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Nous avons regretté ici même une mise en scène humiliante et dé- vastatrice soigneusement orga- nisée par la police américaine. Images sidérantes qui ont lit- téralement glacé nos concitoyens et la quasi-totalité de la classe politico-médiatique. Fallait-il pour autant passer d’un extrême à l’autre, oublier la victime présumée au seul bénéfice du présumé inno- cent et dénoncer tel Robert Badinter, au nom de principes si souvent bafoués en France, la justice américaine ? Le système est différent, il n’est pas for- cément plus mauvais. Mieux, on peut se demander si dans ce genre d’affaire il n’est pas meilleur, accordant les mêmes droits à chacun y compris aux plus faibles. Dans combien de pays une jeune femme de condition modeste et d’origine africaine pourrait ainsi être en- tendue par la police et la justice, contredisant la parole de l’un des principaux dirigeants de la planète. On peut s’interroger en ce qui concerne la France : combien de dossiers relevant d’une affaire de mœurs mettant en cause des personnalités connues de la politique, de l’audiovisuel ou du show-biz, ont été classés sans suite après un coup de téléphone d’une personnalité bien- veillante et surtout bien placée. Imaginez une jeune guinéenne, femme de chambre dans un palace parisien, accusant de viol un dirigeant de premier plan. Que resterait-il de la plainte au bout de quelques heures ?… « Selon que vous soyez puissant ou misérable » écrivait le fabuliste, la justice ne sera pas la même. C’était il y a trois siècles, est-ce différent aujourd’hui dans notre pays ? La réponse est vraisemblablement non. À y regarder de près, la justice américaine a sans doute des défauts mais, en terme d’égalité de sexe ou de condition sociale, il y a plus de raisons de l’envier que de la critiquer. Rangeons notre arrogance au placard, elle est détestable. Pire, ridicule. Une arrogance française Le chiffre Et aussi J amais la maxime d’un journal n’avait collé à ce point à la vérité d’une situation. Après le choc des photos du premier jour, le choc des mots : ceux des sept chefs d’inculpation validés par le grand jury de la Cour suprême de New York. Dans cette déca- de à peine achevée, la réalité a défini- tivement explosé la fiction. Jeudi soir, les séries françaises faisaient pâle figu- re face à l’incroyable réalisme de la deuxième audience de DSK, diffusée par les chaînes d’info en quasi direct. Depuis vendredi dernier, Dominique Strauss-Kahn, prisonnier hors les murs, est d’abord prisonnier de lui-même. Dans cette tragédie, seuls les deux per- sonnages connaissent la vérité. Et ce ne sont pas les Sherlock Holmes de papier qui vont la débusquer à la place de la justice américaine. Acceptons que cel- le-ci fasse son travail sans y ajouter des commentaires inutiles et infondés. E t même si cette affaire risque de polluer durablement la cam- pagne présidentielle en France, la politique reprend déjà ses droits. Pour l’heure, le PS, plus choqué que tout autre, a fait front et tenté de donner un visa- ge d’unité en faisant adopter par plus de 95 % de votants son projet. Reste à savoir si la déflagration nucléaire qu’il vient de subir lui permettra de garder une ima- ge présidentielle, avec au final un can- didat soutenu par l’ensemble du parti. Du côté de la majorité, l’intelligente et habile prudence de Nicolas Sarkozy montre que le Président a immédiate- ment compris tout le parti qu’il pou- vait tirer de cette situation. La « prési- dentialité » est de son côté. Il saura en jouer le moment venu. Bref, plus que jamais, tous les scénarios sont possibles. L’affaire Strauss-Kahn nous a brutalement rappelé qu’un an c’est long, très long. R.N. > Lire p. 2, 3, 4 et 15. NUMÉRO 410 — MERCREDI 25 MAI 2011 — 1,30 ¤ Éditorial Robert Namias Directeur de la publication : Bruno Pelletier Directeur : Robert Namias BERTRAND GUAY / AFP FRED DUFOUR / AFP RICHARD DREW / AFP Les scénarios de l’après-DSK lhemicycle.com Tandis que les socialistes maintiennent leur calendrier électoral, l’UMP tente d’éviter un rassemblement centriste qui nuirait à la candidature de Nicolas Sarkozy. Quels scénarios possibles pour la présidentielle après le séisme DSK ? Hypothèses avec Jérôme Jaffré et Roland Cayrol Jérôme Jaffré P. 2 Roland Cayrol P. 3 MARTIN BUREAU / AFP THOMAS COEX / AFP Au sommaire Agora : Jérôme Jaffré, Roland Cayrol >P. 2-3 Plan large : les Quatre Colonnes en « sidération » par Béatrice Houchard . Sarko sans DSK par Bruno Jeudy >P. 4 Initiatives : 4 000 débats et 1 région : celle de François Bonneau >P. 6-7 À distance : Clearstream : le procès oublié… par Paul Lefèvre >P. 10 900 BORIS HORVAT / AFP ? millions C’est le chiffre spectaculaire du nombre de personnes qui n’ont pas accès à l'eau potable. Tous les ans, un million et demi d’hommes, de femmes et d’enfants meurent après avoir consommé de l'eau contaminée. Réunis à Budapest, les députés européens auxquels se sont joints les députés des pays d'Afrique et des Caraïbes cherchent les moyens les plus efficaces pour lutter contre la pollution de l'eau. Pierre Laurent, l’inconnu du PC Il en est pourtant le numéro 1. Modeste et convaincu, il devrait se rallier à la candidature de Jean-Luc Mélenchon. Pas de candidat communiste en 2012, une première depuis 1974. > Lire Focale p. 8 La révolution Twitter L’affaire Strauss-Kahn a définitivement consacré l’irruption des réseaux sociaux dans l’information. Une révolution irréversible qui bouleverse les codes journalistiques. > Lire 2.0 p. 14

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l'Hémicycle numéro 410 du mercredi 25 mai 2011

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Page 1: l'Hémicycle - #410

Nous avons regretté icimême unemise en scène humiliante et dé-vastatrice soigneusement orga-nisée par la police américaine.Images sidérantes qui ont lit-téralement glacé nos concitoyenset la quasi-totalité de la classepolitico-médiatique. Fallait-il pourautant passer d’un extrême àl’autre, oublier la victimeprésuméeau seul bénéfice du présumé inno-

cent et dénoncer tel Robert Badinter, au nom deprincipes si souvent bafoués en France, la justiceaméricaine ? Le système est différent, il n’est pas for-cément plusmauvais. Mieux, on peut se demander sidans ce genre d’affaire il n’est pasmeilleur, accordantlesmêmes droits à chacun y compris aux plus faibles.Dans combien de pays une jeune femmede conditionmodeste et d’origine africaine pourrait ainsi être en-tendue par la police et la justice, contredisant la parolede l’un des principaux dirigeants de la planète.Onpeuts’interroger en ce qui concerne la France : combien dedossiers relevant d’une affaire de mœurs mettant encause des personnalités connues de la politique, del’audiovisuel ou du show-biz, ont été classés sans suiteaprès un coup de téléphone d’une personnalité bien-veillante et surtout bien placée.Imaginez une jeune guinéenne, femme de chambredans un palace parisien, accusant de viol un dirigeantde premier plan. Que resterait-il de la plainte au boutde quelques heures ?…«Selonquevous soyezpuissantoumisérable»écrivaitle fabuliste, la justice ne sera pas lamême. C’était il y atrois siècles, est-ce différent aujourd’hui dans notrepays ? La réponse est vraisemblablement non.À y regarder deprès, la justice américaine a sansdoutedes défauts mais, en terme d’égalité de sexe ou decondition sociale, il y aplusde raisonsde l’envier quedela critiquer. Rangeons notre arrogance auplacard, elle est détestable. Pire, ridicule.

Une arrogancefrançaise

Le chiffre

Et aussi

Jamais la maxime d’un journaln’avait collé à ce point à la véritéd’une situation. Après le choc

des photos du premier jour, le choc desmots : ceux des sept chefs d’inculpationvalidés par le grand jury de la Coursuprême deNewYork. Dans cette déca-de à peine achevée, la réalité a défini-tivement explosé la fiction. Jeudi soir,les séries françaises faisaient pâle figu-re face à l’incroyable réalisme de ladeuxième audience de DSK, diffuséepar les chaînes d’info en quasi direct.Depuis vendredi dernier, DominiqueStrauss-Kahn, prisonnier hors lesmurs,est d’abord prisonnier de lui-même.

Dans cette tragédie, seuls les deux per-sonnages connaissent la vérité. Et ce nesont pas les Sherlock Holmes de papierqui vont la débusquer à la place de lajustice américaine. Acceptons que cel-le-ci fasse son travail sans y ajouter descommentaires inutiles et infondés.

Et même si cette affaire risquede polluer durablement la cam-pagne présidentielle en France,

la politique reprenddéjà ses droits. Pourl’heure, lePS,plus choquéque tout autre,a fait front et tenté de donner un visa-ge d’unité en faisant adopter par plus de95%devotants sonprojet. Reste à savoir

si la déflagrationnucléaire qu’il vient desubir lui permettra de garder une ima-ge présidentielle, avec au final un can-didat soutenu par l’ensemble du parti.Du côté de lamajorité, l’intelligente ethabile prudence de Nicolas Sarkozymontre que le Président a immédiate-ment compris tout le parti qu’il pou-vait tirer de cette situation. La « prési-dentialité » est de son côté. Il saura enjouer le moment venu.Bref, plus que jamais, tous les scénariossont possibles. L’affaire Strauss-Kahnnous a brutalement rappelé qu’un anc’est long, très long. R.N.

>Lire p. 2, 3, 4 et 15.

NUMÉRO 410 —MERCREDI 25 MAI 2011 — 1,30 ¤

ÉditorialRobert Namias

Directeur de la publication : Bruno Pelletier Directeur : Robert Namias

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Les scénarios de l’après-DSK

lhemicycle.com

Tandis que les socialistesmaintiennent leur calendrier électoral,l’UMP tente d’éviter un rassemblement centriste qui nuiraità la candidature deNicolas Sarkozy. Quels scénarios possiblespour la présidentielle après le séismeDSK?Hypothèses avec JérômeJaffré etRolandCayrol

JérômeJaffré

P. 2

RolandCayrol

P. 3

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Ausommaire • Agora : JérômeJaffré,RolandCayrol>P. 2-3 •

Plan large : les Quatre Colonnes en « sidération » parBéatriceHouchard . Sarko sans DSK parBruno Jeudy>P. 4 • Initiatives :4 000débats et 1 région : celle deFrançoisBonneau>P. 6-7 •

À distance : Clearstream : le procès oublié… parPaul Lefèvre>P. 10

900

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?

millionsC’est le chiffre spectaculaire du nombre de personnesqui n’ont pas accès à l'eau potable. Tous les ans, unmillion et demi d’hommes, de femmes et d’enfantsmeurent après avoir consommé de l'eau contaminée.Réunis à Budapest, les députés européens auxquelsse sont joints les députés des pays d'Afrique et desCaraïbes cherchent les moyens les plus efficacespour lutter contre la pollution de l'eau.

