les cahiers techniques de haute-normandie | maraîchage n°1

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Le désherbage en culture biologique de légumes Maraîchage cahier Nº 1 | Mars 2014 | www.bio-normandie.org ≈ Directrice de la publication et de la rédaction : Annette FICHTL ≈ Rédaction : Sylvain BARQ, Clara GASSER, Caroline DEGRAVE ≈ Crédit photos : Matthieu Chanel (Agrobio 35), GRAB HN, www.biolib.de ≈ Conception et création graphique : Agrobio 35 | Studio Graphique ≈ Mise en page : Agrobio 35 ≈ Editeur : GRAB HN - Association loi 1901 siège social situé 9 rue de la Petite Cité, CS 80882 / 27008 Evreux Cedex Tél. 02 32 78 80 46 - Fax 09 53 32 33 16 - [email protected] ≈ Imprimé sur papier recyclé par : Graphelio, P.A.T La Vatine, 7 rue Linus Carl Pauling, 76130 Mont-Saint-Aignan ≈ Tirage : 250 ex ≈ Dépôt légal : à parution ≈ n°ISSN : en cours Dans le langage courant, le désherbage est souvent réduit au binage. Le binage n’étant en réalité que l’ameublissement de la couche superficielle du sol autour des plantes cultivées. C’est ce que l’on réalise lorsqu’on cherche à casser la croûte de battance. Cette opération à pour effet de réinitialiser les échanges sol/air et la destruction des très jeunes adventices. L’opération de destruction des adventices correspond, elle, au « sarclage ». En maraîchage biologique, le désherbage est plutôt lié à la maîtrise des adventices au sens large. Il s’agit de l’ensemble des techniques utilisées pour éviter l’apparition, le développement et la montée à graine des adventices. Cette maîtrise nécessite une mise en œuvre stratégique à l’échelle de l’exploitation. « Désherber » en maraîchage biologique, c’est donc : • Éviter la production et les apports exogènes de graines d’adventices • Éviter la germination et/ou le développement des adventices • Détruire les adventices développées GRAB HN Les Agriculteurs BIO de Haute-Normandie Une publication du : Les adventices, késako Page 2 5 bonnes raisons de ne pas se laisser envahir par les adventices ! Page 2 Dossier : Réussir sa stratégie de désherbage Page 4 bien désherber, c’est bon pour la santé Page 8

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Page 1: Les cahiers techniques de Haute-Normandie | Maraîchage n°1

Le désherbage en culture biologique de légumes

Maraîchage cahier Nº 1 | Mars 2014 | www.bio-normandie.org

≈ Directrice de la publication et de la rédaction : Annette FICHTL

≈ Rédaction : Sylvain BARQ, Clara GASSER, Caroline DEGRAVE

≈ Crédit photos : Matthieu Chanel (Agrobio 35), GRAB HN, www.biolib.de

≈ Conception et création graphique : Agrobio 35 | Studio Graphique ≈ Mise en page : Agrobio 35 ≈ Editeur : GRAB HN - Association loi 1901 siège social situé 9 rue de la Petite Cité, CS 80882 / 27008 Evreux Cedex Tél. 02 32 78 80 46 - Fax 09 53 32 33 16 - [email protected]

≈ Imprimé sur papier recyclé par :Graphelio,P.A.T La Vatine, 7 rue Linus Carl Pauling, 76130 Mont-Saint-Aignan≈ Tirage : 250 ex≈ Dépôt légal : à parution≈ n°ISSN : en cours

Dans le langage courant, le désherbage est souvent réduit au binage. Le binage n’étant en réalité que l’ameublissement de la couche superficielle du sol autour des plantes cultivées. C’est ce que l’on réalise lorsqu’on cherche à casser la croûte de battance. Cette opération à pour effet de réinitialiser les échanges sol/air et la destruction des très jeunes adventices.

L’opération de destruction des adventices correspond, elle, au « sarclage ».

En maraîchage biologique, le désherbage est plutôt lié à la maîtrise des adventices au sens large. Il s’agit de l’ensemble des techniques utilisées pour éviter l’apparition, le développement et la montée à graine des adventices. Cette maîtrise nécessite une mise en œuvre stratégique à l’échelle de l’exploitation.

