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UNODC/ED/2 8 avril 2003 Français Original: Anglais Le Directeur exécutif “Progrès encourageants dans la réalisation d’objectifs encore lointains” Rapport intérimaire du Directeur exécutif: contribution à l’examen à mi-parcours (2003) des objectifs fixés à la vingtième session extraordinaire de l’Assemblée générale V.03-82492

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UNODC/ED/28 avril 2003

Français Original: Anglais

Le Directeur exécutif

“Progrès encourageants dans la réalisation d’objectifs encore lointains”

Rapport intérimaire du Directeur exécutif: contribution à l’examen à mi-parcours (2003) des objectifs fixés à la vingtième session extraordinaire

de l’Assemblée générale

V.03-82492

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“Progrès encourageants dans la réalisation d’objectifs encore lointains”

Rapport intérimaire du Directeur exécutif: contribution à l’examen à mi-parcours

(2003) des objectifs fixés à la vingtième session extraordinaire de l’Assemblée générale

Page

I. Le contexte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

II. Des progrès encourageants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

A. Héroïne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

B. Cocaïne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

C. Cannabis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

D. Stimulants de type amphétamine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

III. Vers des objectifs encore lointains. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

A. Instruments . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

B. Un paysage nouveau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

C. Les défis à relever . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

IV. Tenir le cap . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

Annexe

Production illicite d’opium dans le monde, 1990-2002 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

Tendances de la culture du cocaïer dans le monde (1985-2002) . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

Trafic de feuille de cannabis 2000-2001: étendue et tendances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

Trafic de stimulants de type amphétamine (hormis l’ecstasy) 2000-2001: étendue et tendances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

Trafic d’ecstasy (MDA, MDEA, MDMA) 2000-2001: étendue et tendances . . . . . . . . . 18

Principales drogues posant problème (en fonction de la demande de traitement) à la fin des années 1990 (mis à jour en 2003) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

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“Progrès encourageants dans la réalisation d’objectifs encore lointains”

Éléments pour l’examen à mi-parcours (2003) des objectifs fixés à la vingtième session extraordinaire de l’Assemblée générale

I. Le contexte

En 1998, l’Assemblée générale a, à sa vingtième session extraordinaire, lancé un appel pour que des progrès appréciables soient réalisés dans la réduction de la production, du trafic et de l’abus de drogues illicites dans le monde en l’espace de 10 ans. Le présent document est une contribution à l’examen à mi-parcours (en 2003) qui doit permettre de déterminer si la communauté internationale est en voie d’atteindre ces objectifs.

La situation mondiale en ce qui concerne les drogues peut être décrite comme suit:

1. Abus de drogues

Ces dernières années, les actions menées en vue de réduire l’abus de drogues illicites ont certes permis des avancées, mais ces résultats encourageants sont tempérés par des signes alarmants, l’importance relative de ces deux aspects étant fonction du type de drogue et de la région considérés. La stabilisation, voire la régression, de l’abus d’héroïne et de cocaïne enregistrés dans certains pays donnent des raisons d’espérer que des succès plus importants sont possibles. Pour ce qui est de la consommation de drogues de synthèse, il est difficile de dresser le tableau de la situation mais les tendances sont préoccupantes. La consommation de cannabis est en hausse. Tout cela s’accompagne d’un phénomène dangereux qui s’étend désormais d’Europe orientale au Pacifique Nord: la progression de l’infection par le VIH et du sida attribuable à la consommation de drogues par injection. L’énorme problème que posent le VIH et le sida en Afrique n’est pas aussi manifestement imputable à cette pratique.

2. Culture et production

La culture du cocaïer régresse, d’où une diminution de la quantité de produit fini. La culture du pavot à opium est elle aussi en déclin et se déplace d’une région d’Asie à une autre, mais la production reste stable en volume. L’Afghanistan est de nouveau le premier producteur d’opium, tandis que la production a diminué en Asie du Sud-Est. Du cannabis est produit sur tous les continents, en des quantités difficiles à déterminer. On ne sait pas grand chose des lieux où sont fabriquées les drogues de synthèse illicites (stimulants de type amphétamine) ni de la quantité produite, mais la production commence à s’étendre au-delà des centres traditionnels d’Amérique du Nord, d’Europe et d’Asie de l’Est.

3. Différences régionales

Bien qu’elles soient moins marquées que par le passé, de grandes tendances ressortent clairement: les opiacés sont les drogues dont il est le plus fait abus en Europe, en Asie et en Océanie; en revanche, c’est la cocaïne qui vient au premier rang dans les Amériques (et, de plus en plus, en Europe); les stimulants de type amphétamine sont consommés surtout en Asie de l’Est et du Sud-Est et, dans une moindre mesure, en Amérique du Nord et en Europe. Le cannabis, enfin, est consommé partout, mais c’est en Afrique que ses conséquences sont les plus graves.

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Tout ceci montre bien que, pour atteindre les objectifs encore lointains que l’Assemblée générale a fixés à sa vingtième session extraordinaire, il faut adopter des politiques qui maximisent l’efficacité des interventions menées en coopération. Les ressources actuellement consacrées à la prévention et aux activités de détection et de répression à l’échelle de la planète (de l’ordre de 50 milliards de dollars) ont permis de circonscrire à quelques dizaines de milliers par an dans le monde le nombre de décès liés aux drogues. L’action collective a épargné à l’humanité les souffrances et la charge financière qu’engendre l’abus du tabac: 20 millions de morts par génération et des dépenses s’élevant à 500 milliards de dollars. Cela étant, la position morale acquise après un siècle de contrôle des drogues doit s’accompagner, dans les faits, de progrès correspondants. Réaliser les objectifs des conventions relatives au contrôle de drogues – c’est-à-dire assurer la disponibilité des drogues à des fins médicales et en freiner le trafic ainsi que l’usage à d’autres fins – exige aujourd’hui encore plus de concertation, d’imagination et de souplesse.

