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SAINT-MARTIN SINT-MAARTEN N o 11 septembre - octobre 2010 ALI TÜR Au siècle dernier à Saint-Martin Last century in Saint-Martin Modernisme à Saint Martin Modernism in Saint Martin

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La revue patrimoniale mensuelle de l'île de Saint Martin/Sint Maarten The Saint Martin/Sint maarten island monthly heritage review

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Page 1: HERITAGE 11

SAINT-MARTIN

SINT-MAARTEN

No 11 septembre - octobre 2010

ALI TÜR

N

Au siècle dernier à Saint-MartinLast century in Saint-Martin

Modernisme à Saint MartinModernism in Saint Martin

Page 2: HERITAGE 11

ethnik tendancycollection de vêtements

en vente exclusive au Musée de Saint-Martin

new fashion wearavailable only

at Saint-Martin Museum

Page 3: HERITAGE 11

Already one year has passed by since the Hope Estate Archaeological Association decided to publish your “Heritage” ma-gazine monthly in order to freely supply everyone with a few pieces of Saint Martin’s history. Our goal was to educate the population and supply each person with documents, photographs, manuscripts, maps and drawings, often hitherto unpu-blished, constituting an integral part of our common patrimony. Since then, a background movement has emerged in our small society, especially in the school environment in which educational projects based on our history or our patrimony de-velop in the primary schools, and at the secondary education levels. Many cultural associations also ask for our help to set up projects linked with a better knowledge of our past. The restoration of our architectural patrimony and the highlighting of historical sites, are part of our elected representatives’ preoccupations today. So much more remains to be done. We have, in the matter, a considerable lateness to catch up. We still hope that speeches will be followed by deeds. Our aim is especially to contribute, through our activities, to the creation of areas of attraction and employment linked to cultural animation. This month, we invite you to an encounter with Ali Tür, a colonial Architect, passing through our island in the early 1930s. He was the fi rst to use reinforced concrete in the French West Indies. Our second subject immerses us, with some nostalgia, in daily life on Saint Martin during the fi rst half of the 20th century. This article was possible thanks to the participation of our elders who are the only ones capable of passing on their popular history, distant from offi cial administrative reports. We thank them warmly for their contribution. A few days away from November 11th, all the Heritage team wishes you a happy Saint Martin’s Day, the fi rst for the country Sint Maarten, 1 month and 1 day after the already historical date 10-10-10. C. HenocqHERITAGE

Saint-Martin/Sint MaartenEditeur :

Association Archéologique Hope Estate

BP 507, Marigot, 97150 Saint Martin

0690 56 78 92E-mail : [email protected]

Directeur de publication: C. HénocqRédaction : Christophe Hénocq

Photographies : Hervé Baïs / A.A.H.E.Christian Stouvenot

Service commercial : 0690 56 78 92

Maquette et Graphisme :

0690 40 89 43

Traduction : I. Fenoll

Impression : PRIM Caraïbes05 90 29 44 87

ISSN 2104-8932www.museesaintmartin.e-monsite.com

La reproduction même partielle de tout article, photo et publicité parus dans HERITAGE est interdite sauf accord. La loi du 11 mars 1957 interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur est illicite (article L.122-4 du code de la propriété intellectuelle).

Voilà un an que l’Association Archéologique Hope Estate a décidé de publier à un rythme mensuel votre revue «Heritage» afi n d’offrir à tous, gratuitement, quelques morceaux de l’histoire de Saint Martin. Notre but était d’éduquer la population et de fournir à chacun des documents, photographies, manuscrits, cartes et plans, souvent inédits, faisant partie intégrante de notre patrimoine commun. Il se produit depuis un mouvement de fond dans notre petite société, notamment en milieu scolaire où les projets pédagogiques ayant pour thème notre histoire ou notre patrimoine fl eurissent dans les écoles primaires, au collège et au lycée. De nombreuses associations culturelles sollicitent également notre aide pour la mise en place de projets liés à une meilleure connaissance de notre passé. La restauration de notre patrimoine architectural et la mise en valeur des sites historiques, font aujourd’hui partie des préoccupations de nos élus. Il reste encore tant à faire. Nous avons en la matière un retard considérable à rattraper. Il nous reste à espérer que les discours seront suivis de faits. Notre objectif est surtout de contribuer, à travers nos activités, à la création de pôles d’attraction et d’emplois liés à l’animation culturelle. Ce mois-ci, nous vous proposons de découvrir Ali Tür, Architecte colonial, de passage dans notre île au début des années 30. Il sera le premier à utiliser le béton armé dans les Antilles françaises. Notre second sujet nous plonge, non sans un brin de nostalgie, dans la vie quotidienne à Saint Martin pendant la première moitié du 20ème siècle. Cet article a été réalisé avec le concours de nos ainés qui sont les seuls à pouvoir nous transmettre leur histoire populaire, loin des rapports administratifs offi ciels. Nous les remercions chaleureusement de leur contribution. A quelques jours du 11 novembre, toute l’équipe de Heritage vous souhaite un happy Saint Martin’s Day, le premier du pays Sint Maarten, 1 mois et 1 jour après la date déjà historique du 10-10-10.

SOMMAIRE ALI TÜR OU L’INTRODUCTION DE L’ARCHITECTURE MODERNISTE A SAINT MARTIN

ALI TUR OR THE INTRODUCTION OF MODERNIST ARCHITECTURE ON SAINT MARTIN

Pages 2 à 8

SAINT MARTIN 50 ANS AVANT LE DEVELOPPEMENT DU TOURISME

SAINT MARTIN 50 YEARS BEFORE THE DEVELOPMENT OF TOURISM

Pages 9 à 13

EDITODistribue par:CARIBBEAN LIQUORS & TOBACCO B.V.8 Buncamper Road - Phillipsburg - St. MaartenTel: (599) 542 2140 - Fax: (599) 542 2241Email: [email protected]

Voilà un an que l’Association Archéologique Hope Estate a décidé de publier à un rythme mensuel votre revue «Heritage»

Page 4: HERITAGE 11

Governor Tellier invited Ali Tür to rebuild Guadeloupe

September 12th, 1928; a vio-lent hurricane struck Guade-loupe head on. Grande Terre and Pointe-à-Pitre were completely destroyed. The wooden houses and town houses built in the 19th century had given way. Within 20

hours, the hurricane made more than 300 casualties in the city, 1500 in all of Guadeloupe. Rapidly, basic products and imported food became scarce and the rural population rus-hed into “la Pointe” (Pointe-à-Pitre) looking for employment, food and shelter. News of the catastrophe reached France and food supplies were unloaded onto the city’s docks. Everything needed to be rebuilt. The festivi-ties of the tricentennial of the French colonisation of Guadeloupe were plan-ned in 1935 and time was of the essence. Guade-loupe was then under the authority of Governor Tel-lier, previously attached to the Ministry of Colonies.

End of December 1928, Tellier met with Ali Tür in Paris. The two men knew

each other and Ali Tür had been placed on the list of ten architects of the Ministry of Colonies since 1925. Ali Tür was the son of a French public servant of the Ce-vennes region, his mother coming from the region of Alsace. He was born in Tu-nisia in 1889. He studied at the Paris School of Fine Arts and was infl uenced by Auguste Perret, but during the First World War, as of September 5th, 1914, he was sent to the army front lines for 4

years. Having reached 30 years of age, he ended his studies and opened an architectural offi ce in Paris. He worked particularly in the rebuilding of housing after the war and received several awards for his architectural works (Destor Award, Decoration Award from the Rougevin Foundation). Governor Tellier then asked him if he could take part in the reconstruction of Guadeloupe.

