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  • 8/8/2019 L'obsolescence programme, symbole de la socit du gaspillage Le cas des produits lectriques et lectroniques

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    1. La hausse de la consommation de produitslectriques et lectroniques dvaste la plante

    La socit de consommation sest impose dans lespays industrialiss avec une promesse : laccs auxbiens marchands est possible pour le plus grand nombreet contribue amliorer confort de vie et bien-tre. Laconsommation de masse standardise est encourage :elle assure, moindres cots, via des conomiesdchelle, un profit maximal aux entreprises productrices.Si ces modes de production et de consommation sou-tiennent un dynamisme conomique qui repose sur le consommer plus , ils ont aussi un revers : leursimpacts environnementaux et sociaux.

    Vers un puisement

    des ressources naturellesEn Europe, on considre que la production d'une tonne

    de dchets municipaux5 quivaut la consommation enamont de 100 tonnes de ressources6. Les estimations desstocks de ressources disponibles au rythme actuel de pro-duction et de consommation tmoignent ainsi d'une fortepression sur les ressources minrales et fossiles notamment. Aujourd'hui, avec une consommation annuelle de matirespremires d'environ 60 milliards de tonnes7, nous consom-mons environ 50 % de ressources naturelles de plus qu'il ya 30 ans8. Les populations des pays riches consomment jusqu 10 fois plus de ressources naturelles par habitantque celles des pays pauvres. Un Europen consomme ainsi43 kg de ressources par jour, contre 10 kg pour un Africain.Cette dernire dcennie, la demande en mtaux a explosen partie du fait de la production croissante dappareilslectriques et lectroniques. Ainsi, le tlphone portable,lun des appareils les plus fabriqus l'heure actuelle,avec 1,2 milliards dunits vendues en 2007 dans lemonde, peut contenir 12 mtaux diffrents hauteur de25 % de son poids total. L'Organisation de coopration etde dveloppement conomiques (OCDE) a estim, partirdes niveaux connus en 1999, qu'avec un taux de crois-sance annuel de leur production primaire de 2 %, les

    rserves de cuivre, plomb, nickel, argent, tain et zinc nedpasseraient pas 30 annes, laluminium et le fer sesituant entre 60 et 80 ans. Lre de la raret se dessinerait donc pour un nombre croissant de matriaux 9.

    Outre les impacts directs sur lenvironnement tels l'excava-tion de grandes quantits de terre engendrant le dfrichagedes sols, l'limination de la vgtation et la destruction desterres fertiles, cette course aux premires matires a desconsquences humaines et sanitaires dsastreuses commele montrent ces quelques exemples : Le Prou, qui alimente en grande partie le march

    europen du cuivre (31 % en 2007 et 21 % en 2008),subit les impacts ngatifs lis cette exploitationminire. Lactivit est fortement consommatrice d'eaualors que la population souffre dj dune pnuried'eau. La transformation des mtaux menace gale-ment la sant des riverains : en 1999, le ministre pru-vien de la Sant a men une tude sur les enfantsvivant proximit des installations ; elle faisait tatd'une teneur en plomb dans le sang trois fois sup-rieure au seuil prconis par l'Organisation mondiale dela sant (OMS)10.

    Riche en ressources naturelles notamment minrales(le diamant, le cuivre, l'or, le cobalt ou encore le zinc),la Rpublique dmocratique du Congo fait, quant elle, depuis longtemps l'objet de convoitises des payslimitrophes, notamment le Rwanda et l'Ouganda. Elleest victime de tensions sociales, de pillages et de frau-des incessantes. La faiblesse de l'Etat et l'instabilitpolitique entranent un manque de contrle notammentsur la partie Est du pays (province du Kivu), o de nom-breux conflits arms ont pour origine l'accs ces res-sources et leur contrle11.

    5/ Les dchets municipaux regroupent les dchets mnagers et les dchets de la collectivit.6/ ADEME : Economiser les ressources naturelles de la plante dans Collectivits locales et Prvention des dchets, juin 2010.7/ Rapport des Amis de la Terre Europe, des Amis de la Terre Autriche et du centre de recherche SERI :Overconsumption? Our use of the worlds natural

    resources , 2009, p. 3.8/ Commissariat gnral au Dveloppement durable : Le point sur le recyclage et le remploi, une conomie de ressources naturelles , 2010, p. 1.9/ Commissariat gnral au Dveloppement durable : Matires mobilises par lconomie franaise. Comptes de flux pour une gestion durable des res-

    sources , 2009, p. 11.10/ Rapport des Amis de la Terre Europe, des Amis de la Terre Autriche et du centre de recherche SERI :Overconsumption? Our use of the worlds natural

    resources , 2009, p. 13.11/ La Documentation franaise (site Internet) : Le pillage des ressources naturelles de la RDC .

    Mine dor en Nouvelle-Zlande

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    L'obsolescence programme, symbole de la socit du gaspillageI 04-05

    12/ Stphane Pambrun : Chine : la grogne monte dans les usines du monde , article du site Internet Novethic, juin 2010.13/ Chiffres dEurostat pour 2008.14/ Selon l'ADEME.15/ Wuppertal Institut fr Klima, Umwelt, Energie Gmbh : Infobrief Forschungsgruppe nachhaltiges Produzieren und Konsumieren , 2008, p. 4.16/ ADEME : Economiser les ressources naturelles de la plante dans Collectivits locales et Prvention des dchets, 2010.17/ Commissariat gnral au Dveloppement durable : Le point sur le recyclage et le remploi, une conomie de ressources naturelles , 2010, p. 2.18/ Selon lUnion europenne, le remploi est toute opration par laquelle un produit consommateur d'nergie ou ses composants ayant atteint le terme de leur pre-

    mire utilisation sont utiliss aux mmes fins que celles pour lesquelles ils ont t conus, y compris l'usage continu d'un produit consommateur d'nergie rapport un point de collecte, distributeur, organisme de recyclage ou fabricant, ainsi que la rutilisation d'un produit consommateur d'nergie aprs sa remise neuf.

    19/ Chiffres dEurostat pour 2008.20/ Les ordures mnagres regroupent les dchets gnrs l'chelle des mnages (dchets rsiduels en mlange et dchets tris).21/ Communiqu de presse du ministre en charge de l'environnement et de l'ADEME relatif aux rsultats de la campagne MODECOM 2007-2008.22/ Dossier de presse du ministre en charge de l'environnement relatif au bilan de la filire pour la priode 2006-2009 et les nouveaux dfis fixs pour

    2010-2014, 2010, p. 4.23/ Journal officiel de la Communaut europenne du 2 dcembre 1996, p. 241.24/ Directive 2002/96/CE sur les DEEE.

    La Chine dtient le monopole des terres rares, des mine-rais et mtaux difficiles extraire, qui sont prsents dansla plupart des produits de haute technologie en raison deleurs proprits notamment magntiques permettant laminiaturisation. Dans ce pays qui est devenu l'usine dumonde , la main-d'uvre est abondante et bon mar-ch. Comme de nombreuses entreprises du secteur, legroupe Foxconn, sous-traitant numro un d'appareilslectroniques, fait travailler ses ouvriers dans des condi-tions de travail pouvantables : Depuis des annes, lequotidien des ouvriers de Foxconn est point du doigt.Mais il aura fallu attendre les drames de ces derniers

    mois (onze suicides sur le lieu de travail entre janvier et juin 2010, ndlr) pour que ses prestigieux clients, dont Apple, Sony et Dell, sinquitent pour leur image 12.

    De l'extraction la destruction :le devenir de la matireNous n'avons jamais produit autant de dchets. La productionannuelle moyenne de dchets municipaux par Franaiss'lve environ 543 kg13 dont 16 20 kg de DEEE14.Les habitudes de vie modernes exercent une pression trsforte en amont sur les ressources naturelles et gnrentune norme quantit de dchets traiter en aval. Nos sys-tmes de production et de consommation s'inscriventdans un modle, largement linaire et non viable : en dbutde chane, une extraction massive et toujours croissantede matires premires non renouvelables, et au bout, l'li-mination des matriaux usags, en mlange complexe etsouvent toxique, par incinration ou par enfouissement.

    Cette production annuelle de plus de 500 kg de dchetspar personne et par an ne recouvre pourtant que lesdchets visibles , jets dans les poubelles, rapportschez les distributeurs ou la dchetterie. Ce chiffre neprend pas en compte la production indirecte de dchets,le dchet final, palpable pour le dtenteur d'un bien aumoment de l'abandon, ne reprsentant qu'une partie desdchets lis au cycle de vie du bien en question. Ainsi, lafabrication des biens de consommation que l'on achte et jette occasionne des dchets avant et aprs l'utilisationpar le consommateur. Ces dchets sont comptabilissdans les dchets industriels et peuvent peser trs lourd :leur ensemble constitue le sac dos cologique desbiens, produits ou services.

    En 2010, un Franais achte environ six fois plus d'qui-pements lectriques et lectroniques qu'au dbut desannes 199017 et chacun se dbarrasse annuellementde 16 20 kg de DEEE. Une partie des ressources nonrenouvelables contenues dans les produits de consom-mation courante pourrait d'ores et dj tre rinjectedans le cycle de production, grce au remploi18 ou aurecyclage. Or, en France, seulement 18 % des dchetsmunicipaux sont recycls. La majeure partie (prs de 70 %)est incinre ou mise en dcharge19.Selon les rsultats de la dernire campagne de caractrisa-tion des ordures mnagres20 conduite par l'Agence de l'en-vironnement et de la matrise de l'nergie (ADEME), la com-position des ordures mnagres a globalement peu changces 15 dernires annes l'exception de l'augmentationtrs nette des textiles sanitaires (lingettes, couches pourbbs, etc.)21. En revanche, toutes les catgories de dtritusde nos ordures mnagres ont augment en poids : on jettenon seulement plus, mais surtout plus de tout .

    Certains de nos dchets font l'objet d'un systme decollecte spcifique et s'ajoutent cette analyse desordures mnagres au sens strict. C'est le cas des DEEEmnagers qui reprsentent le flux de dchets franais quicrot le plus avec une hausse de 2 3 % chaque anne22.La multiplication des DEEE ne date pas d'aujourd'hui :ds 1996, une rsolution du Parlement europen attiraitl'attention des dcideurs sur ce gisement spcifiquede dtritus23. La premire directive relative aux DEEE24 estentre en vigueur en 2005 pour fixer des objectifs decollecte spcifiques la filire et traduire le principe pollueur payeur par le prlvement d'une cotaxeddie aux cots de gestion de ces dchets.