L’expérience que l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) a acquise de longue date dans le domaine de la lutte contre le problème des drogues illicites permet d’affirmer ce qui suit:

1. Les politiques de contrôle des drogues sont efficaces

Les résultats ne sont peut-être pas toujours aussi rapides ni systématiques qu’on le voudrait, mais on dispose d’éléments suffisants pour dire que, dans des conditions satisfaisantes, les pays peuvent maîtriser le problème de la drogue: en effet, sur le long terme, l’évolution de l’abus est à l’image de l’évolution des politiques. Les politiques les plus efficaces sont celles qui concilient les mesures visant à réduire la demande et celles visant à réduire l’offre, notamment par des activités de détection et de répression et par la coopération judiciaire.

2. La réduction de la demande est efficace

Mais il faut du temps. Si certains pays s’emploient depuis un moment à réduire la demande, la coopération internationale dans ce domaine n’en est qu’à ses balbutiements. De fait, ce n’est qu’avec l’adoption de la Déclaration sur les principes fondamentaux de la réduction de la demande de drogues par l’Assemblée générale à sa vingtième session extraordinaire, il y a cinq ans, qu’ont été fixées des normes internationales en la matière. Il n’en reste pas moins que l’on dispose déjà de nombreux éléments indiquant que la prévention, le traitement et la réinsertion donnent des résultats et, surtout, qu’elles ont un coût de substitution bien moindre que les activités de détection et de répression.

3. Les activités de substitutions sont efficaces

Tout porte à croire que l’offre de drogues peut être maîtrisée si l’on agit effectivement sur le problème premier: la pauvreté des petits cultivateurs. Partout où poussent le pavot à opium et le cocaïer, les cultivateurs préfèrent opter pour des moyens de subsistance licites lorsque le rapport risque/rendement s’aligne sur une loi fondamentale de l’économie: pour gagner beaucoup, il faut prendre beaucoup de risques. C’est pourquoi les actions de détection et de répression doivent à la fois dissuader les cultivateurs et perturber le trafic. Il s’agit, à long terme, d’étendre les activités de substitution à toutes les régions de production d’opium et de coca, et ce à une plus grande échelle que jusqu’à présent. Il faut pour cela que les États fassent preuve de volonté politique et que les organismes multilatéraux d’aide au développement et les institutions financières mettent des ressources à disposition.

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4. La coopération internationale est efficace

À mesure que des pays maîtrisent les cultures illicites ou font reculer la consommation d’une drogue illicite donnée, les cultures se déplacent vers une autre région où le respect de la loi est moins strict. Ce déplacement, qui concerne en particulier la production, fait que les succès enregistrés dans des pays donnés ne peuvent se traduire par un gain net au niveau mondial. Le contrôle des drogues ne peut avoir d’effet à l’échelle planétaire que si tous les pays agissent dans le cadre commun du droit international. Ce cadre est fixé par les trois conventions relatives au contrôle des drogues et il est complété par les objectifs et plans d’action que l’Assemblée générale a adoptés à sa vingtième session extraordinaire.

L’établissement du présent rapport en vue de l’examen à mi-parcours de 2003 s’est ressenti de l’insuffisance des données. Les statistiques relatives aux drogues varient en qualité et en quantité, notamment pour ce qui est de l’épidémiologie: c’est là un point faible notoire, et, bon nombre de données faisant défaut ou n’étant pas comparables, les tendances sont difficiles à évaluer. L’une des avancées obtenues à la vingtième session extraordinaire est que l’on a pris conscience qu’il était impératif de mener une action mondiale pour observer, collecter et systématiser les données, en vue de dresser une carte plus précise du problème de la drogue illicite. Les États sont invités à aller de l’avant afin d’acquérir toutes les données dont ils ont besoin pour élaborer leurs politiques.

II. Des progrès encourageants

Ces dernières années, on a observé, sur les principaux marchés des drogues illicites à la fois des progrès encourageants et des signes alarmants, selon le type de drogue et la région considérée. Dans l’ensemble, l’évolution des marchés mondiaux de l’héroïne et de la cocaïne donne à espérer que d’autres succès sont possibles. Le tableau est mitigé s’agissant des drogues de synthèses et assez négatif pour ce qui est du cannabis.

A. Héroïne

L’ONUDC estime qu’environ 13 millions de personnes dans le monde s’adonnaient à l’opium et à l’héroïne à la fin des années 1990. Bien qu’on ait peu de raisons de penser que ce chiffre soit très différent aujourd’hui, les données lacunaires dont on dispose ne permettent pas de suivre précisément l’évolution, d’une année sur l’autre, de la demande illicite mondiale de ces deux substances. L’impression de relative stabilité que donne à première vue le marché mondial de l’héroïne depuis la fin des années 1990 peut être corroborée par l’évolution de l’offre, pour laquelle on dispose de données plus solides. Environ 4 400 tonnes d’opium ont été illicitement produites en 1998. Quatre ans plus tard, en 2002, la situation était sensiblement la même.

