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À PROPOS DU REBELLE

Je crée mespropres normes

FICHE TECHNIQUE 4

SYNOPSIS › Jacques Lourcelles 5

L’INTÉGRITÉ INFINIE DE L’ARTISTE INDIVIDUEL › Lorenzo CodelliL’INTÉGRITÉ INFINIE DE L’ARTISTE INDIVIDUEL › Lorenzo Codelli 6

DÉCOUPAGE SÉQUENTIEL › Boris Barbiéri 8

PHILOSOPHIE DU REBELLE › Jean-François Cazeaux

AYN RAND… › Jean-François Cazeaux

… ET LA CHASSE AUX SORCIÈRES › Thomas Wieder 41

ANALYSE DE SÉQUENCE : LE PROCÈS › Jean-François Cazeaux 43

SOMMAIRE : LA SOURCE VIVE – À PROPOS DE KING VIDOR 48

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The Fountainhead

Le RebelleÉtats-Unis ¬ 1949 ¬ NB ¬ Durée : 1h52 (112 mn) ¬ Format image : 1.37 : 1

Production : Warner Bros. – First National Pictures Inc.

Producteur : Henry Blanke

Distribution : Warner Bros.

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Scénario : Ayn Rand, d'après son roman The Fountainhead [trad.

française : La Source vive], 1943.

Supervision des dialogues : Jack Daniels

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Directeur de la photographie : Robert Burks

Son : Oliver S. Garretson

Montage : David Waysbart

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Partition originale : Max Steiner

Orchestrations : Murray Cutter

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Direction artistique : Edward Carrere

Décors de plateau : William L. Kuehl

Illustrateur : Harold Michelson

Costumes : Milo Anderson, Clayton Brackett et Martha Bunch

Maquillage : Perc Westmore et John Wallace

Coiffures : Gertrude Wheeler

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Directeur des effets spéciaux : William McGann

Effets spéciaux : Edwin DuPar, John Holden et Hans F. Koenekamp

Effets visuels : Chesley Bonestell

Opérateur : James Bell, assisté de Leonard South

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Assistants-réalisateurs : Richard Mayberry

Directeur de production : Eric Stacey

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Machinistes : Earl Ellwood et Harold Noyes

Scripte : Rita Michaels

Photographe de plateau : Jack Woods

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Tournage du 12 juillet au 8 octobre 1948.

Sortie en salles aux États-Unis le 2 juillet 1949.

Sortie en salles en France le 31 mars 1950.

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Interprètes : Gary Cooper (Howard Roark), Patricia Neal

(Dominique Francon), Raymond Massey (Gail Wynand), Kent Smith

(Peter Keating), Robert Douglas (Ellsworth Toohey), Henry Hull

(Henry Cameron), Ray Collins (Roger Enright), Moroni Olsen (le

président du conseil d’administration), Jerome Cowan (Alvah

Scarret), Paul Harvey (l’homme d'affaires), Harry Woods (le

contremaître), Paul Stanton (le doyen), Morris Ankrum (le

procureur), John Doucette (Gus Webb), Tito Vuolo (Pasquale Orsini,

l’ouvrier italien), Griff Barnett (le juge), Frank Wilcox (Gordon

Prescott), Ruthelma Stevens (une secrétaire), Almira Sessions (la

servante), Bob Alden (le vendeur de journaux), Tristram Coffin (un

secrétaire), Roy Gordon (le vice-président), Isabel Withers (une

secrétaire), William Haade (un ouvrier), Gail Bonney (une femme),

Thurston Hall (un homme d'affaires), Dorothy Christy (la femme

du monde), Harlan Warde (un jeune homme), Jonathan Hale (Guy

Francon), Douglas Kennedy (un reporter), Pierre Watkin, Selmer

Jackson (les officiels), John Alvin (le jeune intellectuel), Geraldine

Wall (une femme), Fred Kelsey (le gardien du chantier), Paul

Newlan, George Sherwood (les policiers), Lois Austin (l’invitée),

Joséphine Whittell (l’hôtesse), Lester Dorr (Homme), Bill Dagwell

(l’employé), Charles Trowbridge, Russell Hicks, Raymond Largay,

Charles Evans (les administrateurs), G. Pat Collins (le

contremaître), Ann Doran (une secrétaire), Creighton Haie (le

greffier), Philo McCullough (le bailli).

5

« Renvoyé de l'école d'architecture pour ses idées anticonformistes, Howard Roark devient le disciple de Henry Cameron, un architecte qu'il admire mais que son esprit d'indépendance a conduit à la ruine et à une mort sans doute prématurée. Restant obstinément fidèle à ses principes, Roark ne construit que quatre immeubles en plusieurs années et se trouve bientôt sans le sou. Il refuse les conseils – et l'argent – de son ancien condisciple Peter Keating qui a « réussi » et lui recommande d'accepter les concessions que réclament les clients. Sollicité pour construire un gratte-ciel, Roark refuse la commande quand il découvre que ses clients veulent y ajouter des éléments néo-classiques. Il préfère travailler comme ouvrier sur un chantier.Là, Dominique Francon, une journaliste du « Banner », quotidien à gros tirage, le remarque et lui commande une dalle de cheminée, qu'elle a préalablement brisée, afin d'avoir ce prétexte pour lefaire venir chez elle. Mais il envoie quelqu'un d'autre à sa place. Humiliée, elle vient lui cravacher le visage sur le chantier. Plus tard, quand il fait irruption chez elle, leur bagarre se terminera en empoignade passionnée. Folle d'orgueil, Dominique se refuse à éprouver de l'amour ou de l'admiration pour quiconque, sentiments qu'elle considère comme des chaînes, des entraves à sa liberté d'action. Quelques jours plus tard, elle apprend que Roark a quitté le chantier sans laisser d'adresse. Il a enfin obtenu la commande qu'il attendait. Le building qu'il construit, un chef-d'œuvre d'originalité, suscite une polémique. Le directeur du « Banner », Gail Wynand, conseillé par le

responsable de la rubrique d'architecture, Ellsworth Toohey, déclenche une campagne contre le building en question. N'approuvant pas cette initiative, Dominique démissionne du journal avant même de savoir que la cible de cette campagne est cet ouvrier qu'elle avait invité chez elle. S'étant revus, Roark et Dominique s'avouent leur amour. Mais elle veut le faire renoncer à l'architecture. Devant son refus, elle épouse par défi Gail Wynand qui l'aime depuis longtemps. La campagne du « Banner » a fait grand tort à la carrière de Roark. Il est amené à accepter des commandes plus modestes, telle une station-service, qu'il réalise de son mieux et avec beaucoup d'humilité, pourvu qu'il puisse accomplir son travail sans aucune intervention extérieure.Impressionné par l'obstination et l'intégrité de Roark, et admirant infiniment son talent, Wynand lui commande sa demeure personnelle, qu'il veut à l'image d'un temple ou d'une forteresse dédiée à sa femme Dominique. Étant au-dessus de toute rancune, Roark accepte de travailler pour son ancien ennemi et rival. Entre temps l'étoile de Keating a pâli. Il n'est plus à la mode. Il vient demander son aide à Roark pour un immense projet, Cortlandt, qu'il veut décrocher pour relancer sa carrière. Roark accepte d'en dessiner les plans sans les signer, à condition qu'il puisse agir entièrement à sa guise. Mais les clients exigeront au dernier moment des modifications que Keating ne pourra refuser. Avec la complicité de Dominique, Roark fait sauter Cortlandt et demande un procès public. Toohey, son plus implacable ennemi, prend la tête de l'offensive qui se dessine contre lui.

Wynand renvoie Toohey et lance une campagne en faveur de Roark. Pour la première fois de sa vie, il va défendre ce en quoi il croit. Mais Toohey, qui très consciemment flatte la médiocrité du public et des collaborateurs de Wynand pour asseoir sa puissance, fait avouer la vérité à Keating sur son accord secret avec Roark. Il oblige ainsi Wynand à faire machine arrière. Wynand s'aperçoit tardivement qu'il a été, à travers son journal, non le maître, mais l'instrument de l'opinion publique. Il doit signer un éditorial contre Roark. Au tribunal, Roark assume seul sa défense sur le terrain même où se situe l'enjeu principal du procès : un individu peut-il refuser de servir la société ? Il fait valoir que seuls les visionnaires, qui commencent tous par susciter l'hostilité, font réellement avancer l'humanité. Leur unique moyen d'action est leur intelligence, leur cerveau. Or, il n'existe pas d'intelligence collective. Le vrai créateur ne peut donc agir que selon ses propres critères et estimations. Il ne peut se soumettre aux diktats d'autrui. Après cette diatribe, Roark est acquitté. Un de ses anciens clients a racheté les ruines de Cortlandt et lui propose de le rebâtir à son idée. Wynand a liquidé son journal. Avec les fonds récupérés, il songe à bâtir le rêve de sa vie : le plus grand gratte-ciel de New York. Quelques instants après en avoir donné la commande à Roark, il se suicide. Ayant épousée Roark, Dominique le rejoint au sommet du building dont il supervise la construction. »

Jacques LOURCELLES, Dictionnaire du

Cinéma, tome 3 : les films, 3e édition, Paris,

Éditions Robert Laffont (coll. « Bouquins »),

1995, pp. 1239-1241.

synopsis

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Lisons A Testament (1957), que Frank Lloyd Wright écrivit huit ans après le film de Vidor !e Fountainhead (1949) : on est étonné d'y retrouver parfaitement intacte l'idéologie qui avait inspiré le roman d'Ayn Rand puis son adaptation cinématographique. Jamais sans doute, avant !e Fountainhead, ne s'était opéré un décalque aussi prophétique de la biographie d'un artiste vivant. Vidor dépasse l'« exemplarité » hagiographique des films de Dieterle en systématisant sa synthèse historique un peu à la manière des grandes comédies politiques de Frank Capra : le film tout entier n'est qu'un long prélude à la plaidoirie finale du protagoniste.La carrière de l'architecte Howard Roark (Gary Cooper) est suivie « en négatif » par Vidor, qui s'attache à définir surtout ce qu'il n'est pas. Dans les trois premières scènes, nous voyons Cooper de dos, dans l'ombre, alors qu'il repousse successivement trois offres de compromis, qui seront suivies plus loin par bien d'autres refus toujours plus catégoriques. Les choix cinématographiques du film procèdent de la même façon : les décors de style wrightien sont suggérés par de grandes verrières ou par des piliers rationnels, mais c'est l'esthétique opposée qu'on nous montre de façon plus détaillée, ce contre quoi Wright s'insurge : le kitsch futuriste des bureaux du quotidien Banner, le style néo-classique des

demeures patriciennes. En définissant ainsi « le nouveau » par « l'ancien » Vidor rejoint le "omas Mann du Doktor Faustus, où l'artiste d'avant-garde était dépeint par son ami, artiste « bourgeois » par excellence, qui ne le comprenait pas et lui prêtait des traits démoniaques. Howard Roark a lui aussi un côté surhomme, encore que dans son cas ce soit le Principe Divin qui l’ait engendré et qui l'inspire.Ce principe est incarné dans le film par le personnage de Patricia Neal, la chroniqueuse d'art qui ne peut aimer, en ce monde, rien ni personne parce qu'elle aspire à la perfection, à l'unité de l'art et de la vie. C'est par elle que le Ciel rachètera le héros, tombé dans l'abîme pour avoir refusé les compromis : c'est la scène où un axe idéal unit le ciel, Patricia Neal sur le bord de la carrière et Cooper qui, travaillant au fond de la fosse, lève les yeux pour voir la Vérité.Troisième pôle du film, le Pouvoir, personnifié par Raymond Massey, directeur d'un journal à scandale, !e Banner, qui se lance dans une campagne diffamatoire dans le seul but d'adjoindre un nouveau pouvoir au sien. Parmi ses subordonnés, il y a son rival le plus dangereux, un critique qui développe à plusieurs reprises la théorie de « l'impersonnalité collective », laquelle

