenne annuelle la

croissance de la zone euro n’a pas accéléré en 2016 (1,7%), la

reprise se consolide avec la convergence accrue des rythmes de

croissance entre les pays membres, grâce à une accélération des

pays en retard dans le cycle. Les pays européens profitent en effet du

renforcement du cycle manufacturier global et de la reprise de la

demande mondiale de biens d’équipement. Les dynamiques

reflationnistes gagnent en intensité et leur transmission aux prix de

production mondiaux constitue une bonne nouvelle pour les

producteurs européens. Les dernières données d’enquête PMI

signalent une économie qui commence à tourner à plein régime et

une activité industrielle qui retrouve le rythme de croissance connu à

l’été 2011, avant la crise souveraine.

Dynamique des salaires, faible coût de l’endettement mais

également faible rémunération de l’épargne et soupçon

d’inflation : les ménages arbitrent et, finalement, semblent ne rien

sacrifier. La dynamique plus soutenue du revenu disponible couplée

à la consolidation de la reprise du crédit logement ont simultanément

permis aux ménages d’augmenter leur consommation et leur

investissement résidentiel, mais aussi financier. La baisse des taux

d’intérêt du crédit habitat a permis de compenser la hausse des prix

de l’immobilier, facilitant l’accession à la propriété partout dans la

zone. La faible rémunération de l’épargne et les effets de richesse

n’ont pas incité les ménages européens à augmenter leur propension

à consommer. Le taux d’épargne a, en effet, légèrement augmenté

pour maintenir une cible de revenu financier compensant une moindre

rémunération du capital. La remontée de l’inflation ne s’est pas encore

traduite par un ralentissement de la consommation : ce dernier, même

contenu, sera inévitable. Cependant, confrontés à la moindre

progression de leur revenu disponible réel, les ménages aban-

donneront cette cible de revenu financier et ajusteront leur taux

d’épargne légèrement à la baisse pour maintenir « à flot » le cycle de

leur consommation. La consommation de biens durables, à sa

troisième année de reprise, n’a pas encore atteint son point de

saturation : un faisceau d’indicateurs l’illustre. Les carnets de

commandes en provenance du marché intérieur auprès des

producteurs de biens de consommation ne cessent de s’améliorer.

Les flux de nouveaux crédits à la consommation en janvier étaient

encore en accélération (4,1% sur un an, après 3,9%). La demande de

crédit à la consommation est elle-même toujours attendue en hausse

au premier trimestre 2017, selon l’enquête BLS auprès des banques

de la zone. Les flux du crédit habitat accélèrent également en janvier

(2,7% sur un an). La remontée anticipée des taux d’intérêt dans la

zone euro est trop modeste pour briser l’élan de l’investissement

résidentiel dans les pays du sud. Elle pourrait accélérer le

ralentissement dans les pays où la remontée des prix immobiliers est

plus soutenue et ancienne (dont l’Allemagne et l’Irlande).

11,5

12,0

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15,0% revenu

dispo.

UEM : taux d'épargne des ménages

Sources : Eurostat, Crédit Agricole S.A.

-10

-5

0

5

10

15

20

-2,5

-2,0

-1,5

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-0,5

0,0

0,5

1,0

1,5

2,0

2,5a/a, %a/a, %

UEM : marché du travail

Population active Emploi

Chômeurs (dr.) Sources : Eurostat, CA S.A.

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 8

La progression du revenu disponible restera soutenue par un

rythme de créations d’emplois élevé. Ce dernier a atteint 1,8% sur

un an à fin 2016, créant un « appel d’air » : une forte remontée de la

population active (1,1% au troisième trimestre sur un an) contribuant à

infléchir le rythme de réduction du nombre de chômeurs et du taux de

chômage. Cette dynamique devrait se poursuivre à un rythme à peine

plus faible, impliquant une moindre baisse du taux de chômage en

2017 et 2018 (-0,4 point par an, contre -0,8 point en 2016). Cela

porterait le taux de chômage à 9,1% à la fin 2018, un niveau de peu

supérieur au taux de chômage d’équilibre non inflationniste (NAIRU)

estimé par la BCE à 8,5%. Ce moindre recul du taux de chômage à ce

stade du cycle n’est pas surprenant : dynamisme de la population

active et rythme encore élevé, mais en léger ralentissement, des

créations d’emplois. Nous sommes toujours dans une phase de

croissance riche en emplois, accompagnée d’une légère reprise de la

productivité. Celle-ci est le produit d’une activité plus soutenue dans le

secteur manufacturier, seul secteur capable à ce jour de générer des

gains de productivité. Ces derniers autoriseront une « bascule » du

partage de la valeur ajoutée en faveur des profits. Les marges

pourront aussi bénéficier d’une évolution plus favorable des prix de

production, évolution redevenue positive depuis dans la plupart des

pays de la zone.

C’est sur ces hypothèses que se fonde notre prévision d’accélération

de l’investissement productif. La reprise de la composante

équipement est encore fragile (notamment dans les pays du sud) et

l’investissement productif est principalement tiré par les équipements

de transport. Dans une première phase du cycle, il s’agit tout d’abord

de répondre aux besoins des fonctions commerciales et logistiques

afin de réduire les stocks et avant que ne soient rénovés voire

étendus, lors d’une seconde phase, les équipements plus obsolètes.

Nous sommes en train de passer de la première à la seconde phase.

À cet égard, les différentes incitations fiscales incitant à l’innovation

dans l’industrie vont contribuer à promouvoir l’investissement en

machines et permettre à la seconde phase de gagner en puissance.

Cette reprise de l’investissement va renforcer la croissance en France

et en Italie. Elle ne sera pas suffisante pour freiner le ralentissement en

Allemagne. En Espagne, où la reprise de l’investissement a été

soutenue depuis trois ans, son ralentissement se couplera à celui des

dépenses des ménages.

Quid des principaux risques ? Pour l’année en cours, les risques en

provenance de l’environnement international sont orientés à la baisse :

la croissance et l’inflation mondiales pourraient surprendre positivement

avec une économie américaine dans la phase d’accélération cyclique

(et ce, sans stimuli budgétaires) et un monde émergent en reprise. Pour

2018, si le risque d’une erreur de gestion du policy-mix américain ne

peut être exclu, on suppose cependant que la BCE sera en mesure de

maintenir le découplage nécessaire des taux de la zone euro de ceux

des États-Unis. Quant aux risques endogènes, ils restent orientés à la

baisse. L’éloignement du risque déflationniste dans la zone euro

augmente la probabilité d’une sortie précoce de la politique

d’assouplissement monétaire. Retenant l’hypothèse du maintien de

coalitions ou de partis traditionnels au pouvoir, notre scénario suppose

que les primes de risque des pays périphériques ne se tendent pas trop

violemment à l’approche de la réduction du montant des rachats par la

BCE, prévue dès avril 2018. L’incertitude liée au cycle électoral

européen pourrait se traduire par une remontée du taux d’épargne, un

ralentissement plus marqué de la consommation, mais également faire

trébucher la timide reprise de l’investissement. Le maintien d’un rythme

de croissance supérieur au potentiel se fonde en effet sur l’hypothèse

-70

-60

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-40

-30

-20

-10

0

10

solde d'opinions

UEM : producteurs de biens de consommation durable

Commandes totales

Commandes à l'export.

Sources : Com. européenne, Crédit Agricole S.A.

-1,5

-1,0

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0,5

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2

4

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8

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10 T1 11 T1 12 T1 13 T1 14 T1 15 T1 16 T1

a-a-1% pop. active

UEM : chômage

Taux de chômageNAIRUVariation du tx de chômage (dr.)

Sources : Eurostat, Crédit Agricole S.A.

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 9

d’un relais au ralentissement escompté de la consommation privée

assuré par l’accélération de l’investissement productif. Seul ce relais

permettra de refermer l’écart de production négatif dans la première

moitié de 2019. C’est le scénario que nous retenons.

Un cycle politique plus long que le cycle électoral

La difficulté des partis antisystème à accéder au pouvoir permet de ne pas élaborer des scénarii détaillés de

rupture économique à court terme. Cependant, leurs idées continuent à façonner les programmes politiques et

à alimenter la polarisation des électeurs européens avec une potentielle porosité avec les programmes des

partis traditionnels. Une lecture binaire du risque est donc à exclure et il faudra s’accommoder de ces

tendances sur un horizon de prévision assez long.

Les partis eurosceptiques n’accèdent pas au pouvoir.

Après l’échec du FPÖ à conquérir la présidence autrichienne en décembre, la percée contenue du PVV aux

élections néerlandaises de mars laisse espérer que l’euroscepticisme marque le pas en Europe. Le gain de

la droite néerlandaise europhobe et xénophobe (PVV et FvD) n’aura été que de 7 sièges, contre une projection

des sondages supérieure à 10. Par ailleurs, les autres partis eurosceptiques de gauche, comme de droite,

n’ont pas réussi à augmenter leur score. Le parti du Premier ministre sortant a contenu son recul, avec

33 sièges sur 150, conservant son titre de premier parti. Il devrait être en mesure de former une coalition

centriste avec trois autres partis. Si ce résultat rend presque nulle la probabilité d’un Nexit la sanction de la

coalition sortante se traduit cependant par une fragmentation politique accrue.

