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Ils n’étaient pas obligés. Pas obligés de donner aux caméras du monde entier la possibilité de filmer Dominique Strauss-Kahn menotté, montant dans une voiture, encadré par deux policiers. DSK en person- nage récurrent d’une série américaine, ils n’étaient pas obligés. Et pourtant ils l’ont fait. Sans doute parce que la jus- tice américaine a voulu montrer ainsi que, tout directeur général du FMI qu’il était encore, le dirigeant français devait être traité comme n’importe quel autre justiciable sur le territoire américain. Sans doute également en pensant à cette jeune femme qui a porté plainte et dont le témoignage devra, certes, être vérifié, mais qui reste pour l’heure la victime de cette sinistre affaire. L’agression sexuelle est durement réprouvée et réprimée aux États-Unis et les policiers américains sont connus pour leur dureté en pareille circonstance. Il n’empêche, DSK sortant en pleine nuit du commissariat, ou comparaissant devant la juge, le visage défait et émacié, on se dit que les autorités américaines auraient pu décider de faire autrement. En évitant les menottes notamment. Bref, tout était fait pour humilier. Et c’est parfaitement réussi. Humiliation pour DSK et du coup terrible humi- liation pour la France. L’affaire était en soi assez tragique pour ne pas y ajouter cet affront. Mauvaise image C’est le pourcentage des accidents médicaux graves qui pourraient être évités dans les hôpitaux, selon la Haute Autorité de santé (HAS). Il y a 1 000 accidents médicaux, ou événements indésirables graves, qui se passent chaque jour dans les hôpitaux, soit un accident médical par semaine pour chaque service hospitalier de France. 60 % de ces accidents concernent des complications telle une insuffisance rénale ou les effets secondaires d'un traitement. Le chiffre Et aussi C ela pourrait être un épisode iné- dit du feuilleton « Les Experts », ou un film américain de série B. Encore aurait-il fallu que les scénaristes aient beaucoup d’imagination. Peut-être même leur récit aurait-il été considéré par les producteurs comme incroyable, pas crédible, irréaliste : le directeur géné- ral d’un des organismes économiques les plus puissants du monde, qui s’apprête à faire acte de candidature à une élection présidentielle dans son pays, accusé de tentative de viol et de séquestration sor- dide dans un hôtel new-yorkais, aban- donnant en toute hâte sa chambre, arrêté par la police américaine, débarqué de l’avion d’Air France à destination de Paris, dix minutes avant son départ. En quelques instants, la vie de Domi- nique Strauss-Kahn a viré au cauche- mar. La bombe à fragmentation, car c’en est une, a atteint en une cascade sinistre lui-même, sa famille, mais aussi le Fonds monétaire international, au- quel il a donné pendant trois ans et demi une influence nouvelle. Et, au- delà, la France, qui l’a choisi et imposé à l’échelon international, le Parti socia- liste français, dont il était le favori pour la prochaine élection présidentielle de 2012, et peut-être même la classe poli- tique toute entière. > Lire la suite p. 4 NUMÉRO 409 — MERCREDI 18 MAI 2011 — 1,30 ¤ Éditorial Robert Namias Directeur de la publication : Bruno Pelletier Directeur : Robert Namias BERTRAND GUAY / AFP FRANCK PREVEL / AFP DSK : inimaginable lhemicycle.com L’inculpation et le maintien en détention de Dominique Strauss-Kahn bouleversent la donne politique en France et ternissent l’image de l’Hexagone à l’étranger. Par Michèle Cotta S’appuyant sur une salve de sondages qui la créditent de plus de 20 % des intentions de vote, Marine Le Pen occupe tous les terrains. Ainsi, dimanche, malgré un air de circonstance, la présidente du Front national donnait déjà le sentiment de vouloir surfer sur l’inculpation de DSK. Plus que jamais, Marine Le Pen divise la droite et trouble la gauche. Les propos de Lau- rent Wauquiez l’ont confirmé crûment. Derrière son discours, il y a non seulement une condamnation implicite de l’aide aux chômeurs, qui serait contre-productive, mais également une cri- tique à peine voilée d’un assistanat qui favoriserait l’immigra- tion. Bref, des thématiques très chères à Marine Le Pen. En attendant que d’autres voix issues de l’UMP ou d’ailleurs posent par exemple la question de l’euro, de la suppression des frontières au sein de la communauté européenne ou bien encore de la mondialisation. C’est en ce sens qu’on peut s’interroger sur une éventuelle lepénisation des esprits qui n’épargne pas la gauche, ou du moins son extrême : l’impression de copier-coller entre certains propos sonne étrangement. > Lire p. 2 et 3 La lepénisation des esprits, fantasme ou réalité ? Christian Estrosi P. 2 Jack Lang P. 3 PATRICK KOVARIK / AFP STÉPHANE DE SAKUTIN / AFP Lire Focale : Jean-Pierre Chevènement, l’homme de marbre >P. 8 Expertise : Sécheresse avec Luc Guyau > P. 11 40 % ! La chute FRED DUFOUR / AFP

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l'Hémicycle numéro 409 du mercredi 18 mai 2011

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Page 1: l'Hémicycle - #409

Ils n’étaient pas obligés. Pasobligés de donner aux caméras dumondeentier lapossibilitéde filmerDominiqueStrauss-Kahnmenotté,montant dans une voiture, encadrépar deux policiers. DSK en person-nagerécurrentd’unesérieaméricaine,ilsn’étaientpasobligés.Etpourtantilsl’ontfait.Sansdouteparcequelajus-ticeaméricaineavoulumontrerainsique,toutdirecteurgénéralduFMIqu’il

étaitencore, ledirigeantfrançaisdevaitêtretraitécommen’importe quel autre justiciable sur le territoire américain.Sans doute également en pensant à cette jeune femmequiaportéplainte et dont le témoignage devra, certes,être vérifié, mais qui reste pour l’heure la victime decette sinistre affaire. L’agression sexuelle est durementréprouvée et réprimée aux États-Unis et les policiersaméricains sont connus pour leur dureté en pareillecirconstance. Il n’empêche, DSK sortant en pleine nuitdu commissariat, ou comparaissant devant la juge,le visage défait et émacié, on se dit que les autoritésaméricaines auraient pu décider de faire autrement.En évitant lesmenottes notamment.Bref, tout était fait pour humilier. Et c’est parfaitementréussi. Humiliation pour DSK et du coup terrible humi-liationpour laFrance.L’affaireétait ensoiassez tragiquepour ne pas y ajouter cet affront.

Mauvaise image

C’est le pourcentagedes accidentsmédicaux graves quipourraient être évitésdans les hôpitaux,selon la Haute Autorité

de santé (HAS). Il y a 1 000 accidents médicaux, ouévénements indésirables graves, qui se passent chaquejour dans les hôpitaux, soit un accident médical parsemaine pour chaque service hospitalier de France.60 % de ces accidents concernent des complicationstelle une insuffisance rénale ou les effets secondairesd'un traitement.

Le chiffre

Et aussi

Cela pourrait être un épisode iné-dit du feuilleton « Les Experts »,ou un film américain de série B.

Encore aurait-il fallu que les scénaristesaient beaucoup d’imagination. Peut-êtremême leur récit aurait-il été considérépar les producteurs comme incroyable,pas crédible, irréaliste : le directeur géné-ral d’un des organismes économiques lesplus puissants du monde, qui s’apprêteà faire acte de candidature à une élection

présidentielle dans son pays, accusé detentative de viol et de séquestration sor-dide dans un hôtel new-yorkais, aban-donnant en toute hâte sa chambre,arrêté par la police américaine, débarquéde l’avion d’Air France à destination deParis, dix minutes avant son départ.En quelques instants, la vie de Domi-nique Strauss-Kahn a viré au cauche-mar. La bombe à fragmentation, carc’en est une, a atteint en une cascade

sinistre lui-même, sa famille, mais aussile Fonds monétaire international, au-quel il a donné pendant trois ans etdemi une influence nouvelle. Et, au-delà, la France, qui l’a choisi et imposéà l’échelon international, le Parti socia-liste français, dont il était le favori pourla prochaine élection présidentielle de2012, et peut-être même la classe poli-tique toute entière.

>Lire la suite p. 4

NUMÉRO 409—MERCREDI 18 MAI 2011 — 1,30 ¤

ÉditorialRobert Namias

Directeur de la publication : Bruno Pelletier Directeur : Robert Namias

BERTRANDGUAY

/AFP

FRAN

CKPREVEL/AFP

DSK : inimaginable

lhemicycle.com

L’inculpation et lemaintien en détention deDominiqueStrauss-Kahn bouleversent la donne politique en Franceet ternissent l’image de l’Hexagone à l’étranger.ParMichèleCotta

S’appuyant sur une salve de sondages qui lacréditent de plus de 20%des intentions de vote,Marine Le Pen occupe tous les terrains.

Ainsi, dimanche, malgré un air de circonstance, la présidentedu Front national donnait déjà le sentiment de vouloirsurfer sur l’inculpation de DSK. Plus que jamais, Marine LePen divise la droite et trouble la gauche. Les propos de Lau-rent Wauquiez l’ont confirmé crûment. Derrière son discours,il y a non seulement une condamnation implicite de l’aide auxchômeurs, qui serait contre-productive, mais également une cri-tique à peine voilée d’un assistanat qui favoriserait l’immigra-tion. Bref, des thématiques très chères à Marine Le Pen. Enattendant que d’autres voix issues de l’UMP ou d’ailleurs posentpar exemple la question de l’euro, de la suppression des frontièresau sein de la communauté européenne ou bien encore de lamondialisation. C’est en ce sens qu’on peut s’interroger sur uneéventuelle lepénisation des esprits qui n’épargne pas la gauche,ou du moins son extrême : l’impression de copier-coller entrecertains propos sonne étrangement. >Lire p. 2 et 3

La lepénisation des esprits,fantasmeou réalité ?

ChristianEstrosiP. 2

JackLangP. 3

PATRICKKOVARIK/A

FP

STÉPHAN

EDE

SAKU

TIN/A

FP

Lire • Focale : Jean-PierreChevènement, l’hommedemarbre>P. 8•Expertise : Sécheresse avec Luc Guyau>P. 11

40% !