L’intégrité infinie de l’ artiste individuel

– –Lorenzo Codelli 1

1 Article paru dans Positif, n°163, novembre 1974, pp. 49-50.

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doit triompher des talents individuels pour que puisse se perpétuer la domination de quelques-uns. Pour désigner la géométrie triangulaire de son récit, Vidor dispose, dans une des séquences, ses trois personnages assis respectivement entre les trois branches divergentes d'un même arbre – contredisant cette fois le fameux dicton « A tree is a tree ». Mais cette schématisation participe de la dialectique du film.Les relations qui se tissent entre les trois personnages (la Vérité épouse le Pouvoir mais aime l'Artiste, l'Artiste hait la Vérité et se soumet au Pouvoir, le Pouvoir soumet les deux autres mais est abandonné par eux, jusqu'à la réconciliation finale qui unit étrangement l'Artiste et le Pouvoir) ne constituent rien d'autre que la Vie, c'est-à-dire une synthèse préordonnée, préétablie, où la lutte pour l'affirmation individuelle progresse nécessairement, même si ce n'est pas en ligne droite.Le geste anarchisant de Cooper, dynamitant le lotissement que Peter Keating avait laissé construire selon ses plans mais sans respecter l'intégrité du projet, trouve un écho dans le geste de Patricia Neal jetant par la fenêtre une statuette « trop belle ». C'est elle maintenant qui aide Cooper à perpétrer son geste autodestructeur, qui en rajoute même en se blessant délibérément pour faire croire à un accident. Vidor a tenu à plusieurs reprises à se démarquer de cet extrémisme, en racontant l'anecdote suivante (reprise pratiquement dans les mêmes termes dans l'interview donnée aux Cahiers du Cinéma en octobre 62, dans celle publiée dans !e Celluloïd Muse, et dans le dernier chapitre de son livre On Film Making) : se rendant chez Jack Warner pour lui exprimer son désaccord, Vidor lui avait demandé s'il lui pardonnerait de détruire, en guise de protestation, la partie du film déjà tournée. « Non, pas nous, répondit Warner, mais peut-être le juge te pardonnerait-il. » Et c'est ce qui advient dans le film, lorsque Cooper est acquitté par le tribunal qu'à ému sa longue plaidoirie. La réponse de Warner rend impossible toute identification entre l'Art et la Réalité, mais, en même temps, donne sa cohérence à l'Art, dont elle assure à la fois la défaite et le triomphe.Malgré de claires allusions anti-communistes et anti-collectivistes, symptômes de l'époque comme de la volte-face politique de la Warner Bros2, la plaidoirie de Cooper développe les principes professés et mis en œuvre tant par Vidor que par Wright. La distinction et le conflit entre « parasites » et « créateurs autonomes », les premiers étant rendus responsables de tous les actes barbares dans l'histoire de l'humanité, les seconds étant exaltés comme des bâtisseurs solitaires qui travaillent « pour soi », constituent la force motrice et dynamique qui fait progresser l'humanité. L'Artiste est « le législateur inconnu du monde », disait Wright.

L'optimisme de Vidor, comme déjà celui de Capra, s'exprime aussi dans le rôle choral attribué à la foule (dans les projets harmonieux de Wright, un tel rôle est dévolu à la nature, à la verdure) qui applaudit l'Artiste qu'elle était prête auparavant à lapider. C'est en elle que se conserve l'intégrité fondamentale de la Civilisation, de la Nation américaine, des individus « non massifiés ». Dans la dernière image du film Patricia Neal monte au ciel : un monte-charge la transporte au sommet du nouveau gratte-ciel, où l'attend Gary Cooper. La monumentalité fonctionnelle de Wright répond à l'ontologie monothéiste de Vidor. Lequel des deux artistes a le mieux respecté sa loi d' « intégrité individuelle » ? On pourrait peut-être répondre, non plus en confondant leurs autobiographies, mais en appliquant au cinéma les règles esthétiques de l'architecture, et vice-versa, c'est-à-dire en les considérant tous deux dans leur devenir historique comme « systèmes constructifs ». Si les « valeurs » qui les ont inspirés sont en pleine décadence, les œuvres restent, et sur elles s'édifient les nouvelles valeurs.∅ Lorenzo Codelli

2 cf. Notes on Warner Brothers Foreign Policy, par John Davis. in

The Velvet Light Trap, n° 4, Madison, Wisconsin.

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Découpage séquentiel

– –Boris Barbiéri

« Le découpage suivant a été réalisé à partir d’un DVD. Sur le petit écran, l’image défile à 25 images/secondes et non 24, comme au cinéma ; le film voit donc sa durée réduite de 105 à 100 minutes. C’est pourquoi les indications temporelles mentionnées avant le descriptif des séquences sont légèrement décalées par rapport à la projection en salle.

Revenons brièvement sur la notion de séquence : comme l’indique Le Dictionnaire du Cinéma, « un film est une suite de plans, chaque plan étant constitué d’une série continue d’images enregistrées par la caméra au cours d’une même prise. Lorsqu’on analyse la construction d’un film, cette suite de plans s’organise en un certain nombre de sous-ensembles, appelés séquences ou scènes. La scène correspond à un niveau de décomposition plus fin que la séquence, et il y a en elle, un peu comme dans le concept de scène au théâtre, une certaine notion d’unité de temps et de lieu. »

Le découpage proposé ici adopte ainsi une répartition en séquences, elles-mêmes subdivisées en scènes (notées par exemple 10A, 10B, etc.) lorsqu’il y a lieu. Bien que l’exercice soit le plus « objectif » possible, il laisse une latitude substantielle à celui qui l’effectue, due notamment à l’interprétation des transitions d’une scène ou séquence à l’autre : fondus au noir, fondus enchaînés, etc. D’autres analyses sont donc susceptibles de présenter un découpage légèrement différent de celui-ci.

Quoiqu’il en soit, il faut rendre hommage au travail de la revue L’Avant-Scène Cinéma en général, et à celui d’Annelise Landureau en particulier. Sans ce travail descriptif plan par plan et de reproduction in extenso des dialogues, ce découpage aurait été nettement plus long et fastidieux. Les passages suivis d’une (*) reproduisent intégralement son texte.

Début du thème musical. Plan d’ensemble de face et en contre-plongée sur la vue imposante d’un gratte-ciel moderne planté au centre de Manhattan, encadré par les noms de Gary Cooper et Patricia Neal inscrits en caractère blanc et surimpression. Travelling avant sur le building qui pivote sur lui-même, devenant un livre sur la couverture duquel est inscrit en caractères blancs et obliques le titre du film. Travelling avant et fondu enchaîné sur la liste des interprètes et la liste technique, présentées page après page, jusqu’au nom de King Vidor qui disparaît avec la musique dans un fondu au noir. (*)

Générique00.00.00 ➤ 00.00.58.12 Durée de la séquence : 58 sec.

Plan n° 1 = 1 plan

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Des débuts difficiles00.00.58.13 ➤ 00.02.32.13 Durée de la séquence : 1 mn 34 sec. Plans n° 2 ➠ 7 = 6 plans

École d’architecture / Véranda / Bureau d’Henri Cameron------------------------------------------------1A – Plans n° 2 ➠ 3 = 2 plans00.00.58.13 ➤ 00.01.27.18Exclu de l’école d’architectureÉcole d’architecture, int. jourParce que ses idées ne sont pas conformes à celles communément admises, Howard Roark, qui aspire à devenir architecte, est renvoyé par le directeur de l’école : « Jamais vous ne deviendrez architecte ! ».-------------------------------------------------1B – Plans n° 4 = 1 plan00.01.27.19 ➤ 00.01.48.01L’école des compromisUne véranda, ext. soirUn camarade de Roark, Peter Keating, lui conseille de faire des compromis et de suivre les goûts du public.-------------------------------------------------1C – Plans n° 5 ➠ 7 = 3 plans00.01.48.02 ➤ 00.02.32.13Un entretien d’embaucheBureau d’Henry Cameron, int. jourRoark est reçu par Henry Cameron, un architecte autrefois réputé, mais aujourd’hui sur le déclin. Après lui avoir vertement reproché son impudence et l’audace de ses idées, Cameron embauche Roark.

1

La fin de Cameron0.02.32.18 ➤ 0.06.54.27 Durée de la séquence : 4 mn 22 sec. Plans n° 8 ➠ 36 = 29 plans-------------------------------------------------2A – Un homme brisé…Plans n° 8 ➠ 12 = 5 plans0.02.32.18 ➤ 0.03.21.17Manhattan, ext. jourC’est un Henry Cameron hagard, vieilli et probablement ivre, qui erre dans la rue et interpelle un vendeur du quotidien !e Banner. Il en achète un exemplaire et le déchire aussitôt, puis un second, et enfin toute la pile, sous le regard amusé des passants. La silhouette de Roark se détache de la foule et entraîne Cameron à l’écart. [Fondu au noir]-------------------------------------------------2B – … victime d'une attaque cardiaque…Plan n° 13 ➠ 25 = 13 plans0.03.21.18 ➤ 0.05.09.27Bureau d’Howard Roark, ext./int. jourIls se rendent au bureau de Roark, qui a pris la succession de Cameron. Les affaires ne vont pas fort et, déçu du peu de succès de son « héritier », fou de rage contre la ville façonnée par le populisme du Banner, le vieil homme s’effondre, foudroyé… [Fondu enchaîné]-------------------------------------------------2C – … meurt dans l'ambulancePlans n° 26 ➠ 36 = 11 plans00.05.09.28 ➤ 00.06.54.27Ambulance, int. jourDans l’ambulance qui le conduit à l’hôpital, Cameron demande à Roark de brûler ses papiers. Il le supplie (en vain) de céder, de faire des compromis. Ses dernières paroles, avant de mourir : « Que Dieu vous garde, c’est l’enfer qui vous attend ! »[Fondu enchaîné]

21A

1B

1C

10

3

Une situation désespérée. À moins que…0.06.54.27 ➤ 0.10.29.18 Durée de la séquence : 3 mn 35 sec. Plans n° 37 ➠ 47 = 11 plansBureau d’Howard Roark, int. jour-------------------------------------------------Fidèle à sa promesse, Roark brûle les papiers de Cameron. Peter Keating, informé des soucis professionnels de Roark, lui rend visite et lui offre son aide. Il le supplie à son tour de céder : « Obéis au goût des gens. Tu seras riche et admiré ». Roark refuse, tout comme il refuse l’argent que Keating veut lui avancer, bien qu’il soit dans la gêne. Son sort est désormais suspendu à la décision de la Security Bank : va-t-elle retenir le projet qu’il a conçu pour le nouveau siège du groupe ?

Le refus du compromis0.10.29.19 ➤ 0.13.46.19 Durée de la séquence : 3 mn 17 sec. Plans n° 48 ➠ 74 = 27 plansSalle de réunion de la Security Bank, int. jour-------------------------------------------------Le projet de Roark, de conception avant-gardiste, a bel et bien été retenu. Mais aux lignes très épurées, les administrateurs souhaitent apporter une touche néo-classique qui ne heurtera pas le public. Convaincu qu’ « un bâtiment a son intégrité, comme un homme », Roark refuse et se retire. Décision lourde de conséquence, vu sa situation ; il sera donc ouvrier, s’il le faut. Incrédules, les administrateurs se tournent vers Ellsworth Toohey, qui a suivi la « prestation » de Roark sans mot dire, visiblement satisfait de cette « expérience… intéressante ». [Fondu enchaîné]

4

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Toohey plaide pour son protégé0.13.46.20 ➤ 0.17.02.25 Durée de la séquence : 3 mn 16 sec. Plans n° 75 ➠ 101 = 27 plansBureau de Gail Wynand, int. jour-------------------------------------------------Devant Gail Wynand, le tout-puissant directeur du Banner, Toohey, qui signe la rubrique « One small voice » [« Une petite voix »], vante les mérites de Peter Keating. Wynand, personnellement sensible à l’architecture mais qui « offre au public ce qu’il veut », reconnaît n’avoir jamais fait appel à un architecte valable pour concevoir les immeubles de son groupe : « Votre Keating est nul, il sera parfait pour ce projet ». Il se ravise pourtant et demande à consulter Dominique Francon, l’ « autre » spécialiste de l’architecture au journal. À la surprise de Wynand, celle-ci est absente. [Fondu enchaîné]