En Allemagne, la donne politique a également

quelque peu changé avec l’arrivée de Martin Schulz

comme candidat du SPD à la chancellerie. Celui-ci

offre au parti une formidable remontée dans la

course aux législatives fédérales, au point de

concurrencer dangereusement la CDU. Cette

perspective rend envisageable, mais peu probable,

la réalisation d’une coalition SPD/Verts/Die Linke

(parti de gauche) qui réorienterait le pays vers une

politique budgétaire plus flexible et un aménagement

des réformes « Hartz » afin de sécuriser l’emploi. À

l’opposé, une coalition CDU-CSU/Verts/FDP (parti

libéral) garantirait une poursuite de l’actuelle

politique, mais les divergences entre les Verts et le

tandem CSU/FDP en matière de politique d’asile ou

même de fiscalité rendent une coalition « Jamaïque » difficilement gouvernable. Enfin, la reconduite de

l’actuelle « Grande coalition » risque de devoir prendre en compte les revendications du SPD. Le parti

eurosceptique Afd a perdu de son élan et plafonne dans les sondages depuis l’arrêt des flux migratoires et la

mise en place d’une procédure accélérée de renvoi des demandeurs d’asile déboutés dans leur pays d’origine.

En France, l’élection présidentielle approche, avec le premier tour le 23 avril et le second tour le 7 mai.

Cette élection fait apparaître des clivages profonds entre les programmes des candidats. Le premier oppose

des politiques d’inspiration libérale, axées sur une politique de « l’offre », (François Fillon, Emmanuel

Macron) à des politiques plus interventionnistes, avec une relance par la demande et une hausse marquée

des dépenses publiques (Benoît Hamon, Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen). Une seconde ligne de

fracture s’organise autour du choix entre le protectionnisme et l’acceptation de l’économie mondialisée et du

libre-échange, débouchant sur la question de l’appartenance à l’Union européenne. Marine le Pen et Jean-

Luc Mélenchon optent pour une renégociation des traités européens avec à la clé une probable sortie de la

zone euro. En revanche, François Fillon, Emmanuel Macron et Benoît Hamon sont en faveur du maintien

dans la zone euro. La conséquence de ce double clivage est l’apparition d’un paysage politique plus

morcelé (avec cinq candidats majeurs) peu propice à l’émergence de larges coalitions d’adhésion. Cela

risque de rendre difficile l’obtention d’une majorité claire à l’Assemblée Nationale (les élections législatives

se tiennent les 11 et 18 juin), majorité prête à supporter le programme du prochain président de la

République.

0

10

20

30

40

50

2014 2015 2016 2017

%Allemagne : intentions de vote

aux prochaines législatives

CDU/CSU SPD VertsFDP Linke Afd

Sources : Forsa, Crédit Agricole S.A.

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 10

En Italie, nous prévoyons que le gouvernement Gentiloni reste en fonction jusqu’à la fin naturelle du mandat

en février 2018. Le Premier ministre démissionnaire M. Renzi doit se soumettre au débat interne du congrès

du Parti démocrate au mois d’avril et aux élections primaires à l’automne. Ceci diminue la probabilité

d’élections anticipées. Le caractère proportionnel de l’actuelle loi électorale (avec une prime de majorité à la

liste au seuil de 40%) augmente la probabilité d’une coalition à gauche (Parti démocrate, parti issu de la

scission des démocrates et gauche radicale) ou au centre (Parti démocrate, centristes et droite modérée). Les

chances d'une coalition menée par le mouvement antisystème Cinq Etoiles, avec la droite sécessionniste de la

Ligue du Nord et la droite extrême des Fratelli d’Italia, voit le jour sont minces. En effet, bien que le mouvement

ait de plus en plus investi des thèmes traditionnels de droite et drainé son électorat, l’héritage de gauche de la

plateforme politique fondatrice rend cette alliance compliquée et expose le mouvement à une perte

d’adhérents. Néanmoins, la récente remontée dans les intentions de vote du parti, qui le situe en mars devant

le Parti démocrate, est à observer avec attention.

En Espagne, bien que le gouvernement soit historiquement faible, car minoritaire pour la première fois depuis

le retour de la démocratie, la division de l’opposition devrait empêcher sa censure. Le retour des tensions

politiques est néanmoins à prévoir, car il lui faudra concilier engagement européen de réduction du déficit et

l’opposition des partis de gauche et régionalistes. C’est cet équilibre fragile que le gouvernement socialiste

minoritaire a réussi au Portugal, grâce à la bonne tenue de la croissance. Sa probabilité d’aller au bout de son

mandat pourrait considérablement augmenter, à mesure de sa hausse graduelle dans les sondages.

En revanche, en Grèce, en très grande difficulté dans les sondages, la courte majorité Syriza/Anel dispose

d’une très faible marge de manœuvre pour résister à la demande d’austérité des créanciers. Une chute du

gouvernement est possible, ce qui laisserait le champ libre, au regard des sondages actuels, au parti

conservateur et europhile Nouvelle Démocratie. Néanmoins, la baisse marquée de l’opinion publique en faveur

de l’euro et la suppression de la prime de majorité pourraient être facteur d’instabilité politique à plus long

terme.

Dans un contexte de fragmentation politique historique, il faut s’attendre à ce que les idées radicales et

populistes continuent à façonner les programmes politiques et ainsi alimenter la polarisation des

électeurs européens. Cependant, comme l’exemple de Syriza en Grèce l’atteste, l’accession ou le maintien

au pouvoir de partis populistes ne peut se faire qu’au prix d’un repositionnement moins

eurosceptique. De plus, l’émergence des principaux partis populistes en Italie (M5S) ou en Espagne

(Podemos) s’est effectuée sur une plateforme politique transversale, qui atteint ses limites, au moment de

clarifier son positionnement européen. Le risque d’une certaine porosité existe néanmoins : porosité de

certains sujets portés par les partis extrêmes, qui aurait pour conséquence de nationaliser certains débats

européens, de « zombifier » les institutions européennes en ignorant leurs normes et leurs valeurs. Dans le

sillage de la fragmentation politique, la fragmentation géographique, défendue par certains mouvements

sécessionnistes (Ecosse, Catalogne, ...), sera l’un des principaux risques politiques à surveiller.

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 11

Royaume-Uni : plus que jamais, le consommateur est roi

La « résilience » post-référendum s’est prolongée jusque fin 2016.

La croissance s’est de nouveau révélée plus forte qu’attendu au

quatrième trimestre 2016 : à 0,7% sur un trimestre, elle a accéléré par

rapport aux deuxième et troisième trimestres (0,6% dans les deux cas)

pour évoluer à un rythme supérieur au taux de croissance potentiel. La

consommation des ménages est restée son principal moteur. Mais,

grâce à une forte hausse des exportations doublée d’une baisse des

importations, le commerce extérieur a également joué un rôle significatif

contribuant très positivement (1,3 point de pourcentage) à la croissance

du quatrième trimestre. En revanche, parallèlement, l’investissement

des entreprises a baissé (-1% sur un trimestre). Il est difficile de statuer

et de conclure définitivement qu’il s’agit du début d’une tendance

durable, mais les intentions d’investissement s’inscrivent en forte baisse

depuis plusieurs mois. Notre scénario table donc sur une poursuite de

la contraction de l’investissement au cours des prochains trimestres, les

incertitudes liées au Brexit incitant les entreprises, tout comme les

investisseurs étrangers, à revoir à la baisse leurs projets

d’investissement. L’érosion des marges, conséquence des pressions

haussières sur les prix des intrants, constitue un frein supplémentaire.

Le maintien de la croissance mondiale à un niveau relativement élevé,

la résistance de la consommation des ménages et l’amélioration de la

compétitivité des exportations pourraient cependant infléchir ce

diagnostic et soutenir l’investissement de façon plus importante

qu’attendu. Un risque haussier entoure donc nos prévisions.

Le point d’inflexion du cycle dépendra du comportement des

consommateurs. La poursuite de la forte progression de la

consommation des ménages depuis le référendum s’est largement

appuyée sur une croissance à deux chiffres des prêts à la

consommation provoquant une baisse supplémentaire du taux

d’épargne (à 5,6% au troisième trimestre 2016, contre 6,6% un an

auparavant). La croissance des salaires nominaux est restée

décevante, en dépit de la poursuite de la baisse du taux de chômage.

Compte tenu de la légère remontée du taux de chômage attendue dans

les mois qui viennent et de la progression toujours extrêmement faible

de la productivité (0,4% sur un an au troisième trimestre 2016), les

éventuelles pressions haussières sur les salaires devraient rester

limitées. Combinée à l’important rebond anticipé de l’inflation

(dépassant 3% vers la fin de l’année), la croissance des salaires réels

devrait devenir négative dans le courant de l’année. La progression du

revenu disponible réel brut a déjà baissé fortement au cours de l’année

écoulée : elle n’était plus que de 0,1% sur un an au troisième trimestre

2016. Les signes d’un ralentissement de la consommation des

ménages au tournant de l’année sont déjà visibles dans les indicateurs

avancés. La confiance des ménages, grevée par les anticipations de

prix plus élevés, a légèrement baissé depuis ses points hauts et les

ventes au détail (bien qu’elles ne soient pas un indicateur parfait de la

consommation finale des ménages) ont reculé pour le deuxième mois

consécutif en janvier.

Notre scénario central table ainsi sur un ralentissement de la

consommation des ménages au cours des prochains mois, en

raison de l’anticipation d’une baisse du pouvoir d’achat (liée à

l’accélération de l’inflation) et d’une dégradation du marché du travail.

L’ajustement de la consommation des ménages devrait néanmoins être

plus graduel que le ralentissement des revenus réels ne le suggère. La

baisse du taux d’épargne des ménages constitue un amortisseur. La

confiance des ménages continue de résister et les invite à moins

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-6

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0

2

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98 00 02 04 06 08 10 12 14 16 18

a/a, %

R-U : rémunérations et dépenses de consommation (termes réels)

Rémunérations réelles (déflatées par ledéflateur des dépenses de conso.)Consommation des ménagesSources :

ONS, CA S.A.

prév.