La chuteFRED

DUFOUR

/AFP

Page 2: l'Hémicycle - #409

NUMÉRO 409, MERCREDI 18 MAI 2011 L’HÉMICYCLE 3

Parle-t-on tropdeMarineLePen?Je trouve oui, et parfois même àdes fins purement marchandes.Certaines télévisions, même pu-bliques, lui accordent une placedisproportionnée. Certes, le plu-ralisme est nécessaire, mais cer-tains sont trop naïfs ! On necombat pas une telle idéologie parl’orchestration du personnage quien est la figure. La seule manière,à mes yeux, de faire reculer un telphénomène, c’est d’abord del’analyser et de le contrer argu-ment par argument.

Jugez-vousqu’onassisteàunphénomènede lepénisationdesesprits?Je ne le crois pas. C’est peut-êtrele cas de certains dirigeants ac-tuels qui par calcul à court terme– qui se retournera contre euxd’ailleurs – croient bon de repren-dre à leur compte des thèmes duFront national. Mais, dans les pro-fondeurs du pays, je ne crois pasdu tout que cela soit le cas. LaFrance est un pays beaucoup plustolérant, plus ouvert au monde,plus généreux que ne le pensentcertains. Certes, il y a 5-7 % d’ex-trémistes, de xénophobes, de na-tionalistes, mais le reste de lapopulation française ne l’est pas,très loin de là. Si le Front nationalobtient aujourd’hui de bons ré-

sultats, c’est plus par rejet d’uncertain style politique, d’une pertede confiance face à des responsa-bles qui n’apportent pas lesbonnes solutions, qu’autre chose.

MarineLePena-t-elle toujours tort?Il ne faut jamais oublier que toutrepose au Front national sur uneconstruction idéologique xéno-phobe. Marine Le Pen dissimulecette construction derrière desmots que les formations républi-caines emploient. Prenez l’exem-

ple de la laïcité dont elle abeaucoup parlé. Personne n’estdupe. La laïcité telle qu’elle l’en-visage ne concerne qu’une reli-gion et pas les autres.

LediscourséconomiqueplusàgaucheduFNest-il dangereuxpour vous?Je ne crois pas du tout qu’il proposedes mesures de gauche. Ce sontjuste des mesures démagogiques.

C’est lemêmephénomènedepopulismequecelui queconnaîttoute l’Europe?En Hongrie, aux Pays-Bas, au Da-nemark, j’ai le sentiment qu’il y abeaucoup plus de citoyens xéno-phobes qu’en France.

Laprésidentielle ne risque-t-ellepasde tourner à la fractureentreleséliteset les classespopulaires?Une telle fracture ne se produirapas si les deux principaux candi-dats sont capables d’incarner un

programme concret, sérieux, so-lide et d’offrir ainsi aux citoyensune vraie espérance.

Quelledoit être la cible électoraleprioritaireduPS : les classespopulaires séduitesparNicolasSarkozyen2007puisparMarineLePenou les classesmoyennes?Je ne raisonne pas ainsi. Un can-didat ou un parti devrait imagi-ner ou bâtir un programme sans

tenir compte des sondages oudes analyses. La convictiond’abord, le calcul politique en-suite ! Les citoyens sont trèsintelligents. Si telle ou telle me-sure n’est inscrite sur un pro-gramme que pour les flatter, ilsle détectent tout de suite. Ils ontd’abord envie que leur pays soitdirigé par un homme d’État quipuisse mener un vaste mouve-ment de transformation. Ils veu-lent être portés par un granddessein qui les transcende et les

conduira à donner le meilleurd’eux-mêmes. Regardez l’élec-tion présidentielle de 1981.Certes, il y avait les 110 propo-sitions, mais il y avait surtoutFrançois Mitterrand et saconception de la vie publique,l’élan et le souffle qu’il appor-tait, la vision qu’il donnait.

L’immigrationest-elle encoreun tabouauParti socialiste?

Ce n’est pas du tout tabou. Maisnous ne l’abordons pas en destermes électoralistes. Je rêve quele nouveau président de la Francepuisse proposer à l’ensemble desformations politiques la mise aupoint d’une charte nationale surl’immigration. Dans un pays mo-derne, il n’est plus supportableque les étrangers et les immigréssoient un sujet d’affrontementélectoral. Il y a d’ailleurs selonmoi toute une série de sujets surlesquels il devrait y avoir ainsi un

accord national. La politiqueétrangère par exemple. De cepoint de vue, il est regrettablequ’il n’y ait pas plus de débat auparlement sur ces questions. Oudes débats si rapides qu’ils ne s’ac-compagnent pas d’une vraie ré-flexion de fond.

Propos recueillispar Ludovic VigogneChef du service politique

de Paris Match

Pour Jack Lang, il n’y a pas de lepénisation des esprits,mais des dirigeants politiques quicherchent à exploiter les peurs. Pour le député PSduPas-de-Calais, c’est le rejet d’un certainstyle politique qui nourrit le Front national.

Agora

JACK LANG

«NE JAMAISOUBLIERQU’AUFRONTNATIONALTOUTREPOSESURUNECONSTRUCTIONIDÉOLOGIQUEXÉNOPHOBE.

MARINELEPENNEFAITQUEDISSIMULERCETTECONSTRUCTIONDERRIÈREDESMOTSRÉPUBLICAINS»

«LaFrance est un pays beaucoupplus tolérant,plus ouvert aumonde, plus généreux que ne

le pensent certains»

STÉP

HAN

EDE

SAKU

TIN/A

FP

2 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 409, MERCREDI 18 MAI 2011

Agora

L’ombredeMarineLePenn’influe-t-ellepas tropsur ledébatpolitiqueactuel?Si, bien sûr. Mais certains médiasnous obligent aussi à nous posi-tionner en permanence par rap-port à elle ! Cela devrait êtrel’inverse. C’est elle qui devraitse positionner par rapport auxréformes du gouvernement enplace, dire quelles sont ses solu-tions alors qu’elle est dans ladénonciation et l’invective enpermanence. Le FN n’a pas deprogramme réaliste. Son discours,c’est « y’a qu’à », « faut qu’on ».C’est facile et irréaliste. Ce n’estque de l’illusion. Que fera le FNpour faire face à l’endettementrecord de la France, qui sera laquestion numéro 1 à laquelledevra répondre la majorité quisortira des urnes en 2012 ? De-mandez-lui.

Ens’emparantdethèmesplutôtmisenavantpar leFN,commel’immigration, l’islam...necourt-onpasaprès leFrontnationalplutôtqu’autrechose?Moi jen’appartiens pas à la catégoriede ceux qui veulent faire duMarineLe Pen plus ou du Le Pen moins. Ilfaut êtrenous-mêmes et d’abordpar-ler de nos propositions, de nos ré-formes, denos actions.Nous devons

aussi nous concentrer sur l’action etles problèmes des Français plutôtque sur les grands discours. Nous,gouvernants, nous devons obtenir

des résultats concrets pour les Fran-çais. Il faut être dans l’action plusque dans le commentaire commeClaude Guéant le fait par exemple.C’est un ministre de l’Intérieur quidonne une vraie dimension à safonction. Les Français considèrentla sécurité et l’immigration commedes sujets prioritaires. Ils peuventconstater que dans ces domaines leschoses avancent.

LeFNest-il toujoursunpartid’extrêmedroite?Ne nous trompons pas. C’est tou-jours un parti d’extrême. J’ai ob-

servé les alliances que le Front na-tional de Marine Le Pen a passélors des dernières élections canto-nales. Il a soutenu des candidatsidentitaires qui servent de la soupeau porc et qui ont été condamnéspar la justice. C’est effrayant !

CettepousséeduFNest-elledifférentedecellequeconnaît lamajeurepartiedespayseuropéensavec lamontéedupopulisme?Depuis 1984, on sait bien qu’enFrance, l’extrême droite connaît deshauts et des bas en fonction des in-terrogations et des doutes des Fran-çais. C’est une façon d’exprimerleur exaspération. L’UMP doit avoirpour priorité de répondre aux in-terrogations et insatisfactions de cesélecteurs qui sont aussi les nôtres,mais ont rompu avec nous. Le FNn’est pour eux qu’un exutoire.

Estimez-vousque lesFrançaisse replient sur eux-mêmes?Je ne dirai jamais cela. Je fais tou-jours confiance à leur bon sens.C’est à nous, les responsables poli-tiques, de leur proposer des solu-tions et des perspectives. C’est ànous de répondre à leurs interroga-tions sur le pouvoir d’achat, à leurcolère face aux écarts qui ne cessentde se creuser entre les plus hauts etles plus bas salaires, à leur désir devoir le mérite être récompensé. Moije fais partie de la France des bâtis-seurs plutôt que de la France desquerelleurs. Ainsi, je travaille en ce

moment sur le phénomène de labiflation, c’est-à-dire l’addition del’inflation et de la déflation. Les prixdes produits comme les lecteursdvd, les écrans plasma, les iPods necessent de faire l’objet de promotionet de baisser. En revanche, les pro-duits de première nécessité, ceuxdont une famille ne peut pas se pas-ser, ne cessent d’augmenter. Il estimpératif de lutter contre la spécu-lation qui touche ces derniers etd’imposer davantage d’encadre-ment des prix de la productionjusqu’à la distribution.

LaquestionduRSAetdel’assistanatadéclenchéunetempêtedans lamajorité.N’est-ilpas toujoursdangereuxdedésignerdesboucsémissaires?Je ne trouve pas qu’on dresse lesFrançais les uns contre les autresavec ce débat. S’il y a beaucoup dechômeurs qui souffrent notam-ment depuis la crise, il y a aussimalheureusement une minoritéde fraudeurs et de gens qui profi-tent de notre système social parceque c’est leur intérêt. Dans cettepolémique, ce qui était préjudi-ciable, c’était le calendrier et laforme. Mais ce débat est utile et,en 2012, la question de l’amélio-ration du RSA et de la fin de l’as-sistanat se posera.

Propos recueillispar Ludovic VigogneChef du service politique

de Paris Match

«MOI JE N’APPARTIENS PASÀ LACATÉGORIE DE CEUXQUI

VEULENT FAIRE DUMARINE LE PENPLUSOUDU LE PENMOINS»

CHRISTIAN ESTROSI

Christian Estrosi considère comme Laurent Wauquiez que le débat sur le RSA ne doit pas êtretabou. Le député-maire UMP de Nice souhaite que ce débat s’inscrive dans la campagne de 2012.