La stabilité de la production cache d’importantes réorientations sur le plan géographique. À l’échelle mondiale, les surfaces consacrées à la culture illicite du pavot à opium ont diminué de 25 %, et plus encore au Myanmar et en République démocratique populaire lao. Or, la production ayant très fortement augmenté en Afghanistan, pays où le rendement est élevé, la production mondiale est demeurée globalement stable.

Les déplacements de la production et du trafic sur le plan régional remodèlent les grandes tendances de l’abus d’héroïne dans le monde. Alors que certains succès ont été affichés en Europe occidentale, la situation s’est détériorée dans plusieurs pays situés le long des itinéraires de trafic de l’héroïne en provenance d’Afghanistan (Asie du Sud-Ouest, Asie centrale, Fédération de Russie et Europe orientale).

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S’agissant toujours de l’abus d’héroïne, les perspectives pour la période à venir n’interdisent pas un optimisme modéré, à condition que les États agissent ensemble et de manière résolue. Si on l’aide à poursuivre sur sa lancée, l’Asie du Sud-Est pourrait bien devenir d’ici à 2008 une région où la production illicite d’opium est peu importante. Un succès aussi considérable mettrait fin à un chapitre centenaire dans l’histoire du contrôle des drogues.

En Afghanistan, la tâche est redoutable. Il y a un quart de siècle, ce pays ne produisait guère d’opium; c’est dire que la production d’opium à grande échelle n’y a pas de racines historiques ou socioéconomiques si profondes qu’elles ne puissent être extirpées dans un délai réaliste. Il sera certes difficile d’en venir à bout, mais la marche à suivre est claire: l’Afghanistan doit d’abord viser la stabilité politique, la sécurité intérieure et le relèvement de son économie. Au-delà de l’appui direct à la reconstruction de l’économie, il faudra opérer des interventions probantes pour faire reculer l’intérêt économique, pour les paysans, de cultiver du pavot à opium sur les meilleures terres, aux dépens des cultures traditionnelles (licites) pour lesquelles l’Afghanistan était autrefois réputé.

En Asie centrale, en Fédération de Russie, en Europe orientale et dans les États baltes, où l’héroïne afghane est en progression, la consommation de drogues par injection risque de provoquer une catastrophe en matière de santé publique si l’infection par le VIH et le sida se propagent au-delà du cercle restreint des toxicomanes. Aux actions de détection et de répression qui visent à mettre fin au trafic d’héroïne doivent être associées des actions de prévention et de traitement pour que l’abus continue de régresser en Europe occidentale et qu’une éventuelle épidémie transmise par voie sanguine soit jugulée.

Pour résumer, on aura des raisons d’être modérément optimiste si la communauté internationale parvient à:

• Réduire la production d’opium en Afghanistan;

• Maintenir la régression de la production en Asie du Sud-Est;

• Contenir la progression de l’abus d’héroïne (et de l’épidémie de VIH/sida qui lui est associée) en Europe orientale, en Fédération de Russie et en Asie centrale.

B. Cocaïne

Il ressort systématiquement des dossiers d’hospitalisation que c’est l’abus d’héroïne qui a les conséquences les plus graves pour la santé, suivi par l’abus de cocaïne. Les États font-ils des progrès dans le contrôle de l’offre et de la demande? À cette question, on répondra, avec prudence, par l’affirmative, en particulier pour ce qui est de l’offre.

Parmi les trois pays andins qui sont des fournisseurs de cocaïne, la Bolivie occupe désormais une place presque marginale et le Pérou est parvenu à réduire de près des deux tiers la culture du cocaïer par rapport à 1995. Certes, ce n’est pas sans difficultés que ces deux pays cherchent à conforter ce recul et à éliminer totalement les cultures illicites, mais globalement ils contribuent désormais pour moins d’un cinquième à la production mondiale de cocaïne.

Le grand problème se situe en Colombie, où la production de cocaïne à partir de la culture locale a en gros quintuplé entre 1993 et 1999. Depuis lors, ce pays est à l’origine de près des trois quarts de la cocaïne illicitement produite dans le monde. Un fait mérite toutefois d’être signalé: en 2002, pour la deuxième année consécutive, par inversion de la tendance relevée sur huit ans, la Colombie est parvenue à faire reculer sensiblement la culture du cocaïer, comme l’atteste, depuis 2000, une baisse impressionnante de 37 %, ce qui offre la perspective de priver le marché de la cocaïne de milliards de dollars.

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Des signes positifs sont également observés à l’autre bout de la chaîne. En Amérique du Sud, l’abus paraît stable. Aux États-Unis d’Amérique, qui est le premier marché de cocaïne du monde, des enquêtes menées récemment auprès d’élèves et d’étudiants montrent que le nombre des toxicomanes a diminué de 15 % depuis 1998 et de 60 % depuis 1985.

Toutefois, comme pour l’héroïne, certaines informations donnent à penser que le marché se déplace. Si l’essentiel du trafic de cocaïne se déroule encore dans les Amériques, on observe qu’il progresse en Europe occidentale. La part de cette dernière dans les saisies mondiales de cocaïne a presque doublé entre 1998 et 2001, passant de 8 % à plus de 15 %. Les données sur la consommation font apparaître les mêmes tendances. La majorité des pays d’Europe occidentale ont signalé une augmentation de l’abus de cocaïne en 2001 et certains d’entre eux en 2002 également.

