polnareff au fond des yeux

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Polnareff RéMI BOUET AU FOND DES YEUX

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Beau livre Polnareff

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Page 1: Polnareff au fond des yeux

PolnareffRémi Bouet

Au fond des yeux

Page 2: Polnareff au fond des yeux
Page 3: Polnareff au fond des yeux
Page 4: Polnareff au fond des yeux

© 2007Arthéléna Éditions14 bis, rue de La Moutière78490 Montfort l’Amaurywww.arthelena-editions.fr

RCS Versailles 480 625 482 - APE 221 EDépôt légal : Novembre 2007Tous droits réservés

Auteur des textes : Rémi BouetDirecteur artistique : David Pairé / dpcom.fr assisté de Myrtille Vardelle.

Responsable d’édition : Véronique DésormièreImprimé en France : Pierre Ramskindt Printing

Le code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utili-sation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans consentement de l’auteur et de l’éditeur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du code de la propriété intellectuelle.

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PolnareffRémi Bouet

Au fond des yeux

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sommaire

Page 7: Polnareff au fond des yeux

sommaireJusqu’aux marches du sacré-cœur

L’apprentissage de La Liberté

La poupée qui fait non

tube après tube

carnet de baL

hoLidays in paradise

around the worLd

Long way from home

du courrier

enfin !

page 14

page 35

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page 53

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Michel Polnareff a vu le jour le 3 juillet 1944

dans la belle cité de Nérac, au coeur du Lot-et-

Garonne. Située à quelques kilomètres d’Agen

(et également d’Astaffort, ville chère au cœur

d’un autre enfant du pays, Francis Cabrel), la

bourgade du Sud-Ouest qui vit grandir Henri IV

est, pendant la Seconde Guerre mondiale, située

en zone dite libre. Michel Polnareff aura ainsi la

chance de voir le jour, loin des pas angoissants

et oppressants de l’occupant.

Sa mère, Simone, d’origine bretonne est

danseuse professionnelle en jazz moderne,

danse acrobatique et claquettes. Son père, Leib

Polnareff (qui fera carrière sous le pseudonyme

de Léo Poll), né en Russie (à Odessa), est

d’abord, dès le milieu des années 20, un pianiste

de jazz réputé. Il devient chef d’orchestre au

début des années 30 et enregistre avec le

Léo Poll Orchestra plusieurs microsillons. Il

accompagne également des vedettes comme

Edith Piaf, Jean Sablon ou Charles Trenet. C’est

la guerre qui le conduit à quitter Paris pour

Nérac où il participe activement à la résistance.

La famille qui compte désormais trois membres

retrouve la capitale en 1949. C’est vers la

composition que va alors se tourner Léo Poll qui

va connaître un certain succès. En 1950, Yves

Montand inscrit à son répertoire Le galérien qui

rencontrera un succès encore plus retentissant

dans la version proposée par Les Compagnons

de la Chanson. Léo Poll composera encore entre

autres pour Edith Piaf, Un jeune homme chantait,

et sera également pendant ces années un

musicien de studio très recherché.

Alors qu’il n’a que cinq ans, Michel est déjà

soumis à une formation pianistique intensive et

il reste presque chaque jour jusqu’à dix heures

devant son clavier. Il est inscrit au Conservatoire

national de musique de la rue de Madrid où

il approfondit sans relâche sa connaissance

du répertoire classique. Sa culture générale

n’est pas non plus absente de son éducation. Il

fréquente un cours privé de la rue de Londres, le

Cours Hattemer où lui sont prodiguées les leçons

de mathématique et de français (et où il est

régulièrement premier de la classe).

Alors qu’il n’a que cinq ans, Michel est déjà soumis à une formation pianistique intensive

Jusqu’aux marches du sacré-cœur…

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Sous quelle étoile suis-je né ?

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C’est à ce rythme d’enfer que Michel Polnareff obtient, à onze

ans et demi, un premier prix au Conservatoire en interprétant

Mozart et sa Marche turque, ainsi qu’une médaille d’or de

solfège, devançant des élèves qui ont plus souvent dix-sept ou

dix-huit ans.

