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LA GAZETTE DES ARCHIVES N° 1 « Un voyage imaginaire dans l’histoire de l’Art » PIERRE FREY Paris

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Page 1: LA GAZETTE DES ARCHIVES N° 1 « Un voyage imaginaire dans lhistoire de lArt » PIERRE FREY Paris

LA GAZETTE

DES ARCHIVES

N° 1

«  Un voyage imaginaire

dans l’histoire de l’Art »

PIERRE FREYParis

Page 2: LA GAZETTE DES ARCHIVES N° 1 « Un voyage imaginaire dans lhistoire de lArt » PIERRE FREY Paris

1-Zoom sur…les palempores indiens

Les palempores sont des panneaux composés d’un champ central présentant un arbre de vie ou un motif répétitif, cernés d’une bordure assez large au motif floral ou animalier. Notre collection en compte dix-sept dont sept ont fait l’objet d’une réédition sous la marque Braquenié. Les premières mentions de « courtepointe en indienne ou indiane » en France datent de 1580-1587. La création de la Compagnie française des Indes orientales en 1664 par Colbert participe activement à la diffusion en France de ces étoffes légères et colorées qui connaissent dès lors un grand succès.

Les textiles représentent plus de 50% des marchandises transportées par les navires : des toiles blanches de diverses qualités ainsi que des toiles aux motifs polychromes fleuris destinés à l’ameublement ou l’habillement. Les toiles imprimées se présentent sous deux formes : des pièces d’une vingtaine de mètres ou des panneaux, nommés palempores.

Marque d’une compagnie des Indes (?) Marque sur l’envers d’un palempore

Ceux-ci sont utilisés en tapisserie murale ou en dessus de lit. Très prisés dès la fin du XVIIe siècle, leur importation augmente au cours du temps : 700 en 1682, 2406 en 1683 et 7286 en 1784.

Toile de coton peinte et teinte, 18e siècle

Palempore, toile de coton peinte et teinte, 18e siècle

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Palempore, toile peinte et teinte 19e siècle

Afin de satisfaire le goût des occidentaux, la compagnie a fait imprimer des toiles expressément pour ce marché. C’est la raison pour laquelle certaines indiennes présentent des éléments de décor français.

Toile peinte et teinte, 18e siècle, IndeMotif à la dentelle typique des soieries européennes du début du 18e siècle.

Palempore utilisé comme courtepointe18e siècle, Inde

Panneau au cyprès, 18e siècle, IndePanneau pour le marché persan

Face à cet enthousiasme, les fabricants d’étoffes traditionnelles en laine et soie se plaignent de la concurrence. Malgré l’arrêt du Conseil d’Etat du 26 octobre 1686 interdisant la fabrication, le commerce et l’usage des toiles imprimées, l’attrait pour ces belles étoffes ne diminue pas et les fraudes se multiplient.

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Face à l’inefficacité de cette mesure, la prohibition est levée en 1759. Sur le territoire français, s’élève alors un grand nombre de manufactures d’impression sur étoffes qui reproduisent ou s’inspirent des modèles indiens. Cette pratique perdure jusqu’au XXe siècle.

Fleurs étranges et papillons, vers 1787Toile imprimée à la planche de bois, manufacture françaiseProche du modèle imprimé à Jouy-en-JosasDocument reproduit dans la collection Braquenié sous les ref B1742 et B1811

Saintonge, 19e siècle Toile imprimée en France, Braquenié

Rochecotte, vers 1950 Toile imprimée en France, Pierre Frey

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2-Zoom.. sur les peaux de bêtes

L’homme a découvert très tôt les qualités protectrices de la fourrure. Au cours du temps, son utilisation a pris une signification sociale. Entre le 14e et le 17e siècle, plusieurs lois somptuaires régissent l’utilisation des peaux de bêtes. L’hermine est réservée à la famille royale. De nombreux portraits royaux en témoignent. Au 18e siècle, des explorations scientifiques et impérialistes sont menées en Afrique et Asie. Les Européens découvrent alors de nouvelles espèces végétales et animales. Louis XIV fait venir un zèbre en France. Ces découvertes engendrent un questionnement sur l’homme et sa place dans le règne animal. Elles provoquent, de plus, un engouement pour les motifs copiés des peaux d’animaux sauvages. Alors que jusqu’alors, les femmes portaient des robes gansées de fourrures, les dessinateurs d’étoffes les intègrent alors dans leurs créations. Le motif léopard devient très populaire. Ces bandes de fourrures gagnent peu à peu les tapis.

Archive Braquenié, Gouache tapis

Modèles pour robes, 18e siècle

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La nature a produit des peaux qui répondent à des besoins de survie, de communication. Leurs qualités esthétiques sont mis en lumière par les stylistes. Ces derniers considèrent l’univers animalier comme une source de matériaux bruts, comme un catalyseur d’inspiration. En effet, les effets graphiques sont variés à l’infini. A ces effets visuels, s’ajoute parfois une connotation symbolique. En effet, dans l’imaginaire collectif, les fourrures ou peaux véhiculent des notions de richesse, de prestige, de luxe, de décadence, de pouvoir, de sexualité. Chaque animal est associé inconsciemment à des qualités : l’indépendance du tigre, la gentillesse naturelle de la girafe ou du zèbre, la beauté saisissante et la férocité du python, etc….

Kenya, Pierre Frey, 1971

Python, Archives Boussac

Panthère, Boussac Girafe, Boussac

Tigre, Boussac

 Ces motifs très graphiques peuvent être utilisés aussi bien dans l’habillement que dans l’ameublement.

