laforgue littérature et philosophie mêlées · littérature et philosophie mêlées ......

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    Laforgue Littrature et philosophie mles

    Lettre de Laforgue Gustave Kahn : Jai sacrifi un gros volume de vers philo dautrefois

    parce quils taient mauvais manifestement, mais enfin, ce fut une tape, et je tiens dire quavant dtre dilettante et pierrot, jai sjourn dans le Cosmique. (p.10). Langoisse mtaphysique lobsde depuis lpq o, peu aprs la mort de sa mre, il a compltement perdu la foi.

    Dsir de savoir et inquitude mtaphysique directement hrits des premiers romantiques : Lamartine, Vigny, Hugo. Programme un peu plus large que celui annonc :

    - Comment Laforgue sinscrit dans la tradition romantique - Comment il se situe par rapport ses plus proches contemporains : Corbire, et surtout

    Baudelaire et Rimbaud Des Mditations aux Illuminations, en passant par les Contemplations, je vous propose une petite histoire de la contemplation au XIXe. Lamartine, Les Mditations (1820)

    Tout le monde connat, au moins de rputation le pote le plus clbre qui ait vu le jour en Bourgogne, Lamartine. Celui-ci publie au dbut du XIXe sicle, un recueil qui rencontre un succs fulgurant et inaugure le mouvement romantique : Les Mditations.

    Le titre a une rsonnance philosophique et spirituelle. Paul Bnichou a montr quau XIXe sicle un sacerdoce lac voit le jour, celui des crivains et des potes qui dans lpoque de troubles et dathisme grandissant qui a fait suite la Rvolution franaise, prennent le relais des prtres dautrefois. P. Bnichou, commentant les rsonances nouvelles apportes au terme de mditation par le recueil de Lamartine, crit : Ce mot-mme dit la nature de la nouveaut : le pote dsormais pense ; il est lhritier du philosophe et lmule du thologien, mme en parlant de ses amours. Risque : celui du catchisme.

    Les Mditations : un catchisme ?

    Le quteur de vrit est un personnage rcurrent dans la posie du XIXe sicle. On le retrouve chez Hugo, chez Vigny : Il veut sonder le monde, et son il est dbile (i.e. faible). La finitude est la condition de lhomme :

    Ne porte pas plus loin tes yeux ni ta raison : Hors de l tout nous fuit, tout steint, tout sefface ; Dans ce cercle born Dieu ta marqu ta place. Comment ? pourquoi ? qui sait ? De ses puissantes mains Il a laiss tomber le monde et les humains, Comme il a dans nos champs rpandu la poussire, Ou sem dans les airs la nuit et la lumire ; Il le sait, il suffit : lunivers est lui, Et nous navons nous que le jour daujourdhui ! (II, Lhomme )

    Lintelligence est le propre de Dieu, et lorsque lhomme la revendique comme son apanage, ce nest jamais quun signe darrogance contre laquelle sinsurge le pote chrtien. Le pote lui, au contraire, est celui qui fait aveu dignorance, et naspire aucun magistre :

    Comme toi, ma raison en tnbres abonde, Et ce nest pas moi de texpliquer le monde. Que celui qui ta fait texplique lunivers ! Plus je sonde labme, hlas ! plus je my perds. ( Lhomme )

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    Cependant, si Lamartine est si virulent lencontre des tmraires scrutateurs de linfini, cest quil sest lui-mme fourvoy dans la qute dune science outrecuidante :

    Jai cherch vainement le mot de lunivers. Jai demand sa cause toute la nature, Jai demand sa fin toute crature ; Dans labme sans fond mon regard a plong ; De latome au soleil, jai tout interrog ; Jai devanc les temps, jai remont les ges. Tantt passant les mers pour couter les sages, Mais le monde lorgueil est un livre ferm ! Tantt, pour deviner le monde inanim, Fuyant avec mon me au sein de la nature, Jai cru trouver un sens cette langue obscure. ( Lhomme )

    Cest ici quil faut couter, plus que les paroles, la musique de cette voix qui essaie justement de chanter, au-del et en dpit de toute philosophie. Or, quelque chose vibre sous les mots dans les Mditations, quelque chose qui ressemble la foi, dont la vibration tire le pome du didactisme o il aurait pu senliser. Cette vibration, avant dtre sonore, est une vibration lumineuse : le premier travail en quoi consiste la mditation lamartinienne est un travail de lumire. Paradoxalement, cest la nuit, la clart des toiles, qui parat tre le moment privilgi pour interroger les cieux, les astres servant dintercesseurs dans la prire inquite du pote :

    Doux reflet dun globe de flamme, Charmant rayon, que me veux-tu ? Viens-tu dans mon sein abattu Porter la lumire mon me ?