1929 Ali Tür disembarked in Guadeloupe

Ali Tür disembarked in Guade-loupe on March 22nd, 1929. He was fi rst mandated to rebuild the administrative buildings of

Basse-Terre, the main adminis-trative centre of the colony. All in all, France decided to devote a budget of 40 million Francs to the reconstruction. Due to this,

ALI TUR OR THE INTRODUCTION OF MODERNIST ARCHITECTURE

ON SAINT MARTIN

Le Gouverneur Tellier Invite Ali Tür à reconstruire la Guadeloupe

Le 12 septembre 1928, un cyclone violent frappe la Guadeloupe de plein fouet. La Grande-Terre et Pointe-à-Pître sont complètement détruits. Les cases en bois et mai-sons de ville construite au 19ème

siècle n’ont pas résisté. En 20 heures, l’ouragan aura fait plus de 300 victimes dans la ville, 1500 sur toute la Guadeloupe. Rapidement, les produits de première nécessité et la nourriture importée se font rares et la population rurale affl ue à «la Pointe» (Pointe-à-Pître) à la re-cherche d’un emploi, de nourriture et d’un abri. La nouvelle de la ca-tastrophe est parvenue en France et l’aide alimentaire est débarquée sur les quais de la ville. Tout est à reconstruire. Les festivités du tri-centenaire de la colonisation de la Guadeloupe par les français

sont prévues en 1935 et le temps presse. La Guadeloupe est alors sous l’autorité du Gouverneur Tel-lier, autrefois rattaché au ministère des colonies. Fin décembre 1928, Tellier rencontre Ali Tür à Paris. Les deux hommes se connaissent et Ali Tür a intégré la liste des dix architectes du ministère des colonies depuis 1925. Ali Tür est

le fi ls d’un fonctionnaire français d’origine cévenole, sa mère est alsacienne. Il est né en Tunisie en 1889. Il suit des études à l’école des Beaux Arts de Paris et subit l’infl uence d’Auguste Perret, mais pendant la première guerre mon-diale, dès le 5 septembre 1914, il est envoyé au front pendant 4 ans. A 30 ans, il termine ses études et ouvre une agence d’architecture à Paris. Il travaille notamment à la reconstruction de logements après la guerre et reçoit plusieurs prix pour ses œuvres architecturales (Prix Destor, Prix de la décoration

Rue Léonard, Pointe à Pitre au lendemain du cyclone du 12 septembre 1928Rue Leonard, Pointe a Pitre the day after the hurricane September 12th, 1928

ALI TÜR OU L’INTRODUCTION DE L’ARCHITECTURE MODERNISTE

A SAINT MARTIN

2

1928

Louis Constant Fleming maire de Saint Martin.Louis Constant Fleming mayor of Saint Martin.

Oct. 1929 Grand krach fi nancier à Wall Street provoqué par la spécula-tion boursière.Great fi nancial crash on Wall Street provoked by stock exchange speculation.

31 juil./july 1932

Si les matériaux de base utilisés dans la construction de l’habitat traditionnel étaient la pierre, le bois et la chaux jusqu’au début du 20ème siècle, le début des années 1930 verra l’introduction du béton sur l’île de Saint Martin. A cette époque, l’architecte Ali Tür, rattaché au ministère des colo-nies, fut un précurseur dans la construction des premiers bâtiments modernes à Saint Martin.

If, until the early 20th century, the basic materials used for the construction of traditional housing were stone, wood and whitewash, the start of the 1930s gave way to the introduc-tion of concrete on the island of Saint Martin. At this time, the architect Ali Tür, attached to the Ministry of the Colonies, was a forerunner in the construction of the fi rst modern buil-dings on Saint Martin.

hours, the hurricane made more than 300 casualties in the city, 1500 in all of Guadeloupe. Rapidly, basic products and imported food became scarce and the rural population rus-hed into “la Pointe” (Pointe-à-Pitre) looking for employment, food and shelter. News of the catastrophe reached France and food supplies were unloaded onto the city’s docks. Everything needed to be rebuilt. The festivi-ties of the tricentennial of the French colonisation of Guadeloupe were plan-ned in 1935 and time was of the essence. Guade-loupe was then under the authority of Governor Tel-lier, previously attached to the Ministry of Colonies.

ALI TUR en 1946ALI TUR in 1946

12 sept. 1928

La Guadeloupe est frappée par un cyclone suivi d’un raz de marée. 1928 Guadeloupe is struck by a hurricane followed by a tidal wave.

22 mars/march 1929

Ali Tür débarque en Guadeloupe.Ali Tür disembarks in Guadeloupe.

Sept. 1930 En Allemagne, les Nazis deviennent le second parti der-rière les sociaux-démocrates. In Germany, the Nazis become the second party behind the social-democrats.

1931La crise économique qui a frappé les Etats-Unis en 1929 atteint la France.The economic crisis having struck the United States in 1929 reaches France.

1931

Exposition coloniale au Bois de Vincennes (33 millions de visiteurs).Colonial exposition at the Bois de Vincennes (33 million visitors).

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de la fondation Rougevin). Le Gou-verneur Tellier lui propose alors de participer à la reconstruction de la Guadeloupe.

1929 Ali Tür débarque en Guadeloupe

Ali Tür débarque en Guadeloupe le 22 mars 1929. Il est tout d’abord mandaté pour reconstruire les bâ-timents administratifs de Basse-Terre, chef lieu de la colonie. Au total, la France a décidé de consa-crer un budget de 40 millions de Francs à la reconstruction. On lui doit le palais du gouverneur (ac-tuellement la préfecture), le palais de justice et celui du conseil gé-néral. Les communes et dépen-dances sont également amenées à proposer des contrats à Ali Tür.

Le crédit Foncier fi nancera l’em-prunt des communes à hauteur de 50 millions de Francs. Ainsi, les œuvres architecturales d’Ali Tür se retrouvent aujourd’hui disséminées partout sur l’archi-pel de la Guadeloupe. Il a des-siné par exemple les plans de nombreuses mairies (Lamen-tin, Pointe Noire, Capesterre-Belle-Eau, Petit Bourg), églises (Sainte Anne, Baie Mahault), mais aussi des casernes et des écoles. En tout, ce sont plus de cent bâtiments qui seront construits jusqu’en 1937. La tâche est immense et la main d’œuvre locale, plus habituée à l’utilisation de matériaux de construction traditionnels tels que la pierre et le bois, doit être formée et encadrée. Ali

the governor’s palace (presently the prefec-ture), the court house and the regional council buildings were erected. The communes and ar-chipelago islands were also brought to propose contracts to Ali Tür. The Crédit Foncier fi nanced the loan for the com-munes to an extent of 50 million Francs. Thus, Ali Tür’s architectural works are found today dissemi-nated everywhere over the Guadeloupe archi-pelago. For example, he drew up the plans for many town halls (La-

mentin, Pointe Noire, Ca-pesterre-Belle-Eau, Petit Bourg), churches (Sainte

Anne, Baie Mahault), but also army barracks and schools. All in all, more than one hundred buildings were built until 1937.

The task was huge and the local manpower, more familiar with the use of traditional building mate-rials such as stone and wood, needed to be trained and direc-ted. Ali Tür chose to import a cer-tain number of Metropolitan exe-cutives to head his construction sites. In 1935, the engineer Ro-bert, head of public works wrote: “It is with this workforce, unedu-cated at fi rst, but which adapted very fast, that all the major works were carried out. One can judge by the results obtained, of the importance of the transformation brought about these past years in the professional value of the local

workmen.”

