fibromes ovariens récidivants dans le cadre du syndrome de gorlin : à propos d’un cas

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Page 1: Fibromes ovariens récidivants dans le cadre du syndrome de Gorlin : à propos d’un cas

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ournal de Gynecologie Obstetrique et Biologie de la Reproduction (2010) 39, 584—587

AS CLINIQUE

ibromes ovariens récidivants dans le cadre duyndrome de Gorlin : à propos d’un casecurrent ovarian fibromas in condition of Gorlin syndrome

. Omrania,∗, I. Hui Bon Hoab, H. Bennisa, M. Lehmanna, V. Zerra

Service de gynécologie, hôpital d’Haguenau, université de Strasbourg, 64, avenue du Professeur-René-Leriche,7504 Haguenau cedex, FranceService de gynécologie obstétrique, hôpital de Haute-Pierre, 67000 Strasbourg, France

ecu le 2 fevrier 2010 ; avis du comité de lecture le 13 avril 2010 ; définitivement accepté le 25 mai 2010isponible sur Internet le 6 juillet 2010

MOTS CLÉSSyndrome de Gorlin ;Fibromes ovariensrécidivants ;Cryoconservationovarienne

Résumé Le syndrome de Gorlin, encore appelée naevomatose basocellulaire, est une maladiehéréditaire rare, à transmission autosomique dominante et à expressivité variable. Ce syndromeest caractérisé par un spectre d’anomalies de développement et une prédisposition à différentscancers. Nous rapportons le cas d’une jeune patiente d’origine francaise âgée de 20 ans qui aprésentée des fibromes ovariens bilatéraux récidivants dans le cadre du syndrome de Gorlin.Ces fibromes sont présents dans 25 % des cas des patientes atteintes du syndrome de Gorlin etsont souvent bilatéraux. La résection économique de ces fibromes ovariens est recommandéemalgré le risque de récidive afin de préserver la fertilité.© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDSSummary Gorlin syndrome also known as basal cell nevus syndrome is a rare autosomal domi-nant condition with variable expression. This syndrome is characterized by many anomalies of

Gorlin syndrome;Recurrent ovarianfibromas;Ovarian

development and by the propensity of developing multiple neoplasms. We report a case of a20-years-old French patient who has relapsing ovarian bilateral fibromas in condition of Gorlinsyndrome. These fibromas are present in 25 % of Gorlin syndrome cases, which often are bilate-ral. The economic resection of these fibromas is recommended in spite of the risk of recurrenceto preserve the fertility.

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cryopreservation

© 2010 Elsevier Masson SAS

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (H. Omrani).

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Lmpt

368-2315/$ – see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits roi:10.1016/j.jgyn.2010.05.010

rights reserved.

ntroduction

e syndrome de Gorlin (SG) est connu sous plusieurs déno-inations telles : naevomatose basocellulaire, cinquièmehacomatose, syndrome de Ward ou encore épithélioma-ose multiple généralisée [1]. Il s’agit d’une affection

éservés.

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Figure 2 Utérus normal, ovaires sièges de multiples fibromesrécidivants.Normal uterus, multiple recurrent ovarian fibromas.

Fibromes ovariens récidivants dans le cadre du syndrome de

dysembryoplasique héréditaire par anomalies des crêtesneurales dont les cellules migrent et colonisent un grandnombre d’organes d’origines ectodermique [2]. Le SGest dû à des mutations sur le gène Patched qui est unpuissant suppresseur tumoral [3]. Le SG associe des naevibasocellulaires et des kystes épidermoïdes maxillaires à desanomalies très diverses : cutanées, osseuses, neurologiques,oculaires, génitales et endocriniennes. La prévalence duSG varie de 1/57 000 à 1/256 000 [1]. À notre connaissance,seuls quelques cas de fibromes ovariens récidivants dans lecadre du SG sont retrouvés dans la littérature.

