prolongement de courants positifs fermés à travers des variétés cr

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C. R. Acad. Sci. Paris, t. 330, Série I, p. 663–668, 2000 Analyse mathématique/Mathematical Analysis (Analyse complexe/Complex Analysis) Prolongement de courants positifs fermés à travers des variétés CR Stéphane RIGAT Institutionen för Fysik och Matematik, Mitthögskolan, S-851 70 Sundsvall, Sweden Courriel : [email protected] (Reçu le 13 décembre 1999, accepté après révision le 21 février 2000) Résumé. Soient Ω un domaine de C n . Soit M une variété CR dans Ω et T un courant positif fermé de bidimension (p, p) dans Ω r M. Le théorème bien connu d’El Mir–Sibony affirme que, moyennant l’hypothèse p > CR dim M +1, la masse de T est localement finie près de M et que, de plus, si p> CR dim M +1, alors le prolongement trivial e T de T à Ω est un courant positif fermé. Dans cette Note, nous montrons que nous pouvons affaiblir la condition portant sur la dimension CR pour la remplacer par la même condition portant sur le défaut de Levi def(M), un autre invariant biholomorphe introduit par Chirka, Pinchuk et Sukhov, et qui vérifie 1 6 def(M) 6 CR dim M. Cet invariant est un invariant d’ordre 2. En particulier, def(M) est petit par rapport à la dimension CR pour les variétés M qui ne sont pas Levi-plates. 2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS Continuation of closed positive currents accross CR manifolds Abstract. Let Ω be an open domain in C n . Let M be a CR-manifold in Ω and T be a closed positive current of bidimension (p, p) in Ω r M. The well-known El Mir–Sibony theorem asserts that, if p > CR dim M +1, then the mass of T is locally finite near M; moreover, if p> CR dim M +1, then the trivial extension e T of T to Ω is a closed positive current. In this Note, we show that we can weaken the last assumption by replacing the CR dimension by an another biholomorphic invariant, the Levi defect def(M), introduced by Chirka, Pinchuk and Sukhov, which satisfies 1 6 def(M) 6 CR dim M. This invariant is a second order invariant. In particular, def(M) is small in comparison with CR dim M for non- Levi-flat manifolds M. 2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS Abridged English version Let be a domain in C n and M be a generic C 2 -manifold of codimension m > 2 in . M can be represented in the form: M = z | ρ 1 (z )= ··· = ρ m (z )=0 , (1) Note présentée par Pierre LELONG. S0764-4442(00)00236-6/FLA 2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. 663

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Page 1: Prolongement de courants positifs fermés à travers des variétés CR

C. R. Acad. Sci. Paris, t. 330, Série I, p. 663–668, 2000Analyse mathématique/Mathematical Analysis(Analyse complexe/Complex Analysis)

Prolongement de courants positifs fermés à traversdes variétés CRStéphane RIGAT

Institutionen för Fysik och Matematik, Mitthögskolan, S-851 70 Sundsvall, SwedenCourriel : [email protected]

(Reçu le 13 décembre 1999, accepté après révision le 21 février 2000)

Résumé. SoientΩ un domaine deCn. SoitM une variétéCR dansΩ etT un courant positif ferméde bidimension(p, p) dansΩrM . Le théorème bien connu d’El Mir–Sibony affirme que,moyennant l’hypothèsep > CR dim M + 1, la masse deT est localement finie près deM et que, de plus, sip > CR dim M + 1, alors le prolongement trivialT deT à Ω estun courant positif fermé. Dans cette Note, nous montrons que nous pouvons affaiblir lacondition portant sur la dimensionCR pour la remplacer par la même condition portant surle défaut de Levidef(M), un autre invariant biholomorphe introduit par Chirka, Pinchuk etSukhov, et qui vérifie16 def(M)6 CR dim M . Cet invariant est un invariant d’ordre2.En particulier,def(M) est petit par rapport à la dimensionCR pour les variétésM quine sont pas Levi-plates. 2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicalesElsevier SAS

Continuation of closed positive currents accrossCR manifolds

Abstract. LetΩ be an open domain inCn. LetM be aCR-manifold inΩ andT be a closed positivecurrent of bidimension(p, p) in Ω rM . The well-known El Mir–Sibony theorem assertsthat, if p > CR dim M + 1, then the mass ofT is locally finite nearM ; moreover, ifp >CR dim M + 1, then the trivial extensionT of T to Ω is a closed positive current. Inthis Note, we show that we can weaken the last assumption by replacing theCR dimensionby an another biholomorphic invariant, the Levi defectdef(M), introduced by Chirka,Pinchuk and Sukhov, which satisfies16 def(M)6CR dim M . This invariant is a secondorder invariant. In particular,def(M) is small in comparison withCR dim M for non-Levi-flat manifoldsM . 2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicalesElsevier SAS

Abridged English version

Let Ω be a domain inCn andM be a genericC2-manifold of codimensionm > 2 in Ω. M can berepresented in the form:

M =z ∈Ω | ρ1(z) = · · ·= ρm(z) = 0

, (1)

Note présentée par Pierre LELONG.

