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Article original

Les paralysies du nerf interosseux postérieur. À propos de 18 caset revue de la littérature

Posterior interosseous nerve palsy. A series of 18 cases and literature review

R. Quignon a, E. Marteau b, A. Penaud a, P. Corcia c, J. Laulan b,*a Service de chirurgie plastique reconstructrice et esthétique, hôpital Trousseau, CHRU de Tours, 37044 Tours cedex, Franceb Unité de chirurgie de la main, services d’orthopédie 1 et 2, hôpital Trousseau, CHRU de Tours, 37044 Tours cedex, France

c Service de neurologie et d’électromyographie, hôpital Bretonneau, CHRU de Tours, 37044 Tours cedex, France

Reçu le 26 juin 2011 ; reçu sous la forme révisée le 19 septembre 2011 ; accepté le 26 novembre 2011

Résumé

Objectifs. – La paralysie du nerf interosseux postérieur est un syndrome rare et souvent méconnu, alors que le tableau clinique est caractéristique.Il se manifeste par un déficit de l’extension des doigts associé à une extension du poignet en inclinaison radiale. Nous avons évalué nos résultats dutraitement chirurgical.Méthodes. – Une étude rétrospective sur 20 ans a été réalisée dans le service. Une analyse des étiologies et une évaluation du résultat fonctionnelpostopératoire ont été effectuées. Notre étude a été comparée aux données de la littérature.Résultats. – Dix-huit cas ont été répertoriés retrouvant une nette prédominance de ce syndrome chez l’homme exerçant une activitéprofessionnelle manuelle. L’atteinte du nerf interosseux postérieur était d’origine tumorale dans quatre cas, traumatique dans deux cas, iatrogènedans deux cas et idiopathique dans dix cas. Dans sept de ces dix cas, il a été retrouvé une compression sous l’arcade du court extenseur radial ducarpe. Les résultats postopératoires étaient satisfaisants, dépendants de l’ancienneté de la paralysie, et ont permis une récupération complète dansneuf des quinze cas traités par neurolyse. Dans la littérature, la collecte des données retrouve 264 cas sur 50 ans sous forme de divers cas cliniqueset cinq études de série. Une prédominance des causes tumorales a été retrouvée.Conclusion. – La méconnaissance de la présentation clinique d’une paralysie du nerf interosseux postérieur amène fréquemment à une errancediagnostique. Sa prise en charge précoce repose sur une neurolyse complète permettant d’obtenir une récupération fonctionnelle satisfaisante.# 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Nerf interosseux postérieur ; Compression ; Court extenseur radial du carpe ; Paralysie

Abstract

Objectives. – Posterior interosseous nerve palsy is a rare syndrome frequently unrecognized, while the clinical presentation is characteristic:finger extension paresis associated with wrist extension in radially deviated position. Here, we assessed our results of surgical treatment.Methods. – A 20-year retrospective study was carried out in our unit. Analysis of causes and an assessment of postoperative functional outcomewere performed. Our study was compared with literature data.Results. – Eighteen cases were treated with a predominance in men manual workers. The etiology of the posterior interosseous nerve palsy wastumor in four cases, traumatic in two cases, iatrogenic in two cases and idiopathic in ten cases. In seven of these ten cases, compression under thearch of the extensor carpi radialis brevis was found. The postoperative results were satisfactory with full recovery in nine out of fifteen cases treatedby neurolysis, depending on the duration of the paralysis. In the literature, we found 264 cases over 50 years through a variety of clinical cases andfive case series. A predominance of tumor etiology was found.Conclusion. – Ignorance of the clinical presentation of a posterior interosseous nerve palsy frequently leads to misdiagnosis. Early completeneurolysis enables a satisfactory functional recovery.# 2011 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Keywords: Posterior interosseous nerve; Entrapment syndrome; Extensor carpi radialis brevis; Paralysis

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

Chirurgie de la main 31 (2012) 18–23

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (J. Laulan).

1297-3203/$ – see front matter # 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.main.2011.11.004

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1. Introduction

La pathologie mécanique du rameau profond du nerf radial ounerf interosseux postérieur (NIOP) peut donner lieu àdeux tableaux. Un tableau douloureux, non déficitaire, entrantdans le cadre des épicondylagies latérales et dénommé« syndrome du tunnel radial » depuis la publication de Roleset Maudsley [1]. Les manifestations douloureuses seraient liées àune compression dynamique, intermittente, du NIOP par lesstructures fibromusculaires du tunnel radial [2]. Le second tableauou « syndrome du NIOP », réalise une forme essentiellementdéficitaire, peu ou pas douloureuse, et serait lié à une compressionpermanente du nerf. Il peut aussi résulter d’une lésion traumatiqueou iatrogène du NIOP [3].