Modern architecture taking the climate into consideration

Ali Tür was to rebuild in the shortest possible time, for as little as possible, in a country deprived of building industry and specia-lized manpower, a series of buil-dings corresponding as closely as possible to the climatic conditions of this tropical region. Most of the materials he used came from the German war debt, paid partly in kind to France and dispatched to the Pointe-à-Pitre docks. The tra-ditional buildings, often destroyed by the hurricanes, earthquakes and fi res needed to be replaced by buildings made of reinforced concrete. Ali Tür, both under the infl uence of the Art Deco move-ment and Northern African archi-tecture chose reinforced concrete post-beam structures fi lled with concrete blocks and cement mor-

tar rendering as his building pro-cess. The roofi ng was made of fl at terrace-slabs in order to bet-ter withstand hurricanes. He also took into consideration the period of sunshine and ventilation fac-tors: “These two necessities have in great part conditioned the archi-tecture of recovering Guadeloupe. On the one hand, I always took care to position all my buildings in such a manner that the breeze could pass through them from side to side: I only had rooms open on both sides towards the outdoors, I made a point of replacing the door panels, the window glass panels and even certain parts of indoor

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31 juil./july 1932 Elections du Reichstag en Allemagne. Les Nazis sont le premier parti. Elections at the Reichstag in Germany. The Nazis are the fi rst party.

the governor’s palace (presently the prefec-ture), the court house and the regional council buildings were erected. The communes and ar-chipelago islands were also brought to propose contracts to Ali Tür. The Crédit Foncier fi nanced the loan for the com-munes to an extent of 50 million Francs. Thus, Ali Tür’s architectural works are found today dissemi-nated everywhere over the Guadeloupe archi-pelago. For example, he drew up the plans for many town halls (La-

Mairie de BaillifBailiff town hall

Palais du Conseil Général de Basse-TerreBasse-Terre General Council

Palais de justice de Basse-TerreBasse-Terre court house

8 nov. 1932 Franklin Roosevelt élu président des Etats-Unis.Franklin Roosevelt elected president of the United States.

1933Himmler ouvre un camp d’internement à Dachau.Himmler opens an intern-ment camp at Dachau.

1933Victoire de la droite en Espagne.Victory of the rightist party in Spain.

30 jan. 1933 Hitler, nommé chancelier du Reich par le Président de la République de Weimar, le maréchal Hindenburg.Hitler, named Chancellor of the Reich by the President of the Republic of Weimar, Field Marshall Hindenburg.

27 fév./feb. 1933

Incendie du Reichstag réalisé par les Nazis. Dix mille mili-tants communistes et socialistes sont arrêtés. Fire at the Reichstag carried out by the Nazis. Ten thousand Communist and Socialist militants were arrested.

Page 6: HERITAGE 11

partitions by movable louvers po-sitioned according to the inhabi-tants’ needs. On the other hand, as often as the available fi nancing enabled me to, I built covered gal-leries or canopies sheltering fa-çades or large windows from the direct rays of sunlight.” In these buildings, rooms are large, roof extensions accentuate the sculp-tural effect, reinforced concrete posts decorate the façades with columns. The openings are very orderly. Some buildings comprise fountains and patios. Ali Tür also designed furniture and centre lights that he signed with his ini-

tials and of which certain copies are still preserved in the court house and in the Regional Council of Basse-Terre.

Ali Tür on Saint Martin

On Saint Martin, Louis Constant Fleming was elected mayor in 1928, the very year during which the devastating hurricane passed over Guadeloupe. L.C. Fleming called upon Ali Tür who drew up the plans for the court house and the previous Marigot hospital. Re-garding the fi rst building the fa-çades are still very similar to their original aspect, in spite of some modifi cations regarding the woo-den shutters on the fi rst storey and some extensions behind the

building. The main entrance of the court house strikingly resembles that of the Pointe Noire town hall, in Guadeloupe. The façade offers three wide and tall doors framed

Tür choisit d’importer un certain nombre de cadres métropolitains pour diriger ses chantiers. En 1935, l’ingénieur Robert, chef des travaux publics écrit : «C’est avec cette main d’œuvre inéduquée au début, mais qui s’est adaptée très vite, que tous les grands travaux ont été exécutés. On peut juger par les résultats obtenus, de l’impor-tance de la transformation appor-tée ces dernières années dans la valeur professionnelle des ouvriers locaux.»

Une architecture moderne tenant compte du climat

Ali Tür doit reconstruire au plus vite, le plus économiquement possible, dans un pays privé d’in-dustrie du bâtiment et de main d’œuvre spécialisée, une série d’édifi ces correspondant le mieux possible aux conditions de climat de cette région des tropiques. Une grande partie des matériaux

qu’il utilisera proviendront de la dette de guerre allemande, payée en partie en nature à la France et acheminée sur les quais de Pointe-à-Pître. Les constructions tradition-nelles, souvent détruites par les cyclones, tremblements de terre et incendies devront être remplacées par des bâtiments en béton armé. Ali Tür, à la fois sous l’infl uence du courant Art Déco et de l’archi-tecture d’Afrique du Nord choisit comme procédé de construction les structures poteaux-poutres en béton armé avec remplissage en agglomérés et enduits de mor-tier de ciment. Les toitures sont en dalles-terrasses plates afi n de mieux résister aux cyclones. Il tient compte également des fac-teurs d’ensoleillement et de ven-

tilation : «Ces deux nécessités ont conditionné en grande partie l’architecture de la Guadeloupe renaissante. D’une part, j’eus tou-jours soin d’orienter tous mes bâti-ments de manière à ce qu’ils puis-

sent être traversés de part en part par la brise : je n’eus ja-mais que des pièces ouvertes sur leurs deux faces vers l’ex-térieur, j’eus soin de remplacer les pan-neaux de portes, les vitres des fenêtres et même certaines parties de cloisons intérieures par des lames de per-siennes orientables

suivant les besoins. D’autre part, je construisis, autant

que le permirent les crédits dis-ponibles, des galeries couvertes ou des auvents qui abritent des façades ou des baies, des rayons directs du soleil.» Dans ces édi-fi ces, les volumes sont grands, les débords de toiture accentuent l’effet sculptural, les poteaux en béton armé décorent les façades de colonnes. Les ouvertures sont très ordonnées. Certains bâti-ments comportent des fontaines et des patios. Ali Tür dessine éga-lement des meubles et des lustres qu’il signe de ses initiales et dont certains exemplaires sont encore conservés dans le palais de justice et au Conseil Général de Basse-Terre.

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23 mars/march 1933 Hitler est nanti des pleins pouvoirs par le Reichstag. L’Allemagne devient une dictature légale.Hitler is entrusted full powers by the Reichstag. Germany becomes a legal dictatorship.

30 juin/june 1934

Projet type pour bâtiment administratif, A. Tür, dessin de l’architecte, Ed. Albert Morancé, ParisModel project for an administrative building, A. Tür, architect’s drawing, Albert Morancé Editions, Paris

Gendarmerie,A. Tür, Ed. Albert Morancé, ParisModel Police station, A. Tür,

Albert Morancé Editions, Paris

de part en part par la brise : je n’eus ja-mais que des pièces ouvertes sur leurs deux faces vers l’ex-térieur, j’eus soin de remplacer les pan-neaux de portes, les vitres des fenêtres et même certaines parties de cloisons intérieures par des lames de per-siennes orientables Gendarmerie,A. Tür, Ed. Albert Morancé, Paris

Salle d’audience du Palais de justice de Pointe à Pitre, A. TürPointe a Pitre court house courtroom, A. Tür

11 mai/may 1933

Bûcher des livres en Allemagne.The books are bur-ned in Germany.

1934Les dernières troupes américaines quittent Haïti mais la présence des États-Unis demeure très forte.The last American troops leave Haiti but the presence of the United States remains very strong.

26 jan. 1934 XVIème Congrès pu parti, le «congrès des vainqueurs». Staline est élu à bulletin secret dernier du Comité.16th party Congress, the «congress of victors». Stalin is elected by secret vote last of the Committee.

avril/april 1934

Création de la Gestapo en Allemagne.Creation of the Gestapo in Germany.

