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Pratiques de conservation des sols : mesure des impacts sur la structure du sol Mikael Guillou agr. M.Sc. MAPAQ DAEDD INPACQ Grandes Cultures 4 février 2015

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Pratiques de conservation des sols : mesure des impacts sur la

structure du sol

Mikael Guillou agr. M.Sc.

MAPAQ DAEDD

INPACQ Grandes Cultures 4 février 2015

Collaborateurs

Isabelle Breune, AAC Lennoxville

François Chrétien, AAC Québec

Isabelle Couture, MAPAQ Montérégie Est

Stéphanie Durand, CCAE Estrie

Johannie Goulet, MAPAQ Montérégie Est

Santé des sols : définition et indicateurs

Effet de pratiques optimales sur la structure du sol

Essais 2013-2014

Cultures de couverture intercalaires

Semis direct vs labour

Mise en perspective : résultats de recherche

Plan de présentation

Définition :

« Capacité d’un sol à produire des denrées agricoles ou sylvicoles de façon durable tout en limitant les impacts sur l’environnement et la santé des êtres vivants »

(Sarrantonio et Gallandt, 2003)

Santé des sols

Facteurs en jeu

Santé des sols

Climat Pluviométrie Température

Nature et couverture du

sol Végétation Géologie Drainage

Ruissellement

Qualité du sol

Activités anthropiques

Usage du sol Méthodes de gestion

Intrants Économie de marché Politiques agricoles

Adapté de Arshad et Coen, 1992

Les bénéfices d’un sol en santé :

Augmentation de l’infiltration de l’eau Réduction du ruissellement, de l’érosion Bonne exploration du sol par les racines Meilleure efficacité des engrais organiques Meilleure productivité

La santé d’un sol peut être menacée par :

L’érosion La compaction L’acidification L’excès d’eau La dégradation de ses propriétés chimiques et biologiques

Santé des sols

Indicateurs : Biologiques :

Carbone organique Matière organique Activité microbienne et respiration Enzymes Azote potentiellement minéralisable Biomasse de vers de terre

Chimiques :

pH Éléments nutritifs Conductivité électrique

Physiques :

Texture du sol Stabilité des agrégats Battance Masse volumique Infiltration Capacité de rétention d’eau (Sarrantonio et Gallandt, 2003; Soil Health Assessment USDA)

Qualité des sols

Essais sur 2 ans et total de 7 sites

Mesures réalisées au champ,

peu coûteuses et intégrant tous

les aspects de la qualité des sols

Essais 2013-2014

Les cultures de couverture intercalaires ou le semis direct améliorent-ils les propriétés physiques

du sol de façon mesurable ?

Mesure de la masse sèche de sol à partir de cylindres

Combine l’effet de la texture du sol et de sa porosité

Masse volumique apparente / porosité

Perméamètre de Guelph

Mesures de la capacité du sol à infiltrer l’eau

Infiltration de l’eau en profondeur

Eijkelkamp, 2011

Simulateur de pluie de Cornell

Mesures de l’intensité d’infiltration de surface, du ruissellement et de sa turbidité

Ruissellement et infiltration de surface

0,00

0,10

0,20

0,30

0,40

0,50

0,60

0,70

0,00 5,00 10,00 15,00 20,00 25,00 30,00

Inte

nsi

té (

cm/m

in)

Temps (min)

Simulateur de pluie - parcelle labour 3

Pluviométrie Ruissellement Infiltration de surface

Ruissellement et infiltration de surface

Intensité de pluie = 0.4 à 0.5 cm/min = 240 à 300 mm/heure Durée des tests = 20 à 30 minutes

Poivrons 2014

Tomates 2013

Maïs ensilage 2014

Cultures de couverture intercalaires

Résultats attendus :

Améliorer la porosité du sol et l’infiltration de l’eau

Réduire l’érosion hydrique

Améliorer la portance du sol lors des récoltes (maraîchage)

Choix des CC : Ray Grass ou seigle d’automne

Semis de printemps

Croissance rapide mais limitée pour éviter la compétition avec la culture principale

Conditions de croissance difficiles : compétition pour l’eau, la lumière (maïs), compaction (maraîchage)

2014 : implantation très difficile du seigle (75 mm de pluie en 4 jours après le semis)

Cultures de couverture intercalaires

Site Région Année Sol Culture principale

Culture de couverture

Taux de semis

(kg/ha) et

date

Répétitions

Durée de vie à la

prise de mesures (jours et

date)

