guerre et paix

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VOL 1 N O 4 éTé 2009 – 5,95 $ WWW.GENERATIONDIDEES.CA

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Il y a un vent de renouveau depuis l’élection de Obama, c’est certain. Un dialogue s’est ouvert entre les États-Unis et Cuba, Harper semble avoir vu la lumière en ce qui concerne nos chances de succès en Afghanistan et le président Sarkozy se démarque par une politique internationale qui en impressionne plus d’un. On pourrait même dire que la confiance générale envers les Nations Unies s’est renouvelée. Les écoles sont remplies de jeunes qui s’impliquent dans des organismes à vocation internationale que ce soit pour protége l’environnement, enrayer la pauvreté ou faire cesser des guerres.

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Page 1: Guerre et Paix

vol 1 No4éTé 2009 – 5,95 $

GueRRe eT pAix

www.GeNeRATioNDiDees.CA

Page 2: Guerre et Paix

Génération d’idées est une organisation à but non lucratif, indépendante et non partisane dont la mission est d’offrir à la relève un espace dans lequel elle peut contribuer activement à l’avancement de notre société.

Conscient de l’apport de la diversité des opinions, cet espace encourage les regards nouveaux sur les enjeux politiques, sociaux, économiques et culturels propres à notre société. Il valorise l’expression des opinions divergentes et stimule l’innovation émergeant de la confrontation de celles-ci.

Animé par la conviction de l’importance pour la relève d’investir le débat public, Génération d’idées se veut donc un incubateur d’idées porteuses pour l’avenir de notre société et un porte-voix qui les exprime au nom de notre génération au sein du débat public.

Pour garantir ce rôle d’acteur public, Génération d’idées mise à la fois sur la mobilisation et l’activisme de ses membres, ainsi que sur un dialogue intergénérationnel.

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foNDATeuRs : Mélanie  Joly  –  Stéphanie  Raymond-Bougie  –  Paul  St-Pierre  Plamondon  CoNseil D’ADmiNisTRATioN : Francine  Champoux  –  Bernard  DescôteauxUgo  Dionne  –  Jean  Leclair  –  Ronald  Monet  –  Lorraine  Pagé  –  Anik  Trudel  –  Mélanie  Joly  –  Stéphanie  Raymond-Bougie  –  Paul  St-Pierre  Plamondon  –  Jean-François  BernierNicholas Cerminaro – Pierre-Antoine Fradet – Marc Jeannotte – Andréanne Michon – Jean David Tremblay-Frenette CoNseil exéCuTif : Mélanie Joly – Stéphanie Raymond-BougiePaul St-Pierre Plamondon – Jean-François Bernier – Nicholas Cerminaro – Pierre-Antoine  Fradet – Marc Jeannotte – Andréanne Michon – Jean David Tremblay-Frenette ComiTé RéDACTioN : Jean  David  Tremblay-Frenette,  président  –  Bello  Bakary,  rédacteur  en  chef  -  revue  –  Jean-François  Sylvestre,  rédacteur  en  chef  -  Internet  –  Marc  André  BodetMathieu  Bouchard  –  Hugo  Braën  –  Jannelle  Desrochers  –  Nicolas  Paquin  ComiTé ARTisTique : Andréanne  Michon,  présidente  –  Hélène  Brown  –  Natalie  ChapdelaineElizabeth-Ann Dionne – Olivier Lefebvre – Marie-Pier Veilleux ComiTé TeChNoloGie : Pierre-Antoine Fradet, président – Louis Côté – Nicolas Deault – Maya Rioux ComiTé CommuNiCATioN : Marc Jeannotte, président – Stéphanie Blanchet – Hélène Brown – Julie Dirwimmer – Geneviève Giasson – Roxanne Guérin – Jérémie Martin – Maria ReitAlexandrine  Salvas-Lamoureux  –  Anne-Valérie  Tremblay  ComiTé fiNANCemeNT : Nicholas  Cerminaro,  président  –  Paul  A.  Fournier  –  Louis  Côté  –  Hilal  El  AyoubiMarc-Nicolas Kobrynsky – Martin Letendre – Marc-André Ouellette – François Paquette – Maria Reit – François Rousseau – Anne-Valérie Tremblay ComiTé mise eN mARChé :Jean-François Bernier, président – Benoit Lord – Marie-Paule Giguère 

CollAboRATeuRs : TexTes : Estelle Drouvin – Sébastien Dubé – Yve Étienne Frenette – Marc Jeannotte – Marc-Nicolas Kobrynsky – Caroline Morin – Jean-François Sylvestre Jean-David Tremblay-Frenette meNToRs : Rose-Marie-Charest – Jocelyn Desjardins – Jean-Claude Hébert – Rémy Landry – Jean-François Lépine – Laura-Julie Perreault – Stéphane Roussel ARTisTes : Marianne Bousquet – Judith Brisson – Dylan Cram – Milena Doncheva – Simon Léveillé – Sarah Mangialardo – Melsa Montagne – James Playford – Zoë Yuristy CoRReCTioN : Rachel Bétournay – Caroline Nantel GRAphisme : Marianne Bousquet – Simon Léveillé impRessioN : Impart-Litho DisTRibuTioN : Messageries Gladu

Génération d’idées tient à remercier spécialement pour leur contribution l’ensemble des Forums Jeunesse rencontrés dans le cadre de la Tournée du Québec – Jacques P. Ménard – Réjean Parent – Jacques ProvostGilles Petitclerc – Olivier Lefebvre – Jean Couture – Benoit Martin – les jeunes et les bénévoles du Projet 80, ruelle de l’Avenir, ainsi que toutes les personnes qui font en sorte que Génération d’idées réalise sa mission

Génération d’idées a décidé d’innover dans ses méthodes de recrutement de membres. Félicitations à Louis-Edgar Jean-François et Stéphanie Raymond-Bougie pour l’arrivée de leur petite Edhany le 26 mai 2009 !

illusTRATioN De lA CouveRTuRe : simoN léveillé

01 Bello Bakary – 02 Marianne Bousquet – 03 Judith Brisson – 04 Rose-Marie-Charest – 05 Dylan Cram – 06 Jocelyn Desjardins – 07 Milena Doncheva – 08 Estelle Drouvin – 09 Sébastien Dubé – 10 Fleur de plastique – 11 Yve Étienne Frenette12 Jean-Claude Hébert – 13 Marc Jeannotte – 14 Mélanie Joly – 15 Marc-Nicolas Kobrynsky – 16 Rémy Landry – 17 Jean-François Lépine – 18 Simon Léveillé – 19 Sarah Mangialardo – 20 Andréanne Michon – 21 Melsa Montagne22 Caroline Morin 23 Laura-Julie Perreault – 24 Paul St-Pierre Plamondon – 25 James Playford – 26 Stéphanie Raymond-Bougie – 27 Stéphane Roussel – 28 Jean-François Sylvestre – 29 Jean-David Tremblay-Frenette – 30 Zoë Yuristy 

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Nouvelle impulsioN

Votre organisation, Génération d’idées (GEDI), véhicule des nouvelles idées, garde toujours sa première mission : générer des idées en offrant à la relève un espace unique et non partisan. Alors, où en est GEDI ? Où va-t-elle ? Ces interrogations, légitimes, vous ont sans doute titillé l’esprit. Réponse : une nouvelle impulsion est en marche pour mieux brasser les idées.

D’abord, vous avez entre les mains le quatrième numéro du magazine avec un logo revisité, une nouvelle signature graphique et l’affirmation artistique et rédactionnelle qui nous caractérise depuis les débuts. Le thème de cette parution est Guerre et Paix. Vous trouverez une pano-plie d’articles et de commentaires qui touchent tous les domaines de ce thème. Que ce soit la Guerre et la Paix en termes classiques, ou celles à l’étranger, chez soi ou en soi. La sélection des œuvres d’art présentée apporte une expression concrète d’idées créatives pour notre génération. C’est aussi une façon de comprendre le monde et d’interpréter son environnement. Génération d’idées dédie un espace à nos artistes afin qu’ils exposent leurs idées et leur vision à travers leurs œuvres.

Ensuite, GEDI est fière de vous présenter son nouveau site Internet. Il a été refait pour permettre à l’organisation et à vous, les visiteurs, une plus grande flexibilité. Concrètement, cela signifie une navigation optimisée pour les moteurs de recherche, une boîte de recherche, un fil RSS par catégorie d’article, de nouvelles sections et plus encore. Bref, c’est une plateforme plus dynamique et interactive pour donner

à l’organisation et aux lecteurs une plus grande liberté de générer plus d’idées. Allez sur le site, laissez vos appréciations, lisez le contenu et discutons-en.

Enfin, l’impulsion s’est concrétisée par une Tournée Génération d’idées dans toutes les régions du Québec. Objectif : sensibiliser chaque région à la cause de Génération d’idées et mobiliser la relève. Vous pouvez consulter cette tournée sur notre site www.generationdidees.ca. Il y a des balados (podcasts) des différentes rencontres dans diverses villes : Gatineau, Rivière-du-Loup, Rimouski, Matane, Chicoutimi-Jonquière, etc. Vous pouvez également suivre en direct et dans les mini-détails la Tournée dans la section « Twitter » de notre site et voir la couver-ture média en cliquant sur la section « galerie de presse ». Toute cette impulsion culminera avec un Sommet Génération d’idées prévu à Montréal en 2010. On y travaille…

Cette nouvelle impulsion de Génération d’idées ne vise qu’un but : générer des idées pour être une relève à la hauteur des défis qui assail-lent notre société. À vos claviers pour générer des nouvelles idées sur www.generationdidees.ca et dans le prochain numéro.