Pierre Laurent, l’inconnuduPCIl en est pourtant le numéro 1. Modesteet convaincu, il devrait se rallier à la candidaturede Jean-Luc Mélenchon. Pas de candidatcommuniste en 2012, une première depuis 1974.>Lire Focale p. 8

La révolution TwitterL’affaire Strauss-Kahn a définitivementconsacré l’irruption des réseaux sociaux dansl’information. Une révolution irréversiblequi bouleverse les codes journalistiques.>Lire 2.0 p. 14

Page 2: l'Hémicycle - #410

NUMÉRO 410, MERCREDI 25 MAI 2011 L’HÉMICYCLE 3

L’affaire DSK touche-t-elle le PStrès profondément ?Le PS est très atteint. Un parti esttoujours davantage touché pardes affaires de moralité que pardes affaires de politique politi-cienne. Le coup au moral des mi-litants est aussi terrible : ils ontperdu le candidat avec lequel ilspensaient la victoire assurée.

Les premières enquêtes, réaliséesau lendemain de cette affaire,montrent pourtantqu’électoralement son candidatgarde un vrai potentiel…Les sondages mesurent actuelle-ment un tel rejet de la personne etdu bilan de Nicolas Sarkozy quequel que soit le candidat face à cedernier il gagne. De ce point devue, on se reporte donc sur celuiou celle qui reste en lice. Mais celane veut pas du tout dire quel’adhésion est la même. Les Fran-çais attendaient et voulaient lematch DSK/Sarkozy. Ils étaientdeux candidats qui connaissaientles grands dirigeants planétaires etsemblaient comprendre les enjeuxdumonde actuel. Ils promettaientune campagne pédagogique, pre-nant en compte les réalitéscontemporaines. Le fait qu’il n’aitplus lieu est un vrai choc. Plus rienn’est pareil.

Comment le PS peut-ils’en remettre ?Le PS s’en sortira s’il joue à fondla procédure des primaires tellequ’il l’avait prévue. Dominique

Strauss-Kahn était tellement lefavori de l’opinion que, quelquepart, il mettait à mal ce processuset l’appareil pouvait même se de-mander comment les procédures,les dates, les délais allaient êtrerespectés. Il dominait tellementl’opinion qu’on avait le sentimentque les primaires ne seraient or-ganisées que pour la forme.C’était un candidat hors norme,exceptionnel. Le PS est ramené à

des fondamentaux plus classiqueset il doit les respecter. L’ensemblede la procédure reprend un sens.On va sans doute connaître devraies primaires. Il va y avoir unvrai match. Il sera moins presti-gieux, mais plus ouvert. Et puisune campagne présidentielle re-pose davantage sur une personneque sur un parti. Si le candidat estbon et incarne le changement,tout le PS en profitera.

Les primaires ne risquent-elles pasdésormais de ressembler à unepetite guerre d’appareil ?Je ne crois pas. Ces primaires res-tent ouvertes à tous les Français.

Elles permettront donc de sortirdes questions internes.

Quelles sont les conséquencesde l’affaire pour Martine Aubryet François Hollande ?Cela a tout changé pour MartineAubry. Une logique s’installait :DSK était sur le point de se décla-rer et elle de renoncer. Là, elle vadevoir y aller. Mais elle donne lesentiment de se lancer comme elle

s’était lancée au congrès de Reims,c’est-à-dire un peu forcée. Et puisles Français sont habitués à ce quela compétition présidentielle soitla rencontre entre un homme ouune femme et le peuple. Or, Mar-tine Aubry apparaît plutôt commeune femme s’adressant d’abordaux militants de son parti etcomme une candidate s’intéres-sant d’abord aux manœuvresd’appareil. François Hollande, lui,récupère mécaniquement l’espacelibéré par DSK car il était après luile mieux placé. Mais il n’est pasencore considéré comme un res-ponsable politique de même ni-veau que lui.

Et pour Nicolas Sarkozy ? Il a toutesles raisons de se réjouir…Il est débarrassé de son rival leplus dangereux. Il était même de-venu très compliqué de voir com-ment Nicolas Sarkozy pouvaitencore battre DSK. Désormais, lematch n’est plus du tout le mêmeil est plus jouable, plus ouvert.Son expérience sur la scène inter-nationale sera désormais unedifférence importante face au

candidat socialiste qu’il affronteraalors que, face à DSK, elle necomptait pas. Il pourra aussi sedraper de sa parure présidentielleet du fait d’avoir déjà mené unecampagne. Reste quand mêmepour lui l’inconvénient majeurd’être le sortant sur un continentoù les sortants prennent desclaques du fait de la crise et par-fois également de leur bilan.

Marine Le Pen va-t-elle beaucoupbénéficier de ce scandale ?Cela ne va rien changer pour elleen profondeur. Certes elle va en-granger, car c’est une affaire quitouche l’un des deux grands partis

de la vie politique française, le PS,qu’elle associe d’ailleurs systéma-tiquement à l’UMP. Mais cela nelui apportera aucune troupe et neprovoquera aucun raz de maréevers elle.

Jean-Luc Mélenchon a perdu sonmeilleur ennemi. Une mauvaisenouvelle ?Il devrait, sur le plan personnel, seréjouir puisqu’il voit celui qu’ilconsidérait comme « l’affameurdes peuples » sorti du jeu. Mais,sur le plan politique, cela ne mo-difiera rien car il a, je crois, com-plètement raté cette premièrephase de campagne.

Les centristes ont droità une bouffée d’oxygène…Évidemment, cela libère unespace. Dans les enquêtes, onconstate que 20 % de l’opinionest sensible au courant centriste.Dominique Strauss-Kahn en récu-pérait une très large partie au pre-mier comme au second tour.C’était d’ailleurs une des raisonspour lesquelles c’était compliquéde le battre. Ce champ est libéré.Mais les différents leaders cen-tristes seront-ils capables de s’unirautour d’un candidat unique etd’un programme clair pour ra-masser la mise ? On en est trèsloin aujourd’hui.

Propos recueillispar Ludovic VigogneChef du service politique

de Paris Match

Agora

ROLAND CAYROLDIRECTEURDERECHERCHEAUCEVIPOF(CENTREDERECHERCHESPOLITIQUESDESCIENCESPO)

«DSKÉTAITUNCANDIDATHORSNORME,EXCEPTIONNEL. LEPSESTRAMENÉÀDES

FONDAMENTAUXPLUSCLASSIQUES. LABATAILLEDESPRIMAIRES SERAMOINSPRESTIGIEUSE,MAISPLUSOUVERTE»

«Les Français voulaient le match DSK/Sarkozy.Le fait qu’il n’ait plus lieu est un vrai choc»

Avec l’effacementdeDSK, le directeur de rechercheduCEVIPOFestimeque lesprimairessocialistes retrouvent tout leur sens.PourRolandCayrol, ce cataclysmepolitique redonnede l’airàNicolasSarkozy.

THOMAS

COEX

/AFP

2 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 410, MERCREDI 25 MAI 2011

Agora

Jusqu’à quel point le PS est-iltouché par l’affaire DSK ?Les conséquences sont déjà consi-dérables, et au-delà de sa propre per-sonne. La présidentielle de 2012 nese présente plus du tout de lamêmefaçon. La présidenceDSK telle qu’onpouvait se l’imaginer comportaitla promesse d’un nouvel équilibrepolitique, institutionnel et idéolo-gique. Il y avait dans la tête debeaucoup d’électeurs un véritableschéma. Il y aurait eu d’un côté unprésident réformiste, ouvert, mo-derne, gérant les conséquences de lamondialisation et, de l’autre côté,un parti plus ancré à gauche danssonhistoire et plus soucieux des tra-ditions et des catégories socialesmo-destes. Ces promesses n’existentplus. Pour la campagne de 2012, lessocialistes doivent inventer une his-toire différente. Que ce soitMartineAubry ou François Hollande, cen’est pas sûr qu’ils soient reconnuscomme ayant la dimension prési-dentielle. Avec eux, il y a un risquede passer à une campagne de Pre-mier ministre.

Quelles sont les conséquencessur la primaire ?Indépendamment de la qualité descandidats, elle est à certains égardsrabaissée. Une primaire DSK/Hol-lande/Royal s’annonçait commeune étape essentielle. Cela auraitd’abord permis une vérification ducasDSK, c’est-à-dire de s’assurer qu’ilpouvait revenir sur le terrain fran-çais et était capable de mener unebonne campagne. Soit il passait cetest, et la gauche pouvait nourrirtous les espoirs de l’emporter. Soit il

le ratait, et François Hollande était àce moment-là porté par une dyna-mique de victoire forte et inatten-due, un peu similaire à celle qu’avaitconnue JacquesChirac dans la cam-pagne de 1995. Désormais noussommes descendus de plusieurs ni-veaux. Ces primaires risquent d’êtredominées par des histoires de hainepersonnelle et d’héritage des cou-rants. La primaire a normalementune fonction de mobilisation, dedynamisation et de légitimation.Ces trois fonctions sont moins évi-dentes. Lamobilisation risque d’être

inférieure aux espoirs initiaux etplus proche de celle de 2006.Puisque François Hollande est fa-vori, il ne bénéficiera plus, s’il l’em-porte, de la dynamique créée par lasurprise. Quant à Martine Aubry,sa victoire face à Hollande passeraitpour une victoire de l’appareil duparti. Ce n’est pas non plus très por-teur. Il y aurait du coup un méca-nisme de légitimation moindre.

Qu’est-ce que cela change pourMartine Aubry, François Hollandeet Ségolène Royal ?François Hollande a eu un coup degénie en sedéclarant candidat très tôtet en entretenant ainsi l’idée qu’ilpouvait y avoir un doute sur DSK.C’est un acte majeur comparable à

celuideChirac,qui était lui aussipartitrès tôt face à un Édouard Balladuralors dominant. Il a ensuite montréunecertainecapacité àoccuperunes-pacequi était vide.Aujourd’hui,Hol-lande bénéficie donc, dans cettenouvelle situation, d’un transfert lo-giquedespréférencesqui seportaientsur DSK, et se retrouve dans la posi-tionde favori, qui, on le sait, est diffi-cile à tenir.Onade la sympathiepourunchallenger.D’un favori, onattendqu’il soit au niveau d’un présidentpotentiel. Les critiques sur son ab-sence d’expérience gouvernemen-

tale seront plus vives. Tiendra-t-il lecoup ? Il aura aussi besoin de rallie-ments, car faire campagne unique-ment avec son petit groupe defidèles paraîtrait un peu court. Poursa part,MartineAubry pourrait, elle,apparaître comme la candidate del’appareil, comme Henri Emma-nuelli face à Lionel Jospin en 1995.Certes, elle aura la légitimité du rôlede chef de parti, mais aussi la pous-sière que ce poste véhicule. Ce senti-ment sera encore renforcé si elle estsoutenue par tous les éléphants. Çapourrait avoir un contre-effet redou-table. Enfin, si SégolèneRoyal a biengéré cette séquence et reste dans lejeu, elle est placée loin derrière sesrivaux et peut être tentée d’aiderl’une contre l’autre.