    Descends-tu pour me rvler Des mondes le divin mystre ? Ces secrets cachs dans la sphre O le jour va te rappeler ?

    Une secrte intelligence Tadresse-t-elle aux malheureux ? Viens-tu la nuit briller sur eux Comme un rayon de lesprance ?

    Viens-tu dvoiler lavenir Au cur fatigu qui timplore ? Rayon divin, es-tu laurore Du jour qui ne doit pas finir ?

    Mon cur ta clart senflamme, Je sens des transports inconnus, Je songe ceux qui ne sont plus : Douce lumire, es-tu leur me ? ( Le soir )

    Long cheminement du pote des Mditations aux Harmonies : dun recueil lautre sest opre une dcantation qui permet la soif de Dieu de se donner plus libre cours : Voil, voil mon mal ! cest ta soif qui me tue ! [] Je meurs de ne pouvoir nommer ce que jadore. (Novissima verba, in Harmonies) souffrance exprime ici, est essentiellement une souffrance de pote : limpuissance nommer lineffable qui est la source de toute posie et qui donne la posie lamartinienne ses plus vifs accents.

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    VViiggnnyy,, PPoommeess aannttiiqquueess eett mmooddeerrnneess ((11882266))

    Le sacerdoce potique de V. Si V. proclame que la solitude est sainte, sil spare rsolument le spirituel et le politq, sil

    exclut tt engagt ss la monarchie de Juillet, en revanche, il croit, co Hugo et Lamartine, la mission du pote, mdiateur entre le Rel et lIdal, et par l guide dune humanit en progrs. (Bnichou, Les Mages romantiques). Ts les txts mtaphorisent leur manire cette trag universelle du penseur que V. a vcue co un drame perso. En 1822, V. affirme le caractre intime de ses pomes : Mose ou le Masque de fer, hros mtaphysiques, st en mme tps des symboles de linfortune perso du pote. Mose parle ainsi Dieu face face :

    Que vous ai-je donc fait pour tre votre lu ? ( Mose )

    Jai march devant tous, triste et seul dans ma gloire. ( Mose )

    + refrain :

    Seigneur ! jai vcu puissant et solitaire, Laissez-moi mendormir du sommeil de la terre. ( Mose )

    Sagesse dt le pote est investi : une responsabilit lourde porter, une souffrance :

    Pourquoi vous fallut-il tarir mes esprances, Ne pas me laisser homme avec mes ignorances ? ( Mose )

    Hlas ! je sais aussi tous les secrets des cieux ( Mose )

    Oh ! pourquoi de mes yeux a-t-on lev les voiles ? Comment ai-je connu le secret des toiles ? ( Le dluge )

    Le pote ne doit donc pas se plaindre dtre incompris, ni chercher attirer les lecteurs, mais

    accepter une fois pr toutes que cette incomprhension constitue une vraie dignit. Cf. Le mont des oliviers , o le Christ est une figure du pote :

    Cest que la Terre a peur de rester seule et veuve Quand meurt celui qui dit une parole neuve. ( Le mont des oliviers )

    Hugo, Les Contemplations (Livre Ier, Aurore, XXVII) (1856) Etymologie du mot contemplation : le mot renvoie au templum latin, espace carr que les augures dlimitaient dans le ciel et sur terre pour y observer les signes susceptibles de constituer des prsages. : lunivers hugolien est un temple . En ex : deux textes de 2 registres trs diffrents, lun familier, lautre quasiment pique, et en tout cas visionnaire. Culture participative.

    Oui, je suis le rveur ; je suis le camarade Des petites fleurs dor du mur qui se dgrade, Et linterlocuteur des arbres et du vent. Tout cela me connat, voyez-vous. Jai souvent, En mai, quand de parfums les branches sont gonfles, Des conversations avec les girofles ; Je reois des conseils du lierre et du bleuet.