«L’UMPdoit répondre aux insatisfactionsdes électeurs qui ont rompuavec nous.

Le Front national n’est pour eux qu’un exutoire»

PATR

ICK

KOVA

RIK

/AFP

� TF1 a eu beau se féliciter desrésultats d’audience de sonémission politique, personnen’a été dupe, pas plus à l’Élyséequ’à Matignon : 23,6 % de partd’audience, jamais un Premierministre n’avait fait aussi peusur la première chaîne. Pourtanttout avait été fait pour avoir lesmeilleurs résultats possibles :émission à 20 h 20, enchaînéedirectement au journal, sansécran publicitaire entre les deux

et d’une durée à peine supérieureà celle du 20 heures. En moyenne,ce nouveau rendez-vous politiquea été suivi par 6 100 000 télé-spectateurs, le chiffre habitueldu journal, très à la baisse depuisquelques semaines. FrançoisFillon n’aura pas fait de miracle etdu coup, il subit le même sort quel’information de la Une. À moinsque ce ne soit le Premier ministrelui-même qui n’attire pas plus !…Dans tous les cas c’est un

médiocre début pour cettenouvelle émission politique quià bien y regarder n’a pas grand-chose de nouveau, pas mêmele décor qui ressemble à celuide « Face aux Français »,le rendez-vous imaginépar TFI pour Nicolas Sarkozy.Il faut s’appeler la Une pour oserqualifier d’émission politiquecette banale interview qui auraitdû avoir sa place dans le journalet rien de plus. L.B.

23,6 % sur TF1 : une très mauvaise audience pour le Premier ministre

Page 3: l'Hémicycle - #409

C’est devenu une habitudesous Nicolas Sarkozy : il yaura de nouveau une ses-

sion extraordinaire du Parlementcet été. Députés et sénateurs siége-ront jusqu’au 13 juillet. Pas dequoi réjouir les élus, mais PatrickOllier, lui, est soulagé : le ministrechargé des Relations avec le parle-ment ne quitte pas des yeux son« carnet de commande » : il luireste 16 projets de loi à faire passeravant la coupure estivale ! Règled’or, allègement de l’ISF et suppres-sion du bouclier fiscal, prime dansles entreprises dégageant des divi-dendes, jurys populaires, bio-éthique, soins psychiatriques,immigration, conseillers territo-riaux, âge des fonctionnaires,conditions d’importation et d’ex-portation des matériels de guerre,lois organiques sur la Polynésie, laGuyane, la Martinique et la Nou-velle-Calédonie... Les parlemen-taires ne partiront en vacancesqu’après avoir débattu et voté, leplus souvent en urgence, donc àraison d’une seule lecture parchambre, l’ensemble de ces textes.« Le temps du gouvernement,jusqu’au 13 juillet, n’est plus quede 160 heures, calcule Ollier. Et de375 heures jusqu’au 22 février2012 », date de la fin de la session.Il faut donc faire vite. Dans un telcontexte, la proposition de loi surle RSA suggérée par Laurent Wau-quiez et ses amis députés de laDroite sociale, qui a fait la Une del’actualité la semaine dernière etprovoqué de forts remous dans lamajorité, n’a guère de chanced’être examinée avant... « décem-bre prochain », selon ChristianJacob, président du groupe UMP à

l’Assemblée. Reste une inconnueconcernant le calendrier parle-mentaire : on ignore encore si leprésident de la République convo-quera un congrès à Versailles pourfaire inscrire la règle d’or dans laConstitution. Le Nouveau Centrele réclame, mais l’opération est ris-

quée pour le chef de l’État, car l’op-position est unanimement décidéeà voter contre. Lamajorité des troiscinquièmes est donc loin d’être ac-quise, et l’échec quasi assuré pourle président. « Patrick, débrouille-toi pour que ce soit voté dansles deux assemblées avant l’été, lereste, je l’assume », a toutefoislancé Sarkozy à son ministre.Autre chose, côté gauche, si diffé-rents colloques ont été organisésau Sénat pour les 30 ans du 10mai

1981, l’anniversaire serait passétotalement inaperçu au palaisBourbon si certains nostalgiques,comme Jean Mallot (Allier),n’avaient arboré au revers de leurveste un pin’s à l’effigie de FrançoisMitterrand. « Le plus bel hommagequ’on peut lui rendre, c’est de

l’emporter l’année prochaine »,soulignait Alain Vidalies (Landes).En attendant de l’« emporter », lagauche, sous la pression des écolo-gistes, a voté contre la propositionde loi « gaz de gauchiste » (commecertains petits plaisantins du PSsurnomment le texte sur les gaz deschiste), après avoir approuvé laPPL en commission. Signe que laprésidentielle approche...Côté majorité, à une journalistecanadienne qui comparait la tech-

nique de la « fracturation hydrau-lique » à celle du kärcher, ChristianJacob a gentiment expliqué que « lemot kärcher, on ne l’utilise plus àl’UMP »... À droite, les conversa-tions dans les couloirs ont principa-lement tourné autour de l’ambitionprésidentielle de Jean-Louis Borloo.« Jean-Louis a beaucoup changédepuis l’épisode de Matignon,confie François Sauvadet, présidentdu groupe Nouveau Centre. Iln’imaginait pas une telle violencede la part de ses propres amis. Il y al’homme d’avant, et l’hommed’après » le 14 novembre 2010, datedu dernier remaniement, et dumaintien de François Fillon auposte de Premier ministre.Les vacances sont encore loindonc, mais les députés sontdéjà dissipés. « Quand allez-vouscesser de favoriser les riches ? », ainterrogé, sans crainte de la carica-ture, Marcel Rogement (Ille-et-Vilaine), dans une question à Fran-çois Baroin. « Jamais ! », a rétorquépince-sans-rire l’UMP Jean-MarcRoubaud (Gard), membre de laDroite populaire, faisant pouffer derire ses collègues. Quant à JérômeBignon (Somme), il a fait se gondo-ler l’ensemble du gouvernementen posant avec un grand sérieuxune question à Nathalie Kosciusko-Morizet sur les sangliers. À laquellela ministre a répondu avec lemême sérieux. Depuis, lorsque leprésident de l’Assemblée annonce« Mme le ministre de l’Environne-ment, du Développement durable,des Transports et du Logement »,un petit groupe de députés PS en-chaîne... « et des Sangliers ! » Preuveque l’esprit de Patrick Roy flottetoujours dans l’hémicycle.

4 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 409, MERCREDI 18 MAI 2011

Plan large

Cris et chuchotements à l’AssembléeUne quinzaine de textes seront discutés d’ici l’été. Avec une sessionextraordinaire à la clé. Le gouvernementmet les bouchées doublespour faire voter ses dernières réformes.Par Nathalie Segaunes

Qu’il s’agisse, comme l’affirmentses amis, d’une provocation, d’unpiège qui lui a été tendu pour lediscréditer, – lui ou l’institutionqu’il présidait –, dans un pays où,on le sait, on ne plaisante pas avecle sexe, ou bien véritablementd’un comportement personneldéviant, au fond, peu importe :Dominique Strauss-Kahn avait étémalmené la semaine dernière enFrance, attaqué sur son train devie, mis en cause jusque sur le prixsupposé de ses costumes. L’inter-vention de la justice américaine,la procédure du plaider non-cou-pable que DSK a choisi pour prou-ver son innocence et sauver sonhonneur, ne lui laissera sans doutepas le temps de contre-attaquer.Il ne le peut plus au FMI, qui nelui a accordé aucun soutien etqui a immédiatement nommécomme directeur par intérim sonnuméro 2. DSK n’a pas rencon-tré Angela Merkel, comme il de-vait le faire lundi, il ne sera pasau G8 à Deauville pas plus qu’auG20 à Cannes. La nature ayanthorreur du vide, il ne pourra êtreabsent trop longtemps sans êtredéfinitivement remplacé.Laprocédure judiciaire, sa longueur,son déroulement, l’empêcherontsans doute également, si vite queles choses soient menées, de faireacte de candidature aux primairessocialistes en juillet prochain. DSKfaisait attendre sa décisionofficiellepour rester le plus longtemps possi-ble aux commandes du FMI, mais,on le sait, depuis plusieursmois, sesamis et lui étaient tout entiers ten-dus dans la perspective de la prési-dentielle. C’est désormais, pourlui, pour eux, un rêve évanoui.Plus grave : on voit bien qui, enFrance, peut faire ses choux grasdu scandale qui touche celui quiétait encore il y a quelques jours lefavori des Français dans la courseprésidentielle : Marine Le Pen, quin’a pas attendu la fin de la mati-née de dimanche pour rayer DSKde la liste des candidats potentiels,et pour reprendre, sous une autreforme, le slogan « Tous pourris »dont elle badigeonne l’ensemblede la classe politique française.Un énorme gâchis, le massacred’un candidat, une provocationpeut-être : on souhaite que la justiceaméricaine aille vite, pour laisserà DSK une chance de se disculper.Qu’il soit blanchi ou confondu,le dimanche 15 mai aura marqué,pour lui, sinon la fin du parcours,dumoins celle du combatpolitiqueauquel il se préparait. La chuten’estpas loin d’êtremortelle.

Suite de la page 1

L’opinionde Michèle Cotta

DR

C’est entendu, les réactions sontmajoritairementnégatives. Les Français continuent de penserque l’accident, c’est pour les autres. Pourtant lasonnerie du téléphone en pleine nuit ou la venuedes gendarmes au petit matin, ça existe tous lesjours et pas seulement au cinéma. Depuis 1973et les premièresmesures décidées par legouvernementMessmer, les résultats enmatièrede sécurité routière ont été, il est vrai,spectaculairesmais très irréguliers. Il a fallu prèsde trente ans pour diviser par deux le nombre detués sur la route, passé de 17 000 en 1973 à 8 000en 2002. Et il aura fallu à peine cinq ans pourdiviser ce chiffre à nouveau par deux. À cela uneraison, entre 2002 et 2007, Jacques Chirac et son

ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy ont affichéun volontarisme politique qui ne s’est jamaisdémenti. En s’appuyant sur un déléguéinterministériel très actif et un Conseil nationalde la sécurité routière très présent, à l’aide d’unecommunication quasi permanente, ils ont eule courage de prendre desmesures souventimpopulaires,mais formidablement efficaces.À l’inverse, depuis 2007, quels que soient lespétitions de principe et les propos d’estrade,cette volonté politique est au pointmort etle courage a disparu. La démagogie électorale,le conservatisme parlementaire, à l’exception dela témérité de quelques députés ont fait le reste.Résultat : le nombre des victimes de la route

s’accroît à nouveau pour la première fois depuisdix ans. Et lesmesures annoncées prétendumentdrastiques ne sont que cautères sur jambe de bois.On ne fait que durcir des législations déjàexistantes alors que les solutions sont ailleurs.Redresser la situation, c’est notamment interdiretoute possibilité de téléphoner au volant, latolérance zéro pour tous enmatière d’alcool,la réduction de la vitesse en ville. Tous ceuxqui s’occupent de sécurité routière aujourd’huile saventmais ils n’ont plus droit à la parole.Trop dangereux à un an des élections et pourtantbeaucoupmoins que ces demi-mesures quin’empêcheront pas le téléphone de sonner encoreet toujours au creux de la nuit. R.N.

