gastrite collagène et iléocolite collagène survenant dans un contexte dysimmunitaire : à propos...

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Gastroentérologie Clinique et Biologique (2010) 34, e1—e6 CAS CLINIQUE Gastrite collagène et iléocolite collagène survenant dans un contexte dysimmunitaire : à propos d’un cas et revue de la littérature Collagenous gastritis and ileo-colitis occurred in autoimmune context: Report of a case and review of the literature Gilles Macaigne a,, Jean-Franc ¸ois Boivin b , Florence Harnois a , Claude Chayette a , Dorian Dikov b , Sadek Cheaib a , Marie-Luce Auriault b a Service d’hépato-gastroentérologie, hôpital de Lagny-Marne-la-Vallée, 34, avenue du Général-Leclerc, 77405 Lagny-sur-Marne cedex, France b Service d’anatomopathologie, hôpital de Lagny-Marne-la-Vallée, 77405 Lagny-sur-Marne cedex, France Disponible sur Internet le 15 juillet 2010 Résumé La colite collagène est une colite microscopique dont le mécanisme physiopatholo- gique exact est inconnu, différentes hypothèses étiopathogéniques auto-immunes, infectieuses, alimentaires et médicamenteuses ayant été évoquées, cette dernière étant probablement la plus fréquente. La gastrite collagène est une entité rare dont l’association avec une colite collagène a été exceptionnellement rapportée, seuls six cas ayant jusque là été publiés. Nous rapportons une observation de gastrite collagène associée à une iléite et une colite collagène chez une femme de 73 ans présentant une diarrhée chronique et une perte de poids massive évoluant depuis quatre mois. Cet épaississement collagène diffus du tube digestif est apparu dans un contexte auto-immun associant un antécédent de thyroïdite d’Hashimoto et une gas- trite atrophique de Biermer probable. L’évolution clinique et histologique a été favorable sous traitement par budésonide. © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Summary Collagenous colitis belongs to the group of microscopic colitis. The aetiology and pathogenesis are unknown but different pathogenic hypothesis, autoimmune, infectious, ali- mentary and medicinal being are advanced, the last one being the most frequent aetiology. The collagenous gastritis is a rare entity and its association with collagenous colitis was excep- tionally reported, only six cases being published. We report the seventh case of collagenous gastritis, ileitis and colitis in a 75-year-old woman with chronic diarrhea and important weight loss. This thickened subepithelial collagen band was appeared in an autoimmune injury context with antecedent of Hashimoto’s thyroiditis and probably chronic atrophic Biermer’s gastritis. The clinical and histological evolution was favourable with budesonide. © 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (G. Macaigne). 0399-8320/$ – see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.gcb.2009.06.020

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Page 1: Gastrite collagène et iléocolite collagène survenant dans un contexte dysimmunitaire : à propos d’un cas et revue de la littérature

Gastroentérologie Clinique et Biologique (2010) 34, e1—e6

CAS CLINIQUE

Gastrite collagène et iléocolite collagène survenantdans un contexte dysimmunitaire : à propos d’un caset revue de la littératureCollagenous gastritis and ileo-colitis occurred in autoimmune context:Report of a case and review of the literature

Gilles Macaignea,∗, Jean-Francois Boivinb, Florence Harnoisa, ClaudeChayettea, Dorian Dikovb, Sadek Cheaiba, Marie-Luce Auriaultb

a Service d’hépato-gastroentérologie, hôpital de Lagny-Marne-la-Vallée, 34, avenue du Général-Leclerc,77405 Lagny-sur-Marne cedex, Franceb Service d’anatomopathologie, hôpital de Lagny-Marne-la-Vallée, 77405 Lagny-sur-Marne cedex, France