« Désherber » en maraîchage biologique, c’est donc :

• Éviter la production et les apports exogènes de graines d’adventices

• Éviter la germination et/ou le développement des adventices

• Détruire les adventices développées

• GRAB HN •Les Agriculteurs BIO de Haute-Normandie

Une publication du :

Les adventices, késako

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•5 bonnes raisons

de ne pas se laisser envahir par

les adventices !Page 2

•Dossier :

Réussir sa stratégie de désherbage

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•bien désherber,

c’est bon pour la santé

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5 bonnes raisons de ne passe laisser envahir par les adventices !

Les adventices, kesako ?

Favoriser la croissance et la santé des plantes cultivéesLa maîtrise des adventices permet de limiter les compétitions aériennes et souterraines pour l’accès à l’eau, aux nutriments et à la lumière entre les plantes cultivées et les adventices, souvent plus concurrentielles. L’énergie, dépensée par les premières, est alors être totalement consacrée à leur dé-veloppement et à leurs défenses immuni-taires.

Garantir la qualité des légumesOutre le phénomène de compétition qui affaiblit les plantes cultivées, le développe-ment excessif d’adventices induit des effets indirects favorisant l’apparition de maladies et de ravageurs. Par exemple, le confine-ment humide est propice aux champignons parasites et pourritures bactériennes tandis que plantes hôtes et plantes sont propices aux insectes et rongeurs. Les incidences maladies/ravageurs peuvent, en sus, s’addi-tionner et initier des problèmes de conser-vation.

Faciliter les récoltes Qu’elles soient manuelles ou mécaniques, les récoltes sont ralenties et/ou compli-quées par la présence d’adventices dans les parcelles.

Préserver la santé et le moral des salarié(e)s et exploitants(tes)Le dépassement par les adventices, phéno-mène possiblement récurrent, est synonyme de rattrapages laborieux qui, s’ajoutant aux autres tâches, deviennent de réelles problé-matiques sur la santé, le moral et la moti-vation des maraîchers et de leurs salariés. La stratégie de maîtrise des adventices devient dès lors une stratégie de bien être.

Donner une image positive de la bio Certainement secondaire à l’échelle de l’exploitation, cette image est importante à l’échelle du collectif. Ainsi, une exploita-tion qui maîtrise les adventices donnera une image positive de l’agriculture biologique avec des incidences sur le développement des conversions et installations. L’inverse se vérifie également.

(Le débit de chantier récolte est meilleur sur une culture propre, ci-dessus une culture de betteraves)

Les adventices, communément appelées « mauvaises herbes » sont les plantes présentes sur une parcelle cultivée ou à cultiver et dont la présence n’est ni pré-vue, ni désirée, ni tolérée.

La notion de salissement devient donc relative à l’idée que chaque produc-teur peut avoir de la conduite de ses cultures, de son degré de tolérance, et de l’intérêt éventuel qu’il peut trouver à certaines d’entre elles.

Nous considérons, dans cet ouvrage, les adventices selon un degré de tolérance « zéro ».

Différents types d’adventices• Des plantes sauvages indigènes

Adventices les plus courantes, elles sont issues du milieu naturel et le sol porte en lui les stocks de nombreuses générations de ces plantes. Leur niveau d’expression varie suivant les conditions de sol, leur présence est un indicateur de l’état du sol cultivé. Cette classe concerne une large gamme de plantes,

y compris des arbres, leurs semences pouvant se retrouver sur les parcelles lorsque ceux-ci les bordent.

• Des plantes cultivées

Celles-ci deviennent des adventices lorsque leur présence n’est pas ou plus souhaitée sur une parcelle. Cela concerne les repousses issues de cultures précédentes et la gestion des résidus de cultures (racines d’endives, pommes de terre, tomates, topinambours…).

• Des plantes sauvages exogènes

Plantes endémiques ou non, elles sont apportées, souvent inconsciemment, par les pratiques de l’exploitant.

> apports de composts, paillages végétaux mal contrôlés, passage de matériel d’une exploitation à l’autre sans lavage, utilisa-tions de supports de culture (terreau) ou plants non fiables…

Pour aller + loin Les adventices en maraîchage biologique. GRAB HN 2011

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Ok, je désherbe, mais quoi ?