Est-ce une bonne nouvellepour Nicolas Sarkozy ? A-t-il vudisparaître le candidat qui lemenaçait le plus ?La situation est aussi désormaisplus compliquée pour lui. Domi-nique Strauss-Kahn était un ad-versaire politique redoutable carson espace électoral était très large,mais il était facile à battre surle plan personnel. D’ailleurs, lesconfidences régulières faites parle Président sur les fragilités et lesfailles de DSKmontrent que sur cepoint il avait une bonne analyse.Mais c’est une erreur de penserque cela va le délivrer de toutes lescritiques qui lui étaient adresséessur le plan personnel. Ce n’étaitpas le reproche principal qui luiétait fait. Le problème de NicolasSarkozy, c’est sa façon d’exercer lepouvoir, c’est le fait de ne pasavoir tenu le contrat passé avec lesFrançais en 2007 de récompenserle travail, le mérite, l’effort. Sondéfi actuel, c’est d’être réécoutépar les Français. Aujourd’hui, ilsn’en ont pas envie. Cela changera-t-il ? Reste qu’il peut se dire qu’ilaura face à lui un candidat socia-liste avec un potentiel plus prochedes 20 % que des 30 % et qu’il adonc une chance de le distancerau premier tour.

EtMarineLePenva-t-elleenprofiterouvoit-elledisparaîtreuncandidatqui luiouvraitunchampplus large?C’est un peu tôt pour répondre surce point, qui est plus incertain en-core. Sans doute cette affaire va ali-menter le sentiment antiélites etdonc lui profiter. Mais l’élection

risque aussi de ressembler à uncombat électoral droite/gaucheplus classique. DSK était un candi-dat qui incarnait un mondialismeassumé, bousculait les frontières etpouvait donner le sentiment quedroite et gauche se ressemblaient.Enfin, l’émotion est telle, que laprésidentielle peut être encoreprise davantage au sérieux par lesFrançais, et donc laisser peut-êtremoins de place à la protestationqui porte le vote frontiste.

Cette affaire sera-t-elle selonvous vite oubliée ou laissera-t-elleune trace indélébile ?Elle laissera une trace très forte.C’est le plus grand scandale de laVe République, quelle qu’en soitdemain l’issue judiciaire. La seulecomparaison que l’on pourrait fairec’est avec l’affaireMarkovic, qui, fin1968 et en provenance d’officinesgaullistes, avait visé le couple Pom-pidou.Mais à l’époque, elle avait ététotalement étouffée. Le degré d’exi-gence vis-à-vis des candidats à l’Ély-sée va être encore plus fort. Et puis,après les déceptions Royal (un en-gouement puis une déception surses compétences) et Sarkozy (un en-gouement puis une déception surson exercice du pouvoir), il y a cechoc DSK. « L’État n’est pas la solu-tion, c’est le problème » disait Rea-gan. On pourrait se demander, de lamême façon, si en France l’électionprésidentielle n’est pas la solution,mais le problème.

Propos recueillispar Ludovic VigogneChef du service politique

de Paris Match

«ONPEUT SE DEMANDERSI EN FRANCE L’ÉLECTION

PRÉSIDENTIELLE N’EST PAS LASOLUTION,MAIS LE PROBLÈME»

JÉRÔME JAFFRÉDIRECTEURDUCECOP(CENTRED’ÉTUDESETDECONNAISSANCESSURL’OPINIONPUBLIQUE)

Pour Jérôme Jaffré, l’électionde2012 risquedeperdre en«présidentialité».C’est pour le patronduCECOP laprincipale conséquencedu séismeDSK.

«L’affaire DSK laissera une trace très forte. C’estle plus grand scandale de la Ve République»

MARTINBUREAU/AFP

Page 3: l'Hémicycle - #410

Sous le choc. En état de « si-dération », pour reprendrele mot à la mode. Quand ils

se sont retrouvés le 17 mai à l’As-semblée nationale, les députésn’en croyaient pas leurs yeux nileurs oreilles. Dominique Strauss-Kahn arrêté, Dominique Strauss-Kahn en prison. À gauche, onportait le deuil, s’en prenantd’abord à la justice américaine,oubliant qu’il y avait peut-être,la justice le dira, une victimedans l’affaire. L’ancienne gardedes Sceaux Élisabeth Guigou (PS,Seine-Saint-Denis) est envoyée aufeu pour répondre aux questionssalle des Quatre Colonnes. Elleparle alors de « brutalité », de « vio-lence », de « cruauté » pour com-menter les images de DSK devantle juge de New York. Jack Lang(PS, Pas-de-Calais) évoque un« lynchage visant à se payer un Fran-çais », quand son collèguesénateur Robert Badinter, àquelques centaines de mètres delà, dénonce « une exhibition organi-sée ». Arnaud Montebourg (PS,Saône-et-Loire), l’homme qui amis sur pied les primaires, veutdépasser l’événement : « Je suis op-timiste sur le fait que nous avons ennous les ressources pour rebondir etconstruire la victoire de 2012. »C’est aussi la tendance dans l’en-tourage du président du groupesocialiste, Jean-Marc Ayrault(Loire-Atlantique) : « Il faudra faireles primaires sur le fond, sur une vi-sion. Sinon, on est mort ! »À droite, la consigne est au si-lence. Elle vient de haut. De l’Ély-sée. Quand le ministre PatrickOllier traverse les Quatre Co-lonnes, mardi midi, il balaie d’unrevers de la main toutes les ques-tions. Il n’est pas le seul. Et quand

Chantal Brunel (UMP, Seine-et-Marne) commence à répondreaux journalistes, son assistante luifait de grands signes des deux braspour l’empêcher de trop parler.Françoise de Panafieu (UMP,Paris) a trouvé un angle inespéré :taper sur Bernard Debré (UMP,Paris), sans jamais le citer. Il faut

dire que le second, qui vise en2012 la circonscription de la pre-mière, n’y est pas allé de mainmorte, qualifiant sur son blogDSK de « délinquant sexuel ». Lespropos du médecin sont « incon-venants », a dit la veille la ministreRoselyne Bachelot. Ce qui, en lan-gage Panafieu, se traduit ainsi :« Je suis scandalisée par ceux qui sefont de la pub sur le dos de cette his-toire sans rien connaître au dossier.Qu’ils ferment leur gueule ! » Pre-

nant le contre-pied du discoursdes socialistes, François Sauvadet(Nouveau Centre, Côte-d’Or) veut« faire confiance à la justice améri-caine » et ajoute sa propreleçon : « Si quelqu’un savait quelquechose, il devait le dire à la justicefrançaise. » Pendant que, surl’écran de télévision interne, les

questions orales sans débat dumatin se déroulent sans retenir lamoindre attention, le villepiniste(il en reste) Jean-Pierre Grand(UMP, Hérault) lâche une sen-tence désabusée : « C’est effroyableà 360 degrés. Ça ne profitera à per-sonne. »Pourtant, dans l’hémicycle, alorsque l’affaire est dans toutes lestêtes, il n’en sera jamais question.L’omerta totale. Beaucoup de dé-putés en ont été frappés. Mais qui

aurait pu poser une question ? Etpour demander quoi ? C’est cequ’on appelle, d’un bel oxymore,un silence assourdissant.Un seul sujet est venu concurren-cer l’affaire Strauss-Kahn, et ce futaussi en dehors de l’hémicycle: lasécurité routière et particulière-ment le retrait programmé despanneaux indiquant les radars.En 1993, les députés socialistesbattus aux législatives avaientrendu responsable de la déroutel’un des leurs, Georges Sarre, ini-tiateur du permis à points. Les dé-putés UMP qui tomberont en2012 ont déjà trouvé les respon-sables : Claude Guéant, le ministrede l’Intérieur, et François Fillon,qui, une fois de plus, a passé unmauvais moment à la réunion dugroupe. « Le racket, ça suffit ! » s’estexclamé Bernard Depierre (UMP,Côte-d’Or), rejoint par Marie-Hélène Thoraval (UMP, Drôme) :« Arrêtons de stigmatiser ceux quitravaillent ! » Le président de l’As-semblée, Bernard Accoyer, se féli-cite que le Premier ministre ait,« avec courage, défendu les décisionsdu gouvernement » et prône plusque jamais « l’unité ». Le présidentdu groupe UMP, Jean-FrançoisCopé (Seine-et-Marne), aimeraitbien qu’on parle d’autre choseque de l’affaire DSK : « On gagnetoujours à avoir des débats sur l’ave-nir de la France. » Qu’il se rassure :à l’Assemblée, la vie va reprendrecomme avant. Ou presque : carl’ex-communisteMaxime Gremetzne verra pas la suite. Après sonexclusion temporaire, il a démis-sionné de son mandat de députéde la Somme. Une sortie par lapetite porte pour ce « person-nage » du Palais-Bourbon.

4 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 410, MERCREDI 25 MAI 2011

Plan large

Les Quatre Colonnes en « sidération »L’affaireStrauss-Kahn lesaglacés.Lesmesuresgouvernementalesdécidéespar leConseil interministériel sur lasécurité routière lesontagacésvoireindignés.Florilèges.Par Béatrice Houchard

Avec DSK, Nicolas Sarkozy « sen-tait » déjà bien la présidentielle.Sans DSK, le Président sortant lasent encore mieux. C’est une évi-dence de le dire tant la gauchesemble déboussolée depuis l’arres-tation et l’inculpation pour tenta-tive de viol de l’ancien patrondu Fondsmonétaire international.Le locataire de l’Élysée prend soinde cacher sa joie jusqu’à verserdes larmes de crocodile sur le sortde son ex-rival (« c’est triste etatroce ») et surtout à interdire à sesministres et lieutenants de l’UMPde se réjouir publiquement.À un an de la présidentielle, latrêve politique ne durera pas. Lescoups commencent à pleuvoir.Comme souvent, François Fillons’est chargé de la première charge.Jean-François Copé a pris le relais.Nicolas Sarkozy encourage ses par-tisans à fustiger certains de sespires adversaires coupables de dé-rapages. Mention spéciale pourJean-François Kahn qui a résumél’affaire DSK à un « troussage dedomestique ». Le chef de l’État aégalement passé la consigne dedéfendre la victime, cette « pauvrefemme de chambre africaine » selonl’expression de Claude Guéant.La droite plastronne donc. Com-ment en serait-il autrementpuisquele candidat socialiste le plus dange-reux est éliminé ? La gauche nepourra plus donner de leçons demorale à la droite en critiquant lecomportement de Nicolas Sarkozy.Mais la droite aurait tort de se ré-jouir trop vite et penser que lavictoire tend les bras à NicolasSarkozy. Quelques voix à droitemettent en garde l’Élysée sur lethème « le pays a envie de change-ment ». Avec DSK ou sans DSK.Épingler pour la énième fois Mar-tine Aubry sur les 35 heures ou iro-niser sur l’absence d’expérienceinternationale de François Hol-lande, cela risque d’être un peucourt pour retourner l’opinion.Prudent, le Président-candidatpeau-fine son image d’homme au-dessusde lamêlée. Il comptepoursuivre sastratégie de quadrillage de la Franceet de reconquête des catégories quil’ont lâché ces derniers mois (agri-culteurs, médecins, retraités...). « Jelaboure », aime à répéter le chef del’État. Pour reconquérir des Françaismajoritairement toujours remontéscontre luimalgré une légère embel-lie dans les sondages, il va devoirêtre patient pour espérer récolter en2012. Nicolas Sarkozy n’est jamaisautant en danger que lorsqu’il croitavoir gagné la partie.