2

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12

14

16

18

85 88 91 94 97 00 03 06 09 12 15 18

%

R-U : taux d'épargne des ménages

Récessions Taux d’épargne

Prévisions Sources : ONS, Crédit Agricole S.A.

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 12

épargner, alors que les conditions financières continuent de promouvoir

leur endettement.

Top départ vers l’inconnu

Au bout d’un processus législatif compliqué qui a duré un mois et demi, le projet de loi de Theresa May pour le

déclenchement de l’Article 50 (European Union Notification of Withdrawal Act 2017) a été adopté sans

amendements et a reçu l’assentiment royal le 16 mars. Le projet n’a pas rencontré une opposition franche, les

Travaillistes s’étant pour la plupart alignés derrière les vœux exprimés par leur électorat lors du référendum. La

voie est libre pour la Première ministre britannique afin d’entamer la procédure de sortie, ainsi qu’elle l’avait

souhaité « avant la fin du mois de mars ». Le 29 mars : c’est donc la date d’envoi de la notification de sortie,

date qui marque le début de longues négociations (deux ans pour avoir un accord de sortie et potentiellement

dix ans pour avoir un accord de libre-échange final) et dont l’issue est hautement incertaine, car conditionnée

par les concessions que les vingt-sept sont prêts à consentir à un partenaire qui pour chacun d’entre eux a une

envergure particulière.

La prochaine étape-clé de la procédure de sortie – ainsi que prévu par l’article 50 du Traité de Lisbonne –

consiste en l’adoption des « lignes directrices » des négociations par le Conseil européen le 29 avril prochain.

Ces orientations doivent être adoptées à l’unanimité et représentent une étape décisive du processus, dans la

mesure où elles vont révéler la tonalité adoptée par les vingt-sept. Donald Tusk, président du Conseil

européen, affiche la volonté d’un divorce « le moins pénible possible » pour l’UE, avec comme priorité de créer

« le plus de certitude et de clarté possible pour tous les citoyens, entreprises et États-membres susceptibles

d’être affectés négativement par le Brexit ». Suivront les négociations de l’accord de sortie. Bon nombre de

pays souhaitent une avancée notable sur les termes de la sortie même avant d’aborder toute question relative

aux relations futures entre l’UE et le Royaume-Uni, notamment en matière de commerce. Des progrès sur ce

front nous semblent peu probables avant les élections en Allemagne en septembre prochain. Michel Barnier,

président de la Commission européenne, principal négociateur côté UE, a d’ores et déjà annoncé une date

butoir pour trouver un accord : octobre 2018, soit six mois plus tôt que la sortie formelle, afin de prévoir du

temps pour le processus de ratification. Si le gouvernement britannique se montre optimiste sur sa capacité à

conclure un accord avec l’UE dans un laps de temps si court, les pourparlers risquent d’être tendus,

notamment lorsque sera abordée la question du passeport européen. Le principal risque reste celui d’une

sortie régie par les seules règles de l’OMC, solution par défaut la plus préjudiciable pour le commerce du

Royaume-Uni mais pour les pays européens qui lui sont les plus liés.

-16

-12

-8

-4

0

4

% Impact du Brexit sur le niveau du PIB à long terme

Scénario dégradé Scénario central

Scénario optimisteSources : Crédit Agricole S.A., études citées

Page 13: MONDE Scénario macro-économique 2017-2018 concordance des temps Le temps politique est long. Celui des marchés financiers extrêmement court. Enfin, celui de l économie réelle

MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 13

Japon : le marché du travail reste le facteur-clé

La croissance aura finalement décéléré au cours de l’année 2016

(à 1,0%, contre 1,2% en 2015) tout en se maintenant à un niveau

« raisonnable ». Après deux années consécutives de baisse, la

consommation privée a augmenté de 0,4%. L’investissement rési-

dentiel, soutenu par la politique monétaire accommodante de la

Banque du Japon (BoJ), a progressé de 5,6%, après deux années de

baisse également. L’investissement des entreprises s’est modeste-

ment inscrit en hausse (1,5%, contre 1,1% en 2015). Enfin, les

exportations ont accéléré à partir du deuxième semestre pour afficher

une progression de 1,2% sur l’année. La plupart des facteurs ayant

soutenu la croissance en 2016 resteront à l’œuvre cette année. Nous

maintenons par conséquent notre prévision de croissance éco-

nomique à 1,3% pour 2017.

L’évolution de l’économie japonaise sera largement conditionnée

par la consommation privée, facteur-clé de notre scénario. Le

taux de chômage et le ratio emploi/candidat ont en effet,

respectivement, atteint 3,0% et 1,43 en janvier, des niveaux qui

n’avaient plus été observés depuis l’éclatement de la bulle de la fin

des années 90. La croissance de la rémunération globale des

salariés, reflet des conditions du marché du travail, est restée stable

en rythme annuel (2,2% en termes nominaux soit 2,3% en termes

réels). Le niveau élevé d’offres d’emploi par candidat suggère que

l’offre de travail reste soutenue, alors que le taux de chômage est déjà

faible : un tel contexte devrait être encore plus favorable à la hausse

des rémunérations. De fait, le nombre d’emplois salariés non

agricoles a atteint 63,2 millions en janvier : un record historique dans

un pays confronté à une situation démographique structurellement

défavorable. La bonne santé du marché du travail se traduit, en outre,

par une remontée du taux de participation au marché du travail,

facteur décisif à court et moyen terme pour la croissance.

La dynamique et la soutenabilité de la consommation dépendront

de l’évolution du marché du travail à moyen terme : compte tenu

de la persistance des difficultés démographiques, une hausse

régulière de la rémunération moyenne est nécessaire pour soutenir la

consommation. À cet égard, la décision du Parti libéral démocrate

(PLD) de prolonger son mandat de trois années supplémentaires, le

portant à neuf ans (ce qui garantit presque que Shinzo Abe restera

Premier ministre trois ans de plus), devrait avoir un impact positif sur

l’économie dans la mesure où son programme économique se

concentrera sur la réforme du marché du travail. Il s’attachera – entre

autres – à rectifier les écarts de rémunération entre les salariés dits

« réguliers » (les plus stables, en CDI à temps plein) et les salariés

dits « non-réguliers » (en situation plus précaire : CDD, temps partiel,

intérimaires, etc.).

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90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 12 14 16

Millions

Emplois salariés nonagricolesSources : MIAC, CA CIB

Japon : l’emploi atteint des records historiques,malgré une situation démographique défavorable

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80 83 86 89 92 95 98 01 04 07 10 13 16

%

Japon : la participation aumarché du travail s’améliore

Tx de participation aumarché du travail

Sources : MIAC, CA CIB

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 14

Pays émergents – Jusqu’ici tout va bien ?

La croissance de la sphère émergente va accélérer au cours de l’année, notamment parce que les craintes relatives aux déclarations (bruyantes) et menaces protectionnistes ont quelque peu reculé. Nous identifions quatre risques principaux : ceux-ci sont liés à Donald Trump, à la Fed, aux prix des matières premières et à la Chine.

En ce début d’année, nous estimions que la croissance émergente

allait commencer à accélérer en 2017 après trois années moroses,

mais que les inquiétudes politiques ou géopolitiques faisaient peser

une menace sur l’embellie pressentie des perspectives économiques.

Trois mois plus tard, notre scénario d’accélération de la croissance

reste pleinement d’actualité. Quant à nos craintes liées au contexte

politique et géopolitique, elles ont légèrement reculé.

La Russie et le Brésil sortent lentement de récession

Vue sous un angle géographique, l’accélération de la croissance

s’explique par la lente amélioration économique en Russie et, dans

une moindre mesure, au Brésil. La Russie est sortie de récession,

principalement grâce au rebond des cours du pétrole. Après avoir

considérablement baissé en 2014-2015, le prix du Brent a (plus ou

moins) doublé en un an environ. En conséquence, la récession russe

s’est modérée, de -3,8% en 2015 à -0,2% en 2016. La croissance

pourrait atteindre 1,5% en 2017.

L’amélioration a été plus graduelle, donc plus décevante, au Brésil.

Alors que la mise en place d’un nouveau gouvernement semblait

susceptible de soutenir la confiance et de stimuler la croissance, la

dynamique espérée n’a pas été au rendez-vous. Certaines réformes

du gouvernement tendront à mettre les ménages sous pression, ce

qui limite les perspectives de reprise de la consommation privée. Le

Brésil sortirait de récession en 2017 pour afficher un taux de

croissance modeste (0,6%). Il ne se passe rien de réellement exaltant

en Russie ou au Brésil : la croissance reste faible mais, au moins, la

récession est terminée.

Amélioration des exportations et de l’investissement

Au-delà de ces deux pays, la situation globale des pays émergents

s’améliore lentement. La consommation privée restera un des

principaux piliers de la croissance émergente en 2017. Mais

l’accélération de la croissance viendra probablement de l’inves-

tissement. Le renforcement de la demande mondiale devrait encou-

rager l’investissement des entreprises dans la sphère émergente.

L’amélioration de la demande mondiale a commencé à soutenir les

exportations des pays émergents, comme le montre leur progression

au cours des derniers mois.

Nous tablons également sur une baisse des taux d’intérêt réels : alors

que l’inflation accélère dans de nombreux pays émergents sous l’effet

du rebond des cours du pétrole, la plupart des Banques centrales ne

devraient pas suivre immédiatement le durcissement monétaire de la

Fed. En conséquence, les taux directeurs devraient baisser en termes

réels facilitant le financement des projets d’investissement.