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    Ltre mystrieux que vous croyez muet, Sur moi se penche, et vient avec ma plume crire. Jentends ce quentendit Rabelais ; je vois rire Et pleurer ; et jentends ce quOrphe entendit. Ne vous tonnez pas de tout ce que me dit La nature aux soupirs ineffables. Je cause Avec toutes les voix de la mtempsycose. Avant de commencer le grand concert sacr, Le moineau, le buisson, leau vive dans le pr, La fort, basse norme, et laile et la corolle, Tous ces doux instruments madressent la parole. Je suis lhabitu de lorchestre divin. Si je ntais songeur, jaurais t sylvain. Jai fini, grce au calme en qui je me recueille, force de parler doucement la feuille, la goutte de pluie, la plume, au rayon, Par descendre ce point dans la cration, Cet abme o frissonne un tremblement farouche, Que je ne fais plus mme envoler une mouche ! Le brin dherbe, vibrant dun ternel moi, Sapprivoise et devient familier avec moi, Et, sans sapercevoir que je suis l, les roses Font avec les bourdons toutes sortes de choses ;

    Quelquefois, travers les doux rameaux bnis, Javance largement ma face sur les nids, Et le petit oiseau, mre inquite et sainte, Na pas plus peur de moi que nous naurions de crainte, Nous, si lil du bon Dieu regardait dans nos trous ; Le lys prude me voit approcher sans courroux Quand il souvre aux baisers du jour ; la violette La plus pudique fait devant moi sa toilette ; Je suis pour ces beauts lami discret et sr ; Et le frais papillon, libertin de lazur, Qui chiffonne gament une fleur demi-nue, Si je viens passer dans lombre, continue, Et, si la fleur se veut cacher dans le gazon, Il lui dit : Es-tu bte ! Il est de la maison.

    Les Roches, aot 1835. Hugo, William Shakespeare (1864)

    Tout homme a en lui son Pathmos. Il est libre daller ou de ne point aller sur cet

    effrayant promontoire de la pense do lon aperoit les tnbres. Sil ny va point, il reste dans la vie ordinaire, dans la conscience ordinaire, dans la vertu ordinaire, dans la foi ordinaire, ou dans le doute ordinaire ; et cest bien. Pour le repos intrieur, cest videmment mieux. Sil va sur cette cime, il est pris. Les profondes vagues du prodige lui ont apparu. Nul ne voit impunment cet ocan-l. Dsormais il sera le penseur dilat, agrandi, mais flottant ; cest--dire le songeur. Il touchera par un point au pote, et par lautre au prophte. Une

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    certaine quantit de lui appartient maintenant lombre. Lillimit entre dans sa vie, dans sa conscience, dans sa vertu, dans sa philosophie. Il devient extraordinaire aux autres hommes, ayant une mesure diffrente de la leur. Il a des devoirs quils nont pas. Il vit dans de la prire diffuse, se rattachant, chose trange, une certitude indtermine quil appelle Dieu. Il distingue dans ce crpuscule assez de la vie antrieure et assez de la vie ultrieure pour saisir des deux bouts ce fil sombre et y renouer son me. Qui a bu boira, qui a song, songera. Il sobstine cet abme attirant, ce sondage de linexplor, ce dsintressement de la terre et de la vie, cette entre dans le dfendu, cet effort pour tter limpalpable, ce regard sur linvisible, il y vient, il y retourne, il sy accoude, il sy penche, il y fait un pas, puis deux, et cest ainsi quon pntre dans limpntrable, et cest ainsi quon sen va dans les largissements sans bords de la mditation infinie. (William Shakespeare, I, V, 1) Baudelaire, Petits Pomes en prose (1869)

    Jaime passionnment le mystre, confesse celui qui dit JE dans Mademoiselle Bistouri (XLVII), parce que jai toujours lespoir de le dbrouiller. Je me laissai donc entraner par cette compagne, ou plutt par cette nigme inespre. (XLVII Mademoiselle Bistouri)