Page 7: HERITAGE 11

Ali Tür à Saint Martin

A Saint Martin, Louis Constant Fleming a été élu maire en 1928, année précise du passage du cy-clone dévastateur en Guadeloupe. L.C. Fleming fi t appel à Ali Tür qui dessina les plans du palais de jus-tice et de l’ancien hôpital de mari-got. En ce qui concerne le premier les façades sont assez proches de leur aspect d’origine, malgré quelques modifi cations au niveau des volets en bois du premier étage et quelques extensions en arrière du bâtiment. L’entrée princi-pale du palais de justice ressemble étonnamment à celle de la mairie La façade présente trois portes larges et hautes encadrées de co-lonnes en béton armé, recouvertes de petits carrelages. Ces colonnes soutiennent une galerie située au 1er étage, débordant en auvent et protégeant la façade du soleil. La toiture est plate et la balustrade du premier étage consiste en de simples poteaux cylindriques en

ciment. Sur le fronton, les mots «Palais de Justice» en lettres ma-juscules sont moulés en ciment et incrustés. Les carrelages typiques des années 30 ornent le hall d’ac-cueil du rez-de-chaussée et de la salle d’audience. Les volumes des pièces sont grands et les hautes portes en bois on été modernisées par remplacement des anciennes

jalousies en bois par des vitres. Bien qu’une grande partie du bâ-timent ait été modifi ée, notamment vers l’arrière, dans la cour, par adjonction de pièces supplémen-taires, la façade a gardé un aspect proche de celui d’origine.Un autre bâtiment public de Saint Martin a été dessiné par Ali Tür et publié dans un ouvrage édité au début des années 30, intitulé: Encyclopédie de l’Architecture/Ar-chitecture coloniale Guadeloupe qui lui est entièrement consacré. Il s’agit du dispensaire de Saint Mar-tin, c’est-à-dire de l’ancien hôpital. Le bâtiment abritant aujourd’hui le pôle développement durable et cadre de vie de la collectivité a considérablement été modifi é entre les années 1980 et 2010, d’abord pour agrandir l’ancien hô-pital, ensuite pour être transformé en centre administratif. Cepen-dant, une partie du patio intérieur entouré de poteaux en béton existe encore, ainsi que les toits plats en dalle de béton armé.

Le plus bel ouvrage réalisé par Ali Tür à Saint Matin est sans conteste la maison d’habitation de la Loterie Farm. Etonnamment, il ne s’agit pas d’un bâtiment public, mais d’une propriété privée ayant appar-tenu à l’ancien maire de l’époque M. Louis Constant Fleming. Il est probable que monsieur Fleming, en charge de la mairie entre 1928

by reinforced concrete columns, covered in small tiling. These co-lumns support a gallery located on the fi rst fl oor, extending into a canopy and protecting the façade from the sunlight. The roof is fl at and the fi rst storey handrail is made of simple cylindrical cement posts. On the pe-diment, the words “Court House” in capital letters are molded in cement and inlaid. The ti-ling, typical of the 1930s, decorate the ground fl oor and courtroom re-ception hall. The sizes of the rooms are large and the tall wooden doors have been mo-dernized by repla-cing the previously existing wooden louvers by glass panels. Though a great part of the building has been changed, especially towards the rear, in the courtyard, by the addition of supplementary rooms, the façade has kept an aspect similar to the original one.

Another public building of Saint Martin was designed by Ali Tür and published in a book edited in the early 1930s, titled: Encyclope-dia of Guadeloupe Architecture / colonial Architecture which is entirely devoted to him. It is the Saint Martin community clinic,

that is to say, the previous hos-pital. The building now sheltering the Territorial Municipality’s Sus-tainable Development and Envi-

5

30 juin/june 1934 Nuit des longs couteaux en Allemagne. Les SA réclament avec force le passage à une seconde étape, la révolution socialiste.Night of the long knives in Germany. The SA forcefully claim a passing to a second stage, the socialist revolution.

Projet type pour bâtiment administratif, A. Tür, dessin de l’architecte, Ed. Albert Morancé, ParisModel project for an administrative building, A. Tür, architect’s drawing, Albert Morancé Editions, Paris

Façade du Palais de justice de Marigot en 1951, Vidoc.Marigot court house façade in 1951, Vidoc.

Mairie de Pointe-Noire.Pointe-Noire town hall.

Façade du Palais de justice de Marigot, de nos jours.Marigot court house façade, nowadays.

2 août/august 1934 Mort d’Hindenburg. Hitler se fait proclamer président du Reich (Führer).Death of Hindenburg. Hitler has himself proclaimed president of the Reich (Führer).

1934Début de la longue Marche de Mao en Chine.Start of Mao’s Long March in China.

1935

Construction de la Maison de Loterie Farm par L.C. Fleming.Construction of the Loterie Farm house by L.C. Fleming.

15 sept. 1935 En Allemagne, les lois antisémites de Nuremberg privent les juifs de leurs droits civiques et autori-sent la confi scation de leurs biens.In Germany, the Nuremberg antisemitic laws deprive the Jews of their civic rights and authorise the confi scation of their property.

Page 8: HERITAGE 11

et 1949 ait obtenu d’Ali Tür qu’il dessine les plans de cette mai-son moderne. D’après les témoi-gnages, cette bâtisse fut construite vers 1935. La maison est établie sur les pentes, entourée d’annexes postérieures construites sur des terrasses. L’accès se fait par un escalier majestueux construit en béton, dont les garde-corps sont constituées de lices en forme de cylindres de béton horizontaux. Le bâtiment de forme carrée comporte

quatre grandes portes de 3 mètres de haut en façade principale. Les deux côtés de la maison et l’arrière présentent égale-ment quatre ouver-tures, fenêtres ou portes, permettant une excellente circulation de l’air. Toutes les ouvertures comportent des volets en bois anticycloniques.

ronment Department has largely been modifi ed between 1980 and

2010, fi rst to increase the previous hos-pital, then to be transfor-med into an admin is t ra -tive building. However, a part of the interior patio sur rounded by posts still remains, as well as the fl at roofs made of reinfor-ced concrete slabs. The most

beautiful buil-ding built by Ali Tür on Saint Martin

is without a doubt the house of Loterie Farm. Astonishingly, it is not a public building, but a private property which used to belong to

the mayor of the times, Mr. Louis Constant Fleming. It is possible that Mister Fleming, in charge of the town hall between 1928 and 1949 obtained from Ali Tür that he drew up the plans of this modern house. Based on testimonies re-ceived, this building was erected towards 1935. The house is laid on the slopes, surrounded by an-nexes later built on terraces. Ac-cess to it is possible by a majes-tic concrete staircase, its railings being constituted of handrails made of horizontal concrete cy-linders. The square shaped buil-ding comprises four large 3 meter high doors on the main façade. The two sides of the house and the rear also offer four openings, windows or doors, enabling an excellent air fl ow. All the openings comprise hurricane-proof wooden shutters. A terrace covered by a fl at reinforced concrete roof rests on cylindrical beams and columns also built from concrete. This ter-race completely surrounds the building and offers a typically Art Deco colored cement tiling fl oor

Une terrasse couverte par un toit plat en béton armé repose sur des poutres et colonnes cylindriques également en béton. Cette terrasse fait le tour complet de la bâtisse et présente un sol en carrelage de ciment typiquement Art Déco des-sinant des motifs géométriques co-lorés en rouge, jaune, blanc et noir. Ces carrelages ont une dimension identique à ceux du Palais de jus-tice de Marigot. L’intérieur de la maison présente de grands vo-lumes et des sols tantôt carrelés, tantôt en parquet. L’ensemble du bâtiment est en toitures-terrasses disposées à différents niveaux. Un élément central surélevé est pour-vu de claustras en béton dans le but d’assurer l’évacuation de l’air chaud accumulé dans la maison. Les montants latéraux du portail d’entrée s’appuient contre le vieux mur en pierres sèches datant du

19ème siècle et sont surmontés d’éléments décoratifs sous forme de plateaux en béton empilés.

6

18 juil./july 1936

Salle d’audience du Palais de justice de Marigot, carreaux de ciment.

Marigot court house Courtroom, cement tiling.

2010, fi rst to increase the previous hos-pital, then to be transfor-med into an admin is t ra -tive building. However, a part of the interior patio sur rounded by posts still remains, as well as the fl at roofs made of reinfor-ced concrete slabs. The most

Salle d’audience du Palais de justice de Marigot,

Carrelage du hall d’accueil du Palais de justice de Marigot.Marigot court house reception hall tiling.