Mlle Francon déconseille son fiancé0.17.02.26 ➤ 0.19.45.16 Durée de la séquence : 2 mn 43 sec. Plans n° 102 ➠ 115 = 14 plansAppartement de Dominique Francon, int. jour-------------------------------------------------Wynand se rend chez Dominique. Bien qu’elle soit fiancée à Keating, elle déconseille à Wynand de l’engager, parce qu’elle l’estime « piètre architecte ». Très attiré par Dominique, Wynand se heurte à une jeune femme glaciale et indifférente, qui vient à l’instant de jeter par la fenêtre une magnifique statue au motif qu’ « elle n’a pas sa place dans un monde où la beauté et le génie n’ont aucune chance. » Wynand invite néanmoins Dominique et Keating à dîner chez lui le soir même. [Fondu enchaîné]

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7

Une demande en mariage0.19.45.17 ➤ 0.23.22.17 Durée de la séquence : 3 mn 38 sec. Plans n° 116 ➠ 137 = 22 plansSalle à manger de Gail Wynand, int. soir-------------------------------------------------Lors du dîner, Wynand propose à Keating un étrange marché : la commande de la Security Bank contre la rupture de ses fiançailles avec Dominique ! D’abord décontenancé, mais tenté par l’opportunité qui s’offre à lui, Keating accepte, avant de se retirer. Pour Wynand, la preuve est faite : chaque homme à son prix. Il en profite pour demander la main de Dominique, qui refuse sans appel. Elle annonce à Wynand son départ pour le Connecticut, chez son père, afin d’être seule. [Fondu au noir]

13

La foudre frappe dans le Connecticut0.23.22.18 ➤ 0.26.10.20 Durée de la séquence : 2 mn 48 sec. Plans n° 138 ➠ 163 = 26 plans-------------------------------------------------8A – Des explosions dans la carrièrePlans n° 138 ➠ 139 = 2 plans0.23.22.18 ➤ 0.23.59.24Chambre de Dominique Francon, int. matinDominique est réveillée par les explosions qui secouent la carrière de granit. [Fondu enchaîné]-------------------------------------------------8B – Deux regards se croisentPlan n° 140 ➠ 163 = 24 plans0.23.59.25 ➤ 0.26.10.20Carrière, ext. matinElle se rend sur le chantier et parmi les ouvriers qui attaquent la roche, elle en remarque un, qui soutient son regard : Howard Roark ! [Fondu enchaîné]

8

9

Tempête sous un crane0.26.10.21 ➤ 0.26.34.21 Durée de la séquence : 24 sec. Plan n° 164 = 1 planChambre de Dominique Francon, int. nuit-------------------------------------------------Seule dans sa chambre, Dominique ne parvient pas à chasser l’image de Roark. Elle se tord les mains de rage et s’effondre sur sa coiffeuse.[Fondu enchaîné]

8A

8B

14

10

Une attirance mutuelle0.26.34.22 ➤ 0.27.39.00 Durée de la séquence : 1 mn 05 sec. Plans n° 165 ➠ 177 = 13 plansCarrière, ext. jour-------------------------------------------------Le lendemain, Dominique revoit l’ouvrier qui hante ses pensées. Ils échangent à nouveau un long regard : « – Pourquoi me regardez-vous ? – Pour la même raison que vous ». Au ton hautain de Dominique répond celui, plein d’ironie, de Roark. Dominique s’éloigne, furieuse.[Fondu enchaîné]

Un prétexte pour voir Roark0.27.39.01 ➤ 0.31.22.28 Durée de la séquence : 3 mn 43 sec. Plans n° 178 ➠ 209 = 32 plans-------------------------------------------------11A – Dominique trouve un prétextePlans n° 138 ➠ 139 = 2 plans0.27.39.01 ➤ 0.28.25.10Chambre de Dominique Francon, int. jourTournant dans sa chambre comme une lionne en cage, Dominique brise la dalle de sa cheminée à coup de tisonnier.[Fondu enchaîné]-------------------------------------------------11B – « La pression est irrésistible… »Plan n° 140 ➠ 163 = 24 plans0.28.25.11 ➤ 0.31.22.28Chambre de Dominique Francon, int. jourDominique fait venir Roark pour enlever la dalle et la faire changer. Prétexte à un échange à double sens où s’affirme leur attirance mutuelle : « Le marbre est du calcaire soumis à une pression… La pression est irrésistible. Elle entraîne des conséquences incontrôlables. » Il est convenu que Roark vienne remplacer la nouvelle dalle dès qu’elle sera arrivée. [Fondu enchaîné]

11

11A

11B

15

12

Pasquale Orsini…0.31.23.00 ➤ 0.31.52.28 Durée de la séquence : 30 sec. Plans n° 210 ➠ 213 = 4 plansChambre de Dominique Francon, int. jour-------------------------------------------------… Mais le jour venu, c’est un autre ouvrier, Pasquale Orsini, qui se présente à la demande de Roark. Furieuse, Dominique se précipite hors de la chambre. [Fondu enchaîné]

13

Seq. 13 – À la cravache0.31.53.00 ➤ 0.32.51.15 Durée de la séquence : 58 sec. Plans n° 214 ➠ 231 = 18 plansCarrière, ext. jour-------------------------------------------------Dominique parcourt à cheval la distance qui sépare la maison de son père de la carrière. Elle repère bientôt Roark qu’elle rejoint et frappe au visage avec sa cravache. Il la regarde s’éloigner sans mot dire.[Fondu enchaîné]

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L’étreinte0.32.51.16 ➤ 0.33.56.19 Durée de la séquence : 1 mn 05 sec. Plans n° 232 ➠ 237 = 7 plansChambre de Dominique Francon, int. nuit-------------------------------------------------Roark rejoint Dominique dans sa chambre. À sa vue elle tente de s’enfuir mais il lui bloque le passage, avant de la saisir dans ses bras et de l’embrasser. Elle se dégage mais tombe au sol en franchissant le seuil de la terrasse. Howard la rejoint. [Fondu enchaîné]

Un courrier pour Roark0.33.56.20 ➤ 0.35.03.21 Durée de la séquence : 1 mn 07 sec. Plans n° 238 ➠ 240 = 3 plansBaraquement, int. nuit-------------------------------------------------De retour dans son baraquement, Roark trouve un message de Roger Enright, un entrepreneur qui l’engage pour concevoir un immeuble. Roark rassemble ses affaires. [Fondu enchaîné]

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Roark s’est envolé0.35.03.22 ➤ 0.35.41.02 Durée de la séquence : 37 sec. Plans n° 241 ➠ 245 = 5 plansCarrière, ext. jour-------------------------------------------------Le lendemain, Dominique apprend par le contremaître de la carrière le départ précipité de Roark. Dépitée, elle renonce à s’enquérir de son nom.[Fondu au noir]

Une croisade pour le Banner0.35.41.03 ➤ 0.39.26.20 Durée de la séquence : 3 mn 45 sec. Plans n° 246 ➠ 263 = 18 plans-------------------------------------------------17A – Toohey part en croisadePlans n° 246 ➠ 251 = 6 plans0.35.41.03 ➤ 0.37.28.24Le Banner, int. jourÀ Alvah Scarrett, le bras droit de Wynand, qui désespère de trouver une nouvelle idée de campagne pour le Banner, Toohey suggère de s’attaquer à Roger Enright et à l’immeuble qu’il vient de faire bâtir – trop luxueux et surtout trop avant-gardiste : « Ce bâtiment est une honte pour l’art, et un danger. » Dominique, qui a assisté à leur conversation, est stupéfaite de la beauté du bâtiment et intriguée par les motivations de Toohey. En aparté, celui-ci reconnaît d’ailleurs que Enright House est « une merveille ». -------------------------------------------------17B – Dominique plaide en vainPlan n° 252 ➠ 263 = 12 plans0.37.29.00 ➤ 0.39.26.20Bureau de Gail Wynand, int. jourDominique tente de convaincre Wynand de renoncer à attaquer l’immeuble conçu par un certain Howard Roark – qu’elle est persuadée n’avoir jamais vu. Mais Wynand se montre intraitable : « détruire pour amuser la populace », telle est la politique du Banner et il n’en changera pas. Dominique démissionne. [Fondu enchaîné]

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Les masses contre l’immeuble Enright0.39.26.20 ➤ 0.40.16.09 Durée de la séquence : 49 sec. Plans n° 268 ➠ 270 = 3 plans-------------------------------------------------18A + 18B – « Des milliers contre un »Plans n° 268 ➠ 269 = 2 plans0.39.26.21 ➤ 0.39.40.07 / 0.39.40.08 ➤ 0.40.02.21Métro et rues de New York, int./ext. jour + Immeuble du Banner, int. jourDans sa rubrique, Toohey s’en prend violemment à l’immeuble Enright et fustige « l’incompétence » d’Howard Roark. Arguments qu’il réitère devant un parterre d’architectes acquis à sa cause.-------------------------------------------------18C – Scarrett se frotte les mainsPlan n° 252 ➠ 263 = 12 plans0.40.02.22 ➤ 0.40.16.09Bureau d’Alvah Scarrett, int. jourSous l’œil ravi de Scarrett, un flot ininterrompu de lettres de protestation submerge les locaux du Banner.

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L’immeuble Enright est achevé0.40.16.10 ➤ 0.41.20.14 Durée de la séquence : 1 mn 4 sec. Plans n° 271 ➠ 276 = 6 plansChantier Enright, ext. jour-------------------------------------------------Devant la « Résidence de luxe Enright » à présent achevée, Roger Enright félicite chaleureusement Roark. Indifférent au tapage médiatique provoqué par le Banner, Enright s’apprête au contraire à fêter l’événement et à donner une soirée conviant la presse et les architectes. [Fondu enchaîné]

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Les retrouvailles de Roark et Dominique0.41.20.15 ➤ 0.49.18.20 Durée de la séquence : 7 mn 58 sec. Plans n° 277 ➠ 317 = 41 plans-------------------------------------------------20A – L’immeuble Enright fait parler de luiPlans n° 277 ➠ 304 = 28 plans0.41.20.15 ➤ 0.45.11.06Building Enright, int./ext. soirAu cours de la soirée, Dominique échange des remarques aigres-douces avec Peter Keating, qui a été convié à l’inauguration d’Enright House avec le gratin de l’architecture, parmi lesquels les inévitables Ellsworth Toohey et Guy Francon, le père de Dominique. L’invité d’honneur fait enfin son entrée, Dominique reconnaissant immédiatement en lui l’ouvrier du Connecticut. Enright les « présente » l’un à l’autre et mentionne à Roark la démission de Dominique afin de défendre le projet. [Fondu enchaîné]-------------------------------------------------20B – Une proposition de mariage (2)Plan n° 305 ➠ 317 = 13 plans0.45.11.07 ➤ 0.49.18.20Bureau d’Howard Roark, int. nuitLa soirée terminée, Dominique retrouve Roark. Elle lui reproche de n’avoir pas tenté de la revoir, alors qu’il connaissait parfaitement son identité. Réplique de Roark : « Je voulais que vous veniez à moi ». Dominique lui avoue alors son amour et accepte d’être sa femme s’il abandonne l’architecture : elle ne supportera pas de voir le génie de Roark jeté en pâture aux médiocres. Bien entendu, Roark refuse : « Apprenez à ne pas avoir peur du monde. Vous reviendrez vers moi ensuite. Ils ne me détruiront pas ». Ils s’embrassent avant de se séparer. [Fondu enchaîné]

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Dominique rejoint Gail Wynand0.49.18.21 ➤ 0.50.40.18 Durée de la séquence : 1 mn 32 sec. Plans n° 318 ➠ 327 = 10 plansBaie de New York et yacht de Gail Wynand, ext. jour-------------------------------------------------En hors bord, Dominique rejoint Wynand dans la baie de New York, alors qu’il revient de croisière sur son yacht. Elle accepte de l’épouser. Surpris de ce revirement, Wynand ne pose toutefois pas de question et avoue à Dominique son amour.[Fondu au noir]