Disponible sur Internet le 15 juillet 2010

Résumé La colite collagène est une colite microscopique dont le mécanisme physiopatholo-gique exact est inconnu, différentes hypothèses étiopathogéniques auto-immunes, infectieuses,alimentaires et médicamenteuses ayant été évoquées, cette dernière étant probablement laplus fréquente. La gastrite collagène est une entité rare dont l’association avec une colitecollagène a été exceptionnellement rapportée, seuls six cas ayant jusque là été publiés. Nousrapportons une observation de gastrite collagène associée à une iléite et une colite collagènechez une femme de 73 ans présentant une diarrhée chronique et une perte de poids massiveévoluant depuis quatre mois. Cet épaississement collagène diffus du tube digestif est apparudans un contexte auto-immun associant un antécédent de thyroïdite d’Hashimoto et une gas-trite atrophique de Biermer probable. L’évolution clinique et histologique a été favorable soustraitement par budésonide.© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Summary Collagenous colitis belongs to the group of microscopic colitis. The aetiology andpathogenesis are unknown but different pathogenic hypothesis, autoimmune, infectious, ali-mentary and medicinal being are advanced, the last one being the most frequent aetiology.

The collagenous gastritis is a rare entity and its association with collagenous colitis was excep-tionally reported, only six cases being published. We report the segastritis, ileitis and colitis in a 75-year-old woman with chronic diarrloss. This thickened subepithelial collagen band was appeared in an awith antecedent of Hashimoto’s thyroiditis and probably chronic atThe clinical and histological evolution was favourable with budesoni© 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (G. Macaigne).

0399-8320/$ – see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits rdoi:10.1016/j.gcb.2009.06.020

venth case of collagenoushea and important weightutoimmune injury contextrophic Biermer’s gastritis.de.

éservés.

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e G. Macaigne et al.

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Figure 1 Épaississement collagène irrégulier de la membranebasale de la muqueuse antrale au moment du diagnostic initialaprès coloration par le Picro-Syrius (faible grossissement).

Figure 2 Épaississement collagène focal de la membranebasale sous-épithéliale de la muqueuse fundique au moment dudiagnostic initial associé à un infiltrat lymphoplasmocytaire ductm

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Les colites microscopiques sont définies par des lésionsistologiques d’inflammation chronique d’une muqueusendoscopiquement normale [1]. Parmi elles, la coliteollagène (CC) se caractérise par une bande collagène sous-pithéliale d’épaisseur supérieure à 10 �m. Bien que leurécanisme précis soit inconnu, différentes hypothèses étio-athogéniques auto-immunes, infectieuses, alimentaires etédicamenteuses ont été évoquées, cette dernière étant laremière cause des colites microscopiques.

La gastrite collagène (GC) est une entité beaucoup plusare que la CC, également définie par un épaississementollagène de la membrane basale sous-épithéliale (MBSE)e plus de 10 �m et dont l’étiopathogénie est inconnue.es associations de GC avec colite lymphocytaire [2], mala-ie cœliaque [3,4] et recto-colite hémorragique [4] ont étéapportées et de rares cas d’association d’épaississementollagène de la MBSE colique et gastrique ont été publiés.

À notre connaissance, nous rapportons le septième cas’épaississement collagène de la MBSE de l’estomac, de’iléon et du côlon.

Une femme de 73 ans était hospitalisée en mai 2006 poure bilan d’une diarrhée chronique évoluant depuis quatreois et résistante aux différents traitements symptoma-