Les actions de désherbage sont naturellement concentrées sur les parties cultivées, celles-ci pouvant être découpées en différentes zones cibles :

1. La surface entière peut être désher-bée sur sol nu ou, ponctuellement, pour quelques légumes comme la pomme de terre, avant la récolte pour en faciliter la mise en œuvre.

2. Les espaces inter-rangs représentent la zone évidente à désherber.

3. Le rang, plus compliqué que l’inter-rang, est une zone dont la propreté est souvent déterminante pour la réussite de la culture.

4. Les passe-pieds, pour les cultures en planches paillées ou non, sont parfois oubliés. Leur salissement, notamment sur cultures longues comme les courges, peut avoir des conséquences néfastes tel l’envahissement en fin de culture.

5. Le pied des légumes, essentiellement pour les cultures sur paillage, doit être entretenu pour tenir la culture propre.

Le désherbage peut aussi être effectué « hors » des zones cultivées :

6. Les bords de serres sont souvent ou-bliés dans le désherbage. Leur envahisse-ment est long et difficile à rattraper.

7. Les abords des parcelles sont des zones à ne pas négliger. Si la végétation en bordure gagne la parcelle cultivée, l’efficacité du travail mécanique sera réduite. Par ailleurs, les adventices aux abords risquent de devenir des plantes relais pour les ravageurs.

(Stratégie d’entretien des passe-pieds)

(Ne pas oublier de désherber le pied ! Ci-dessus un pied de pâtisson)

Profession : Auxiliaires de cultures

Un Carabe

Un Perce Oreille

Une Coccinelle

Un bourdon

Un staphylin odorant

En maraichagebio-logique, ces zones

sont aussi des refuges pour les insectes auxiliaires des cultures.

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Réussir sa stratégie de désherbage contenir d’importantes quantités d’es-pèces et de graines d’adventices.

Implanter un couvert végétal

Sur les bords de serres, les abords de parcelles ou encore les parcelles libérées, ces couverts choisis (engrais verts, prai-ries fleuries…) sont un moyen d’éviter le développement et la production grai-nière d’adventices. Ils pourront avoir, par ailleurs, un rôle important pour la faune auxiliaire ou dans la fertilité du sol et la fertilisation des cultures.

Adapter la conduite du sol

L’apparition et le développement des es-pèces d’adventices sont fortement liés à

La stratégie de désherbage est l’articu-lation d’un ensemble de connaissances, méthodes et techniques avec différents objectifs dans l’espace et dans le temps.

• La connaissance des cycles des légumes est incontournable pour leur entretien : choix d’itinéraires et de matériels adap-tés pour leur désherbage, anticipation des repousses...

• La connaissance des cycles et carac-téristiques des adventices permet de comprendre les raisons de leur présence, d’anticiper leur apparition et d’intervenir de la manière la plus efficace pour leur destruction.

• La connaissance des méthodes et outils utilisés pour le désherbage est également nécessaire. Il s’agit d’en maî-triser les modes d’actions, les position-nements dans le temps, les réglages éventuels ainsi que de connaître les conditions optimales d’efficacité.

Mieux vaut prévenir que guérir !Les méthodes prophylactiques sont l’en-semble des mesures mises en œuvre pour éviter l’apparition des adventices et, le cas échéant, pour diminuer leur pression sur les cultures.

Eviter la production grainière en cours de culture

La notion de stock de graines d’adven-tices d’un sol correspond à la quantité de graines présentes pour un volume de terre donné. Plus ce stock est important plus la pression sera importante. Il est donc né-

cessaire, pour les années suivantes, d’évi-ter d’augmenter ce stock en limitant les montées à graine.

Gérer les résidus de cultures

Certaines cultures peuvent devenir problé-matiques pour les cultures qui les suivent. C’est le cas par exemples des bisan-nuelles, vivaces cultivées en annuelles ou tubercules. Il est donc nécessaire de bien appréhender les risques de repousse par une exportation complète, un travail du sol approprié ou un enfouissement suffi-sant.

Nettoyer le matériel

Partager son matériel avec un autre ma-raicher ou passer d’une parcelle à risque à une autre, sont des facteurs de propa-gation des adventices. Le nettoyage sys-tématique du matériel est un moyen effi-cace pour limiter ces apports exogènes.