    Baudelaire fait ici un aveu fondamental : jaime passionnment le mystre , mais il en biaise la solennit, en proposant une version burlesque de la Divine Comdie de Dante, dans laquelle le pote visionnaire se laisse guider dans lau-del, lEnfer, le Purgatoire et le Paradis, par sa bien-aime, Batrice, qui le chaperonne et laccompagne. Mademoiselle Bistouri , hrone ponyme de ce PPP, nest quun avatar dgrad de Batrice. De mme lassociation du terme familier et trivialement concret de dbrouiller avec le mot mystre est loquente. Le pote, priv dsormais daurole, nest plus un mage, mais quasiment un dtective priv qui essaie de dbrouiller les nigmes du sordide qui accompagne parfois la maladie mentale, comme cest le cas dans ce PPP.

    Il y a une sorte de plaisir mystrieux et aristocratique pour celui qui na plus ni curiosit ni ambition, contempler. ( Le Port ).

    Dans ce texte qui est une variation en prose sur le motif de LInvitation au voyage , cest la posture philosophique ou plutt anti-philosophique du dandy qui est mise en valeur. Deux mots appartenant au champ smantique de la connaissance apparaissent : mystrieux et curiosit . Le Dandy se place sur la ligne de dmarcation au-del de laquelle toute prtention la connaissance est frappe dinanit. En tout cas, dsormais la grandeur de la dmarche philosophique est hors de porte : ce que signale la ngation devant le terme d ambition . Lassociation de ce mot avec celui de curiosit manifeste clairement que cest la possibilit mme dune qute de savoir qui est devenue hors datteinte. Il reste alors pour le Dandy le charme et la volupt du mystre dont il se refuse violer le secret. Au contraire, cest la prservation de ce secret dans la contemplation qui est source de jouissance. Le quteur de vrit hugolien tel quil apparat dans la Fin de Satan a cd la place au rveur pour qui le beau lemporte. Le Beau apparat donc comme tant la rponse approprie face au mystre quand le Vrai se prsente non seulement comme inatteignable, mais inviolable. Il est significatif enfin que cette invitation au voyage reste en quelque sorte amarre au port. Il nest plus besoin de partir pour explorer linfini. Le pote dans la forme de sagesse qui est la sienne peut faire comme le sage stocien : rester sur la rive, labri du port, dans lataraxie de celui qui na plus besoin de sagiter comme les vagues de la mer y compris de sagiter pour comprendre ce qui est inpuisable et doit tre contempl comme tel.

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    CCoorrbbiirree,, LLeess AAmmoouurrss jjaauunneess ((11887733))

    Distance par rapport tte forme de qute mtaphysique. Cf Dcourageux :

    Ce fut un vrai pote : Il navait pas de chant. Mort, il aimait le jour et ddaigna de geindre. Peintre : il aimait son art Il oublia de peindre Il voyait trop Et voir est un aveuglement.

    Songe-creux : bien profond il resta dans son rve Sans lui donner la forme en baudruche qui crve, Sans ouvrir le bonhomme, et se chercher dedans.

    [] Chercheur infatigable : Ici-bas o lon rame, Il regardait ramer, du haut de sa grande me, Fatigu de piti pour ceux qui ramaient bien (Corbire, Les Amours jaunes, Dcourageux )

    Vritable caricature de la posture hugolienne. Un parcours qui ressemble celui de Laforgue dans la distance prise lgard du srieux philosophique et des illusions, du pathos artificiel, qui peuvent accompagner tte ambition potique un peu dmesure.

    Laforgue, des pomes philo aux Complaintes (1885)

    Laforgue publie ses Complaintes en 1885, anne o meurt Victor Hugo. Il a 25 ans. I utilise le nologisme de rvoir quil emprunte peut-tre Hugo1.