S0764-4442(00)00236-6/FLA 2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. 663

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whereρj ∈C2(Ω) and∂ρ1(z)∧ · · · ∧ ∂ρm(z) 6= 0 onM . We setρ= (ρ1, . . . , ρm).Let Tz(M) denote the real tangent space toM at z ∈M and Hz(M) = Tz(M) ∩ iTz(M) denote

the complex tangent space. The complex dimension ofHz(M) is denoted byCR dim M ; for genericmanifolds, it does not depend onz ∈M and is equal ton−m.

We denote by〈·, ·〉 the euclidean scalar product onRm and bySm−1 the unit sphere inRm. For everyβ ∈ Sm−1, let us consider the largest complex dimensionsz(β) of the complex subspaces ofHz(M)included in the zero set of the functionHz(M) 3 w 7→ L(〈β, ρ〉(z))(w), whereL(〈β, ρ〉(z)) denotes theLevi form of the function〈β, ρ〉 at the pointz. For allα ∈ Sm−1, we putdz(α) = infsz(β) | β ∈ Sm−1 and〈α,β〉= 0 anddefz(M) = supdz(α) | α ∈ Sm−1. We call this number theLevi defectof the manifoldM in z. This number is a biholomorphic invariant ofM , which satisfies16 defz(M)6 CR dim M andcharacterizes the nondegeneracy of the Levi form ofM . For example, if the functionsρj are pluriharmonic,defz(M) reaches its maximal admissible value and is equal toCR dim M . On the other hand, ifdefz(M)is small in comparison withCR dim M , thenM has essentially non-trivial Levi form (cf . [16]).

Example1. – If M = (z,w) ∈ CN × CN | Rewj + |zj|2 = 0, j = 1, . . . ,N, thenCR dim M = Nanddef0(M) = 1.

Our theorem is the following:

THEOREM 2. – Let M be a genericC2-manifold of the form(1) in a domainΩ in Cn. Let T be aclosed positive current of bidimension(p, p) in Ω rM . Let us assume that, for allz ∈ M , we havedefz(M) 6 p − 1. Then the mass ofT is locally finite nearM . If moreoverdefz(M) < p − 1 for allz ∈M , then the trivial continuationT of T is closed inΩ.

In order to prove this statement, we use the following theorem (cf . [16]):

THEOREM 3. –Let M be a genericC2-manifold of the form(1) in Ω ⊂ Cn, thenM is (n − m −defz(M))-pseudoconcave, for allz ∈M , and so, for allz ∈M , there existsr > 0 and a finite number ofwedgesVj ⊂Rm such that the corresponding wedgesM(z, r, Vj) are (n−m−defz(M))-pseudoconcavein z and such thatB(z, r)rM =

⋃jM(z, r, Vj), whereB(z, r) denotes the ball of centerz and radiusr.

In order to prove our Theorem 2, we use Proposition 4 of [11] to show that the mass ofT is locally finitein every wedge. This implies that the mass ofT is locally finite nearM and that the trivial extensionTmakes sense. A careful estimate of the mass ofT on every wedge shows thatT is closed.

Introduction

Le lien entre courants positifs fermés et ensembles analytiques est maintenant bien connu. En effet, siXest un ensemble analytique complexe, on peut associer àX le courant positif fermé[X ] d’intégration surl’ensemble analytiqueX (cf . [7,8]) et, partant d’un courant positif ferméT , on peut revenir aux ensemblesanalytiques grâce au théorème de Siu [14].

Bishop a montré [2] que, siM est un sous-ensemble analytique dans un ouvertΩ deCn, etX un sous-ensemble analytique dansΩrM , de dimension purep et de volume localement fini au voisinage deM ,alorsX est un sous-ensemble analytique deΩ.

Ce résultat a ensuite été généralisé par Skoda [15] : siT est un courant positif fermé dansΩrM debidimension(p, p) et de masse localement finie au voisinage deM , alors l’extension trivialeT deT par0au-dessus deM est un courant positif fermé.