iques. La malade avait pour antécédents une thyroïditeuto-immune nécessitant une opothérapie substitutive parevothyroxine depuis 1982 et une hypercholestérolémieraitée par fénofibrate depuis plusieurs années. Il n’y avaitas d’autre prise médicamenteuse, pas de notion de séjourécent à l’étranger, pas de contage familial évident. Laiarrhée était faite de quatre à cinq selles quotidiennesmpérieuses, diurnes, liquides et parfois pâteuses, sanslaire ni sang. Il s’y associait des douleurs abdominalesiffuses d’allure spasmodique, une altération de l’état géné-al avec asthénie majeure, anorexie et perte de poids de2 kg. Il n’y avait pas d’autre signe d’appel extra digestif.’examen clinique était normal. La gastroscopie, la colo-copie avec iléoscopie terminale et le transit baryté de’intestin grêle étaient normaux en dehors d’une antrite éry-hémateuse non ulcérée. L’examen anatomopathologiquees biopsies gastriques montrait au niveau antral et fun-ique un épithélium largement décollé avec diminution dea mucosécrétion, un infiltrat inflammatoire lymphoplasmo-ytaire modéré du chorion et un épaississement collagènee la MBSE prédominant au niveau antral où il atteignait0 �m (Fig. 1) alors que l’épaississement collagène maxi-al au niveau fundique n’était que de 20 �m. Il était

oté une discrète élévation de la lymphocytose intraé-ithéliale à 28 lymphocytes pour 100 cellules épithélialesCE) et la recherche d’Helicobacter pylori en histologietait négative. Par ailleurs, on notait au niveau fundiquene atrophie glandulaire avec disparition des cellules bor-antes, métaplasie antropylorique et intestinale débutanteFig. 2). Les biopsies coliques étagées montraient unetrophie muqueuse avec décollement de l’épithélium deurface, un infiltrat lymphoplasmocytaire modéré du cho-ion, une lymphocytose intraépithéliale à dix lymphocytesour 100 CE et un épaississement collagène de la MBSE mesu-ant de 20 à 58 �m en fonction du site des biopsies (Fig. 3).

es biopsies iléales montraient une atrophie glandulaireans atrophie villositaire, une discrète hyper-lymphocytosentra-épithéliale à 34 lymphocytes pour 100 CE et un épais-issement collagène focal et discontinu de la MBSE mesuré

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horion et à une atrophie glandulaire avec métaplasie intes-inale (hématoxyline - phloxine-safran [HPS], grossissementoyen).

ntre 10 et 18 �m. L’examen histologique de deux biopsiesuodénales était normal, il n’était pas observé de parasite.e bilan biologique standard était normal en dehors d’uneypokaliémie à 3 mmol/L, d’une hypoalbuminémie minime37 g/L avec hypoprotidémie à 62 g/L et d’une discrète

iminution de la vitamine B12 à 197pg/ml pour une valeurormale supérieure à 211pg/ml. Il n’y avait pas de syndromenflammatoire. Les taux de TSH sérique, de 5-HIAA uri-aires, la sérotoninémie, la gastrinémie étaient normaux. Laecherche d’anticorps anti-endomysium de type IgA et anti-liadine de type IgA et IgG, et d’anticorps antinucléairestait négative. Le taux sérique d’immunoglobulines était

ormal. Il n’avait pas été initialement réalisé de recherche’anticorps antifacteur intrinsèque ni anti-cellule pariétale.a sérologie VIH était négative. Le test au d-xylose était nor-al, la clairance fécale de l’(1 anti-trypsine et la protéinurie
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Gastrite collagène et iléocolite collagène survenant dans un contexte dysimmunitaire : e3

Figure 3 Décollement de l’épithélium de la muqueuse Figure 4 Marquage de la muqueuse fundique en immuno-hhD

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colique avec épaississement collagène sous-épithéliale etinfiltrat lymphoplasmocytaire interstitiel (HPS, faible grossis-sement).

des 24 heures négatives. Le poids de selles moyen quotidienmesuré sur trois jours dans des conditions difficiles était nor-mal avec une créatorrhée et une stéatorrhée normales, sousréserve des difficultés de réalisation du recueil.

L’arrêt du fénofibrate ne modifiait pas les signes cliniqueset les traitements par dérivés du 5-ASA, cholestyamine etralentisseurs du transit étaient inefficaces. Un traitementpar budésonide à la dose quotidienne de 9 mg était alorsdébuté. Une amélioration était notée par la patiente après15 jours de traitement. Après quatre mois, sous 3 mg debudésonide, le transit s’était normalisé avec tendance àla constipation, les douleurs abdominales avaient disparu,l’état général s’était nettement amélioré avec retour del’appétit, diminution de l’asthénie et reprise de cinq kilos.Sur le plan biologique, l’hypokaliémie n’avait pas récidivéet le taux sérique de vitamine B12 s’était normalisé aprèssupplémentation par voie parentérale.