L’opinionde Bruno Jeudy

DR

Le Conseil constitutionnel a censuré un alinéade l’article 35 de la loi sur la liberté de la presse,qui interdisait à une personne poursuivie pourdiffamation de faire la preuve des faits qu’elleallègue, si ceux-ci sont antérieurs à dix années.Selon l’article de la loi du 29 juillet 1881, la vérité desfaits diffamatoires « peut toujours être prouvée »,sauf lorsqu’ils concernent « la vie privée de lapersonne», qu’ils sont amnistiés ou prescrits, ouencore lorsque l’accusation « se réfère à des faitsqui remontent à plus de dix années ».Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité

(QPC) sur la validité de cette dernière disposition,le Conseil constitutionnel a donc décidé de lacensurer car elle portait « atteinte à la libertéd’expression ».Dans leur décision, les Sages écrivent que cet alinéaavait notamment pour conséquence d’interdire auxpersonnes poursuivies pour diffamation de sereporter pour leur défense à « tous les propos ouécrits résultant de travaux historiques ouscientifiques ».Demêmeétaient-ils empêchés de se référer « à desévénements dont le rappel ou le commentaire

s’inscriventdansundébatpublic d’intérêt général ».« Par son caractère général et absolu, cetteinterdiction porte à la liberté d’expression uneatteinte qui n’est pas proportionnée au butpoursuivi »,méconnaissant ainsi « l’article 11de la déclaration de 1789»des droits de l’Hommeet du citoyen, ont encore estimé les Sages.La décision du Conseil constitutionnel« est applicable à toutes les imputationsdiffamatoires non jugées définitivement au jour »de sa publication, qui doit encore intervenirau Journal officiel. J.G.

Diffamation : les Sages censurent une disposition de la loi sur la presse

Sarko sans DSK

La salle des Quatre Colonnes à l’Assemblée nationale. PHOTOBERTRANDGUAY/AFP

Page 4: l'Hémicycle - #410

Chaque année, Toulouseaccueille 6 000 nouveauxhabitants. Pour leur sim-

plifier la vie et faciliter leurs dé-marches administratives, la villea créé l’été dernier Tatie Violette.

Chapeau violet, boucles d’oreillesviolettes, chemisier parme,« Tatie Violette est un mélangedétonant d’humour décalé etd’informations pratiques à desti-nation des Toulousains. Sa mis-

sion est de faire découvrir lesservices que propose la ville ».Les quatre premiers épisodes decinq minutes sont ainsi consa-crés aux « moments de vie et detransports, à la démocratie deproximité, à la mallette du nou-vel arrivant, et à l’office de latranquillité ».

Au cœur de la villeDiffusée sur toulouse.fr, Daily-motion et Youtube, la fictionproduite en interne par la direc-tion de la communication de laville met en scène trois comé-

diens. Muriel Darras joue le rôlede Tatie Violette, Pierre Matrasest Adrien, quelque peu débous-solé en découvrant Toulouse,enfin Stéphanie Villanti estConstance, employée municipalemodèle.Au cœur de la ville, les lieux detournage ont été choisis en

fonction de leur esthétique etde leur rôle informatif : le coursDillon où Adrien, nouvel arri-vant, découvre les joies destransports en commun, le toitdu Capitole où il est pris de ver-

tige, en passant par la mairieannexe de Saint-Cyprien ou laprairie des Filtres.Des scénarios à la fois ludiques etoriginaux accessibles aux malen-tendants et aux malvoyants grâceà des vidéos sous-titrées, et à desaudiodescriptions détaillées desépisodes. �

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NUMÉRO 410, MERCREDI 25 MAI 2011 L’HÉMICYCLE7

MIDI-PYRÉNÉESPRIXHANDI-ENTREPRISE� Soucieusede récompenser lesentreprises et les associationsquimettent enplacedespolitiquesinnovantes enmatièrede recrutement,demaintien, et d’évolutionde carrièredes collaborateurs en situationdehandicap, la régionMidi-Pyrénéesalancé lapremière éditionduprixHandi-entreprise. La régionpréparepar ailleurslamise enplaced’unAgenda22afinde conduire unepolitique transversaledeshandicapés.

YVELINESUNECHAUFFERIEAUBOISÀVERSAILLES� L’Île-de-France a lancé une étudepour assurer le chauffage duPetitTrianon et de ses serres, du Pavillonfrais et du Pavillon français ainsi quedes serres de Folichancourt, à partird’une chaufferie au bois. Une solutionqui permettrait de valoriser uneressource importante du domaineen bois de coupe et d’élagage.

RHÔNE-ALPES700FAMILLESÀÉNERGIEPOSITIVE� Plus de 3000Rhônalpins se sontimpliqués cet hiver dans le concours«Familles à énergie positive». Lesmembres de 700 familles issues desix départements deRhône-Alpesse sont ainsi engagés àmodifier leurcomportement énergétique afin deréduire de 8% leur consommation,soit une économie de 1 750000 kWh.

ÎLE-DE-FRANCEDESPROJETSPOURLAQUALITÉDEL’AIR� Afin de donner une bouffée d’airfrais à l’Île-de-France, le Conseil régionalvient de lancer un appel à projets visantà améliorer la qualité de l’air. Unepremière en France. L’objectif de ladémarche est de respecter à termeles normes fixées par l’Organisationmondiale de la santé enmatièred’émissions polluantes. La pollutionest un enjeumajeur en Île-de-Franceoù les taux de pollution de l’air battentdes recordsprèsdes grandsaxes routiersrégionaux en périphérie de Paris.

MIDI-PYRÉNÉESLECONSEILRÉGIONALINVESTITDANSL’ÉNERGIEETL’AÉRONAUTIQUE� La régionMidi-Pyrénées va investir260millions d’euros d’ici à 2020 enfaveur de lamaîtrise énergétique etportera son effort pour l’aéronautique,première industrie de la région, à130millions d’euros en quatre ans.«260millions d’euros demesuresdirectes pour l’efficacité énergétiqueen 10 ans, cela constitue la politiquerégionale sans doute la plus ambitieuseen France », a estimé le présidentdu Conseil régional. « L’ensemble decesmesures devrait générer entre 1et 1,5milliard d’euros de travaux dansla région sur la période », a-t-il ajouté.

En bref

donnera naissance à un projet decharte. « Elle devra porter une visionde notre territoire et donner les élé-ments permettant aux décideurs de

hiérarchiser les projets. Le SRADDTconstitue une étape stratégique quiaura un impact sur les aggloméra-tions de demain », indique le prési-

dent de la région Centre.Une initiative qui sera validée parle Conseil régional d’ici à l’au-tomne. Les premières applications,

notamment en matière de santéet de déploiement du très hautdébit, sont attendues dès 2012.

Ludovic Bellanger

Toulouse lance sa web-série

«TATIE VIOLETTE EST UNMÉLANGEDÉTONANT D’HUMOUR DÉCALÉ

ET D’INFORMATIONS PRATIQUESÀ DESTINATION DES TOULOUSAINS »

Unhumour à la Jacques Tati et un sourire deMary Poppins, Tatie Violetteest l’héroïne de la premièreweb-série toulousaine, pratique et décalée.

Inédit. Le Centre a développé une démocratie participative prenant en compte les particularités de chaque territoire. Un succès. Les 29 réunionsterritoriales et thématiques ont réuni quelque 4 000 participants. PHOTODR

FRANÇOISBONNEAUPRÉSIDENTDELARÉGIONCENTRE

PHOTODR

Élaborer et partager une visioncommune pour le territoire avecses habitants, ses décideurs,

ses élus. » La démarche initiée parla région Centre traduit le rôle quirevient aujourd’hui aux régions enmatière d’aménagement urbain,de formation, de déplacement ouencore d’énergie, pour dessiner lemode de vie de demain. Avec entrame de fond l’élaboration d’unschéma régional d’aménagementet de développement durable duterritoire. « Le SRADDT doit propo-ser une vision partagée prenant encompte les effets destructeurs pournos concitoyens de la crise et de lafinanciarisation de l’économie sur leséquilibres sociaux et environnemen-taux » souligne François Bonneau,président de la Région.

23 réunions territorialesOrganisée autour de vingt-troisréunions territoriales et de sixforums thématiques (consacrésà l’économie, aux transports, àl’éducation, aux services publics,à la culture et à la biodiversité),la démarche baptisée « Ambitions2020 » constitue un état des lieuxunique des forces et des faiblessesrégionales. L’occasion pour leCentre de rappeler les défis ma-jeurs à relever. Faire face à l’essor

démographique et au vieillisse-ment de la population, luttercontre les changements clima-tiques, ou encore appréhender lesmutations économiques, le Cen-tre invite la région à la réflexion.Pour ses habitants, les confé-rences permettent de mieux ap-préhender leur territoire, et pour

les élus de partager l’expériencede leurs concitoyens. L’objectifest de présenter une vision régio-nale de l’avenir, adaptée dans samise en œuvre à l’échelle des bas-sins de vie. C’est à chacun, habi-tants et élus, qu’il revient deréfléchir aux ambitions qu’ilporte pour elle.Pour la région, l’enjeu est de taille.Il s’agit d’affirmer le Centre danssa vocation nationale et euro-péenne, d’identifier la région

comme terre d’innovation dans lasociété de la connaissance, de pro-mouvoir les harmonies constitu-tives de la qualité de vie, et d’allervers plus de solidarité.