    Poids duproduit

    1 kg d'acier1 kg de cuivrePuce d'ordinateur de 0,09 gOrdinateur portablede 2,8 kg

    Poids du sac dos cologique

    2,3 kg15 kg20 kg

    434 kg

    Le sac dos cologiquede quelques produits et matriaux 15,16

    Les Amis de la Terre / Le Cniid Rapport Septembre 2010

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    L'exportation de ce type de dchets est soumise auxdispositions dun amendement la Convention de Blequi, depuis 1997, interdit l'exportation des dchets dan-gereux des pays membres de l'OCDE vers des pays nonmembres de lOCDE.

    Toutefois, les DEEE nont pas un statut ferme sur la listedes dchets dangereux et les sorties pour valorisation sont permises. Force est de constater que nombre de nosvieux appareils finissent par se trouver dans des pays endveloppement. Ainsi environ la moiti des 20 50 millionsde tonnes des DEEE produits dans le monde chaqueanne (pour la majeure partie par les pays industrialiss)25alimentent les conomies informelles des pays du Sud,essentiellement l'Asie et l'Afrique, autour du dmantle-ment des appareils et du recyclage rudimentaire desmtaux prcieux, avant de finir dans des dcharges sauva-ges. En bout de chane, les chiffonniers des tempsmodernes accomplissent un travail pnible et dangereux

    qui n'exclut ni femmes ni enfants, exposs sans protectionaux vapeurs toxiques des mtaux lourds et des dioxinesmises par le brlage des dchets. L'environnement deces chantiers-dcharges n'est pas pargn car le fardeaudes DEEE est double : par la masse croissante de dchetsgnrs et par la toxicit des matriaux qui les composent.

    Traitement des DEEE : une opportunitrate pour limiter le gaspillage desmatires premiresEn 2008, environ 70 % des DEEE franais ont fini incin-rs, enfouis ou traits dans des filires informelles26. Parmi

    les 30 % restants faisant l'objet d'une collecte slective, 2 %sont remploys, 80 % recycls et 18 % incinrs. Le prin-cipe mme de la hirarchie europenne de prvention etde gestion des dchets de la directive cadre adopte en2008 par l'Union europenne est donc srieusement mis mal. Il nonce le remploi puis le recyclage des dchetscomme prioritaires par rapport leur limination...L'impact environnemental de ces dchets renfermant leplus souvent des substances chimiques dangereuses justifierait d'ailleurs lui seul d'interdire leur stockage etleur incinration. En effet, ces deux modes de traitementengendrent la diffusion dans l'atmosphre et dans les solsde polluants toxiques spcifiques ce gisement dedchets, comme les retardateurs de flammes broms oules dioxines chlores et bromes27 lies l'usage de poly-chlorure de vinyle (PVC). Actuellement, les industriels se

    flicitent de rpondre aux termes de la directive relativeaux DEEE qui fixe un objectif de collecte slective de 4 kgpar habitant et par an alors quil est prouv que nous en jetons quatre cinq fois plus.Par ailleurs, le recyclage actuel des DEEE se focalise essen-tiellement sur la valorisation des mtaux par broyage etseconde fusion, qui engendre aussi des pollutions etcondamne le reste des matriaux la destruction, auxdpens du dmantlement et remploi des composants etdu recyclage des plastiques. Si la directive RoHS28 a permislinterdiction de lusage de plusieurs substances chimiquestoxiques, interdiction rpercute sur le march mondial, elleconserve toutefois un train de retard sur la ralit despollutions gnres par lindustrie lectronique.Si d'immenses efforts restent donc faire pour rendrerellement efficaces les filires de collecte des DEEEpour le remploi et le recyclage, une question se pose enamont : pourquoi, de nos jours, mettons-nous tant deproduits lectriques et lectroniques au rebut ?

    0

    En milliers d'units

    2004 2005 2006 20072000 2001 2002 2003 2008

    25 000

    5 000

    10 000

    15 000

    20 000

    Petit lectromnager

    Gros lectromnagerMicro-ordinateurTlviseur

    Baladeur numrique

    Forte hausse des ventes de certains appareilslectriques et lectroniques

    Source : Groupement des fabricants dappareils mnagers,Insee-Ple de statistiques industrielles, Growth From Knowlege,Syndicat des industriels de matriels audiovisuels lectroniques.

    25/ Rapport PNUE :Dchets lectroniques, la face cache de l'ascension des technologies de l'information et de la communications , 2005, p. 1.26/ En considrant que chaque habitant produit 16 kg (fourchette basse) de DEEE par an. Les taux de collecte et de recyclage pris en compte pour

    le calcul sont ceux dlivrs par le Ministre en charge de l'environnement dbut 2010.27/ L'incinration est l'une des sources les plus importantes de dioxines, molcules organiques complexes qui s'accumulent dans la chane alimentaire. L'incinration

    des DEEE entrane la formation de dioxines chlores, notamment celles dites de Seveso (2,3,7,8 TCDD), tristement clbres, dont le caractre cancrigneest reconnu depuis 1997 par l'OMS. Mais les DEEE prsentent un autre danger lorsqu'ils sont incinrs : les retardateurs de flammes broms (RFB) qu'ilscontiennent fournissent le brome ncessaire la formation des dioxines dites bromes. Classe de dioxines encore peu connue, plusieurs tudes tendent mon-trer que leur toxicit pourrait tre quivalente voire suprieure aux dioxines chlores et constituer ainsi une nouvelle bombe chimique retardement.

    28/ RoHS signifieRestriction of the use of certain Hazardous Substances in electrical and electronic equipment et dsigne la directive europenne2002/95/CE relative la limitation de l'utilisation de certaines substances dangereuses dans les quipements lectriques et lectroniques.

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    L'obsolescence programme, symbole de la socit du gaspillageI 06-07

    Razzia sur les ressources naturelles : origines et consquences

    Dominique Bourgest philosophe et professeur la facult des gosciences et delenvironnement de lUniversit de Lausanne. Il codirige la collection Dveloppementdurable et innovation institutionnelle aux Presses universitaires de France (PUF).Nous sommes passs en quelques annes dune abondance suppose de res-sources naturelles une pnurie prochaine. Comment a-t-on pu arriver cettesituation de non-retour ?Cette situation est issue de la logique mme de nos socits. La finalit des socitsdmocratiques occidentales, cest lenrichissement du plus grand nombre. Et lenri-chissement matriel du plus grand nombre se traduit dans la croissance du PIB. On acru un moment donn avec le dveloppement durable que lon pourrait dcouplerla croissance du PIB de la consommation des ressources. Or, lchelle globale, cela

    ne fonctionne pas. Cette tendance trs forte, propre ce type dorganisation de la socit, trs complexe car fai-sant intervenir des paramtres multiples, nous conduisait ncessairement transgresser les capacits de rgula-tion de la plante et heurter la finitude des diffrentes ressources indispensables nos conomies. Cet abou-tissement a t maintes fois annonc : songeons notamment au Rapport Meadows au Club de Rome de 1972. Aujourdhui, apparaissent plus clairement encore les signaux du crash futur.Nous avons donc t prvenus mais navons pas voulu intgrer ce constat-l ?Non, et cela pour plusieurs raisons. La premire, que je viens dvoquer, tient notre mcanisme de fond. Ladeuxime rside en lide de dveloppement durable dont on constate aujourdhui lchec, et la troisime est ga-lement contenue dans certaines conceptions de la durabilit. Cest ce que lon appelle la substituabilit , cest--dire le fait que le march finit toujours par susciter des techniques qui vont nous permettre de nous en sortir.Les techniques sont extrmement importantes, et incontournables. Malgr tout, elles ne sont jamais que desmdiations entre nous et le monde naturel. Il nexiste pas de substitution du capital reproductible au capital naturelil y a simplement des techniques qui permettent un moment donn quand telle partie du capital naturel est pui-se de se reporter sur telle autre. Cela nest plus possible ds lors que la pnurie devient systmatique ou syst-mique, ce qui commence tre le cas avec les mtaux. Entendons bien toutefois, en matire de mtaux, il sagitdune pnurie relative plutt quabsolue, mme si lon annonce lpuisement prochain de nombre de rservesexploites ou connues. Nous trouverons trs probablement de nouveaux gisements, mais beaucoup plus pro-fonds, qui exigeront plus dnergie, et qui ne permettront probablement plus les mmes capacits dextraction.La substituabilit ne joue pas entre la technique et la nature, elle permet nos techniques dexploiter dautresaspects de la nature, ce qui fonctionnera de moins en moins sur une plante pille et dvaste.

    Pour en savoir plus Rapport des Amis de la Terre Europe et Autriche et du centre de recherches SERI :Overconsumption? Our use

    of the worlds natural resources , 2009. Commissariat gnral au Dveloppement durable :Matires mobilises par lconomie franaise. Comptes de flux pour une gestion durable des ressources , 2009.

    Commissariat gnral au Dveloppement durable :Le point sur le recyclage et le remploi, une conomie de res-sources naturelles, 2010.

    Les Amis de la Terre / Le Cniid Rapport Septembre 2010

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    2. L'tat des lieux de l'obsolescence programme desquipements lectriques et lectroniques en France

    29/ Etude de lINSEE : Cinquante ans de consommation en France , 2009, p. 1.30/ Ibidem, p. 14.31/ INSEE : La consommation des mnages en TIC depuis 45 ans , 2006, p. 1.32/ Ibidem, p. 3.33/ INSEE : La consommation des mnages depuis cinquante ans , 2009, p. 21.

    Les Trente Glorieuses ou la naissancede la consommation de masse

    Depuis cinquante ans, les Franais consomment unpeu plus chaque anne : en 2010 le volume annuel deconsommation par personne est trois fois plus levqu'en 196029.Les Trente Glorieuses ont marqu le passage uneconsommation de masse, qui s'est traduite, notamment,par une augmentation des dpenses de 4,1 % par habi-tant chaque anne30. Ces changements s'expliquent pardiffrents facteurs comme l'volution des modes de vie,l'omniprsence de la publicit mais aussi la productionindustrielle de masse et le progrs technique .La consommation de masse s'est dans un premiertemps exprime par la multiplication des biens matrielsqui a accompagn l'quipement progressif des mna-ges. Plus rcemment, une fois les mnages quips et lemarch en voie de saturation, les services de communi-cation se sont envols (comme la tlphonie, Internet,etc.). Toutefois, cet essor des services ne marque paspour autant une dmatrialisation de l'conomie puisqueces nouveaux besoins, pour tre assouvis, ncessitentl'achat de nouveaux biens. Au final, la croissance envolume des dpenses des mnages en biens manufac-turs reste toujours suprieure celle des services.