Stabilisation de la Chine

Qu’en est-il de la Chine ? La Chine reste un risque, son problème de

dette n’ayant pas été résolu. Il s’agit cependant davantage d’un risque

s’inscrivant dans la durée que d’une menace imminente. Les liens

0%

1%

2%

3%

4%

5%

6%

7%

8%

Inde Chine Russie Brésil

BRICs: prévisions decroissance du PIB

2017 2018Source : Crédit Agricole CIB

0%

1%

2%

3%

4%

5%

6%

7%

Asie Moy.-Or./Afri. Europeémerg.

Am. Latine

Emergents : prévisionsde croissance du PIB

2017 2018Source : Crédit Agricole CIB

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 15

relativement étroits entre le gouvernement et le système bancaire

permettent aux autorités de continuer à soutenir la croissance via le

crédit. Simultanément, la balance des capitaux permet au système

financier de s’appuyer sur une base des dépôts assez importante. De

plus, bien que nous nous attendions à une augmentation des prêts

non-performants dans les prochaines années (en raison des plans de

relance récents), les marges de manœuvre budgétaires assez

importantes dont dispose le gouvernement devraient lui permettre de

soutenir le secteur bancaire, si cela devenait nécessaire. Au final,

notre scénario central table sur une croissance chinoise stable dans

les prochains trimestres.

Craintes de montée du protectionnisme : toujours présentes, mais apparemment en recul

Donald Trump a confirmé son intention de renégocier l’ALENA et

d’abandonner le Partenariat transpacifique4. Cependant, la pression

que le candidat Trump voulait exercer sur la Chine ne s’est pour

l’instant pas matérialisée, ce qui a conduit les marchés à réduire leur

perception des craintes liées au protectionnisme. Donald Trump devra

« faire quelque chose » pour démontrer à ses concitoyens (et

électeurs) qu’il promeut le retour des emplois aux États-Unis. La

volonté d’agir puis l’action pourraient, dans un avenir plus ou moins

lointain, éroder la confiance et limiter le développement du commerce

mondial. Tout en continuant à surveiller la situation de près, nous

sommes cependant moins tranchés qu’il y a trois mois sur les

conséquences négatives et concrètes que la politique de Donald

Trump pourrait avoir sur les pays émergents.

Les trois autres risques principaux

En dehors des incertitudes liées à la politique de Donald Trump, qui

constituent clairement le principal risque pour l’univers émergent, trois

autres risques pèsent sur notre scénario d’accélération graduelle de la

croissance.

1 - La vulnérabilité au durcissement monétaire de la Fed. Cer-

tains pays sont plus vulnérables parce qu’au cours des dernières

années, ils ont financé leur déficit courant avec des inves-

tissements en portefeuille et de la dette à court terme. C’est le

cas notamment de la Turquie, de la Malaisie, de l’Afrique du Sud

et de l’Indonésie. De nombreux pays émergents ont cependant

réduit leur déficit courant au cours des deux dernières années, ce

qui les a rendus moins vulnérables. Les marchés tablent, par

ailleurs, sur une hausse graduelle des taux et les prix intègrent

largement ce scénario. À moins que la Fed ne devienne

beaucoup plus agressive qu’attendu, la plupart des pays

émergents devraient être capables d’endurer le resserrement

monétaire sans grande difficulté.

2 - Les incertitudes sur les prix des matières premières.

L’important rebond des cours des matières premières depuis le

début de l’année dernière a donné un grand bol d’air aux pays

exportateurs et contribué à l’amélioration des perspectives pour

l’ensemble des pays émergents. Notre scénario de reprise en

2017 repose sur l’hypothèse d’une bonne tenue des cours des

matières premières. Que se passerait-il si cette hypothèse n’était

pas vérifiée ? Si les cours du pétrole chutaient (en réaction à une

hausse de la production américaine d’hydrocarbures par

4 Trans-Pacific Partnership ou TPP en anglais

-1%

0%

1%

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KRW PLN ZAR TRY MXN CNY INR RUB BRL

Emergents : taux d'intérêt réels (3 mois)

Sources : Bloomberg, Crédit Agricole CIB

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16

1992 1996 2000 2004 2008 2012 2016

a/a, %

Chine : évolution du PIB

Source : National Bureau of Statistics

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N°17/091 – 31 mars 2017 16

exemple), la croissance, la balance des paiements et les devises

des pays émergents seraient impactées.

3 - La Chine et plus particulièrement son secteur financier et

son marché immobilier. D’une part, les autorités de

régulations chinoises durcissent les règles applicables aux

gérants d’actifs, ce qui pourrait conduire à une baisse du ratio

d’endettement dans les circuits de financement parallèles

(shadow banking). Cela pourrait donc peser sur la dispo-

nibilité du crédit dans l’économie et pénaliser les petites

banques. D’autre part, les prix de l’immobilier, dopés par le

développement du crédit bancaire, ont progressé à un rythme

élevé au cours des derniers trimestres. Une remontée des

taux d’intérêt, qui pourrait être liée à la politique de la Banque

centrale ou être provoquée par des tensions financières,

pourrait se traduire par une baisse des prix. Cela impacterait

alors la consommation privée (via un effet de richesse

négatif), le budget, le secteur de l’immobilier et le secteur

financier. Un risque de plus à surveiller pendant le reste de

l’année 2017.

Géopolitique – Que sait-on du monde de Donald Trump ?

L’arrivée de Donald Trump est un moment de bascule pour la géopolitique mondiale. Mais il serait simpliste de

croire à un « simple » renversement des alliances. Pour l’instant, tout ce que l’on sait, c’est que des

changements profonds sont en cours et que la situation est instable. C’est peu mais beaucoup : de multiples

scénarios sont possibles mais surtout, à ce stade, leur probabilité d’occurrence respective est égale.

Quels que soient ses déclarations contradictoires, le président américain a déjà déconstruit, avec une rapidité

sidérante, l’un des piliers de l’après-guerre, le multilatéralisme. Cette volonté de rompre avec le système a été

actée avec le retrait de l’accord de partenariat transpacifique et la volonté de renégocier les termes de l’accord

de libre-échange américain (ALENA). Clairement, D. Trump privilégie les négociations bilatérales.

Mais cette volonté de rupture suscite des réactions. Des anticorps en somme ! Ainsi, réveille-t-elle l’activisme

politique allemand. Les voyages du ministre des Affaires étrangères en Russie ou d’A. Merkel aux États-Unis

indiquent que Berlin veut garder la main sur le dossier ukrainien, sans doute en échange d’un investissement

dans l’Otan. En Asie, l’effet « anticorps » est plus dangereux. Bien que D. Trump ait reconnu le principe d’une

Chine Unique, cela n’a pas empêché un déploiement militaire américain en Corée du Sud déclenchant, en

retour, une mini-crise dans la région et, en réponse, l’augmentation des dépenses militaires chinoises. En

Amérique latine, les difficultés mexicaines au lendemain de l’élection de D. Trump ont réveillé la solidarité de

ses voisins. En réaction, les chefs d’États latino-américains ont exprimé leur volonté de renforcer la

coopération économique régionale, mais également avec d’autres puissances économiques, notamment celles

du projet avorté du « Partenariat Trans-Pacifique » (TPP). Néanmoins, pour l’instant, chacun s’inquiète de ses

propres débouchés commerciaux avec les États-Unis, car la région reste très dépendante de l’exportation de

ses matières premières.

Les Russes n’aiment pas attendre… Enfin, le nouvel échiquier géopolitique ne sera pas stable tant qu’une

orientation n’aura pas été donnée aux relations avec la Russie. À Moscou, on attend un « deal » sur l’Ukraine.

Et surtout, ce que V. Poutine veut, c’est un nouveau Yalta, qui définirait les frontières d’influence de l’Otan et

de la Russie.

Mais du côté américain, rien n’est clair. Un rapprochement avec la Russie mal perçu par l’opinion américaine

est un risque réel pour D. Trump, cerné par des « affaires russes ». Par ailleurs, le premier échange

téléphonique avec Vladimir Poutine n’a pas été celui que les Russes attendaient, car l’ouverture de Moscou

pour relancer la non-prolifération nucléaire a tourné court. D. Trump, qui n’avait pas l’air de bien connaître les

traités de réduction des armes stratégiques (Start) de 2010, aurait déclaré que ces derniers n’étaient pas à

l’avantage des États-Unis. Enfin, l’augmentation des dépenses militaires américaines n’est pas le signal que

les Russes voulaient. Cette situation d’attente est dangereuse. N’oublions pas que V. Poutine a pour stratégie

géopolitique de ne jamais perdre la main.

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Pétrole – Vers une nouvelle confrontation entre l’OPEP et les États-Unis

Si la réduction de la production de l’OPEP a redonné espoir à un secteur malmené depuis deux ans, des signaux suggèrent un nouvel affrontement entre l’OPEP et les producteurs américains. Le prix du pétrole a augmenté, mais la production américaine pourrait bien à nouveau croître avec la reprise des investissements aux États-Unis. Les efforts de l’OPEP et notamment de l’Arabie saoudite ont bien favorisé une réduction des stocks, mais sans doute pas autant qu’espéré. L’Arabie saoudite pourrait donc être tentée de ne pas reconduire l’accord. En excluant toute nouvelle sanction contre l’Iran et une dégradation majeure de la situation en Libye, la vraisemblable augmentation de l’offre sur le second semestre 2017 devrait être absorbée par une croissance de la demande. Un marché pétrolier relativement bien approvisionné et des stocks qui restent élevés, devraient confiner le prix du baril entre 50 et 60 dollars en 2017.

Le début de l’année 2017 relance un regain d’optimisme parmi les

professionnels du secteur pétrolier. Depuis décembre dernier, le prix

du Brent a augmenté et se maintient jusqu’à présent dans une

fourchette comprise entre 50 et 60 dollars par baril. Sur les deux

premiers mois de 2017, l’OPEP a respecté ses engagements de

réduction de production. De nombreux producteurs annoncent une

augmentation de leurs investissements sur 2017. À fin janvier 2017, les

stocks pétroliers des pays membres de l’OCDE sont légèrement

inférieurs aux stocks douze mois auparavant.