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Pas d’autres commandes pour Roark0.50.40.19 ➤ 0.53.19.17 Durée de la séquence : 2 mn 39 sec. Plans n° 328 ➠ 344 = 17 plans-------------------------------------------------22A – Roark touche le fondPlans n° 328 ➠ 334 = 7 plans0.50.40.19 ➤ 0.51.55.07Immeuble de la Civic Opera House, int. jour et parvis de l’hôtel Saint-Charles, ext. jourLes commanditaires potentiels de Roark se désistent : la campagne du Banner a fait son œuvre. Alors que Roark sort des bureaux de la Civic Opera House après un nouvel échec, un couple quitte l’hôtel Saint-Charles sous les flashes des appareils-photos et les traditionnelles poignées de riz, avant de s’engouffrer dans une limousine : Dominique vient d’épouser Gail Wynand ! Roark s’éloigne, abattu. -------------------------------------------------22B + 22C – Des immeubles conçus par d’autres Plan n° 335 ➠ 336 + 337 = 3 plans0.51.55.08 ➤ 0.52.11.11 / 0.52.11.12 ➤ 0.52.20.02 Chantier, ext. jour + un autre chantier, ext. nuitRoark passe devant plusieurs chantiers, atribués à d’autres architectes que lui. -------------------------------------------------22D – Confrontation avec TooheyPlans n° 338 ➠ 344 = 7 plans0.52.20.03 ➤ 0.53.19.17Chantier de la Civic Opera House, ext. jourAlors qu’il passe devant la future Civic Opera House, finalement conçue par Guy Francon et Peter Keating, Roark est abordé par Toohey. Ce dernier avoue être à l’origine de l’ostracisme dont Roark est l’objet et tente de l’entraîner dans une joute verbale. Mais à son interrogation « Dites-moi ce que vous pensez de moi. », Toohey ne recueille, à son grand dépit, qu’un laconique : « Je ne pense rien de vous. » [Fondu enchaîné]

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Roark se diversifie et réussit0.53.19.18 ➤ 0.55.27.12 Durée de la séquence : 2 mn 8 sec. Plans n° 345 ➠ 358 = 14 plans-------------------------------------------------23A – Une belle station-servicePlans n° 345 = 1 plan0.53.19.18 ➤ 0.53.36.16Bureau d’Howard Roark, int. jourRoark vient enfin de décrocher un nouveau contrat. Il ne s’agit pas d’un immeuble, mais d’une station-service. Peu lui importe : « Je construirai tout ce qu’on me demandera. Du moment que je le fais à ma façon. »[Fondu enchaîné]-------------------------------------------------23B – Les projets s’enchaînentPlan n° 346 ➠ 354 = 9 plans0.53.36.17 ➤ 0.54.23.03Bureau d’Howard Roark/différentes villes , int./ext. jourIl dessine ensuite un magasin, une ferme, une villa, un immeuble de bureaux…[Fondu enchaîné]-------------------------------------------------23C – Le début de la gloire ?Plans n° 338 ➠ 355 = 1 plan0.54.23.04 ➤ 0.54.58.11Terrasse d’un immeuble, ext. jourInterviewé par un journaliste, Roark se montre serein : « J’ai toujours trouvé quelqu’un qui aimait mon travail. Un homme qui savait voir et réfléchir. »[Fondu enchaîné]-------------------------------------------------23D – Un rendez-vous inattenduPlans n° 356 ➠ 358 = 3 plans0.54.58.11 ➤ 0.55.27.12Bureau d’Howard Roark, int. jourDe retour à son bureau, un message attend Roark : Gail Wynand demande à le rencontrer ![Fondu enchaîné]

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M. Wynand veut se faire bâtir une maison0.55.27.13 ➤ 0.58.08.15 Durée de la séquence : 2 mn 41 sec. Plans n° 359 ➠ 369 = 11 plansBureau de Gail Wynand, int. jour-------------------------------------------------Wynand, absent de New York pendant la campagne du journal contre Roark, n’a pas fait le rapprochement entre son interlocuteur et le projet Enright. Séduit par son travail, il veut engager Roark à titre privé, afin de concevoir une maison de campagne dédiée à sa femme Dominique : « Concevez-la comme une forteresse. Et un temple. Le temple de Dominique Wynand. » Sans rappeler à Wynand le tort qu’il lui a causé, Roark accepte la commande.[Fondu enchaîné]

Wynand convient – mais un peu tard – qu’on ne l’y prendra plus…0.58.08.16 ➤ 1.00.48.19 Durée de la séquence : 1 mn 52 sec. Plans n° 370 ➠ 375 = 6 plansMaison des Wynand, int. jour-------------------------------------------------Wynand fait part de son projet à Dominique. Mais lorsqu’il lui révèle le nom de l’architecte, elle éclate de rire devant l’ironie de la situation. En un éclair, Wynand se rappelle la campagne du Banner contre Roark. Vexé, il jure de le briser. [Fondu enchaîné]

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Confrontation (1)1.00.48.20 ➤ 1.03.42.01 Durée de la séquence : 2 mn 53 sec. Plans n° 376 ➠ 388 = 13 plansBureau de Gail Wynand, int. jour-------------------------------------------------Lors d’un second rendez-vous, un bras de fer s’engage entre les deux hommes. Mais à vrai dire, seul Wynand est disposé à en découdre : « Je vous offre de devenir l’architecte de mes futurs projets. Vous serez riche. Si vous refusez, vous ne bâtirez plus jamais rien. » Pour toute réponse, Roark redessine sous ses yeux le projet de maison qu’il venait lui soumettre, et l’affuble d’éléments rococo qui jurent avec la conception moderne initiale. Wynand éclate de rire ; pour Roark, la partie est gagnée. Wynand l’invite à dîner chez lui le soir même. [Fondu enchaîné]

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Roark dîne chez les Wynand1.03.42.02 ➤ 1.05.31.10Durée de la séquence : 1 mn 49 sec. Plans n° 389 ➠ 402 = 14 plansMaison des Wynand, int. soir-------------------------------------------------Chez les Wynand, Roark retrouve Dominique. Elle s'étonne, calmement d'abord, avec véhémence ensuite, que Roark ait pardonné à son mari. Roark parvient à l'apaiser sans que leurs sentiments respectifs n'éveillent les soupçons de Wynand.[Fondu au noir]

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Au creux de la vague1.05.31.10 ➤ 1.07.35.19 Durée de la séquence : 2 mn 4 sec. Plans n° 403 ➠ 413 = 11 plansBureau d’Ellsworth Toohey, int. jour-------------------------------------------------Encensé hier encore, Peter Keating est subitement passé de mode et ne parvient plus à décrocher un contrat. Il vient implorer Toohey d'intercéder pour lui dans l'attribution de Cortlandt, immense ensemble d'appartements à loyers modérés destinés aux revenus modestes. Personne à ce jour n'a été capable de résoudre le problème : des logements de qualité pour un faible coût de construction. Toohey ne croit guère aux chances de réussite de Keating mais lui accorde l'opportunité d'essayer ; il lui remet le cahier des charges de l'appel à projet… [Fondu enchaîné]

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Keating se trouve un « nègre »1.07.35.20 ➤ 1.10.49.11Durée de la séquence : 3 mn 14 sec. Plans n° 414 ➠ 431 = 18 plansBureau d’Howard Roark, int. jour-------------------------------------------------… Cahier des charges que Keating soumet à Roark, qu'il supplie de dessiner le projet en le laissant y apposer sa signature. Roark est tenté : Cortlandt est le genre de défi dont il a toujours rêvé : « Je m'intéresse aux nouveaux matériaux, aux techniques permettant de bâtir intelligemment. Cette question me passionne. » Il donne son accord, à condition qu'on ne retouche pas ses plans. La reconnaissance, la gloire, l'argent, il les abandonne à Keating. [Fondu au noir]

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Des vacances pour Howard Roark1.10.49.12 ➤ 1.13.08.09Durée de la séquence : 2 mn 19 sec. Plans n° 432 ➠ 451 = 20 plansVilla des Wynand, ext. jour-------------------------------------------------Lorsque les journaux annoncent la construction prochaine de Cortlandt et reproduisent la maquette du projet, Wynand et Dominique identifient immédiatement le travail de Roark, même si Keating en est crédité. La villa des Wynand est désormais achevée. En remerciement, Wynand offre à Roark de l'accompagner en croisière – plusieurs mois sur son yacht personnel. Au dépit de Dominique, qui ne supporte plus d'être séparée de Roark et du temps que celui-ci passe en compagnie de son mari, Roark accepte. [Fondu enchaîné]

Le futur Mémorial Gail Wynand1.13.08.10 ➤ 1.13.59.16Durée de la séquence : 51 sec. Plans n° 452 ➠ 454 = 3 plansYacht des Wynand, ext. jour-------------------------------------------------Quittant le port de New York, les deux hommes passent au large d'Hell's Kitchen, le quartier misérable où Wynand est né et qu'il possède presque en totalité. Il projette d'y bâtir un immeuble, « le mémorial Gail Wynand », le plus haut bâtiment de la ville. Bien entendu, Howard Roark en sera l'architecte. [Fondu enchaîné]

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On retouche les plans de Roark1.13.59.17 ➤ 1.15.27.22 Durée de la séquence : 1 mn 28 sec. Plans n° 455 ➠ 468 = 3 plansBureau de la commission Cortlandt, int. jour-------------------------------------------------Pendant l'absence de Roark, Keating éprouve les pires difficultés face à Toohey et aux architectes associés de Cortlandt, qui veulent absolument modifier le projet initial. Malgré ses supplications, Keating est impuissant à empêcher l'irréparrable. Cortlandt sera bel et bien redessiné.[Fondu enchaîné]

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Cortlandt défiguré1.15.27.23 ➤ 1.16.18.06 Durée de la séquence : 50 sec. Plans n° 469 ➠ 476 = 8 plansChantier Cortlandt, ext. jour-------------------------------------------------À son retour de voyage, Roark se rend sur le chantier de Cortlandt en compagnie de Keating. Ils ne peuvent que constater les dégâts : aux immeubles, on a ajouté de la couleur, des balcons, etc. Keating est mortifié mais impuissant. Poursuivre les commanditaires ou avouer la réalité de l’accord tacite qui liait les deux architectes est impossible. C’est désormais à Roark de prendre les choses en main. [Fondu enchaîné]

Tempête sous un crâne (2)1.16.18.07 ➤ 1.18.26.17Durée de la séquence : 2 mn 8 sec. Plans n° 477 ➠ 479 = 3 plansBureau d’Howard Roark, int. nuit-------------------------------------------------Dominique rend visite à Roark, après plusieurs mois passés loin de lui. Elle est prête à quitter Wynand. Mais avant cela, Roark lui demande de l’aide : qu’elle se rende en voiture et seule, le lundi soir suivant, sur le site de Cortlandt : « Quand j’aurai fini de parler, ne dites rien, même si vous décidez de m’aider. Faites-le simplement. Allez sur le chantier à 23h30… »[Fondu enchaîné]

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Le dynamitage de Cortlandt1.18.26.18 ➤ 1.20.23.11 Durée de la séquence : 57 sec. Plans n° 480 ➠ 509 = 30 plansChantier Courtland, ext. nuit-------------------------------------------------Bien entendu, Dominique est décidée à aider Roark. Le soir convenu, elle se rend sur le chantier et prétextant une panne, elle détourne l’attention du gardien. Une série d’explosions retentit, soufflant les bâtiments. Dominique regagne sa voiture à grand peine et avec un morceau de verre brisé, elle s’entaille les veines. Une silhouette, celle de Roark, se dresse au milieu du chantier et déclare aux policiers qui inspectent les lieux : « Arrêtez-moi, je parlerai au procès. » [Fondu enchaîné]

Toohey chauffe les foules1.20.23.12 ➤ 1.21.14.00 Durée de la séquence : 50 sec. Plans n° 510 ➠ 512 = 3 plans!éâtre, int. jour-------------------------------------------------Au cours d’une réunion publique, Toohey s’en prend avec véhémence à « Howard Roark, l’égoïste » et demande à ce qu’il soit « éliminé ». [Fondu enchaîné]

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Un éditorial de Gail Wynand1.21.14.01 ➤ 1.22.23.23 Durée de la séquence : 1 mn 9 sec. Plans n° 513 ➠ 514 = 2 plansBureau de Gail Wynand, int. jour-------------------------------------------------Malgré les mises en garde de Scarrett, Wynand dicte un éditorial de soutien à Roark. Pour la première fois de sa vie, Gail Wynand va défendre ses opinions, seul contre tous. [Fondu enchaîné]

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Roark se rend au chevet de Dominique1.23.39.18 ➤ 1.25.21.03 Durée de la séquence : 1 mn 41 sec. Plans n° 521 ➠ 527 = 7 plansHôpital, int. jour-------------------------------------------------Roark vient à son tour rendre visite à Dominique. Dans l’épreuve, celle-ci a acquis une force et une détermination nouvelles, quelle que soit l’issue du procès : « Je me battrais, ils ne me font plus peur ». À quoi Roark rétorque : « Voilà ce que je rêvais d’entendre. »[Fondu enchaîné]