La situation varie d’un pays à l’autre en Amérique centrale et dans les îles des Caraïbes, mais elle a en général tendance à s’aggraver. L’abus progresse, en partie sous l’effet du trafic. Cette région étant prise en étau entre les deux grandes régions de production et de consommation, la criminalité et le blanchiment d’argent liés à la drogue font également des progrès, au détriment des activités licites.

Pour résumer, l’on a des raisons de penser qu’un rétrécissement irréversible des marchés mondiaux de cocaïne au cours des cinq prochaines années est possible à condition que la communauté internationale conjugue ses efforts pour:

• Enrayer la propagation de l’abus de cocaïne en Europe et dans la Fédération de Russie;

• Consolider le recul de l’abus enregistré aux États-Unis d’Amérique;

• Aider les pays d’Amérique centrale et des Caraïbes à résister à l’afflux de drogues illicites et de l’argent dégagé du trafic de stupéfiants;

• Réduire encore la culture du cocaïer dans les pays andins au moyen d’une aide accrue aux activités de substitution.

C. Cannabis

Le cannabis reste la drogue illicite la plus communément produite, la plus couramment consommée et celle faisant l’objet du trafic le plus répandu, à telle enseigne que l’évolution des marchés internationaux de cette substance se présente sous un jour peu encourageant pour les organismes de contrôle de drogues.

Étant donné l’absence presque totale de systèmes de surveillance (l’ONUDC entreprend tout juste son premier projet à cet égard), on ne dispose pas d’évaluations fiables de la production. La progression des saisies et les signes indiquant une augmentation de la consommation donnent à entendre, toutefois, que la production est également en hausse.

Dans presque toutes les régions on signale que l’abus du cannabis progresse, y compris en Afrique, où il reste la drogue la plus consommée. Les deux tiers environ des 86 pays qui ont fait rapport à l’ONUDC en 2002 ont indiqué que l’abus de cette substance augmentait, ce que confirment des saisies plus importantes (en progression de 40 % depuis 1998).

Il convient d’établir une distinction entre la résine de cannabis et l’herbe de cannabis. Les données sur les saisies semblent indiquer que le trafic de résine est relativement stable et, l’on constate que les trois quarts des saisies se font en Europe occidentale. Les saisies d’herbe expliquent l’augmentation mentionnée ci-dessus, et l’on observe que, en 2001,

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60 % de toutes les saisies ont été effectuées dans les Amériques. Les plus fortes hausses en matière de saisies ont été relevées en Afrique (un quart de toutes les saisies, contre 10 % en 1998-1999), ce qui dénote à la fois une extension des cultures pratiquées et un durcissement des mesures de répression.

Enfin, les saisies de plants de cannabis – qui sont un indicateur des efforts déployés par les pouvoirs publics pour éliminer les champs de cannabis – semblent diminuer, ce qui signifie peut-être que certains pays attribuent une priorité moins importante à l’éradication du cannabis.

On relève néanmoins quelques tendances encourageantes. Aux États-Unis d’Amérique, par exemple, l’abus de cannabis (prévalence annuelle) a diminué en 2002 parmi les élèves du secondaire, affichant une baisse de près de 10 % par rapport à 1997 et de quelque 30 % par rapport à la fin des années 1970.

Il est difficile de dire avec précision comment évoluera le problème du cannabis. Les données sont insuffisantes et les politiques divergent. Les stratégies suivies par certains pays creusent l’écart entre la lettre et l’esprit des conventions relatives au contrôle des drogues et soulèvent des questions de fond qui sont abordées plus bas. Certains pays en développement, en particulier en Afrique, ont à maintes reprises exprimé leurs préoccupations face aux politiques qu’ont récemment décidées certains pays développés en matière de cannabis, et qui compromettent les mesures de contrôle des drogues.

Pour résumer, le problème du cannabis soulève des questions de fond auxquelles la communauté internationale doit répondre, car:

• Le cannabis est la drogue illicite la plus communément produite, la plus couramment consommée et celle faisant l’objet du trafic le plus répandu;

• Il semble que la production et l’abus aient tendance à progresser;

• Les mesures que certains États ont prises (sur le plan administratif ou législatif) ont exacerbé le débat;

• De nombreux pays en développement, notamment en Afrique, ont été contraints d’employer les maigres ressources dont ils disposent pour endiguer les conséquences de ces mesures.

D. Stimulants de type amphétamine

Les stimulants de type amphétamine sont des drogues synthétiques qui englobent l’amphétamine, la méthamphétamine et l’ecstasy, chimiquement apparentées. Contrairement aux drogues traditionnelles issues de plantes, ils sont fabriqués dans des laboratoires qu’il est facile de dissimuler, et avec des produits chimiques qu’il est facile de se procurer, d’où l’extrême difficulté à déterminer aussi bien le lieu de production que l’ampleur et l’évolution de la production.

Les saisies de laboratoires et de produits finals, de même que les données recueillies sur l’abus, montrent que le marché des stimulants de type amphétamine continue de se développer. Ces dernières années, des laboratoires ont été découverts et démantelés, dans le monde entier, dans des proportions jamais atteintes auparavant, en particulier aux États-Unis d’Amérique. Toutefois, ce marché est aussi un marché fluctuant, en partie pour échapper aux mesures prises par les organismes de contrôle, en partie en raison de la dynamique des modes d’abus.