Contrôler la qualité et l’origine des intrants

Les matières organiques, les paillages « verts », les terreaux et plants maraîchers utilisés pour les cultures sont des sources importantes de « contamination ». Un compost mal fermenté ou un terreau de mauvaise qualité sont susceptibles de

(Des fraisiers en bord de serre se substituent aux adventices)

" Connaître son ignorance est la meilleure part de la

connaissance " proverbe chinois

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l’état du sol. Il peut s’agir de problèmes de structure : tassement mécanique ou lié au PH ; de manque de porosité; d’un excès de matière organique en sol hydromorphe ou d’azote minéral ; ou au contraire de sol carencé… Cette lecture du sol permet d’en adapter la conduite et de rétablir des conditions d’équilibre plus favorables à la lutte contre les adventices.

Adapter la rotation des cultures

L’alternance des cultures évite la spécia-lisation des adventices en cassant leur cycle. Si elle est plus simple à mettre en œuvre en cultures céréalières (alternance de cultures d’hiver/cultures de printemps), des rotations diversifiées en maraîchage offrent la possibilité d’intégrer la lutte contre les adventices. Là encore, l’implan-tation de couverts végétaux dans la rota-tion sera bénéfique.

Des choix stratégiques et une planification annuelleAvant même une mise en œuvre au champ, comme pour les cultures, le dés-herbage se planifie et se redéfinit tous les ans.

Choisir les densités de semis/planta-tion en respectant les caractéristiques de chaque espèce

Densifier certains semis pour avoir une couverture de sol rapide et donc une plus forte compétitivité de la culture sur les adventices (radis bottes par exemple).

Diminuer les densités, en écartant les rangs, afin de faciliter l’intervention mé-canique.

Uniformiser les écartements entre lignes de légumes différents aux conduites compatibles afin d’utiliser un seul et même matériel de désherbage. Par exemple : choux/poireaux/céleris/haricots ; carottes/panais/betteraves/endives/navets/gros radis/épinards.

Etaler ou grouper les semis

Quels que soient les travaux de désher-bage à réaliser sur les cultures, ils sont de fait proportionnels aux quantités de lé-gumes mis en terre. Ainsi, pour certaines cultures qui nécessitent un passage ma-nuel (racines de garde par exemple), il est primordial, pour réussir le désherbage, de bien penser les semis. Cela permet d’éviter les pics de travail si l’exploitation manque de main d’œuvre. Au contraire, si l’exploitation a recours à de la main d’œuvre ponctuelle pour ces opérations, grouper les semis permet de concentrer les désherbages.

Organiser les chantiers de désherbage

Pour des raisons morales, physiques et économiques, il est important d’optimi-ser les opérations de désherbage manuel. Le travail en équipe permet notamment la rationalisation des tâches. L’assistance au désherbage améliore l’efficacité dans la durée et le bien-être du producteur (ci-vières permettant le désherbage allongé, astuces d’outils manuels…).

Pour les passages mécanisés, l’organisa-tion du travail est également nécessaire. Il s’agit d’éviter la répétition des opé-rations d’attelage/dételage des outils, d’organiser leur ordre d’utilisation afin d’optimiser la charge de travail et l’effi-cacité du désherbage.

Caler les rythmes de sarclage

Dans l’organisation générale, les se-maines vont au rythme des récoltes, des ventes… . Intégrer des plages de temps conséquentes et systématiques pour les opérations de sarclage, c’est s’assurer d’un suivi régulier des cultures et d’un contrôle efficace des adventices. Des passages répétés sur des cultures peu sales sont plus efficaces que des pas-sages espacés induisant des rattrapages. « Biner quand c’est propre » demande au

final moins d’énergie, qu’elle soit fossile, animale ou humaine.

Bien sûr, la météo capricieuse peut dés-tabiliser cette organisation, mais les conséquences seront toujours moins im-portantes si ces bonnes habitudes sont prises.

Choisir des itinéraires adaptés

Une même culture peut être semée ou repiquée. C’est le cas des épinards, mâches, oignons et courges… Le choix de l’itinéraire est directement lié à la capacité de la désherber. Une même culture repiquée peut l’être sur sol nu ou sur paillage. Là aussi, le choix de l’itiné-raire est lié à la capacité de la désherber. Quel que soit l’itinéraire choisi, il aura une influence sur l’organisation du travail et les coûts.