Ces réussites vont avec une discipline de fer que le jeune

homme vit de plus en plus mal. Il n’a pas le droit de sortir

avec d’autres enfants et c’est avec sa maman qu’en

cachette il découvre au cinéma de son quartier les derniers

films venus d’Hollywood et qu’elle aime tant. Ces années

d’enfance passées au troisième étage d’un immeuble de

la rue Oberkampf seront plus tard qualifiées par Michel

Polnareff d’enfer. Cette existence vouée au travail et à

l’apprentissage de la musique imposée par un père qui est

obsédé par les résultats de son fils a, certes, constitué les

racines d’une carrière qui allait atteindre au génie, mais a

fait passer un enfant à

côté de son enfance et

de l’insouciance qui s’y

rattache. Un rendez-

vous raté avec lui-même

qui résonne encore

douloureusement dans le

cœur de Michel Polnareff.

Sous quelle étoile suis-je

Ce qui est certain, c’est que sa bonne étoile, il va la décrocher lui-même.

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né, chantera il plus tard. Ce

qui est certain, c’est que sa

bonne étoile, il va la décrocher

lui-même jusqu’à devenir cet

artiste exceptionnel qui va

révolutionner la chanson du

milieu des sixties. Pour l’heure,

nous sommes en 1957, le

jeune homme a treize ans et

il traverse la Manche pour la

première fois. Son premier

séjour britannique a lieu a Poole tout près de

Bournemouth dans le Dorset. Pendant trois

mois, Michel est hébergé chez une famille de

pêcheurs où il apprend à maîtriser la langue de

Shakespeare. Dans la journée, il est plongeur

dans un restaurant et donne des cours de piano

aux enfants de la maison. Pas folichon, mais le

jeune homme rompt pour la première fois avec le

cercle familial et échappe au joug paternel. Mais

plus que tout, une rencontre décisive va décider

de l’avenir de Michel Polnareff. Celle qu’il fait

avec… le rock’n’roll ! Il découvre le quotidien

musical des jeunes Anglais si éloigné de Chopin

et Mozart. Elvis Presley, Buddy Holly, Little

Il découvre en première partie de Raymond Devos un chanteur qui va le marquer définitivement Son nom ? Johnny Hallyday.

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Au début de l’année 1965, Michel Polnareff a

pris une décision lourde de conséquences.

Il quitte le domicile de ses parents. Ce virage

capital vers son destin ne pouvait pas se

négocier en douceur. Le virage est abrupt et

passe par une rupture nette et sans concession.

Il part, voilà tout ! Il part pour mettre un point

final à ces années d’une vie qui n’était pas la

sienne, qui ressemblait à ce que souhaitait

son père pour lui. Désormais à presque vingt

ans, ses choix ne seront plus que les siens et

il décidera seul de son chemin. Fini la banque,

l’aventure est là qui l’attend au coin de la rue.

À partir de maintenant, c’est sa guitare qui

sera son plan de la vie, la boussole qui va le

mèner vers le rendez-vous qu’il s’est fixé : un

rendez-vous avec la gloire ! La guitare, il en

a fait une alliée en quelques mois. Il maîtrise

totalement ses subtilités et les accords qui lui

permettent d‘écrire des chansons qu’il porte

déjà en lui car la musique est depuis toujours

un prolongement naturel de sa pensée. La

première qu’il compose, excusez du peu, n’est

autre que La poupée qui fait non. C’est sur les

marches du Sacré-Cœur qu’il teste le pouvoir de

La guitare, il en a fait une alliée en quelques mois. Il maîtrise totalement ses subtilités et les accords.

L’apprentissage de La Liberté.

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Le talent de Michel Polnareff apparaît dès lors presque à l’étroit à l’intérieur des frontières hexagonales.