Mortel électoralisme

Bernard Accoyer au perchoir. PHOTO JACQUESDEMARTHON / AFP

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NUMÉRO 409, MERCREDI 18 MAI 2011 L’HÉMICYCLE7

AUVERGNEL’UNIVERSITÉ ACCÈDEÀ LA PROPRIÉTÉ� Conséquence directe de la loisur l’autonomie des universités votée en2007, l’université d’Auvergne est devenuepropriétaire de sesmurs.Une première en France. Pour lemoment,neuf universités sur quatre-vingt-cinq ontréclamé la dévolution. Outre Clermont-Ferrand, Toulouse I et Poitiers devraientsuivre d’ici l’été.

POITOU-CHARENTESDES JARDINS POTAGERSCOLLECTIFS� Les Picto-Charentais ont lamainverte. Plébiscités par les habitants,les potagers collectifs présententde nombreux avantages : économiespour les familles, consommationde produits frais et sains, lien social…La région soutiendra ainsi la création denouvelles parcelles par les associationsou les collectivités locales, en privilégiantles dimensions environnementales,sociales et d’accessibilité aux personnesàmobilité réduite.

MARSEILLEPOLICE D’AGGLOMÉRATION� Confrontée à une augmentationsans précédent des braquages de sescommerces de proximité et des volsavec violence,Marseille annonce lamiseen place à la rentrée d’une policed’agglomération pour lutter contre lesagressions. Le dispositif, inauguré à Parisen 2009 et testé à Lille et Lyon, devraits’élargir également àBordeaux.

LOIRE-ATLANTIQUENANTES INVENTE SAMÉTROPOLE DE 2030� Les 24maires de lamétropolenantaise lancent un nouveau projet deterritoire pour 2030. Imaginer le futur,tel est le pari de «MaVi(ll)e Demain »,unedémarcheprospective et participativeà l’échelle du territoire local. Pour ses élus,« il s’agit de construire ensembleune vision collective de ce que noussouhaitons à long terme, de définirun cap et les chemins pour y parvenir dèsaujourd’hui ». Et d’élaborer unmodèlede développement né des réflexionsdes habitants, invités à participerà la définition de la « métropolesouhaitable » de demain.

PARISUN 1ER CENTRE DE TRIINTRA-MUROSParis a inauguré son premier centre de trides déchets dans le 15e arrondissement.Pour lemaire de la capitale BertrandDelanoë, il s’agit d'une « rupture quisymbolise la solidaritémétropolitaine.Paris doit assumer ses déchets et cesserde déplacer les structures de tri àl'extérieur de sesmurs ». Capablede traiter 15 000 tonnes de déchetsménagers par an (soit ceux de 350000habitants), le centre est labellisé HQE.Une première pour un bâtiment de cetype. Trois autres centres intra-murosviendront compléter le dispositifà partir de 2013.

En bref

Vousavezdéclaré récemment«notrepaysest ruiné» :qu’entendez-vouspar là?Tous les économistes et financierss’accordent sur le fait que la dettefrançaise est immense. Nous pou-vons être le prochain pays endifficulté après la Grèce et le Por-tugal. Il y a besoin de redresserl’économie du pays.

Votredernier livre s’intitule«Et si laFrances’éveillait…» :est-ceàdireque laFrances’est endormie... ?Je pense que la France et les Fran-çais doivent être plus attentifs aumonde qui les entoure. La Francevit parfois de manière trop hexa-gonale, et recroquevillée sur elle-même. Le risque est de se retrouverhors du mouvement du monde,notamment sur le plan technolo-gique, face aux puissances émer-gentes que sont la Chine, l’Inde etle Brésil. L’État-nation n’est pluscapable de tout prendre en chargecomme il y a 30 ou 40 ans. L’éco-nomie s’est internationalisée, alorsmême que la politique fait sem-blant de montrer qu’elle est enmesure de tout faire.

Précisément, les régionset lesmunicipalitésont-ellesun rôleàjouerpour réconcilier les citoyensavec lapolitique?

L’État-nation perd de son pouvoir,vers le haut au profit des centresdécisionnels européens, maisaussi vers le bas. Les régions, lesterritoires, les grandes aggloméra-tions ont un rôle majeur. Lorsquedes groupes s’implantent en Eu-rope, ils choisissent d’abord uneville avec laquelle ils auront desaffinités en termes de recherche,de formation ou encore de pôlede compétitivité. Le gouverne-ment devrait être plus attentif àce qui se passe dans les territoires,et ne plus travailler dans une vi-sion jacobine.

Croyez-vousen lavictoirede lagaucheen2012?Je pense que la gauche a debonnes chances de gagner. Lebilan de Nicolas Sarkozy est fina-lement décrié par beaucoup deFrançais. Mais pour cela, le PS nedoit pas être seulement dans l’ali-gnement de promesses. Il doitporter des projets pour sortir lepays des difficultés dans les-quelles il s’enfonce depuis dixans. Aujourd’hui, nous avons undouble devoir. Celui de gagner etde ne pas décevoir, en démon-trant aux électeurs qu’ils ont faitle bon choix, que le pays est surla bonne voie.

Propos recueillispar Ludovic Bellanger

Pour lemaire de la capitale des Gaules, le Parti socialiste doit être porteurde projets et ne pas décevoir. Gérard Collomb considère que la Francese recroqueville trop sur elle-même. Interview.

Collomb : laFrancedoit se réveiller

Commune pilote pour le dé-veloppement du très hautdébit (THD) enmilieu rural,

Mareuil-sur-Lay va connecter 715foyers à la fibre optique d’ici l’étéprochain. « Depuis plusieurs années,nous avons multiplié les initiatives etles actions afin que l’ensemble desfoyers vendéens bénéficient d’un accèsau haut débit. Maintenant nous pas-sons à une nouvelle étape », expliqueBruno Retailleau, président duConseil général de la Vendée. « Latechnologie progresse tous les jours. Ilfaut sans cesse se renouveler si on neveut pas provoquer une fracturenumérique. »Département leader dans le désen-clavement numérique, la Vendées’est positionnée dès 2004 sur lehaut débit. « Nous avons été l’un

des premiers départements à offrirle haut débit sur presque 100 % duterritoire. Notre objectif est désormaisde donner la possibilité à tous d’ac-céder au très haut débit. »

Une première en France« C’est une grande première enFrance, peut-être même en Europe »,reconnaît Bruno Janet, directeurdes relations avec les collectivitéslocales de France Télécom. « Pourla première fois dans une petite com-

mune, la fibre optique va être ame-née jusqu’au domicile des particu-liers. » Un « cheveu de lumière » quioffrira un vrai bouleversement entermes de rapidité de connexions

et de débit. « Ce dernier sera multi-plié par 50. Il passera de 2 à 100mégabits », précise-t-il. Un débitréservé aujourd’hui aux trèsgrandes agglomérations.« Avec cette expérimentation, ils’agit de tester en un temps record

(6 mois) et en dimension réelle ledéploiement d’un réseau en zonerurale » explique Benoît Loutrel,directeur du programme Écono-mie Numérique au Commissariat

général à l’investissement.« La bataille de la compétitivité nese gagnera pas sans le numérique »,souligne Bruno Retailleau. « Inves-tir dans le numérique, c’est investirdans la croissance et dans les em-plois. » �

Le Conseil général deVendée a lancé une expérimentation inéditede déploiement de la fibre optique enmilieu rural.

ÀMareuil-sur-Lay, le trèshautdébit se ruralise

«LA BATAILLE DE LA COMPÉTITIVITÉ NESE GAGNERA PAS SANS LE NUMÉRIQUE »

Bruno RetailleauPrésident du Conseil général de Vendée

THIERRYVALLIER

Inauguré à Mulhouse l’andernier, le premier tram-trainde France fait depuis des

émules. En attendant Nantes,l’Ouest de Lyon réhabilite unmode de transport ferroviaire

hybride, dont la particularité estde relier centre-ville et zone péri-urbaine.Particulièrement impliquée dansles modes de déplacement alter-natifs, la région Rhône-Alpes sou-tient par ailleurs la réalisation de

plans de déplacements inter-entreprises. Leaders en la matière,les collectivités locales de montrerl’exemple. Saint-Étienne, Deux-Alpes, Chambéry, Échirolles etLyon disposent déjà d’un PDE

pour leurs employés. Et les Rhô-nalpins de changer leurs habi-tudes. VéliVert à Saint-Étienne,covoiturage sur le Grand Lyon, laRégion réinvente la mobilitéjusqu’à un projet d’autopartage àl’échelle régionale.

En Isère, des télécabines urbainesNouvelle piste de réflexion, les télé-cabines présagent les transportsde demain. Utilisée à New York,la technologie par câble présentel’avantage d’être non polluante.