1936Hitler viole les traités de Lo-carno en occupant militairement la Rhénanie. Hitler violates the Locarno treaties by militarily occupying Rhenanie.

Jan. 1936 Grèves avec occupation chez Fi-restone, Goodyear et Goodrich aux USA.Strikes with occupation at Firestone, Goodyear and Goo-drich in the USA.

4 mai/may 1936 Victoire électorale du Front Populaire en France. Gouverne-ment Léon Blum. Electoral victory of the Popular Front in France. Government of Leon Blum.

8 mai/may 1936 Accords de Matignon. Sous l’impul-sion de Léon Blum, le parlement vote la semaine des 40 heures.Matignon agreements. Under Leon Blum’s impetus, parliament votes the 40-hour week.

20 juin/june 1936 Loi sur les congés payés en France imposée par les grèves. 600 000 ouvriers découvrent les vacances.Law regarding paid holidays in France imposed by the strikes. 600,000 discover holidays.

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Une terrasse couverte par un toit plat en béton armé repose sur des poutres et colonnes cylindriques également en béton. Cette terrasse fait le tour complet de la bâtisse et présente un sol en carrelage de ciment typiquement Art Déco des-sinant des motifs géométriques co-lorés en rouge, jaune, blanc et noir. Ces carrelages ont une dimension identique à ceux du Palais de jus-tice de Marigot. L’intérieur de la maison présente de grands vo-lumes et des sols tantôt carrelés, tantôt en parquet. L’ensemble du bâtiment est en toitures-terrasses disposées à différents niveaux. Un élément central surélevé est pour-vu de claustras en béton dans le but d’assurer l’évacuation de l’air chaud accumulé dans la maison. Les montants latéraux du portail d’entrée s’appuient contre le vieux mur en pierres sèches datant du

19ème siècle et sont surmontés d’éléments décoratifs sous forme de plateaux en béton empilés.

L’orientation de la construction a bien évidemment tenu compte de l’orientation des vents dominants dans la vallée de Loterie Farm.

D’autres traces d’Ali Tür à Marigot

Deux autres bâti-ments de Marigot montrent des simili-tudes évidentes avec le style architectural d’Ali Tür. Ces deux bâtiments construits par le maire Louis Constant Fleming se trouvent à l’angle des rues de la liberté et de la république. Le

premier, construit en 1937, a été le premier

hôtel de la partie fran-çaise de Saint Martin : l’hôtel Beau-séjour. Il est actuellement en cours de rénovation. La façade présente

drawing up red, yellow, white and black geome-trical motifs. This tiling is of a size identical to that of the Marigot court house. The inside of the house offers large spaces and fl oors that are either tiled, or wooden. The whole building is made of terrace roofs laid out on different levels. A raised central element bears concrete claustras in or-der to ensure the evacua-tion of the hot air accumu-lated in the house. The uprights of the entrance

gate rest on the old dry stone wall dating back to

the 19th century and are crowned with decorative elements in the shape of piled up concrete trays. The building has obviously been positioned in order to take

the prevailing winds of the Loterie Farm valley into consideration.

Other traces of Ali Tür in Marigot

Two other buildings in Marigot show obvious similarities with the ar-chitectural style of Ali Tür. These two buil-dings built by mayor Louis Constant Fle-ming are located on the angle of rue de la Liberté and rue de la République. The fi rst one, built in 1937, was the fi rst hotel of the French side, Saint Martin: the Beau-séjour hotel. It is

currently being renovated. The fa-çade offers an exceptionally high ground fl oor, when one compares it with the façades of older houses dating back to the middle of the 19th century. The large doors were closed by wooden shutters, borrowed from the old traditional architecture. The fl at roof, on the contrary, is modern, built of rein-forced concrete. On the fi rst fl oor, the openings also bear wooden hurricane-proof shutters. The gal-lery is decorated with concrete rai-lings. The second building is loca-ted on the angle of the two streets and presents similar characteris-tics concerning the openings, the room sizes, the concrete beams and roofs. It was built between 1940 and 1950. With these two examples one can see that the previous mayor of Saint Martin started to use modern building materials and techniques, bor-

rowed from Ali Tür, whilst keeping certain aspects of the traditional architecture.

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18 juil./july 1936

Putsch militaire fasciste du général Franco contre la République General Franco’s Fascist military putsch against the Republic

drawing up red, yellow, white and black geome-trical motifs. This tiling is of a size identical to that of the Marigot court house. The inside of the house offers large spaces and fl oors that are either tiled, or wooden. The whole building is made of terrace roofs laid out on different levels. A raised central element bears concrete claustras in or-der to ensure the evacua-tion of the hot air accumu-lated in the house. The uprights of the entrance Dispensaire à Saint Martin, A. Tür, dessin de l’architecte, Ed. Albert Morancé, Paris

Community clinic on Saint Martin, A. Tür, architect’s drawing, Albert Morancé Editions, Paris

Patio de l’ancien hôpital de Saint Martin.Patio of the previous Saint Martin hospital.

d’Ali Tür à Marigot

Deux autres bâti-ments de Marigot montrent des simili-tudes évidentes avec le style architectural d’Ali Tür. Ces deux bâtiments construits par le maire Louis Constant Fleming se trouvent à l’angle des rues de la liberté et de la république. Le Vue de la maison principale de Loterie Farm.

View of the main house at Loterie Farm.

L’escalier d’accès à la terrasseThe staircase leading to the terrace

1937

Ali Tür quitte défi nitivement les Antilles et rentre en France.Ali Tür defi nitely leaves the West Indies and goes back to France.

2 avril/april 1937

Bombardement de Guernica en Espagne.Bombarding of Guernica in Spain.

juin/june 1937

Chute du ministère Blum en FranceFall of the Blum ministry in France

7 juil./july 1937

Début de la guerre sino-japonaise. Start of the China-Japan war.

1937

Epuration massive et sanglante dans l’armée Rouge.Massive and bloddy purge in the Red Army.

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un rez-de-chaussée d’une hauteur inhabituelle, lorsqu’on la compare avec les façades de maisons plus anciennes datant du milieu du 19ème siècle. Les grandes portes étaient fermées par des volets en bois, empruntés à l’architecture traditionnelle ancienne. La toiture plate, au contraire, est moderne, construite en béton armé. Au pre-mier étage, les ouvertures sont également pourvues de volets anti-cycloniques en bois. La galerie est

ornementée de garde-corps en béton. Le second bâti-ment est situé à l’angle des deux rues et présente des caractéristiques similaires au niveau des ouvertures, des volumes, des poutres en béton et des toitures. Il fut construit entre 1940 et 1950. On voit à travers ces deux exemples que l’an-cien maire de Saint Martin, commença à utiliser des matériaux et des techniques de construction modernes, empruntés à Ali Tür, tout en conservant certains aspects de l’architecture tradition-nelle.

Ainsi, Ali Tür, bien qu’étran-ger à l’île de Saint Martin, a également laissé des traces de son œuvre gigan-tesque dans notre île. Les bâtiments qu’il a construits entre 1930 et 1935 sont en très bon état de conserva-tion. Seul l’ancien hôpital a

complètement été dénaturé par les aménagements et exten-sions postérieures. Le palais de justice de Marigot et la maison de Loterie Farm sont les témoins de cette époque d’entre-deux-guerres où le béton armé fut introduit dans les colonies françaises des An-tilles. Les habitants de Saint Martin adopteront rapidement ces nou-velles techniques de construction et l’utilisation du béton remplacera les matériaux traditionnels jusqu’à

nos jours. Ali Tür rentra défi nitive-ment en France en 1937 et ne revint jamais aux Antilles. Il est décédé dans le sud de la France à la fi n des an-nées 70. Plu-sieurs bâtiments r e m a r q u a b l e s , construits par Ali Tür en Guade-loupe, sont ins-crits par le Minis-tère de la Culture au titre des monu-ments historiques. A Saint Martin, au-cun de ces témoins de la mo-dernisation de la construction

Saint Martinoise n’est protégé.