Le contrôle histologique gastrique réalisé après quatremois de traitement par budésonide montrait une normalisa-tion de la MBSE avec disparition de l’épaississement colla-gène. Au niveau fundique, la disparition de l’épaississementcollagène sous-épithélial et la diminution de l’infiltratinflammatoire interstitiel permettaient de mettre au pre-mier plan des lésions d’atrophie glandulaire sévère avecmétaplasie intestinale, sous estimées sur les biopsiesinitiales, associées à une hyperplasie neuro-endocrinemicronodulaire confirmée par l’immunomarquage dirigécontre la chromogranine A (Fig. 4). La recherche rétros-pective sur les premières biopsies de cette hyperplasieneuro-endocrine s’avérait également positive. La recherched’anticorps anti-cellules pariétales de l’estomac et anti-facteur intrinsèque était positive alors que le contrôlede la gastrinémie retrouvait, contrairement au taux ini-tial normal, une importante élévation avec un taux sériqueà 727ng/L pour une limite supérieure de la normale à

120ng/L. Le taux sérique de la vitamine B12 était normal. Lediagnostic de gastrite auto-immune de Biermer était alorsretenu, probablement préexistante à la GC. Par ailleurs,les biopsies rectocoliques montraient une diminution de la

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istochimie avec un anticorps antichromogranine montrant uneyperplasie neuro-endocrine linéaire et micronodulaire (cloneAK A3 Dako, fort grossissement).

ensité de l’infiltrat inflammatoire du chorion, une augmen-ation de la mucosécrétion glandulaire et une diminution de’épaississement collagène de la MBSE qui restait toutefoisnormalement épaissie. L’histologie duodénale était tou-ours normale. Un sevrage en budésonide était alors réaliséans récidive des signes cliniques.

L’originalité de cette observation réside principale-ent sur trois points : l’épaississement gastrique, iléal et

olique de la MBSE, seules six observations d’épaississementollagène diffus du tube digestif ayant jusqu’alors étéapportées, sa survenue dans un contexte dysimmunitairessociant une thyroïdite auto-immune d’Hashimoto et uneastrite atrophique auto-immune de Biermer et l’efficacitéapide du traitement par budésonide malgré la persistance’un épaississement de la membrane collagène.

Tout comme pour la CC, la GC a été définie par Vesoulis etl. [4] par l’épaississement collagène de la membrane basaleupérieur à 10 �m, celui ci pouvant être diffus ou irrégulier.n effet, au niveau gastrique, l’épaississement collagène dea MBSE ne dépasse qu’exceptionnellement 3 �m même enas de gastrite chronique sévère, la GC ne pouvant donc pastre confondue avec une fibrose diffuse de la MBSE pouvanttre associée à une cicatrisation d’ulcère ou à une toxi-ité médicamenteuse. Lagorce-Pages et al. [5] ont divisé deacon arbitraire les malades atteints de GC en trois groupes :e premier inclus des enfants et adultes jeunes ayant une GCsolée avec anémie fréquente, le second, tout comme dansotre observation, des adultes ayant une GC associée à uneC avec diarrhée chronique et perte de poids massive et

e troisième regroupant des sujets ayant une GC associée àne colite inflammatoire et/ou colite lymphocytaire, à unealadie cœliaque, sans caractéristique clinicopathologiquearticulière.