    Dans ce sicle dennui, de fivre inassouvie, O lhomme exaspr de dsirs inconnus Plus follement se rue au festin de la vie Et veut jouir, et veut savoir et ne croit plus,

    Et sanglote, le front sur les dalles des temples ! Toi, Sphinx de granit, rien ne remue en tes flancs, Et muet, ternel, sans piti, tu contemples Le mme horizon bleu quil y a vingt mille ans ! (Premiers pomes p. 197) [Lhomme] Pourtant il va toujours, frle dipe des choses, Fou dangoisse devant linconnu de son sort (Premiers pomes p. 217)

    Il ne sonde partout, ignorant de sa route Que les steppes dazur dun silence infini (Premiers pomes p. 218) => Echo de Vigny

    Questionnement mtaphysique prsent dans toute luvre de Laforgue :

    Car jignore tout, moi ! Mon heure est l peut-tre : Je ne sais pas ! Jtais dans la nuit, puis je nais. Pourquoi ? Do lunivers ? O va-t-il ? Car le prtre Nest quun homme. On ne sait rien ! Montre-toi, parais, Dieu, tmoin ternel ! Parle, pourquoi la vie ? Tout se tait ! Oh ! lespace est sans cur ! Un moment ! Astres ! Je ne veux pas mourir ! Jai du gnie ! Ah ! redevenir rien irrvocablement ! (Premiers pomes, Eclair de gouffre , p. 247)

    1 Le nologisme est de Laforgue, dans le texte liminaire de ses Complaintes parues en 1885 : Prludes autobiographiques . Hugo lui-mme emploie ce terme dans les Misrables pour dsigner la chambre de M. Madeleine, I, V, 3, p. 132.

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    Hritage romantique : Statut noble de la posie, vocation leve penser, philosopher. Echec de la philosophie, de lentreprise des quteurs de vrit (cf. FS, Hugo). Drame de tout le sicle : perte de la foi.

    Jai appris, et tout comme autant de riches langues Les philosophies et les successives croix ; Mais pour mener ma vie au Saint-Graal sans gangue, Nulle na su le mot, le Ssame-ouvre-toi, Clef de lendroit.

    Oui, dilapid ma jeunesse et des bougies A regalvaniser le fond si enfantin De nos plus immmoriales liturgies, Et perdu ce jeu de purs et srs instincts, Tout mon latin. (Fleurs de bonne volont, XXV Impossibilit de linfini en hosties , p. 121)

    Llgie gouailleuse La faim dInfini justifie les moyens. (LImitation de Notre-Dame la Lune, La lune est strile , p. 55)

    Drision // mtaphysique. Frle svt le blasphme (rcriture du Notre Pre, p. 41). Ecriture provocante, insolente. Irrvrence :

    H ! Notre-Dame des gens sols, Des filous et des loups-garous ! (Les Complaintes, Complainte de cette bonne lune , p. 52)

    Drision : Puis, fou devant ce ciel qui toujours nous bouda, Je rvais de prcher la fin, nom dun Bouddha ! ( Complainte de cette bonne lune , p. 38)

    Quand on a du dieu sous la peau, On cuve a sans dire mot. ( Complainte sur certains temps dplac , p. 114)

    Vanit du savoir humain (rfces lEcclsiaste +srs reprises dans les 1ers pomes) La science, outre quelle ne peut rien savoir, Trouve, tels les ballons, lIrrespirable Noir. ( Complainte du sage de Paris , p. 142)

    Travestisst burlesque de la dmarche philosophique // rosse qui marche :

    Vers quel but ? Sous quel matre ? elle ne le sait trop, Car le fouet du dsir ne veut pas quelle y rve !

    Trimer pour lInconnu (lincertain !) est son lot, Un jour, plus bonne rien, il faudra quelle crve Sans avoir vu son Dieu, sans emporter le Mot. (Premiers pomes, Hue, Carcan , p. 292)

    Abandon de la philosophie au profit de lartisanat potique. On passe du registre du dire celui du faire, + humble :

    []Des casiers de bureau, le Beau, le Vrai, le Bien ; Rime et sois grand, la Loi reconnatra les siens. ( Complainte du sage de Paris , p. 142)

    Autre rponse : celle du gentleman, du dandy : [] Mais sans rite emprunt, car cest bien malsant, Sirote chaque jour ta tasse de nant. ( Complainte du sage de Paris , p. 144)

    Autre rponse encore : se crer un monde dhabitudes, co Verlaine. Cf. Buisine, Verlaine, Histoire dun corps, Taillandier,

    Moi je veux vivre monotone. ( Complainte dun certain dimanche p. 59) [refrain]

    Mlancolie se prsente chez Laforgue comme une souffrance du vide : il y a un trou dans le rel. Il y a un trou en moi. Je ne suis jamais labri dy basculer. Inscurit radicale.