Elle permet aussi de franchir unobstacle, comme entre Brignoudet Crolles, au nord-est de Greno-ble, séparés par l’Isère, la voie fer-rée et l’autoroute. « Tout a étéimaginé et étudié : piste cyclable,passerelle… », assure Francis Gim-

bert, vice-président de la Com-munauté de communes du Grési-vaudan et chargé des transports.« Mais tout est trop coûteux, sansêtre pleinement efficace. » Les ca-bines actuellement à l’étude se-

raient capables d’accueillir lesvélos, les poussettes, les fauteuilsroulants…

Des navettes fluvialesà Lyon en 2012Autre innovation en matière de

mobilité, la navette fluviale partà la conquête de Lyon. Après LaRochelle et Paris, se déplacer enbateau y sera possible dès le prin-temps 2012. Les concepteurs dufutur pôle de loisirs et de com-merces de Confluence – une vi-trine architecturale HQE quiabritera le nouveau siège duconseil régional – ont en effetimaginé d’y associer un mode detransport sur l’eau. « Ce nouveauquartier étant exemplaire en ma-tière de développement durable,nous souhaitions offrir une expé-rience alternative aux transports encommun et à la voiture », expliqueRomain Molho-Lavignie, res-ponsable du programme au seind’Unibail. Le site accueillera éga-lement à l’avenir une flotte devéhicules électriques. « Il fautdonner envie de redécouvrir le cœurde ville grâce à des moyens detransport modernes, rapides etattractifs », conclue BernadetteLaclais, en charge des transportsà la région Rhône-Alpes.

Ludovic Bellanger

6 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 409, MERCREDI 18 MAI 2011

Initiatives

La révolutionvertedes transportsrhônalpinspréfigure-t-elle la villededemain?La nécessité de privilégier ledéveloppement des transportscollectifs constitue aujourd’huiune évidence. Cela pour protégernotre environnement, mais aussipour préserver le pouvoir d’achatde nos concitoyens, surtout dansune période de renchérissementdu prix de l’essence. En complé-ment des TER périurbains ouintercités, nous avons donc l’obli-gation d’imaginer des modes de

transport innovants afin d’ac-compagner une nouvelle mobi-lité urbaine résolument alternativeà la voiture individuelle.

PortéeparConfluence, laRégionest-elle sur les rangspourbâtir lefutur écoquartier deShanghai?En présentant un pavillon éco-construit, la Région a été un par-tenaire engagé de l’Expositionuniverselle de Shanghai 2010,pour promouvoir un autre mo-dèle de développement. Nouscélébrons cette année vingt-cinq

années de coopération avec lamunicipalité de Shanghai, etnous sommes prêts à accompa-gner nos partenaires dans lesprojets de développement d’éco-quartiers. Les discussions sontd’ailleurs engagées.

Vousavezdéclaré :«Éducation,santé, emploi, justice... lesFrançaisdéplorentunedégradationdesservicespublics».Est-ceàdireque les régionsdoiventaujourd’huise substituer à l’État?La dégradation des services pu-blics est une réalité que nousconstatons au quotidien dans lesterritoires. La région est ainsiobligée de se substituer à l’État età ses carences pour venir en aideaux habitants et éviter que ne sedéveloppe une société à deux vi-tesses. Je pense notamment auxMaisons de santé en zones ru-rales. Mais je veux dire avec forceque cela n’est pas le rôle de la ré-gion, et qu’elle n’en a pas nonplus les moyens financiers !

« La dégradationdes services publicsest une réalité »

3 questions à

Rhône-Alpes : çabougepourmieuxcirculerPilote enmatière d’environnement, la régionRhône-Alpes inaugurera son tram-trainà la rentrée. La Région, qui dévoile son nouveau visage à Lyon, planche déjà sur des projetsde télécabines urbaines et de navettes fluviales.

«LA CANDIDATURE ANNECY 2018 NOUSA CONDUIT À ÉTUDIER UN CONCEPT

POUR ACHEMINER 100 % DES SPECTATEURSEN TRANSPORTS COLLECTIFS »Bernadette LaclaisVice-présidente de la région Rhône-Alpes,chargée des transports

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JEAN-JACKQUEYRANNEPRÉSIDENTDUCONSEILRÉGIONALRHÔNE-ALPES

PHOTOBERTRANDGUAY/AFP

Page 5: l'Hémicycle - #409

Plus de 138 millions de personnestravaillent hors de leur pays de naissance.Bienvenuedans un monde d’opportunités.

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isLa présidentielle est leseul moment où l’onpeut peser dans la viepolitique française… »Cet automne, promis,

il abattra ses cartes. Du côté duParti socialiste, en coulisse, ons’agite. Le traumatisme de 2002reste vivace. L’opération faire flé-chir le « Che » est lancée. Pour larue de Solférino le temps presse.Lui, ne bronche pas. Tout cela lelaisse de marbre, sourire énigma-tique aux lèvres.« La France est-elle finie ? » C’estle titre de son livre. Un réquisi-toire sur la conversion des socia-listes au libéralisme. Le déclin dutissu industriel français, l’euro quiétouffe, l’austérité à perpétuité, etune Europe soluble dans le néo-libéralisme. Le constat est impla-cable. Le tout étayé par une érudi-tion qui est aujourd’hui unedenrée rare en politique.10 Mai 2011, dans les salonsdu palais du Luxembourg. Il jetteun œil à la Une duMonde. Rajusteses lunettes. « La tontonmaniaest partout », murmure-t-il sourirenarquois. Un groupe de visiteurs

se perd dans la contemplation desplafonds de la salle des confé-rences. « Ici, il y a plus de visiteursque de sénateurs ! »Trente ans après, jour pour jour. Ils’amuse de « l’immense masse descollaborateurs de François Mitter-rand… Le 10 mai 1981, j’ai passéla soirée sur les plateaux télé.Cette victoire, c’était le couronne-

ment d’un long effort. Une satis-faction. » Il s’arrête, réfléchit. « Lagauche n’a pas été au bout de sonprojet. » Un soupçon de lassitudedans la voix. « Mitterrand ? Unepersonnalité brillante, attachante,profonde. Un homme qui dépas-sait de quelques coudées la staturede la plupart de nos hommes po-litiques. »Sur l’actuel locataire de l’Élysée,ne comptez pas sur lui pour hur-ler avec la meute. « Je n’ai jamais

attaqué Nicolas Sarkozy sur sonstyle, ni sur sa personne… Je m’enaccommode. Je critique sur lefond ! » Fidèle à son habitude,Chevènement marche seul. Auxavant-postes même.« La crise de la démocratie est évi-dente. Nous sommes dessaisis de lasouveraineté populaire. La Franceest à la merci des marchés finan-

ciers. À droite comme à gauche,on ne veut pas déplaire auxbanques… La dictature de l’ac-tionnariat refleurit de plus belle.L’orage est devant nous… Despyramides de dettes. Des déséqui-libres abyssaux. L’économie mon-diale est à la merci du moindrechoc… Nous allons vers des an-nées difficiles. Seule une fermevolonté républicaine peut redres-ser la barre. »République en avant toute ! Un

credo ? Peut-être. En tout cas uneespérance. République ! Dans labouche du « Che » le mot sembleclaquer au vent de l’Histoire. L’an-cien ministre de François Mitter-rand veut pourfendre Maastricht.Mettre au pas les marchés finan-ciers, changer la nature des rap-ports franco-allemands, en unmot modifier les règles du jeu eu-

ropéen. Notre souveraineté est àce prix. Il parle avec mesure, cal-mement, c’est sa façon d’être pas-sionné. Les esprits chagrinsl’accusent de confondre vision etnostalgie. Il n’en a cure. L’histoirelui a déjà donné raison. Il a laforce tranquille, le pas assuré deceux qui savent où ils vont. En-vers et contre tout, ou tous. Séré-nité, distance et sang-froid, pourlui, des maîtres mots. En un demi-siècle de politique, Jean-Pierre

Chevènement se force toujours àporter un regard généreux surautrui. Il cite Platon. « Nul n’estméchant volontairement. » Il s’ar-rête. Réfléchit un long momentavant d’avouer : « je lutte tous lesjours pour me convaincre de cetteposition. C’est souvent très diffi-cile. »

Jean-FrançoisCoulomb des Arts

Focale

JEAN-PIERRECHEVÈNEMENTSÉNATEURMDCDUTERRITOIREDEBELFORT

« Je serai candidat pour faire bouger les lignes. » Tiens, revoilà Chevènement.Tous les cinq ans. Un atoutmaître dans son jeu. Sa (future ?) candidature.

L’homme de marbre

3 dates

197113 juin : congrèsde refondation du

Parti socialiste. L’année suivante, leprogramme socialiste « Changer la Vie »est approuvé et le programme communde la gauche signé.

198110mai : élection deFrançoisMitterrand

à la présidence de la République.Je suis nomméministre d’État chargéde la Recherche et de la Technologie.

19925mai : je vote contrele traité deMaastricht ;

jequitterai leParti socialisteenmars 1993.

PHOTO JEFFPACHOUD/AFP

8 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 409, MERCREDI 18 MAI 2011

«NOUS ALLONS VERS DES ANNÉES DIFFICILES.SEULE UNE FERME VOLONTÉ RÉPUBLICAINE

PEUT REDRESSER LA BARRE»

«

Page 6: l'Hémicycle - #409

Ce printemps est absolumentexceptionnel ! En plus dela sécheresse, la chaleur

évapore le peu d’eau sur le sol.