Thus, Ali Tür, whilst a foreigner to the island of Saint Martin, also left traces of his gigantic work on our island. The buil-dings he erected between 1930 and 1935 are in very good state of repair. Only the previous hospital has been completely distorted by the various changes and additions brought to it la-ter. The Marigot court house and the Loterie Farm

house are testimonies of this pe-riod between the two world wars during which reinforced concrete

was introduced into the French colonies of the West Indies. The inhabitants of Saint Martin rapidly

adopted these new buil-ding techniques and the use of concrete replaced traditional materials until today. Ali Tür fi nally went back to France in 1937 and never came back to the French West Indies. He died in the South of France towards the end of the 1970s. Several remar-kable buildings, built by Ali Tür in Guadeloupe, are listed amongst the histo-rical monuments by the

French Ministry of Culture. On Saint Martin, none of

these testimonies of the moderni-zation of Saint Martin construction are protected.

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Vue des claustras en béton permettant l’évacuation de l’air chaudView of the concrete claustras enabling the evacuation of the hot air

ornementée de garde-corps en béton. Le second bâti-ment est situé à l’angle des deux rues et présente des caractéristiques similaires au niveau des ouvertures, des volumes, des poutres en béton et des toitures. Il fut construit entre 1940 et 1950. On voit à travers ces deux exemples que l’an-cien maire de Saint Martin, commença à utiliser des matériaux et des techniques de construction modernes, empruntés à Ali Tür, tout en conservant certains aspects de l’architecture tradition-nelle.

Ainsi, Ali Tür, bien qu’étran-ger à l’île de Saint Martin, a également laissé des traces de son œuvre gigan-tesque dans notre île. Les bâtiments qu’il a construits La terrasse décorée de carreaux ciment

des années 30The terrace decorated with 1930s cement tiling

rentra défi nitive-ment en France en 1937 et ne revint jamais aux Antilles. Il est décédé dans le sud de la France à la fi n des an-nées 70. Plu-sieurs bâtiments r e m a r q u a b l e s , construits par Ali Tür en Guade-loupe, sont ins-crits par le Minis-tère de la Culture au titre des monu-ments historiques. A Saint Martin, au-cun de ces témoins de la mo-dernisation de la construction Détail de porte avec caillebotis et poignée

en céramique, années 30Door detail with grating and 1930s

ceramic handle

Les piliers d’entrée de la maison The entrance pillars of the house

adopted these new buil-ding techniques and the use of concrete replaced traditional materials until today. Ali Tür fi nally went back to France in 1937 and never came back to the French West Indies. He died in the South of France towards the end of the 1970s. Several remar-kable buildings, built by Ali Tür in Guadeloupe, are listed amongst the histo-rical monuments by the Ancien hotel Beauséjour, rue de la République - 1937

Former hotel Beauséjour

Nov. 1937

Les Japonais sont à Shanghai.The Japanese are in Shanghaï.

1938

Hitler devient comman-dant en chef de l’armée allemande.Hitler becomes com-mander in chief of the German army.

1938

Promulgation de lois sociales aux USA: salaire minimum, travail des enfants, 40h hebdomadaires.Promulgation of the social laws in the USA : minimum wage, children’s work, 40-hour week

12 mars/march 1938

L’armée allemande entre en Autriche. Hitler réunit l’Autriche au Reich. The German army enters into Austria. Hitler groups Austria with the Reich.

Sept. 1938

Le Führer soutient la demande d’au-tonomie du parti nazi des Sudètes puis réclame cette région.The Führer supports the Sudètes’ Nazi party’s request for autonomy then claims this region.

3 Sept. 1938

Création de la Qua-trième Internationale par Léon Trotsky.Creation of the Fourth International by Leon Trotsky.

30 Sept. 1938

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SAINT MARTIN 50 YEARS BEFORE THE DEVELOPMENT OF TOURISM

SAINT MARTIN 50 ANS AVANT LE DEVELOPPEMENT DU TOURISME

After the abolishment of slavery in 1848, the sugar factories on Saint Martin closed one after the other for lack of profi tability. Salt gathe-ring helped sustain the economy until the early 1960s. However, the fi rst half of the 20th century was marked by a massive emigra-tion of the Saint Martiners looking for employment. Some left to cut

cane in Guadeloupe or in the Do-minican Republic. Others found employment in petrol refi neries on Aruba or on Curacao. For those

having remained on the island, life passed by peacefully, punctuated by the seasons in a small society isolated from the world, adapted to its environment, still largely tur-ned towards agriculture and lives-tock breeding. This intermediate period preceded the development of the touristic economy that we know and still remains imbedded

in the memory of our elders who describe to us what daily life was like between 1920 and 1960.

Après l’abolition de l’esclavage en 1848, les usines à sucre de Saint Matin fermeront les unes après les autres par manque de rentabilité. La récolte du sel permettra le main-tient de l’économie jusqu’au début des années 1960. Cependant, la première moitié du 20ème siècle sera marquée par une émigration massive des saint martinois à la recherche d’un emploi. Certains partiront couper la canne en Gua-deloupe ou en République Domini-caine. D’autres trouveront un em-

ploi à Aruba ou Curaçao, dans les raffi neries de pétrole. Pour ceux qui restèrent sur l’île, la vie s’écou-lait paisiblement, rythmée par les saisons dans une petite société isolée du monde, adaptée à son environnement, encore largement tournée vers l’agriculture et l’éle-vage. Cette époque intermédiaire précèdera le développement de l’économie touristique que nous connaissons et reste encore gra-vée dans la mémoire de nos ainés qui nous racontent avec nostalgie la vie quotidienne entre 1920 et 1960.

Transports maritimes «Je me souviens du temps d’an-tan où Marigot ressemblait encore à un marécage. Les rues étaient en terre battue et on trouvait des crabes dans le sable au beau mi-lieu de la rue de la République. Le lagon de Simpson Bay n’avait pas encore été comblé et pénétrait dans le bourg jusqu’au niveau de la rue Félix Eboué. Toutes les rives du grand étang étaient bordées par une riche mangrove où venaient

nicher les oiseaux échassiers. Les deux quartiers de Saint-James et de Marigot étaient séparés par le «doigt de gant», et il n’était pas rare de voir les jeunes des deux quartiers organiser des batailles navales sur les barques en bois des pêcheurs au beau milieu de la frontière. Une route de front de mer longeait la plage où les barques de quelques pêcheurs se repo-saient au soleil. Les rues étaient désertes. Le Lilian était la goélette postale qui assurait la liaison entre la Guadeloupe et Saint-Martin dans les années 30. Plus tard, le Javeline, l’Inese II, le Maris-Stella,

Marigot vu du fort, doigt de gant - 1930Marigot seen from the fort, Doigt de gant - 1930

Voilier en carénage, embarcadère de Marigot - années 50Sailboat out for careening, Marigot dock - 1950s

Barques de pêcheurs devant l’embarcadère de Marigot - années 1900Fishermen’s boats in front of Marigot dock - 1900s

30 Sept. 1938

Signature des accords de Munich : An-glais et Français cèdent aux exigences du Führer. Signature of the Munich agreements: English and French surrender to the Führer’s demands..

09 nov. 1938

En Allemagne, pogrom de la «nuit de cristal» suite à l’assassinat d’un diplomate à Paris. In Germany, pogrom of the « crystal night » following the assassination of a diplomat in Paris.

.

9

1939

Pacte d’acier : Alliance de l’Allemagne avec l’Italie. Steel pact: Alliance of Germany with Italy.

.

20 jan. 1939

En Espagne, les franquistes rentrent à Barcelone.In Spain, the Franco-sup-porters enter Barcelona.

Fév./feb. 1939

500.000 réfugiés espagnols passent la frontière et sont internés dans des camps d’exception en France.500,000 Spanish refugees cross the border and are interned in exception camps in France.