    La part de la consommation des mnages en technolo-gies de l'information et de la communication (TIC)regroupant biens et services de l'informatique, de l'lec-tronique et des tlcommunications est passe de 1,3 %en 1960 4,2 % dans les annes 200031, soit une multi-

    plication par trois. Vingt ans de baisse continue des prixd'achat des biens de consommation et de progrstechnique , selon les termes de l'INSEE, expliquent enpartie cette forte croissance. La tlphonie mobile et lesmicro-ordinateurs sont les deux produits phares de cesnouvelles technologies : leur croissance moyenneannuelle en volume est respectivement de 39 % et de 37 %depuis 199032, priode partir de laquelle leurs ventesont vraiment explos.

    Des Franais bien quips ou trop quips ?Jusqu'au milieu des annes 1980, les mnages se sontquips en gros lectromnager33. Si, depuis, le marchde ces produits est satur, presque tous les consomma-teurs tant quips, ces derniers continuent pourtant renouveler ces biens.Force est de constater qu'en 2007, les mnages franaisdisposaient presque tous d'un rfrigrateur, d'un tlvi-seur et d'un lave-linge. Prs de neuf mnages sur dixtaient quips d'un tlphone fixe et 77 % disposaientd'un tlphone portable.

    La consommation des produits lectriques et lectroniques en plein essor malgr unmarch franais satur

    0

    En indices de volume base 100 en 2000

    Dpense totale de c onsommation

    Produits des TIC

    1998 2000 2002 20041990 1992 1994 1996 2006 2008

    100

    150

    50

    200

    250

    300

    Consommation des produits des TIC

    Source : Insee, comptes nationaux - base 2000.

    99,8

    97,3

    93,9

    87,1

    85,2

    83,3

    82,3

    76,9

    58,9

    48,5

    47,8

    en %

    Champ : ens emble des mnages en France mtropolitaine.

    Rfrigrateur

    Tlvis eur couleur

    Lave-linge

    Tlphone fix e

    ConglateurMagntos copeou lecteur DVD

    Four micro-ondes

    Tlphoneportable

    Micro-ordinateurConnection

    internetLave-vaiss elle

    Taux dquipement des mnagesen biens durables en 2007

    Source : Insee, SRCV-SILC 2007.

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    L'obsolescence programme, symbole de la socit du gaspillageI 08-09

    Des biens toujours remplacsMalgr un march qui a atteint la saturation, l'achat de biensmanufacturs a doubl depuis les annes 198034 et lesachats d'quipements lectriques et lectroniques ont tmultiplis par six depuis le dbut des annes 1990. Cette

    hausse continue des achats engendre une utilisation crois-sante des ressources naturelles et par consquent leur rar-faction avec en parallle l'augmentation de la production dedchets, comme expos dans le chapitre prcdent.Depuis les annes 1990, on observe de nombreusesinnovations35 (crans plats, produits nomades36, appa-reils plus petits, nouveaux standards), qui poussent aumulti-quipement et au renouvellement des appareilslectriques et lectroniques.

    La dure de vie moyenne des produits diminue Aujourd'hui les appareils semblent avoir une dure de vieplus rduite qu'il y a 50 ans, une diminution qui se seraitaccentue cette dernire dcennie.Depuis trois ans, le taux de panne sur les produitsd'lectromnager ne s'amliore pas, ce qui rvle que lafiabilit des produits nest pas forcment une prioritpour les constructeurs37.Par exemple : le tube cathodique des anciens postesde tlvision a une dure de vie moyenne de dix quinze

    ans alors que celle d'un cran plat avoisine cinq annes.La dure de vie moyenne des appareils lectromnagerscourants serait aujourd'hui en moyenne de 6 8/9 ans alorsqu'auparavant elle tait de 10 12 ans38. Cette moyennecache des disparits entre les appareils dont les dures de vie

    varient en fonction de leur taille, de leur niveau de conception(de haute technologie ou pas) ou de leur utilisation. Par exem-ple, les machines laver et les rfrigrateurs auraient unedure de vie d'une dizaine d'annes alors que les ordinateurs(portables et fixes) durent environ cinq ans, que les tlpho-nes portables sont changs en moyenne tous les 20 mois,avant mme de tomber en panne (ils peuvent en effet vivre normalement quatre ans). La dure de vie d'un appareil varieen gnral selon trois paramtres. A titre d'exemple, la durede vie d'une machine laver est conditionne par :1) le nombre de cycles de lavage pour lequel le produit a t

    conu par le fabricant ;2) les conditions ou l'intensit d'utilisation. Ainsi, une

    machine laver conue pour un certain nombre decycles de lavage qui tourne tous les jours aura une durede vie plus courte que la mme machine qui ne tourneque deux fois par semaine ;

    3) le moment o lon decide de jeter l'appareil, mme s'ilfonctionne encore.

    34/ Commissariat gnral au Dveloppement durable : Le point sur le recyclage et le remploi, une conomie de ressources naturelles , 2010, p. 1.35/ INSEE : Cinquante ans de consommation en France , 2009, p. 25.36/ Un produit nomade est un objet portable, gnralement miniaturis par rapport son quivalent fixe, et capable de fonctionner au gr de nos dpla-

    cements (baladeur numrique, ordinateur portable, tlphone mobile, par exemple).37/ Enqute UFC Que Choisir : Fiabilit des marques dlectromnager - tat stationnaire , mars 2010.38/ Selon les propos de Jean-Paul Geai, rdacteur en chef de Que Choisir, sur l'mission Service Public de France Inter du 8 juin 2010, bass sur leurs

    enqutes de fiabilit des produits lectromnagers.

    Lvolution du secteur des appareils lectriques et lectroniques

    Marie-France Correest consultante indpendante spcialise dans la consommationet le marketing responsables. Ingnieure en design industriel et matriaux et innova-tions technologiques, elle a pass 17 ans la tte du dpartement Essais de Que

    Choisir o elle a coordonn les essais de produits pour le journal et lexpertise scienti-fique de lassociation. Globalement, on a assist une miniaturisation de la plupart des appareils domes-tiques hors appareils de gros lectromnager qui ont conserv leurs dimensions stan-dardises. Ensuite on observe une lectrisation voire lectronisation de la plu-

    part de ces appareils. Ainsi des appareils qui taient il y a quarante ans exclusivement manuels (par exemple rpe fromage, moulin pices, autocuiseurs, friteuses) com- portent dsormais une motorisation lectrique ou un affichage digital pas toujours en

    rapport avec la fonction (heure sur un four, clairage dans un sche-linge) et/ou pas vraiment ncessaire (par exemple lectronique sur un autocuiseur, rfrigrateur connect Internet).On note aussi que la priode de multiplication du petit quipement lectromnager des annes 1970 1980 (yaour-tires, fers friser, grille-pain) sest prolonge dans les annes 1990 avec lapparition dquipements totalement

    nouveaux tant la cuisine (fours pizzas, pierrades, appareils raclette, chocolatires) quau salon (lecteurs de

    cassettes VHS puis de DVD, enregistreurs minidiscs) ou autres (par exemple appareils photo APS puis numriques).Cette stratgie de segmentation et de cration dune offre toujours nouvelle sest dploye dans un contexte de

    progression technologique qui a favoris la consommation de ces quipements avec des achats de renouvellement du fait de lobsolescence technologique. La sophistication des quipements les rend plus vulnrables des pannes.

    Les Amis de la Terre / Le Cniid Rapport Septembre 2010

  • 8/8/2019 L'obsolescence programme, symbole de la socit du gaspillage Le cas des produits lectriques et lectroniques

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    Dure de vie et poids estims des appareils dquipement lectriques et lectroniques

    L'obsolescence programme ou planifie, plannedobsolescence en anglais, est le processus par lequelun bien devient obsolte pour un utilisateur donn, parceque l'objet en question n'est plus la mode ou qu'iln'est plus utilisable.Cette stratgie est planifie ou programme par lesentreprises, et le raccourcissement de la dure de vie estpens ds la conception du produit. Cela cre en perma-nence chez le consommateur un besoin concret (lappareilne fonctionne plus) ou le sentiment du besoin (lappareilne lui plat plus) de racheter de nouveaux biens.Cette obsolescence n'est pas nouvelle. La technique est neavec la rvolution industrielle et le modle productiviste. Dsla fin du XIX e sicle, l'apparition aux tats-Unis de T-shirts usage unique en est l'un des premiers signes annonciateurs.

    Dans les annes 1930, un ingnieur a propos laGeneral Electrics de dvelopper les ventes d'ampoulesde lampes de poche en accroissant l'intensit des lam-pes sans augmenter la capacit des piles. Cela a entranune diminution de la dure de vie de ces mmes ampou-les et a augment la frquence de renouvellement.Pendant cette priode de marasme conomique aux tats-Unis, l'obsolescence programme est apparue comme unesolution pour rsoudre les problmes de surproduction et pourfavoriser le phnomne de renouvellement illimit des biens.Cette stratgie s'est gnralise dans les pays industriali-ss, y compris en France, pendant la deuxime moiti du XX e sicle lors de la reprise conomique de laprs-guerreavec l'apparition de la consommation de masse, dont elleest l'un des moteurs, et le dveloppement de la publicit.Pour les produits lectriques et lectroniques cibls parnotre tude, ces techniques de diminution de la dure devie des produits taient la base utilises dans lindus-trie informatique, qui s'appuie sur le renouvellement per-manent des composants (processus, systme dexploi-tation et logiciels), mais depuis les annes 1990 et l'arri-ve des nouvelles technologies (Internet, les ordinateursde maison, etc.) ce phnomne stend tous lesdomaines de llectronique.

    Compares aux autres types de biens, les TIC connais-sent l'une des croissances les plus importantes de cescinquante dernires annes. Une croissance entameprincipalement dans les annes 1970 avec la dmocrati-sation de la tlphonie fixe, puis entretenue depuis lesannes 1990 avec Internet et la tlphonie mobile. Ainsi,les appareils lectroniques ont bel et bien tir la crois-sance de la consommation depuis cinquante ans, avecdes phases cycliques, qui correspondent aux grandesphases d'quipement des mnages : tlviseurs en noiret blanc puis en couleurs dans les annes 1960 et 1970,appareils photos dans les annes 1970, magntoscopeset camscopes dans les annes 1980, ordinateurs ettlphones portables depuis la fin des annes 1990 etenfin tout rcemment l'arrive des tlvisions cranplat. Les diffrentes techniques d'obsolescence pro-gramme permettent ainsi un march satur, de se redynamiser .Ces techniques pour diminuer la dure de vie des pro-duits ont t mises au point pour couler les stocks enpleine crise conomique, dans un contexte o les res-sources taient considres comme illimites. Aujourd'hui, ces techniques perdurent, voire sintensifient,malgr la prise de conscience des capacits d'absorptionet de rgnration limites de la plante.