C’est très préoccupant. » FrédéricNathan, prévisionniste à Météo-France, n’est pas non plus opti-miste pour les mois qui viennent :« Selon nos prévisions saisonnières,il devrait faire chaud jusqu’à finjuillet, mais attention, chaleurn’empêche pas précipitations ! »Pour Michel Petit*, membre duGIEC (Groupe international desexperts sur l’évolution du climat),« toute la difficulté est de savoirsi c’est juste une situation excep-tionnelle ou le signe d’unetendance lourde. Dans nos modé-lisations, la sécheresse devrait da-vantage frapper le Sud, ce qui n’estpas le cas cette année. On sait enrevanche qu’il va faire plus chaud.Il serait donc prudent d’adapterl’agriculture et notamment la syl-viculture avec des essences capa-bles de résister sur le long terme àla chaleur et au stress hydrique. »À l’INRA (Institut national de larecherche agronomique), on estencore plus catégorique : « Ceprintemps préfigure les années àvenir » affirme Nadine Brisson,directeur de recherche au labora-toire AgroClim d’Avignon. « Noustravaillons clairement sur un scé-nario avec plus de chaleur etmoins d’eau. Cette année, ce quifrappe, c’est la précocité de la sé-cheresse. En 1976, elle avait bru-talement commencé en mai-juin.Cette année elle est installée de-puis mars ! La situation est catas-trophique. Pour les céréales, lesrendements seront inférieurs auxminimums. Pour le fourrage, lesdeux premières coupes entremars et juin représentent 70 % dutotal de l’année. Le déficit est déjàtrès lourd ! »Au WWF, le constat est iden-tique : « La baisse du rendementdes céréales pourrait atteindre50 % » prévient Cyrille Deshayes,

responsable du programme eau-agriculture. « Sur le plus longterme, nous devons nous préparerà lamultiplication des sécheresses. »

Alors que faire ? « Diminuer lademande en eau », affirme NadineBrisson de l’INRA. « Il faut notam-ment échapper à la monoculture

en réintroduisant des rotationsde cultures. » Cyrille Deshayessoutient lui aussi cette solution etpropose de limiter les cultures

gourmandes en eau comme lemaïs : « Le problème du maïs, c’estqu’il est très rentable et bénéficiedes aides de la PAC et de la pression

des grandes coopératives qui ven-dent les intrants et les machines.Ce système est incohérent. Alorsque la sécheresse était déjà là, des

agriculteurs ont semé du maïs ! »Pour Nadine Brisson, le problèmevient aussi du fait que les agricul-teurs avaient déjà acheté les

semis. Seule bonne nouvelle : lahausse des températures va facili-ter les cultures venues du Sudcomme le sorgo pour remplacerle maïs. Dans l’Ouest, la baissedes précipitations pourrait limiterles risques de maladies et favori-ser les cultures en hiver.Enfin, relativisons : au niveau pla-nétaire, le premier trimestre a étéle 14e plus chaud depuis 130 ans.L’an dernier, il était en premièreposition !

Jean-Louis Caffier

*«Climat,uneplanèteetdeshommes»,

éditionsduChercheMidi

NUMÉRO 409, MERCREDI 18 MAI 2011 L’HÉMICYCLE 11

Expertise

Sécheresse : aujourd’hui l’exception,demain lanorme?La sécheresse qui frappe la France et d’autres pays européens auradenombreuses conséquencessur l’agriculture. Les prix vont augmenter. Et demain, avec le réchauffement global, ce sera pire.

«LA SITUATION EST CATASTROPHIQUE POUR LES CÉRÉALESET POUR LE FOURRAGE. LE DÉFICIT EST DÉJÀ TRÈS LOURD

ET LA SÉCHERESSE VA CONTINUER»NADINE BRISSON. LABORATOIRE AGROCLIM

Quelsproblèmes les sécheressesdans lemondeposent-ellesréellementà l’agriculture?Ce sont de vrais traumatismes avecune action directe sur les céréales etindirectes sur l’élevage. Elles désta-bilisent l’agriculture en créant desproblèmes économiques (moinsd’exportations) et des difficultéspour l’autosuffisance alimentaire.Enfin, elles exacerbent la questionde la gestion et du partage de l’eau.Il y a là de vrais risques de conflits.

Lechangement climatiqueest-il responsable?

À mon avis, oui. Il multiplie lesphénomènes extrêmes, séche-resses ou inondations. Une annéesèche peut se rattraper mais pasplusieurs de suite. L’Australie estconfrontée à ce phénomène etdoit importer de la nourriturealors qu’elle prétendait il y a peupouvoir nourrir le monde. Il fautrepenser les comportements agri-coles, choisir des cultures moinsgourmandes en eau ou investirsur l’irrigation par exemple.

Àquiprofitent les crises?Aux spéculateurs ! Les sécheresses

provoquent un fort déséquilibreavec d’un côté moins d’exporta-tions, comme enRussie l’an dernier,et de l’autre plus d’importations. Cequi est nouveau aujourd’hui, c’estque la spéculation intervient dès lemoindre dérèglement. Il faut revoirles mécanismes de régulation. Ona aussi besoin de stocks de sécurité.

Àquelles conditions l’agriculturepourra-t-elle nourrir lemonde?En privilégiant d’abord la proxi-mité. Il faut appuyer les politiqueslocales, sécuriser l’agriculture enAfrique par exemple. Ensuite, il

faut arrêter de gaspiller et tout re-prendre, de l’eau aux sols en utili-sant tous les moyens possibles, labiologie, la génétique, l’agronomieet la recherche sinon, nous auronsdes catastrophes supplémentaires.Il y a urgence car la demandeaugmente en quantité et qualité.L’agriculture va devoir produiredavantage avec des contraintesnouvelles ! Le développement suividepuis 40 ans pour répondre à lademande de la société doit conti-nuer, mais sous d’autres formes !

Propos recueillispar Jean-Louis Caffier

«Lasécheresseexacerbelaquestiondelagestionetdupartagede l’eau»L’ancien président de la FNSEA, LucGuyau, préside aujourd’hui le Conseilde la FAO. À ce titre, il répond à nosquestions sur l’avenir de l’agriculturedans ce contexte de sécheresse.

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Il y a bien une bulle immobi-lière. Le Centre d’analyse stra-tégique, organisme qui dépend

du Premier ministre, note que lesprix à l’achat sont déconnectés desloyers. Sur les quinze dernièresannées, les loyers ont augmentéde 30%, en phase avec les salaires.Mais les prix à l’achat, eux, ontdoublé : plus 100 %, soit trois àquatre fois plus vite que les salaires.C’est là la définition d’une « bulle »,quand les prix se déconnectentainsi des fondamentaux. Bien sûr,on trouvera toujours des experts,des vendeurs de biens, pour vousexpliquer que « cette fois, c’est dif-férent » et que l’immobilier vamonter jusqu’au ciel…La dernière bulle caractéristiqueconcernait les valeurs Internetau début des années 2000. Lesexperts se répandaient alorspour expliquer que les « TMT »(Technologie-Média-Télécom,souvenez-vous…) allaient dominer

le XXIe siècle. En septembre 2000,l’action France Télécom monteà 219 euros. Aujourd’hui, ellevaut… 16 euros.Bien sûr, on espère que l’immobi-lier ne connaîtra pas une tellechute ! Mais, on peut tout demême se poser des questions. Etsurtout, on peut s’interroger sur la

pertinence des politiques d’aide àl’achat. En subventionnant ainsila demande, ne contribue-t-on pasà pousser les prix à la hausse ? Le« prêt à taux zéro » (PTZ) n’est-ilpas un bidon d’essence qu’on

jette sur un marché immobilierdéjà flambant ? Pour reprendrel’épisode de la bulle Internet :imagine-t-on, un instant, le gou-vernement de l’époque distribuerdes aides financières aux petitsépargnants, pour les aider à ache-ter des actions France Télécom à219 euros ?

Une récente étude de l’OCDE dé-nonce le caractère procyclique deces aides. Si vous donnez une aidede 30 000 euros dans un marchédéjà tendu, vous faites décaler lesprix à la hausse de 30 000 euros.

C’est également ce qu’explique entermes plus diplomatiques le Cen-tre d’analyse stratégique : « Dansles zones tendues, où le foncier estrare, il faut se demander si unesubvention de la demande nerisque pas de conduire à une aug-mentation du prix ». Si on se ré-sume, dans les zones tendues, les

aides alimentent la bulle. Ailleurs,elles constituent un effet d’au-baine. Conclusion : supprimonstoutes ces aides. Il y a là une bellesource d’économie pour le gou-vernement. En année pleine, leprêt à taux zéro va coûter 2,6 mil-liards d’euros pour le budget del’État. Mieux vaut stimuler l’offre.D’où l’idée par exemple de durcirla fiscalité sur les terrains nonbâtis, avec à la clef des recettespour l’État !D’autant que le gouvernementprend un vrai risque en incitantainsi à l’achat. On pourrait lui re-procher d’être un « pousse-au-crime ». Car plus la bulle gonfle,plus elle risque d’éclater, avec desconséquences non négligeables.On l’a vu en Irlande, aux États-Unis, l’explosion de la bulle im-mobilière a provoqué une crisebancaire qui a mis le pays à ge-noux. Idem en Espagne.Certes, sur le plan personnel, onentend souvent ce raisonnementd’apparence « bonpère de famille » :« Je n’achète pas pour spéculer.J’achète pour vivre dedans. Donc ça

m’est égal que les prix chutent. »Faux ! Il est prouvé qu’une chutedes prix peut avoir de lourdesconséquences sur votre carrièreprofessionnelle. Que se passe-t-il sivotre villa, achetée 600 000 euros,perd la moitié de sa valeur ? Outreune grosse déprime, vous vous re-trouvez collé avec votre maison.Impossible de revendre, sauf à enre-gistrer une sérieuse moins-value etvous retrouver en faillite person-nelle, avec un patrimoine négatif,car la dette, elle, demeure entière etles échéances continuent de tom-ber tous les mois. Résultat, vous nepouvez plus déménager. Vousn’êtes plus mobile professionnelle-ment. Vous devez refuser toutemutation professionnelle, ou toutemploi trop loin de votre domicile.Une étude du Conseil d’analysestratégiquemontre ainsi qu’un pro-priétaire au chômage met 30 % detemps en plus qu’un locataire pourretrouver du travail.Moralité : il est urgent d’attendreavant d’acheter. Après l’échecdu « tous propriétaires », vive le« tous locataires » !

10 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 409, MERCREDI 18 MAI 2011

Àdistance

Immobilier : pas de pitié pour les aidesPar Axel de Tarlé

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«IL FAUT SE DEMANDER SI UNE SUBVENTIONDE LADEMANDENE RISQUE PAS DE CONDUIRE

ÀUNE AUGMENTATIONDU PRIX»Centre d’analyse stratégique

DR

La brusque accélérationde la croissance économique

au premier trimestre 2011 en France,portée par l’investissement, laconsommation et la reconstitutiondes stocks des entreprises, a crééla surprise…mais elle ne pourraitêtre que temporaire.En dévoilant ce chiffre imprévude 1 %, laministre de l’ÉconomieChristine Lagarde a affirmé que« Tous les clignotants sont au vert ».C’est une « très bonne nouvelle pourl’économie française », avait-elle

déclaré depuis Londres, annonçantmême«des créations d’emploissupérieures à 50000pour le seulpremier trimestre ».Mais gare à l’excès d’optimismepréviennent les analystes, quicraignent une tendance inversedès le deuxième trimestre. Ilsmettenten avant les périls possibles et enpremier lieu l’inflation qui grignotele pouvoir d’achat, puis la flambéedes cours du pétrole et desmatièrespremières, et enfin le yo-yo de l’euro...Certains experts commeMarc Touati

(Global Equities) estiment mêmeque l’économie française amangéson pain blanc. Ce dernier soulignela baisse de la production industrielleet des dépenses de biensmanufacturés enmars. Il s’attend àun deuxième et surtout un troisièmetrimestre « bien plus difficile ».Toutefois, ces prévisionsde croissance,mêmeprises avecprudence, ontdequoi satisfaire François Fillonet conforter ainsi les prévisionsdugouvernementqui a toujours tablé surunehaussede2%duPIB. J.G.