ARTisTe : DylAN CRAm, Napalm (Exploding Hearts)Série : 24 Frames – Impression jet d’encre – 92” x 228” – 2008

moT De lA RéDACTioN

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01 moT De lA RéDACTioN [Dylan  Cram]  02 sTATisTiques 04 éDiToRiAl – Je pARs eN GueRReeT Je vous iNviTe ! Stéphanie  Raymond-Bougie  05 éDiToRiAl – GueRRe eT pAix : lA GéNéRATioNDivoRCée  Mélanie  Joly  06 si lA pAix T’iNTéResse Sébastien  Dubé  –  Stéphane  Roussel  [Dylan  Cram]  08 éTATs DéfAillANTs Marc  Jeannotte  –  Rémy  Landry  [James  Playford]  12  sANs GueRRe poiNT De sAluT  Marc-Nicolas Kobrynsky  –  Jocelyn  Desjardins  [Judith  Brisson]  14  De l’iNTéRieuR Caroline  Morin  –  Rose-Marie  Charest  [Sarah  Mangialardo]16 pAix éCoNomique pAix soCiAle Yve Étienne Frenette – Jean-David Tremblay-Frenette – Jean-François Lépine  [Milena Doncheva] 18 l’oNu esT-elle NéCessAiRe ?  Jean-François  Sylvestre  –  Laura-Julie  Perreault  [Zoë  Yuristy]  22  JusTiCe RépARATRiCe, uN ChemiN D’AveNiR Estelle Drouvin – Jean-Claude Hébert [Melsa Montagne] 24 CRimiNAlisATioN Des iTiNéRANTs, uNe AbeRRATioN soCiAle Audrey  Coté  [Marianne  Bousquet]  eNTRevue AveC Alex25 DesTiNATioN : sommeT GéNéRATioNs D’iDées 2010 Paul St-Pierre Plamondon

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Il y a un vent de renouveau depuis l’élection de Obama, c’est certain. Un dialogue s’est ouvert entre les États-Unis et Cuba, Harper semble avoir vu la lumière en ce qui concerne nos chances de succès en Afghanistan et le président Sarkozy se démarque par une politique internationale qui en impressionne plus d’un. On pourrait même dire que la confiance générale envers les Nations Unies s’est renouvelée. Les écoles sont remplies de jeunes qui s’impliquent dans des organismes à vocation internationale que ce soit pour protége l’environnement, enrayer la pauvreté ou faire cesser des guerres.

Donc comment se fait-il que, à l’heure où l’on veut se départir des armes nucléaires et que tous semblent vouloir mettre la main à la pâte pour atteindre une « paix internationale », du même souffle, on crée des écoles pour la communauté noire en Ontario, il est impossible de bâtir des projets d’envergure à Montréal, on ne sait plus comment gérer Montréal-Nord et on n’a jamais assisté à autant d’allégations de corruption au Canada et au Québec ? Pour moi, voici les signes d’une démocratie locale fatiguée, prête à céder aux pressions issues de la peur des autres, à l’appât du gain et à un individualisme néfaste.

En fait, on a de la difficulté à « recruter » des membres de la génération Y dans toutes les instances politiques locales (canadienne, québécoise et municipale). Bien que plusieurs d’entre nous s’impliquent dans des associations communautaires, peu le font au sein d’organismes à voca-tion locale. Les politiques internationales sont importantes et peuvent définitivement influencer des populations entières, mais notre pouvoir d’action sur les éléments qui nous entourent est beaucoup plus impor-tant et concret. Il faut se réapproprier les instances qui peuvent avoir un impact direct sur notre vie de tous les jours. J’aimerais, par cet article, vous inviter à lutter contre certaines problématiques au sein même de notre société.

Dans les faits, je pars en guerre contre certaines institutions et certaines pratiques et je vous invite à en faire de même à l’endroit d’une problé-matique qui vous interpelle : créez un mouvement de masse et, des cellules d’intervention à tous les niveaux sur un sujet donné pour et par des gens de notre génération.

Voici comment cela fonctionne :

Vous verrez sur le site de Génération d’idées au cours du mois de juin des champs d’intervention qui nécessitent une prise en charge par notre génération. Vous adhérez à l’un de ces sujets et lorsqu’un groupe a au

moins trois intervenants, il est prêt à se rencontrer pour déterminer son champ d’intervention et les actions concrètes qu’il désire entreprendre. Vous pourrez ajouter des champs d’intervention. L’important est que deux personnes ou plus se joignent à votre initiative. Génération d’idées vous demandera de mettre à jour directement sur notre site les actions de votre groupe et dans la mesure du possible, nous tenterons d’amener ces initiatives sur la sphère publique afin que tous puissent constater que nous avons un influence sur les problématiques locales.

Personnellement, je pars en guerre contre l’ostracisme du quartier Montréal-Nord. Qui m’aime me suive ! Au menu : travailler avec les intervenants sociaux du coin ; participer à toute enquête publique liée aux événements de Montréal Nord et s’impliquer pour élim-iner le profilage racial – lisez ceci pour vous mettre en appétit : www.cdpdj.qc.ca/fr/publications/docs/Lettre-Montreal-Nord.pdf

Alors commando, à vos ordinateurs : www.generationdidees.ca - Enrôlez-vous et sortez vos armes de persuasion.

Parmi les thèmes abordés, vous pourrez partir en guerre contre la corruption provinciale et municipale, la pauvreté et ses effets sur les enfants, l’exclusion des aînés et des sans-abris, les hostilités entre Montréal et Québec et l’immobilisme des syndicats.

ApARTé

Des solutions innovatrices qui nous donnent matières à réflexions et un léger sourire :

Une association de femmes issues de la société civile kenyane avait décrété fin avril une semaine d’abstinence sexuelle afin d’inciter les hommes politiques à régler leurs différends et à réformer le pays. Elles estiment que les politiciens ne devraient pas avoir le temps de se consa-crer aux plaisirs de la chair compte tenu de la situation économique et politique critique du pays. Les deux camps rivaux ont finalement signé un accord de partage du pouvoir et M. Odinga est devenu Premier ministre d’un gouvernement de coalition.

Je pARs eN GueRRe eT Je vous iNviTe !

Il faut se réapproprIer les Instances quI peuvent avoIr un Impact dIrect sur notre vIe de tous les jours.

sTéphANie RAymoND-bouGieCofondatrice - GEDI

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GueRRe eT pAix : lA GéNéRATioN DivoRCée

Lorsque nous avons annoncé l’idée de traiter du thème « Guerre et Paix » dans le cadre d’un numéro de Génération d’idées, nous avions en tête d’aborder la question sous tous ses angles. Nous avons alors pensé traiter d’un type de conflit qui nous touche tous de près ou de loin : les conflits familiaux et, plus particulièrement, l’incidence du divorce/sépa-ration dans notre société et ses conséquences sur notre tissu social. Portrait du divorce vu par de notre génération, la génération divorcée.

On le savait déjà, au Québec, de moins en moins de couples se marient (religieusement ou civilement). En fait, avec seulement 22 156 mariages à notre actif en 2007, on se marie deux fois moins au Québec qu’il y a 25 ans (44 849 mariages en 1980). Par ailleurs, le taux de divorce est effarant : de 14 % en 1970, il est passé à 35,8 % en 1985 et 51,9 % en 2005. Un couple marié sur deux divorce et cela sans compter le nombre de séparations dans le cas de couples non-mariés.

Quand on regarde autour de nous, les statistiques n’ont rien d’étonnantes. Elles font foi d’une réalité partagée par plusieurs. La plupart des parents de mes amis ont divorcé, les miens également. Certains enfants ont vécu ces divorces à un jeune âge, d’autres à l’âge adulte. Certains vivent maintenant leur propre séparation. Mais les séparations des couples d’hier ont quelque chose de différent de celles d’aujourd’hui. En effet, la Révolution tranquille a bouleversé les Québécois, non seulement dans leur vision des rôles de l’État et de l’Église, mais surtout dans leurs valeurs et leurs rapports au couple et à la famille. En 1970, les couples se mariaient beaucoup. Les mariés avaient été éduqués strictement et religieusement, ils étaient jeunes et souvent moins expérimentés à certains égards. Dans plusieurs cas, la méconnaissance de l’un et de l’autre et leur évolution à l’âge adulte donnaient lieu à des mariages non fonctionnels. L’un des époux se réfu-giait dans le travail ou ailleurs. Les tensions au sein du couple étaient ressenties par tous. Peu à peu, le seuil d’acceptabilité du divorce aidant, les couples se sont séparés. Dans certains cas après 10 ans, 15 ans, 25 ans de mariage.

Or, peu de choses sont plus difficiles pour un enfant qu’un conflit au sein de sa famille. Il ébranle sa sécurité, bouleverse son bien-être et déforme ses perceptions. Lorsque le conflit est porté devant les tribunaux, il ne devient rien de moins qu’un traumatisme pour la cellule familiale.