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Les plaidoyer du Banner

1.23.33.12 ➤ 1.23.39.17Durée de la séquence : 6 sec. Plans n° 519 ➠ 520 = 2 plansBureau de Gail Wynand, int. jour-------------------------------------------------Et les unes du quotidien de Wynand se succèdent : toute illustrent « l’affaire ». Toutes défendent Roark.[Fondu enchaîné]

Wynand se rend au chevet de Dominique1.22.23.24 ➤ 1.23.33.11 Durée de la séquence : 1 mn 10 sec. Plans n° 515 ➠ 518 = 4 plansHôpital, int. jour-------------------------------------------------Dominique a survécu, ses jours ne sont plus en danger. Wynand lui rend visite à l’hopital, parfaitement conscient de son rôle dans le dynamitage de Cortlandt. Roark a été remis en liberté sous caution, mais l’opinion est toute entière contre Roark, de même que la presse. Seul le Banner le défend encore. [Fondu enchaîné]

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Toohey obtient des aveux1.25.21.04 ➤ 1.26.57.01Durée de la séquence : 1 mn 36 sec. Plans n° 528 ➠ 534 = 7 plansBureau de Peter Keating, int. jour-------------------------------------------------Toohey harcèle Keating. Son seul objectif : détruire Roark dont le talent menace sa propre quête du pouvoir et de domination des masses : « Il faut briser l’esprit des esclaves ! Les empêcher de penser et d’agir ! Leur apprendre le conformisme et l’obéissance. Vous lisiez ma rubrique sans comprendre mon message. Pourquoi dénonçais-je le talent ? Et louais-je des médiocres comme vous ? Parce que les génies sont indomptables. » Keating cède ; Toohey lui extorque des aveux signés.[Fondu enchaîné]

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L’effet d’une bombe1.26.57.02 ➤ 1.28.02.08Durée de la séquence : 1 mn 5 sec. Plans n° 535 ➠ 541 = 7 plansVilla des Wynand, ext. nuit-------------------------------------------------Alors que Roark dîne chez les Wynand, préparant sa défense et pesant avec Gail ses chances de l’emporter, le téléphone sonne : les aveux publics de Keating ! Wynand est décidé à défendre Roark jusqu’au bout, « quitte à tout perdre. » [Fondu enchaîné]

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La lutte, en vain1.29.02.24 ➤ 1.32.40.08Durée de la séquence : 3 mn 37 sec. Plans n° 549 ➠ 566 = 18 plans-------------------------------------------------44A – Une manifestationPlans n° 549 ➠ 552 = 4 plans1.29.02.24 ➤ 1.29.14.24Le Banner, int. jourDes passants armés de pancartes manifestent devant le Banner : « Howard Roark en prison. Le Banner doit changer de politique. »[Fondu enchaîné]-------------------------------------------------44B – Un dîner en villePlan n° 553 = 1 plan1.29.14.25 ➤ 1.29.29.13Un appartement bourgeois, int. soirAu cours d’une soirée huppée chez des particuliers. On peut lire sur les sous-verres : « On ne lit pas Wynand. »[Fondu enchaîné]-------------------------------------------------44C – Les vendeurs agressésPlans n° 554 ➠ 555 = 2 plans1.29.29.14 ➤ 1.29.42.04Une rue, ext. nuitUn groupe d’hommes s'approche d’un vendeur de rue installé avec un chariot aux couleurs du Banner. Ils le jettent à terre, dispersent les journaux sur le sol et renversent son chariot avant de prendre la fuite. (*)[Fondu enchaîné]-------------------------------------------------

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Grève au Banner

1.28.02.09 ➤ 1.29.02.23 Durée de la séquence : 1 mn Plans n° 542 ➠ 548 = 7 plansLe Banner, ext./int. jour-------------------------------------------------Et il est bien prêt de tout perdre, en effet. Rien ne va plus au Banner. Toute la rédaction a démissionné après le renvoi de Toohey. Celui-ci revient nargueur son ancien patron : « Vous avez laissé les gens comme moi corrompre le domaine des idées, pendant que vous prospériez… Vous avez confondu argent et pouvoir… »[Fondu enchaîné]

44D – Dominique fait son retour au BannerPlans n° 556 ➠ 561 = 6 plans1.29.42.05 ➤ 1.30.32.05Le Banner, int. nuitPlus aucun rédacteur n’acceptant de travailler au Banner, quel que soit le salaire, Dominique « reprend sa rubrique » et vient aider Wynand et Scarrett.[Fondu enchaîné]-------------------------------------------------44E – Le retour des invendusPlan n° 562 ➠ 563 = 2 plans1.30.32.06 ➤ 1.30.58.24Un entrepôt, int. nuitLes entrepôts regorgent d’invendus du quotidien. « Plus personne ne lit le Banner. »[Fondu enchaîné]-------------------------------------------------44F – La prochaine éditionPlans n° 564 = 1 plan1.30.58.25 ➤ 1.31.25.22Le Banner, int. nuitDominique s’affaire avec l’un des rares collaborateurs à n’avoir pas déserté pendant que Wynand prend un peude repos. -------------------------------------------------44G – Wynand prêt à baisser les brasPlans n° 565 ➠ 566 = 2 plans1.31.25.23 ➤ 1.32.40.08Bureau de Gail Wynand, int. nuitWynand est exténué et déprimé. Il sent bien que cette fois, il n’aura pas le dessus : « Je ne dirige pas ce journal. Il appartient à l’homme de la rue. Il n’y a rien à sauver. » Dominique l’adjure de ne pas abandonner.[Fondu enchaîné]

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Wynand s’avoue vaincu1.32.40.09 ➤ 1.33.20.22Durée de la séquence : 40 sec. Plans n° 567 ➠ 571 = 5 plansSalle de réunion, int. jour-------------------------------------------------Devant un conseil d’administration aux abois qui le pousse à reprendre Toohey et à « changer d’opinion dans l’affaire Cortlandt », Wynand finit par céder.[Fondu enchaîné]

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Le Banner exige la tête de Roark1.33.20.23 ➤ 1.34.02.20 Durée de la séquence : 42 sec. Plans n° 572 ➠ 575 = 4 plansUne rue, ext. nuit-------------------------------------------------Wynand, trempé par la pluie qui tombe en rafales, ramasse dans le caniveau un exemplaire du Banner où s’étale en une son nouvel éditorial, dans lequel il appelle la justice à « châtier Roark sans pitié. » [Fondu enchaîné]

Le procès1.34.02.21 ➤ 1.42.46.01Durée de la séquence : 9 mn 25 sec. Plans n° 576 ➠ 655 = 80 plans-------------------------------------------------47A – La plaidoirie de RoarkPlans n° 576 ➠ 620 = 45 plans1.34.02.21 ➤ 1.40.24.22Tribunal, int. jourLe jour du procès, Roark assure sa propre défense. [voici in extenso l’intégralité de sa plaidoirie] : « Il y a mille ans, un homme a découvert le feu. Ses frères l’ont sans doute brûlé avec, mais il leur a légué cette invention et illuminé les ténèbres… Depuis des siècles, des hommes innovent, armés de leur seule vision. Les créateurs, les artistes, les savants, ont toujours été seuls… Toute idée nouvelle fut rejetée, les inventions furent critiquées. Mais les visionnaires ont continué. Ils ont combattu et souffert, mais ils ont gagné. Aucun créateur n’a cherché a satisfaire ses contemporains. Ceux-ci le haïssaient. Sa vérité était son seul mobile. Son travail, son

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seul objectif. Son travail, pas ceux qui s’en servaient. Sa création, pas le profit qu’en tiraient les autres. Celle qui bâtissait sa vérité. Il défendait sa vérité contre tous. Il continuait, sans se soucier des critiques, avec son intégrité pour drapeau, au service de rien ni personne. Il vivait pour lui-même. C’est ainsi qu’il a pu créer ce qui fait la gloire de l’humanité. Voilà ce qu’est la création. L’homme ne survit que par son esprit. Il vient au monde désarmé. Son cerveau est son arme. Mais l’esprit est individuel. Un cerveau collectif, ça n’existe pas. L’homme doit penser et agir par lui-même. L’esprit ne peut œuvrer sous la contrainte. Il ne peut obéir aux besoins, aux opinions et aux désirs des autres. Ce n’est pas un objet de sacrifice. Le créateur ne se fie qu’à son jugement. Le parasite suit l’avis des autres. Le créateur réfléchit, le parasite copie. Le créateur produit, le parasite pille. Le créateur veut dompter la nature, le parasite veut dompter l’homme. Le créateur est indépendant. Il n’obéit ni ne commande. Ses relations sont basées sur le libre-arbitre. Le parasite veut le pouvoir. Il veut condamner les hommes à l’esclavage. Il dit que l’homme est un outil pour les autres, qu’il doit penser et agir comme eux et vivre dans une servitude sans joie au service des autres…Regardez le passé. Toutes les grandes réalisations sont le fruit d’un esprit individuel. L’horreur et la destruction sont nées du désir d’asservir les hommes comme des robots, sans droits, sans ambitions personnelles, sans volonté, espoir ni dignité.C’est un vieux conflit. Il a un autre nom : L’individuel contre le collectif… Notre grand pays s’est bâti sur l’individualisme, le principe des droits inaliénables. Le droit de rechercher le bonheur, de produire et de gagner au lieu de renoncer. Le droit de prospérer au lieu de dépérir. De réussir, au lieu de piller. De chérir le sentiment de sa valeurpersonnelle et de placer au premier rang son amour propre. Regardez les résultats : les collectivistes veulent détruire tout cela, à l’image d’une partie de la terre.Je suis architecte. Je sais ce qui repose sur ces principes. Nous allons vers un monde où je refuse de vivre. Mes idées sont mes biens, on me les a volées en rompant un contrat. Sans me laisser le choix. On a dit que mon travail appartenait à d’autres, qu’ils avaient des droits sur moi et qu’il était de mon devoir de leur obéir. Voilà pourquoi j’ai dynamité Cortlandt. Je l’ai dessiné, je l’ai créé. Je l’ai détruit. On devait le construire conformément à mon projet. C’était le prix exigé et je n’ai pas été payé. On a détruit mon travail et on en a tiré des bénéfices sans rien me donner.

Nul ne peut disposer d’une minute de ma vie. Ni de mon énergie ou d’une de mes réalisations. Absolument personne. Il fallait le dire, le monde sombre dans l’abnégation. Je parle ici au nom des derniers hommes libres de ce pays. Voilà mes principes. Je n’en admets pas d’autres. Et mes principes, c’est le droit pour chacun de vivre pour lui-même. »[Fondu enchaîné]-------------------------------------------------47B – Le juge s’adresse aux jurésPlans n° 621 ➠ 633 = 13 plans1.40.24.23 ➤ 1.41.39.01Tribunal, int. jourAprès le plaidoyer de Roark, le juge s’adresse solennellement aux jurés qui s’apprêtent à délibérer : « Sachez que les pertes subies par les entrepreneurs ne sont pas de notre ressort. La responsabilité des pertes financières sera déterminée devant une chambre civile. Intéressez-vous uniquement à l’acte criminel. » [Fondu enchaîné]-------------------------------------------------Verdict : acquittement !Plans n° 634 ➠ 655 = 22 plans1.41.39.02 ➤ 1.42.46.01Tribunal, int. jourLes jurés reviennent dans le prétoire à l’issue de leur délibération. Sous le regard sombre de Wynand et celui, angoissé, de Dominique. Verdict : Roark est non coupable ! Un nouveau regard de Roark vers Dominique scelle en quelque sorte leur union.[Fondu enchaîné]

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Roark dessinera Cortlandt1.42.46.02 ➤ 1.43.07.05Durée de la séquence : 21 sec.Plan n° 656 = 1 planBureau d’Howard Roark, int. jour-------------------------------------------------Roark a repris ses activités. Roger Enright lui annonce qu’il a racheté les plans et le site de Cortlandt. Roark en sera l’architecte, sans pression extérieure cette fois. On annonce à Roark que Wynand désire le rencontrer.