Croissance : le débat des optimistes et des pessimistes

Dans ce point de vue, Axel de Tarlé tire la sonnette d’alarme : on n’a pas retenu les leçons dela crise des subprimes et les aides gouvernementales risquent de contribuer au surendettementdesménages. Il propose de les supprimer.

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Colmar : unmusée toutneuf en2013Unterlinden abrite notamment la collection duRetable d’Issenheim. Cet ensemble pictural seraégalement restauré d’ici la fin 2013.

Desprojetstrèsdiverspourunepassioncommune : le service des citoyens.

Plus d’une centaine d’élus,députés, maires, sénateursou conseillers généraux ont

été récompensés cette semaine parune Marianne d’Or. Remise de cesprix dans les salons du Conseilconstitutionnel en présence deJean-Louis Debré. Ces élus ont étéchoisis pour avoir porté cette annéedes projets tous très différentsmaisqui avaient au moins un pointcommun : l’amélioration de la viedes citoyens au quotidien. C’estvrai par exemple d’un centre aqua-tique à Alfortville, d’un quartierrénové à Domont dans le Val-d’Oise ou de la réfection de la Tourd’Argent à L’Isle-sur-la-Sorgue.Marianne d’Or également pour lemaire de Rosières, qui a favorisé lacréation d’emplois en zone ruraleou le maire d’Ancenis en Loire-Atlantique, qui a développé un

plan de lutte contre les addictions.Beaucoup de récompenses pourdes projets améliorant la qualité dela vie ou protégeant l’environne-ment comme à Megève en Haute-Savoie ou à Biguglia en Haute-Corse. Enfin ces « Marianne d’Or »ont récompensé de nombreusesinitiatives concernant la mise enœuvre de l’intercommunalité tellesles réalisations entre Dunkerque,Saint-Paul-sur-Mer et Fort-Mar-dyck, ou le soutien à la culturecomme à Marseille avec la prépa-ration de l’année européenne de laculture en 2013.

Bertrand Delpech

Culture

12 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 409, MERCREDI 18 MAI 2011

Jean-LouisDebréavecAlainTrampoglieri, créateurdesMarianned’Or, en2006

à l’Assembléenationale.

Un écrin agrandi pour unjoyau magnifié : le muséeUnterlinden de Colmar va

faire l’objet jusqu’en 2013 d’im-portants travaux, sous la houlettedu cabinet d’architectes suisse Her-zog & de Meuron, tandis que sapièce maîtresse, le Retable d’Issen-heim, sera restaurée.Le permis de construire du futurmusée a été signé par le mairede Colmar, Gilbert Meyer (UMP),et le premier coup de pioche estprévu à l'automne.À l’étroit dans les murs d’un cou-vent médiéval du XIIIe siècle,l’établissement va coloniser le bâ-timent de style Art nouveau desanciens bains municipaux qui luifait face, et s’agrandir d’une nou-velle aile.L’extension, qui va multiplier pardeux la surface du musée pour laporter à près de 8 000mètres carrés,permettra de montrer des piècesactuellement en réserve, et d’expo-ser demanièrepermanente la collec-tion d’art moderne et contempo-rain, aujourd’huidécrochéeàchaqueexposition temporaire.Cette collection, articulée princi-

palement autour des artistes actifsen France après la Seconde Guerremondiale – notamment ceux dela Nouvelle École de Paris –, s’estenrichie récemment de donationset de legs, dont un ensemble de35 œuvres de Dubuffet.

Un rapport avait souligné dès2002 l’exiguïté des locaux dumusée. Mais c’est en 2005-2006que le maire a conçu le projet demettre à la disposition de son ges-tionnaire, la Société Schongauer,

les anciens bains municipaux, ou-verts en 1906 et fermés définitive-ment en 2003.Le prestigieux cabinet bâlois Her-zog & de Meuron, qui compteparmi ses plus célèbres réalisa-tions la Tate Modern de Londres(2000) et le « Nid d’Oiseau », lestade olympique de Pékin (2008),a été désigné comme maîtred’œuvre en novembre 2009.Le projet a été chiffré à 27,3 mil-lions d’euros (HT), dont 8,8 mil-lions apportés par la ville et 13,3

par l’État et les autres collectivités.L’inauguration est prévue fin2013.Parallèlement à ces travaux, lemusée a entrepris une importantecampagne de restauration de ses

collections, dont celle du Retabled’Issenheim, chef-d’œuvre du go-thique finissant réalisé de 1512 à1516 par le sculpteur Nicolas deHaguenau et le peintre allemandMatthias Grünewald.La convention de financementde la restauration du retable a étésignée à Colmar. Les restaura-trices ont programmé 285 joursde travail.Cette lourde opération se fera de-vant les visiteurs au musée Unter-linden puis dans l’église des

Dominicains où le retable seratransféré le temps des travaux.Son coût, estimé à 341 000 euros,sera pris en charge par la Fonda-tion du patrimoine, l’État et la ré-gion, le solde devant être acquittépar des mécènes que la Fondationva s’employer à recruter.Installé dans le cloître et la cha-pelle d’un ancien couvent dedominicaines fondé en 1252, lemusée Unterlinden a ouvert en1853. Il présente depuis l’originele chef-d’œuvre peint par Grüne-wald pour la commanderie desAntonins d’Issenheim, un villageau sud de Colmar.Le retable de 3,30 m de haut et5,90 m de large représente sur sessept panneaux de tilleul la vie duChrist et celle de saint Antoinel’Ermite, guérisseur du « mal desardents ».Le maire de Colmar tenait depuislongtemps à ces travaux de restau-ration et il n’a pas ménagé ses ef-forts pour obtenir le montagefinancier. C’est pour lui l’une« des plus belles opérations enmatière d’action culturelle ».

Joël Genard

«UNEDES PLUS BELLESOPÉRATIONS CULTURELLES

CONDUITES PAR LAMUNICIPALITÉ DE COLMAR»

Le maire, Gilbert Meyer

DR

JACQ

UESDE

MAR

THON

/AFP

Marianned’Or2011Distinctions

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La copie à usage privé existaitbien avant l’apparition d’In-ternet. Les cassettes audio et

vidéo ont en leur temps provoquéles mêmes craintes et les mêmessoupçons quant aux dommagespotentiels que ces technologies pou-vaient provoquer à l’industriemusi-cale et au cinéma. Une taxe sur lessupports enregistrables amême étécréée pour compenser ces pertes.Cependant, cette pratique restaitlimitée : il fallait acheter les cas-settes puis avoir accès à un enregis-trement source. Et les adolescentsdes années 70 et 80 n’avaient pastous ni les moyens d’acheter cesbandes en quantité, ni accès à unemédiathèque illimitée.

Le téléchargement en un clicLe Web a changé la donne car dé-sormais, plus besoin de support,l’ordinateur est lui-même le lieu destockage. Internet est un réseaumondial qui crée des média-thèques virtuelles accessibles àtous. Il suffit qu’une personne, uneseule, mette en ligne un morceaudemusique pour que tous les inter-nautes de la planète, tous sans

exception, puissent le copier sansrien avoir à faire d’autre qu’une re-cherche et un clic. C’est simple,gratuit et, avec le haut débit, quasiinstantané. Imparable. Des dizainesde millions d’internautes ont télé-chargé et téléchargent.

Des logiques contraires etdes technologies mouvantesLes ventes de CD ont diminué demoitié entre 2003 et 2010 (Source :Les Échos). Peut-on baisser les bras ?Les comédiens, chanteurs ou mu-siciens doivent être naturellementrétribués pour leur travail et leurcréation. Dans lamesure où le pira-tage évite la rémunération des au-teurs, ces artistes et les industrielspeuvent légitimement considérerque ce téléchargement illicite s’ap-parente à du vol.Face à cette logique, beaucoup d’in-ternautes considèrent que, grâce àInternet, l’accès à la culture peutêtre aujourd’hui de facto gratuit etque les stratégies industrielles desmajors sont pénalisantes pour tousceux qui n’ont pas de ressources.

D’un côté donc, le téléchargementest perçu comme une logique devoleur. Pour d’autres au contraire, ils’agit seulement d’une passion par-tagée. Exemple : «Glee », la dernièresérie qui fait fureur chez les ado-lescents, a commencé à être diffu-sée sur M6 avec plus d’un an deretard. Pourtant, chaque épisode dela saison 2 est disponible en versionsous-titrée, sur le Web, 24 heuresaprès sa diffusion initiale aux États-Unis. Des groupes de fans enregis-trent chaque épisode diffuséoutre-atlantique, font la traductiondes dialogues et mettent en place lessous-titres. Ilsneveulentpasattendre.L’HADOPI tente demettre un freinà cette vague qui met en danger lacréation artistique, qui se voit pri-vée de ses ressources financières,ainsi qu’une industrie qui emploiedes dizaines de milliers de per-sonnes. Mais les manières departager ces œuvres non payéeschangent régulièrement. Les plates-formes de téléchargement sont dé-laissées au profit des chaînes demusiques et vidéos en streaming

qui permettent l’écoute ou le vi-sionnage en ligne sans avoir à télé-charger quoi que ce soit. Lecontrôle redevient impossible.Les dernières évolutions sur cedossier sont contradictoires : si laChine a récemment décidé desévir sur ce sujet au nom de la dé-fense de la propriété intellec-tuelle, Apple a annoncé savolonté de mettre fin aux restric-tions empêchant la copie d’unfichier musical acheté sur de mul-tiples supports. En fait, aucune so-lution n’a été trouvée quisatisfasse tout le monde : les créa-teurs et une industrie qui ne veu-lent pas travailler gratuitement,et les clients qui ne sont pas satis-faits d’une offre qu’ils jugentinsuffisante et surtout trop chère.De plus, les logiciels sont euxaussi massivement piratés viaInternet, ce qui représente unmanque à gagner qui se chiffreen milliards de dollars pour leurséditeurs. Décidément, le téléchar-gement n’a pas fini de faire parlerde lui.