C’est ainsi que cette réalité a nécessairement laissé des traces chez les enfants. On ne veut jamais répéter les erreurs de nos parents. Et voilà pour la psyché de la génération des enfants divorcés. Cette expérience a nécessairement un impact sur notre vision collective du couple, de la famille ou, du moins, de notre rapport aux enfants. Certes, on se marie moins. Pourquoi épouser un modèle qui n’a pas fonctionné chez nos aînés ? On essaie d’imposer notre façon d’être en couple. On reporte le fait d’avoir des enfants et on essaie surtout de trouver le bon conjoint pour les élever. On ne veut pas faire vivre ce qu’on a vécu.

Au-delà des considérations psychologiques, il y a certainement là un historique générationnel commun qui entraîne des conséquences. L’une d’entre elles est notre principale revendication : la conciliation travail-famille. Quand on comprend la racine de ce que l’on réclame, il est évident que le concept n’a rien à voir avec la paresse ou le manque d’ambition. Cette nécessité d’équilibrer nos vies professionnelle et familiale vient davantage du fait que nous tentons de réussir là où plusieurs avant nous ont échoué. Nous tentons d’assurer notre bien-être, celui de notre couple et celui de nos enfants puisque, pour nous, les trois composantes sont intrinsèquement liées. On retourne davan-tage vers des valeurs plus familiales qui, à notre sens, permettent une plus grande stabilité émotive chez nos enfants et chez nous bien évidemment. Malgré tout, parfois le couple se laisse. On tente alors davantage de préserver l’essence de la famille malgré l’animosité qui nous habite.

Rien ne garantit que la nouvelle approche de notre génération apportera de meilleurs résultats que chez celle de nos parents et qu’il s’agit là d’une conception plus saine des relations familiales. À force de chercher le conjoint parfait avec qui élever nos enfants, peut-être sommes-nous devenus trop intransigeants. On remarque déjà chez certains d’entre nous la présence de compromis vers la fin de la tren-taine (qu’ils n’auraient autrement pas faits plus jeunes) afin d’aller de l’avant avec le projet d’être parents. D’autres n’arrivent tout simplement pas à trouver ce conjoint (avec un nombre important de jeunes femmes éduquées célibataires). Il y a également lieu de se demander si le choix d’une entente de séparation à l’amiable se fait au détriment d’efforts à faire survivre une relation qui a besoin d’être nourrie. Idéalisons- nous la façon d’élever nos enfants ? Sommes-nous pris avec les mêmes questionnements que l’étaient nos parents ?

Une chose est sûre, nous tentons de solutionner certaines erreurs du passé. Il y a de ces batailles qui parfois laissent autant de traces que les grandes guerres des livres d’histoire.

peu de choses sont plus dIffIcIles pour un enfant qu’un conflIt au seIn de sa famIlle.

mélANie JolyCofondatrice - GEDI

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sébAsTieN Dubé

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Depuis la fin des colonialismes espagnol et portugais au début du 19e siècle, l’histoire de l’Amérique latine a été profondément marquée par la présence des forces armées dans la sphère politique. Certains pays ont connu, à répétition, des coups d’État impliquant des militaires. En Bolivie, par exemple, 200 coups d’État ont été perpétrés en autant d’années d’indépendance. Le Brésil, quant à lui, n’a connu que deux coups d’État militaires depuis son indépendance en 1822. Cependant, le coup de 1964 a ouvert la voie à un régime militaire qui a duré 20 ans.

Dans ce contexte historique caractérisé par l’instabilité et la violence politique récurrente, un État se démarque : le Costa Rica. Après une guerre civile qui a suivi une élection contestée en 1948, les dirigeants de ce petit pays de l’Amérique centrale ont tenu un pari des plus risqués. En effet, dans le but d’assurer la pacification et la stabilité démocra-tique du pays, il fut décidé d’abolir unilatéralement les forces armées et de dévier vers la santé et l’éducation les ressources englouties dans la défense. C’est pourquoi la Constitution de 1949, toujours en vigueur, stipule l’absence de forces armées permanentes et son remplacement par une police entièrement sous contrôle civil. Ses responsabilités se limitent à surveiller les frontières et à assurer la défense nationale et l’ordre public. Concrètement, on estime que moins de 0,5 % du P.I.B. du pays est ainsi alloué à la sécurité. Soixante ans après cette décision historique, force est de constater que les dirigeants du Costa Rica ont gagné leur pari.

Premièrement, même si l’isthme centro-américain a été déchiré par des guerres civiles d’une violence inouïe au cours des années 1960, 1970 et 1980, le Costa Rica n’a jamais été attaqué par ses voisins et a pu préserver son régime démocratique. À la même époque, le Guatemala, le Salvador et le Nicaragua voisins se sont enlisés dans des conflits atroces fauchant des centaines de milliers de vies. Deuxièmement, le Costa Rica a continué à creuser l’écart avec ses voisins et à se maintenir parmi les pays latino-américains les plus développés. Pour reprendre une expression de son président actuel et récipiendaire du Prix Nobel de la Paix en 1987, Óscar Arias Sánchez, voilà le genre de résultat

qu’on obtient quand les enfants se promènent dans la rue avec des livres sous le bras plutôt qu’avec des armes.

Pour certains historiens, l’exception costa-ricaine s’explique par une faible proportion de population autochtone sur son territoire, ce qui a permis le développement de relations sociales plus égalitaires et moins conflictuelles et ce, même durant le colonialisme espagnol. Cela est sans doute vrai. Mais un fait demeure : le développement particulier du Costa Rica s’explique aussi par des décisions courageuses prises par des dirigeants politiques préoccupés par le bien-être de la population et guidés par des idéaux pacifistes.

Entre 2003 et 2008, les dépenses militaires ont augmenté de 91 % en Amérique latine pour atteindre la rondelette somme de 47 milliards de dollars américains. Bien sûr, la lutte contre le crime organisé et le remplacement d’appareils vieillots servent à expliquer une partie de ces dépenses. Néanmoins, pendant que des pays comme le Vénézuela ou le Chili continuent à dépenser dans la défense comme au bon vieux temps de la Guerre froide, le Costa Rica continue à investir dans l’éducation et à ne pas avoir d’ennemi, réel ou imaginaire. Pendant que plusieurs croient que pour avoir la paix il faut préparer la guerre, le Costa Rica démontre plutôt que pour avoir la paix, il faut préparer la paix.

si lA pAix T’iNTéResse

« voIlà le genre de résultat qu’on obtIent quand les enfants se promènent dans la rue avec des lIvres sous le bras plutôt qu’avec des armes »

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sTéphANe RousselProfesseur à l’UQAM et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en politiques étrangère et de défense canadiennes

CommeNTAiRe

ARTisTe : DylAN CRAm, BurmaSérie : 24 Frames – Huile sur impression jet d’encre – 128” x 237” – 2008

si lA pAix T’iNTéResse

La réflexion sur la paix passe par la recherche d’exemples pouvant inspirer des solutions concrètes. L’étude du cas du Costa Rica soulève deux questions. D’une part, qu’est-ce qui explique ce refus de créer des forces armées ? Des circonstances favorables propres au Costa Rica ? Ou la volonté des dirigeants politiques et de la population ? D’autre part, les facteurs à l’origine de cette décision peuvent-ils être reproduit ailleurs ? La réponse à cette question découle en partie de la première, puisqu’il est sans doute plus facile d’exporter une volonté politique que de tenter de recréer, artificiellement, des « circonstances favorables ».

Un autre cas cité fréquemment en exemple est celui de l’Islande, qui entre-tient uniquement une garde côtière. Si l’on peut dire que les Islandais sont animés d’un esprit pacifiste, il faut ajouter qu’ils ont été aidés par les circonstances. D’une part, ce pays est une île isolée et dépour-vue des ressources stratégiques, ce qui réduit les risques d’agression. D’autre part, l’Islande est membre de l’OTAN et accueille des forces étrangères sur son territoire.

Il n’est pas besoin d’aller si loin pour découvrir une réflexion sur la création de forces armées. Un tel débat a eu lieu au Québec à la veille du référendum de 1995. Un Québec souverain devrait-il avoir des forces armées et être membre d’alliances ? La suite des choses n’a pas forcé de suite au débat, mais celui-ci a démontré combien les pressions sont fortes sur les dirigeants politiques et combien la population peut être ambivalente sur ce point.

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éTATs DéfAillANTs

mARC JeANNoTTe

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Depuis les ANNées 1990, les GouveRNemeNTs oCCiDeNTAux eT les GRANDes iNsTiTuTioNs iNTeRNATioNAles s’iNquièTeNT Des éTATs qui N’AssuReNT pAs le miNimum Requis à leuRs populATioNs. oN esTime à 2 milliARDs le NombRe De peRsoNNes qui viveNT DANs Ces éTATs DéfAillANTs.éTATs

DéfAillANTs

ARTisTe : JAmes plAyfoRD, Untitled Tree # 3Impression jet d’encre – 40” x 50” – 2009 – www.playfordphotography.com

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iNGéNieRie DéfAillANTeCette ingénierie se fait à plusieurs niveaux. Elle s’amorce avec la présence des gouvernements et d’organisations internationales pour pacifier les relations entre acteurs politiques et superviser les accords qui mettent un terme aux conflits. L’objectif est d’amener les partis à s’entendre sur une gouvernance démocratique. Les États doivent réaliser des élections libres, instaurer des pratiques de bonne gouver-nance et garantir le respect des droits humains.

Dès lors, s’enclenche la reconstruction de l’État sur un modèle préétabli. Ainsi, pour obtenir le financement nécessaire, une liste de conditions doit être imposée par les institutions financières internationales et les gouvernements occidentaux : privatisation des marchés, libéralisation des secteurs économiques de base et des services publics.

