le train: souvenirs et objets du chemin de fer ≫ par françois berlin

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Souvenirs et objets du chemin de fer )) par Franqois Berth (lkitions ((Ouest-France ))) C e livre presente a notre w train d’une maniere si sing&&e et originale qu’il merite un retour plus attentif dans la Revue Gc%u?rale des Chemins de Fer aprts la courte presentation qui en a et6 faite dans le numero de janvier 1998. Car Franqois Bertin a reussi ce tour de force d’tcrire un ouvrage de vulgarisation sur l’univers du train tout en dtclenchant, chez les passion&s que nous sommes, un inter&t total par les flots de souvenirs qu’il nous remet en memoire. Que les objets soient de simples outils de travail du cheminot (l’habillement, les lampes et lanternes, marteau a bandage, N lapin m, K petits bonhommes o...) ou la description des locomo- tives les plus connues, c’est, par theme, un voyage a l’interieur de la propre vie de l’employe de chemin de fer. Aquarelles, peintures, vieilles photos jaunies ou cliches recents (en prove- nance, le plus souvent, des collections du Muste francais du chemin de fer a Mulhouse) et affiches se cotoient pour vous faire decouvrir un chemin de fer parfois oublit mais toujours present. Les . ~ tiges : l’tcartement des rails (les quatre pieds huit pouces de la voie originale de George Stephenson) et la circulation a gauche des trains, De la traction a vapeur, il nous donne un corn-s avant de nous installer dans la cabine de conduite (s la chapelle n) des loco- motives - 230 D 9 a Ten Wheels a, Pacific 141 R, 2 029 &at, 1314 Midi, la * bonne a tout faire n 030 C et la Pacific PO 4 546 - oti, chauffeur et mtcanicien vont K faire du charbon n, puis a du gaz n a la pelle (avant l’invention du * Stocker n qui ambnera directement le charbon du tender au foyer), prendre le manche en attendant le signal du depart pour demarrer : ce qui est facile puisque toutes les manceuvres a effectuer sont expliquees dans le texte. I,es autres corps de metiers ne sont pas oublits ; ainsi, le contra- leur, muni du precieux guide invent6 par Na- poleon Chaix et de sa pince troueuse de billets, tellement reconnaissable avec sa casquette ; la garde-barriere au metier si eprouvant au siecle dernier ; le lampiste, les coltineurs, ripeurs et poseurs de voies, les tau- premieres pages du livre ne sont pas tres gaies avec ces photos de locomotives a vapeur rouillees laissees a l’abandon en plein champ ou sur une voie de garage qui ont eu (helas, pas assez souvent !) la chance d’echapper au chalumeau du ferrailleur pour rejoindre les mains expertes d’amoureux qui, en les bichonnant et en les repa- rant, leur redonnent une nouvelle vie. Puis l’auteur revient sur les premieres locomotives a vapeur ayant roule en France. 11rappelle que ce sont les Anglais qui furent les pionniers de cette aventure, si bien qu’il nous en reste deux ves- piers qui en assurent l’entretien regulier ; les aiguilleurs et por- teurs, les visiteurs, atteleurs, accrocheurs et agents qui offcient dans les depots ; tout ce beau monde dirigt fermement par les u culs de plomb W, nbras marts D,e fromages blancs Bet autres =cha- peaux mous 3, ainsi que par le plus redoute et dlebre : le chef de gare. Cette revue d’effectif s’effectue a travers leurs vies propres, mais aussi avec tous les objets qu’ils utilisent. Le chemin de fer, c’est aussi le materiel, nous l’avons vu avec les locomotives a vapeur si brillamment d&rites. Francois Bertin y ajoute sa passion

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Page 1: Le train: Souvenirs et objets du chemin de fer ≫ par François Berlin

Souvenirs et objets du chemin de fer )) par Franqois Berth

(lkitions (( Ouest-France )))

C e livre presente a notre w train d’une maniere si sing&&e et originale qu’il merite un retour plus attentif dans la Revue Gc%u?rale des Chemins de Fer aprts la courte presentation

qui en a et6 faite dans le numero de janvier 1998. Car Franqois Bertin a reussi ce tour de force d’tcrire un ouvrage de vulgarisation sur l’univers du train tout en dtclenchant, chez les passion&s que nous sommes, un inter&t total par les flots de souvenirs qu’il nous remet en memoire. Que les objets soient de simples outils de travail du cheminot (l’habillement, les lampes et lanternes, marteau a bandage, N lapin m, K petits bonhommes o...) ou la description des locomo- tives les plus connues, c’est, par theme, un voyage a l’interieur de la propre vie de l’employe de chemin de fer. Aquarelles, peintures, vieilles photos jaunies ou cliches recents (en prove- nance, le plus souvent, des collections du Muste francais du chemin de fer a Mulhouse) et affiches se cotoient pour vous faire decouvrir un chemin de fer parfois oublit mais toujours present. Les . ~

tiges : l’tcartement des rails (les quatre pieds huit pouces de la voie originale de George Stephenson) et la circulation a gauche des trains, De la traction a vapeur, il nous donne un corn-s avant de nous installer dans la cabine de conduite (s la chapelle n) des loco- motives - 230 D 9 a Ten Wheels a, Pacific 141 R, 2 029 &at, 1314