Ces dernières années, le trafic de la méthamphétamine, qui représente l’essentiel du marché, s’est nettement développé en Asie de l’Est et du Sud-Est. Toutefois, depuis 2001 les saisies ont diminué, peut-être grâce aux contrôles plus stricts qui s’exercent sur

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l’éphédrine (l’un des principaux précurseurs), et aux premiers succès remportés dans la réduction de la production illicite de méthamphétamine en Chine.

En 2000, près de 90 % de tous les pays ayant fait état de trafic de méthamphétamine avaient mentionné une hausse. En 2001, par contre, ce pourcentage est tombé à 52 %. Le Japon, l’un des marchés les plus lucratifs d’Asie de l’Est, a indiqué que l’abus s’était stabilisé en 2001, après avoir progressé pendant plusieurs années. En revanche, la Thaïlande, qui est touchée par les importations massives en provenance du Myanmar, pays limitrophe, a saisi les plus grandes quantités de méthamphétamine à l’échelle mondiale en 2001.

L’Europe reste le principal centre de production illicite et de trafic d’amphétamine. En Europe occidentale, les saisies ont atteint un pic vers 1998 avant d’afficher une tendance à la baisse, mais la production et le trafic ont continué de progresser en Europe orientale. Peut-être faut-il voir là un déplacement de la production vers cette région et aussi une demande moins soutenue en Europe occidentale. Alors que la moitié de tous les pays d’Europe occidentale avaient signalé une hausse de l’abus en 2000, cette proportion est tombée à 33 % en 2001.

Le trafic d’ecstasy a fortement augmenté tout au long des années 1990 en Asie du Sud-Est, en Afrique australe, au Proche et au Moyen-Orient et, en particulier, dans les Amériques. En 2001, toutefois, les saisies ont diminué, principalement en Amérique du Nord et en Europe occidentale. Au milieu des années 1990, les pays d’Europe occidentale entraient dans 80 % environ de l’ensemble des saisies; en 2000 et 2001, ce pourcentage est tombé à 50 % environ. La progression de la consommation ralentit en Europe occidentale et l’abus a fléchi, pour la première fois depuis des années, aux États-Unis d’Amérique. Cela dit, il semble que l’abus de cette substance s’intensifie en Asie et, dans une moindre mesure, en Afrique.

Pour contrer le problème des stimulants de type amphétamine, il faut faire preuve d’une grande détermination et prendre plusieurs mesures. Avant tout, il faut rassembler davantage de données factuelles: les données sur la fabrication, le trafic et l’abus de ces substances sont encore très lacunaires. L’ONUDC met actuellement sur pied une enquête mondiale pour déterminer sur quoi les efforts doivent porter. Le contrôle des précurseurs, parallèlement aux mesures visant à faire obstacle aux détournements, offre un moyen efficace de contrôler les stimulants de type amphétamine. Les États doivent en particulier étendre aux stimulants de type amphétamine leurs programmes de réduction de la demande, sinon il ne sera jamais possible de réduire l’offre.

Pour résumer, la lutte contre le problème des stimulants de type amphétamine doit passer par des efforts concertés visant à:

• Combler les lacunes dans les données sur la production, le trafic et l’abus de ces substances;

• Étendre et intensifier le contrôle des précurseurs;

• Intensifier les mesures tendant à réduire la demande de ces stimulants et à améliorer les services de traitement dans le monde entier;

• Veiller, en particulier en Asie, à ce que la cupidité dont font preuve les trafiquants de drogues synthétiques ne se substitue à la pauvreté qui amène des paysans à cultiver le pavot à opium, et éviter que cette rapacité devienne le principal moteur des agissements illicites dans la région.

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III. Vers des objectifs encore lointains

Le débat ministériel de la session de la Commission des stupéfiants, qui doit se tenir au printemps 2003, a été convoqué pour dresser un bilan, cinq ans après la vingtième session extraordinaire de l’Assemblée générale. Il importe donc de jeter un regard sur ces dernières années avant de se pencher sur l’avenir, et de prendre conscience des réalisations obtenues sur le plan des politiques.

A. Instruments

Outre les divers plans d’action qui ont été adoptés, il est clair, rétrospectivement, que plusieurs objectifs ont été atteint lors de la vingtième session extraordinaire. Premièrement, la Déclaration sur les principes fondamentaux de la réduction de la demande de drogues énonce des normes internationalement acceptées en vue de réduire la demande de drogues illicites, comblant ainsi une lacune du régime international de contrôle des drogues. Les conventions, en effet, avaient été expressément conçues pour régir essentiellement le contrôle de l’offre et laissaient aux législations nationales le soin de régir le contrôle de la demande. Ce n’est qu’à compter de l’adoption de la Déclaration, par l’Assemblée, à sa vingtième session extraordinaire, que la “démarche équilibrée” est devenue réaliste. C’est sur cette toile de fond que l’ONUDC a, à la fin 2002, élaboré l’une de ses principales Priorités opérationnelles: équilibrer, dans ses opérations, les aspects relatifs à l’offre et ceux relatifs à la demande, en insistant nouvellement sur la prévention, la sensibilisation et le traitement.

Deuxièmement, l’Assemblée, à sa vingtième session extraordinaire, a nouvellement insisté sur l’élaboration d’instruments destinés à mesurer l’évolution du problème de la drogue, de sorte à obtenir un corpus fiable de données factuelles permettant d’évaluer l’effet des grandes orientations suivies. Étonnamment, on manque en effet de données solides et comparables sur la production illicite, le trafic et l’abus de drogues. Les déclarations et plans d’action adoptés à la vingtième session extraordinaire fixent des objectifs, des jalons et des délais qui exigent que l’on normalise les données relatives à la drogue, que l’on harmonise les indicateurs et que l’on améliore les normes de communication de l’information. Un ensemble de données de meilleure qualité, grâce auquel on pourra mesurer les évolutions et les tendances au fil du temps, constituera une base factuelle à partir de laquelle on pourra définir les politiques à suivre en matière de drogues, notamment d’ici à l’échéance de 2008.