Des CoNséqueNCes pRévisiblesEn peu de temps, les États reconstruits embarquent dans la dépendance et l’endettement. On impose trop rapidement la tenue d’élections. On demande qu’une police soit efficace, sans que les paramilitaires locaux soient complètement désarmés et on force des ajustements économiques qui empêchent le protectionnisme et des normes de travail décentes. Le tout pour faciliter l’investissement étranger. Conséquemment, des multinationales injectent des millions, mais les communautés sont incapables de se bâtir des entreprises locales. La pauvreté et les taux de chômage s’accroissent. Les gouvernements en place, sans les revenus publics nécessaires, perdent leur légitimité, car ils sont incapables d’assurer les services de base. Conséquences : les milices se forment à nouveau pour revendiquer des changements et les tensions sociales reprennent. Et la communauté internationale doit à nouveau intervenir. Et le cycle reprend. Sombre portrait. Les cas d’Haïti, du Libéria, du Congo, de l’Angola, de la Somalie et de nombreux États de l’Amérique latine en dessinent pourtant parfaitement l’échec.

lA pRéveNTioN, fACile eT DuRAbleLa communauté internationale investit des milliards pour des interven-tions militaires mais elle peine à remplir ses obligations d’atteindre la cible de 0,7 % de son PIB à l’aide au développement. Pourtant, pour enrayer les causes fondamentales des conflits, la prévention se veut la plus facile et la moins coûteuse des stratégies à long terme. L’Onu et ses agences tentent de faire comprendre cette stratégie à nos gouvernements depuis le rapport du Programme des Nations

Unies pour le Développement (Pnud) de 1994, qui mena aux Objectifs du Millénaire pour le développement de 2000. Ces objectifs visent à réduire, d’ici 2015, l’extrême pauvreté, à favoriser la prise en main des communautés, à assurer une éducation primaire universelle et à attein-dre l’égalité entre les sexes et les groupes ethnoculturels. Le temps passe, le travail reste à accomplir, mais l’argent manque.

Alors, quelles sont les vraies priorités des gouvernements occidentaux ? Permettre aux communautés en difficulté de se relever d’elles-mêmes, ou simplement reproduire un modèle politique et économique qui a de grosses failles ? L’enjeu est certes complexe, mais tant que nous questionnerons les actions sur le terrain, les conséquences de celles-ci ressortiront et leurs échecs seront plus visibles.

Ces pAys se DémARqueNT pAR l’AbseNCe D’uNe foRCe De l’oRDRe léGiTime CApAble De mAiNTeNiR lA séCuRiTé, pAR lA pRéseNCe D’uNe éCoNomie à lA limiTe Du léGAl eT Du CRimiNel. Ces éTATs soNT mARqués pAR Des ClivAGes eThNiques, liNGuisTiques ou ReliGieux. les souRCes De CoNfliTs Au seiN De l’éTAT soNT eNDémiques eT lA violeNCe DevieNT sTRuCTuRelle Dès que Des GRoupes ARmés se CoNTesTeNT le pouvoiR. lA libRe CiRCulATioN Des miliCes eT Des ARmes DésTAbilise les RéGioNs. les GouveRNemeNTs oCCiDeNTAux oNT uNe peuR bleue De CeTTe DéChéANCe. lA DéfAillANCe De Ces éTATs fAvoRise l’émeRGeNCe Des GRoupes CRimiNels TRANsNATioNAux, les CRises humANiTAiRes eT les GueRRes eThNiques, eN plus De CoNTRibueR, DiT-oN, à lA moNTée Des exTRémismes eT Du TeRRoRisme. les éTATs DéfAillANTs, suRTouT Des pAys « moiNs iNDusTRiAlisés », soNT DeveNus l’uNe Des pRioRiTés Du 21e sièCle. les puissANCes oCCiDeNTAles eT lA mAJoRiTé Des oRGANisATioNs iNTeRNATioNAles hoRmis l’oNu, CoNsiDèReNT l’iNGéNieRie éTATique Comme seule fAçoN effiCACe De CoNTReR CeTTe meNACe. mAis qu’eN esT-il Au JusTe ?

les cas d’haïtI, du lIbérIa, du congo, de l’angola, de la somalIe et de nombreux états de l’amérIque latIne en dessInent pourtant parfaItement l’échec.

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Rémy lANDRyLieutenant Colonel à la retraite des Forces armées canadiennes et chercheur associé avec le Groupe d’étude et de recherche sur la sécurité internationale de l’UdeM

CommeNTAiRe

Le sujet abordé est vaste et d’une grande complexité, de plus son traite- ment est loin de faire l’unanimité. La représentation que vous faites, par ailleurs, de la situation des États en difficulté, souvent associés au concept d’« État en faillite », est simpliste et laisse entrevoir que la solution est uniquement entre les mains des pays occidentaux. Malgré ce constat, il n’en demeure pas moins que plusieurs notions soulevées sont partagées par de nombreux chercheurs de diverses spécialités.

Votre approche, malgré tout, néglige d’introduire un aspect incon-tournable à votre problématique, soit la dynamique générée par l’intensification de la mondialisation, avec ses effets d’interdépendance, associée à la médiatisation croissante de l’information auprès des sociétés civiles. En effet, ces deux facteurs ont pour effet d’exacerber les progrès de la démocratisation, tout en accentuant les différences. Ils ont aussi comme conséquence, soit d’adoucir ou d’amplifier les impacts du capitalisme principalement dans les relations Nord-Sud. Le tout d’ailleurs, n’est pas étranger à l’aggravation interne de la situation des États en difficulté, tout en stimulant le besoin d’intervention de la communauté internationale.

Avec l’apparition de nouvelles menaces internationales, lesquelles ébranlent les fondements du présent système international, les pays les plus stables ne doivent pas s’isoler sous prétexte qu’ils ne sont pas directement concernés. L’indifférence lors du génocide rwandais nous rappelle que nous sommes tous citoyens du monde et qu’il est de notre responsabilité d’intervenir, même si ce n’est que pour des raisons de solidarité humaine. Par contre, les solutions et les intervenants de tous types se font de plus en plus nombreux et nous nous devons d’éviter toute action unilatérale. Les futures interventions ainsi que les stratégies préventives devront donc se construire sur la légitimité d’un multilatéralisme englobant et orchestré par une O.N.U. renouvelée pour avoir une chance de succès.

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Ces dernières années, l’environnement a progressivement occupé une place prépondérante dans le discours international ; c’est comme la tarte au sucre, personne ne peut être contre. Le sujet est neutre, il est rassembleur et permet d’occulter la stagnation des libertés civiles. Comme si la chute de l’ex-URSS avait mis un point fi nal à cette ques-tion : après tout, la démocratie a gagné non ?

L’amélioration de la condition humaine est intimement liée à la nature du gouvernement qui préside à ses destinées. En Birmanie, en Tunisie, en Ouzbékistan, en Biélorussie, on arrête, torture et persécute toute opposition au gouvernement. Au Zimbabwe, la corruption et l’indifférence du gouvernement Mugabe ont fait chuter l’espérance de vie de 60 ans en 1990 à 36, aujourd’hui. Seulement 18 % de ses habitants sont satisfaits de l’état de leur démocratie. C’est sans parler de la Chine, de l’Iran et de la Corée du Nord, où l’opacité du régime empêche de peindre le portrait complet des violations des droits de l’homme. Globalement, c’est encore 2,6 milliards d’êtres humains qui vivent dans des pays non libres en 2009, d’après Freedom House, State of the World 2009.

Aujourd’hui, le reste du monde abandonne ces peuples à leur triste sort. C’est avec empressement que nous puisons les justifi cations pour l’inaction dans les échecs en devenir que sont l’Iraq et l’Afghanistan. Comme Ponce Pilate, nous pouvons nous laver les mains de la misère et du malheur du voisin en disant « nous avons essayé ». Refl ets de leurs peuples, les gouvernements occidentaux sont bien trop heureux « d’être extrêmement préoccupés », de « condamner vigoureuse-ment » et autres explétifs vides de sens et d’actions.

Cette impotence pue au nez. Il est évident qu’une démocratie aux institutions solides – lire sans corruption – et les libertés civiles qui l’accompagnent améliorent signifi cativement le niveau de vie d’un peuple. Si le bien-être des populations du globe nous tient véritable-ment à cœur, on ne peut que supporter l’expansion de la démocratie et des libertés civiles, à la pointe d’un fusil si nécessaire.

Pour temporiser, les adversaires des interventions militaires avancent deux arguments principaux : la démocratie n’est pas exportable et s’il faudrait l’imposer, ce serait préférable par les voies diplomatiques.

Premièrement, la démocratie est tout à fait exportable : non pas les valeurs ou la pensée occidentale mais le droit d’être libre de ses actes et de son intégrité physique, de choisir son gouvernement et d’avoir un cadre de vie sécuritaire et des lois acceptées par la majorité.