« Dessiner l’avenir de la régionà 10 ou 20 ans »Impliqués dans les défis de de-

main, les Centriens ont débattuau cours des six derniers mois desorientations présentées. Inaugu-rées l’automne dernier à Vierzon,les rencontres territoriales se sontconclues au printemps à La Châtre.Une concertation inédite qui aréuni près de 4 000 participants.« Il y a une vraie implication. Lesateliers organisés au cours des réu-nions se sont déroulés dans une am-biance studieuse et constructive. Ladémocratie participative suscite des

envies, des attentes, elle doit nourrirle SRADDT », affirme FrançoisBonneau.Outre l’« Aménagement et le dé-veloppement durable du terri-toire », les ateliers ont fait la partbelle à l’« Éducation, à la Forma-tion et à l’Emploi », ainsi qu’au« Plan Climat Énergie ». Pour le

président de la région Centre, ils’agit de rappeler le sens d’une dé-marche citoyenne et participativepour que le débat ne soit pasconfisqué par la réflexion dequelques-uns. Ouvrir un dialogueentre le citoyen et le politiquedans chaque bassin d’emploi de larégion est essentiel, parce que l’in-telligence collective est supérieureà l’intelligence particulière.Pour le Centre, la mise en actionde la réflexion sur le Schéma ré-

gional d’aménagement et de dé-veloppement durable du territoirearrive à un moment particulier,celui « d’une crise avec un profondbouleversement économique et so-cial ». Avec le risque de voir lesinégalités se creuser entre les ter-ritoires. Le but du SRADDT est decréer un mouvement commun à

l’ensemble des habitants pourdessiner l’avenir de la région à 10ou 20 ans.

Une mise en action dès 2012Analysées et commentées, lesorientations proposées constituentune base au débat qui permet àchaque habitant, à chaque déci-deur, à chaque territoire d’entamerune réflexion et de proposer desprojets et des démarches nouvelles.Le diagnostic territorial ainsi établi,

6 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 410, MERCREDI 25 MAI 2011

Initiatives

Quel est l’enjeu du programme« Ambition 2020 » ?La loi a confié aux régions laresponsabilité du Schéma régionald’aménagement et de développe-ment durable du territoire(SRADDT). Il s’agit à partir d’undiagnostic précis et à traversune vaste consultation d’élaborerune vision partagée à 10 ou 20 ansde l’avenir régional. Il nous fautpenser un nouveau modèle dedéveloppement, respectueux deséquilibres sociaux et environne-mentaux. L’espace régional est parexcellence un espace de projetsmobilisateurs dans les domainesde l’économie, de l’éducation, del’enseignement supérieur, de la re-cherche, de l’innovation, du tou-risme, qui construisent l’avenir deses habitants.

Quelles sont les solutions pourdessiner la région de demain ?Il importe de favoriser les conver-gences entre les différents ni-veaux de collectivités et tousceux, dans les différents do-maines d’activité, qui sont les ac-teurs du développement de notrerégion. Nous voulons relever lesdéfis de la solidarité entre les ter-ritoires et les générations, le défide la connaissance pour l’inno-vation et pour l’emploi, le défi dela frilosité et du repli sur le passé.Tracer un chemin, promouvoirl’innovation, donner confiance,sont les conditions pour entrerdans le monde de demain. Lesappréhensions existent notam-ment chez les jeunes : la marcheest haute, c’est collectivementque nous pouvons la franchir.

Comment s’articule la démarcheinitiée par le Centre ?Il s’agit de libérer les énergies etles volontés pour construire unplan d’action qui soit partagé etapporte des réponses aux néces-saires mutations économiqueset écologiques, à la probléma-tique du vieillissement, tout enréaffirmant notre modèle de so-lidarité et de répartition des ri-chesses. Dans dix ans, dans vingtans, le monde aura profondé-ment changé. Il importe qu’unemême ambition rassemble cher-cheurs, entreprises, agriculteurs,salariés, et que la démocratie ci-toyenne, à laquelle aspirent leshabitants, nous permette d’écrireavec eux un avenir attractif pournotre région à l’horizon 2020-2030.

« Penser un nouveau modèlede développement »

3 questions à

4000 débats et 1 régionÀ l’instar des principales agglomérations de l’Hexagone, la région Centre invite aux débatspour imaginer et concevoir l’avenir de son territoire. Une démarche participative sans précédent.

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«IL Y A UNE VRAIE IMPLICATION. LES ATELIERS ORGANISÉSAU COURS DES RÉUNIONS SE SONT DÉROULÉS DANS UNE

AMBIANCE STUDIEUSE ET CONSTRUCTIVE. LA DÉMOCRATIEPARTICIPATIVE SUSCITE DES ENVIES, DES ATTENTES»

François BonneauPrésident de la région Centre

Page 5: l'Hémicycle - #410

Plus de 138 millions de personnestravaillent hors de leur pays de naissance.Bienvenuedans un monde d’opportunités.

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D’une voix calme, posée, ilrevendique 10 000 élus, unancrage territorial incon-

tournable et une démarche : ras-sembler la famille de gauche. Lavraie gauche. Pas celle qui s’estfondue dans le libéralisme. « LePCF a le devoir de proposer des solu-tions politiques aux problèmes. »Une phrase qui sied à la fonction…Son téléphone sonne. C’est lamusique de Butch Cassidy and theSundance Kid.Depuis près d’un an, place duColonel-Fabien, Pierre Laurentoccupe le bureau 520. Celui deMarie-Georges Buffet. Il estpresque étonné de se retrouver là.« Après le choc de 2007, il a fallumobiliser des énergies nouvelles,un renouvellement de génération.C’est tombé sur moi ! » Élu avecplus de 80 % des voix. Un scorestalinien ? Normal, il était le seulcandidat.Là où ils sont, ses parents doiventêtre fiers. Chez les Laurent, le com-munisme, c’est une affaire defamille. En 1945 son père, Paul,s’inscrit au PCF. À l’époque, on en-trait au parti comme on entre enreligion. Il gravit tous les échelons.Membre du bureau politique, dusecrétariat, député de Paris, il est de

tous les combats aux côtés deGeorges Marchais. Sa femme, elle,se contente d’être secrétaire de sec-tion. Tapotant sur son stylo, filsde son père mais pas fils à papa,Pierre Laurent ajoute : « l’engage-ment communiste ne se transmet pasgénétiquement. » Avant de se re-trouver en haut de l’affiche, PierreLaurent fut journaliste. Devinezoù ? À l’Humanité, dont il dirigeala rédaction des années durant.

En cette fin d’après-midi,l’homme a le sourire. Il arrive dechez Sotheby’s. On y vendait deslettres et des discours de Robes-pierre. Adjugés 750 000 euros.L’État a préempté. C’est ce quiravit Pierre Laurent. « La Sociétédes études robespierristes nous avaitalertés. J’ai répondu à leur appel etrelayé modestement cette affaire. »Modeste. Pierre Laurent l’est, oualors il cache bien son jeu. Calmeaussi ; même si, quand il parle, il

ne regarde pas toujours son inter-locuteur. Ce n’est pas un tribun. Ille sait et peut-être n’en souffrepas. Même si ses prédécesseursnous ont habitué à des envoléeslyriques mémorables… Oui, maisvoilà, le mur est tombé, l’URSSs’est effondrée. Les communistesont perdu de leur superbe.Le « grand soir » n’est même plusun rêve, surtout à l’heure de lamondialisation.

« Le PCF doit faire preuve de son uti-lité comme il l’a fait au cours de sonhistoire, argumente-t-il. Être com-muniste aujourd’hui c’est se dressercontre les injustices. C’est luttercontre une droite brutale, cynique etarrogante. » Les générations pas-sent, la dialectique reste.Sur l’affaire DSK, la sentencetombe comme un couperet :« DSK est hors jeu pour la présiden-tielle. Les conséquences pour lapolitique sont catastrophiques. Un

homme est en difficulté et on a l’im-pression que tout s’écroule. Il esturgent que la politique se redéploiesur le terrain des idées. »Un récent sondage nous a apprisque 37 % des ouvriers avaient filéchez Marine Le Pen. « Ce n’est pasforcément des gens qui viennent dela gauche », s’insurge gentimentPierre Laurent. « Il ne faut passe voiler la face, il y a untrouble profond dans le monde ou-

vrier, chez les employés. Ils pensentque les sacrifices qu’ils font ne dé-bouchent sur rien… On laisse cesgens dans un sentiment d’abandon,de colère. Une colère qui se mani-feste aussi par l’abstention. »La présidentielle de 2012, pour lescommunistes, il s’agit de laverl’affront de 2007. Front de gaucheen avant toute. Mélenchon en lo-comotive. « Je pense qu’il va êtrecandidat… », ça c’est acquis. Maispas question de lui signer un

chèque en blanc. « En septembreon aura nos candidats aux législa-tives. Cela frotte un peu là-dessus…Mais l’implantation du PC est réelleet incontournable… » ComprisMélenchon ?Pierre Laurent s’attend à unecampagne difficile. « Le climatpolitique est inquiétant. » Il n’aqu’une ambition, avouée, mettrela gauche (la vraie) à la hauteur dela situation. « Un énorme travail »,soupire-t-il.

Jean-FrançoisCoulomb des Arts

Focale

PIERRE LAURENTSECRÉTAIRENATIONALDUPARTICOMMUNISTEFRANÇAIS

Les communistes sont-ils solubles dans le Front de gauche ? La question a le don d’irriterle secrétaire national du PCF.

Communiste oui ! Fils à papa non !

3 dates

1973mars : ma premièregrève, au lycée Bergson

à Paris.

200529 mai : le nonau traité

constitutionnel européen. Une alertedes Français qui n’a pas été entendue.

20105 septembre : monpremier discours à la

fête de l’Huma. Une intense émotion.