    Source UNEP :Sustainable Innovation and Technology Transfer. Industrial Sector Studies, 2009, p. 41.

    Qu'est-ce que l'obsolescence programme ?

    Poids en kg2558

    0-13045

    Dure de vie en annes5-85-854810

    AppareilPC avec cranOrdinateur portableImprimante Tlphone portable TlvisionFrigidaire

    Dchets sauvages dans la rue.

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    L'obsolescence programme, symbole de la socit du gaspillageI 10-11

    39/ ADEME :Panorama de loffre de rparation en France , 2007, p.41.40/ Ibidem, p. 34.41/ Ibidem, p. 44.

    Il existe une multitude de techniques pour raccourcir ladure de vie des produits. Elles peuvent tre d'ordretechnique ou technologique, ou d'ordre psychologique(l'obsolescence esthtique ou psychologique).

    L'obsolescence technologique ou techniqueL'obsolescence technologique (ou technique) est l'en-semble des mthodes techniques pour avancer la fin devie d'un appareil. Moins de la moiti des appareils quitombent en panne sont rpars : 44 % selon une tudede l'ADEME39. Dans la plupart des cas, les appareils sont jugs obsoltes avant mme d'tre emmens chez lerparateur et mis au rebut. Selon la dernire enqute defiabilit dUFC Que Choisir, depuis 2005, les construc-teurs d'lectromnager ne se sont pas amliors sur lestaux de pannes. Selon nous, ces mauvais scores s'expliquent en partie par les diffrentes techniques pourrendre irrparables les produits.Des pices dtachesde moins en moins disponiblesLes pices de rechange sont difficiles se procurer etsont coteuses (notamment du fait des cots destockage et de gestion). La spcification des picesexplique en grande partie ce phnomne de rarfaction.Il a t constat dans une tude conduite pour l'ADEMEque la disponibilit des pices de rechange estaujourdhui problmatique, elle se serait dgrade

    depuis dix ans40. On peut dplorer qu'aucune obligationn'existe en termes de mise disposition des picesdtaches (contrairement aux voitures et aux cycles) etque la rglementation (le Code de la consommation) pr-

    voie uniquement une information sur la dure de dispo-nibilit des pices.

    Des produits indmontablesBon nombre de produits de haute technologie sontquasi indmontables voire pas du tout, l'instar del'iPad d'Apple, ce qui rend difficile la rparation. L'iPad,comme l'iPhone avant lui, est dot d'accumulateursdont la dure de vie varie entre deux et quatre ans, etqui sont directement mouls dans le plastique.Pourtant, la directive relative aux piles et accumulateursprcise que la pile ou laccumulateur doit pouvoir tredsolidaris de lappareil.Il a t constat que mme certaines pices des appa-reils lectromnagers (ou produits blancs) mis sur le mar-ch, notamment des chauffe-eau, sont aujourd'hui direc-tement moules dans du plastique et ne sont ni dmon-tables ni rparables41.Des rparateurs dEmmas nous ont signal lapparition,ces dernires annes, dappareils dont les parties exter-nes sont moules et qui donc, une fois casses, ne sontni dmontables ni rparables. Ainsi, nous avons puobserver des rfrigrateurs avec le joint directement sertidans la porte ce qui le rendait plus difficilement dmon-table que s'il tait dot de simples vis.

    Les diffrentes formes d'obsolescence programme

    L'obsolescence accrue des produits de consommation courante

    Michel Ebranest journaliste. Il a collabor pendant plus de 20 ans au mensuel QueChoisir, au sein duquel il a pass dix ans la tte du dpartement Enqutes. Il y a ra-lis de nombreuses enqutes sur la fiabilit du brun (tlviseur, magntoscope, etc.)et du blanc (four, rfrigrateur, lave-linge, etc.). C'est bel et bien lobsolescence de plus en plus rapide des produits de notre viequotidienne qui pose souci. Et si ces appareils tombent en panne ou ne remplissent

    plus leurs missions, cest avant tout parce quils sont bourrs dlectronique. Cest exactement la mme chose avec lautomobile. Et la cl de la dure de vie est dsor-

    mais bel et bien celle de linformatique embarque bord des objets qui encombrent notre quotidien. Prenons lexemple dun lecteur multimdia mp3 vieux de quatre ans.Il fonctionne encore trs bien et pourtant, il va finir, au mieux au fond dun tiroir, au pire

    la dchetterie ! Sa mmoire dsormais trique lui interdit de stocker un film en format numrique et son cran riquiqui noffre aucun confort de visionnage. Du coup, ce walkman gnial na plus la cote et sera remplac

    par un mp4 aux standards de 2010 en attendant le nouveau diktat informatique qui dmodera le nouveau venudici six mois.

    Les Amis de la Terre / Le Cniid Rapport Septembre 2010

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    42/ Communiqu de Presse du GIFAM.

    Une sophistication croissante des appareilsLe lave-linge de demain sera dot d'une intelligence arti-ficielle : il saura doser, faire des conomies deau... Cettesophistication entrane nanmoins une complexificationdes systmes qui fait que les appareils sont plus souventsusceptibles de tomber en panne et seront plus compli-qus rparer. D'ailleurs, de nos jours, le rparateurn'est pas toujours comptent, car le mcanicien d'hierdoit aussi tre aujourdhui lectronicien et faire voluerses comptences au rythme effrn des innovationstechnologiques.

    L'incompatibilitLa conception de programmes toujours plus gourmandsen ressources informatiques oblige un changementde matriel plus frquent. C'est particulirement frappanten ce qui concerne les jeux vido qui entranent le marchde l'informatique dans une qute vers toujours plus depuissance. Les logiciels et jeux toujours plus performantsncessitent en effet un matriel plus rcent. La course laperformance et la comptition qui en dcoule fait partiedes stratgies utilises pour favoriser le renouvellementd'un parc informatique rendu lent et pnible utiliser.

    Des appareils moins robustesLa recherche du bas prix se fait au dtriment de la soliditet de la qualit des appareils. Flagrante pour d'autresbiens de consommation courante comme le textile, elletouche galement les biens lectromnagers : certainstambours de lave-linge ne sont plus fabriqus en mtalaujourd'hui mais en plastique, ce qui augmente leur fragi-lit. L'accs de tous aux quipements lectriques et lec-troniques occasionne ainsi une baisse dequalit et une dure de vie plusrestreinte des appareils.Cela se solde une impor-tante production dedchets.Une solidit moin-dre peut gale-ment rsulter dufait que l'esthti-que prime sur les

    aspects de pro-tection et de soli-dit. C'est le casdes consoles de jeux vido nomades.L'utilisateur en dpla-cement expose laconsole des chocs ou des chutes que ne peutpas forcment supporter uncran ou une carte mre. Un renforcementde la protection se ferait en revanche au dtriment dudesign et du poids unitaire.Ce constat est confirm par la liste de rparations typepar console prtablie par un rparateur (voir www.repa-ration-de-console-paris.com).

    Largument cologique : une nouvelle formed'obsolescence programme ?Largument cologique justifierait dornavant la miseau rebut d'un ancien appareil pour un bien quiconsomme moins d'nergie. Le Groupement interpro-fessionnel des fabricants d'appareils d'quipementmnager (GIFAM) prcise ainsi que le march de

    l'lectromnager renoue avec la croissance et assureque le renouvellement des 25 millions d'appareils lectro-

    mnagers de plus de 10 ans par des appareils rcents performants permettrait d'conomiser 5,7 milliards de kWh, soit la consommation annuelle des Parisiens 42 .

    Ces dernires dcennies, l'innovation technologique asans aucun doute permis des avances au niveau del'optimisation de la consommation de ressources. Toutefois il faut tre vigilant concernant l'argumentaire devente qui consiste inciter l'achat pour conomiser del'nergie et raliser des conomies. Il faut en effet resituer

    Les progrs de l'lectronique (baisse de

    consommation lectrique et consommation d'eau...) ont un revers

    flagrant sur la longvit. En effet, la proli-fration de l'lectronique apporte son lot de

    progrs, mais les pannes qui en dcoulent sont trs chres et malgr tout assez fr-quentes. La majorit des avaries sont dsor- mais lectroniques ce qui n'existait pas auparavant. En tout cas pas dans les

    mmes proportions. Alors que sur la mme priode, les parties mcani-

    ques survivent trs bien.

    Michel Ebran

    Exemple d'utilisation de plastique de mauvaise qualit(planche qui jaunit avec le temps).

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    L'obsolescence programme, symbole de la socit du gaspillageI 12-13

    La dure de vie programme des produits : info ou intox ?

    Linda Bendaliest journaliste. Elle est l'auteure du reportage sur le secteur des quipementslectriques et lectroniques TV, hi-fi, lectromnager le grand bluff , diffus en fvrier 2010dans lmission Envoy Spcial sur France 2.Dans le cadre de votre enqute, vous avez rencontr les fabricants et leur avez parlde la dure de vie programme des produits. Quelles taient leurs ractions ?Ils taient trs frileux , il sagit en effet dune question taboue. Pourtant lorsque lonconoit un produit, on choisit des matriaux et des processus spcifiques qui influeront surla dure de vie du produit. Il est donc possible, en tant quingnieur, de la calculer. Ce quima interpelle est le fait que cela soit tabou alors quil sagit dune vidence. La dure devie est connue pour chaque produit conu. Le tabou existe car ce domaine relve du secretindustriel. Je me suis par ailleurs rendue compte que trs peu de personnes en interne

    connaissent la possibilit de calculer la dure de vie dun produit. Cela nest pas tonnant dans la mesure o les proces-sus de conception sont tellement compartiments et font intervenir des personnels diffrents. Le service marketing enamont dfinit un cahier des charges avec une dure de vie, le transmet certains ingnieurs qui leur tour le transmet-tent dautres ingnieurs, etc. Linformation est ainsi dispatche dans une chane de conception au sein de laquelle cha-

    cun travaille dans son coin. Il tait en effet difficile didentifier les personnes connaissant la dure de vie du produit. Toutefois, il y a une personne dans la chane qui la connat, mais linformation ne circule pas et du coup ne sort pas.Personne ne se soucie donc rellement de la question ?Pour le reportage, nous avons rencontr deux personnes chez un fabricant, respectivement ingnieur et chef de pro-duit. Ce dernier ne stait visiblement jamais pos la question de la dure de vie car ce nest pas une informationquil va mettre en avant pour vendre un nouveau produit. Lingnieur en revanche avait une ide de la dure de viedu produit et semblait nerv que je lui pose cette question. Il a dailleurs refus de donner une rponse claire. Avez-vous par ailleurs eu d'autres chos ?Suite lmission, un site Internet spcialis dans les nouvelles technologies a pos galement la question auxfabricants. La rdaction de ce site avait post un premier commentaire sur le site Internet de France 2 disant queles fabricants navaient aucun problme avec la dure de vie des produits et que le reportage visait les piger.Le site avait galement publi un article expliquant que le reportage tait mont de toutes pices.