Les principales caractéristiques des observations rappor-ées dans la littérature anglo-saxonne sont rapportées dans

e Tableau 1. Six des sept cas associant CC et GC intéres-aient des femmes d’un âge moyen de 66 ans (53—78 ans). Leeul homme était âgé de 20 ans et présentait un épaississe-ent collagène de la membrane basale gastrique et colique.
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Tableau 1 Colites collagènes associées à un épaississement collagène du tractus digestif haut.[8] [15] [21] [10] [9] [11] [7] Cas présent

Âge (années) sexe 78 femmes 75 femmes 53 femmes 57 femmes 20 hommes 54 femmes 74 femmes 73 femmes

Tableau clinique Diarrhée aqueuseAmaigrissement (10 kg)

Diarrhée aqueuseAmaigrissement

Diarrhée aqueuse Diarrhée aqueuse anorexieAmaigrissement

Épigastralgies,vomissements, diarrhée etamaigrissement

Diarrhée aqueuseAmaigrissement (10 kg)

Diarrhée Diarrhée aqueuseDouleurs abdominalesAmaigrissement (12 kg)

Durée d’évolution (mois) 1,5 6 192 6 72 3 3 4

Contexte auto-immun nd nd nd Non Non Non nd Oui (thyroïdited’Hashimoto)

Syndrome carentielbiologique

HypoalbuminémieHypokaliémieAnémie carence en folates

Non Non HypoprotidémieHypoalbuminémie

Anémie ferriprive Hypokaliémie nd HypokaliémieHypoprotidémieHypoalbuminémie

Clairance �1 anti-trypsinefécale

nd nd nd Augmentée nd Augmentée nd N

Stéatorrhée nd nd nd nd nd N N N

Test au d-xylose Anormal nd nd N nd N N N

Aspect endo Colite érythémateuse Normal Normal Gastrite et duodéniteérythémateuse

Gastrite nodulaire nonulcérée

Normal Normal Antrite érythémateusenon ulcérée

Localisation et épaisseurde la bande collagèneinitiale (�m)

Duodénum : 40Côlon : 40

Estomac : 30—60Duodénum : 50Côlon : 10—30

DuodénumIléonCôlon : 7—100

Estomac : 20—40Duodénum : 20—30Côlon : > 30

Estomac : 15—43Côlon : 20—30Iléon : ND

Estomac : 30—40Duodénum et iléon :20—30Côlon : 50—80

EstomacCôlon

Estomac : 50Côlon : 20—50Iléon : 15

Traitement Régime sans glutenPrednisolone puissulfasalazine

nd Bismuth Prednisone Anti-histaminiques declasse 2 Anti-parasitaires

Budésonide Inhibiteur de lapompe à proton

Budésonide

Évolution clinique Amélioration nd Rémission Rémission puis rechute nd Rémission Rémission Rémission

Évolution histologique nd nd nd nd À 3 ansEstomac : 23—225Colon : 20—30Iléon : nd

À 5 moisEstomac : 30—40Duodénum et iléon :disparition bandecollagèneCôlon : 30—50

Stabilisation À 4 moisEstomac : disparitionbande collagèneRectocôlon : diminutionépaississement collagène

Apparition six ans après le début des épigastralgies et vomissements ; N : normal ; nd : non déterminé.

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Gastrite collagène et iléocolite collagène survenant dans un