Biomasse aérienne

sèche (kg/ha) et date

#1 Mont. Est 2013 Loam Tomate Ray Grass Ray Grass

Témoin

59 35

5 juin

5 51 26 juil

105 18 sept

ND

#2 Mont. Est 2014 Loam Melon Ray Grass Seigle

Témoin

110 325

3 juin

4 94 5 sept

1440 840

30 juin

#3 Mont. Est 2014 Sable à loam

sableux

Poivron Ray Grass Seigle

Témoin

175 240

11 juin

5 72 22 août

ND

#4 Estrie 2014 Argile limone

use

Maïs ensilage

Ray Grass 15

20 juin

5 82 10 sept

1038 3 nov

Essais de cultures de couverture

Masse volumique apparente MVA (g/cm3)

1,2

1,3

1,4

1,5

1,6

1,7

1,8

#1 Tomate #2 Melon #3 Poivron #4 Maïsensilage

MV

A (

g/c

m3)

Ray Grass 0-6 Seigle 0-6 Témoin 0-6

Ray Grass 10-16 Seigle 10-16 Témoin 10-16

NS

Mesures en juillet 2013 (#1), août 2014 (#3) et septembre 2014 (#2 et 4)

* A

B

NS NS

NS NS

NS

Site #1, Tomates, mesures en juillet et septembre 2013

Masse volumique apparente

Profondeur d’enracinement du Ray Grass 26 juillet = 10 cm

*

*

↓6%

↓6%

Conductivité hydraulique – infiltration en profondeur (cm/heure)

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

1,2

1,4

1,6

1,8

2

#1 Tomate #2 Melon #3 Poivron #4 Maïsensilage

Infi

ltra

tio

n (

cm/h

)

Ray Grass 10-15 Seigle 10-15 Témoin 10-15

Ray Grass 20-25 Seigle 20-25 Témoin 20-25

NS

Mesures en juillet 2013 (#1), août 2014 (#3) et septembre 2014 (#2 et 4)

* A B NS NS

NS NS NS

NS

Conductivité hydraulique

* A

Site #1, Tomates, juillet 2013

11 fois plus d’infiltration

B

Ruissellement et infiltration de surface (cm/min)

0

0,05

0,1

0,15

0,2

0,25

0,3

0,35

0,4

#2 Melon #3 Poivron #4 Maïs ensilage

Infi

ltra

tio

n e

t ru

isse

lle

me

nt

(cm

/min

)

Ray Grass Ruissellement Seigle Ruissellement Témoin Ruissellement

Ray Grass Infiltration Seigle Infiltration Témoin Infiltration

NS

Mesures en août 2014 (#3) et septembre 2014 (#2 et 4) Intensité de pluie utilisée comme covariable

NS

Tendance NS

NS

NS

NS

Turbidité du ruissellement (NTU)

0

20

40

60

80

100

120

#2 Melon #4 Maïs ensilage

Turb

idit

é d

u r

uis

sell

em

en

t (N

TU

)

Ray Grass Seigle Témoin

Mesures en septembre 2014 (#2 et 4) Site #3 : pas de mesures car chlorophylle !

* A

B

Tendance NS

B

Site #2, Melon, 5 septembre 2014

Turbidité du ruissellement

Ray Grass

Témoin

La qualité d’implantation des CC intercalaires explique les résultats 2013 : tomate

Bonne implantation du Ray Grass ↓ MVA; ↑ perméabilité

2014 : maïs ensilage, poivron, melon Implantation difficile du seigle (pluviométrie) et moyenne du Ray Grass Effets non mesurables sur le sol

Conditions de croissance difficiles :

ombrage en maïs, compétition pour l’eau circulation intensive en maraîchage

Fauchage : 3 fois par an en maraichage donc cultures tuteurées et entre rangs larges

requis (1.5 m)

Turbidité : Effet très positif des couvertures de sol pour réduire les pertes de sol