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Ultime rendez-vous 1.43.07.06 ➤ 1.46.00.12Durée de la séquence : 2 mn 53 sec. Plans n° 657 ➠ 675 = 19 plansBureau de Gail Wynand, int. jour-------------------------------------------------Dans le bureau de Wynand, un contrat attend Roark : la réalisation du mémorial Gail Wynand ! Ce dernier a stoppé net la parution du Banner et envisage désormais l’immeuble comme son testament au monde, « le dernier gratte-ciel de New York. Avant que l’humanité ne se détruise. Dédiez-le à cet esprit qui est le vôtre et aurait pu être le mien. » Une fois que Roark a signé les documents et s’est retiré, Wynand sort un pistolet du tiroir de son bureau et se tire une balle dans la tête.

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Réunion au sommet1.46.00.13 ➤ 1.47.56.04Durée de la séquence : 1 mn 56 sec. Plans n° 676 ➠ 693 = 18 plansChantier, ext. jour-------------------------------------------------Une pancarte proclame : « La Tour Wynand, la plus grande construction du monde. » Dominique pénètre sur le chantier et demande à voir Roark. Il est tout en haut de la tour. Lorsque le contremaître s’enquiert de son identité, elle répond : « Mme Roark. » Elle rejoint son mari qui l’attend au sommet de la tour, sa silhouette se découpant sur le ciel.

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Introduction

Un film n’est pas un texte philosophique. King Vidor n’est pas un philosophe ; c’est un cinéaste, c’est-à-dire un artiste qui propose dans ses œuvres une certaine vision du monde. Il ne s’agit donc pas d’utiliser Le Rebelle comme un vague prétexte à des considérations philosophiques générales mais, par l’analyse concrète du film, dans sa matérialité singulière, d’initier une réflexion à partir d’éléments filmiques précis. Par sa forme même et à cause des conditions dans lesquelles il a été réalisé (des rapports difficiles entre le producteur, Ayn Rand, la scénariste et auteur du roman adapté et du metteur en scène) le film est particulièrement riche et complexe. Plusieurs pistes de réflexion sont donc possibles. Nous allons ici en explorer quelques unes ayant un lien direct avec les notions du programme de philosophie des classes de Terminale.Le thème de la liberté est toujours présent mais plusieurs lectures du film sont envisageables. Qui est Howard Roark ? Un rebelle anarchiste ? Un artiste dans l’affirmation de sa puissance créatrice ? Une figure du surhomme nietzschéen ? Ou un individualiste ultra libéral ?

Quelle liberté ?Que dit-on quand on dit « liberté chérie » ? On dit qu’on aime la liberté. Soit. Mais qu’aime-t-on ? Sur quel objet précis se porte ce désir ? Liberté : un mot aussi joli que vague, un de ces détestables mots qui chantent plus qu’ils ne parlent comme disait Paul Valéry. Liberté, une notion du programme de Terminale… Justement : une notion, pas un concept ; une notion qu’il s’agit de définir.Juste une petite expérience : le titre générique de l’édition 2007 du Festival international du Film d’histoire de Pessac est « Liberté, liberté chérie ». Tapons ces mots sur le clavier de notre ordinateur et interrogeons un moteur de recherche. Premier site proposé par Google : « Liberté chérie », site d’une association ultra-libérale. Lisons la présentation proposée : « Association militante libérale qui entend faire évoluer notre vieux pays », qui lutte contre « les revendications illégitimes des grévistes aveuglés par des syndicats voyous » et « dénonce l’obscurantisme gangrénant de certaines élites intellectuelles française. »Sommes nous bien certains que nous parlons tous de la même chose ? Un travail définitionnel paraît plus que jamais nécessaire.Le film propose une conception individualiste de la liberté. Le rapport individu/société est un des thèmes majeurs de la filmographie de King Vidor.

Philosophie du Rebelle

Approche pédagogique

– –Jean-François Cazeaux

« Nous sommes libres quand nos actes émanent de notre personnalité tout entière, quand ils l’expriment, quand ils ont avec elle cette indéfinissable ressemblance que l’on trouve parfois entre l’œuvre et l’artiste. » Henri Bergson, Essai sur les données immédiates de la conscience.

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Pour mieux comprendre son point de vue, référons- nous à deux films qui peuvent éclairer notre perception du Rebelle : La Foule et L’Homme qui n’a pas d’étoile. Vidor dépeint dans ces films des individus en conflit avec la société comme dans Le Rebelle mais en propose un traitement très différent.Vidor lui-même est assez critique sur certains aspects de son film, non pas sur ses qualités artistiques (c’est un lieu commun d’affirmer que c’est un chef d’œuvre, peut-être son meilleur film, affirmation évidemment discutable), mais sur certains éléments du scénario. Il faut savoir que celui-ci a été écrit par Ayn Rand, qui a adapté son propre roman La Source vive et qui disposait du final cut 1. Un exemple : la scène finale, qu’on peut juger sublime ou ridicule, a été imposée par Ayn Rand. Cette scène tout à fait fidèle au roman et à l’idéologie de Rand est très sévèrement condamnée par Vidor 2. Ce qui ne l’empêche pas d’être esthétiquement très intéressante, talent de Vidor oblige.

Il nous faudra donc distinguer, autant que possible, ce qui revient à Vidor de ce qui revient à Rand. La lecture du roman est à cet égard édifiante. Contrairement à Vidor, Rand revendique un statut philosophique (voir son portrait dans ce dossier) et développe dans son roman des conceptions férocement individualistes, anticommunistes et anti-altruistes. « Le seul devoir de l’homme est la poursuite de son propre intérêt » affirmera-t-elle dans un pamphlet intitulé La Vertu d’égoïsme. « Le critique Clive Denton définit Le Rebelle comme une brillante tentative de sabotage volontaire du roman d’Ayn Rand » écrit François Zamour dans un très intéressant article paru dans la revue CinémAction 3 mais, précise-t-il, « plutôt que de sabotage, il conviendrait de parler d’un travail d’appropriation […]. Vidor va parvenir à se glisser entre le scénario et le personnage. »En tout état de cause, le film est un plaidoyer pour l’individualisme : soit dans la version ultra-libérale et pseudo nietzschéenne d’Ayn Rand, soit conforme à l’idéologie du rêve américain pour King Vidor. Les motifs de Rand sont clairement politiques : le personnage de Toohey est explicitement présenté dans le roman comme un idéologue et un activiste collectiviste. Dans le film de Vidor, cet aspect-là est très atténué, Toohey devenant un intrigant aux mobiles assez flous que Vidor filme en utilisant les stéréotypes codifiés propres au méchant hollywoodien (voir par exemple ses premières scènes). Plus que l’individualisme politique c’est la singularité de l’artiste et sa lutte contre les puissances sociales qui intéresse Vidor. Pour changer d’horizon, citons Rousseau dont la conception de la liberté est aux antipodes de celle de Rand  mais qui écrit une phrase que ne pourrait renier ni Rand ni Vidor : « Perdre sa liberté c’est perdre sa qualité d’homme ». Et on revient au problème initial : qu’est-ce que la liberté ? L’affirmation de la puissance de l’individu ou la prise en compte de l’intérêt général, comme l’affirme Rousseau ?L’analyse du film ou de certaines de ces scènes peut donc permettre de développer un travail philosophique sur les définitions de la liberté, sur l’individu, la société et la démocratie mais aussi dans une autre perspective (plus vidorienne que randienne) sur la création artistique, la démesure du désir et le rapport à autrui.

Howard Roark : une société qu’il juge

médiocre et dangereuse…

Ellsworth Toohey : les stéréotypes codifiés

du méchant hollywwodien…

1 En l’occurrence, un droit de regard sur le scénario. Pas une

ligne ne pouvait être modifiée sans son accord.

2 Propos de Vidor à Luc Moullet, « Entretien avec King Vidor »,

Cahiers du Cinéma, n°136, octobre 1962, p. 13.

3 cf. reproduction de cet article, « L’omniprésence de

l’architecture chez King Vidor » dans ce dossier.

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L’individualisme

Ce film est une allégorie. Chacun des personnages principaux incarne des valeurs ou des concepts. C’est d’ailleurs ce qui donne au film ce caractère abstrait, caractère souligné par les décors expressionnistes et une mise en scène elliptique.Howard Roark est une figure forte de l’individualisme. Il définit clairement sa liberté comme l’expression de sa force et de sa volonté. Il ne tient compte ni de l’avis d’autrui ni de ses désirs. Sûr de ses valeurs, il refuse de se soumettre à celles d’une société qu’il juge médiocre et dangereuse.Il convient ici de préciser ce qu’est l’individualisme : d’une manière générale, on désigne sous le nom d’individualisme toute théorie dans laquelle l’individu est considéré comme source irréductible de valeur tant sur le plan moral que politique.Mais il existe plusieurs formes d’individualisme. Notre monde actuel est fortement individualiste mais la vulgate contemporaine propose plutôt un nivellement des valeurs. En l’absence supposée de toute transcendance et de tout principe, l’individu devient lui-même la norme dans une logique consumériste du  « tout se vaut ». Il s’agit donc d’un individualisme de masse, fortement répandu dans nos sociétés de consommation individuelle ; c’est l’individualisme du pavillon individuel (pour rester dans l’architecture,) du portable et de « C’est mon choix ». Ce n’est évidemment pas l’individualisme d’Howard Roark.Pour Rand, Roark est un individu supérieur, intrinsèquement porteur d’une essence différente. Il se situe largement au-dessus de la société médiocre, comme le dernier plan du film nous le donne à voir. Il est reconnu par des êtres de même nature que lui, comme Dominique, qui discerne sa force au premier regard alors qu’elle ne sait rien de lui et qu’il lui apparait dans la posture d’un ouvrier (séquence de la carrière).Cette supériorité lui donne tous les droits y compris celui de la violence. Cette conception pour le moins discutable peut être rapprochée de positions philosophiques et politiques telles celle de Calliclès dans le Gorgias de Platon 4 ou celle de Strirner dans L’Unique et sa propriété 5.

4 Diatribe de Calliclès dans le Gorgias de Platon (491e – 492c) :

« Mais voici ce qui est beau et juste suivant la nature, je te le

dis en toute franchise, c’est que, pour bien vivre, il faut laisser

prendre à ses passions tout l’accroissement possible, au lieu de

les réprimer, et, quand elles ont atteint toute leur force, être

capable de leur donner satisfaction par son courage et son

intelligence et de remplir tous ses désirs à mesure qu’ils

éclosent.

Mais cela n’est pas, je suppose, à la portée du vulgaire. De là

vient qu’il décrie les gens qui sont capables, parce qu’il a honte

de lui-même et veut cacher sa propre impuissance. Il dit que

l’intempérance est une chose laide, essayant par là d’asservir

ceux qui sont mieux doués par la nature, et, ne pouvant lui-

même fournir à ses passions de quoi les contenter, il fait l’éloge

de la tempérance et de la justice à cause de sa propre lâcheté.

Car pour ceux qui ont eu la chance de naître fils de roi, ou que la

nature a fait capable de conquérir un commandement, une

tyrannie, une souveraineté, peut-il y avoir véritablement quelque

chose de plus honteux et de plus funeste que la tempérance ?

Tandis qu’il leur est loisible de jouir des biens de la vie, que

personne ne les en empêche. Ils s’imposeraient eux-mêmes pour

maitres la loi, les propos, les censures de la foule ! Et comment

ne seraient-ils pas malheureux du fait de cette prétendue beauté

de la justice et de la tempérance, puisqu’il ne pourraient rien

donner de plus à leurs amis qu’à leurs ennemis, et cela, quand

ils sont maîtres de leur propre cité ? La vérité, que tu prétends

chercher, Socrate, la voici : le luxe, l’incontinence et la liberté,

quand ils sont soutenus par la force constituent la vertu et le

bonheur ; le reste, toutes ces belles idées, ces conventions

contraires à la nature, ne sont que niaiserie et néant. »5 « Ce qui te donne le droit, c’est ta force, ta puissance et rien

d’autre. » – Strirner, L’Unique et sa propriété.

Dominique discerne la force de Roark au premier

regard alors qu’elle ne sait rien de lui et qu’il lui

apparait dans la posture d’un ouvrier.