Troisièmement, l’Assemblée, à sa vingtième session extraordinaire, a décidé que les États tout comme l’ONU devaient veiller à ce que les politiques, les programmes et les projets soient évalués de manière objective. La large place faite aux pratiques optimales et à la distinction entre ce qui porte ses fruits et ce qui ne donne pas de bons résultats permet de reproduire en d’autres endroits des politiques qui ont fait leurs preuves et de mettre un terme à celles qui ne sont pas probantes.

B. Un paysage nouveau

Si les États ont depuis longtemps fait la preuve qu’ils étaient résolument en faveur du contrôle des drogues, le paysage dans lequel s’inscrivent les politiques en matière de drogues a changé. L’opinion publique comme la société civile, en effet, jouent un rôle de plus en plus grand dans l’élaboration des politiques. Il convient de noter cinq aspects saillants qui caractérisent ce nouvel environnement.

Premièrement, l’opinion publique mondiale est bien plus consciente qu’auparavant des dangers que pose l’abus de drogues et de ses conséquences, qu’elle contribue à mettre

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en évidence. De la sorte, les pouvoirs publics sont engagés à faire de la lutte contre le trafic et l’incivilité une priorité. De fait, de nombreux sondages d’opinion font apparaître que les drogues, la criminalité et le terrorisme font partie d’un tout articulé. Cela a aidé les pouvoirs publics, comme le montrent les rapports préparés pour la présente réunion, à décider de prendre des mesures plus résolues en vue de réduire l’abus de drogues et de traiter les toxicomanes, tout en mettant un frein au trafic. C’est sur cette toile de fond que l’ONUDC a récemment défini une autre de ses Priorités opérationnelles: traiter de façon intégrée les questions intéressant la drogue et le crime.

Deuxièmement, il faut constater, depuis quelque temps, une opposition, parfois violente, entre: i) l’opinion publique, qui s’oppose radicalement à toute tentative de sous-estimer la gravité du problème de la drogue, et ii) la propagation, dans certains pays, d’un état d’esprit permissif en faveur du droit d’abuser des drogues. Cette attitude de laissez-faire, qui conduit à l’autodestruction, semble contredire la mobilisation aux niveaux tant individuel qu’institutionnel contre le tabagisme. De fait, on a récemment assisté à un événement qui fera date dans l’histoire de la santé publique: l’issue des négociations en vue de l’adoption, à l’OMS, d’une convention-cadre pour la lutte antitabac, l’objectif étant de réduire l’incidence des maladies qui accompagnent le tabagisme et le nombre des décès qui s’ensuivent. Les appels sporadiques au réexamen (en fait, à l’assouplissement) de la législation régissant le contrôle des drogues ne cadrent guère avec les objectifs déclarés des États Membres: préserver les générations actuelles et à venir du fléau du nicotinisme – alors même que le tabac est une substance licite. Lorsque le tabagisme s’est propagé, voici plusieurs centaines d’années, un consensus international du genre de celui qui a permis, au XXe siècle, l’adoption des traités relatifs au contrôle des drogues était impensable. Et pourtant, malgré les dizaines de millions de décès imputables au tabagisme, la société déplore toujours l’absence d’un contrôle du tabac.

Troisièmement, l’efficacité des mesures relatives au contrôle des drogues – qu’elles concernent la demande ou l’offre – doit être observée et constamment évaluée, l’opinion publique escomptant, à juste titre, des progrès conformes à la résolution inébranlable des États Membres de résoudre le problème mondial de la drogue grâce à des stratégies nationales et internationales, comme énoncé dans la Déclaration politique adoptée à l’issue de la vingtième session extraordinaire de l’Assemblée générale, en 1998. Le public s’attend à des progrès non seulement sur le front national: il surveille de près les répercussions qu’ont, au plan international, les législations nationales. Ainsi, les pays d’où proviennent les matières premières qui servent à fabriquer des drogues illicites, pays qui luttent pour contrer la menace que représentent pour eux le trafic et l’abus de drogues au plan intérieur, voient leur action en faveur d’une réduction de l’offre contrecarrée par la consommation persistante dans d’autres pays et par les appels à la libéralisation lancés dans les régions de grande consommation. L’opinion publique mondiale veut être assurée que les fonds investis dans la prévention, le traitement et, tout particulièrement, la détection et la répression, d’une importance tout à fait considérable, ont de plus en plus d’effets. L’on ne peut donc que regretter que les États ne se soient pas tous dotés d’instruments en vue d’évaluer les progrès accomplis et de mesurer l’efficacité de leurs interventions.