Toutefois, la menace d’une nouvelle confrontation entre pro-

ducteurs américains et OPEP (Arabie saoudite en particulier) se

profile. Les activités de forage continuent à augmenter dans les

grandes zones de prospection aux États-Unis. La production de pétrole

américaine se stabilise. Certains grands producteurs internationaux

vont centrer leurs investissements sur les pétroles de schiste

américains et projettent une augmentation de leur production

américaine en 2017. La taxation des importations de pétrole, telle que

suggérée par le projet de réforme fiscale, pourrait bien accentuer la

confrontation entre les deux importants blocs producteurs de pétrole. Si

cette réforme conçue pour renforcer la compétitivité des producteurs

américains est susceptible de renforcer la cohésion entre pays

membres de l’OPEP, l’imposition de nouvelles éventuelles sanctions à

l’Iran peut en revanche être bien accueillie (du moins officieusement)

par les autres producteurs.

Notre scénario se base sur le prolongement de la tendance

actuelle. Nous tablons sur une croissance de la demande mondiale de

pétrole de 1,4 million de barils par jour. Les quotas de l’OPEP resteront

globalement bien respectés grâce à l’Arabie saoudite, avec toutefois

une légère dégradation à mesure que l’on se rapproche du 30 juin.

Nous supposons en revanche que l’accord ne sera pas étendu au-delà

du premier semestre 2017. L’administration américaine ne parviendra

pas à mettre en œuvre sa réforme fiscale à brève échéance. La relance

des investissements des producteurs aux États-Unis devrait juste

permettre une faible croissance de la production américaine sur la

seconde moitié de 2017. Les premières annonces des producteurs

laissent supposer que les investissements en 2017 resteront bien

inférieurs aux records historiques de 2013 et 2014. Malgré des gains de

productivité, les États-Unis ne devraient toutefois pas connaître la

frénésie et le raz-de-marée de pétrole des années 2012-2014. Harold

Hamm, magnat pétrolier ayant fait fortune en exploitant le pétrole de

schiste dans le Dakota du Nord et supporter de Donald Trump, a

récemment mis en garde le secteur contre une nouvelle escalade des

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14Mb/j

Etats-Unis : production de pétrole

Pétroles de schiste Autres pétroles bruts

Offshore Autres liquidesSource : EIA

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USD/bbl

Scénario Brent

Historique

Futures

Eco - mars 2017

Eco - déc. 2016

DJ consensus - mars 2017

Sources : ICIIS, ICE, DJ International, Crédit Agricole S.A.

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investissements aux États-Unis. Selon Harold Hamm, toute croissance

de la production américaine non-contrôlée nuirait gravement à

l’ensemble du secteur qui aurait alors du mal à s’en relever. Enfin, bien

que la situation semble s’améliorer en Libye et au Nigéria,

l’environnement politique intérieur n’est pas suffisamment stable pour

considérer une reprise des productions libyenne et nigériane à pleine

capacité. Notre scénario est basé sur une production libyenne et

nigériane en 2017 de 0,65 et 1,65 million de barils par jour

respectivement.

Notre scénario suppose donc un marché légèrement déficitaire en

2017 permettant une baisse modérée des stocks sur l’exercice. Grâce à

cet équilibre certes fragile, les prix du pétrole devraient continuer à

évoluer entre 50 et 60 dollars par baril sur 2017.

Confusions en Libye et au Nigéria

Les terminaux d’exportation de brut de Ras Lanuf et d’Es Sider (d’une capacité globale de 600 000 barils par

jour) font depuis début mars l’objet de convoitises entre les différentes factions armées libyennes. En dix jours,

les deux terminaux situés dans le croissant pétrolier ont changé de mains à plusieurs reprises. Repris en

septembre par les forces du général Khalifa Haftar ces deux terminaux stratégiques ont contribué à la reprise

de la production libyenne. La Libyan National Army du géneral Haftar assure aussi le contrôle des terminaux

pétroliers de Brega, Zueltima et Harriga (Tobrouk). En six mois, la production libyenne est passée de

300 000 barils par jour en août dernier à près de 700 000 barils par jour sur les deux premiers mois de 2017.

Mais, début mars, les deux terminaux ont été repris par les Benghasi Defence Brigades. Les terminaux ont

ensuite été remis aux Petroleum Facilities Guards, milice proche du gouvernement reconnue par la

communauté internationale et siégeant à Tripoli. Le 14 mars, avec (selon certaines sources) l’appui de troupes

russes, les forces du général Haftar auraient repris le contrôle des deux ports. Depuis le début des hostilités, la

production de pétrole libyenne aurait diminué d’un peu moins de 100 000 barils par jour. Il est toutefois difficile

d’estimer précisément les dommages occasionnés par les combats sur les infrastructures et l’impact à moyen

terme sur les capacités exportatrices libyennes.

Au Nigéria, les négociations entre gouvernement fédéral et milices du delta semblent progresser. Aujourd’hui,

seul le terminal de Forcados ne serait pas encore opérationnel. D’une capacité d’environ 220 000 barils par

jour, le terminal pourrait être mis en service pendant le deuxième trimestre. Cela permettrait alors à la

production de pétrole du Nigéria d’atteindre 1,9 million de barils par jour.

L’évolution de la situation intérieure en Libye et au

Nigéria peut rapidement impacter les cours du

pétrole. Si les situations se stabilisent, la production

cumulée de ces deux membres de l’OPEP peut très

vite augmenter de 200 000 à 400 000 barils par

jour. A contrario, une reprise des actes de sabotage

au Nigéria ou la reprise de combats fratricides en

Libye pourrait nettement réduire les productions.

Une chose est sûre : toute reprise significative de la

production pétrolière dans ces deux pays atténuera

l’impact des réductions de productions supportées

par les autres pays membres de l’OPEP, qui

demanderont alors probablement l’application de

plafonds aux deux pays. Les situations intérieures

politiques de la Libye et du Nigéria seront à

surveiller avec, notamment, une influence grandis-

sante russe au Moyen-Orient.

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Mb/j

Production de pétrole brut

Libye NigériaSource : EIA

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 19

Politique monétaire – Les resserrements ? À pas comptés, voire à reculons

Les États-Unis ont ouvert le bal : la mise en œuvre de politiques monétaires moins généreuses est dans l’air du temps. Le resserrement monétaire est cependant un exercice autrement plus périlleux que l’assouplissement. Les risques ne sont pas symétriques. Même si le cycle le justifie, priver une économie et, surtout, des marchés financiers d’un ingrédient essentiel à leur succès ne peut se faire que très – vraiment très – graduellement.

Réserve fédérale : maintien des anticipations de hausse graduelle des taux

La hausse, largement attendue, des taux directeurs par le FOMC au

mois de mars a porté la fourchette du taux des Fed funds à 0,75%-

1%. La projection médiane (inchangée par rapport à celle de

décembre dernier) du taux des Fed funds de la Fed s’établit à 1,40%

à fin 2017, puis à 2,10% à fin 2018. Cela suppose deux hausses

supplémentaires de 25 points de base cette année, puis trois hausses

supplémentaires l’année prochaine. Le taux projeté à long terme

demeure à 3%. Les prévisions économiques du comité sont égale-

ment pratiquement inchangées, avec une croissance attendue à 2,1%

cette année.

La Fed devrait attendre le mois de septembre avant de relever

ses taux une deuxième fois cette année. Les perspectives

économiques justifient une normalisation monétaire plus rapide qu’au

cours des deux dernières années, mais notre scénario table sur un

« report » des hausses dans le temps : deux hausses interviendraient

en 2017, suivies de quatre en 2018. Les conditions vont se dégrader

sur les marchés financiers au cours des prochains mois, dégradation

motivée par la déception sur le calendrier et l’ampleur de la relance

budgétaire de Washington (reflation trade), ainsi que par une

résurgence des inquiétudes liées au commerce international. Un tel

contexte suggère que la Fed mènera la normalisation monétaire avec

prudence.

Banque centrale européenne : vers une inflexion de la politique monétaire

La BCE va graduellement entrer dans une phase de réduction de

son soutien monétaire à la zone euro. Depuis juillet 2011, chaque

décision de politique monétaire a favorisé davantage d’assouplis-

sement : baisses de taux, VLTROs, TLTROs, programmes d’achat de

titres privés, programme d’achat de titres publics, extension et

expansion de ces programmes.

Désormais, la BCE va graduellement – très graduellement – retirer ce

soutien. La première étape sera la suppression de la référence à la

possibilité de taux plus bas. Puis, la BCE va probablement indiquer

une fin du Quantitative Easing (QE), avant de s’engager sur un

tapering5 (au premier trimestre 2018), puis de commencer à remonter

ses taux (probablement pas avant mi-2019). Des débats sont en

cours sur la séquence de ce resserrement monétaire (une remontée

des taux avant la fin du tapering). La logique économique (apla-

tissement de la courbe, remontée de la devise), ainsi que la com-

munication de la BCE nous incite à penser que la remontée des taux

sera plus tardive que ce que ne pense le marché.

5 Réduction progressive des achats de titres

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2016 2017 2018 2019 2020

%

Fed : rythme duresserrement monétaire

Longer Longer

Long terme

Source : FOMC mars 2017- projections économiques

FOMC de mars, projection médiane

Projection desmarchés (OIS)

2017 2018 2019 Lo ng terme

M édiane 1,375% 2,125% 2,875% 3,0%

OIS 1,300% 1,686% 1,868%

Chaque losange indique la valeur, arrondie au 8e de point de base le plus

proche, du taux des Fed funds (ou du centre de l’ intervalle) jugé approprié par

un membre du FOM C, à la fin de l’année calendaire spécifiée ou à long terme.