Midi, la * bonne a tout faire n 030 C et la Pacific PO 4 546 - oti, chauffeur et mtcanicien vont K faire du charbon n, puis a du gaz n a la pelle (avant l’invention du * Stocker n qui ambnera directement le charbon du tender au foyer), prendre le manche en attendant le signal du depart pour demarrer : ce qui est facile puisque toutes les manceuvres a effectuer sont expliquees dans le texte. I,es autres corps de metiers ne sont pas oublits ; ainsi, le contra- leur, muni du precieux guide invent6 par Na- poleon Chaix et de sa pince troueuse de billets, tellement reconnaissable avec sa casquette ; la garde-barriere au metier si eprouvant au siecle dernier ; le lampiste, les coltineurs, ripeurs et poseurs de voies, les tau-

premieres pages du livre ne sont pas tres gaies avec ces photos de locomotives a vapeur rouillees laissees a l’abandon en plein champ ou sur une voie de garage qui ont eu (helas, pas assez souvent !) la chance d’echapper au chalumeau du ferrailleur pour rejoindre les mains expertes d’amoureux qui, en les bichonnant et en les repa- rant, leur redonnent une nouvelle vie. Puis l’auteur revient sur les premieres locomotives a vapeur ayant roule en France. 11 rappelle que ce sont les Anglais qui furent les pionniers de cette aventure, si bien qu’il nous en reste deux ves-

piers qui en assurent l’entretien regulier ; les aiguilleurs et por- teurs, les visiteurs, atteleurs, accrocheurs et agents qui offcient dans les depots ; tout ce beau monde dirigt fermement par les u culs de plomb W, n bras marts D, e fromages blancs B et autres = cha- peaux mous 3, ainsi que par le plus redoute et dlebre : le chef de gare. Cette revue d’effectif s’effectue a travers leurs vies propres, mais aussi avec tous les objets qu’ils utilisent. Le chemin de fer, c’est aussi le materiel, nous l’avons vu avec les locomotives a vapeur si brillamment d&rites. Francois Bertin y ajoute sa passion

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pour les locotracteurs et matrices Diesel, l’int&eur des trains de luxe et des voitures presidentielles, les voitures de deuxieme et troisibme classe avec cette particularite historique : x Devant l’aflux des passagers de toutes conditions, la promiscuite yui en resulte et les reclamations des plus fortunb qui en dkoulent, on crie de% 1838 le principe d’une deurieme c&se. La promiscuite y &ant encore trop forte, la troisieme classe fait son apparition deux ans plus turd jusqu 2 sa suppression en 1956 (. . .) Le reseau Alsace- Lorraine ddveloppe m&me la particularitC, empruntee aux chemins defer allemands, d’auoir quatre classes ! Pratique qui sera suppri- m&e le 10 junuier 1930 s ; les michelines et autorails (equip&s, en 1921, d’un moteur de char d’assaut !), les fourgons plateaux et les foudres, les machines de depot et les locomotives Clectriques. A chaque fois, le texte accompagnant les photos nous dresse un rappel historique succinct, souvent teinte de petites anecdotes, et une description technique de base. 11 depasse aussi le simple aspect humain et technique en rtservant quelques chapitres a des sujets annexes a la traction, mais tout aussi revelateurs d’une pen&e unique de la vie du chemin de fer. Ainsi nous d&it-i1 ces * palais du voyage n que sont les gares, ainsi que l’architecture somptueuse des buffets des plus grandes d’entre elles, la construction des ouvmges d’art (ponts, tunnels, viaducs,

tranchees...) imagines par des architectes dont le plus ctltbre res- tera Gustave Eiffel ; la signalisation ferroviaire qui, parfois, se transforme en ceuvre d’art (voir le tableau d’Albert Brenet qui illustre le paragraphe) ; l’univers merveilleux du train miniature, tout ce qui touche a l’art ferroviaire (en particulier les affiches) et a la u litterature de gare n. 11 ne reste qu’a evoquer certains kenements parfois douloureux (toutes ces photos jaunies de trains qui connaissent l’infortune d’etre w dans le sable B), historiques (le role tenu par les cheminots resistants, les records du monde de vitesse) avant l’extinction des feux, apres un passage tres instructif et ludique sur la signification des expressions du franc-parler cheminot (ainsi vous aurez l’expli- cation de tous les passages entre guillemets qui parstment cette analyse), ainsi que sur les dates de naissance aussi importantes que la traction a vapeur, Diesel et Clectrique, les locomotives, le crocodile, le 11 22 h 12 w, le ticket ou le * plateau-repas n. C’est assurement le livre ideal pour faire dtcouvrir a des personnes peu au fait des particularites du train tout cet univers merveilleux qui nous passionne, tout en assurant une ultime mission : rtpondre a l’interrogation du poete Y Oui, les objets ont une ame n.

Thierry ESCOLAN