Quatrièmement, la notion de réduction des risques est devenue un champ de bataille et de récrimination, ce qui perpétue un débat de moins en moins constructif. D’une manière générale, on pense que la réduction des risques concerne la demande. En fait, cette notion englobe beaucoup plus que la seule demande. Toutes les mesures de contrôle des drogues – y compris celles parrainées par l’ONUDC – ont pour objet la réduction des risques, puisqu’elles visent à réduire les effets nocifs de la production, du trafic et de l’abus de drogues. Ainsi, les conventions qui régissent l’offre de drogues – autorisant ces substances à des fins médicales mais en interdisant l’usage à d’autres fins – participent elles aussi à la réduction des risques. La répression, qui permet de condamner les

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trafiquants, contribue à réduire les risques qui se posent à la société. Les activités de substitution, qui aident les paysans à se détourner des cultures illicites, sont elles aussi des mesures qui permettent de réduire les risques, et qui, de plus, atténuent les dégâts écologiques imputables à la culture du pavot à opium et du cocaïer. On peut avoir des opinions diverses quant à l’importance relative des politiques et des ressources allouées aux divers éléments du contrôle des drogues, mais ce débat ne peut être utile que si l’on s’abstient de toute position idéologique et que l’on se fonde uniquement sur des données factuelles. Pour ce qui est des principes directeurs, il appartient à l’Organe international de contrôle des stupéfiants de se prononcer sur la compatibilité des mesures de réduction des risques avec les dispositions des conventions.

Enfin, il faut poursuivre très activement l’étude scientifique des usages médicaux possibles du cannabis. Il n’existe pas à l’heure actuelle de données scientifiques suffisantes pour justifier l’inscription de cette substance à la pharmacopée, alors que les effets du cannabis sur le long terme sont attestés. S’ils se révèlent utiles à des fins médicales, les produits dérivés du cannabis devraient faire l’objet d’un traitement identique à celui des autres produits médicaux, c’est-à-dire être considérés comme des préparations pharmaceutiques prescrites pour certains symptômes selon des doses et des normes déterminées. Il ne faudrait pas que la reconnaissance des propriétés médicales de quelque substance psychoactive que ce soit ouvre la voie à sa consommation à des fins récréatives, sinon la société finirait par en déplorer l’abus, tout comme elle déplore à présent le tabagisme.

C. Les défis à relever

S’il est vrai que les gouvernements tout comme les opinions publiques ont impulsé un nouvel élan aux politiques en matière de drogues, il n’en reste pas moins que des sujets de préoccupation demeurent. Ces sujets, exposés ci-après, constituent les principaux défis à relever:

a) La prévalence de l’abus des drogues, bien qu’en recul dans certaines régions, progresse dans d’autres. Si une certaine drogue devient moins accessible, elle est remplacée par une ou plusieurs autres substances. En particulier, il semble que la polytoxicomanie, dont les effets multiples sur la santé sont préoccupants, se répande;

b) Comme il est d’usage dans une économie de marché, la pression (demande) ne donne pas toujours lieu au recul des cultures et de la production illicites (offre): celles-ci ne font que se déplacer. Elles se déplacent parfois au sein d’une même région, d’un pays vers un autre où le respect de la loi est moins strict. Les mesures d’incitation au développement par la diversification des cultures et l’activité licite n’ont pas toujours reçu l’appui qu’elles exigeaient. Les appels lancés par l’Afrique, l’Amérique latine et l’Asie aux institutions de développement et aux banques multilatérales demeurent insistants: à mesure que les collectivités rurales abandonnent leurs activités illicites, il faut les aider à persévérer dans la légalité. Conscient de cet aspect, l’ONUDC a adopté l’une de ses principales Priorités opérationnelles: inscrire les questions concernant la drogue et le crime dans le contexte du développement durable;

c) Les drogues de synthèse, et particulièrement les stimulants de type amphétamine, ont fait prospérer les marchés dans les années 1990. Il s’agit peut-être là d’un marché tout à fait nouveau, qui attire de nouveaux usagers, mais il se peut aussi qu’il remplace le marché classique des stupéfiants d’origine végétale. Les données ne permettent pas de trancher, car elles ne sont pas assez nombreuses pour que l’on puisse évaluer l’importance relative de ces deux aspects. Le grand danger réside dans le fait que les stimulants de type amphétamine attirent les jeunes consommateurs et que les marges de profit des producteurs et des trafiquants sont considérables. Il se pourrait bien que l’abus

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de ces substances devienne dans un avenir proche l’aspect le plus grave du problème de la drogue;

d) Dans plusieurs régions, l’abus de drogues par injection a donné lieu à la propagation spectaculaire des infections transmises par voie sanguine, de l’infection par le VIH et du sida à l’hépatite C – une maladie incurable venant tragiquement s’ajouter aux tourments de l’abus chronique. Une fois que l’infection se propage au-delà du cercle des usagers injecteurs, l’ensemble de la population est exposée au risque d’une pandémie de VIH/Sida;

e) Les modalités du trafic de drogues sont devenues encore plus complexes et s’entremêlent à d’autres formes de trafic: trafic d’armes, traite d’êtres humains, contrefaçon et contrebande. Il est arrivé que ce phénomène mette en danger la stabilité même de certaines sociétés, minant des avancées en matière de développement et de stabilité politique obtenues à grand prix. Le trafic de drogues et la criminalité, en ce qu’ils pèsent tous deux sur le maintien de la paix et le règlement des conflits, exacerbent les crises humanitaires;

f) Le profit tiré du narcotrafic, parfois si grand qu’il atteint une dimension macro-économique, s’est profondément enraciné dans l’économie licite, les trafiquants pouvant se permettre d’offrir à des fonctionnaires corrompus des incitations impossibles à contrer. Il n’est sans doute aucun autre domaine où la corruption a autant contrecarré les efforts de prévention et d’interception;

g) Au cours du demi-siècle écoulé, la criminalité organisée a étendu son emprise sur les marchés de la drogue. Depuis une dizaine d’années environ, on a vu apparaître aussi sur ces marchés des groupes de terroristes. Ces derniers se contentaient, au début, de protéger les cultures, la production et le trafic en échange de fonds au moyen desquels ils achetaient les armes et payaient les services dont ils avaient besoin. Mais ils se sont bientôt adonnés eux-mêmes au trafic. La lutte contre le trafic de drogues et contre le blanchiment de l’argent recoupe donc souvent la guerre contre le terrorisme, et inversement.