    Mais lorsque les rdacteurs du site Internet spcialis ont reu les rponses au questionnaire, leur article suivant confirmaitles propos du reportage, savoir que la question de la dure de vie est taboue et que la plupart des personnels ne la connais-sent pas. Les fabricants navaient pas voulu leur communiquer de dure de vie des produits. La seule dure de vie quils ontbien voulu diffuser est celle de la dalle (dispositif d'affichage d'un cran plat, ndlr ) ou de lcran, mais elle diffre de la durede vie de lensemble de lappareil.Les fabricants, lorsquils lancent un produit, cherchent combiner deux objectifs : une production un cotacceptable et la satisfaction client. Une marque ne peut pas se permettre de mettre sur le march des produitsqui cassent trop rapidement.La dure de vie prvue la conception na pas volu et les produits ne susent pas plus vite quil y a dix ans,mais les consommateurs les utilisent plus frquemment. Ainsi la dure de vie estde facto rduite. Par exemple,une machine laver est conue pour 2 500 cycles de lavage : auparavant les mnages lutilisaient pendant 15ans, aujourdhui ce nest plus que dix ans. Cependant, il est certain que grce aux avances technologiques dau- jourdhui, les fabricants devraient tre en mesure de produire des biens qui durent plus longtemps.

    Un dernier mot ?Lenqute ma permis de constater quil existe une vraie volont de matriser la dure de vie des produits. Dunepart, il ne faut pas proposer de produits qui durent moins de deux ans car sinon ils sont encore sous garantie etle remplacement ou la rparation est la charge du fabricant ou du distributeur. Dautre part, ces derniers se jus-tifient par le seuil psychologique qui fait que les consommateurs changent lappareil tous les six ou sept ans.Les fabricants adaptent donc les produits par le biais de linnovation au rythme de renouvellement par les mna-ges alors quils pourraient insister sur le fait que les biens peuvent sutiliser plus longtemps.

    Les Amis de la Terre / Le Cniid Rapport Septembre 2010

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    43/ Rapport des Amis de la Terre Europe, des Amis de la Terre Autriche et du centre de recherche SERI :Overconsumption? Our use of the worlds natural resources , 2009, p. 25.

    44/ Ibidem.45/ Ministre de lEcologie, de lnergie, du dveloppement durable et de lamnagement du territoire, ministre de lEconomie, de lindustrie et de lemploi, Conseil

    gnral de l'Environnement et du dveloppement durable, Conseil gnral des Technologies de linformation : TIC et dveloppement durable , 2008, p. 2.

    la phase d'utilisation du produit par rapport son cyclede vie et au type de produit. Ainsi, le petit lectromnagera dj atteint sa maturit nergtique, et l'argument co-logique du rachat n'est ici plus valable.

    Aujourd'hui, pour fabriquer le mme bien, nous utilisonsmoins de matire et moins d'nergie que par le pass.Pendant sa phase d'utilisation l'appareil est galementmoins nergivore. Le premier tlphone portable mis surle march en 1983 pesait 1,5 kg, ceux d'aujourd'huipsent environ 100 grammes. Un portable mobilisemaintenant moins de matires premires, mais c'estsans compter l'effet rebond43. Cette meilleure efficacitde la matire entrane une diminution des cots d'exploi-tation et par consquent du prix des appareils. Celaengendre l'explosion des ventes, et en retour, unehausse de consommation de ressources naturelles. Les2,5 milliards de tlphones portables44 vendus dans lemonde en 2009 psent environ 250 000 tonnes.

    A titre dexemple, en France, la consommation lie aux TIC est comprise entre 55 et 60 TWh par an, soit 13,5 %de la consommation dlectricit par les applicationsfinales. Cette consommation augmente un rythme sou-tenu, denviron 10 % par an sur les dix dernires annes.

    Les perspectives proches, notamment larrive de laTlvision numrique terrestre (TNT) et de la Haute dfi- nition (HD), ne permettent pas desprer un quelconque ralentissement de cette consommation court terme 45 .

    Si les nouvelles gnrations d'appareils sont moins nergi-vores compte tenu de la consommation de chaque appareil,elles sont galement plus sophistiques. Par consquent,elles sont plus souvent soumises la panne et plus com-pliques rparer, do une dure de vie rduite.En plus de raliser des efforts sur la consommation nergti-que pendant l'utilisation des produits, il faut allonger leurdure de vie pour rduire leur impact sur la consommation deressources naturelles et diminuer la production de dchets.

    Console de jeu portable casse et irrparable.

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    L'obsolescence programme, symbole de la socit du gaspillageI 14-15

    46/ Etude de l'INSEE, Cinquante ans de consommation , 2009.47/ ADEME : Panorama de loffre de rparation en France , 2007, p.8.48/ Agence rgionale de Haute-Normandie : dossier Le boom des tlphones portables... mais aussi des dchets , dcembre 2008.49/ Colin Campbell :The Romantic Ethic and the Spirit of the Modern Consumerism , 1987.

    Les Amis de la Terre / Le Cniid Rapport Septembre 2010

    L'obsolescence psychologique (ou esthtique)Lobsolescence esthtique ou psychologique intervientavant mme la mort technique ou la panne ventuelledu produit : c'est le phnomne de sparation avec unbien lorsque l'on n'y est plus attach ou que son attrait

    cesse de s'exercer (au profit d'un bien de substitution).L'effet de mode : des produits porteurs d'imageLes produits refltent aujourdhui le nomadisme de notresocit multi-quipe et le secteur des appareils lectri-ques et lectroniques ny chappe pas. Ainsi, des appa-reils autrefois sobres et indmodables sont aujourdhui customiss pour amliorer le design d'intrieur ; lesrfrigrateurs couleur aluminium sont aujourdhui lamode, mais une fois cette mode passe, le particulier ris-quera de se lasser de son objet et de l'abandonner.Cette tendance est particulirement rpandue dans lepetit lectromnager du fait du faible cot d'achat (parexemple, une bouilloire moins de 20 euros pourra ainsi

    tre change au gr de la mode).L'attrait pour le nouveauLa premire cause de non-rparation des produits vo-que par les consommateurs est l'attrait pour de nou-veaux produits, qui vont remplacer l'appareil en panne47.Les consommateurs sont attirs par la nouveaut, l'ori-ginal, et rejettent ce qui est vieux, dmod et us.

    Reprenons l'exemple des tlphones portables : les nou-velles fonctions technologiques, les offres clientle, lespoints de fidlit et des tarifs toujours plus attractifs ,mais conditionns un engagement contraignant, pourlacquisition dun nouveau modle sont autant de raisons

    qui poussent les consommateurs avoir le tlphonedernier cri ou le tlphone de technologie de pointe .Un tel engouement et le nombre exponentiel dutilisa-teurs (de plus en plus jeunes) ont amplifi le problme liaux DEEE. La priodicit serait de 20 mois en moyennepour le renouvellement dun portable (10 mois pour les12-17 ans, 33 pour les plus de 60 ans)48.

    Le succs d'Apple ne tiendrait pas tellement au carac-tre rvolutionnaire des nouveaux biens que la firmemet sur le march, mais plutt sa matrise du design etde la conception de produits qui semblent futuristes. Lasortie rcente de l'iPad, une tablette numrique mi-chemin entre l'ordinateur portable et le tlphone, est en

    ce sens rvlatrice de cette stratgie. En effet, le succsde l'iPad peut tre en partie expliqu par les capacits dela marque crer de nouveaux besoins.

    Si l'attrait pour la nouveaut est suscit par la publicit etles stratgies marketing des entreprises, il serait toutefoistrop simpliste d'imputer l'entire responsabilit aux

    entreprises car le consommateur peut utiliser son librearbitre et se comporter en acteur rationnel. Selon lesociologue Colin Campbell, le trait dominant du consom-mateur de la deuxime moiti du XX e sicle est son insa-tiabilit, cette propension vouloir tout prix acqurir ledernier bien de consommation. Il parle ainsi de neophi-lia (l'amour des nouvelles choses) et dcrit trois typesde nouveaux consommateurs : celui qui veut mainte-nir une image immacule de lui-mme, l'avant-gardisteet enfin le fanatique de la mode49.

    Ces diffrentes formes dobsolescence programmeservent un modle conomique que la production nour-rit par le renouvellement des biens et le multi-quipe-ment. Un des lments de cette course la consomma-tion est le fait que nous ne rparons plus nos produits, etque les services aprs-vente des distributeurs dquipe-ments lectriques et lectroniques, font trop peu deffortspour rparer les produits quils vendent.

    Pour en savoir plusGiles Slade, Made to break Technology and Obsolescence in America , Harvard University press, 2007. Vance Packard, Lart du gaspillage , Calmann-Lvy, 1962.

    Collecteur de tlphones portables hors d'usage.

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    50/ European Environmental Citizens Organisation for Standardisation, www.ecostandard.org.

    Les politiques europennes et l'obsolescence des produits

    Edouard Toulouse est spcialiste des politiques europennes d'coconception pourECOS46. Il milite pour rendre les produits de grande consommation plus cologiques.