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 20

L’enjeu pour la BCE au cours du prochain trimestre sera de

parvenir à communiquer sur cet infléchissement de sa politique

monétaire : le passé a montré que le retrait des mesures de soutien

monétaire pouvait entraîner des sur-réactions.

Banque d’Angleterre : une hausse des taux à court terme nous semblerait prématurée

Les premiers éléments hawkish, déjà perceptibles lors de la réunion de

politique monétaire du mois de novembre, se sont matérialisés lors de

la réunion du mois de mars avec le vote de Kristin Forbes en faveur

d’une hausse du taux directeur de 25 points de base et des minutes

indiquant que « certains membres ont noté qu'il ne leur faudrait

qu’assez peu de nouvelles positives en termes de perspectives

d'activité ou d'inflation pour les amener à penser qu’une réduction plus

rapide de la politique de soutien monétaire pourrait être appropriée ».

La croissance a continué de surprendre positivement et les signes de

ralentissement imminent, bien qu’ils existent, sont restés assez limités.

La Banque d’Angleterre (BoE) a révisé sa prévision de croissance pour

le premier trimestre 2017 à 0,6% sur un trimestre, à la faveur

notamment de meilleures perspectives pour l’économie mondiale. Le

marché du travail est proche du plein emploi (le taux de chômage, à

4,7%, est à peine plus élevé que la nouvelle estimation du taux de

chômage naturel de la BoE de 4,5%). Avec l’anticipation d’une inflation

supérieure à la cible de la BoE de 2% pour une période de temps assez

longue (trois ans), la BoE se montre peu tolérante à des surprises

positives, notamment émanant de la consommation des ménages, de

la croissance des salaires et/ou des anticipations d’inflation.

Néanmoins, s’il n’est pas exclu que des voix hawkish supplémentaires

s’élèvent dans les prochains mois au sein du Comité de politique

monétaire, toute hausse de taux par la BoE serait prématurée tant

que les « circonstances exceptionnelles » (les incertitudes liées au

Brexit) continuent de faire peser un risque sur les perspectives de

croissance.

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janv.-14 déc.-14 nov.-15 oct.-16 sept.-17 août-18 juil.-19 juin-20 mai-21 avr.-22

%

BCE : séquence de resserrement de la politique monétaire

Inflation a/a Inflation sous-jacente a/a Taux de dépôt Taux refi

ABSPP CBPP3

TLTRO I PSPP

PSPP

+

CSPP QE+ TLTRO II

Ralentissement QE, prolongation

Evocation du tapering

Tapering Fin du PSPP

Arrêt complet des

programmes

1ère hausse des taux

Taux de dépôt > 0%

Sources : BCE, Eurostat, CA CIB

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a/a, %

Royaume-Uni : croissance descoûts unitaires du travail

Coûts unitaires du travail

Productivité (prod./heure), signe inv.

Coût horaire du travail

Moy. depuis 2001-2007 Sources : ONS, CA S.A.

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N°17/091 – 31 mars 2017 21

Banque du Japon : prudence avant tout virage hawkish

La Banque du Japon (BoJ) ne devrait pas modifier sa politique,

bien que l’amélioration des perspectives d’inflation à court terme

soit de nature à la rassurer. L’inflation hors produits frais (la mesure

de l’inflation sous-jacente au Japon) a en effet atteint +0,1% sur un an

en janvier, sa première valeur positive depuis février 2016. Compte

tenu de la stabilisation des prix du pétrole depuis novembre dernier,

de leur niveau très bas à la même période l’an dernier et de leur

impact retardé sur les prix, l’inflation sous-jacente devrait continuer à

augmenter dans les prochains mois et atteindre 1% dans le courant

du troisième trimestre. Cependant, malgré cette amélioration à court

terme de l’inflation sous-jacente, on est encore loin d’une inflation

« pérenne » et tirée par la demande. La progression des salaires

tarde, en effet, à suivre le resserrement du marché du travail, un

phénomène qui suggère une forte réticence des entreprises à

augmenter les rémunérations. Aussi, à moins que la BoJ n’observe

des signes clairs de pressions inflationnistes tirées par la demande

(telle une hausse régulière de l’inflation sous-jacente), elle n’enverra

pas de messages suggérant un durcissement de sa politique

monétaire.

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Salaire de base

Tx de chômage (dr. inv.)

Sources : MHLW, MIAC, CA CIB

La BoJ devrait attendre des signes concrets depressions inflationnistes tirées par la demande

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Inflation hors produits frais

Prévisions

Sources : MIAC, CA CIB

La BoJ devrait être rassurée parl’amélioration à court terme de l’inflation

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Taux d’intérêt – En hausse, mais pas de sell-off 6 massif

Les Banques centrales sont vigilantes, retirent ou envisagent de retirer à dose homéopathique leur soutien monétaire. Alors que les risques économiques et politiques s’accumulent, elles ne peuvent prendre le risque de voir remonter les taux longs. Ceux-ci s’inscrivent sur une pente ascendante : une pente douce.

Etats-Unis : une seule certitude, la hausse des incertitudes

Les taux américains ont augmenté : le dix ans s’affiche désormais à

près de 2,60% et la partie courte de la courbe anticipe 2,6 hausses

des taux de la Fed en 2017. Au regard des prix de marché, les

opérateurs sont assez optimistes sur le fait que les mesures de la

nouvelle administration conduiront à une accélération durable de la

croissance et de l’inflation, accélération suscitant des taux d’intérêt

plus élevés.

Le degré d’incertitude qui entoure les perspectives de taux est

cependant plus élevé que lors des trimestres précédents. L’ampleur

et la portée de l’expansion budgétaire sont incertaines et des

déceptions sont possibles sur le plan de la politique monétaire. Les

actifs risqués semblent de plus en plus surévalués au regard de la

plupart des mesures de valorisation et sont vulnérables à une

remontée des taux. Les risques politiques restent pleinement

d’actualité en Europe avec le déclenchement du Brexit, les élections

françaises, puis les élections italiennes au premier trimestre 2018.

Dans ce contexte, si les taux à dix ans peuvent s’inscrire en légère

hausse par rapport à leurs niveaux actuels, le degré élevé

d’incertitude rend un sell-off prolongé peu probable.

Quelle est la juste valeur du dix ans américain ? Un modèle très

simple de valorisation des obligations via une prime de risque fournit

des repères. Les taux à dix ans peuvent être exprimés en fonction de

la croissance et de l’inflation anticipées complétées par une prime de

risque. La prime de risque des Treasuries est ainsi égale à l’écart

[taux d’intérêt à dix ans - croissance anticipée - inflation anticipée].

La prime de risque des obligations est habituellement négative aux

États-Unis : ce phénomène s’explique par la présence de nombreux

acteurs captifs et insensibles aux prix. Les fonds de pension, les

compagnies d’assurance, les Banques centrales et les fonds

souverains sont en effet contraints d’acheter des obligations du Trésor

américain. Avant 2009, la prime de risque moyenne était de l’ordre

de -1,25%. Après 2009, avec les politiques monétaires accom-

modantes et la hausse des facteurs de risque, la prime de risque

moyenne est passée à -2%. Aujourd’hui, nous nous situons entre ces

deux régimes : ni dans la période de taux de crise post-2009, ni dans

celle d’explosion du crédit d’avant 2009.

Les prévisions à long terme pour la croissance américaine sont de

l’ordre de 2% à 2,5%, tandis que l’on peut s’attendre à une inflation à

long terme comprise entre 1,5% et 2%. En tablant sur une prime de

risque comprise entre -1,25% et -2%, la valeur « d’équilibre » des

taux américains à dix ans est comprise entre 2,00% et 2,75%.

6 Mouvement de vente massif, provoquant une remontée violente des taux de

rendement des obligations

-3,0

-2,5

-2,0

-1,5

-1,0

-0,5

0,0

2001 2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015

Les deux régimes de la primede risque obligataire

Prime de risque des obligations américainesMoy. pré-criseMoy. post-crise Sources : Bloomberg, Fed

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 23

À court terme (horizon de deux à trois mois), l’incertitude sur le plan

budgétaire qui sera finalement annoncé, les risques politiques en

Europe et la vulnérabilité des actifs risqués nous conduisent à adopter

un biais baissier sur les taux. Cependant, à moyen terme (horizon

d’un à deux ans), une hausse des taux américains, à 2,7% fin 2017 et

3% fin 2018, est inscrite dans notre scénario

En termes plus techniques, les positions de pentification de la courbe

des taux (segment cinq ans-trente ans) sont attractives. Le récent

mouvement de remontée des taux, emmené par les taux à cinq ans,

semble excessif. Nous attendons à court terme à un mouvement de

baisse avec un aplatissement de la courbe. Si les mesures de la

nouvelle administration américaine conduisaient en outre effective-

ment à une hausse durable de la croissance et de l’inflation, cela

devrait se traduire par une hausse des taux sur la partie longue de la

courbe et une pentification du segment cinq ans-trente ans.

Europe : un scénario en deux temps

En 2017, deux facteurs devraient dicter l’évolution les taux

européens :

Les risques politiques (en particulier en France et en Italie) ;

Le tapering de la BCE au premier trimestre 2018 (avec une

annonce probable au quatrième trimestre 2017).

Les risques politiques, tout d’abord. Notre scénario table sur

l’absence d’émergence de risques systémiques. En France, la

candidate de l’extrême-droite, Marine Le Pen, devrait atteindre le

deuxième tour, mais les sondages la donnent ensuite systéma-

tiquement perdante. En Italie, les derniers développements politiques

ont rendu des élections anticipées moins probables. Le parti

contestataire M5S (« Mouvement 5 étoiles ») a certes gagné du

terrain au cours des dernières années, mais ne sera probablement

pas en mesure de former le prochain gouvernement.