Pour les cultures nécessairement semées (carottes, endives…) et dont la maîtrise de l’enherbement est plus complexe, le choix peut être fait d’abandonner pure-ment et simplement la culture et de se tourner vers des collègues plus spéciali-sés pour compléter la gamme.

Faire des choix structuraux

Quand on parle de désherbage en agri-culture biologique, les deux mots qui viennent aussitôt à l’esprit sont « outils » et « main d’œuvre ». Avec les surcoûts des semences, plants et autres intrants, ces composantes résument l’essentiel des différences de coûts de production entre maraîchage conventionnel et bio-logique.

Raisonner les amortissements du ma-tériel et les charges de main d’œuvre

Ils représentent à eux deux la majorité des charges de structure. Il existe pour le poste désherbage une corrélation directe entre ces deux lignes. Un niveau de mé-canisation important réduira les charges de main d’œuvre.

L’approche sera propre à chaque exploi-tation, avec des différences marquées entre maraîchage diversifié et spécialisé.

Les bons choix passent immanquable-ment par une prise en compte de la gestion de l’exploitation et une connais-sance des coûts de production et des prix de revient.

(Mâche semée, plus de valeur ajoutée !)

Avant même une mise en œuvre au champ, comme

pour les cultures, le désherbage se planifie et se

redéfinit tous les ans.

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Les techniques de désherbageEn maraîchage biologique, le désherbage se met en œuvre dès la préparation du sol.

Le labour permet un désherbage total de la surface à emblaver soit en fin de culture, soit avant l’implantation de la nouvelle. Cette mise à nu est destinée à favoriser les mises en terre. Si son uti-lisation est encore largement répandue, ses intérêts agronomiques sont de plus en plus discutés. Cette opération peut être remplacée par d’autres techniques comme les déchaumages, sous-solages ou autres travaux superficiels avec des outils à dents ou animés (vibroculteur, cultirateau…) sur planches permanentes.

La technique du faux semis implique une préparation du sol bien en amont de la culture. Le lit de semences est préparé, mais la culture n’est pas mise en terre. Les adventices germent, apparaissent puis sont détruites (mécaniquement ou thermiquement). L’opération peut être répétée plusieurs fois avant la mise en terre réelle. Le but de cette technique est de diminuer le nombre de graines d’adventices (stock) dans les premiers centimètres du sol pour ensuite réduire le temps de désherbage.

Les difficultés de la technique résident essentiellement dans :

• Son organisation : nécessité de plani-fier les travaux du sol, en amont, trois semaines à deux mois avant la mise en terre.

• La préservation de la structure du sol en ne travaillant que sur les pre-miers centimètres.

• L’obtention d’un bon taux de des-truction qui dépend du matériel utilisé, du stade de développement des adven-tices, des conditions météorologiques et de l’état du sol lors de l’intervention.

Les paillages sont utilisés pour éviter la germination des adventices en cours de culture et permettent d’éviter le dés-herbage. Ils sont surtout adaptés aux cultures repiquées. Les paillages biodé-gradables sur planches et les toiles tis-sées réutilisables sont les plus courants. Ils imposent, cependant, de désherber les pieds des légumes sans oublier les passe-pieds. Des techniques de cultures permanentes et/ou sans labour tendent à utiliser des paillages « naturels » (pailles de céréales, herbes sèches, feuilles, BRF, couverts vivants…).

Le désherbage thermique est utilisé pour détruire des adventices au stade jeune (cotylédon à deux feuilles). La flamme chauffe l’eau contenue dans les cellules des adventices. En bouillant, celle-ci fait éclater les cellules qui se vident. Quelques heures après le passage, la plante fane et meurt. Le passage se fait à la vitesse

d’un pas lent. Il n’est pas nécessaire de carboniser la plante, cela consomme trop d’énergie (gaz en général).

Le désherbage thermique est utilisé de différentes manières :

• Sur la surface en plein pour réali-ser un faux semis. La consommation d’énergie et le temps passé sont alors plus importants qu’avec une destruction mécanique.