Deuxièmement, la diplomatie sans guerre est un canard boiteux : « la guerre n’est que le prolongement de la politique par d’autres moyens » – Clausewitz. La diplomatie sans la guerre, c’est un policier sans les contraventions, c’est un tigre édenté et dégriffé, ce sont des sanctions économiques qui jouent le jeu du despote en place en affaiblissant la population locale. La diplomatie sans guerre, c’est le rappel d’un ambassadeur ; oh ! que le monde chie dans ses braies quand ça arrive. La diplomatie sans guerre, c’est cette façon qu’ont les gouvernements de berner les leurs en prétendant qu’ils ont « fait quelque chose », même si l’histoire des sanctions économiques est une succession d’échecs. Il est simplement utopique de penser que les autocrates de ce monde vont abandonner le pouvoir parce que l’Occident le leur demande gentiment ; sans guerre, ou sa menace, pas de résultats.

Si certains États se prêtent moins à une intervention militaire parce qu’il est hautement probable que l’on remplacerait un tyran par un autre, d’autres sont des candidats évidents. En 1990, la junte militaire birmane pensait légitimiser son précédent coup en organisant des élections. La Ligue nationale de la démocratie de Aung San Suu Kyi remporta les élections avec 80 % des suffrages exprimés. Ce fut le début et la fi n de la démocratie en Birmanie ; à ce jour, la leader du mouvement demeure en détention.

Finalement, l’environnement et l’expansion de la démocratie et des libertés civiles ont quelque chose en commun : tout le monde est pour, mais personne ne veut faire sa part.

sANs GueRRepoiNT De sAluTmARC-NiColAs KobRyNsKy

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sANs GueRRe

ARTisTe : JuDiTh bRissoN, Massacre of the Black Madonna by means of Depleted UraniumSérie  : A Culture of War – Acrylique sur 4 toiles – 5’ x 19’ – 2008

JoCelyN DesJARDiNsAuteur, Manifestement Vert

CommeNTAiRe

L’environnement est le premier des droits humains, disait Ken Saro-Wiwa.En effet, comment exercer pleinement ses libertés civiles dans un envi-ronnement dégradé ?

Si ces libertés sont bafouées, ce n’est pas en raison d’un discours envi-ronnemental dominant, mais au nom d’intérêts divers et complexes à la moralité boiteuse. Nous nous battons mal. Et nous faisons aussi mal la guerre que nous conduisons notre diplomatie.

Cette diplomatie détermine si une entente est possible en fonctiondes conditions disponibles. S’il y en a, on cherche des règles d’accommodements. Sinon, on quitte le jeu et on fait face aux conséquences de son retrait.

Or, la guerre n’est plus la seule conséquence aux blocages. De nos jours, les désaccords internationaux sont nombreux et complexes. Portent-ils tous des germes guerriers ? Non. Les ententes interna-tionales, elles, sont porteuses d’accommodements en fonction des conditions disponibles… et perfectibles autrement que par la menace guerrière. Ainsi donc, il ne faut pas de meilleures guerres, mais moins. Et il ne faut pas moins de diplomatie, mais une meilleure, conjuguée à des conséquences autres que la guerre.

Bref, au lieu de considérer la diplomatie sans guerre comme une hérésie, nous ferions mieux de voir la diplomatie sans menace de repré-sailles comme telle. « La guerre est toujours la sanction d’un échec », affi rmait Dominique de Villepin. Elle berne les nations qui la mènent et pousse les parties impliquées à l’absolutisme.

Exportable la démocratie ? Contagieuse, certes. À la pointe du fusil ? Déci-dément, non. Toutes les valeurs prétendument universelles et supérieures ayant été imposées par les armes fi gurent aujourd’hui au rang d’artefacts d’une morale dépassée. Qu’il n’en soit pas ainsi de la démocratie, de l’environnement et de tous les autres droits fondamentaux.

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ARTisTe : sARAh mANGiAlARDo, Sans titreSérie Reconstructions 4 – Épreuve chromogène – 19“ x 19“ – 2008

De l’iNTéRieuRCARoliNe moRiN

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À côté des grandes batailles que se livre l’humanité depuis des années, il y a celles, non moins grandes, mais souvent négligées et qu’on ne voit pas à la télé, qu’on se livre à soi-même. Je ne parle même pas des batailles physiques contre la maladie ou des parties de notre corps qu’on n’aime pas. Je parle de la guerre incessante qu’on mène contre ce qu’on est intrinsèquement, à l’opposé des modèles proposés par la société. La bataille contre la vitesse exigée par le travail, en opposition avec notre besoin de sommeil commandé par l’oreiller.

Certains peuvent croire qu’une telle démarche thérapeutique est égocentrique. Pourtant, il n’y a qu’un humain malheureux pour rendre les autres malheureux. Creuser au fond de soi, y découvrir ses douleurs, ses blessures, ses mauvais tournants, les bons aussi, nous rend plus indulgent envers les autres. La psychanalyse m’a appris, entre autres, que s’accepter soi-même, c’est le plus beau cadeau qu’on puisse faire à la société. Quand on se regarde droit dans le ventre, on n’a plus peur de regarder les autres et de les accepter tels qu’ils sont, sans les juger. Quand on médite, on n’a plus envie de médire !

Plonger au fond de soi, c’est aussi découvrir quels sont nos désirs les plus forts, les plus authentiques, afin de mieux les satisfaire. Ça prend une bonne dose de courage dès le départ. Comme le dit Pol Pelletier dans ses ateliers, il faut accepter de se mettre en déséquilibre. Il faut être prêt à accepter que notre vie bascule complètement, sans retour en arrière. Ça peut avoir l’effet d’une bombe ! Écouter son ventre, son cœur, c’est faire taire son cerveau, l’éducation qu’on a reçue et les règles imposées. Ça peut changer une vie, mais en mieux, puisqu’on se rapproche de notre vérité.

Plonger dans son fond, c’est aussi se respecter dans ce que la nature nous a donné de plus précieux : notre instinct, notre chant, notre unicité, nos talents. C’est difficile, par la suite, de faire semblant, de nier notre personnalité.

Il n’y a rien d’ésotérique à vouloir être mieux, pour soi et pour les autres. Pourtant, tout plongeon intérieur paraît encore suspect. À l’heure où rien ne va plus, cela devrait être encouragé. Utiliser nos outils intérieurs ne coûte pas bien cher par rapport à tout ce qu’on investit sur notre appa- rence extérieure. Hervé Kempf, dans ses essais Pour sauver la planète, sortez du capitalisme et Comment les riches détruisent la planète, nous le répète : la surconsommation nous a éloignés des valeurs fondamen-tales qui assurent la survie de l’espèce humaine. Si on ne change pas nos habitudes, il y a un danger imminent pour l’être humain. Ainsi, on devrait se rappeler que notre principale richesse, on la porte tous à l’intérieur de nous, peu importe l’apparat dont elle est vêtue.

Enfin, quand on est en paix avec soi, on n’a pas envie de faire la guerre à qui que ce soit.

Rose-mARie ChAResTPrésidente de l’Ordre des psychologues du Québec

CommeNTAiRe

Les guerres ont des effets dévastateurs pour l’être humain. Pourtant, il les fait. Le conflit avec l’autre, dans la sphère intime comme au plan international, a sa première représentation dans le conflit avec soi-même. Cette division entre différentes parties de soi et cette oppo-sition entre le désir et la peur de vivre, de réussir, d’aimer habitent et animent la personne tout au long de sa vie. Certains trouveront des solutions à leurs dilemmes. D’autres, de manière subtile ou évidente, se mettront en échec, voire s’autodétruiront. Je suis d’accord avec Caroline Morin : les guerres que l’on se livre à soi-même méritent notre attention. Il en va du bien-être de la personne, de son développement, mais aussi de sa participation heureuse et productive à la vie des autres et à la société dans son ensemble.

Toute démarche rigoureuse vise une intégration des différents aspects de la personne, ce que Caroline Morin appelle son ventre, son cœur et son cerveau, pour donner un sens cohérent à son identité, à sa vie et à sa relation au monde. La personne qui se connaît mieux et qui a résolu ses conflits intérieurs choisit librement parmi les différents rôles que lui propose la société. Elle peut même en créer ou en inventer, pour son plus grand bonheur et celui de la collectivité. En ce sens, je ne vois pas d’opposition entre une quête de vie intérieure harmonieuse et les exigences de la société. De plus en plus de gens y croient. Tant mieux.

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pAix éCoNomiquepAix soCiAleyve éTieNNe fReNeTTeJeAN DAviD TRemblAy-fReNeTTe

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Les concepts de guerre, paix et société sont intimement liés. Une société est une réunion d’individus vivant de manière organisée au sein d’un milieu particulier. Elle est basée, entre autres, sur des échanges de biens, de services, d’idées. Comme dans tout écosystème, lorsque cette chaîne d’échanges est rompue, on fait face à une situation trouble provenant du désir de combler des carences. Un conflit peut donc émerger d’un mécontentement et se traduire par des manifestations pacifiques par exemple. Dans un cas extrême où le trouble persisterait, ces manifestations peuvent conduire à une insurrection civile. Nous vivons présentement l’une de ces périodes charnières où une grande partie de la population mondiale remet en cause les fondements de nos échanges économiques sur fond de tensions sociales.

Les turbulences qui frappent actuellement l’économie mondiale tirent principalement leur origine du problème des prêts hypothécaires à haut risque (subprime) aux États-Unis. Divers plans de sauvetage des banques ainsi que de l’industrie automobile ont été difficilement arra-chés aux représentants démocratiquement élus du peuple américain. Cependant, ceux-ci étaient souhaitables pour éviter une répétition de la Grande Dépression des années 1930. Il n’en reste pas moins que le simple citoyen se questionne à savoir si ces mesures offriront une aide concrète aux travailleurs affectés ou si les milliards injectés contribueront uniquement à enrichir la classe dirigeante, celle-là même à la source de la crise.