Différentes structures anatomiques sont susceptibles decomprimer le NIOP [1,4–7]. Le plus souvent, le bord proximaldu chef superficiel du muscle supinateur, ou arcade de Fröhse, estmis en cause. Mais ont aussi été incriminés : le bord antéromédialet le fascia profond du court extenseur radial du carpe (CERC),des formations fibreuses au niveau de la capsule articulairehuméroradiale, des branches transversales de l’artère récurrenteradiale et le bord distal du supinateur. Le NIOP peut aussi êtrecomprimé par une tumeur (lipome) ou un processus expansifd’origine articulaire (synovite, kyste synovial) [8,9]. Enfin, dessténoses idiopathiques, éventuellement multiples, ont aussi étérapportées [10].

Le muscle long extenseur radial du carpe (LERC) étantinnervé par des branches collatérales du tronc du nerf radial, sapréservation dans le syndrome du NIOP explique le tableau

Fig. 1. Photographies d’un patient présentant une paralysie du nerf interosseux postcarpe (cas no 6). A et B. Clichés préopératoires (notez l’extension en inclinaison raClichés à huit mois montrant une récupération complète.

caractéristique d’extension du poignet en inclinaison radiale(Fig. 1). Le déficit d’extension des doigts est variable, netouchant parfois que certains rayons [11]. La faible fréquencede ce syndrome, associée à une présentation clinique atypique,conduit fréquemment à un retard de diagnostic et donc à unretard de prise en charge thérapeutique.

Une revue rétrospective des 18 cas pris en charge dans leservice a été effectuée afin d’en étudier le tableau, les causes etles résultats du traitement chirurgical. Un recueil des étiologiesde la compression du NIOP a été réalisé dans la littérature afinde les comparer avec celles de notre série.

2. Patients et méthode

2.1. Étude rétrospective

Tous les patients présentant un déficit isolé dans le territoiredu NIOP et traités chirurgicalement, de 1990 à 2009, ont étéintégrés à l’étude. Ont été exclues les formes douloureuses sanssigne déficitaire moteur, y compris celles associées à desanomalies électroneuromyographiques (ENMG) isolées.

Le recueil des données a recherché : l’âge lors del’intervention, le type d’activité professionnelle, le sexe, lalatéralisation, le côté atteint, la cause suspectée, les symptômesprésentés en préopératoire, le délai entre les premierssymptômes et la chirurgie, les anomalies ENMG, les résultatsd’une éventuelle imagerie, les constatations peropératoires, legeste réalisé et l’évolution postopératoire immédiate.

érieur liée à une compression en regard de l’arcade du court extenseur radial dudiale du poignet et la paralysie des extenseurs des doigts et du pouce). C et D.

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Le résultat à long terme a été évalué par un questionnairetéléphonique. Il était demandé au patient de quantifier larécupération motrice, la gêne résiduelle éventuelle et depréciser son degré de satisfaction. Un questionnaire quick-DASH était rempli par le patient.

2.2. Revue de la littérature

Une revue de la littérature a été réalisée afin de faire unrecueil des étiologies rapportées par les différents auteurs. Larecherche des publications a été effectuée sur Pubmed* avecl’association des mots clés : « posterior interosseous nervepalsy », ou « posterior interosseous nerve entrapment », ou« radial tunnel syndrome ».

Les cas cliniques et les études de séries dans lesquels lesyndrome déficitaire était au premier plan ont été sélectionnés,excluant donc les cas dans lesquels prédominait le tableaud’épicondylalgie latérale.

3. Résultats

3.1. Étude rétrospective

La série était constituée de 18 cas diagnostiqués chezsix femmes et 11 hommes, dont un présentait une atteintebilatérale (Tableau 1). L’âge moyen était de 41 ans, avec desextrêmes de 16 et 79 ans. Douze patients exerçaient uneprofession manuelle. Parmi les 18 cas de la série, la moitiéconcernait le membre dominant.

L’examen préopératoire retrouvait une atteinte complète(poignet et doigts) dans six cas, subtotale dans huit cas etpartielle dans quatre cas. Le délai moyen avant la prise encharge chirurgicale était de 13,1 mois avec des extrêmes dedeux à 72 mois. Dans tous les cas, le diagnostic a été confirmépar une étude ENMG qui montrait des anomalies neurogènes,limitées au territoire du NIOP, allant de la dénervation partielleà l’absence de réponse.