• En pré-levée, sur le rang ou sur la surface complète. Certaines adven-tices, se développant plus rapidement que les plantes cultivées, rendent possible un désherbage thermique. La plante cultivée se développe alors sur un rang ou une surface propre facili-tant son entretien ultérieur.

Cette technique, plus économe en énergie lorsque ciblée sur le rang, impose une surveillance précise des semis pour intervenir au moment optimum : juste avant la sortie de la plante cultivée. Une cloche de verre ou un P17 sur une petite zone permet d’anticiper la levée du reste du semis.

• En post-levée, certaines plantes cultivées (et adventices) résistent au passage sous la flamme jusqu’à cer-

(Désherbage thermique post-levée sur endives)

En maraîchage biologique, le désherbage se met en œuvre

dès la préparation du sol.

Le désherbage mécanique est la technique la plus

répandue sur cultures en place ou lors des faux semis

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tains stades de leur développement : endives jusqu’à 4 à 6 feuilles, oignons de semis au stade crochet. Le dés-herbage thermique, à ce stade, agit tel un « désherbant sélectif ». Cette technique nécessite cependant des précautions dans sa mise en œuvre et retarde momentanément la culture.

Le désherbage mécanique est la tech-nique la plus répandue sur cultures en place ou lors des faux semis. Toutes les zones à désherber peuvent en théorie

l’être mécaniquement. Le terme désher-bage mécanique s’emploie dès lors qu’un outil est utilisé, que celui-ci soit attelé derrière un tracteur, un âne ou simple-ment au bout d’un manche. Le but de l’action mécanique est de meurtrir, arra-cher, sectionner, broyer, et/ou enfouir les adventices.

Il existe un large panel d’outils, de ré-glages et de combinaisons d’outils dans le commerce ou auto-construits qui per-mettent de réaliser cette lutte.

(Doigts Kress efficaces aussi en traction animale)

Les principaux outils de désherbage mécanique

Type d’outil Modèles Mode d’action Utilisation

Outils non animés par prise de force

Herses étrilles

• Dents souples • Dents rigides • Différentes longueurs et formes

Arrachage Meurtrissures

En plein ou entre rang

Dents de vibroculteur

• Souples ou rigides • Socs droits ou triangulaires • Différentes largeurs (DL)

Arrachage Meurtrissures Enfouissement

Entre rang, en plein pour faux semis

Socs triangulaires

• Pattes d’oies (DL) • Queues d’hirondelles • Différentes largeurs

Section de racines Enfouissement possible

Entre rang, léger buttage pos-sible sur le rang (pattes d’oies)

Lames

• Lames droites ordinaires • Lames Lelièvre (courbes) • Lames à betteraves (courbes) • Lames Delfosse (courbes) • Différentes tailles

Section du système racinaire Entre rang, possible près du rang sans protection supplé-mentaire

Disques

• Disques pleins (buttoirs) • Disques étoiles • Différents diamètres Indivi-duels ou combinés

Section et arrachage des adventices Enfouissement

Débuttage/buttage Ecroutage, buttage sur le rang.

Disques à doigts • Doigts Kress Arrachage Sur le rang

Outils animés par prise de force

Rotor axe vertical

• Rotor à doigt Eléments indivi-duels de herse rotative

Arrachage/ Broyage Entre rang, sur le rang pour herse individuelle

Rotor à axe horizontal

• Fraises et multi fraises • Brosses

Broyage/ Enfouissement Entre rang

Le choix des outils se fera :

• Lors de l’acquisition en fonction des légumes cultivés, des techniques culturales utilisées, du type de sol, de la vitesse de travail souhaitée, de la capacité d’investissement et de l’in-térêt économique, du matériel par-tagé ou non, des compétences en mécanique…

• Lors du désherbage, si le choix entre plusieurs outils est permis, en fonction des conditions météorolo-giques et de l’état sol, du stade de développement de la culture et des adventices, du type d’adventices dominant, de l’objectif (entretien ou rattrapage), de la rapidité d’interven-tion souhaitée…

Le désherbage manuel reste incontournable pour certains

légumes. Idéalement il devrait être cantonné à un minimum d’espèces, sur le

rang et le pied ...