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cette chanson et de toutes celles qu’il ne tarde

pas à écrire de L’amour avec toi, à Beatnik, ce

mouvement pacifiste dont il va devenir l’un des

chefs de file. À son répertoire il ajoute les folk-

songs de Bob Dylan, Peter, Paul & Mary et de

Donovan, quelques rock’n‘rolls et séduit, sur les

marches de la basilique, un public qui apprécie,

à en croire le joli pactole qu’il récolte chaque

jour, ce jeune homme aux cheveux longs et aux

mélodies entêtantes. Avec les quelques milliers

d’anciens francs que lui rapportent son art, il

vivote, dormant où il peut, chez les copains,

dans les squares et, le plus souvent, dans une

station de métro. Vie de nomade où l’amour

et l’eau fraîche étanchent sa soif de liberté. À

l’approche des beaux jours, Michel Polnareff

décide de voyager et ses pas vont le mener tout

d’abord vers le sud de la France. Il jalonne son

parcours de chansons qu’il sème sur les places

des villes et villages qu’il rencontre et croise le

fer, pardon, le vers, avec les groupes de rock

qu’il croise ci et là. Après un séjour sur la Côte,

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Xil revient brièvement vers la capitale avant de

repartir vers Londres à l’invitation d‘ une amie

de Montmartre, Sue, qui l’héberge un temps.

Là, il fréquente les clubs à la mode, Marquee

en tête, et découvre la griffe musicale anglaise

sous les traits des Rolling Stones, des Who, des

Yarbirds, des Moody Blues… Il tente également

de placer ses chansons, comme la futur

célèbre poupée, The Doll who says no, chez des

éditeurs, sans succès. Ce n’est que partie remise

car bientôt, les enregistrements de Michel

Polnareff seront tous réalisés dans la capitale

londoniènne. À l’automne, après quelques

mois d’une immersion salutaire dans l’esprit

pop/rock anglais qui va éclairer ses premiers

enregistrements et définir le style unique qu’il

va bientôt imposer, c’est le retour à Paris, au

Sacré-Cœur, sur les terrasses de cafés, au milieu

de cette bande qui partage les mêmes rêves, les

mêmes espoirs. Michel va bientôt descendre de

cette position où il domine Paris pour se rendre

dans les clubs qui pourront l’aider à passer un

nouveau cap de sa carrière crépusculaire. Au

Golf Drouot, tout d’abord, où le maître des lieux,

Henri Leproux, ouvre ses portes et sa scène aux

jeunes chanteurs débutants. Grâce à lui et à

sa passion du rock, des centaines, des milliers

de carrières ont pu éclore, fleurir sur le pavé

parisien. De Johnny aux Variations, en passant

par Eddy et Martin Circus et Jacques Dutronc,

tous ont fait leurs premières armes au Golf

sous les yeux protecteurs et quasi-paternels

d’Henri et de son épouse. Michel y fera plusieurs

apparitions fin 65 et début 66.

Il fréquentera également La Locomotive, tout

près du Moulin-Rouge (pour ne pas dire sous

le Moulin-Rouge !) qui est alors un haut lieu du

rock’n’roll où se retrouvent les afficionados du

magazine Disco Revue créé dès 1961 par Jean-

Claude Berthon. C’est ce magazine, aîné de Salut

les Copains, qui organise, entre le 15 novembre

et le 11 décembre 1965, un concours amateur

auquel Michel le bohème est inscrit par des

amis. À la clé, pour le vainqueur, un contrat avec

Maison de disques ! Ce crochet hebdomadaire

voit Michel Polnareff sortir vainqueur le 12

novembre en interprètant Great Balls of fire (le

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Page 20: Polnareff au fond des yeux

À part Johnny, on voit mal qui peut alors proposer de tels

spectacles

complets

qui

intègrent

la qualité

du son, des

lumières et

de la mise

en scène.

acles

spect

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réglement du concours obligeait le participants

à proposer une reprise). Les finalistes se

retrouvent pour la grande finale qui a lieu le 12

février 1966 et qui consacre Michel Polnareff.

Mais ce dernier refuse sans états d’âme l’offre

de contrat pour enregistrer un disque qui lui est

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Page 23: Polnareff au fond des yeux

pourtant faite par un des grands noms du métier,

Eddie Barclay. Pour Michel Polnareff, chanter

n’est qu’un jeu. Il veut écrire et composer

mais ne se voit pas du tout chanteur. Dificille

aujourd‘hui à imaginer alors que la voix de

Michel Polnareff va s’avérer une des plus belles

et des plus originales qui soient dans la chanson

contemporaine.