14 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 409, MERCREDI 18 MAI 2011

2.0

Téléchargement : vérolemortelle ou libre accèsà la culture ?

Le chiffre

12%des internautes françaispratiquent le téléchargement,et 21 % chez les 15-24 ans.(Chiffres SACEM)

Laurent Petitgirard – SACEM

La citation

«NOUS ESTIMONSQU’HADOPI

NE SUFFIRA PASÀ ENRAYER LACONTREFAÇONDES ŒUVRESSUR INTERNET »

GOOGLE LANCE SONSERVICE DE STREAMINGMUSICAL� Le géant américain lance unnouveau service, baptisé GoogleMusic. Il permettra aux internautesaméricains de stocker leurs fichiersmusicaux sur des serveurs en ligneafin de pouvoir y accéder quel quesoit l’outil utilisé ou le lieu d’accès.Ils ne pourront cependant paspartager cette médiathèquepersonnelle mais les majors dudisque, avec lesquelles Google n’apu obtenir d’accord, se mobilisentdéjà contre ce projet qui nécessiteselon elles une licence de diffusionpar internaute.

LE W3C VEUTSTANDARDISERLES PROTOCOLESDE COMMUNICATIONAUDIO / VIDÉO EN LIGNE� Cet organisme chargé de lacompatibilité des différentestechnologies duWeb souhaitemettre en place des standardspour faciliter la diffusion de fluxaudio et vidéo par les navigateursWeb sans passer par l’installationd’applications tierces. Ces standardsdevraient rendre plus difficiles lescontrôles ou la censure de ces flux.Cela pourrait promouvoir les servicesde streaming déjà accusés defavoriser le piratage de la musiqueet des films.

UN FRANÇAIS SUR DEUXA DÉJÀ ACHETÉ EN LIGNE� Les Français ont de plus en plusconfiance dans l’e-commerce.Après des débuts difficiles à l’aubedes années 2000, en raison d’uneméfiance portant sur la sécurité destransactions, les Français adoptentdésormais cemode deconsommation, qui a gagné plusde 10millions de clients entre 2007et 2010, selon le dernier baromètreMédiamétrie. Et 43% desinternautes déclarent avoir faitun achat durant le mois précédentl’étude. Une tendance qui sepoursuit désormais dans lesachats via unmobile.

SELON LA CNIL, LESMOTEURS DE RECHERCHERESPECTENT DEMOINS EN MOINSLA VIE PRIVÉE� Dans un communiqué laconiqueen date du 9mai, la CNIL constateque les moteurs de recherche nesuivent plus les recommandationsdu G29, qui regroupe les 27 CNILeuropéennes, limitant à 6moisla conservation des données denavigation des internautes sur laToile. Si Microsoft se tient à cettelimite, Google les conserve pendant9mois et Yahoo, qui ne les stockaitque durant 3mois, vient de passerà 18mois afin demieux exploiterle potentiel de personnalisationde ces données.

En bref

Commeprévu, HADOPI est loin d’avoir réglé l’épineuse questiondu téléchargement. Faut-il une nouvelle loi ? Aucun des candidatsà la présidentielle n’échappera à cette question.

BORISHO

RVAT

/AFP

Des dizaines de milliersde commentairesDominique Strauss-Kahn est de-venu le sujet numéro un del’opinion publique mondiale. Dèsdimanche, plus de 9 000 tweetsrelaient l’information, « #DSK »devient le mot clé le plus utilisésur Twitter. Même phénomène demasse sur Facebook où les articlessont partagés plusieurs milliers defois, entraînant d’innombrablescommentaires.Les sites français enregistrent uneactivité inhabituelle pour une édi-tion dominicale. Sur Libération.frcomme sur le Figaro.fr, plus de7 000 commentaires ont été postésen quelques heures. L’affaire est lesujet d’intérêt principal des inter-nautes français sur les grands sitesd’informations en ligne.Signe de l’importance planétairede cette information : elle suscitedes centaines de commentairessur les sites du New York Times,Washington Post ou de Fox News.Le Huffington Post dépasse les3 500 commentaires. Ironie :Dominique Strauss-Kahn a écritune douzaine d’articles pour cegéant de l’information en ligneaux États-Unis. Les internautes eu-ropéens, espagnols, allemands etanglais notamment, commententeux aussi par centaines cette actu-alité sur leurs réseaux sociaux.

Des avis partagés entreindignation et soupçonsde complotBien sûr, les avis des internautessont très partagés. Mais une véri-table différence apparaît entre leregard des internautes français etcelui des internautes étrangers.Les premiers se focalisent surla dimension présidentielle deDominique Strauss-Kahn alorsque pour le restant de l’opinionpublique mondiale, c’est le di-recteur général du FMI qui esttouché par ce scandale, même sison statut de candidat à l’électionprésidentielle est souligné par une

minorité importante des com-mentateurs.Le jugement, qui traduit le chocressenti, est majoritairementsévère. Les informations émanantde la police new-yorkaise sontjugées crédibles. L’indignationdomine : « S’il est reconnu coupable,enfermez-le pour le reste de sa vie. »(nytimes.com). Ce scandale rap-pelle, en plus grave, les démêlés duprésident Clinton lors de l’affaireLewinsky : « Vous souvenez-vous dela période Clinton ? » (cnn.com). Letrain de vie choque aussi les inter-nautes américains qui trouventcela inapproprié, surtout de la partd’un homme de gauche : « Avec nosimpôts, cet homme descend dans deshôtels à 3 000 $ la nuit ? » (Washing-tonpost.com).Face à cette opinion très négative,de nombreux internautes seposent tout de même la questiond’un piège éventuel. Cette opi-nion que l’on trouve dans denombreux commentaires français :« Je ne crois pas à cette histoire uneseconde... À qui profite le crime ? »(lepoint.fr) est aussi partagée àl’étranger, notamment en Alle-magne : « Ceux qui croient en cesscandales personnels, qui arriventmaintenant par hasard, croient en-core au Père Noël »(faz.de). Ce sen-timent s’exprime aussi auxÉtats-Unis : « Il s’agissait d’unpiège. Il a mordu à l’hameçon. »(foxnews.com)Beaucoup de commentaires ten-tent de décrypter le fonction-nement du système judiciaireaméricain. Exemples :

Philippe Bilger« Il faut attendre. Je constateque dans la journée d’hier je n’aijamais entendu défendre avecune telle constance répétitivela présomption d’innocence,au moins dans les interventionsofficielles et médiatiques. Jeconstate aussi que la justiceaméricaine, sur le plan technique,n’hésite pas avec une rapidité

foudroyante à appréhender lespersonnalités même les plusemblématiques. »>www.philippebilger.com

Ou bien encore :Diner’s Room« Dans le système de droitaméricain, il n’est pas rareque la procédure s’achève avantle procès. Il faut dire que lesrisques d’une lourdecondamnation y incitent lesaccusés, comme le ministèrepublic qui peut inscrire unecondamnation supplémentaireà son palmarès.Il n’est pas inimaginable que lecas Strauss-Kahn ne parviennepas au procès. Soit que lespreuves de l’accusation ne luipermettent pas de poursuivre,soit, au contraire, qu’ellessuffisent à engager une action. »> dinersroom.eu

Certains enfin s’interrogent sur lamise en scène de cette machinejudiciaire :

Immedias« OJ Simpson, Bernard Madoff,DSK… À chaque affaire, chaquedestin, une même mise en scène eten images, ostentatoire, les mêmesclichés de notables entravés quetraînent des flics en cols blancs,la mine de circonstance, à l’arrièred’une limousine aux vitres ajourées– pour que la scène soit accessibleà tous. Le tout après qu’un hautresponsable des services de policede New York ait annoncé la sortieimminente de l’accusé. Tout lemonde est en place : moteur ! »> blogs.lexpress.fr/media/

L’actualité française est pourles jours et les semaines à venirune actualité planétaire. Qui l’eûtcru ?

NUMÉRO 409, MERCREDI 18 MAI 2011 L’HÉMICYCLE 15

Déblogage

Affaire DSK : la Toile oscilleentre indignation et complot

Chaquesemaine,le tourde Francedes blogspar Manuel Singeot

Dèsdimanche troisheuresdumatin, l’information faisait le tourde laplanètesur Internetavecunedifférencede ton trèsmarquéeentre les commentairesfrançais et ceuxvenusdu restedumonde.

EIP l’Hémicycle, Sarl au capital de 85 890¤. RCS : Paris 443 984 117.44, rue Blanche - 75009 Paris. Tél. : 01 55 31 94 20. Fax : 01 53 16 24 29. Web : www.lhemicycle.com - Twitter : @lhemicycle

GÉRANT-DIRECTEURDELAPUBLICATIONBruno Pelletier ([email protected]). DIRECTEURRobert Namias ([email protected]) RÉDACTEURENCHEFJoël Genard([email protected]). ÉDITORIALISTESGérard Carreyrou, Michèle Cotta, Bruno Jeudy, Paul Lefèvre, Catherine Nay AGORA Ludovic Vigogne ONT COLLABORÉ À CE NUMÉROLudovic Bellanger, Jean-Louis Caffier, Jean-François Coulomb des Arts, Bertrand Delpech, Axel de Tarlé, Nathalie Segaunes, Manuel SingeotCORRECTIONAurélie Carrier MAQUETTEDavid Dumand DIRECTRICE COMMERCIALEViolaine Parturier ([email protected])PARTENARIATS JulietteBoudre ([email protected]) IMPRESSIONRoto Presse Numéris, 36-40, boulevard Robert-Schumann, 93190 Livry-Gargan. Tél. : 01 49 36 26 70.Fax : 01 49 36 26 89. Parution chaque mercredi ABONNEMENTS [email protected] COMMISSION PARITAIRE0413C79258 ISSN 1620-6479

Le chiffre

20000commentaires en 24 heuresà propos de l’affaire DSKsur les principaux médiasen ligne mondiaux.

Martine Aubry

La citation

«LES NOUVELLESQUI NOUS

PARVIENNENT DE NEWYORK DEPUIS CETTENUIT SONNENT ÀL’ÉVIDENCECOMMEUNCOUPDETONNERRE»

JEW

ELSA

MAD

/AFP

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