El Mir [5] et Sibony [13] ont ensuite montré que l’on pouvait supposer queM est seulement pluripolairecomplet. Puis, généralisant les travaux de Chirka [3] et Funahashi [6] (voir aussi Becker [1] et Shiffman[12]) qui avaient montré que,M étant une variétéCR de dimensionCR k etX un ensemble analytique deΩrM , l’hypothèsedim X > k+ 2 implique queX est un sous-ensemble analytique deΩ, ils ont montré

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que,T étant un courant positif fermé de bidimension(p, p), l’hypothèsep> k + 2, implique queT est demasse localement finie au voisinage deM et s’étend en un courant positif ferméT .

D’un autre côté, utilisant des invariants liés à la forme de Levi de la variétéM et non à sa dimensionCR (cf . [9,10,16] et [4]), Chirka, Pinchuk et Sukhov ont généralisé les résultats de Funahashi et Chirkaprécédemment cités. Le résultat le plus fort dans cette direction (cf . [16]) est le suivant : sid= defz(M)désigne le défaut de Levi de la variété CRM enz (invariant biholomorphe compris entre1 et la dimensionCR, et petit par rapport à la dimensionCR pour les variétésCR non Levi plates), et siX est un sous-ensemble analytique deΩrM de dimensionp, l’hypothèsep> d+2 implique queX est un sous-ensembleanalytique deΩ.

Dans cette Note, nous nous proposons donc de remplacer la condition portant sur la dimensionCR dansle théorème d’El Mir–Sibony par la condition analogue mais portant sur le défaut de Levi. L’ingrédientessentiel du théorème de Sukhov étant le théorème de Rothstein, nous utilisons la proposition 4 de [11](autre généralisation du théorème de El Mir–Sibony) comme un analogue du théorème de Rothstein pourles courants positifs fermés.

1. Rappels sur le défaut de Levi

Soit Ω un domaine deCn etM une variétéC2 générique de codimensionm > 2 dansΩ. M peut êtrereprésentée sous la forme :

M =z ∈Ω | ρ1(z) = · · ·= ρm(z) = 0

, (1.1)

oùρj ∈C2(Ω) et∂ρ1(z)∧ · · · ∧ ∂ρm(z) 6= 0 surM . On noteρ= (ρ1, . . . , ρm).SoientTz(M) l’espace tangent réel àM en z ∈M et Hz(M) = Tz(M) ∩ iTz(M) l’espace tangent

complexe àM en z. La dimension complexe deHz(M) sera notéeCR dim M ; pour les variétésgénériques, elle est indépendante dez ∈M et est égale àn−m.

Notons〈·, ·〉 le produit scalaire euclidien surRm et Sm−1 la sphère unité deRm. Pour toutβ ∈ Sm−1,considérons la dimension complexe maximalesz(β) des sous-espaces vectoriels complexes deHz(M)inclus dans l’ensemble des zéros de la fonctionHz(M) 3 w→ L(〈β, ρ〉(z))(w), où L(〈β, ρ〉(z)) désignela forme de Levi de la fonction〈β, ρ〉 au pointz. Pour toutα ∈ Sm−1, nous posonsdz(α) = infsz(β) |β ∈ Sm−1 et〈α,β〉= 0 puisdefz(M) = supdz(α) | α ∈ Sm−1. On appelle ce nombre ledéfaut de Levide la variétéM en z. Ce nombre est un invariant biholomorphe deM , compris entre1 et CR dim M etqui mesure le degré de « Levi-platitude » deM . Par exemple, si les fonctionsρj sont pluriharmoniques,defz(M) atteint sa valeur maximaleCR dim M . Réciproquement, sidefz(M) est petit par rapport àCR dim M , alors la forme de Levi de M est suffisamment « non dégénérée » [16].

Exemple1.1. – SiM = S2N−1 × S2N−1 ⊂ C2N , alorsCR dim M = 2N − 2 et def(M) = N − 1 entout point deM .

Exemple1.2. – SiM = (S3)N ⊂C2N , alorsCR dim M =N et def(M) = 1 en tout point deM .

2. Énoncé et démonstration du théorème

Notre théorème sera le suivant :

THÉORÈME 2.1. – SoitM une variétéC2 générique de la forme(1.1) dans un domaineΩ de Cn.Soit T un courant positif fermé de bidimension(p, p) dansΩ rM . Supposons que, pour toutz ∈M ,on ait defz(M) 6 p− 1, alorsT est de masse localement finie au voisinage deM . De plus, l’hypothèsedefz(M)< p− 1 pour toutz ∈M implique que le prolongement trivialT deT est fermé dansΩ.