Page 12: HERITAGE 11

15 mars/march 1939 Les nazis font leur entrée à Prague. Hitler démantèle la Tchécoslovaquie.The Nazis enter Prague. Hitler dismantles Czechos-lovakia.

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4 sept. 1939

Sea transport

“I remember the old times during which Marigot still looked like a marsh. The streets were made of hard-packed earth and one would fi nd crabs in the sand straight in the middle of the rue de la République. Simpson Bay lagoon had not yet been fi lled up and fl owed into town up to Felix Eboué Street. All the shores of the big pond were lined with lush mangrove in which wader birds came to

nest. The two neighborhoods of Saint-James and Marigot were separated by the “glove fi nger”, and young people from the two neighborhoods would often set up naval battles on the f i s h e r m e n ’ s wooden boats in the very middle of the border. A waterfront road bor-dered the beach on which a few fi shermen’s small boats rested in the sun. The streets were empty. The Lilian was the postal schoo-ner carrying out the link between Guadeloupe and Saint-Martin in the 1930s. Later, the Javeline, the Inese II, the Maris-Stella, the

Delgrès and the Danibe took over and enabled exchanges of goods between the two islands. Back in the time when sailing transport was used, the captains were so stingy that they rarely used the engines. They said: “Each tuf! tuf! Costs money!”. They only used sails and the trip between Saint-Martin and Basse-Terre could last eight days. The boats in charge of the link between Saint-Martin and Guadeloupe, built by Anguillan or Saint-Martin sailors, carried the mail, passengers and goods. We used to export many animals such as cattle, donkeys, horses, goats and sheep towards Guadeloupe.

Embarking the ani-mals was always a sight attracting young people. The sailboat’s deep draft didn’t allow it to dock at the wharf and the cattle were thrown in the water, tied to the side of the fi shing boat and they swam towards the sailboat while we rowed. The poor animals were panic-stricken and then had to travel for many days at sea

before reaching their destination. These trips were as stressful for the animals as they were for the human beings.

Fish and vegetable market

“During the July 14th celebrations, the whole population gathered,

le Delgrès et le Danibe prirent le relais et permettaient les échanges de marchandises entre les deux îles. A l’époque de la navigation à voile, les capitaines étaient si avares qu’ils utilisaient rarement les moteurs. Ils disaient : «Chaque tuf! tuf! coûte de l’argent!». Ils n’uti-lisaient que la voile et le voyage entre Saint-Martin et Basse-Terre pouvait durer huit jours. Les navires chargés de la liaison entre Saint-Martin et la Guadeloupe, construits par des marins anguillais ou saint-martinois, transportaient le cour-rier, les passagers et les marchan-dises. Nous exportions beaucoup d’animaux comme des bœufs, des ânes, des chevaux, des chèvres et des moutons vers la Guadeloupe. Le chargement des animaux était toujours un spectacle qui attirait les jeunes. Le grand tirant d’eau du voilier ne lui permettait pas

d’accoster au quai et les bœufs étaient jetés à l’eau, attachés sur les côtés de la barque et ils nageaient en direction du voilier pendant que nous ramions. Les pauvres bêtes étaient affolées et devaient ensuite voyager pendant plusieurs jours en mer avant d’arriver à destination. Ces voyages étaient très éprou-vants pour les animaux comme pour les hommes.»

Marché aux poissons et aux légumes

«Pendant les fêtes du 14 juillet, toute la population se réunis-sait, comme encore aujourd’hui, pour suivre les courses de voiliers dans la baie de Marigot. Nous por-tions toujours nos plus beaux vê-tements en de pareilles occasions. Les voiliers traditionnels de Saint-

Sea transport

“I remember the old times during which Marigot still looked like a marsh. The streets were made of hard-packed earth and one would fi nd crabs in the sand straight in the middle of the rue de la République. Simpson Bay lagoon had not yet been fi lled up and fl owed into town up to Felix Eboué Street. All the shores of the big pond were lined with lush mangrove in which wader birds came to Le Lilian, goélette postale de Saint Martin - années 40

The Lilian, Saint Martin’s postal schooner - 1940s

nest. The two

Embarking the ani-mals was always a sight attracting young people. The sailboat’s deep draft didn’t allow it to dock at the wharf and the cattle were thrown in the water, tied to the side of the fi shing boat and they swam towards the sailboat while we rowed. The poor animals were panic-stricken and then had to travel for many days at sea

Chargement du bétail à l’embarcadère de Marigot - années 50Embarking cattle at Marigot dock - 1950s

Course de voiliers traditionnels, 14 juillet, embarcadère de Marigot - années 30Traditional sailboats race, July 14th, Marigot dock - 1930s

27 mars/march 1939

Madrid se rend. La guerre est fi nie.Madrid surrenders. The war is over.

23 août/august 1939

Signature du pacte germano-soviétique au Kremlin : traité de non agression.Signature of the Germano-Soviet pact in the Kremlin: Non-aggression treaty.

01 sept. 1939

Invasion de la Pologne par la Wehrmacht.Invasion of Poland by the Wehrmacht.

03 sept. 1939

La Grande Bretagne puis la France déclarent la guerre au Reich.Great Britain and France declare war on the Reich.

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4 sept. 1939 Le Japon se déclare neutre dans la guerre mondiale.Japan declares itself neutral in the world war.

as we still do today, to follow the sailboat races in Marigot bay. We wore our best clothes on such oc-casions. The traditional sailboats

of Saint-Martin and Anguilla loo-ked like the fi shing boats used as dinghies by the large European lobster-fi shing sailboats which

Martin et d’Anguille ressemblent aux barques qui servaient d’an-nexes aux grands voiliers langous-tiers européens qui venaient lâ-cher leurs fi lets dans les eaux des Antilles jusqu’au début du siècle. Ces embarcations étaient utilisées par les pêcheurs d’autrefois et les courses que nous organisons au cours de fêtes nous font revivre

les compétitions que se livraient les différents équi-pages pour arriver les premiers sur le marché et vendre tout leur poisson. Les pêcheurs du village de Simpson Bay traversaient le grand étang pour vendre le produit de leur pêche à Marigot, à l’ac-tuel emplacement de la mairie. Sur la plage de Ma-rigot, ils tiraient

leurs barques et les femmes rele-

vaient leurs longues robes pour rentrer dans l’eau acheter le pois-son. Les pêcheurs criaient «What a strap! What a strap!» et tendaient des grappes de poissons multico-lores qu’ils avaient accrochées au bout d’un morceau de sisal. Nous n’utilisions pas de balances, et ce système de vente par grappes

les compétitions que se livraient les différents équi-pages pour arriver les premiers sur le marché et vendre tout leur poisson. Les pêcheurs du village de Simpson Bay traversaient le grand étang pour vendre le produit de leur pêche à Marigot, à l’ac-tuel emplacement de la mairie. Sur la plage de Ma-rigot, ils tiraient Marché au poisson sous le sand box tree - années 50

Fish market under the sand box tree - 1950s

Marché au poisson rue de la République - années 50Fish market rue de la République - 1950s

17 sept. 1939

L’Armée rouge envahit la Pologne.The Red Army invades Poland.

30 oct. 1939 Ordonnance de Himmler sur le transfert en Pologne de tous les Juifs du Reich et de ses territoires annexés.Himmler’s order regarding the transfer to Poland of all the Jews of the Reich and of its annexed territories.

30 nov. 1939

L’URSS attaque la Finlande.The Soviet Union attacks Finland.

22 mars/march 1940

Après la démission de Daladier, Paul Reynaud devient Président du Conseil.In France, after Daladier’s resignation, Paul Reynaud becomes President of the Council.