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Vidor n’a pas la même conception de l’individualisme ; ses personnages positifs sont plus généralement marqués par ce que l’on peut appeler l’idéologie du rêve américain et qu’on pourrait symboliser par la figure du self made man : l’homme issu du peuple qui réussit grâce à ses qualités et son travail. Comme Howard Roark mais aussi d’autres personnages du film (Wynand). Contrairement à Rand, Vidor ne méprise pas le peuple, à qui il donne toute sa dignité dans la scène du procès (cf. infra) en le distinguant clairement de la masse consumériste et formatée par les médias. La réflexion philosophique avec des élèves pourrait donc porter sur ces deux conceptions de l’individualisme, sur leurs valeurs morales et politiques à partir d’éléments du film, comme la scène du procès, celle de la destruction de l’immeuble par Roark, en posant la question des conséquences sociales de cet actes (le film est muet sur le sort des hommes et des femmes de condition modeste qui devaient occuper les lieux) ou celles décrivant le pouvoir des médias.La question politique du rapport entre l’individu, la société et l’État pourra être posée ainsi que le problème de la valeur de la démocratie.

Puissance et pouvoir

Ayn Rand se réfère souvent à la pensée de Nietzsche. On peut penser que sa lecture du philosophe allemand est discutable et réductrice mais, indéniablement, on peut voir dans Le Rebelle l’expression de certains thèmes nietzschéens.Howard Roark incarne la volonté de puissance dans son affirmation la plus franche. Sa puissance de création dionysiaque en fait un surhomme (cf. la dernière séquence). Au pouvoir des petits hommes médiocres ou des porteurs de la tradition (le

chameau de la première métamorphose), il oppose sa force novatrice. C’est aussi le lion de la deuxième métamorphose dont la violence est capable de nier le nihilisme (destruction de l’immeuble) et l’enfant de la troisième métamorphose créant de nouvelles valeurs 6. Alors que Roark est une figure positive de la volonté de puissance, deux autres personnages du film se placent dans des perspectives différentes.Tout d’abord Dominique Francon, dont l’attitude pour le moins ambiguë et douloureuse a été qualifiée de masochiste par certains critiques. En réalité, sa souffrance provient du fait qu’elle refuse cette puissance, préférant renoncer à la réaliser par manque de force ou de confiance. Cette résignation n’est pas sans rappeler le refus du vouloir vivre de Schopenhauer. Elle va même adopter très provisoirement une attitude stoïcienne de renoncement au désir. Ce nihilisme qui prend des formes parfois démesurées (séquence de la destruction de la statue antique, mariage avec Wynand) va être complètement dépassée par la grande affirmation vitale exprimée par Roark : Dominique va littéralement s’élever jusqu’à lui dans une scène finale fortement lyrique.

6 Chez Nietzsche, le chameau est le porteur de la civilisation

judéo-chrétienne qui transmet les valeurs nihilistes de l’idéal

ascétique ; le lion est la force capable de détruire ces valeurs, de

nier le nihilisme ; et l’enfant l’affirmation de nouvelles valeurs.

« L’esprit devient chameau et lion le chameau et pour finir enfant

le lion. » – Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra.

L’expression de certains thèmes nietzschéens… Dominique : une attitude qu’on peut qualifier de

masochiste…

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Wynand représente une forme pervertie de cette volonté de puissance qu’il confond avec une volonté de pouvoir. Son empire médiatique, son pouvoir sur les autres, ne font pas de lui un homme capable de se réaliser. Il cherche la première place et, ce faisant, perd son intégrité, se perd lui-même. Il prend conscience de son erreur grâce à l’étrange ménage à

trois qu’il forme avec Roark et Dominique, mais n’a plus la force de résister aux pressions sociales et financières et n’a d’autre issue que sa propre destruction.Face à ces trois formes de la volonté de puissance, les personnages de Keating et de Toohey représentent les petits hommes (toujours dans une perspective nietzschéenne) à la fois pathétiques et dangereux.Keating n’est qu’un faible parasite. Il n’a aucune puissance, aucun talent. Incapable de s’affirmer de créer par lui-même il est la figure même de la servitude volontaire car du fait de sa faiblesse il ne peut exister que dans la soumission et la grégarité.Toohey exprime la volonté de pouvoir, le petit homme qui cherche à exercer le pouvoir parce qu’il hait la puissance créatrice qu’il n’a pas. Le personnage n’a pas dans le film le même statut que dans le roman où il est décrit comme un idéologue collectiviste. Dans le film de Vidor, il est plutôt présenté comme un dangereux médiocre, comme un critique haïssant le talent et la créativité et ne cherchant qu’à les détruire. Il voudrait exister aux yeux de Roark qui ne lui reconnait même pas un statut d’ennemi (séquence de la rencontre devant le chantier). Le but qu’il poursuit reste assez flou, car Vidor a gommé ses motivations politiques. Il ne peut s’exprimer que dans la négation et la manipulation des faibles (voir la séquence d’extorsion des aveux de Keating).

La liberté de création

On peut lire le film comme une allégorie présentant les difficultés de la création artistique en général et du cinéma en particulier. Le cinéaste est comme l’architecte du film, confronté au pouvoir de ses commanditaires, au jugement du public et à la démagogie des critiques. Vidor lui-même avait connu d’énormes difficultés avec ses producteurs lors des tournages de ses deux films précédents (Duel au soleil et An American Romance). Il déclarera d’ailleurs, ne plaisantant qu’à demi, qu’il aurait pu, comme Roark, faire sauter les locaux des studios ou brûler les copies des films. Dans le cinéma plus qu’ailleurs, il est difficile d’exprimer sa créativité… le cinéma est un art mais c’est aussi une industrie. Le parallèle avec l’architecture est évident. Plutôt que l’individualisme politique, c’est la

singularité de l’artiste qui intéresse King Vidor.Comment un artiste peut-il imposer ses choix ? Doit-il se soumettre au jugement du plus grand nombre ou de la vulgate ambiante ? Doit-il céder aux pressions économiques ? Qu’est ce qu’un génie, sinon un créateur inventant de nouveaux genres, de nouvelles valeurs ? Autant de questions qui pourront

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Keating et Toohey : « de petits hommes »

à la fois pathétiques et dangereux.

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permettre d’initier, à partir du film une réflexion sur l’art avec les élèves de Terminale.

La démesure du désir chez Vidor

Le film est tout entier traversé par la démesure, l’hubris des grecs que l’on peut retrouver chez Calliclés et qui s’oppose à la tempérance platonicienne, à la sophrosuné, la santé de l’âme (phren : « esprit » ; sos : « sain » ), le respect des lois humaines et la soumission au destin. Dans ce film, Vidor montre avec force son goût pour la démesure comme il le fait dans ses autres productions de l’époque. Démesure des personnages, des sentiments, des décors et de la mise en scène dans Le Rebelle. Démesure du désir qui ne s’accomplit que dans la violence et la mort comme dans la flamboyante scène finale de Duel au soleil. Démesure de la passion dans La Furie du désir ou dans La Garce où Bette Davis incarne une sorte de madame Bovary qui aurait appris à se servir d’un fusil (cf. texte de Michael Wilson). Dans tous ces films, le désir s’exprime par la violence, seule réponse aux forces qu’il déclenche. Aucune rationalité aucune morale ne peut venir tempérer les passions. Il n’y a pas de demi-mesure parce qu’il n’y a pas de mesure, pas de compromis possible, pas de recours à la raison ou à l’éthique. Les personnages de Vidor se réalisent ou se détruisent dans le désir, au-delà du bien et du mal. La violence de leurs actes ne se justifie pas, elle s’impose inexorablement.La démesure de Vidor apparait dans la dernière scène. Cette ascension finale vers le septième ciel du centième étage d’un immeuble gigantesque figure la plénitude du désir assouvi. Cette fin positive est en totale contradiction avec celles des autres films de Vidor. Il faut y voir une concession à la naïveté d’Ayn Rand (fidélité au roman).Vidor sait que la démesure mène à la destruction.

Des pistes de réflexions s’ouvrent à nous : peut-on maîtriser ses désirs ? C’est ce que tente de faire par l’ataraxie Dominique Francon dans la première partie du film. Mais sa tentative est marquée par la violence et l’hubris : elle détruit la statue pour se détacher d’elle et sera réveillée dans son désir par des explosions venant de la carrière. (La scène de la rencontre entre Howard et Dominique pourrait faire l’objet d’analyses intéressantes y compris sur le plan psychanalytique).Peut-on à la fois être libre et passionné ?Ces quelques lignes n’épuisent évidemment pas les possibilités qu’offre ce film. Plusieurs autres problématiques sont possibles comme par exemple (et en vrac) les rapports à autrui (rejet de l’altruisme chez Rand), la dictature du « on » (avec Heidegger) ou la générosité et l’altruisme (avec Descartes), le rapport entre la violence et les passions. Sans oublier l’essentiel : présenter aux élèves une authentique œuvre d’art, un film à la fois représentatif de la production hollywoodienne et totalement hors norme… L’œuvre d’un artiste génial.∅ Jean-François Cazeaux

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Ayn Randprêtresse de l’objectivisme

– –Jean-François Cazeaux

Le Rebelle est adapté d’un roman d’Ayn Rand, La Source vive (!e Fountainhead). Ayn Rand a également écrit le scénario du film.

Alissa Zinovievna Rosenbaum est née le 2 février 1905 à Saint

Pétersbourg (Russie) dans une famille juive agnostique. Elle fait

des études de philosophie et émigre aux Etats-Unis en 1926. Elle travaille à

Hollywood comme scénariste et change son nom en Ayn Rand. Elle publie son premier roman, Nous les vivants, en 1936. La Source vive est son troisième livre et son premier grand succès : il s’est vendu à plus de 6 millions d’exemplaires.Elle enseigne la philosophie dans de nombreuses universités et développe ses propres théories, connues sous le nom d’objectivisme. Violemment anticommuniste, elle joue un rôle important dans la chasse aux sorcières à Hollywood (cf. ci-contre) et se fait le chantre du libéralisme et de l’individualisme. « Les partisans du capitalisme, du laisser faire, sont les seuls défenseurs des Droits de l’Homme », écrit-elle dans !e Objectivist Newsletter. Le titre de son ouvrage La Vertu d’égoïsme est significatif. Elle s’oppose clairement à toute forme d’organisation collective et dénonce l’altruisme comme une perversion. Elle exerce une grande influence aux États-Unis et dans certains groupes développant des idéologies libérales (en particulier les libertariens).Elle est morte à New York en 1982.

L’objectivismeL’objectivisme se décline en une métaphysique

(celle de la réalité objective) ; une épistémologie

(le primat de la raison) ; une éthique (celle de

l’accomplissement de l’égo et de son intérêt

propre) et une doctrine économique (le

capitalisme de laissez-faire). Il y a également trois

valeurs cardinales de l’objectivisme : la raison,

l’intentionnalité et l’estime de soi. Enfin,

l’objectivisme affirme la supériorité fondatrice du

droit de propriété à la base de tous les autres.

Les faits sont les faits, la réalité existe

indépendamment de notre perception des choses,

l’homme ne peut créer, inventer, altérer ou

formater la réalité, celle-ci existe objectivement en

dehors du jugement humain et ce dernier se doit

de s’exercer en fonction des prérogatives de la

réalité.

la doctrine économiqueLa doctrine économique des objectivistes est celle

du capitalisme de laissez-faire. Les objectivistes

sont des libertariens mais ils s’opposent aux

anarcho-capitalistes et sont pour un État-minimal

cantonné aux tâches régaliennes. Ce sont des

minarchistes. À noter qu’il est plus juste de dire

que les minarchistes objectivistes sont des

« randiens », en référence au fait qu’Ayn Rand

était en faveur d’un État-minimal assurant le droit.

Il existe des anarcho-capitalistes objectivistes

mais ne s’accordant pas avec la mère de

l’objectivisme sur ce point.

• « Prendre « n’importe quoi qui nous rende heureux » comme un guide d’action, signifie n’être guidé que par ses caprices émotifs. Les émotions ne sont pas des outils de connaissance. Être guidé par des caprices, c’est-à-dire par des désirs dont la source, la nature et la signification nous sont inconnues, c’est s’abaisser à devenir un automate dont le fonctionnement est laissé à la merci de démons inconnaissables (notre esprit ayant déclaré forfait), un automate qui n’arrête pas de frapper sa tête vide contre les murs de la réalité qu’il refuse de voir. » Ayn RAND : La Vertu d’égoïsme, chap. « L’éthique objectiviste », p. 73.