La distribution des étiologies se répartissait en quatre causestumorales, deux causes traumatiques, deux causes d’origineiatrogène et dix causes définies comme idiopathiques. Lesdeux cas d’origine iatrogène étaient survenus lors de la biopsied’un volumineux lipome sous-aponévrotique. Dans les dix casde compression idiopathique, la structure impliquée était lebord proximal du CERC dans cinq cas (cas 1, 4, 10, 17 et 18),l’arcade de Fröhse dans deux cas (cas 3 et 15), et les deuxstructures dans deux cas (cas 6 et 9). Concernant le dernier casidiopathique, la cause anatomique n’a pu être précisée, lepatient ayant été traité par transferts musculaires d’emblée (cas2). Aucune complication postopératoire n’a été observée.

Les neurolyses ont été pratiquées par trois opérateurs quiutilisaient tous une voie dorsolatérale passant entre le CERC etle LERC [7]. Dans deux cas, un geste palliatif a été réaliséd’emblée : un patient de 62 ans qui avait une paralysie complèteet ancienne, d’origine idiopathique, avec amyotrophie majeurede la loge dorsale de l’avant-bras, le NIOP n’a pas été exploré etl’intervention a consisté en une réanimation des extenseurs ; etun cas d’origine iatrogène, chez une patiente de 54 ans, qui

présentait une paralysie isolée du long extenseur du pouce etqui a été traitée par réanimation de celui-ci. Dans trois cas, ungeste palliatif a été réalisé secondairement pour compléter lerésultat : deux cas traumatiques avec des lésions musculairesassociées qui ont nécessité un geste palliatif secondaire, aprèsneurolyse (cas 7) et greffe nerveuse (cas 13), pour améliorerl’extension du poignet ; et un cas iatrogène (biopsie d’unlipome profond) pour lequel, après exérèse de la tumeur etneurolyse, un transfert musculaire secondaire a été nécessaire(cas 8).

Parmi les 18 cas, 14 ont pu être évalués avec un recul moyende 7,2 ans (un à 14 ans). Sur les dix patients traités parneurolyse, six ont eu une récupération complète, trois unerécupération partielle et un aucune amélioration (cas 9). Celui-ci présentait une paralysie subtotale qui évoluait depuisquatre ans au moment de l’opération. Les quatre patients ayantété traités par une réanimation des extenseurs, de première ouseconde intention, ont considéré que l’amélioration étaitpartielle.

Treize des 14 patients évalués se déclaraient « trèssatisfaits » ou « satisfaits » suite à l’intervention. Le quick-DASH moyen était de 22,3 (de 0 à 70) ; il était de 13,1 si l’onexcluait les quatre cas traités par transfert tendineux primaireou secondaire. La valeur du quick-DASH se dégradait avec ledélai de prise en charge.

Parmi les quatre cas perdus de vue, lors de la dernièreconsultation, la récupération était complète dans les trois castraités par neurolyse, dont le cas bilatéral ; et le quatrième avaitété traité par transferts tendineux d’emblée.

Ainsi, dans les 15 cas où une neurolyse avait été réalisée, larécupération était complète dans neuf cas, partielle danscinq cas et absente dans un cas. Une chirurgie palliativecomplémentaire a été nécessaire dans deux de ces cas (cas 7 et8).

3.2. Revue de la littérature

En fonction des critères de sélection, 101 articles ont étéretrouvés. Parmi ceux-ci, il y avait cinq études de séries de cas[3,12–15]. La plus importante était constituée de 40 cas dont16 d’origine iatrogène, 15 cas traumatiques, quatre casd’origine tumorale et cinq étiquetées comme idiopathiques[3]. Parmi les 264 cas de paralysie du NIOP colligés, les 2/3 étaient rattachés à des compressions d’origine tumorale etmusculo-aponévrotique (Tableau 2).

L’étiologie la plus fréquente était le kyste synovial (19,7 %)puis la compression sous l’arcade de Fröhse (16,7 %). L’origineiatrogène représentait 10 % des cas, mais le déficit étaitspontanément résolutif dans la majorité des publications.L’atteinte iatrogène du NIOP était le plus souvent associée auxdoubles abords pour réparation du tendon distal du biceps.

4. Discussion

Comparée à la littérature, cette série retrouve uneprédominance des formes idiopathiques liées à une compres-sion du NIOP par les structures musculo-aponévrotiques (61 %

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Tableau 1Principaux paramètres de la série.