Bilan des essais cultures de ouverture intercalaires

Source CC et période de semis

Culture suivante

MVA Porosité Infiltration Stabilité des agrégats,

DMP

Taille des agrégats

Caroline du Nord Wagger et al. 1989

Automne Blé

Vesce

Maïs grain NS NS NS

Iowa Kaspar et al. 2001

Automne Avoine Seigle

Maïs grain ↑19% seigle 1 an sur 3

Virginie Ess et al. 1998

Automne Seigle

+ 5 passages de tracteur

↓ 3% ↑ 18% NS

Ontario Dapaah et Vyn, 1998

Automne Radis

Printemps avec blé ou orge

Ray Grass, trèfle rouge

Maïs grain ↑ 6% DMP Ray Grass

Québec (*) N’Dayegamiye et Tran,

2002

Printemps, sans culture Trèfle rouge, sarrasin

moutarde, millet japonais

Blé NS ↑ 19% agrégats > 0.25 mm

Québec N’Dayegamiye et al.,

2014A

Printemps, sans culture ou en intercalaire Légumineuses

Maïs grain ou blé

NS ↑ 11% agrégats >5 mm

NS pour intercalaires

Québec N’Dayegamiye et al.,

2014B

Printemps, sans culture ou en intercalaire d’orge

Légumineuses

Maïs ensilage

NS NS

Tour d’horizon Effet des CC sur la structure du sol

(*) effet cumulé de 2 enfouissement de CC

Culture de couverture d’hiver :

↓ 42 à 63% du ruissellement de surface

↓ 59 à 92% de l’érosion du sol

Tour d’horizon Effet des CC sur l’érosion

Bilan de 10 ans (1938-1947) Sable loameux, Pente 3% Cultures : Pois/tomates/maïs sucré Engrais verts : • semés en août (raygrass-vesce) ou

octobre (seigle) • labouré en mars-avril New Jersey (Brill and Neal, 1950)

Les fortes pluies (> 50 mm/h) ont lieu en juin à septembre

Facteur pouvant expliquer l’effet limité des CC sur le sol : le tassement par la machinerie agricole

L’effet négatif de la circulation de machinerie surpasse

largement l’effet bénéfique des CC

Circulation de machineries : tassement systématique du sol ↑ MVA

↓ porosité

↓ infiltration de l’eau Caroline du Nord, loam sableux fin (Wagger et al. 1989)

Iowa, loam (Kaspar et al. 2001)

Virginie, loam limoneux (Ess et al. 1998)

Compaction et CC

Photo : Myriam Gagnon

Compaction et CC

Virginie, loam limoneux

Semis du seigle en novembre

mesures de MVA en mai

0, 1, 3 ou 5 passages de tracteur

4.7 T/essieu

0

5

10

15

20

25

30

1,2

1,25

1,3

1,35

1,4

1,45

1,5

0 1 2 3 4 5 6

% m

acro

po

rosi

MV

A (

g/c

m3)

Nombre de passages de tracteur

MVA témoin MVA seigle

Macroporosité témoin Macroporosité seigle (Ess et al. 1998)

CC : importance du système racinaire

Semis direct vs labour

Résultats attendus :

Améliorer la porosité du sol et l’infiltration de l’eau

Protéger contre l’érosion hydrique

Réduire les coûts de production

Particularité :

La structure du sol s’améliore par

l’activité microbienne, la faune du sol

l’action des racines

la protection par les résidus de culture

Facteurs pas complètement contrôlés !!

Semis direct vs labour

(Omafra, 1997)

Il faut 3 à 4 ans aux vers de terre pour modifier fortement la structure d’un sol

Vers de terre et structure du sol

Nouveau Brunswick

4 sites sableux et limoneux

Couverts forestiers

« lâcher » de vers de terre en forêt en 1940 par les services forestiers

→ appâts pour la pêche

Pas de vers de terre en 1958

Sites colonisés par les vers de terre en 1961-1962

Langmaid, 1963

1958 1961

Site Région Type de sol Année N° années en semis

direct

Culture principale

N° de rep

#1 Mont. E Argile Rideau 2013 8 Maïs grain 9

#2 Mont. E Argile Sainte Rosalie 2013 4 Maïs grain

6

#3 Centre du Québec

Loam sableux fin Des Saults

2014 2 Maïs ensilage

9

Semis direct vs labour

Choix des sites :

Semis direct implanté depuis 2, 4 ou 8 ans

Masse volumique apparente MVA (g/cm3)

1,2

1,25

1,3

1,35

1,4

1,45

1,5

1,55

1,6

1,65

1,7

#1 - 8 ans #2 - 4 ans #3 - 2 ans

MV

A (

g/c

m3)

SD 0-6 Labour 0-6 SD 10-16

Labour 10-16 SD 20-26 Labour 20-26

NS

Mesures en juillet 2014 (#3), août à septembre 2013 (#1, 2)

** A

B

NS NS

NS

NS

Tendance NS NS *** A

B

Conductivité hydraulique – infiltration en profondeur (cm/heure)

0

0,05

0,1

0,15

0,2

0,25

0,3

0,35

0,4

0,45

0,5

#1 - 8 ans #2 - 4 ans #3 - 2 ans

Infi

ltra

tio

n (

cm/h

eu

re)