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9 avril/april1940 Anticipant une attaque alliée contre la Norvège, Hitler envahit le Danemark puis la Norvège.Anticipating an allied attack against Norway, Hitler invades Denmark and then Norway.

came to spread their nets in the West Indian waters at the turn of the century. These crafts were used by the fi shermen of yes-teryear and the races we set up during celebrations enable us to relive the competitions that the various crews disputed to reach the market place and sell all their fi sh fi rst. The Simpson Bay vil-lage fi shermen used to cross the big pond to sell the product of their fi shing outings in Marigot, where the town hall now stands. They would haul their crafts up on Marigot beach and the women would pull up their long skirts to enter the water and buy the fi sh. The fi shermen would shout out “What a strap! What a strap!” and proposed grapes of multi-colored fi sh they had hung at the end of a piece of sisal string. We didn’t use scales, and this system of fi sh grapes sale allowed us to sell all the fi sh. We Saint-Martiners did not eat the coffer fi sh, or octopi or lobsters. We were scared of them.”“In olden times, the women wore long dresses. You’d hear “Shrah! Shrah! Shrah!” when they walked on the hard-packed earth or on sandy roads. In town we would order clothing from the dressma-kers. The superb dresses were hand-made and sometimes using the sewing machines of Victorian times that would make a “Trucu-

tuc! Trucutuc!” sound all day long. The country people didn’t need to buy their foodstuffs on the market. Only the inhabitants of the town of Marigot came to shop for salt or vegetable supplies in the grocery stores or on the market, but the farmers exchanged or gave the product of their harvest to their neighbors. We produced so many vegetables that we sometimes went to trade them against fi sh with the Marigot fi shermen. We planted peas, roots and all sorts of vegetables. Each family bred animals such a chicken, pigs, goats, sheep and cattle. Meat was preserved in salt as we did not have refrigerators. I remember our races coming out of school to reach Marigot market fi rst and sell the town inhabitants a few vegetables. The women were clothed from head to foot. They wore a scarf on their hair and only their faces and hands were visible. Today, young girls show a lot more than their legs even be-fore they’re married. This attitude was unthinkable in those times. Towards the end of the 1940s the angle of rue de la République and the Boulevard de France looked totally different. The fi rst “Shell” service station belonged to Mrs. Fleming. At the angle of the two streets stood Jules Petit’s store in which one could fi nd salt fi sh, corn fl our and all sorts of foodstuffs. A

permettait d’écouler tous les pois-sons. Nous Saint-Martinois, ne mangions pas les poissons coffres, ni les poulpes ou les langoustes. Nous en avions peur.» «Autrefois, les femmes portaient de longues robes. On entendait «Shrah! Shrah! Shrah!» lorsqu’elles se déplaçaient sur la terre battue ou sur les routes en sable. Dans le bourg nous commandions des vê-tements chez les couturières. Les superbes robes étaient faites à la main et parfois avec des machines à coudre de l’époque victorienne qui faisaient «Trucutuc! Trucutuc!» à longueur de journée. Les gens de la campagne n’avaient pas besoin d’acheter leurs aliments au mar-ché. Seuls les habitants du bourg de Marigot venaient s’approvision-ner en sel ou en légumes dans les épiceries ou sur le marché, mais les agriculteurs échangeaient ou donnaient les produits de leurs récoltes à leurs voisins. Nous pro-duisions tant de légumes que nous allions parfois les troquer contre des poissons avec les pêcheurs de Marigot. Nous plantions des pois, des racines et toutes sortes de vé-gétaux. Chaque famille élevait des

animaux comme les poules, co-chons, cabris, moutons et bœufs. La viande était conservée dans le sel car nous ne possédions pas de

réfrigérateurs. Je me sou-viens de nos courses en sortant de l’école pour ar-river les premières au mar-ché de Marigot et vendre quelques légumes aux bourgeois. Les femmes étaient couvertes par les vêtements de la tête aux pieds. Elles portaient un foulard sur les cheveux et ne découvraient que le visage et les mains. Au-jourd’hui, les jeunes fi lles montrent bien plus que leurs jambes avant même d’être mariées. Cette at-titude était inconcevable dans le temps. Vers la fi n des années 40 l’angle de la rue de la République et du boulevard de France avait un tout autre aspect. La première station d’es-sence «Shell» appartenait à Mme Fleming. A l’angle des deux rues se tenait le magasin de Jules Petit où l’on pouvait trouver de la morue sa-lée, de la farine de maïs et toutes sortes de produits alimentaires. Un quai en béton avait été construit

pour faciliter l’embarquement des passagers et des animaux sur les barques de transbordement. Un «sand-box-tree» faisait de l’ombre

Le Marché de Marigot, devant l’ancien embarcadère - années 1900Marigot market, in front of the old dock - 1900s

La station Shell, rue de la République - années 50The Shell service station, rue de la République - 1950s

7 mai/may 1940 Plus de 300 bombardiers allemands survolent la Tamise et entament une campagne de dévastation en Angleterre.More than 300 German bombers fl y over the Thames and start a devastation campaign in England.

10 mai/may 1940 Offensive éclair des allemands par les Ardennes. Invasion de la Belgique des Pays-Bas et du Luxembourg.Lightning strikes by the Germans through the Ardennes hills. Invasion of Belgium, of the Nether-lands and Luxemburg.

10 juin/june 1940

L’Italie rentre en guerre aux côtés de l’Allemagne contre la France et la Grande-Bretagne.Italy enters into war alongside Germany against France and Great Britain.

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concrete wharf had been built to facilitate the embar-king of passengers and ani-mals onto transfer vessels. A sand-box-tree provided shade for the market on which the fi sh were spread on wire-meshed tables just as they are today.” To be continued…We can see it by reading these testimonies, Saint Martin, at the start of the 20th century was a peace-ful island on which farming and fi shing still enabled a food providing autonomy that is part of the past now. Modern life was already setting in with the importa-tion of the fi rst cars. One had to wait until the 1960s and 70s to see the instal-lation of running water and electricity, absolute neces-sities for the development of tourism.

sur le marché où les poissons étaient éta-lés sur des tables grillagées comme encore aujourd’hui.» A suivre…On le voit à la lecture de ces témoignages, Saint Martin, au dé-but du 20ème siècle était une île paisible où l’activité agricole et la pêche permet-taient encore une au-tonomie alimentaire aujourd’hui révolue. La modernité était déjà en marche avec l’importation des pre-mières voitures. Il faudra attendre les années 60 et 70 pour voir arriver l’eau cou-rante et l’électricité, indispensables au développement du tourisme.

concrete wharf had been built to facilitate the embar-king of passengers and ani-mals onto transfer vessels. A sand-box-tree provided shade for the market on which the fi sh were spread on wire-meshed tables just as they are today.” To be continued…We can see it by reading these testimonies, Saint Martin, at the start of the 20th century was a peace-ful island on which farming and fi shing still enabled a food providing autonomy that is part of the past now. Modern life was already setting in with the importa-tion of the fi rst cars. One had to wait until the 1960s and 70s to see the instal-lation of running water and electricity, absolute neces-sities for the development of tourism.

L’embarcadère de Marigot - années 50 Marigot dock - 1950s

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Au cours de votre séjour, ne manquez pas de vous arrêter au Musée de Saint-Martin pendant votre visite au bourg de Marigot.

Situé 7 Rue Fichot non loin de l’église catholique, vous y découvrirez l’histoire de l’île depuis l’arrivée des premiers amérindiens en 3350 avant Jésus Christ en passant par la colonisation européenne à partir du 15ème siècle, pour aboutir à la vie quotidienne au début du 20ème siècle.

Le Musée est ouvert de 9h à 13h et de 15h à 17h.

7, Rue Fichot - MarigotTél. : 0690 56 78 92

While visitting Saint-Martin and Marigot, don’t miss our island Museum.

Located #7, Fichot street, near the Catholic church.You will be able to learn the island’s history from the very fi rst indigenous inhabitants, arriving in 3550 B.C., the European colonisation in the beginning of the 15th cen-tury, to ending up with daily life on Saint Martin in the 20th century.

The Saint-Martin Museum is open from 9:00 am to 1:00 pm and from 3:00 pm to 5:00 pm

7, Fichot street - MarigotPh. : 0690 56 78 92