En particulier, si l’on considère les ensembles décrits dans les exemples 1.1 et 1.2, on voit bien quela condition portant sur la bidimension du courantT pour que celui s’étende en un courant positif fermé

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S. Rigat

est moins restrictive dans notre théorème que dans le théorème d’El Mir–Sibony. Ceci montre que le faitque la dimensionCR soit arbitrairement grande par rapport à la bidimension du courantT n’est pas unobstacle pour le prolongement deT en un courant positif fermé si la forme de Levi est suffisamment « nondégénérée ».

La démonstration va se faire en deux étapes. Tout d’abord, rappelons quelques définitions et résultatsissus de [16].

DÉFINITION 2.2. – Une variétéC2 génériqueM de la forme (1.1) est appeléek-pseudoconcaveenz ∈M si et seulement si0 est élément de l’enveloppe convexe conique de l’ensemble desα ∈ Sm−1 telsque la forme de Levi de〈α, ρ〉 ait au minimumk valeurs propres strictement positives surHz(M).

DÉFINITION 2.3. – SoitV un cône ouvert deRm etV ∗ son cône conjugué, c’est-à-dire queV ∗ = α ∈Rm | 〈α,β〉 > 0, ∀β ∈ V . Soit r > 0. On noteM(z, r, V ) (et on appelledomaine standard) un domainede la forme :

M(z, r, V ) =ζ ∈Cn | |z − ζ|< r et ρ(ζ) ∈ V

.

Nous dirons queM(z, r, V ) estk-pseudoconcaveenz ∈M si et seulement siM estk-convexe enz dansla direction d’unσ ∈ V ∗r 0, i.e. la forme de Levi de〈σ, ρ〉 a au minimumk valeurs propres strictementpositives surHz(M).

Nous avons alors le théorème suivant (cf . [16]) :

THÉORÈME 2.4. – Si M est une variétéC2 générique de la forme(1.1) dansΩ ⊂ Cn, alorsM est(n − m − defz(M))-pseudoconcave, pour toutz ∈ M , et donc, pour toutz ∈ M , il existe r > 0 etun nombre fini de cônesVj ⊂ Rm, j = 1, . . . ,N , tels que les domaines correspondantsM(z, r, Vj) sont(n−m−defz(M))-pseudoconcaves enz et tels queB(z, r)rM =

⋃Nj=1M(z, r, Vj), oùB(z, r) désigne

la boule de centrez et de rayonr.

Première étape: fixonsz ∈M . Pour montrer que la masse deT est bornée au voisinage dez, il suffit,d’après le théorème 2.4, de prouver que la masse deT est bornée dans chaqueM(z, r, Vj) au voisinagede M . Pour cela, nous suivons la preuve de la proposition 2.5 de [16]. Soient doncj ∈ 1, . . . ,Net σj ∈ V ∗j r 0 tels que la forme de Levi de〈σj , ρ〉 ait au moins(n − m − defz(M)) valeurspropres strictement positives surHz(M). Il existe une constanteCj > 0 telle que la forme de Levi deφj = 〈σj , ρ〉 + Cj

∑mk=1 ρ

2k ait au moins(n − defz(M) − 1) valeurs propres strictement positives sur

l’espace tangent complexe à l’hypersurfaceζ ∈ B(z, r) | φj(ζ) = 0 enz. On adφj = 〈σj + 2Cj ρ, dρ〉,et donc l’hypothèseσj ∈ V ∗ r 0 implique quedφj 6= 0. En particulier, il existeλj > 0 tel que la formede Levi deψj = exp(λjφj) − 1 ait (n − defz(M)) valeurs propres strictement positives surCn. SoitDj(r) = ζ ∈ B(z, r) | ψj(ζ) > 0 ; on aM(z, r′j, Vj) ⊂ Dj(r

′j) pour r′j > 0 suffisamment petit. Une

démonstration analogue à la preuve du lemme 7, p. 164–166, de [11] nous donne directement le fait quela masse deT est bornée au voisinage deM , car le complémentaire deM sera la réunion desDj(r

′j),

ψj est strictement(defz(M) + 1)-convexe surDj(r′j) avecp > defz(M) + 1, et que par construction,

la restriction deψj est strictement plurisousharmonique sur un espace vectoriel complexe de dimensioncomplexe(n− defz(M)) transverse à l’hypersurfaceψj = 0.