    Les politiques europennes aident-elle lutter contre l'obsolescence des produits ?L'Union europenne a adopt une directive qui impose des normes minimales de per-formance cologique aux produits consommateurs d'nergie, notamment les appa-reils lectroniques (tlvisions, ordinateurs, consoles de jeux, etc.). En thorie tous lesaspects environnementaux peuvent tre couverts, tels que la consommation d'ner-gie, l'utilisation de ressources, la fin de vie, la recyclabilit.En pratique, la mise en uvre de mesures pour lutter contre l'obsolescence et accro-tre la dure de vie ou la rparabilit des produits s'avre pour l'instant difficile. Il y aquelques succs, comme une dure de vie minimale fixe pour les ampoules ou l'im-

    position progressive d'un chargeur unique pour les tlphones portables. Mais pour le reste, on nous rtorquesouvent le manque de dfinitions prcises et de mthodes de vrification pour ces aspects. En outre, les fabri-cants ne sont pas vraiment motivs, ils poussent plutt pour acclrer le renouvellement des stocks.L'effet de l'obsolescence de plus en plus rapide de certains types de produits est-il analys dans le cadre

    de cette directive ?Il est intressant de noter que la question de la dure de vie peut avoir une importance cl dans les analyses decycle de vie des produits, et donc dans les recommandations en terme d'co-conception. Par exemple, si l'onconsidre une dure de vie thorique de 6 ou 7 ans pour un ordinateur, alors il s'avre que le principal impactcologique du produit pendant son cycle de vie sera sa consommation d'lectricit (donc lie son efficacitnergtique). Mais une tude du Bureau europen de l'environnement de 2009 a soulign que si on se base plu-tt sur 3,5 ans de dure de vie (en raison de l'obsolescence rapide des matriels informatiques) et qu'on prenden compte toute l'nergie ncessaire la fabrication des circuits lectroniques, alors c'est la phase de fabricationdu produit qui est la plus impactante sur l'environnement. Ce qui pourrait suggrer d'autres types de mesuresrglementaires. Mais la Commission europenne n'a pas encore franchi ce pas.La situation peut-elle s'amliorer ?Cette directive europenne sur l'coconception des produits sera rvise en 2012, avec une valuation de l'effetdes premires mesures. Certains Etats membres de l'UE sont conscients de la faible prise en compte de certainsaspects et souhaiteraient rendre cette politique plus ambitieuse.On est aussi dans un contexte o l'on parle de plus en plus des risques d'puisement des ressources. LaCommission europenne a publi une tude alertant sur les rserves des mtaux rares entrant dans la composi-tion des appareils lectroniques et informatiques. Ceci devrait contribuer rendre ces produits plus durables etmieux recyclables.Mais pour cela, il faudra tre capable de traduire prcisment dans des rglementations ce que pourrait tre unniveau obligatoire de non-obsolescence ou de faible obsolescence . Un dbat passionnant mais difficile.Pour en savoir plusLe site web de la campagne cool products for a cool planet des ONG europennes prsente en termes simplesles enjeux et dcisions de la directive europenne sur l'co-conception.www.coolproducts.eu (uniquement enanglais pour l'instant).

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    L'obsolescence programme, symbole de la socit du gaspillageI 16-17

    Les Amis de la Terre et le Cniid ont ralis uneenqute par questionnaire sur le service aprs-vente desprincipaux distributeurs franais : Darty, Auchan,Conforama, Casino, Leclerc, Carrefour, BUT etBoulanger.

    Son objectif ? Mesurer les efforts mis en place par lesdistributeurs pour allonger la dure de vie des produitsgrce l'entretien et la rparation des produits lectri-ques et lectroniques. Pour cela, nous avons rencontrdes reprsentants de Darty et de Carrefour et avons ana-lys les rponses crites reues de la part de Darty,Conforama, Casino, BUT et Carrefour.

    Boulanger, Auchan et Leclerc nont pas souhait rpondre nos questions.

    Une diminution de la dure de vie moyenne est globale-ment observe par lensemble des distributeurs dquipe-ments lectriques et lectroniques en charge de la main-tenance et de la rparation des appareils. Selon nous,cette diminution ne sexplique pas par un seul facteur,mais par une coresponsabilit des trois principaux typesdacteurs : fabricants, distributeurs et consommateurs. Voici les principales rponses des distributeurs sur le ser-vice aprs-vente des produits lectriques et lectroniquesquils commercialisent :

    1) Selon vous, certains quipements sont-ils plusou moins adapts lentretien et la rparation ?

    BUT : La notion de valeur unitaire des produits (le prixdu produit, ndlr) ne peut pas tre exclue de ce dbat.

    Carrefour : Les produits forte volution technolo-gique tels que les produits multimdia (ordinateurs, lec-teurs mp3) ont une forte obsolescence. Cependant,leur volution intgre des avances en terme dcono-

    mie dnergie, de recyclabilit Sur ces produits forte volution technologique, la disponibilit des pi-ces dtaches est un problme majeur. Par exemple, ildevient difficile de trouver des pices dtaches deproduits informatiques utilisant danciennes technolo-gies des prix raisonnables.

    Casino : Les petits appareils bruns (baladeurs, petitson), le petit lectromnager (hors micro-ordinateurs,aspirateurs et robots) et les petits produits gris (souris,claviers, imprimantes 1er prix) sont les moins adapts la rparation par rapport leur prix de vente public plusfaible que le cot de rparation.

    Conforama : Plus adaptes : le GEM ; moins adap-tes : la tlvision et la micro-informatique .

    Darty indique que plusieurs facteurs, au-del de larparabilit, sont prendre en compte. Le premier estsans doute le rapport entre le cot conomique de larparation et le cot de remplacement neuf. Ensuite,lobsolescence technique, trs forte sur les produitsbruns, incite galement les clients au remplacementplutt qu la rparation.

    2) Quel est lge moyen partir duquel vousconsidrez les diffrentes catgories de produitscomme non-rparables ? Cet ge moyen a-t-ilvolu au cours des dix dernires annes ?

    BUT : Lge du produit nest pour nous pas un cri-tre pour dfinir sil est rparable. En revanche, cesont les notions de disponibilit et de prix des picesdtaches qui sont bien souvent rdhibitoires tantpour le distributeur durant la priode de garantie quepour le consommateur hors priode de garantie. Cephnomne est encore plus marqu pour la tlvisionpar exemple, du fait dune dflation permanente de lavaleur des produits, qui en plus bnficient dvolu-tions technologiques supplmentaires.

    Carrefour : La question ne se pose pas dans cestermes, il existe des gammes de qualit et prix trsdiffrentes lintrieur dune mme famille. Au fil desans, les produits tant devenus de plus en plus acces-sibles, le rapport entre le cot de rparation et le cotdachat a augment, nincitant pas la rparation.

    Casino : Age moyen pour non rparable : produitsbruns : 5 ans, PEM : 4 ans, GEM : 8 ans, produits gris :4 ans. Oui, lge moyen a fortement chut pour le brunet le PEM. Le gris a toujours t plutt bas.

    Conforama : Il ny a pas dge moyen par type deproduit, cela dpend de la qualit de fabrication doncdu niveau de gamme et de la frquence dutilisation.Des carts sensibles sont constats. Le produit dure

    3. L'indiffrence collective face la baisse de la rparation

    Notre commentaire :si la rponse de BUT reste dans labsolula plus vasive, lensemble des acteurs confirme le dilemmeconomique entre rparation et rachat d'un quipement neuf. A ce sujet, les distributeurs ont donc un rle important jouerpour guider le consommateur vers un choix plus responsable :prfrer la rparation pour viter des dchets.

    Les Amis de la Terre / Le Cniid Rapport Septembre 2010

    >>Le GEM ou le grand lectromnager :rfrigrateur, lave linge, lave vaisselle, etc.Le PEM ou le petit lectromnager :aspirateur, bouilloire, cafetire, etc.Les produits bruns : appareils audiovisuels : tlvision, magntoscope, etc.Les produits gris : appareils informatiques et bureautiques : micro-ordinateurs, tlphonie, etc.

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    plus longtemps quand il ny a pas ou trs peu demcanique. Il faut noter que la dure de vie est aussiconditionne par les avances technologiques per-manentes qui incitent les clients changer dappareil,cest un critre important dont on parle trs peu dans

    le cadre du dveloppement durable. Darty : Les critres pris en compte ne sont pasdirectement lis lge du produit, mais bien larbi-trage cot de rparation versus cot de remplace-ment neuf qui reste le principal enjeu, tant pour leconsommateur que pour lentreprise. Ce qui est cer-tain, cest que la baisse du prix de vente moyen desproduits associe lacclration de linnovationtechnologique a accru le remplacement des produitsau dtriment de leur rparation.

    3 ) Quelles sont par ordre croissant les trois pre-mires catgories de produits lectriques et lec-troniques pour lesquelles vous obtenez les tauxde rparation les plus levs ? Selon vous, quel-les en sont les raisons ?

    Carrefour : Le gros lectromnager : machine laver, lave-vaisselle. Les produits bruns utilisant unelentille laser : lecteurs DVD, lecteurs CD.Les produits

    lectromcaniques sont par nature plus sensibles auxpannes puisquils comportent, par construction, despices dusure qui ont une dure de vie finie. La fr-quence dusage des produits et les conditions dutili-sation sont trs variables selon le domicile de lutilisa-teur (par exemple : duret de leau/respect des consi-gnes de chargement sur une machine laver) et peu-vent fortement altrer la dure de vie du produit. Pourles lecteurs DVD et optiques, tout dpend de la qua-lit du loader (chargeur, ndlr) trs variable selon lesfabricants et selon les supports lus (CD/DVD).

    BUT : Dune manire gnrale (sans que le respon-sable ait de chiffres en particulier sa disposition,ndlr) il semble que ce soient les catgories du GEMqui reprsentent les taux de rparation les plus levs,sagissant encore de produits mcaniques , avecune capacit des quipes dintervenir assez facilementlorsquil sagit dun problme plus lectronique :lave-linge, cuisinires, lave-vaisselle.

    Casino : GEM : lave-linge, rfrigrateur et lave-vais-selle. Prix de vente lev. Produit lourd, produit utileavec peu dobsolescence.

    Conforama : absence de statistiques.

    Darty : Les produits les plus rpars sont les produitsles plus chers pour lesquels la rparation est cono-miquement viable.

    4) Quels sont, selon vous, les freins la rparation ?BUT : La disponibilit dans le temps des pices dta-ches, et surtout le prix unitaire des pices dtaches.

    Carrefour : Labsence dun parc industriel lectro-nique grand public en Europe : la majorit des pro-duits sont fabriqus en Chine, le savoir-faire technique

    Notre commentaire : se contenter, pour Casino, d'avancerdes dures de vie relativement courtes pour les appareils sans

    apporter plus de prcisions est insuffisant, mais ces donnesse rapprochent de la dure de vie moyenne estime des pro-duits (voir le chapitre 2). La prise en compte du prix de rpa-ration (intervention et pices dtaches) lemporte encore unefois sur les aspects de prservation de lenvironnement. Surun produit hors garantie, il est comprhensible que leconsommateur finisse par arbitrer en faveur dun nouvel achatds lors que le produit reprsente un intrt essentiel pour savie de tous les jours (le rfrigrateur par exemple) et que larparation se complique. Mais dans le cas dune tlvision, lefait quil ne souhaite pas attendre une pice dtache car lerachat dun nouvel appareil lui revient peine plus cher estplus que regrettable. La baisse du prix de vente moyen des

    produits associe lacclration de linnovation technologi-que , comme le prcise Darty, favorise bien le rachat au dtri-ment de la rparation et nous entrane dans le cercle vicieuxdune consommation excessive.