Les investisseurs devraient cependant être assez nerveux à

l’approche de ces échéances, ce qui conduit à adopter un biais

baissier sur les taux core à court terme (sur un horizon de deux mois),

ainsi qu’une pression haussière sur les spreads français et

périphériques. Cependant, selon notre scénario de non-maté-

rialisation de risques systémiques, la suite de l’année serait carac-

térisée par une remontée des taux core et un resserrement des

spreads France-Allemagne.

L’évolution des taux longs et les modalités de sortie du QE, par

ailleurs. L’annonce par la BCE du début de la réduction de ses

achats d’actifs (tapering) vers le quatrième trimestre de cette année

pourrait avoir un impact important sur les marchés core et

périphériques. Nos anticipations en termes de tapering ne s’appuient

pas sur l’évolution attendue de la croissance et de l’inflation, mais sur

des facteurs plus techniques de disponibilité des obligations. La BCE

pourrait encore modifier les règles qui régissent sa politique de QE

afin d’élargir la base des titres qu’elle est susceptible d’acheter, mais

la principale question est de savoir s’il y a assez d’investisseurs

prêts à vendre leurs obligations à la BCE.

Une majorité des emprunts d’État de la zone euro est détenue par des

investisseurs institutionnels (parmi lesquels des banques, des

Banques centrales, des fonds de pension, des compagnies d’as-

surance). Ces investisseurs détiennent ces obligations pour des

-10

-8

-6

-4

-2

0

2

4-100

0

100

200

300

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1990 1994 1997 2000 2004 2007 2010 2014

% PIBpdb

L’expansion budgétaire est associée à la pentification de la courbe

Pente 5 ans 30 ans

Déficit budgétaire US (dr.)Source : Bloomberg

20

30

40

50

60

70

80

mars-16 juin-16 sept.-16 déc.-16 mars-17

pdb

Spread 10 ans France-AllemagneSource : Bloomberg

Le spread France-Allemagne devrait baisserune fois les risques politiques passés

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 24

motifs spécifiques qui peuvent relever de contraintes règlementaires,

d’une gestion de devises ou de gestion actif-passif, par exemple. Ils

sont a priori peu susceptibles de vouloir céder leurs obligations à la

BCE. Nous estimons à environ 1 650 milliards d’euros le montant des

titres disponibles que la BCE pourrait acheter sur le marché, ce qui

implique que celle-ci aura du mal à poursuivre le QE sous sa forme

actuelle au-delà du premier trimestre 2018.

Une annonce de tapering aura un effet haussier sur les taux core,

induisant des ventes de Bunds et une pentification de la courbe des

taux. Une telle annonce se traduira certainement également par un

écartement des spreads périphériques et semi-core. Toutefois, si les

spreads s’élargissaient de manière importante, la BCE pourrait

promouvoir un assouplissement du crédit, afin de soutenir le

marché périphérique. La BCE dispose encore d’un certain nombre

d’outils pour favoriser la transmission de sa politique monétaire,

notamment :

Rétablir les TLTROs avec des conditions plus accommodantes ;

Viser plus directement le bilan des banques ;

Cibler les actifs non core des banques européennes ;

Lancer des opérations d’achats visant les titres périphériques.

Aussi, un élargissement des spreads périphériques après l’annonce

du tapering est-il inscrit dans notre scénario. Ce dernier ne retient pas

de risque systémique et table sur une stabilisation des spreads après

une hausse initiale.

Les prix de marché récents suggèrent que la probabilité d’une hausse

des taux de la BCE d’ici mi-2018 est de plus de 50%. Le QE de la

BCE ne sera probablement pas terminé mi-2018 et il semble très peu

probable que la BCE se lance dans un cycle de hausses des taux

avant la fin du QE. L’accélération récente de l’inflation s’explique

largement par des effets de base et par les prix de l’énergie. L’inflation

sous-jacente reste faible. La BCE pourrait être amenée à réviser ses

prévisions d’inflation sous-jacente à moyen terme à la baisse, ce qui

affaiblirait un peu plus les arguments en faveur d’un relèvement des

taux directeurs. Les taux devraient baisser à court terme sur la partie

courte de la courbe euro, une évolution qui serait favorable aux

positions longues en obligations allemandes sur le secteur quatre

ans-six ans et aux swaps du secteur trois ans.

6

7

8

9

10

11

12

130,4

0,6

0,8

1,0

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2,0

2004 2008 2012 2016 2020

%

a/a, %

Inflation sous-jacente ZE

Tx chômage retardé de 9 m. (dr.)

Prévisions

Sources : Bloomberg,ECB

Les prévisions d’inflation de la BCEpourraient être un peu trop optimistes

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 25

Taux de change – De la politique monétaire à la politique tout court

La divergence entre les politiques monétaires, notamment celle menée par la Fed et la BCE, n’est qu’un ingrédient de l’appréciation déjà forte du dollar. Cette dernière s’est largement nourrie du discours revigorant de D. Trump et de la défiance inspirée par l’euro à l’approche d’échéances électorales décisives. La capacité de la nouvelle administration à respecter ses engagements sera décisive. Rien n’est acquis. Et en l’absence de choc politique en Europe, l’euro peut reconquérir lentement un peu du terrain.

G10 : le côté obscur des Trumponomics

L’examen des facteurs qui ont influencé les devises du G10 ces

derniers mois suggère que les thèmes dominants ne devraient

guère changer au cours des trois mois à venir. Les risques

politiques en zone euro, en particulier, devraient persister avant les

deux tours de l’élection présidentielle française en avril et mai, puis

les élections législatives en juin. Les divergences de politique

monétaire entre une Fed hawkish et les autres Banques centrales du

G10 devraient s’accentuer. La crainte de mesures protectionnistes

aux États-Unis pourrait devenir décisive pour les marchés, avant la

publication mi-avril par le Trésor américain de son rapport sur les

politiques de change7. Enfin, les mesures de relance budgétaire et de

dérèglementation susceptibles mises en œuvre par l’administration

américaine pourraient être éclaircies et influer sur les taux longs.

La solidité des fondamentaux américains, la réforme fiscale et les

mesures de dérèglementation attendues de la part de la nouvelle

administration américaine devraient permettre à la Fed de

poursuivre sa normalisation monétaire et continuer de soutenir le

dollar contre les autres devises. Pour quantifier cette appréciation,

nous utilisons un modèle reliant les variations du taux d’intérêt

américain à deux ans et la performance du taux de change nominal

effectif du dollar8. La régression suggère qu’une hausse de 100 points

de base du taux à deux ans s’accompagne d’une appréciation de 8%

du dollar. Les attentes du marché à fin 2018 divergent actuellement

du dot plot de la Fed d’environ 35 points de base : une convergence

des anticipations du marché vers celles de la Fed se traduirait a priori

par une appréciation du dollar de 2,5% à 3,0%.

Alors qu’il n’a pas joué un rôle significatif au premier trimestre

2017, le thème du protectionnisme va progressivement s’im-

poser. La publication par le Trésor américain de son rapport sur les

politiques de change à la mi-avril va en effet attirer l’attention des

marchés sur les mesures de restrictions tarifaires et non-tarifaires,

que l’administration Trump veut imposer à ses principaux partenaires

commerciaux. Cela pourrait suffire à éroder le soutien dont les

devises à rendement élevé, les devises à risque et les « devises

matières premières » ont bénéficié depuis le début de l’année. Dans

ce contexte, les deux devises des antipodes (dollar australien et dollar

néo-zélandais) seraient les plus affectées par toute nouvelle

appréciation du billet vert. Dans le même temps, les « devises

pétrole » du G10 (couronne norvégienne et dollar canadien)

pourraient se montrer plus résilientes, en particulier si le rééquilibrage

7 « Semiannual Report on International Economic and Exchange Rate Policies »

8 Taux de change pondéré selon le poids des partenaires commerciaux des États-

Unis (Trade Weighted Index)

84

88

92

96

100

104

108

4%

6%

8%

10%

12%

mars-14 mars-15 mars-16 mars-17

Taux de change effectif du dollar et écart des taux à 2 ans Etats-Unis-G9

Sensibilité USD à hausse de 100 pdb de l’écart des tx 2a US-G9Tx de change effectif du dollar(dr.)

Sources : Bloomberg, CA CIB

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 26

du marché du pétrole commence à prendre forme au deuxième

trimestre.

Les risques politiques en zone euro devraient continuer de jouer

un rôle important dans l’évolution des devises du G10 au

deuxième trimestre. Les investisseurs vont évidemment se focaliser

sur le résultat des deux tours de l’élection présidentielle française

(avril et mai), puis sur celui des élections législatives (juin). Les

élections régionales allemandes en mai devraient également retenir

l’attention. La récente défaite du parti contestataire PVV aux Pays-

Bas peut être considérée comme un signe encourageant avant les

élections régionales allemandes et, surtout, avant les élections

générales de septembre. Nous restons cependant prudents à

l’approche l’élection présidentielle française. Le souvenir de sondages

d’opinion sous-estimant le vote contestataire avant le référendum

britannique sur l’UE et avant l’élection présidentielle américaine est

vivace... Notre scénario central continue néanmoins d’exclure la

victoire d’un candidat contestataire, une hypothèse qui sous-

tend nos prévisions d’appréciation modérée de l’euro au second

semestre 2017.

Devises émergentes : potentiel d’appréciation limité

Les devises émergentes se sont appréciées, en moyenne, au premier

trimestre. Après sa baisse en fin d’année dernière, suite à l’élection de

Donald Trump, notre indice synthétique des devises émergentes a

regagné l’intégralité du terrain perdu depuis le début de l’année.