PHOTO FRED DUFOUR/AFP

8 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 410, MERCREDI 25 MAI 2011

«DSK EST HORS JEU POUR LA PRÉSIDENTIELLE.LES CONSÉQUENCES POUR LA POLITIQUE

SONT CATASTROPHIQUES. C’EST UNE AFFAIREDRAMATIQUE»

Page 6: l'Hémicycle - #410

Pour le président de l’Assem-blée nationale, BernardAccoyer, cette réforme

apporte un rééquilibrage en per-mettant au Parlement de bénéfi-cier de plus depouvoir d’évaluationet de contrôle.Un rappel : deux modificationsimportantes ont été introduites enmatière de procédure législative.L’ordre du jour est désormais par-tagé entre une semaine destinée au

contrôle, une autre consacrée à l’or-dre du jour des assemblées et deuxsemaines d’ordre du jour prioritaireà l’initiative du Gouvernement.Cela permet ainsi de multiplier lesinitiatives parlementaires. Concer-nant les procédures, il y a égale-ment des dispositions enmatière dedélais qui permettent de travailleren toute sérénité. Enfin, l’introduc-tion des études d’impact permetaux parlementaires de se faire uneidée plus précise des conséquencesdes dispositions proposées.Pour le président de l’Assemblée,cette réforme renforce aussi le tra-vail des commissions. « Les textes

ont plus de poids en arrivant dansl’hémicycle. Car ils sont parfois com-plètement différents de ceux proposéspar le Gouvernement et celui-ci doitdéfendre son projet avec plus de vi-gueur. Il arrive qu’un texte soit com-plètement modifié, grâce à ce travailparlementaire. »Au-delà de ces modifications im-portantes dans le travail au quoti-dien, Bernard Accoyer a soulignéque la loi de 2008 permettait

d’éviter l’obstruction systéma-tique. « Les murs d’amendementsbloquaient les discussions et fai-saient que le débat passait de l’hé-micycle dans la rue. On parledésormais du fond et on limite ainsiles incidents de procédure. Pensezqu’en 2006 il y avait eu jusqu’à137 000 amendements. C’était uneinsulte à nos institutions ! »Enfin, le président de l’Assembléea indiqué que la création du co-mité d’évaluation et de contrôledes politiques publiques permet-tait de se saisir de sujets transver-saux, à parité entre majorité etopposition. Lors de ces débats,

Bernard Accoyer a été largementsoutenu par le président de lacommission des lois du SénatJean-Jacques Hyest, qui est inter-venu pour souligner les avancéesde cette réforme notamment enmatière d’initiative parlementaire.« De grandes lois se font désormaisgrâce à ces textes de 2008. »Soutien également du secrétairegénéral du Gouvernement. SergeLasvignes a cependant regretté

que le travail réalisé en amont eten commission ne puisse paspermettre de se concentrerdavantage en séance sur lesgrandes questions politiquesdu moment. « La force des chosesrésiste et il y a encore beaucoup tropd’amendements. »Pour lui, cette réforme n’a paspermis de lutter contre une autretendance, à savoir l’inflationlégislative. « Ce n’est d’ailleurspas tellement le nombre de lois quipose problème, mais le nombred’articles par loi (16 articles enmoyenne en 1990 et 37 en 2009).Le volume des textes a ainsi dou-blé », a conclu le secrétaire géné-ral du Gouvernement.Si Pascal Jan, autre intervenant dece débat et enseignant à l’IEP deBordeaux, considère égalementque cette réforme revalorise l’ac-tion du Parlement, il a critiquéla procédure accélérée qui « va àl’encontre de la philosophie généralede la réforme ». Celle-ci a ainsi étéengagée 13 fois en 2010-2011.« Mais cette réforme marque tout de

même une avancée incontestable.Les députés et sénateurs ont en mainles instruments de ce qui pourraitêtre un nouvel âge du parlementa-risme français, grâce à ces nouvellesprérogatives et ces nouveauxmoyens »,a conclu Pascal Jan.Enfin, Jean Gicquel, professeur dedroit public à l’université Paris I,se félicite du fait que la réformerééquilibre les pouvoirs du Parle-ment. L’article 42 de la Constitu-tion est pour lui une innovationmajeure. Il voit dans l’activité descommissions parlementaires unepuissante contribution à la démo-cratie : « Au niveau du travail légis-latif, le texte de la commission sertde support à la séance publique. Ledroit d’amendement s’exerce désor-mais en commission et en séance.Les commissions ne cultivent plusle huis clos. L’entre-soi a disparu.La commission, qui était par le passéun organe préparatoire, devient unorgane décisionnel. »

Compte rendude Joël Genard

NUMÉRO 410, MERCREDI 25 MAI 2011 L’HÉMICYCLE 11

Expertise

Réforme constitutionnelle de 2008 :nécessaire mais pas suffisanteÀ l’occasion d’un débat organisé par LaDocumentation française, Bernard Accoyer, entouréde parlementaires et de spécialistes du droit constitutionnel, a dressé le bilan de la réformede 2008 sur le rééquilibrage des pouvoirs entre l’exécutif et le législatif.Conclusion : une première avancée,mais « peutmieux faire ».

«LA LOI DE 2008 AMISFIN À L’OBSTRUCTION

SYSTÉMATIQUE PROVOQUÉEPAR DE VÉRITABLESMURSD’AMENDEMENTS»

Bernard Accoyer

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Sans préjudice de l’applicationdes trois derniers alinéas de

l’article 28, l’ordre du jour est fixé parchaque assemblée. Deux semainesde séance sur quatre sont réservéespar priorité, et dans l’ordre que leGouvernement a fixé, à l’examendestextes et aux débats dont il demandel’inscription à l’ordre du jour.En outre, l’examendes projets de loide finances, des projets de loi definancement de la Sécurité sociale et,sous réserve des dispositions de

l’alinéa suivant, des textes transmispar l’autre assemblée depuis sixsemaines aumoins, des projetsrelatifs aux états de crise et desdemandes d’autorisation visées àl’article 35 est, à la demande duGouvernement, inscrit à l’ordre dujour par priorité.Une semainede séance sur quatre estréservéepar priorité et dans l’ordre fixépar chaqueassembléeau contrôlede l’actionduGouvernement et àl’évaluationdespolitiquespubliques.

Un jour de séance parmois estréservé à un ordre du jour arrêté parchaque assemblée à l’initiative desgroupes d’opposition de l’assembléeintéressée ainsi qu’à celle des groupesminoritaires.Une séance par semaine aumoins,y compris pendant les sessionsextraordinaires prévues à l’article 29,est réservée par priorité auxquestions desmembres duParlement et aux réponsesduGouvernement.

Article 48 de la Constitution

Un tel calme, c’est plutôt rareà la première chambre de lacour d’appel de Paris. Plus

de file à l’entrée, plus de brouhahadans les couloirs, les gardes sem-blent même regretter de n’avoirplus de journalistes à refouler.En fait, le seul spectacle de l’au-dience d’appel du procès Cleas-tream, c’est M. de Villepin quis’ennuie. Bien entendu, il s’efforcede le dissimuler : d’abord parcequ’il est bien élevé, mais surtoutparce que la présidente et ses deuxjuges assesseurs le guettent du coinde l’œil. Villepin s’ennuie parceque Sarkozy n’est plus là. Il n’y aplus de combat de chefs. Sarkozy atranquillement retiré sa partie ci-vile, comme si le match ne l’amu-sait plus, comme s’il abandonnaità la punition judiciaire banale celuiqui avait voulu lui barrer le cheminde l’Élysée : Villepin relaxé enpremière instance, mais rappelé àl’audience de la cour d’appel par leparquet général.Souvenez-vous de ce qu’avait dé-claré, fort désappointé, le procu-reur Marin, après le rendu dujugement de première instance :« Le tribunal de Paris n’a pas tirétoutes les conséquences des élémentsrassemblés contre M. de Villepin. »En somme, remettons l’ouvragesur le métier. Pourquoi, ce qued’aucuns qualifient d’acharne-ment ? Bien sûr, on peut penserqu’en faisant appel, le procureur

de la République de Paris, l’accusa-teur majeur du premier procès,s’est vexé de constater que sonanalyse juridique affinée du pre-mier procès sur « la dénonciationcalomnieuse par omission » n’a pasété appréciée à sa juste valeur parles premiers juges. On peut aussise douter qu’est venue discrète-ment de la Chancellerie l’injonc-tion de ne pas laisser Dominiquede Villepin sur une victoire juri-dique qu’il a habilement transfor-mée en Austerlitz médiatique. Toutest à refaire. Reste la question desavoir qui est le plus grand men-teur des trois prévenus.Et les magistrats de la premièrechambre semblent vouloir explo-rer, disons exploiter, ligne par ligne,chaque page du dossier. Troisfemmes à l’égard desquelles, àl’évidence, le charme distingué etle dos dressé de M. de Villepinn’ont qu’un effet apparemment li-mité. Pour ce qui le concerne, laquestion est simple : savait-il enjuillet 2004 que les listings Clear-stream étaient falsifiés, pouvait-ildouter à cette époque de la présencedu nomdeNicolas Sarkozy dans ceslistes de comptes frauduleux ?C’est là qu’apparaissent les men-songes et les fantasmes des deuxautres personnages assis de l’autrecôté du prétoire : d’abord Imad La-houd, gros yeux noirs derrière seslunettes, le magicien du men-songe, celui qui a réussi à faire

croire à tout le monde y compris àsa femme qu’il était un génie del’espionnage ; ensuite Jean-LouisGergorin, casque noir et regardaux aguets, celui qui croyait queson patron, Jean-Luc Lagardère,avait été assassiné, et qui pensaitrendre service à la France en sa-vonnant la route de Nicolas Sar-kozy. Tous les deux ont trafiqué ceslistes de comptes clandestins pourfaire croire qu’il – Sarkozy – possé-dait des comptes secrets, donc desrevenus occultes.L’arme fatale contre Dominiquede Villepin est ce personnage éton-nant, silhouette d’officier de Hus-sards, coupe courte et réputationflatteuse d’as du renseignement.Lui, c’est un vrai espion. Le généralRondot a sans doute regrettéd’avoir parfois ménagé l’ancienPremier ministre au cours du pre-mier procès. Mais le portrait qu’ona fait de lui ainsi que l’utilisationparfois perverse de ses propos me-surés l’ont profondément agacé :«Mme la Présidente, je ne suis pas unberniche, l’idiot du village auquel onbotte les fesses , je sais ce que j’ai écritet je confirme tout ce que j’ai écrit. »Qu’a-t-il écrit ? Tout simplementqu’à partir de juillet 2004, avantl’instruction, avant le scandale etle soupçon, il savait que les listingsétaient des faux et que, lui, Rondot,l’avait dit à tout le monde. Toutle monde : Jean-Louis Gergorin,Dominique de Villepin et même

Michèle Alliot-Marie, qui était toutde même son ministre de la Dé-fense : « J’ai alerté tout le monde, jeleur ai dit : attention ça ne tient pas !J’ai mis en garde tout le monde sur lesconséquences de ces faux. »Sous-entendu personne n’en a tenucompte. Y compris M. de Villepin.

Reste à savoir si les trois magistratesde la cour d’appel seront plus sensi-bles à ce témoignage que la cour depremière instance. Mais peut-êtreque ce n’est pas seulement le procèsqui est oublié, mais l’affaire elle-même.Autre temps, autre combat…

Paul Lefèvre

10 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 410, MERCREDI 25 MAI 2011

Àdistance

Clearstream : leprocèsoublié…

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DR

L’affaire DSKadéfinitivement occulté le procès Clearstream.Réquisitoires et plaidoiries sedéroulent dans une indifférence générale. Jugement à l’automne, en pleine précampagneprésidentielle.

Ils lisent l’Hémicycle !