Le mode de présentation était relativement stéréotypé avecl’association d’une diarrhée chronique et, contrairementaux colites collagènes isolées, d’une perte de poids mas-sive. Ainsi, quand il était précisé, l’amaigrissement étaitsupérieur à dix kilos pour une durée d’évolution variantde 1,5 à quatre mois. Dans notre observation, la maladeavait perdu 12 kilos en quatre mois. Une importante pertede poids a également été constatée dans des cas degastrites collagènes isolées sans atteinte extra gastrique[6,7], sans explication physiopathologique évidente avan-cée. Tout comme dans notre observation, il n’était pas notéde syndrome carentiel majeur. Dans les sept observationsrapportées, seules deux présentaient un tableau carentielmodéré, la première avec anémie par carence en folateset épaississement de la membrane collagène duodénaleet diminution de l’absorption du d-xylose [8], la secondeavec anémie par carence martiale sans anomalie histolo-gique duodénale possiblement secondaire à des saignementsoccultes répétés [9]. Dans notre cas, la carence initiale envitamine B12, non constatée dans les autres observations,était plutôt en rapport avec la gastrite chronique atrophiqueauto-immune associée. Les tests de malabsorption n’ont étéétudiés que dans quelques observations. Le test au d-xylose,réalisé dans quatre cas, était pathologique à une seulereprise en association avec une atteinte duodénale [8], alorsque l’absorption du d-xylose était normale dans les troisautres dont deux malgré un épaississement de la membranecollagène duodénale [10,11]. Le dosage de la stéatorrhéen’a été réalisé que dans deux observations et s’est avéréenormal (notre cas, [11]). Dans l’observation de Pulimood etal. [9], seule une hypoprotidémie avec hypoalbuminémieen rapport avec une exsudation protéique digestive étaitnotée, l’existence d’une entéropathie exsudative ayantdéjà été rapportée en cas de CC [12]. Dans notre obser-vation, l’hypoprotidémie et hypoalbuminémie initiales etrésolutives sous traitement n’étaient probablement pasliées à une exsudation protéique digestive, la clairancede l’(1 anti-trypsine étant normale. Dans trois observationsdont la nôtre, il était noté une hypokaliémie probablementsecondaire à la diarrhée sécrétoire. À la vue de ces obser-vations, il n’est pas possible de trouver une quelconquerelation entre l’intensité de l’exsudation protéique ou dela malabsorption, l’existence et l’intensité des symptômes,la localisation et l’importance de l’épaississement collagènede la membrane basale épithéliale.

L’existence d’un épaississement de la MBES au niveaude sites extracoliques pourrait être en faveur d’un méca-nisme physiopathologique identique résultant de réactionsparticulières induites ou entretenues par des facteurs étio-logiques inconnus. Si nous considérons que la pathogéniede l’épaississement de la MBSE est identique sur l’ensembledu tube digestif, plusieurs mécanismes physiopathologiquespeuvent être avancés. La première hypothèse suggèreraitque la collagénisation résulte d’une exsudation plasma-tique locale de protéines dans la lamina propria superficielle[13,14]. L’existence d’un œdème sous épithélial localiséjuste au-dessus de la membrane collagène, observé dansdeux observations de gastrobulbite et CC [10,15], renfor-

cerait cette hypothèse. Cet œdème pourrait représenter unexsudat riche en protéines, stade précoce de ce mécanismeprécédant la formation de collagène. Le second mécanismeattribuerait l’épaississement collagène à une altération

sse

texte dysimmunitaire : e5

ocale des fibroblastes péri cryptiques. En effet, dans lauqueuse colique et grêlique du lapin, les fibroblastes

scensionnent avec l’épithélium au niveau des cryptes,e qui n’a cependant pas été démontré concernant lesbroblastes péricryptiques de la muqueuse gastrique. Unenomalie fonctionnelle de ces fibroblastes pourrait engen-rer un excès de production de collagène comme cela a étéuggéré dans les colites collagènes [16] et pourrait expliquer’organisation architecturale particulière de la bande colla-ène au pied des cryptes. Le troisième mécanisme évoquéerait un dérèglement du processus de réparation en réponse

un processus infectieux, inflammatoire ou toxique. Destudes immuno-histochimiques ont identifié sur des frag-ents congelés de CC des dépôts de collagène de type I, III

t VI, les deux premiers étant considérés comme étant liés àes processus de réparation secondaires à une inflammationlors que les dépôts de collagène de type VI sont considérésomme étant un épaississement primaire de novo patho-ogique [17]. Ainsi, dans l’observation de Castellano et al.10], le facteur étiologique pouvait être médicamenteux, laalade consommant au long cours des AINS, possible agent

tiologique des colites collagènes. En effet, l’inhibition dea synthèse des prostaglandines par les AINS, et notam-ent de la prostaglandine PGE2, pourrait modifier le rapport

ntre la production et la dégradation intracellulaire duollagène [18]. Dans notre observation, aucun facteur médi-amenteux n’a pu être incriminé mais l’existence d’uneastrite chronique atrophique auto-immune aurait pu êtree facteur déclenchant des lésions inflammatoires initiales’expliquant toutefois pas l’épaississement collagène notéu niveau colique et iléal.