Zèbre, 1971tissu Pierre Frey

Ensembles, 1966 Créateur Rudi Gernreich

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 Cette fascination pour le monde animalier sauvage s’exprime de façon cyclique dans l’univers de la mode et de la décoration. Aujourd’hui encore, chaque éditeur se doit d’avoir dans ses collections des modèles de ce genre. Ils permettent de donner une image un peu décalée à des intérieurs classiques ou de jouer avec des effets visuels très graphiques.

 Au 19e siècle, l’orientalisme marqué par un intérêt pour les cultures du Moyen-Orient, la recherche de l’exotisme, accélère l’utilisation de ces motifs dans la décoration intérieure. Les salons présentent des tapis persans, des peaux de tigres et autres fourrures jetées sur les fauteuils. Le coût important de ces peaux et la faveur de ces motifs ont engendré la création de copies tissées moins onéreuses. Braquenié proposent plusieurs modèles de moquettes inspirées de peaux animales.

Moquette Braquenié, 4133BRMoquette Braquenié, 1386BR

Salon maison et objet, janvier 2008

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Nos collections de tissus sont souvent une invitation au voyage sur la route de la soie en Orient. Je me suis alors posée la question de la place de l’Orient dans nos archives textiles. La collection de moquettes Braquenié constitue un bon sujet d’étude.

L’inventaire des moquettes Braquenié vient de s’achever. Cette collection au sein des archives est importante par le nombre et la diversité stylistique des pièces conservées. 1582 documents ont été répertoriés dont 368 de style oriental. En Europe, la moquette est utilisée comme revêtement de sol depuis le XVIe siècle mais de façon sporadique et par les plus riches. Le premier métier à tisser des moquettes à velours coupé est breveté en 1741 à Wilton d’où le terme moquette Wilton. Les innovations techniques du début du XIXe siècle modifient la fabrication des moquettes et démocratisent ce revêtement de sol. Les fabricants de moquettes vont alors les couvrir de motifs empruntés au répertoire iconographique du tapis. C’est donc tout naturellement que l’on retrouve des motifs de l’Orient, berceau de l’art du tapis.

L’étude des différents modèles a permis de déterminer pour un certain nombre leur origine géographique. Plusieurs archives moquettes présentent des motifs issus des régions signalées par un point sur la carte.

3-Zoom.. sur les moquettes orientales

motif du Caucase Daghestan

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Motifs arménienLe tapis arménien type est le tapis Koubah. Les motifs géométriques s’encadrent dans des compartiments à la manière des cloisonnés chinois.

Motif du TurkestanLe gul, mot persan siginfiant fleur, constitue le décor de base de la plupart des tapis du Turkestan. Son motif de forme octogonale est celui bien connu des boukharas.

Motif turcLes tapis Lotto à effet de grille ont reçu le nom du peintre vénitien Lorenzo Lotto (1480-1556) qui les a reproduits 2 fois dans ses œuvres. Cette moquette s’inspire de ce type de motif.

Motif persan Parmi les plus beaux tapis figurent les tapis persans dont l’origine se situe au XVIe siècle. Ils présentent une grande variété de décor : palmes cachemire, décor vases, tapis à médaillons, décor de feuilles en forme de faucilles, etc…Voici un exemple de décor vase.

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4-Zoom.. Sur les cieux

L’année 2009 a été déclarée « année mondiale de l’astronomie » par l’UNESCO, l’occasion pour nous de découvrir l’impact de cette discipline sur la création textile.

La conquête de l’air Dessin de Herbin1943

L’astronomie est la science de l’observation des astres et cherche à expliquer leur origine, leur évolution et aussi l’influence qu’ils exercent sur notre vie. Attesté dès l’âge de bronze, l’intérêt pour les astres traduit une quête spirituelle : « Qui sommes-nous, d’où venons nous, où allons-nous ? ». Depuis toujours, l’humanité a prêté aux astres une dimension mystique, magique qu’ils conservent encore aujourd’hui.

A ses débuts, l’astronomie consiste seulement en l’observation et la prédiction des mouvements des objets célestes visibles à l’œil nu : les mayas sont les premiers à mentionner une éclipse de lune en 3380 avant JC.

Les premières théories sur l’univers datent du 5e siècle avant JC et ont pour principe fondamental que la Terre est un monde changeant alors que le ciel est le siège de l’harmonie et de la perfection. Aristote (-384/-322), philosophe grec, détermine l’univers en 4 catégories : la Terre, l’Eau, le feu et l’Air.

Les quatre éléments, manufacture Hartmann, Munster, vers 1810

Ptolémée (vers 90/160) émet une nouvelle théorie selon laquelle les astres tournent autour de la Terre. Cette conception de l’univers se maintient jusqu’à la fin du 15e siècle. Au XVIe siècle, Copernic établit que le soleil est au centre du système planétaire. Cette découverte est confirmée par les observations à la longue vue de Galilée.

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Durant le siècle des lumières, les progrès de l’astronomie ont bouleversé la conception du ciel et de l’univers. Le public cultivé brûle de partager les découvertes les plus récentes. Cet enthousiasme perdure aux XIXe et XXe siècles. Les Arts Décoratifs se font l’écho de cet engouement par des créations inspirées de l’univers, révélant par la même occasion ses qualités esthétiques. Le textile n’échappe pas à cette règle.

En voici quelques exemples :

Echantillons extraits de recueils textiles de la fin du XIXe siècle

Apollo, 1971, Création Pierre FreyCe dessin reproduit les premières photos de la surface lunaire.

Projets de tapis Lauer : -Les quatre éléments-Les signes du ZodiaqueLe Zodiaque est la zone des cieux autour de l’écliptique. Il est traditionnellement divisé en 13 constellations correspondant à 12 signes. Jusqu’au XVIIe siècle, l’astrologie est très liée à l’astronomie.