    Notre commentaire : le GEM se distingue notamment parla politique relative aux pices dtaches de la majorit desfabricants de cette catgorie de produits : les pices dta-ches sont disponibles pendant dix ans aprs la mise sur lemarch de lappareil. Toutefois, le prix et les dlais de dispo-nibilit peuvent dissuader le consommateur de faire rparer.Les produits GEM sont en effet des produits trs utiliss dansla vie quotidienne et ncessitent une rparation rapide.Se contenter pour Conforama davancer labsence de statis-tiques est surprenant alors quil dclare dans le questionnaireque ses quipes sont motives pour rparer, cest le cur de notre mtier et nous mettons tout en uvre pour cela. Enlabsence de chiffres, cet engagement a peu de valeurpuisquil ne peut pas faire lobjet dun suivi, ni doprationsdincitation des quipes.

    droite, rsistance de machine laver mal entretenue.

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    L'obsolescence programme, symbole de la socit du gaspillageI 18-19

    est donc moins accessible et les donnes techniquesplus complexes rcuprer. La valeur du produitver-sus le cot de la structure pour rparer le produit. Leproduit est-il conomiquement rparable ? La dispo-nibilit des pices dtaches sur le long terme pour

    les produits forte obsolescence technologique. Lademande du consommateur qui prfre recevoir unproduit neuf plutt que rpar lorsque le produittombe en panne en priode de garantie.

    Casino : Le rapport prix du produit/prix de la rpa-ration ; le prix des pices dtaches ; la mauvaiseimage des SAV en gnral ; lobsolescence des pro-duits ; la nouveaut.

    Conforama : Les volutions technologiques(notamment sur le brun et le gris) ; le cot du SAV deplus en plus lev ; la pression sur les prix et pour cer-tains produits la difficult obtenir des pices ainsique leur cot de plus en plus lev qui incitent lchange. Darty se rfre aux lments prcdemment vo-qus dans la rponse au questionnaire, soit : la baisse du prix de vente moyen des produits asso-

    cie lacclration de linnovation technologique ; larbitrage cot de rparationversus cot de rem-

    placement neuf ; lobsolescence technique, trs forte sur les produits

    bruns.

    Lintervention du SAV sur un produit sous ou hors garan-tie nest pas utilise par les distributeurs pour allonger ladure de vie des produits, ni prsente comme telle. Larparation ne semble pas une priorit dans leur concep-

    tion de la qualit et de la satisfaction du client. Aucun desdistributeurs ayant particip lenqute nindique claire-ment inciter le consommateur la rparation.Parmi les distributeurs interrogs, la rmunration destechniciens comporte une part variable et les critrespour attribuer la prime sont plus ou moins flous : selon la qualit dexcution de lintervention pour

    Carrefour ; pour Casino, en fonction du pourcentage dappareils

    dpanns la premire intervention ; en tenant compte des interventions termines essen-

    tiellement pour BUT ;

    pour Conforama, selon le nombre dinterventions maissurtout le taux de rparations termines au premier pas-sage ;

    pour Darty, selon le taux de rparations termines le jour mme de lintervention et le taux de fiabilit des

    rparations .Les termes appareils dpanns ou encore rpara-tions termines ne signifient pas systmatiquementrparation russie mais, dans labsolu, qu'une solution at trouve pour le consommateur. Ce systme dermunration nincite pas assez les techniciens rparer.Nous constatons galement un manque de suivi et detransparence relatif linformation sur le service aprs-vente et la dure de vie des produits : peu de chiffressont communiqus sur les taux de panne et de rpara-tion par type de produit. Ces donnes sont confidentiel-les, indisponibles ou partielles. Il semblerait en effet que,au lieu de servir promouvoir une meilleure durabilit etune rparabilit accrue des produits, elles servent avanttout aux distributeurs ngocier leurs marges avec lesfabricants.Darty prfre dailleurs au mot panne , le concept de demande dassistance . En effet, les produits sont de plus en plus connects entre eux et complexes uti-

    liser. Et alors que parfois le produit nest pas physique- ment en panne les clients rencontrent de plus en plus dedifficults utiliser leur produit. Comme pour une panne,ces demandes dassistance sont prises en charge par

    lassistance tlphonique et si ncessaire par linterven-tion dun technicien domicile ou le dpt du produit aucomptoir SAV du magasin. Cest ainsi plus de 3 millions

    de demandes dassistance qui sont rsolues par Darty tous les ans. Une part importante de ces demandesdassistance est rsolue par tlphone (80 % en multi-

    mdia, 40 % en brun et 20 % en GEM).

    La rduction de la dure de vie des appareils semblelaisser les distributeurs indiffrents, et un travail en faveurdvolutions positives dans ce domaine ne semble pastre lordre du jour. Seul Conforama prcise que ladure de vie est un critre important dont on parle trs

    peu dans le cadre du dveloppement durable .

    Le modle conomique actuel et les business plans sontdonc conus autour de la vente des produits et nonautour de la fonctionnalit apporte par les produits : ilspoussent par consquent au remplacement et non lal-longement de la dure de vie des produits. Selon WalterStahel, directeur de lInstitut de la Dure bas Genve,les incitations conomiques produire des biens lectro-niques programms pour durer sont actuellement inexis-tantes ( ce sujet, voir galement le point de vued'Edouard Toulouse, p. 16). Aujourdhui, lurgence nest plus de devenir un des leaderseuropens dans la gestion des DEEE, mais de les viter(voir nos demandes politiques dans le chapitre 4). LaFrance doit voluer au plus vite vers une rfrence enmatire d'coconception et d'conomie des services.

    Notre commentaire : les distributeurs ne fabriquent pas lesproduits et sont par consquent tributaires des services des

    fabricants. Mais ils disposent toutefois de moyens pour fairepression sur les fabricants pour obtenir une meilleure disponi-bilit des pices dtaches. A ce sujet, Conforama prcisedailleurs que nous intervenons aujourdhui lors des ngo-ciations pour challenger les fournisseurs sur la fiabilit de leurs

    produits (indicateurs du taux de panne), le cot du SAV par fournisseur est intgr dans le cot total. Nous imposons des

    normes concernant la disponibilit des pices dtaches.

    Les Amis de la Terre / Le Cniid Rapport Septembre 2010

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    Le service aprs-vente reste largement perfectibleLavis de Linda BendaliQuelles sont les faiblesses et pistes damlioration du SAV franais ?

    Le premier aspect concerne le SAV propos par les magasins distributeurs. Ils veulent proposer ce service en faisant sem-blant de fournir un service 24h/24 et 7 jours/7 le plus complet possible sans pour autant y consacrer les moyens suffisants,en termes de personnel. Il sagit dune simple vitrine, tant donn quils demandent chaque technicien deffectuer entredix et douze interventions domicile. Sur une journe de travail cela signifie que, soit le technicien parvient situer la panneassez rapidement et cela va lui demander 15-20 minutes, soit quil se rend compte au bout de quelques minutes que cestplus compliqu que cela, et dclarera lappareil bon pour la poubelle . Passer du temps chez le client et y revenir ven-tuellement leur cote en effet cher. Les distributeurs donnent lillusion de proposer un service, mais il faut bien avoirconscience que dispenser un SAV cote beaucoup dargent, par exemple pour la formation du personnel.Certaines pannes sont faciles solutionner en 20 minutes, mais dans 75 % des cas, il faut y consacrer une heure.Les distributeurs partent du principe quils facturent une demi-heure de service et restent 20 minutes. A unmoment, ces enseignes ont dcid de dsinvestir en force de travail et poussent de nos jours plutt lchange.Le fait que le service soit organis par des distributeurs qui sont galement revendeurs revient un intrt directpour ces derniers dinciter les personnes racheter.Si lappareil en panne est encore sous garantie, comme le tout sera leur charge, ils vont se dbrouiller pour rparer.

    Pour les appareils hors garantie, les distributeurs estiment 20 % les interventions qui conduisent la rparation.La premire chose consiste donc se donner les moyens en personnel et en finances pour effectivement propo-ser un vrai SAV dont lobjectif est de rparer et non pas de faire changer lappareil.Et du ct des fabricants ?Le deuxime aspect concerne les fabricants qui freinent aussi la rparation en limitant l'accs aux pices dtaches.Pendant les deux ans de la garantie, les pices dtaches sont disponibles car le fabricant et le distributeur ontune obligation de remplacer. Au-del de ce dlai, le stock de pices dtaches nest plus prvu.Nous avons provoqu une panne sur une petite carte tlviseur et nous leur avons demand de venir tester lapanne. Les techniciens ntaient pas forms. Ils arrivaient et identifiaient bien la carte lectronique comme tant lorigine de la panne cette carte cote 300 euros minimum. Sauf que, mme si le technicien avait voulu larparer, la carte lectronique ntait dj plus fournie par le fabricant, bien que le tlviseur en question nait quedeux ans. Il nous a expliqu que pour de nombreux produits bruns (tlviseur, lecteur DVD, etc.) la disponibilitdes pices dtaches sarrte souvent au bout de deux ans.

    Cette situation, est-elle gnralisable lensemble des produits ?Non, par exemple la plupart des marques des produits blancs (frigidaire, lave-linge, etc.) sengagent les fournir pen-dant dix ans. Toutefois, se pose la question des prix : il existe galement une politique des fabricants qui consiste proposer des pices dtaches qui sont quasiment au prix de lappareil neuf. Une logique conomique peut expli-quer ce prix lev des pices dtaches, notamment car il ne sagit pas de flux importants. Mais lorsque la pice estplus chre que lappareil neuf entier, lobjectif nest vraiment pas de faire rparer. Pour un citoyen-consommateur quise trouve face au distributeur ou un rparateur, le parcours est jalonn pour empcher la rparation.La satisfaction du client semble value sur le critre de la prsence du rparateur (dlai dintervention,politesse) plus que sur la rparation russie du bien. Quelle tait votre observation ce sujet ?Les distributeurs jugent la satisfaction non pas au service rendu, mais au fait de stre rendus disponible pour ventuel-lement rendre ce service. Les techniciens sont par exemple nots sur leur sourire, leurs explications. Aujourdhui, le SAV se rduit la construction dune image de marque, il nest plus quune vitrine. Le SAV actuel en France nest pas dutout digne de ce nom : les taux de rparation sont trs faibles. Il faut noter tout de mme que les distributeurs nen sont

    pas les seuls responsables, les fabricants le sont aussi. Lobjectif nest pas du tout la rparation, mais le renouvellement.Cela sinscrit dans la logique du renouvellement du march et rien nest fait pour allonger la dure de vie des produits.La pratique consistant envoyer les rparateurs domicile quips a minima est rvlatrice de cette logique. Ilsne disposent pas doutils pour rellement rparer, pour rendre un vrai service. Les techniciens sont de moins enmoins rparateurs de nos jours, ils apportent plutt une aide et des conseils dinstallation des appareils et deslogiciels. On les forme de moins en moins aux gestes techniques.Selon un organisme de formation des techniciens-rparateurs interrog, lre de la rparation pour les produitsbruns est aujourdhui termine et lon se trouve dsormais dans une re des services de mise en installation parexemple. On ne rpare plus ces dispositifs comme avant, tout cela est trs miniaturis. Au lieu de former tousces composants lectroniques, ce qui cote trop cher, ils ont dcid de passer une autre activit.Un objectif clair pour obtenir des produits qui durent est dimposer aux fabricants des choses trs particuliresconcernant les pices dtaches et leur disponibilit : tant quil ny aura pas facilement des notices dinformationpour les techniciens, et toutes ces autres choses qui facilitent la rparation, la situation restera biaise.