Les rues des pays affectés par la crise sont prises d’assaut par des citoyens en colère. En Islande par exemple, on a recensé un nombre grandissant de manifestations dans les rues de la capitale Reykjavik à la suite de l’effondrement du système financier du pays. On a d’ailleurs dû nationaliser une grande partie du système bancaire après la perte de confiance des investisseurs internationaux. Un grand nombre d’Islandais se retrouvent aujourd’hui avec des dettes exorbitantes en devises étrangères. En Grèce, c’est plutôt le désengagement de l’État qui a causé de nombreuses émeutes au cours de l’été 2008. La Grèce, voulant se conformer aux exigences de l’Union Européenne, a enclenché un mouvement massif de privatisation de ses routes, ponts, écoles et hôpitaux. Tout cela alors que les citoyens grecs perdent leurs emplois à cause de la crise économique mondiale.

Le Canada n’est pas à l’abri d’une situation similaire puisqu’il fait face, lui aussi, à un fort ralentissement économique dû à sa proximité économique et commerciale avec les États-Unis. Une injection de capitaux a été nécessaire afin de sauvegarder l’industrie automobile canadienne bien que sa pérennité soit loin d’être assurée au sein de la province la plus riche du pays, l’Ontario. Parallèlement, l’industrie des ressources naturelles, en particulier l’exploitation du pétrole, est en perte de vitesse et tout l’Ouest canadien s’en trouve fragilisé, plus particulièrement l’Alberta, vache à lait du système de péréqua-tion dont le Québec a tant profité au cours des dernières années. Les sources de revenu des divers paliers gouvernementaux se tarissent et des coupures au sein des programmes sociaux jugés intouchables sont maintenant envisageables. Une augmentation des frais de scolarité ou une possible réduction de la taille de la fonction publique ne constitue- raient-elles pas le moteur de manifestations populaires d’une ampleur inégalée alors que nombre de familles et de chômeurs réclameront de meilleures conditions de subsistance ?

Il nous apparaît clair que le concept de « guerre » n’implique plus nécessairement l’usage des armes dans le but de conquérir un espace géopolitique ou de défendre son territoire, mais peut être une résul-tante de tensions sociales pouvant mener éventuellement à des conflits armés internes. Pensons aux autorités chinoises qui, à l’heure actuelle, craignent bien davantage les querelles intestines découlant du ralentissement économique qu’un conflit international de nature géopolitique. La définition du périmètre d’une guerre au XXIe siècle est probablement propre à chaque pays. Croissance économique rimera dorénavant avec paix sociale interne et moins avec la situation exté-rieure. Dans un monde où les états pauvres d’antan feront la barbe aux puissances économiques traditionnelles, les disparités économiques entre classes sociales seront-elles, de nouveau, sources de conflit ? Il est à souhaiter que le Canada et le Québec sauront préserver l’équilibre qui leur sied si bien.

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ARTisTe : mileNA DoNChevA, Target – DetailImpression numerique – 2007

JeAN-fRANçois lépiNeAnimateur-journaliste, Une heure sur TerreSociété Radio-Canada/Télévision

CommeNTAiRe

Oui, nous vivons une période charnière où les fondements de l’économie mondiale sont de plus en plus contestés. Mais la crise économique actuelle n’a fait qu’accentuer ces tensions. Les problèmes liés aux échanges économiques inégalitaires ont des racines beaucoup plus anciennes.

Bien avant la crise financière de 2008, plusieurs membres du G-20 ont manifesté leur volonté de changer les rapports entre les économies développées et celles en développement. Avons-nous déjà oublié la crise alimentaire qui a provoqué, en 2007, de bien plus grandes mani-festations contre un système qui menace l’agriculture des pays pauvres et qui pousse les prix des denrées de base à la hausse ?

Ce que la crise financière a apporté – heureusement, je dirais – c’est une légitimité accrue à ceux qui disent depuis longtemps que le système économique mondial n’avantage que les plus riches.

Il en est ainsi dans chacun de nos pays. Les Chinois n’ont pas attendu la crise économique actuelle pour manifester. Ils sont même plus calmes, ces temps-ci, parce que plus fragilisés. Les travailleurs chinois qui perdent leurs emplois par milliers aujourd’hui manifestaient bien plus violemment il y a un an ou deux, en voyant que seule une minorité profitait de la croissance.

Ici, ce ne sont pas les hausses de frais de scolarité ou les coupures de postes qui pourraient provoquer l’impatience, mais l’arrogance de nos dirigeants devant l’appauvrissement d’une partie de plus en plus importante de la population.

Tout cela n’est pas circonstanciel ou provoqué par une crise des prêts hypothécaires, mais le résultat d’un grave problème de répartition de la croissance à l’échelle de la planète.

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JeAN-fRANçois sylvesTRe

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ApRès plus De 60 ANs D’hisToiRe, l’oRGANisATioN Des NATioNs uNies (oNu) esT iNTeRveNue DANs De mulTiples CoNfliTs à TRAveRs le moNDe pouR mAiNTeNiR lA pAix. AuJouRD’hui, il esT Temps De se poseR lA quesTioN : l’oNu esT-elle uTile eT effiCACe ? uNe iNTeRRoGATioN DiffiCile, TANT lA quesTioN esT Complexe, mAis NéCessAiRe.

l’oNu A uN moDe De foNCTioNNemeNT louRD. ses DélAis D’iNTeRveNTioN soNT exTRêmemeNT leNTs à CAuse De sA buReAuCRATie pesANTe. RésulTAT : Des millieRs De peRsoNNes peRDeNT lA vie à CAuse De CelA.

l’oNuesT-elle NéCessAiRe ?

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L’Onu a été fondée en 1945, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en remplacement de la Société des Nations, qui n’avait pas su ou pu empêcher la guerre. Elle a pour objectif de prévenir un autre conflit mondial. Mise sur pied par les Alliés, l’Onu est donc une création de l’homme, pour éviter à tout jamais la guerre et ses atrocités. Bref, c’est une plateforme où les États discutent entre eux pour résoudre leurs différends par la diplomatie au lieu de la guerre. La paix est au cœur des préoccupations de cette organisation en symbiose avec la Déclaration des droits de l’homme, signée par les 58 pays membres le 10 décembre 1948.

À sa base, elle est composée des 15 membres du Conseil de sécu-rité dont cinq membres sont permanents : la Chine, les États-Unis, la Fédération de Russie, la France et le Royaume-Uni. Les 10 autres membres sont élus par l’Assemblée générale pour un mandat de deux ans. Chaque membre du Conseil de sécurité dispose d’une voix. Les décisions de procédures sont prises par un vote affirmatif d’au moins neuf des 15 membres. Les questions de fond sont également prises par un vote affirmatif de neuf membres, parmi lesquels doivent figurer les cinq membres permanents. Si un membre permanent est opposé à une décision, il peut voter contre. Il exerce alors son droit de veto.

Le problème de l’Onu découle du Conseil de Sécurité et de ses prises de décisions. Quelques exemples : Dans les années 90, le conflit entre la Croatie et la Serbie a fait des centaines de milliers de morts et a été le théâtre d’un épouvantable génocide. En 1994, il y a eu le génocide rwandais, un des pires de l’histoire de l’humanité avec le massacre de près d’un million de personnes. Aujourd’hui, c’est le Darfour, région de l’ouest du Soudan, où sévissent des atrocités inacceptables. Ce ne sont là que quelques exemples où une intervention rapide de l’Onu aurait pu faire éviter l’horreur.

Mais, la prise de décision est tellement compliquée que rien n’y fait. Juste pour que le mot génocide apparaisse dans les communiqués ou dans les déclarations du secrétaire général, il faut un interminable débat. Même lorsque c’est une évidence. Conséquence : les prises de décisions sont extrêmement lourdes.

L’Onu peine à prendre des décisions parce que les cinq membres permanents ont un droit de veto. Ceux-ci bloquent souvent des déci-sions qui sont cruciales pour la bonne marche de l’organisation. De plus, elle compte plus de 100 000 fonctionnaires. C’est une grosse machine compliquée peu adaptée aux besoins de notre époque.

L’Onu est prisonnière de sa propre structure. Les changements tardent à venir. Le monde a changé mais l’organisation reste empêtrée dans ses carences. Les mêmes qu’il y a 60 ans. C’est donc une grande réforme que doit entreprendre l’Onu. Est-ce qu’il y a une volonté de change-ment des pays membres ? Le Conseil de sécurité devra apprendre à réagir beaucoup plus rapidement. Des millions de vies humaines pourraient être sauvées.

L’hypocrisie des grandes puissances occidentales nous démontre le peu d’intérêt que peuvent avoir ces pays pour les autres. Un bel exemple de cette hypocrisie est le drapeau olympique, où sont affichés les cinq anneaux qui représentent les cinq continents. Question : pourquoi il n’y a jamais eu de jeux olympiques en Afrique ? Sûrement parce que ce continent n’a pas de poids économique. C’est triste. Il faut revenir à la philosophie de base de la création de l’Onu. Et réformer cette institu-tion vitale pour une véritable paix mondiale.

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lAuRA-Julie peRReAulTDiplômée en relations internationales de l’Université de Caroline du Nord à Chapel Hill et journaliste à la section internationale du journal La Presse. 