SD 10-15 Labour 10-15 SD 20-25 Labour 20-25

Mesures en juillet 2014 (#3), août à septembre 2013 (#1, 2)

NS

NS NS

NS

Tendance NS ** A

B

Ruissellement et infiltration de surface (cm/min)

0

0,05

0,1

0,15

0,2

0,25

0,3

#3 - 2 ansRu

isse

lle

me

nt

et

infi

ltra

tio

n (

cm/m

in)

SD Ruissellement Labour Ruissellement

SD Infiltration Labour Infiltration

Mesures en juillet 2014 (#3) Intensité de pluie utilisée comme covariable

* A

B

* A

B

Turbidité du ruissellement (NTU)

0

50

100

150

200

250

300

350

400

#3 - 2 ans

Turb

idit

é (

NT

U)

Semis direct Labour

Mesures en juillet 2014 (#3)

* A

B

2014, site #3, Loam sableux fin Des saults, SD 2 ans

Couverture par les résidus de soya : Labour = 0%; SD = 24 %

Turbidité du ruissellement

Semis direct Labour

0

2

4

6

8

10

12

14

16

#1 - 8 ans #2 - 4 ans

Re

nd

em

en

t 15

% e

au (

T/h

a)

Semis direct Labour

Rendements

Sites #1 et #2, 2013, maïs grain, labour = semis direct

Site #3 – 2 ans, 2014, maïs ensilage, estimation du producteur : ↓ 25 à 30 % du rendement en semis direct

NS NS

La période d’implantation du semis direct (2, 4 ou 8 ans) et la qualité du sol pourrait expliquer les résultats

MVA, infiltration de l’eau :

Résultats équivalents en semis direct (4 à 8 ans) ou labour, en sol argileux

Sol plus massif, moins perméable en semis direct (2 ans), en sol limoneux

Ruissellement et turbidité :

Plus de ruissellement en semis direct (2 ans), en sol limoneux

Peu de pertes de sol : effet des résidus de culture

Bilan des essais Semis direct vs labour

Tour d’horizon Semis direct et structure du sol

Effets contradictoires du semis direct selon le type de sol la régie la durée d’implantation

En sol perméable et SD implanté depuis plus de 4 ans :

↓ MVA principalement à la surface du sol (0-7.5 cm) (Dao, 1993; Franzluebbers, 2002)

↓ porosité totale 5 à 48% vs labour mais ↑ des macropores continus (Ø 1 à 2 mm) (Edwards et al. 1988; Shipitalo et al. 1987 )

Favorise l’infiltration de l’eau : ↓ 27 à 98% du ruissellement ↑ 43% du volume annuel de drainage souterrain (Baker, 1987; Glenn, 1987; Edwards, 1988; Tan, 1998)

Limite l’érosion des sols :

↓ jusqu’à 92% selon la couverture de résidus (Mabit, 2001; Tiessen, 2010)

Tour d’horizon Semis direct et structure du sol

En sol peu perméable, en régie inadéquate, le semis direct ne permet pas d’améliorer les caractéristiques du sol

Ex : Sable loameux à drainage lent, monoculture de maïs, semis direct depuis 11 ans (Dam, 2003)

↑ MVA et ↓ porosité

Moins de macroporosité avec le semis direct

Tour d’horizon Semis direct et structure du sol

Essais en Ontario, loam argileux : le semis direct, implanté depuis 6 et 4 ans, produit parfois plus de ruissellement que le labour

Sol plus humide (Drury et al. 1993; Gaynor & Findlay 1995)

Moins de fentes de retrait

Surface du sol plus lisse

0

50

100

150

Maïs labour Maïs semisdirect

Maïs labour Maïs semisdirect

Ruissellement (mm) Drainage (mm)

0

200

400

600

800

1000

Maïs labour Maïs semis direct

Pertes de sol (kg/ha/an)

↑17%

↑36% ↓56%

↓19%

Réduction du travail de sol et/ou engrais verts : Amélioration occasionnelle de la structure du sol en surface (0-10 cm)

Peu d’améliorations de la structure du sol en profondeur

Effets dépendants de facteurs pas toujours contrôlés : racines, vers de terre

Bon contrôle de l’érosion par les résidus et les cultures de couverture

En période de transition du semis direct, le ruissellement de surface peut augmenter surtout en sol peu perméable mais l’érosion reste réduite

Intérêt à combiner la réduction du travail de sol et les cultures de couverture

Amélioration de la régie (compaction/drainage/rotation) indispensable au préalable

Conclusion

Photo : Isabelle Breune, AAC