C’est sur les marches du Sacré-Cœur que va

se sceller son destin en la personne de Gérard

Woog, le copain d’école avec qui il partagea la

découverte et la passion du rock. Ce dernier

était devenu dénicheur de nouveaux talents pour

l’éditeur Rolf Marbot. Il a évidemment pensé à

son vieux copain dont il connaît et apprécie le

talent. Il le retrouve à son QG du Sacré-Cœur et

convaint Michel de rencontrer son boss. C’est

ainsi que Rolf Marbot devient (sur l’insistance

de son équipe artistique au sein de laquelle on

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Page 24: Polnareff au fond des yeux

retrouve la parolière Vline Buggy, car lui-même

ne croit que modérémment aux qualités du

jeune homme) l’éditeur de Michel Polnareff

après avoir accédé aux conditions de l’artiste

: enregistrement à Londres en compagnie,

excusez du peu, de Jimmy Page (futur Yarbirds

et Led Zeppelin) ! Quant aux prétentions de Rolf

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Page 25: Polnareff au fond des yeux

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Page 26: Polnareff au fond des yeux

Michel Polnareff censuré pour l’affiche de son spectacle Polnarévolu-tion où il apparaît de dos fesses nues, réagit avec cette photogra-phie explicite réalisée par Jean-Marie Périer.

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Marbot et Lucien Morisse (directeur

des Disc’AZ, firme pour laquelle

Michel Polnareff va enregistrer, et

connu pour son excellent travail de

producteur radio sur Europe 1 avec

les mythiques émissions pour ceux

qui aiment le jazz et bien sûr, Salut les

copains. Il va devenir un personnage

éssentiel dans la vie professionnelle

du jeune artiste) de voir Michel

transformer son nom afin de sonner

plus anglais, qu’ils n’y comptent pas

! Profiter de la crème des musiciens

et des studios d’Outre-Manche, yes,

mais oublier son nom, Polnareff,

definitly not !

En mars 1966, Michel Polnareff

rejoint Londres en compagnie de

l’arrangeur Jean Bouchety. Le premier

45 tours sera bientôt en boîte !

Chère Véronique, Beatnik et Ce que je

cherche est en toi et La Poupée qui fait

non, sont prêtes à conquérir la France

! Cette dernière ne demandera que

quelques heures d’enregistrement

avant d’être gravée pour l’éternité.

De retour en France, le disque est

mixé puis sort chez les disquaires

en mai 1966 : c’est un triomphe

immédiat et son interprète devient

une vedette du jour au lendemain.

La chanson passe en boucle sur les

radios et plus de 200 000 disques

sont vendus en quelques semaines à

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Page 28: Polnareff au fond des yeux

Ce vendredi 2 mars 2007, une électricité

particulière irradie la capitale. L’événement qui

se prépare est comme palpable dans l’air chargé

d’énergie contenue, une excitation particulière

brille dans les yeux de tous ceux, des milliers,

qui, depuis le début de l’après-midi, convergent

vers un lieu de célébration, un lieu de culte. Car

ce soir Bercy ne sera pas qu’une immense salle

de concert. Ce soir, le Palais omnisports de Bercy

sera le lieu béni des retrouvailles entre un artiste

absent de France depuis trente-quatre ans et des

dizaines de milliers de Français qui ont vibré au

son de ses mélodies délicates ou sauvages, qui

ont gardé l’empreinte de ses mots gravé dans le

enfin !

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Page 29: Polnareff au fond des yeux

cœur. Ce soir et les autres soirs, ils seront encore

plus nombreux que lorsque Michel Polnareff s’est

exilé en Amérique, ce funeste mois d’août 1973.

Plus nombreux car la passion de Polnareff se

partage, se transmet et chaque fan, chaque

disciple a porté, toutes ces années d’absence,

la bonne parole aux jeunes générations qui ont

rejoint l’église de ce maître à penser, à chanter

et à danser qui proclama, en 1972, dans son

homélie : On ira tous au paradis. Et ce soir, ce

vendredi 2 mars, c’est bien vers le paradis que se

presse la foule qui attend, fébrile, la multiplication

des chansons, la transformation de l’eau en sueur,

la foule des fidèles qui attend un passeport pour

ce monde meilleur qu’a décrit si formidablement

Michel Polnareff dans Je rêve d’un monde.