M. Sylvestre, la question que vous soulevez pour Génération d’idées est un sujet qui obsède les Nations Unies depuis de longues années déjà. La réforme de cette organisation tentaculaire a été entamée il y a près de 20 ans par Perez de Cuellar qui, lors de son règne au Secrétariat-général, avait réduit les effectifs de l’Onu de près de 30 %.

Son successeur, Kofi Annan a, pour sa part, fait de la réforme des institutions des Nations Unies sa priorité. Il a d’ailleurs confi é à la québécoise Louise Fréchette le soin de revoir le fonctionnement des agences onusiennes liées au développement économique et social. Lors d’une conférence qu’elle a prononcée à Montréal l’an dernier, Mme Fréchette n’a pas caché l’ampleur et la diffi culté de la tâche. Cependant, elle concluait que dans les domaines du développement et de l’intervention humanitaire, les agences des Nations Unies sont de plus en plus effi caces et transparentes. À bien des égards, elle n’a pas tort.

Si je vous comprends bien, votre argument touche surtout la nécessité d’une réforme du Conseil de sécurité. Sur ce point, M. Sylvestre, impossible de ne pas vous donner raison. Le Conseil de sécurité dans sa forme actuelle représente bien mal l’ordre mondial. Produit de la Deuxième Guerre mondiale,sa composition refl ète beaucoup plus les rapports de force de la Guerre froide que ceux du nouveau millénaire. Le fait qu’aucun pays africain, sud-asiatique, latino-américain ou musulman ne dispose d’un siège permanent à ce conseil consterne une grande partie des pays-membres.

On ne compte plus le nombre de réunions et de sommets qui ont été tenus au cours des ans pour transformer cet organe si central à la mission onusienne. Tous ces efforts diplomatiques ont échoué lamentablement. Cependant, on aurait tort de faire porter à l’Onu elle-même le fardeau de ces échecs répétés. Il faut plutôt regarder du côté des pays-membres qui veulent chacun tirer la couverte de leur côté. C’est particulièrement vrai des pays occidentaux : ils détiennent au Conseil de sécurité le 3/5ième des droits de veto pour à peine 6 %de la population mondiale. Une situation qui arrange autant le Canada que les pays de l’Union Européenne et qui ne manque pas d’expliquer en partie l’immobilisme des réformes onusiennes.

ARTisTe : Zoë yuRisTy, Northern Afghanistan Fantasy Play-setSculpture murale multi-media – 17.5” x 22” – 2008

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JusTiCe RépARATRiCe,

uN ChemiN D’AveNiResTelle DRouviN

Juriste de formation, je m’interroge sur l’impact d’un système judiciaire répressif : gagne-t-on la paix sociale à force de punition et d’exclusion ?

Arrivée depuis trois ans au Canada, j’ai été attirée par les démarches de justice réparatrice proposées ici, alors qu’elles sont inexistantes dans mon pays d’origine, la France. À l’automne dernier, j’ai participé à une rencontre détenus-victimes dans un établissement de détention fédéral. J’étais représentante de la communauté, un rôle qui permet d’être témoin d’une démarche courageuse et libératrice tant de la part de personnes détenues que de celles victimes.

Quelle expérience extraordinaire que de participer à ces échanges empreints de vérité et d’émotions ! Quel défi de passer d’un climat de suspicion à un climat de confiance et de respect ! Même si les personnes ne sont pas liées directement par le crime qu’elles ont commis ou subi, il n’en reste pas moins que la similarité des situations renvoie chacun(e) à ce qu’il/elle a vécu. Que s’est-il passé exactement ? Comment en est-on arrivé là ? Que se passe-t-il depuis ?

La douzaine de participants a décidé de s’impliquer volontairement et bénévolement à la démarche. Que viennent-ils chercher de cette « confrontation » quelque peu éprouvante pour certains ? Retrouver une paix intérieure, être écoutés, entendus dans leurs souffrances, reconnus dans leur volonté de changer et d’avancer, regardés comme des êtres humains au cœur de leurs zones d’ombre.

Au début, les visages sont crispés, les corps fermés, les regards fuyants. Puis, chacun accepte de se dévoiler, de dire l’innommable, de mettre des mots sur des blessures, des tabous, des souffrances. Descendre, toucher le fond de son être, puis remonter, encouragé par la présence de l’autre qui est à ses côtés, qui l’accepte tel qu’il est, malgré ce qu’il a fait, qui le considère au-delà de cette étiquette d’agresseur ou de victime qui l’enferme depuis si longtemps.

Cela suppose d’accepter de revisiter ses émotions, laisser échapper la colère, reconnaître la tristesse, les peurs. Non pas pour s’y morfondre ou encore culpabiliser ou amadouer l’autre, mais bien pour s’en libérer – les traverser pour les reléguer au passé.

Je m’émerveille devant les visages qui se détendent, les sourires qui apparaissent, les regards qui se croisent avec reconnaissance. L’atmosphère se fait plus légère. Les changements s’opèrent en profondeur. Certains reconnaissent que leurs cauchemars ont cessé, qu’un poids à l’intérieur d’eux-mêmes a disparu. D’autres manifestent le désir d’aller plus loin, de réparer d’une manière ou d’une autre, en témoignant pour prévenir de nouveaux crimes ou en écrivant pour demander pardon à leurs victimes directes.

De plus en plus de pays commencent à s’intéresser à la justice répara-trice. S’il est vrai que le taux de récidive est quasi-nul, ce n’est pas seulement à cette « efficacité » que l’on doit son succès. Le processus de transformation qu’elle encourage porte des semences de paix pour les personnes qui le suivent, mais aussi pour toute la société qui en fait un projet prometteur, où l’humain redevient sujet de sa propre vie, tourné vers l’avenir, convaincu de sa capacité de changer.

Et que dire de la justice réparatrice quand elle devient véritablement une justice alternative ? Le programme Hollow Water mis en place par des femmes autochtones au Manitoba est exemplaire à ce sujet. Inquiètes du nombre croissant d’hommes incarcérés dans leur commu-nauté et du taux d’alcoolisme très élevé, elles se sont réunies pour réfléchir à la manière de transformer cette triste réalité.

À l’écoute de leurs propres traditions, elles ont mis en place un système de justice réparatrice en 12 étapes qui protège la victime, confronte l’agresseur, implique leurs familles respectives et toute la communauté. Cette approche non conflictuelle et non punitive a avant tout une valeur éducative. La sentence rendue par la communauté vise à aider la victime et à réintégrer l’offenseur qui doit réparer les conséquences de son geste au sein de la société, tout en continuant d’en être partie prenante.

Reconnu par le système judiciaire, le programme Hollow Water, mis en place depuis 1984, a fait ses preuves. La communauté a retrouvé la paix, et les hommes ne remplissent plus les prisons. Une belle source d’inspiration pour inventer une nouvelle manière de vivre en société !

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ARTisTe : melsA moNTAGNe, Langage visuelAcrylique et encre – 30“ x 36“ – 2009

L’idée de la justice réparatrice est séduisante. Estelle Drouvin fait voir magnifiquement les vertus d’un tel cheminement, tant pour les victimes que pour les détenus repentis.

Certes, lors d’un éprouvant face-à-face, des participants peuvent en tirer profit. Cependant, cette thérapie de groupe reste marginale et ne saurait devenir la norme. Rappelons pour mémoire que cette démarche exceptionnelle concerne surtout les crimes de violence portant atteinte à la sécurité de la personne.

Dans une perspective globale, le modèle canadien de justice pénale fait voir une disjonction entre l’action du juge et l’intervention du gestionnaire de la peine. Le premier inflige une peine proportionnelle à la gravité de l’infraction commise et la culpabilité morale du contre- venant. Responsable des libérations conditionnelles, le second donne préséance à une grille d’analyse rigide.

Dans une cour de justice, on procède à l’exercice de la pesée des facteurs et circonstances d’un cas d’espèce. L’importance respective de la prévention, de la dissuasion (pour l’accusé et la collectivité), de la dénonciation publique, du châtiment et de la réinsertion sociale variera selon la nature du crime et la situation de son auteur.

Dans les officines administratives des libérations conditionnelles, outre la rigidité du processus de classement d’un candidat selon des critères fixes, l’accent porte sur l’appréciation du risque. C’est ici que l’idée de justice réparatrice peut être utile.

me JeAN-ClAuDe hébeRTAvocat-criminaliste et professeur associé, UQAM

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CRimiNAlisATioN Des iTiNéRANTs, uNe AbeRRATioN soCiAle

On ne dira jamais assez que c’est précisément parce qu’elles occupent l’espace public et qu’elles n’ont nulle part où aller que les personnes de la rue sont judiciarisées. Pourtant, les faits parlent d’eux-mêmes. Dans son mémoire soumis à la Ville de Montréal dans le cadre de la Consulta-tion sur l’itinérance, en avril 2008, Céline Bellot, chercheuse au Centre International de Criminologie Comparée (C.I.C.C), révélait que 15 090 constats d’infraction (impliquant 2 704 personnes) ont été émis de janvier 2004 à mars 2006, principalement en raison « d’état d’ébriété en public et de fl ânage ». A-t-on idée des coûts sociaux et fi nanciers engendrés par la criminalisation de l’extrême pauvreté ? Itinérants et jeunes de la rue n’ont évidemment pas les moyens de payer ces contraventions et, par conséquent, n’ont d’autre choix que d’aller en prison. Que se passe-t-il en prison pour la majorité d’entre eux ? La plupart, dont plusieurs jeunes largués par la Direction de la Protection de la Jeunesse, s’endurcissent au contact de vrais criminels. De là s’ensuit la spirale infernale de la rue à la prison et parfois, de l’hôpital à la morgue. Attention : on ne parle pas ici de vendeurs de drogues, de membres des Hell’s ou d’assassins. Non, il s’agit de personnes que l’extrême pauvreté ou la maladie mentale ont malencontreusement menées à la rue.