• « L’organisme n’a pas de choix : ce qui est requis pour sa survie est déterminé par sa nature, par le genre d’entité qu’il est. […] La vie d’un organisme est sa norme d’évaluation : ce qui la favorise est bon, ce qui la menace est mauvais. Ainsi le primat de la raison est une nécessité objective, l’homme agit pour sa survie selon sa nature, il détermine ses besoins en fonction de ce qu’il est, en fonction d’une réalité objective (d’où la légitimité du primat de la raison). L’Objectivisme nie l’existence du surnaturel et l’idée que les hommes peuvent survivre en tant qu’homme en se créant leur propre réalité. » Ibid, pp. 30-31.

EXTRAITS

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The Fountainhead est sorti dans les salles

américaines en juillet 1949, dans un

contexte bien particulier. Depuis 1947 en

effet, les États-Unis sont en pleine Chasse

aux sorcières – des sorcières rouges, bien

entendu –, avant même la spectaculaire

entrée en scène du sénateur du Wisconsin,

Joseph McCarthy, en février 1950. Pour les

États-Unis, la Seconde Guerre mondiale ne

se termine donc en août 1945 que pour

déboucher sur la Guerre froide, puis sur la

Guerre de Corée.

Comme de nombreux acteurs, permanents

ou occasionnels, de l’industrie du cinéma, la

romancière Ayn Rand a joué un rôle dans

cette affaire, rôle d’autant plus savoureux

qu’elle témoigne, lors de la première vague

d’auditions de la Commission des activités

anti-américaines 1, peu après Jack L.

Warner, patron des studios Warner – ceux-là

même avec qui Rand s’empoignera l’année

d’après, durant la préparation et le tournage

de The Fountainhead. Un épisode que relate

en détail Thomas Wieder dans son récent

ouvrage Les Sorcières de Hollywood :

Une adepte de la chasse aux sorcières

Washington, 20 octobre 1947. Le représentant républicain du New Jersey John Parnell Thomas (à gauche),

président de la commission des activités antiaméricaines, serre la main du producteur Jack L. Warner,

venu en témoin « amical » devant la commission.

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« À tout seigneur tout honneur, le premier témoin à entrer en scène est le patron d’un des plus grands studios de Hollywood, Jack L. Warner. Fidèle à sa réputation, le plus jeune et le plus extraverti des frères Warner fait de l’esbrouffe. Il met quiconque au défi de citer un seul film Warner qui soit « hostile » aux États-Unis, d'inspiration ou de tonalité communiste. Mission à Moscou ? Une simple œuvre de circonstance réalisée « dans le cadre de l'effort de guerre et en aucun cas pour la postérité ». À ses yeux, les communistes ne sont rien de moins que des « termites idéologues » qui se sont infiltrés au cœur des institutions américaines pour y semer des « germes subversifs ». De sorte qu'il s'est toujours donné pour règle de « tourner les talons dès qu'un rouge se présente », et jure ses grands dieux qu'il a déjà licencié douze communistes notoires. Enfin, prêt à toutes les surenchères pour donner des gages de son patriotisme, le producteur propose d'affréter un bateau pour emmener en URSS tous ceux que le système américain répugne...2 Après ce premier témoignage, qui donne le la, c'est au tour de Louis B. Mayer de prendre la parole. Le ton est plus policé, mais le fond est le même. « J'espère sincèrement que cette commission fera en sorte que le Congrès légifère pour réglementer, à l'échelle de la nation, l'embauche des communistes dans le secteur privé », fait savoir le patron de MGM. Je crois qu'on devrait leur interdire d'accéder au sanctuaire de la liberté puisqu'ils cherchent à le détruire. » Comme Warner sur Mission à Moscou, Mayer est sommé de s'expliquer sur Chant de Russie. « Bien sûr que le film était favorable à la Russie. C'est pour cela qu'on l'a fait. » Mais, comme Warner, il relativise la portée du film, « guère plus qu'une comédie musicale romantique et distrayante », et, n'eût été la musique de Tchaïkovski, l'histoire « aurait pu se passer en Suisse, en Angleterre ou n'importe où ailleurs ».Telle n’est pas l'opinion du témoin suivant, Ayn Rand, auteur de La Source vive, un best-seller sorti en 1943 et en passe d'être adapté au cinéma par Warner Bros., avec Gary Cooper (Le Rebelle, King Vidor,1949). La romancière excipe de sa connaissance de l'URSS – pourtant datée car, née à Saint-Pétersbourg, elle a émigré en 1926 – pour proposer une longue exégèse de Chant de Russie. Ce film, explique-t-elle, l'a littéralement « rendue malade ». Car il n'est que mensonge, du début à la fin, et elle en donne maints exemples. Il ment quand il montre de Moscou des immeubles opulents et un grand restaurant abondamment achalandé ; il ment encore quand il représente des paysans heureux, proprets et bien nourris, conduisant des tracteurs rutilants. Ayn Rand assure qu'elle n'a jamais vu de sa vie tant de gens arborer des sourires. Or « c'est un procédé bien connu de la propagande communiste que de montrer des gens en train de sourire. » Le message du film, conclut-elle, est qu'« il fait bon vivre dans un État totalitaire ».

Pendant toute sa déposition, la future théoricienne de l'« objectivisme » s'exprime avec toute l'autorité d'une experte en propagande. D'ailleurs, elle est en train de mettre la dernière main à un pamphlet que publiera quelques semaines plus tard l'Alliance du cinéma pour la préservation des idéaux américains. Intitulé Screen Guide for Americans (Guide du cinéma pour les Américains), ce vade-mecum est censé aider les cinéastes à se prémunir contre toute influence communiste. Le texte se lit comme une suite de commandements : « 1. Ne prenez pas la politique à la légère » ; « 2. Ne dénigrez pas la libre entreprise » ; « 3. Ne dénigrez pas les industriels » ; « 4. Ne dénigrez pas la richesse » ; « 5. Ne dénigrez pas le profit » ; « 6. Ne dénigrez pas le succès » ; « 7. Ne glorifiez pas l'échec » ; « 8. Ne glorifiez pas la dépravation » ; « 9. N'idéalisez pas l'homme du peuple », « 10. Ne glorifiez pas le collectivisme » ; « 11. Ne dénigrez pas l'individu indépendant » ; « 12. N'utilisez pas l'actualité à mauvais escient » ; « 13. Ne dénigrez pas les institutions américaines ». Le pamphlet s'achève par un réquisitoire sans appel : « Laissez [les communistes] créer leurs propres studios, si tant est qu’ils le puissent. Mais cessons de les laisser utiliser nos films, nos studios et notre argent pour revendiquer notre expropriation, notre asservissement et notre anéantissement. La liberté d’expression ne nous oblige pas à fournir un couteau à l’assassin qui veut nous trancher la gorge. »Thomas WIEDER : Les Sorcières de Hollywood. Chasse aux rouges et

listes noires, Éditions Philippe Rey, Paris, 2006, pp. 37-40.

1 Les auditions débutent le 20 octobre 1947.

2 Le compte rendu des auditions d'octobre 1947 se trouve dans

l'ouvrage de Gordon Kahn, Hollywood on Trial. The Story of the

Ten Who Where Indicted, New York, Boni and Gaer, 1948. De

nombreux extraits des auditions sont également consultables sur

le site internet http://historymatters.gmu.edii.

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À première vue, la scène du procès a pour objet de permettre à Roark (et donc à la scénariste Ayn Rand) de présenter ses thèses dans un cadre institutionnel. Mais Vidor par sa mise en scène dépasse ce propos réducteur ou délirant (au choix) et nous donne à voir tout autre chose. Examinons tout d’abord la transition entre cette scène et la précédente. Dans celle-ci, on pouvait voir Wynand seul sous la pluie ramassant dans un caniveau un exemplaire du Banner que des pieds anonymes venaient de piétiner. Le journal, vecteur des attaques démagogiques contre Roark, se délite dans ses mains. La symbolique, claire, est soulignée par la musique : d’abord des violons mélancoliques puis la reprise d’un leitmotiv dramatique qui nous amène à la scène suivante : le procès.Un fondu enchaîné nous fait pénétrer dans l’enceinte du tribunal. Un large mouvement de caméra fait découvrir la salle. Ce plan d’une vingtaine de seconde met en place un nouveau rapport de force, une nouvelle perspective. La foule, la masse grégaire, n’avait été, jusqu’alors, que très peu représentée : quelques badauds méchamment moqueurs témoins de la révolte dérisoire de Cameron au moment ou il déchire des exemplaire du Banner ; quelques lecteurs du Banner lors des campagnes de dénigrement, une assemblée applaudissant au

discours de Toohey, rédacteur du Banner, des passants sans visage piétinant le Banner. On remarque l’omniprésence du Banner, qui souligne son influence négative sur une foule incapable de penser par elle-même. Changement total de décor dans le tribunal. Roark va faire face a des citoyens et non plus à une foule sans tête, cible du Banner. Le début du plan montre une frise allégorique dominée par un aigle royal, emblème de la nation américaine, puis dans le même mouvement nous découvrons successivement le juge, le procureur, l’accusé à droite d’un cadre qui s’élargit sur les jurés et le public. Le plan unit le symbole républicain et l’assemblée tout entière, donnant à chacun des participants une dignité conforme à l’idée que se fait Vidor du peuple américain.La caméra isole ensuite un Roark solitaire face au jury. Nous allons, à partir de ce moment, épouser son point de vue, d’abord par un plan subjectif sur le jury et le procureur puis par un travelling qui l’accompagne jusqu'au moment où il prête serment avec en arrière plan une bannière étoilée. À la fin du travelling, Roark se plante devant le jury et, immobile, entame sa plaidoirie. Il ne va pas bouger d’un centimètre pendant l’intégralité de son discours, rigide comme ses principes. C’est par sa caméra et son montage que

Procès Analyse de séquence

– –Jean-François Cazeaux

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Vidor va s’intercaler entre le discours de Rand (le texte du dialogue, abrégé synthétique de celui du roman) et son personnage, et imposer un rythme et un point de vue. Au fil de la plaidoirie, des plans vont donner du sens aux paroles de Roark qui semble s’adresser aux principaux protagonistes du film : un travelling nous amène d’abord vers une Dominique subjuguée, puis nous découvrons dans le public Keating et Toohey, et enfin Wynand. Ces gros plans d’une grande sobriété dégagent pourtant une forte expressivité des sentiments (certains par effet Koulechov) : l’admiration et le désir chez Dominique, la honte chez Keating, le dépit chez Toohey, le remord et la détresse chez Wynand. Le discours prend ainsi une autre dimension, soulignée en creux par l’absence de musique dans un film où elle est par ailleurs omniprésente. L’idéologie de Vidor apparait clairement au moment où Roark fait explicitement l’éloge de l’individualisme et des valeurs américaines : « notre grand pays s’est bâti sur l’individualisme » […] « le droit de rechercher le bonheur », mais le plan des jurés, graves et attentifs, et celui, en contre-plongée du juge, qui manifeste clairement son intérêt, intègrent de fait au discours élitiste de Roark le common man, l’homme du peuple américain,

référence totalement absente dans le roman de Rand.

Vidor maitrise cette scène qui aurait du être dominée par un discours pseudo-philosophique non exempt de sophismes (voir par exemple l’intéressant glissement sémantique qui transforme le collectif en collectivisme). Fidèle à l’esthétique et au propos du Rebelle, il filme la verticalité et sa démesure (verticalité dans les cadres et la composition des plans : lignes verticales, jeux « vertical » de Gary Cooper), il filme des rapports humains exacerbés jusqu’au délire. Il filme surtout un artiste incompris parce que génial (plan de Roark en plongée avec en arrière-plan les reproductions de son œuvre) et des êtres dévorés par leurs passions. Loin de se laisser enfermer dans la simple expression d’un pamphlet politique, (c’était l’intention de Rand, qui dans le roman utilise la plaidoirie de Roark pour exprimer ses thèses), Vidor, en artiste génial, filme le procès comme un moment mélodramatique et contradictoire de ce « mélo flamboyant » qu’est Le Rebelle.∅ Jean-François Cazeaux

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