L’association de colites microscopiques, collagène ouymphocytaire, avec une maladie cœliaque est actuelle-ent admise. L’existence d’un épaississement collagènee la MBSE a été notée chez plus de 36 % des adultesyant une maladie cœliaque [19] indépendamment de’existence d’une sprue collagène. La GC est une entitéare mais également rapportée en association avec unealadie cœliaque [3,4]. D’autres observations ont rapporté

ne association entre la GC et une atteinte inflamma-oire colique, colite [20] ou rectocolite hémorragique4], laissant suggérer l’existence d’un facteur déclenchantommun et d’un mécanisme physiopathologique identique.ontrairement à notre observation, les autres cas décrits’épaississement collagène de la membrane basale coliquet gastrique ne survenaient pas dans un contexte dys-mmunitaire signalé. Dans notre cas, il était noté unontexte auto-immun avec un antécédent de thyroïditeuto-immune d’Hashimoto et l’existence d’une gastritehronique atrophique auto-immune très probable. Cetteastrite était probablement antérieure au diagnostic de GCn raison de l’existence initiale d’une carence en vita-ine B12, des résultats histologiques des premières biopsies

vec hyperplasie neuro-endocrine et de l’immunomarquageirigé contre la chromogranine. La persistance d’un infil-rat inflammatoire du chorion et la présence d’autoanticorpsnticellules pariétales et anti-facteur intrinsèque sont enaveur de l’origine auto-immune de la gastrite atrophique.

Sur le plan thérapeutique, une amélioration cliniqueignificative sous prednisone était notée dans deux cas [8,9],ous inhibiteur de la pompe à protons dans un cas [21]t dans un cas sous bismuth [22], l’évolution n’étant pas

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écrite dans deux autres observations. Dans notre cas etans celui de Cocq et al. [11], l’évolution clinique sousudésonide a été spectaculaire malgré l’absence de dispa-ition des lésions histologiques. Cette discordance entre laonne évolution clinique et la persistance de lésions his-ologiques significatives était principalement notée dans leas publié par Cocq et al. [11]. Bien que l’évolution cli-ique ait été favorable et l’amélioration histologique dea GC notable, les biopsies gastriques de contrôle réali-ées chez notre malade ont mis en évidence un aspect deastrite chronique atrophique avec hyperplasie des cellulesndocrines et métaplasie intestinale sans dysplasie. Cesonstatations avaient déjà été rapportées par Winslow et al.23] suggérant ainsi que l’évolution à long terme de ces gas-rites était marquée par un risque plus élevé de développerne tumeur neuro-endocrine ou un adénocarcinome gas-rique, nécessitant ainsi une surveillance endoscopique etistologique.

En conclusion, la CC peut être associée à une atteintelus diffuse du tube digestif. De ce fait, la réalisation deiopsies étagées gastriques, duodénales et iléales pour-ait être indiquée à titre systématique d’autant plus qu’ilxiste une colite microscopique avec perte de poids mas-ive. Contrairement aux colites collagènes dont l’étiologieédicamenteuse est la plus fréquente, l’épaississement col-

agène de la MBSE colique et extracolique pourrait être laanifestation d’un désordre généralisé du dépôt de col-

agène pouvant survenir, comme dans notre observation,ans un contexte dysimmunitaire. La publication d’autresbservations identiques pourrait permettre d’identifier lesécanismes physiopathologiques qui demeurent actuelle-ent peu clairs.

onflit d’intérêt

ucun.

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