Malgré les recommandations répétées des organismes communautaires qui viennent en aide aux personnes marginalisées, la Ville de Montréal, par l’entremise de son service de police, privilégie encore la judiciarisation

de celles-ci pour assurer la « gestion de l’espace public ». Récemment interrogé par L’Itinéraire au sujet de la brutalité policière, Bernard Saint-Jacques, du Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes, affi rme que le Service de police de la Ville de Montréal n’a toujours rien compris : on continue à judiciariser les personnes de la rue et, de dire M. St-Jacques, certains policiers ont tendance à recourir à la force excessive auprès des plus vulnérables de la société.

Mais à la défense du travail des policiers, notons que l’appropriation de l’espace public par les promoteurs d’événements et de specta-cles s’accroît sans arrêt au centre-ville de Montréal depuis quelques années. Plus que jamais, on demande aux policiers de « nettoyer » le centre-ville. Comme une tache de crème solaire sur une carte postale,les itinérants détonnent dans le centre-ville qui se transforme pratique-ment en Disneyland l’été venu : Festival de jazz, Juste pour rire, piétonisation de la rue Ste-Catherine, etc. Chaque printemps, le SPVM s’emploie donc à faire place nette, aussi bêtement que les années précédentes. Quand va-t-on enfi n comprendre que collectivement, nous n’avons plus les moyens de criminaliser les plus pauvres et d’élire des politiciens municipaux qui se contentent de nous servir de creux discours émaillés des fabuleuses expressions « mixité sociale », « vivre-ensemble » et « développement durable » ?

eNTRevue AveC Alex

Alex est camelot pour L’Itinéraire depuis maintenant huit ans et vend L’Itinéraire au métro Berri.

GeDi – À quoi te fait penser le mot guerre ?

A – Aux États-Unis.

GeDi – À quoi te fait penser le mot paix ?

A – Avant, j’aurais dit au Canada mais là je suis vraiment plus sûr.

GeDi – À l’échelle montréalaise, y a-t-il un contexte similaire à la guerre auquel on devrait apporter la paix ?

A – Les relations entre la police et le monde de la rue. Il ne devrait pas y avoir de brutalité ou de harcèlement envers les itinérants. On a voulu faire une marche pour symboliser ça pacifi quement en mars dernier mais ça a mal tourné en raison d’un petit groupe de casseurs qui n’ont rien à voir avec nous. C’est dommage car ça donne aux gens de la rue une très mauvaise réputation, tout ça en raison de petites cliques qui profi tent d’événements comme le nôtre pour casser et piller.

GeDi – As-tu déjà été victime de brutalité policière ?

A – J’ai vendu de la dope pendant longtemps donc j’ai eu ma part de démêlés avec les policiers. Ils ont leur travail à faire mais ils doivent faire attention aux plus jeunes. Souvent, les jeunes de la rue sont en révolte et ont des diffi cultéspersonnelles. Quand tu es jeune et qu’un policier vient te parler comme ton père, t’as plus le goût de l’envoyer chier que d’autre chose. J’aimerais que les policiers soient moins agressifs et condescendants avec ces jeunes, je suis passé par là.

GeDi – Quelle est la partie diffi cile dans le fait de vendre L’Itinéraire ?

A – Vendre dehors l’hiver ! Il y a bien sûr certains regards peu sympathiques de certains passants mais c’est une minorité et à la longue on s’habitue.

GeDi – Quelle est la partie plus intéressante dans la vente de L’Itinéraire ?

A – Tu viens à connaître bien du monde et tu connais la petite histoire de chacun. Ça fait des liens et ça fait des ouvertures pour des jobs des fois.

GeDi – Qu’aimerais-tu voir comme amélioration dans notre société ?

A – Les lobbies sont trop forts, regardez notre gestion du Grand Nord québécoispar exemple. Il faudrait un jour un gouvernement qui mette ses culottes et prenne des décisions indépendamment de ces lobbies. Ça prendrait une première personne mais celle-ci risque de se faire couper la tête, c’est toujours plus payant de rentrer dans les rangs et de garder le statu quo…

TRAveRseR lA Rue AilleuRs qu’à uNe iNTeRseCTioN, CRACheR, flÂNeR, se CouCheR suR uN bANC, êTRe ivRe suR lA voie publique. voilà quelques iNCiviliTés qui CoÛTeNT CheR à Ceux eT Celles qui viveNT DANs lA Rue. eN RevANChe, Commises pAR moNsieuR ou mADAme TouT-le-moNDe, Ces mêmes iNCiviliTés pAsseNT ComplèTemeNT iNApeRçues. vieux RouTieR De lA Rue, le CAmeloT AlexANDRe péloquiN meT le DoiGT suR uN pRoblème mAJeuR loRsqu’il évoque le hARCèlemeNT poliCieR à l’éGARD Des peRsoNNes De lA Rue.

AuDRey CoTéRédactrice en chef de L’Itinéraire

ARTisTe : mARiANNe bousqueT 

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la société de développement économique ville-marie (cld) est fière de supporter des projets remplis d’avenir tels que génération d’idées. la sdévm (cld) coordonne des services de première ligne en accompagnement, soutien technique ou financier. ces services sont offerts aux pmE en démarrage ou déjà en opération, tant en économie de marché qu’en économie sociale, au centre-ville de montréal.www.sdevm.ca

DesTiNATioN : sommeT GéNéRATioN D’iDées 2010

Il y a bientôt un an que Stéphanie Raymond-Bougie, Mélanie Joly et moi-même, Paul St-Pierre Plamondon, lancions le premier numéro de Génération d’idées (GEDI), qui visait à donner une voix à la relève mais aussi la mobiliser et la responsabiliser face aux nombreux défis qui nous attendent comme collectivité dans les prochaines années. Quatre numéros plus tard, nous sommes contents d’être entourés d’une équipe chev-ronnée de bénévoles et d’avoir pu publier plusieurs textes de qualité dans la revue, mais nous avons également soif d’une mobilisation et d’une réflexion plus porteuse et interactive que débattre seulement sur papier. Stéphanie a généré l’idée d’organiser un colloque et depuis on s’est remis à rêver. Ce colloque sera un événement où convergeront 500 jeunes de partout au Québec pour arrêter les priorités de notre génération dans un cadre indépendant, non partisan et à but non lucratif.

L’objectif du Sommet Génération d’idées est donc lancé : une expérience intellectuelle, émotive et culturelle qui mettra l’emphase sur la créativité de la Génération Y et qui se tiendra à Montréal début 2010.

Dans le cadre de la préparation du Sommet, nous avons constaté que la plupart de nos lecteurs habi-tent dans la région de Montréal, conséquence des moyens limités de diffusion de Génération d’idées. Notre organisation est un projet fondé sur les concepts

de diversité et d’ouverture, tant sur le plan culturel, idéologique que géographique. Devant ce constat, nous avons décidé de lancer une Tournée du Québec pour mieux faire connaître nos projets en région mais également consulter la relève québécoise quant au contenu et au déroulement du Sommet. Après avoir visité Drummondville, Gatineau, St-Jérôme, Val-d’Or, Amos, Rivière-du-Loup, Rimouski, Gaspé, Sept-Îles, Baie-Comeau et Chicoutimi, Génération d’idées visitera prochainement les villes suivantes :

Trois-Rivières 3-4-5 juin (Lancement du numéro 4)

Sherbrooke 10-11-12 juin

St-Hyacinthe – Granby 15-16 juin

St-Georges – Thetford 18-19-20 juin

Québec 23-24-25-26 juin

Vous pouvez suivre chaque étape de la tournée à travers nos reportages balados (podcasts) concernant chaque région sur notre site Internet www.generationdidees.ca.Nous y publierons également une consultation en ligne sur les enjeux prioritaires de notre génération, de manière à préparer adéquatement le Sommet au niveau du contenu. Notre génération d’idées est l’affaire de tous les Québécois et nous comptons sur la relève de chaque région pour être au rendez vous.

pAul sT-pieRRe plAmoNDoNcofondateur - GEDI

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www.GeNeRATioNDiDees.CA

mARiANNe bousqueTJuDiTh bRissoN

Rose-mARie-ChAResTDylAN CRAm

JoCelyN DesJARDiNs mileNA DoNChevA

esTelle DRouviNsébAsTieN Dubé

JeAN-ClAuDe hébeRTmARC JeANNoTTe

mélANie Joly mARC-NiColAs KobRyNsKy

Rémy lANDRy JeAN-fRANçois lépiNe

simoN léveillésARAh mANGiAlARDo

melsA moNTAGNeCARoliNe moRiN

lAuRA-Julie peRReAulTpAul sT-pieRRe plAmoNDoN

JAmes plAyfoRDsTéphANie RAymoND-bouGie

sTéphANe RousselJeAN-fRANçois sylvesTRe

JeAN-DAviD TRemblAy-fReNeTTe yve éTieNNe fReNeTTe

Zoë yuRisTy