Deuxième étape: montrons que le prolongement trivialT deT est fermé. Puisque le problème est local,on peut supposer queΩ = B(z, r), oùr sera le plus petit desr′j . Considéronsu= maxψ1, . . . , ψN. Alorsu est strictement positive, de classeC2 sur une réunion d’ouvertsWj telle que le complémentaire de cetteréunion soit la réunion finie des sous-ensembles fermésψi = ψj pour i 6= j. Sur chaqueWj , u est declasseC2 et strictement(defz(M) + 1)-convexe. Pour montrer queT est fermé, il suffit de montrer quepour toute(p− 1, p)-formeϕ, on a〈∂T ,ϕ〉= 0. Pour cela, soitχ :R→ [0,1] une approximation régulière

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Prolongement de courants positifs fermés

de l’indicatrice de l’ensemble[1,+∞[ . Il suffit de montrer que

limν→∞

∫ΩrM

T ∧ χ(νu)∂ϕ= 0.

Supposons tout d’abord, que la masse deT soit nulle surΩr(⋃

jWj

); il suffit donc d’établir que :

limν→∞

∫Wj

T ∧ χ(νu)∂ϕ= 0. (2.1)

Pour cela, on procède comme pour la démonstration de la proposition 4 de [11]. En faisant commedans la première partie de la preuve, par tranchage, on montre (cf . [11], p. 166–170) que l’hypothèsep > defz(M) + 1 implique (2.1). Pour terminer la preuve du théorème 2.4, il reste à modifier légèrementlesψj de façon à ce que les sous-ensembles fermésψi = ψj soient sans masse pourT . Pour cela, onprocède comme pour la démonstration du lemme 3.3 dans [13]. Soitρ une fonction positive plate surMtelle queM = ρ−1(0). Posons pourλ ∈ R, ρj,λ = ψj + jλρ. En restreignantΩ, et en prenantλ0 > 0suffisamment petit, pour toutλ ∈]0, λ0[ , les fonctionsρj,λ sont strictement(defz(M) + 1)-convexes. Deplus, pour tous lesi < j ∈ 1, . . . ,N, siλ 6= λ′, alorsρi,λ = ρj,λ∩ ρi,λ′ = ρj,λ′=M . En particulier,∑

λ∈]0,λ0[

‖T ‖(ρi,λ = ρj,λrM

)6 ‖T ‖(ΩrM)<+∞,

ce qui implique que ∑λ∈]0,λ0[

∑i<j

‖T ‖(ρi,λ = ρj,λrM

)<+∞,

soit encore, qu’il existeλ> 0 tel que∑i<j

‖T ‖(ρi,λ = ρj,λrM

)= 0,

ce qui termine la preuve du théorème.On obtient donc les corollaires suivants :

COROLLAIRE ([5,13]). –Soit M une variétéC2 générique de la forme(1.1) dans un domaineΩde Cn. Soit T un courant positif fermé de bidimension(p, p) dansΩ rM . Supposons que, pour toutz ∈M , on ait CR dim M 6 p− 1, alorsT est de masse localement finie au voisinage deM . Si de plus,CR dim M < p− 1, alors le prolongement trivialT deT est fermé dansΩ.

Démonstration. –Le corollaire est une conséquence directe de l’inégalitédefz(M)6CR dim M . 2COROLLAIRE ([16]). – SoientM une variétéC2 générique de la forme(1.1)dans un domaineΩ deCn

etX un ensemble analytique complexe de dimensionp dansΩ rM . Supposons que, pour toutz ∈M ,p− 1> defz(M), alors la fermetureX deX est un ensemble analytique deΩ.

Démonstration. –La preuve est classique : soitT = [X ] le courant d’intégration surX . C’est un courantde bidimension(p, p) positif fermé dansΩrM . D’après le théorème 2.4, le courantT est positif fermédansΩ. SoitA= z ∈ Ω : ν(T , z)> 1, où ν(T , z) désigne le nombre de Lelong du courantT . D’aprèsun théorème de Siu [14], l’ensembleA est un ensemble analytique fermé. OrX ⊂A, d’où

X ⊂A⊂ supp T =X,

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S. Rigat

ce qui prouve queX =A est un ensemble analytique fermé.2Remerciements.Je remercie vivement A.B. Sukhov pour avoir attiré mon attention sur ce problème ainsi que pour

ses indications.Je remercie B. Coupet pour d’utiles remarques sur le contenu de cette Note.Enfin, cette Note a été rédigée pendant mon séjour à l’Institutionen för Fysik och Matematik de Sundsvall. Je tiens

tout particulièrement à remercier Urban Cegrell, Anders Fällström et Ragnar Sigurdsson pour leur hospitalité.

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