DominiquedeVillepinà sonarrivéeà la courd’appel deParis. PHOTOTHOMASSAMSON/AFP

JacquesPélissard,XavierBertrandetJean-LouisDebréàl’occasiondelaremisedes«Marianned’Or»dans lessalonsduConseil constitutionnel.

Page 7: l'Hémicycle - #410

Culture

12 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 410, MERCREDI 25 MAI 2011

Un ouvrage rassemblant lessouvenirs d’anciens députés –illustres commeVictor Hugo etJacques Chaban-Delmas, ou plusméconnus – raconte les coulissesde la vie de parlementaire.Dans « Si le Palais-Bourbonm’étaitconté », à paraître le 26maiet préfacé par le président del’Assemblée nationale BernardAccoyer, Louis Barthou, députéde 1889 à 1922, explique d’entrée

que le goût de la politique naît«moins d’une tradition familiale qued’une vocation personnelle. Ce goûtse discipline,mais ne s’improvise pas.On l’a, si je peux dire, dans le sang ! »,écrit-il.Certes, il y a la vocation,mais il y asurtout l’élection. Ainsi Paul Vignéd’Octon, député de l’Hérault de 1893à 1906, évoque les champions de cequ’il appelle « lamanœuvre de ladernière heure ». Parmi les plus

fameuses, il raconte qu’un candidatà la députation, au dernier moment,« sans que la nouvelle puisse êtredémentie à l’ouverture du scrutin, fitpasser son concurrent pourmort ».On y apprend aussi qu’un députésocialiste de l’Allier, ChristopheTrivier, parvenait à faire « chanterl’Internationale à son pupitre, à l’aided’une clé et d’un coupe-papier ».Et Jacques Isorni, député d’extrêmedroite de la Seine de 1951 à 1958,

détaille de son côté l’« art de faireles couloirs ».Quant à la tribune de l’Assemblée,pour Victor Hugo (député de laSeine de 1848 à 1851, et 1871), elleest la « bouche ouverte de l’esprithumain ». Joël Genard

«Si le Palais-Bourbonm’était conté »,éditions duMoment, 320pages,19,95 euros.

On n’imaginait pas NicolasSarkozy ainsi, ce 6mai 2007où les élections présiden-

tielles lui donnèrent les clés d’unroyaume qu’il convoitait depuislongtemps. Sombre et introspectif,les yeux rivés sur son téléphone,espérant un appel ou un messageimprobable de Cécilia, se remé-morant quelques étapes de sa pro-gression vers l’échelon ultime dupouvoir.

Des affrontements (tragi-comiques)avec Chirac ou Villepin au brûlotClearstream, de la gestion de laplace Beauvau et Bercy à la prisede l’UMP, en passant par les stra-tégies médiatiques et autres dis-cours établis par un staff dévoué :

La Conquête se veut une immer-sion dans les coulisses et arcanesdumonde politique, aux codes par-fois proches de la sphère du specta-cle. Le ton est donné d’entrée dejeu par Cécilia – campée par Flo-rence Pernel – qui intime à sonépoux de « ringardiser » l’adversaire,d’être à la fois « acteur et metteur enscène » de l’actualité.Sans mentionner les difficultés (ju-ridiques, notamment) inhérentes à

la réalisation d’une fiction sur unchef d’État dont lemandat n’est pasterminé, saluons les prouesses tech-niques de ce film : le travail de do-cumentation qui servit de supportà l’écriture du scénario, le mariageréussi entre réalisme et reconstitu-

tions romanesques, les décors et,surtout, les performances d’acteur.Denis Podalydès est saisissant deressemblance, et parvient à faire ou-blier le visage deNicolas Sarkozy auprofit du sien, sans jamais tomberdans un excès caricatural. Certainsregretteront que le film décrive uneguerre des ego plutôt que d’analyserle projet politique. Mais le but dumetteur en scène n’était certaine-ment pas là, et la plupart des Fran-

çais découvriront un envers dudécor connu jusqu’alors des seulsjournalistes.Il reste que ce film d’un nouveaugenre en France est plutôt réussi.Notamment dans l’enchaînementrythmé des séquences, reflétant le

style Sarkozy, maintenant l’atten-tion du spectateur, et créant undouble élan narratif : l’ascensionpolitique parallèlement au déclindu couple. L’accumulation de puis-sance et la progression dans lessondages s’accompagnent d’unedéréliction amoureuse qui conduità l’impensable pour un winnercomme Sarkozy : Cécilia claque laporte. Tout se passe comme si lacourse présidentielle croisait à un

moment la course maritale, en unpoint difficilement conciliable.« Il n’arrive pas à garder sa femme,comment peut-il garder la France ? »ricane (en substance) SamuelLabarthe, qui incarne Villepin.C’est précisément l’inverse qui est

à l’œuvre : pour conquérir sonpays, le futur Président accepte –malgré lui – de sacrifier ses senti-ments.De ce double élan découle la tona-lité la plus remarquable de LaConquête. On pensait voir un filmà charge, dépeignant un person-nage franchement déplaisant, orc’est lemécanisme opposé qui s’en-clenche : la solitude et les doutes deSarkozy le rendent carrément sym-

pathique. Était-ce la volonté del’auteur ? En tous les cas, loinde nuire à l’image du président dela République, ses coups de gueuleet son impulsivité ne font qu’enri-chir la complexité humaine de ceportrait. Jessica Nelson

LaConquête: une fiction-réalitéAvec ce film, lemetteur en scèneXavier Durringer invente un nouveau genre : le ciné-réalité.Pas vraiment un coup demaître,mais un coup d’essai plutôt réussi grâce à des numérosd’acteur exceptionnels.

LaConquête,deXavierDurringer, avecnotammentDenisPodalydès, FlorencePernel etBernardLeCoq. PHOTOÉMILIE DE LAHOSSERAYE

Le Palais-Bourbon raconté par d’anciens députés

YVAN

TRAVERT/AFP

Page 8: l'Hémicycle - #410

Quelque chose d’irréversibles’est passé lundi 16 maiavec la retransmission de

la comparution de DominiqueStrauss-Kahn devant un tribunalaméricain. Les téléspectateurs dumonde entier ont été informés entemps réel par le biais de tweetsenvoyés par les journalistes instal-lés à l’intérieur de la salle d’au-dience. Les chaînes d’informationont pu ainsi diffuser des informa-tions aumomentmêmeoù l’événe-ment se passait, alors que les

caméras utilisées n’ont servi qu’àfournir des images diffusées endifféré. Ces tweets étaient envoyésmalgré l’interdiction formelle dela cour mais rien n’y fit, et cettesituation s’est reproduite quelquesjours plus tard au vu et au su detous. En l’occurrence, des jugesappelés à statuer sur le sort deDominique Strauss-Kahn.Pour mieux comprendre en quoicette situation apparaît aujourd’huicomme incontournable, unbref rap-pel de ce qu’est Twitter.

Twitter en quelques motsTwitter est un réseau social ex-ploité sur Internet sur lequel lesinternautes inscrits publient oureprennent des messages courts de140 caractères maximum. Ces mes-sages peuvent inclure un lien versun site Web ou des mots-clés iden-tifiés par le caractère « # » : lescélèbres « hashtags ». Cesmessagessont consultables par n’importequi. Il faut en revanche posséderun compte sur Twitter pour par-ticiper. Twitter est donc à la fois unréseau de communication et de dif-fusion d’informations.

Qui peut publier sur Twitter etcomment suivre une personne ?Tout un chacun peut avoir uncompte sur Twitter. Si les messagessont enrichis de « hashtags » (mots-clés), ils seront intégrés au fil d’in-formation affiché par le site Webaux personnes qui souhaitent lireles messages contenant ce vocable.En revanche, pour suivre toutes lespublications d’un compte, il estnécessaire d’en connaître l’exis-tence et, de préférence, s’y abonner.

Quelle crédibilité accorderaux tweets ?Twitter, envisagé comme sourced’information, pose deux ques-tions. La première concerneévidemment la crédibilité de l’in-formation mise en ligne. En effet,Twitter ne se conçoit pas commeun média d’information, maiscomme un réseau social où les in-ternautes communiquent sur lessujets qui les intéressent. Il n’y aaucune différence entre le non-journaliste et le journaliste, la pa-role se mêle et c‘est à celui quisera le plus suivi et le plus repris –

« retweeté » en langage Web – querevient l’influence, donc la posi-tion de passeur d’infos. Le lecteur,à la différence d’un média clas-sique, n’a aucun moyen assuré desavoir si la personne qu’il suit estréellement informée ou si sesmessages ne sont que pur avis per-sonnel, ou pire, propagande.

La confidentialité mise à mal ?La seconde question posée par

Twitter concerne la confidentialitéde l’information mise en ligne. Làoù un journaliste utilise un microou une caméra, le twitteur n’a be-soin que d’un smartphone surlequel il pianote. Plus discret, peurepérable, il peut franchir les bar-rières devant lesquelles le journal-iste s’arrête. Simple, efficace,difficile à bloquer et à contrôler.Le problème s’est déjà posé àl’Assemblée nationale en juillet2010 lors de l’examen du projetde loi sur les retraites par la com-mission des affaires sociales del’Assemblée. Son président, PierreMéhaignerie, avait demandé lehuis clos, mais certains députéss’étaient offusqués de cette déci-sion, notamment Lionel Tardy,très actif sur Twitter.Comment garantir alors, lorsd’un conseil d’administration, d’unsommet européen ou même d’unconseil des ministres, que les pro-pos tenus dans ces enceintes confi-dentielles, ne seront pas relayésimmédiatement sur ce réseausocial ? Il est toujours possible debrouiller les ondes, mais cela im-plique de couper les participantsdu monde extérieur, alors que cesderniers ont souvent besoin d’êtreinformés, eux aussi, en temps réel,sur certains dossiers.Ni les médias, ni les décideurspolitiques et économiques n’ontactuellement de réponses à ces ques-tions. Il est pourtant urgent d’entrouver tant il est vrai que chaque

jour qui passe voit Twitter prendreune place de plus en plusprépondérante dans les réseauxd’in-formation. Internet, l’une des plusbelles inventions de l’homme duXXIe siècle, n’a pas fini d’être uncasse-tête pour les gouvernementsdu monde entier. Il faut savoir queTwitter est désormais un réseau socialplanétaire sur lequel 200 millionsd’internautes échangent 110 mil-lions demessages chaque jour.

2.0

Twitter : le secretmisàmort

Le chiffre

78 000messages échangés surTwitter, dans la semaine,comportant le hashtag #DSK.