Sexe Âge Côté dominant(atteint)

Profession Étiologie Durée(en mois)

Paralysie Geste chirurgical Recul Récupération(en %)

Satisfaction Quick DASH

F 16 D (D) Étudiante Idiopathique 10 Subtotale Neurolyse 13 ans 85 Très satisfait 5M 62 D (D) Manuelle Idiopathique 72 Complète Transferts Perdu de vueM 50 D (D) Manuelle Idiopathique 7 Partielle Neurolyse 12 ans 100 Très satisfait 0M 44 G (G) Manuelle Idiopathique 6 Partielle Neurolyse 6 ans 100 Très satisfait 48F 70 D (G) Retraitée Tumoralea 2 Subtotale Neurolyse Décédée

(récupérationcomplète)

M 25 D (G) Manuelle Idiopathique 6 Complète Neurolyse 7 ans 100 Très satisfait 2M 31 D (D) Manuelle Traumatique (lésion

L & CERC)12 Complète 1 = Neurolyse

2 = Tranferts10 ans 60 Satisfait 55

M 48 D+G (G) Manuelle Biopsie lipome 4 Complète 1 = Neurolyse2 = Tranferts

3 ans 70 Très satisfait 16

M 18 D (D) Étudiant Idiopathique 48 Subtotale Neurolyse 13 ans 0 Insatisfait 34M 41 G (G) Manuelle Idiopathique 18 Partielle Neurolyse 11 ans 100 Très satisfait 0M 67 D (G) Retraité Lipome 6 Subtotale Neurolyse 1 an 80 Très satisfait 7F 55 D (D) Manuelle Lipome 7 Complète Neurolyse 1 an 95 Très satisfait 11M 19 D (G) Manuelle Traumatique (lésion

L & CERC)12 Complète 1 = Greffe nerveuse

2 = Transferts14 ans 70 Très satisfait 64

F 30 D (G) Manuelle Kyste synovial 3 Subtotale Neurolyse 2 ans 100 Très satisfait 0F 79 D (G) Retraitée Idiopathique 3 Subtotale Neurolyse 6 ans 100 Satisfait 0F 54 D (D) Aucune Biopsie lipome 12 Partielle (LEP) Réanimation LEP 2 ans 50 Satisfait 70M 17 D (G) Manuelle Idiopathique 3 Subtotale Neurolyse Perdu de vue

(récupérationcomplète)

M 17 D (D) Manuelle Idiopathique 4 Subtotale Neurolyse Perdu de vue(récupérationcomplète)

L & CERC : long et court extenseurs radiaux du carpe ; LEP, long extenseur propre du pouce.a Ostéochondromatose secondaire à une arthrose post-traumatique du coude.

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hirurgie de

la m

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Tableau 2Fréquence dans la littérature des différentes étiologies de la paralysie du nerfinterosseux postérieur.

Étiologie Nombre de cas Pourcentage

Compressions tumorales 104 39,4Kyste synovial 52 19,7Lipome 17 6,4Autres tumeurs 18 6,8Causes vasculaires 17 6,4

Iatrogénique 25 9,5Traitement chirurgical 23 8,7Autres 2 0,8

Rhumatologique 22 8,3Polyarthrite rhumatoïde 12 4,5Autres 5 1,9Infection 5 1,9

Idiopathique 5 1,9

Musculo-aponévrotique 72 27,3Arcade de Froshe 44 16,7Bande fibreuse, fibrose 26 9,8Arcade du CERC 2 0,8

Traumatique 36 13,6Section 7 2,7Fracture/luxation de tête radiale 26 9,8Contusion NIOP 3 1,1

NIOP : nerf interosseux postérieur ; CERC : court extenseur radial du carpe.

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vs 25 % dans la littérature), cela aux dépens des étiologiestumorales (22 % vs 39,4 % dans la littérature), avec une largeprédominance de professions manuelles (70 %). On peut penserque les sollicitations mécaniques répétées des structuresmusculo-aponévrotiques, associées à une anatomie prédispo-sante, peuvent avoir favorisé la compression nerveuse.

Fig. 2. Vue peropératoire du nerf interosseux postérieur (cas no 11). Noter lasténose du nerf qui était comprimé contre l’arcade de Fröhse par un lipomeprofond.

Nous n’avons pas été confrontés à des cas de sténoseidiopathique [10]. Dans tous nos cas où une indentation nette aété retrouvée en peropératoire sur le NIOP (Fig. 2), elle siégeaittoujours en regard d’une structure anatomique qu’il s’agisse del’arcade du CERC ou de celle du supinateur.