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Les outils sont animés par prise de force ou non animés. Ces derniers permettent des vitesses de passage plus impor-tantes. Des outils à commandes hydrau-liques ou pneumatiques apparaissent également sur le marché.

Les interventions de désherbage néces-sitent de la précision. Ainsi certaines bineuses sont guidées par l’outil de trac-tion, par un opérateur spécifique, auto-guidé par un système mécanique (tra-ceur) ou par des technologies modernes (GPS, RTK, cellules photosensibles). Ces matériels et techniques de binage cherchent à s’approcher de la qualité de travail de la combinaison « œil/main ».

Le désherbage manuel reste incontour-nable pour certains légumes. Idéalement il devrait être cantonné à un minimum d’espèces, sur le rang et le pied des lé-gumes paillés, et sur une largeur la plus faible possible. En pratique, ce poste atteint un poids considérable. La notion d’organisation du travail prend alors tout son sens. La combinaison des stra-tégies et techniques précédentes a pour objectif de réduire au maximum la durée et la pénibilité des passages manuels.

Bien désherber c’est bon pour la santé !

désherbage mécanique entraînent des charges de structure supplémentaires, ils bénéficient souvent d’aides de la région, du département ou de la communauté de commune.

A l’échelle globale de l’exploitation, la stratégie de désherbage devient claire-ment une question de gestion écono-mique, celle des coûts de production et des prix de revient. Ces notions, difficiles à appréhender en maraîchage diversifié, devraient pourtant être prises en compte. Elles prennent toute leur importance en maraîchage spécialisé, dans un contexte de développement de la production avec des risques de tensions sur les prix.

Les pratiques de mutualisation (maté-riels et main d’œuvre) et de coopéra-

tions sont des moyens d’assurer la dura-bilité des systèmes.

… Mais aussi humainsDu point de vue des femmes et des hommes qui cultivent les légumes biolo-giques, l’organisation et la réussite de la stratégie de désherbage sont des enjeux de premier ordre concernant la santé physique à court, moyen et long terme.

Dans un métier où les tâches pénibles sont déjà nombreuses ; récoltes ma-nuelles, ports répétés de charges lourdes, conditions météorologiques difficiles et positions de travail éprouvantes ; il est essentiel, pour l’exploitant ou ses colla-borateurs, de se donner les moyens de limiter les efforts physiques liés au dés-herbage et d’améliorer la qualité de vie au travail.

A RETENIR

Quels que soient les choix réalisés sur l’exploitation en termes d’itiné-raires techniques, d’investissements matériels et de disponibilité de main d’œuvre, la lutte contre les adventices implique une cohérence entre ces choix et les surfaces emblavées. Les résultats techniques et économiques sont meil-leurs sur des surfaces moindres bien conduites que sur des surfaces plus im-portantes où les adventices prennent le dessus.

la stratégie de désherbage devient clairement une

question de gestion économique

Si le désherbage n’assume pas, à lui tout seul, la réussite complète des cultures, il reste cependant primordial du fait de ses répercussions sur de nombreux postes de l’exploitation et sur le ressenti du produc-teur vis-à-vis de son métier.

Des enjeux économiques...La maîtrise du désherbage et les choix qui y sont liés influencent directement :

• Les volumes valorisables : les quanti-tés récoltées (rendement brut) baissent si la concurrence avec les adventices est trop importante. Cela peut également affecter les quantités commerciali-sables (rendement net) du fait d’éven-tuelles chutes de qualité, de chute de calibres ou de pertes au stockage. L’in-verse est également vrai.

• Les charges opérationnelles : elles dépendent de certains itinéraires cultu-raux, choisis spécifiquement en fonc-tion de la conduite de désherbage. La plantation (plutôt que le semis) et le paillage augmentent les charges opéra-tionnelles. Ces choix ne sont pas forcé-ment mauvais, mais une augmentation des coûts devra se répercuter sur le prix de vente.

• Les charges de structure évoluent également selon la stratégie de désher-bage adoptée. Le choix d’un désher-bage préventif ou de rattrapage aura des répercussions sur le temps de tra-vail et sur la consommation d’énergie.

Le choix d’itinéraires « légumes plan-tés sur paillages » augmente les temps de travaux liés aux plantations et aux récoltes, plus difficilement mécanisables sans investissements coûteux.

Si les investissements en matériel de