Bercy, ce soir, a des allures de cathédrale et la

célébration qui va avoir lieu pourrait bien donner

lieu à quelque miracle…

Bercy se remplit et, déjà, on se demande si l’on

n’est pas déjà habité par une sorte de transe

en voyant des centaines de Polnareff surgir

de partout, on est rassurés lorsqu’une jeune

femme vous interpelle et vous proposent de

poser pour une photo avec la perruque bouclée

et la légendaire paire de lunettes avant de vous

regarder sur l’écran géant (une paire de lunettes

dont les verres sont les écrans !) qui domine la

scène. Après cet intermède sympa proposé par

un opérateur de téléphones mobiles (on peut voir

sa trombinette également sur son portable !), on

revient à l’essentiel : se faire à l’idée incroyable

que Michel Polnareff va bientôt entrer sur cette

scène, que ce sera lui en vrai et que cesseront

alors les rumeurs chagrines qui ont tenté depuis

quelques mois d’inoculer le venin du doute :

viendra, viendra pas ? Peut-il encore faire de la

L’événement qui se prépare est comme palpable dans l’air chargé d’énergie contenue, une excitation particulière brille dans les yeux de milliers de fans.

Ce vendredi 2 mars, c’est bien vers le paradis que se presse la foule.

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Page 31: Polnareff au fond des yeux

scène ? Et sa voix, est-elle toujours là ?

Dans quelques minutes, il apportera

un démenti cinglant aux aboyeurs, aux

chacals avides de pensées, de mots

pourris et puants. Dans quelques heures,

il pourra, tel César, regarder ou plutôt

les ignorer ces oiseaux de mauvais

augure, et lancer, magnanime (et en

se marrant tant l’homme a l’humour

chevillé au cœur) : je suis suis venu,

j’ai vu, j’ai vaincu ! Ze tour 2007 allait

commencer sur les chapeaux de roues !

Mais trêve de bavardage car voici que

le noir se fait dans l’immense chapelle

de Bercy. Des accords de guitares

saturés déchirent le silence qui s’est

fait instantanément devant l’émotion du

moment. C’est en ombre chinoise dans

un halo de lumière qui le rend presque

irréel qu’apparaît Michel Polnareff. Je

Je n’ai pas préparé de discours, mais je dirai juste, enfin !

Page 32: Polnareff au fond des yeux

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isbn 978-2-916832-02-931,90 € TTC

impRimé en e U

un jour funeste de l’an 1973, Michel Polnareff a dit Goodbye Marilou. embarqué sur le paquebot France pour rejoindre l’Amérique, il a croisé Tous les bateaux, tous les oiseaux et constaté, en accostant, que Le désert n’est plus en Afrique. Le désert, c’était d’être devenu Le prince en otage d’un exil involontaire… Seul, Dans la maison vide, d’une plume trempée dans le désespoir, il a écrit une Lettre à France que le souffle chaud d’un vent d’ouest a déposée au creux de nos oreilles. Jour après jour, il se demandait si Les grands sentiments humains avaient une Ame câline. Je suis un homme, Je t’aime, je suis prêt à donner Tout, tout pour ma chérie et j’ai tellement de choses à dire lançait-il vers le ciel, fidèle messager de ses mots d’amour à la Femme/France de ses pensées… L’homme qui pleuvait des larmes de verre dansait jusqu’au vertige, tel L’oiseau de nuit au Bal des laze. il s’était proclamé Le roi des fourmis, creusant des galeries souterraines pour rejoindre nos cœurs lassés de tant d’absence. L’espoir d’un retour nous est enfin parvenu précédé d’un son de Tam Tam qui disait : préparez Le grand chapiteau, Femme/France, je veux faire L’amour avec toi !, I love you because, Love me, please love me ajoutait michel Polnareff, comme peinant à retrouver sa langue maternelle. Aucune importance : son pays était prêt à lui ouvrir les bras et à lui réapprendre les mots de l’amour, le Kâma-sûtra du cœur. michel Polnareff est de retour ! A minuit, à midi, Dans la rue, partout, ses chansons sublimes raisonnent enfin ! Monsieur l’abbé va être content : maintenant c’est sur, On ira tous au paradis…

PolnareffRémi Bouet

Au fond des yeux