L’amélioration de la demande mondiale, des exportations des pays

émergents et le reflux des craintes concernant le protectionnisme ont

permis cette réappréciation.

Ce mouvement pourrait continuer à court terme. Nous restons

néanmoins prudents sur les devises émergentes dans une optique de

moyen terme : certaines incertitudes persistent concernant la politique

commerciale qui sera mise en œuvre par Donald Trump. Le président

américain devra probablement s’acquitter – au moins en partie – de

son mandat politique, ce qui pourrait se traduire par un retour des

craintes de montée du protectionnisme et pourrait à terme peser sur

les devises émergentes.

Le yuan chinois va graduellement perdre du terrain dans les mois qui

viennent, en raison du déficit persistent de la balance des capitaux

chinoise, ce qui devrait également peser, dans une certaine mesure,

sur les autres devises émergentes.

En outre, les devises des pays qui affichent des besoins de

financement extérieur importants pourraient avoir des difficultés à

s’apprécier, alors que la Fed va continuer à durcir sa politique

monétaire.

En dépit des réserves liées à la politique commerciale de D. Trump, il existe actuellement un vrai risque haussier sur nos prévisions. En effet, si les craintes de mise en place de mesures protectionnistes par l’administration Trump continuent de se dissiper, un nombre croissant d’investisseurs pourrait capituler et renforcer les flux d’investissement vers les pays émergents. Dans ce cas, les pays tournés vers l’exportation (notamment l’Asie) et les pays fortement intégrés à l’économie américaine (le Mexique, par exemple) seraient les principaux bénéficiaires.

6,0

6,1

6,2

6,3

6,4

6,5

6,6

6,7

6,8

6,9

7,0

2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017

Taux de change USD/CNY

Source : Crédit Agricole CIB

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2000 2004 2008 2012 2016

Devises émergents et dollar

Prix du Brent (USD/bl)

Indice devises EM c/USD (+ =appréciation du change) - dr.Source : CA CIB

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 27

Prévisions économiques et financières

Taux d’intérêt

Taux de change

Matières premières

30-mars juin-17 sept.-17 déc.-17 mars-18 juin-18 sept.-18 déc.-18

Etats-Unis Fed funds 1,00 1,00 1,25 1,25 1,50 1,75 2,00 2,25

Taux 10 ans 2,40 2,50 2,60 2,70 2,80 2,90 2,95 3,00

Zone euro Repo 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00

Taux 10 ans (All.) 0,33 0,40 0,60 0,70 0,80 0,90 1,00 1,10

Spread 10a c/ EUR France 0,61 0,35 0,40 0,40 0,40 0,40 0,40 0,40

Italie 1,97 1,70 1,50 1,50 1,50 1,50 1,50 1,50

Taux de change USD

Pays industrialisés30-mars juin-17 sept.-17 déc.-17 mars-18 juin-18 sept.-18 déc.-18

Euro EUR/USD 1,07 1,06 1,08 1,10 1,10 1,13 1,15 1,16

Japon USD/JPY 111 113 116 117 115 114 112 110

Royaume-Uni GBP/USD 1,25 1,25 1,25 1,26 1,26 1,28 1,31 1,32

Suisse USD/CHF 1,00 1,01 1,00 1,00 1,01 0,99 0,98 0,98

Asie

Chine USD/CNY 6,89 7,07 7,25 7,25 7,19 7,16 7,16 7,17

Hong Kong USD/HKD 7,77 7,77 7,77 7,77 7,77 7,77 7,77 7,77

Inde USD/INR 64,85 65,50 66,50 67,50 68,00 68,50 69,00 69,50

Corée du Sud USD/KRW 1114 1150 1170 1190 1180 1170 1150 1130

Amérique latine

Brésil USD/BRL 3,12 3,25 3,30 3,35 3,40 3,35 3,50 3,35

Mexique USD/MXN 18,64 20,80 20,80 21,00 21,00 21,00 21,50 21,50

Europe - émergents

Pologne USD/PLN 3,92 4,08 3,93 3,82 3,79 3,65 3,57 3,51

Russie USD/RUB 55,94 59,00 58,00 57,50 57,50 57,00 56,50 56,00

Turquie USD/TRY 3,63 3,65 3,60 3,60 3,60 3,50 3,50 3,50

Métaux précieux T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4

Or USD/oz 1 250 1 240 1 230 1 250 1 260 1 280 1 280 1 300

30-mars2017 2018

T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4

Brent USD/BBL 53 57 56 59 60 65 66 68

2018201730-mars

Prix moy. du trim.

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 28

Scénario économique du Groupe Crédit Agricole S.A.

2016 2017 2018 2016 2017 2018 2016 2017 2018

Etats-Unis 1,6 2,2 2,5 1,2 2,3 2,4 -2,7 -3,2 -3,4

Japon 1,0 1,4 1,1 -0,3 0,6 0,9 3,8 3,9 3,8

Zone euro 1,7 1,7 1,6 0,2 1,5 1,2 3,1 3,0 2,9

Allemagne 1,8 1,8 1,7 0,4 1,7 1,5 8,4 7,9 7,9

France 1,1 1,3 1,4 0,3 1,3 1,1 -1,2 -1,1 -1,0

Italie 1,0 1,1 1,1 0,0 1,3 1,0 2,4 2,3 1,8

Espagne 3,2 2,6 2,3 -0,3 1,9 1,1 1,9 1,6 1,7

Pays-Bas 2,1 1,9 1,8 0,1 1,6 1,1 7,9 8,2 8,7

Autres pays développés

Royaume-Uni 1,8 1,8 1,4 0,7 2,7 2,9 -3,7 -2,7 -2,4

Canada 1,4 2,0 2,1 1,4 2,0 2,2 -3,3 -2,7 -2,1

Australie 2,9 2,7 2,8 1,3 2,1 2,3 -3,8 -3,9 -4,0

Suisse 1,3 1,4 1,5 -0,4 0,2 0,5 9,4 9,2 9,0

Asie 6,1 5,9 6,0 2,6 2,5 2,7 2,3 1,5 1,0

Chine 6,7 6,6 6,5 2,0 1,7 1,7 2,2 1,2 0,4

Inde 7,9 6,9 7,3 4,9 4,6 5,2 -1,0 -1,4 -1,5

Corée du Sud 2,7 2,7 3,0 1,0 1,8 2,0 7,2 6,0 5,5

Amérique latine -0,9 1,5 2,5 10,7 6,1 4,8 -2,1 -2,3 -2,5

Brésil -3,5 0,6 2,5 8,8 4,4 4,7 -1,2 -1,8 -2,0

Mexique 1,9 1,5 2,0 2,8 4,9 3,4 -2,9 -2,6 -2,9

Europe émergente 1,0 2,0 2,1 6,1 4,8 4,5 -0,3 0,1 -0,1

Russie -0,2 1,5 1,5 7,1 4,4 4,0 1,7 2,2 2,0

Turquie 1,4 1,5 1,5 7,7 7,4 7,0 -4,6 -4,4 -4,5

Pologne 2,8 3,8 3,4 -0,6 1,8 1,5 -0,5 -0,7 -1,2

Afrique, Moyen-Orient 2,4 2,4 2,9 6,4 7,4 6,1 -4,6 -2,6 -1,5

Arabie Saoudite 1,1 0,5 2,0 3,8 3,6 3,4 -8,6 -4,5 -1,9

Emirats Arabes Unis 2,1 2,6 3,0 2,5 2,9 3,0 1,4 3,1 4,2

Egypte 3,1 3,4 3,5 13,0 20,0 13,0 -5,5 -5,1 -4,5

Maroc 1,7 3,9 4,0 1,5 2,0 2,2 -2,3 -2,5 -2,6

Total 3,0 3,3 3,4 2,9 3,0 2,9 0,3 0,1 0,0

Pays industrialisés 1,6 1,9 2,0 0,7 1,8 1,8 0,0 -0,1 -0,2

Pays émergents 4,0 4,3 4,6 4,6 3,9 3,7 0,5 0,3 0,1

PIB (a/a, %) Inflation (a/a, %) Balance courante (% du PIB)

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MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 29

Comptes publics

Vous pouvez consulter nos prévisions économiques et financières sur notre site Internet.

2016 2017 2018 2016 2017 2018

Etats-Unis -3,2 -3,3 -3,3 76,7 77,4 77,7

Japon -5,1 -4,3 -4,2 212,8 217,0 220,9

Zone euro -1,9 -1,6 -1,4 91,5 90,3 89,1

Allemagne 0,5 0,3 0,3 68,3 66,0 63,5

France -3,3 -3,2 -3,3 96,1 96,4 96,7

Italie -2,6 -2,4 -2,0 132,9 132,3 131,4

Espagne -4,7 -3,3 -2,6 99,9 99,0 98,7

Pays-Bas -1,1 -0,5 -0,2 62,1 59,6 56,7

Belgique -2,9 -2,3 -2,4 106,8 106,5 106,1

Grèce -1,1 -1,1 0,7 180,2 180,9 177,8

Irlande -0,9 -0,5 -0,4 75,2 73,6 72,0

Portugal -2,3 -2,0 -2,2 130,3 129,1 128,0

Royaume-Uni -3,7 -3,3 -2,5 88,6 87,8 86,0

Solde budgétaire (% du PIB) Dette publique (% du PIB)

Page 30: MONDE Scénario macro-économique 2017-2018 concordance des temps Le temps politique est long. Celui des marchés financiers extrêmement court. Enfin, celui de l économie réelle

MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps

N°17/091 – 31 mars 2017 30

Achevé de rédiger le 31 mars 2017

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