IV. Tenir le cap

Pour relever les défis exposés ci-dessus, il faut pouvoir compter sur la volonté résolue de tous. On trouvera indiqués ci-après certains axes de réflexion quant à ce que les États et l’ONU pourraient entreprendre au cours des cinq années à venir pour réaliser les objectifs que l’Assemblée générale a fixés à sa vingtième session extraordinaire.

Pour ce qui est de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime – qui n’est qu’un organisme aux effectifs limités devant faire face à des tâches ardues – ce sont les États Membres, par la voix des ministres qui les représentent ici, qui décideront des orientations à suivre. Pour notre part, nous continuerons à faire de notre mieux pour nous acquitter de notre responsabilité publique. En 2002-2003, nous avons passé en revue nos opérations de sorte à déterminer notre conduite pour l’avenir. Les conclusions de cet examen ont été présentées dans le document intitulé “Priorités opérationnelles: lignes directrices pour le moyen terme”. Ces nouvelles priorités sont les suivantes:

• Traiter de façon intégrée les questions intéressant la drogue et le crime;

• Inscrire les questions concernant la drogue et le crime dans le contexte du développement durable;

• Maintenir un équilibre entre les activités de prévention et de répression;

• Choisir les opérations sur la base des connaissances et d’une vision stratégique;

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• Contribuer à mettre en place des institutions pour promouvoir les meilleures pratiques internationales;

• Optimiser les ressources pour tirer parti de la force des partenariats.

Les trois premières devraient conduire à réorienter complètement les travaux de l’Office, une large place étant faite à l’intégration des problèmes (drogue et crime), de manière équilibrée (offre et demande), et en axant les efforts sur la viabilité des résultats obtenus (développement durable). Les autres priorités sont d’ordre programmatique et opérationnel et visent à tirer parti de la force des connaissances (l’Office s’employant sans répit à devenir le dépositaire des données et des connaissances en matière de drogues et de criminalité) et des pratiques optimales (particulièrement pour ce qui est de la prévention et du traitement), les ressources étant optimisées au moyen de partenariats.

L’ONUDC ne dispose que de ressources très modiques, qui ne sont ni stables ni prévisibles. Ces ressources sont si précisément destinées à des fins particulières que la réalisation des Priorités opérationnelles risque d’être sérieusement entravée. En revanche, les groupes de pression qui militent en faveur de la libéralisation des drogues et de styles de vie réceptifs à la drogue ont à leur disposition des sommes de loin plus importantes que celles accordées à l’ONUDC.

La tâche des États, sur les plans tant individuel que collectif, est clairement définie.

Continuer d’assurer le bon fonctionnement du régime de contrôle des drogues et l’enrichir au XXIe siècle est une tâche importante, qui exige avant tout et impérativement que l’on réaffirme le multilatéralisme. Le problème de la drogue est un problème international. Dans ce monde intégré qui est le nôtre, toute politique ou action menée à l’échelle nationale ne peut qu’avoir des incidences au-delà des frontières. Si nous acceptons que la production, le trafic et l’abus de drogues sont des phénomènes mondiaux – ce que confirme le fait que la production et la consommation existent dans l’hémisphère Nord et dans l’hémisphère Sud – il faut alors convenir que des politiques et des mesures unilatérales ne sont pas de nature à être efficaces au plan mondial. Le régime multilatéral de contrôle des drogues est un capital politique des plus précieux, que les États se sont accordés à enrichir progressivement depuis un siècle. S’il faut y apporter des modifications, ce ne devrait être qu’au moyen d’outils multilatéraux: par des consultations internationales et une action collective. Les mesures unilatérales ne feront que compromettre ce régime, conçu pour être un jeu à somme positive pour les parties contractantes.

Certes, il n’est pas toujours facile de concilier intérêts nationaux et intérêts internationaux: une norme internationale ne saurait rendre compte de nuances régionales ou nationales. Il est d’autant plus difficile de concilier ces intérêts lorsqu’il s’agit du problème de la drogue que c’est un phénomène qui suscite l’émotivité et qui touche à la vie de personnes, de familles et de collectivités dans le monde entier. La seule manière d’aller de l’avant est de faire systématiquement appel aux données empiriques et de relayer les vues de la société civile au moyen de cet outil démocratique qui permet aux États Membres de s’exprimer dans des instances internationales comme la présente.

En conclusion, il nous incombe à tous, au sein des Nations Unies, de tirer parti de l’occasion que nous offre cet examen à mi-parcours pour renouveler notre détermination à dépenser les fonds publics de façon plus efficace et produire des biens publics de meilleure qualité. Alors que le contrôle des drogues entre dans son deuxième siècle, nous devons être conscients que nous le devons à ceux dont le nom est inscrit dans les premiers mots de la Charte: Nous, peuples des Nations Unies.

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TENDANCES DE LA CULTURE DU COCAÏER DANS LE MONDE (1985-2002)

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