Par ailleurs, nous retrouvons une forte implication du CERCdans cette série comparativement à la littérature. Cette différencepeut s’expliquer par la voie d’abord utilisée. Lors d’un abordantérieur, le CERC est récliné avec les muscles latéraux pourexposer le NIOP, alors que par un abord dorsolatéral, seul leLERC est soulevé, ce qui permet d’observer précisément lesrapports de l’arcade du CERC avec le NIOP [7]. Il n’est pas excluque certains cas de sténose idiopathique, siégeant juste en amontde l’arcade de Fröhse, puissent être en rapport avec unecompression méconnue par l’arcade du CERC.

L’histoire clinique des différents cas retrouve fréquemmentune errance diagnostique prolongée devant cette symptoma-tologie pourtant spécifique et caractérisée avant tout parl’extension en inclinaison radiale du poignet. La méconnais-sance peut être favorisée par le caractère parfois incomplet oudissocié du déficit ; ainsi, une de nos patientes, chez quil’innervation de l’extenseur propre de l’index était conservée,avait même été adressée à un psychiatre. Tous les muscles de laloge postérieure doivent être explorés par l’EMG. Mais le retarddiagnostique est surtout favorisé par la relative rareté de cettemononeuropathie, comme le montre notre revue de la littératurede 264 cas rapportés sur 50 ans, et notre série de 18 cas sur20 ans. Dans les paralysies complètes et anciennes, la neurolysene permet plus d’espérer un quelconque bénéfice [4] et il estpréférable de recourir d’emblée à la chirurgie palliative.

Il paraît important de souligner le risque de lésion du NIOPlors des biopsies de lipomes profonds développés au niveau duradius proximal. Les biopsies des tumeurs provenant de la faceprofonde du supinateur doivent être réalisées avec la plusgrande prudence, le nerf pouvant être soulevé et rendusuperficiel par le développement de la tumeur.

La prise en charge chirurgicale de la compression du NIOPdépend du délai avant la consultation, de l’âge, des résultatsENMG et de l’imagerie (IRM, TDM) préopératoires. Cesdonnées permettent de prévoir le potentiel de récupération etdonc de planifier le geste à effectuer : neurolyse, greffenerveuse, ou transferts tendineux.

Les résultats fonctionnels d’une neurolyse ou d’une greffenerveuse seront d’autant plus favorables que le gestethérapeutique sera réalisé précocement dans l’évolution de lamaladie [16]. Spinner conseille une neurolyse en l’absence derécupération spontanée au-delà de six semaines [4]. Tous noscas idiopathiques traités par neurolyse avant dix mois ont euune récupération complète. Mais, il peut exister une grande partd’incertitude quant à la datation du début de la symptomato-logie et le mode évolutif influe aussi sur les capacités derécupération postopératoires. Ainsi, un patient avec un très bonrésultat (récupération complète et quick-DASH à 0) malgré uneneurolyse tardive à 18 mois d’évolution, avait initialement untableau d’épicondylalgie latérale associée à des pertes de forcetransitoires, évoquant une atteinte d’abord intermittente et uneévolution très progressive.

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La neurolyse doit explorer l’ensemble du trajet du NIOPdans le tunnel radial afin de contrôler tous les sites potentiels decompression, celle-ci pouvant se situer à plusieurs étages[6,10]. Dans deux de nos cas, il existait plusieurs sites decompression.

5. Conclusion

La compression du NIOP est une pathologie rare dont laméconnaissance induit un retard diagnostique et doncthérapeutique, en particulier pour les cas idiopathiques.Cependant, la symptomatologie réalisant une paralysiedissociée du nerf radial avec respect de la sensibilité, estévocatrice et doit faire envisager le diagnostic.

Une neurolyse chirurgicale est indiquée, en l’absence derécupération spontanée rapide, après que le diagnostic a étéauthentifié par une étude ENMG. L’exploration doit concernerl’ensemble du tunnel radial afin de réaliser une décompressioncomplète du NIOP.

Sous réserve que la neurolyse ne soit pas trop tardive, lesrésultats postopératoires sont satisfaisants et permettentd’enrayer l’évolution d’un déficit moteur conduisant à unhandicap majeur pour la vie quotidienne et l’exerciceprofessionnel, d’autant que la chirurgie palliative n’apportequ’un bénéfice partiel.

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enrelation avec cet article.

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