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    Comment redonner une vraie valeur aux biens et ren-forcer les services ? Chacun peut y contribuer dans lecadre de sa vie professionnelle et personnelle. Dans cechapitre, nous dressons de manire synthtique les pos-sibilits existantes, mais qui peinent encore s'imposerface au modle prdominant qui conduit au gaspillagede la matire et de l'nergie. Ces recommandationsconcernent la fois les citoyens, les entreprises et lespouvoirs publics. Aujourd'hui, faire voluer les socitsvers un systme conomique plus durable et quitable,implique de bousculer les schmas tablis et de placerl'intrt gnral avant les intrts privs. Il s'agira gale-ment d'oser se lancer sur de nouvelles pistes.

    Pour les citoyensSi les producteurs et distributeurs doivent faire voluerleurs pratiques et ne plus penser en termes de productionmassive pour mnager nos ressources naturelles, lademande doit galement voluer du ct des consomma-teurs. Au quotidien, il relve du bon sens de se demandersi l'acquisition d'un nouveau produit est ncessaire.

    Consommer autrementc'est adopter un mode de vie plus sobre Tout d'abord, le lien entre accumulation des richessesmatrielles et bien-tre n'est pas vident. Selon JeanGadrey et Patrick Viveret, respectivement conomiste etphilosophe, pour atteindre un certain bien-tre, un mini-mum de confort matriel et de richesse est requis.Ensuite, la qute d'une croissance exponentielle et detoujours plus de richesse ne conduit pas l'panouisse-ment personnel.La consommation de masse, quant elle, participedirectement la surproduction de dchets et l'puise-ment des ressources naturelles. Elle est de plus en pluscritique notamment par les adeptes toujours plus nom-breux de la simplicit volontaire ou de la sobritheureuse , concepts dvelopps entre autres par PierreRabhi. Leur credo : consommer modrment et moins,ne pas faire de la richesse infinie une ligne de conduite,et aller l'essentiel.

    Pour un retour en force de la qualitIl s'agit ainsi de miser sur la qualit plutt que sur laquantit. En effet, lorsque l'on achte des biens faiblecot apparent, on tend oublier que le moins cher l'achat n'est pas forcment le moins coteux sur le long

    terme. Un produit durable aura moins d'impact global(impact environnemental et social, notamment) que sesquivalents dure de vie moyenne ou courte.

    Adopter un mode de consommation plusresponsable peut commencer par le remploiDonner une deuxime vie un bien vite la fabrication deson quivalent neuf et la cration d'un nouveau dchet inutile . Ainsi acheter d'occasion, louer, changer, don-ner, entretenir ses appareils permet d'allonger la dure devie des produits. En dernier recours, il est possible de fairerparer les appareils en panne sous garantie et horsgarantie chez les artisans rparateurs les plus proches.En effet, il vaut mieux faire rparer une des roulettes dunechaise de bureau casse plutt que de labandonnerdans la rue. Se procurer des biens doccasion chez desacteurs de lconomie sociale et solidaire, commeEmmas, plutt que dacheter du neuf permet de fairedes conomies et de contribuer la rinsertion des compagnons . Le remploi, de manire plus gnrale,peut tre une nouvelle faon de vivre ensemble.

    La mutualisation des biens,un nouvel espace commun

    La mutualisation des biens comme les machines laverdans un immeuble ou encore les coopratives d'habi-tants51 sont de bons exemples d'initiatives mettre enuvre pour rpondre aux besoins matriels et l'enviede vivre ensemble. Le partage des biens et des espacescommuns prsent dans ces initiatives implique de fairevoluer notre rapport aux objets et notre conception dela proprit prive. Il s'agit en effet de redonner une vraievaleur aux objets et services.

    4. Redonner une vraie valeur aux biens et renforcer les services

    51/ Une cooprative dhabitants est une socit qui regroupe des personnes qui veulent grer et amliorer, ensemble, les logements quelles occupentdans un mme immeuble ou sur un mme terrain. Les valeurs fondamentales sont la proprit collective, la sortie du systme spculatif et la dmocratie.

    Les Amis de la Terre / Le Cniid Rapport Septembre 2010

    Partage des outils dans une cooprative d'habitants.

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    Pour les entreprisesNotre systme de production et de consommation actuela t construit sur l'ide de la croissance infinie. Or nousprenons conscience notamment de la finitude des res-sources naturelles non renouvelables, de la surexploita-tion des ressources naturelles renouvelables et desimpacts environnementaux et sociaux considrables denos modes de vie. Face ces constats, les industriels sedoivent de ragir, vite et efficacement, par une adapta-tion des procds de production et des offres.

    Lconomie circulaire :une meilleure utilisation de la matireDe nos jours, les systmes de production et de gestiondes dchets sont fortement linaires. Et cette faon deproduire et de jeter transparat dans les statistiques degestion des dchets : peu de remploi, de recyclage etde compostage, et priorit donne la mise en

    dcharge ou l'incinration. Dans l'absolu, ce mode defonctionnement est vou lchec en raison de lpuise-ment des ressources de la plante. Heureusement, dessolutions existent : passer dune conomie linaire uneconomie circulaire, ou cologie industrielle, contribue soulager la plante. Cet autre modle conomique,inspir par le fonctionnement des cosystmes naturelsmatures, favorise notamment une meilleure utilisation

    des matires recyclables.Les dchets des

    uns serventainsi de

    ressources pour les autres. Cette valorisation matireamliore est indispensable mais doit tre combineavec une ambitieuse politique de rduction drastique desdchets en quantit et en toxicit.Il s'agira galement pour l'industrie du recyclage de per-

    fectionner ses procds. Quand on parle de recyclage au XXIe sicle, cest extrmement primitif ce que nous fai-sons. Ces activits de recyclage des dchets encore

    aujourdhui, la plupart du temps, sont extrmement sales, consomment beaucoup dnergie, consomment

    beaucoup de matire explique le journaliste scientifi-que Suren Erkman52.

    conomie des services,une solution pleine davenirLconomie des services, ou lconomie de fonctionna-lit, constitue dans de nombreux domaines l'une desvoies les plus intressantes pour remplacer le modle

    conomique actuel. Son concept est simple : le consom-mateur achte un service plutt quun produit et le com-merant passe de la vente dun produit celle dun ser-vice. Le centre de gravit des intrts industriels est ainsimodifi, cest linverse de la stratgie du gaspillage, condition toutefois que la rotation du bien, une fois ins-tall, soit faible et que l'on ne propose pas au client unnouveau produit tous les deux ans . En outre, laquestion de la modification des relations entre acteursdans le but de pourvoir aux besoins des uns et des

    autres gagne tre largie au-del de ce que reprsente lchange marchand 54.

    Les industriels sont ainsi amens concevoir des pro-

    duits combinant notamment les critres suivants : durables et fiables ; rparables (accs facile et disponibilit rapide des pi-

    ces dtaches) ; capables dintgrer des innovations ; compatibles pour que les pices soient facilement

    rutilisables.Le bien reste jusquau bout la proprit de celui qui vendle service. Le gain conomique de ce dernier ne se faitplus ponctuellement au moment de la vente, mais sins-crit dans la dure par le service dusage, dentretien etde dpannage. Cela cre en outre des emplois locauxnon dlocalisables.

    L'conomie des services peut prendre diffrentes formeset se destiner diffrentes cibles. La mutualisation debiens qui fait dj partie de notre vie quotidienne sans quel'on s'en rende forcment compte en est un bon exemple :la location de matriel de bricolage et de jardinage, decostumes, de couches lavables (associe au service delavage), de bquilles, de vlos et de voitures, etc.

    52/ Suren Erkman, fondateur et directeur de lInstitut pour la communication et lanalyse des sciences et des technologies Genve, dans Ma poubelleest un trsor , film de Martin Meissonnier et Pascal Signolet diffus le 20 avril 2010 sur France 3.

    53/ Suren Erkman :Vers une cologie industrielle, comment mettre en pratique le dveloppement durable dans une socit hyper-industrielle , 2004,Editions Charles Lopold Mayer, p. 99-100.

    54/ Nicolas Buclet : Lconomie de fonctionnalit : un moyen de repenser la relation entre satisfaction des besoins et modes dchange ? dans

    Crativit et innovation dans les territoires . Rapport du groupe de travail prsid par Michel Godet, 2010, p. 69.

    L'cosystme mature , c'est quoi ?

    Si lon veut formuler de manire trs gn-rale lobjectif de lcologie industrielle dans les ter-

    mes de lcologie scientifique, on peut dire quil sagitde faire passer le systme industriel actuel, considr

    comme juvnile , au stade dcosystme mature .Les cosystmes juvniles se caractrisent par des fluxdnergie et de matire rapides ainsi que par un faible tauxde recyclage de la matire ; ils ont des rseaux trophiquessimples et linaires ; les espces interagissent peu entreelles, hormis la comptition directe pour les ressources. A linverse, les cosystmes matures se caractrisent

    par des flux de matire et dnergie proportionnelle-ment plus faibles ; un taux lev de recyclage de la

    matire ; des rseaux trophiques varis et trsspcifiques ; des interactions complexesentre un nombre lev despces53 .

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    En Sude, par exemple, des machines laver sont mises disposition des habitants dun immeuble, de manirecollective, et en Suisse, une enseigne propose la loca-tion la plupart de ses appareils lectromnagers et lec-troniques de loisir55. A lheure actuelle, les entreprises

    franaises ne se prcipitent pas sur ce march de l'co-nomie des services. Nous avons soumis la question del'conomie des services destination des particuliersaux distributeurs interrogs dans le cadre de cette tude.Les rponses confirment la faible prise en compte actuellede ce modle conomique : Casino indique ne pas avoird'avis sur ce sujet et, pour BUT, l'avantage se situeraitmoins du ct des dchets qu'au niveau de la ncessit

    pour le consommateur, peut-tre, de faire plus attention au produit du fait qu'il ne lui appartient pas . Darty consi-dre l'conomie des services destination des particulierscomme une piste qui dpend cependant galement despratiques culturelles : les latins seraient ainsi moins

    enclins partager leur lave-linge . L'enseigne indique enoutre que le problme de l'arbitrage conomiqu