JP Balasse, journaliste, lorsde l'audience de libérationsous caution de DSK

La citation

«JE N’AI JAMAISVU AUTANT

DE JOURNALISTESTWITTER EN MÊMETEMPS... L’AFFAIREDSK A TOUT CHANGÉ,TOUT. »

IMPOSSIBLE DE SAVOIRQUI CONSULTE SONCOMPTE FACEBOOK� Premier réseau social de laplanète, Facebook ne permet pas àses abonnés de savoir qui consulteleur compte. Pire, les applicationsen ligne qui affirment pouvoir lefaire ne sont que desmoyensd’utiliser les informations du comptepour envoyer des spams ou collecterillégalement les informationspersonnelles. Selon Nicolas Brulez,spécialiste de la sécurité chezKaspersky, 15 000 personnesauraient déjà été victimes de cesoffres malveillantes. Un véritablesouci lorsqu’on sait que Facebookcompte 20millions de comptesfrançais.

LES SERVICESMOBILES PÈSENTPLUS D’1,2 MILLIARDD’EUROS EN FRANCE� C’est ce que révèle une étudecommandée par l’AFMM,Association française dumultimédiamobile. Conséquence logiquede la croissance dumarché de latéléphonie mobile en France, cetteexplosion du secteur des servicesmobiles est soutenue notammentpar le fait que près d’unmobinautesur trois possède un smartphone.Lemarché français, très dynamique,représente près de 10% du chiffred’affaires mondial du secteur.

LINKEDIN VALORISÉÀ 8,9 MILLIARDSDE DOLLARS� Premier réseau socialprofessionnel aumonde, LinkedIna brillamment réussi son entréeau Dow Jones. Son action, proposéeau prix initial de 45 $, s’est envoléejusqu’à près de 120 $ avantde terminer sa première journéede cotation à 94,25 $. Ce succèsrappelle l’entrée en bourse deGoogle en 2004. Facebook, luiaussi en passe d’entrer à la bourse,pourrait créer le même engouement,ce qui fait craindre à certainsspécialistes la reconstitution d’une« bulle Internet », comme au débutdes années 2000.

AMAZON VEND PLUS DELIVRES ÉLECTRONIQUESQUE DE LIVRES PAPIER� Dans un communiqué du 19 mai,le géant américain de la venteen ligne a annoncé qu’il vendaitdésormais 105 livres électroniques,lisibles sur son lecteur Kindle,pour 100 livres imprimés sur papier,grand format et livre de pocheconfondus. Le coût réduit du Kindle,proposé à 114 $, explique en partiece succès, qui repose aussisur la richesse du catalogue(950 000 références) et le prixde vente des éditions électroniques.83% sont proposés à un prixmaximum de 9,99 $.

En bref

Twitter balaie d’un seul coup tous les codes de l’information. L’instantanénon vérifié en constitue l’architecture de base. Une révolution et un danger.

14 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 410, MERCREDI 25 MAI 2011

DominiqueStrauss-Kahn faceau juge le 19mai 2011. PHOTORICHARDDREW/AFP

LejugeMichaelObus, Coursuprêmedel’ÉtatdeNewYork.PHOTORICHARDDREW/AFP

EduardoGuimaraes, blogueuret militant politiquebrésilien, s’interroge sur

cette affaire :

Blogcidadania« Le témoignage de la femmede chambre, dans un mondeoù le viol est pratiqué en touteimpunité, doit être pris très ausérieux. Cependant, il y a desaspects de cette affaire qui attirentl’attention. Le candidat à laprésidentielle des socialistesfrançais, qui possède égalementune grande chance d’être élu etqui est le directeur d’unétablissement de la taille du FMI,pourrait-il commettre un crime sigrave, sans se soucier de quoi quece soit ? Ils diront qu’il pouvaitêtre drogué ou ivre. Mais unhomme qui a réussi comme M.Strauss-Kahn peut-il commettreune erreur aussi absurde ?Combien de candidats à laprésidence d’une superpuissance,et avec de telles cotes, ont faitquelque chose ? L’épouse del’accusé est également fortementengagée dans sa défense. Sesdéclarations montrent qu’ellesemble convaincue que lespoursuites n’ont pas le moindrefondement. Pourrait-elle prendrela défense inconditionnelle de sonmari uniquement par crainte del’embarras ? »>www.blogcidadania.com.br

Un blog grec, « Ici Alexandrie »,se perd dans les informations con-tradictoires diffusées dans les mé-dias et livre son scepticisme :

Alexandria« Dominique Strauss-Kahnest financièrement indépendant,“bon vivant”, bien éduqué, père defamille, connu comme “amoureuxdes femmes”, et candidat à laprésidence de la France. Il connaîtla loi américaine de par sesnombreux voyages entre l’Europeet l’Amérique. Cet homme a brisésa carrière en quelque 24 heures,

est devenu le “violeur”, le“sauvage”, la “bête sauvage” ?Il est impossible de croireM. Strauss-Kahn d’un coup sousle charme d’une immigrante(parfois du Sénégal, parfoisguinéenne) présentée comme seulemais mariée avec un enfant, ouveuve, vivant dans une auberge dejeunesse dans le Bronx ou mêmedans un immeuble réservé auxpatients atteints du sida. J’ai lude nombreuses publications de lapresse américaine et je me posebeaucoup de questions. »> alexandria323232.blogspot.com

Le site d’information russeZaiprotiv pointe du doigt l’éten-due des possibilités offertes à ladéfense de Dominique Strauss-Kahn.

Zaiprotiv« Selon le professeur de droit dela faculté de droit de New York,Bess Frank, les détectives de ladéfense de M. Strauss-Kahnpeuvent même prendre un volvers la Guinée équatoriale.“Ils veulent tout savoir survos antécédents. Vous ne savez

jamais ce qui peut être trouvélà-bas. Et si vous êtes un hommeavec les fonctions de M. Strauss-Kahn, ils passent tout au peignefin.” Bien sûr, l’équipe de M.Braffman doit se conformeraux lois américaines sur laprotection des victimes.Par exemple, ils ne sont pasautorisés à lui parler de sonpassé sexuel. Un avocat peuttenter de convaincre le procureurde retirer les accusationss’il y a quelque chose qui peutincriminer Ophelia. »> zaiprotiv.info

B-log, autre blogd’information russe,se demande si Dominique Strauss-Kahn n’a pas été victime de la puis-sance américaine qu’il aurait miseen cause en étant à la tête du FMI.

B-Log« Les médias tentent de trouver leplus de saletés possible sur M.

Strauss-Kahn. Pourquoi? Enraison de la valeur du dollar.Dominique Strauss-Kahn a faitune attaque sur le dollar, etmaintenant il fait face à la colèrede l’Empire. Le directeur généraldu Fond monétaire internationala appelé à l’introduction de lanouvelle monnaie mondiale quiremplacerait le dollar. La tête duFMI estime également que lesdroits de tirage spéciaux devraientjouer un rôle plus important.M. Strauss-Kahn ne s’est-il pasmis ainsi dans la position deSaddam Hussein et Mouammar

Kadhafi ? M. Strauss-Kahn a étéencore plus dangereux queSaddam ou Kadhafi – il a occupéune position où il lui était aisé dechanger les politiques du FMI etqui offrait des contacts avec deschefs d‘État visant à promouvoirl’idée de remplacer le dollar. »> B-log.org.ua

Paul Craig Roberts, économiste etjournaliste américain, développesa théorie du complot, et dénonceles États-Unis comme en étant lesinstigateurs.Une thèse que l’on retrouve dansde très nombreux blogs allemands.

Globalresearch« Que ce soit mérité ou non, leFMI a beaucoup de crédibilité. Enplaçant la Chine comme premièrepuissance économique d’ici la finde la prochaine présidenceaméricaine, le FMI a mis un coupde poignard dans le cœur de

l’hégémonie américaine. Lepouvoir à Washington est basésur la suprématie économiquede l’Amérique. Le rapport du FMIa déclaré que cette suprématiearrivait à sa fin. Pour la premièrefois depuis des décennies, d’autrespays peuvent voir la perspectived’échapper à la domination desÉtats-Unis. Ils n’ont pas à êtredes États-marionnettes. Ils voientla perspective de servir leur peupleet leurs propres intérêts au lieu deceux de Washington. Les payseuropéens, par exemple, obligésde se battre pour Washington enAfghanistan et en Libye, voientla lumière au bout du tunnel.Ils peuvent maintenant envisagerun refus. Bien que membrede l’établissement, riche, etindépendamment de soncomportement envers les femmes,Dominique Strauss-Kahn a faitl’erreur de révéler qu’il pourraitavoir une conscience sociale. Cetteconscience sociale, ou la démesuredu pouvoir, l’a conduit à contesterla suprématie américaine. C’estun crime impardonnable pourlequel il est puni. »>www.globalresearch.ca

NUMÉRO 410, MERCREDI 25 MAI 2011 L’HÉMICYCLE 15

Déblogage

AffaireDSK : sur laToile étrangère,les théoriesducomplotont la viedure

Chaquesemaine,le tourdu mondedes blogspar Manuel Singeot

Si la presse étrangèren’est pas tendreavec l’anciendirecteur général duFMI,les blogs, deMoscouàBrasilia enpassantparAthènesouBerlin, doutentde la culpabilité deDSK.Dans cesblogs, on l’imagine volontiers en victimede« l’impérialisme financier »américain.

EIP l’Hémicycle, Sarl au capital de 85 890¤. RCS : Paris 443 984 117.44, rue Blanche - 75009 Paris. Tél. : 01 55 31 94 20. Fax : 01 53 16 24 29. Web : www.lhemicycle.com - Twitter : @lhemicycle

GÉRANT-DIRECTEURDELAPUBLICATIONBruno Pelletier ([email protected]). DIRECTEURRobert Namias ([email protected]) RÉDACTEURENCHEFJoël Genard([email protected]). ÉDITORIALISTESGérard Carreyrou, Michèle Cotta, Bruno Jeudy, Paul Lefèvre, Catherine Nay AGORA Ludovic Vigogne ONT COLLABORÉ À CE NUMÉROLudovic Bellanger, Jean-François Coulomb des Arts, Béatrice Houchard, Jessica Nelson, Manuel Singeot CORRECTIONAurélie Carrier MAQUETTEDavidDumand DIRECTRICE COMMERCIALEViolaine Parturier ([email protected])PARTENARIATS Juliette Boudre ([email protected])IMPRESSIONRoto Presse Numéris, 36-40, boulevard Robert-Schumann, 93190 Livry-Gargan. Tél. : 01 49 36 26 70. Fax : 01 49 36 26 89. Parution chaquemercredi [email protected] COMMISSIONPARITAIRE0413C79258 ISSN 1620-6479

«M. STRAUSS-KAHN PEUT-IL COMMETTREUNE ERREUR AUSSI ABSURDE ? »

> EDUARDOGUIMARAES, BLOGUEURBRÉSILIEN

La fouledescurieuxdevant le 71Broadway, immeubledans lequel est assignéà résidenceDominiqueStrauss-Kahn. PHOTOSPENCERPLATT/AFP

Page 9: l'Hémicycle - #410

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