Observation

Melle M.P., âgée actuellement de 20 ans, suivie pour syn-drome de Gorlin nous a été adressée par son médecingénéticien à l’âge de 15 ans pour une masse pelviennedécouverte lors d’une échographie abdominopelviennesystématique. L’interrogatoire a révélé la présence du syn-drome de Gorlin chez la grand-mère, le père et deux frères.Notre patiente a eu des règles régulières depuis l’âge de14 ans. Elle a été opérée pour des kystes mandibulairesà deux reprises. L’examen clinique a retrouvé de nom-breux nævus de petite taille, une lordose dorsal et uneirrégularité des membres inférieurs. L’examen gynécolo-gique a objectivé un développement pubertaire normal etau toucher rectal une masse pelvienne régulière indoloremobile et ferme. L’échographie pelvienne a montrée unevolumineuse masse pelvienne de 8 cm hétérogène peu vas-cularisée d’origine ovarien, et l’IRM un utérus normal avecplusieurs masses tissulaires latéro-utérines dont les plusvolumineux sont une de 7,5 cm et une autre de 3 cm dontl’aspect et la localisation évoquaient des fibromes ovariensbilatéraux avec présence un discret épanchement liqui-dien (Fig. 1). Les marqueurs tumoraux étaient normaux.

Melle M.P. a été opéré par laparotomie et une myomecto-mie ovarienne bilatérale a été réalisée respectant le tissuovarien sain. L’analyse anapathomopathologique a concluà des fibromes ovariens avec calcifications. Lors du suivi

Figure 1 Nombreux nodules ovariens bilatéraux avec épan-chement pelvien.Many bilaterals ovarians nodes with pelvic effusion.

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Figure 3 Ovaire droit fibromateux.

Right fibromatous ovary.

ous avons objectivé une récidive de ces fibromes qui aug-entaient progressivement en nombre et en volume tout

n envahissant le tissu ovarien. Cette évolutivité exposaita patiente au risque de destruction de ses ovaires avectérilité. Ainsi, après une discussion multidisciplinaire aveconsentement de la patiente, celle-ci a été réopérée parœlioscopie (Fig. 2), avec exérèse de multiples fibromesvariens (Fig. 3 et 4) et réalisation d’un prélèvement du cor-ex ovarien en vu d’une cryoconservation pour préserver sonotentiel de fertilité ultérieur.

iscussion

e SG est une maladie rare mais non exceptionnelle [2]. Uniagnostic indirect peut être retenu en présence de deux cri-ères cliniques majeurs ou un critère majeur et deux critères

ineurs. Les critères majeurs sont : des kératokystes odon-

ogéniques, une porokératose palmoplantaire, la présencee plus de deux carcinomes basocellulaires (CBC) ou desBC débutant avant l’âge de 20 ans et une atteinte familialeu premier degré. Les critères mineurs sont : une macro-

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Figure 4 Ovaire gauche fibromateux.

Left fibromatous ovary.

éphalie, une bosse frontale, un palais ogivale, des kystespidermiques, des anomalies costo-vertébrales et thora-iques, un pectus carinatus, des calcifications ectopiquesur la radiographie du crâne, des fibromes ovariens ou unédulloblastome [1]. Notre patiente présente deux critèresajeurs permettant de retenir le diagnostic de fibromes

variens survenant dans le cadre d’un SG à savoir : l’atteinteamiliale de premier degré et les kératokystes odontogé-iques.

En cas de doute, le diagnostic peut être confirmé para biologie moléculaire. Le gène du SG a été localisé sure chromosome 9q22.3. L’étude de tumeur dans le SG aveces marqueurs du chromosome 9q a montré une perte de’hétérozygotie de cette région suggérant que le gène du SGourrait correspondre à un gène suppresseur de la tumeur.ette notion d’anti-oncogène repose sur la perte des deuxllèles de ce gène dans une tumeur d’après le modèle pro-osé par Knudson en 1971. Deux équipes en Australie etu États-Unis ont identifié ce gène en 1996. Il s’agit duène Patched qui code pour une glycoprotéine transmem-ranaire nommée « Hedgehog » qui peut fonctionner commeécepteur ou transporteur. La voie de transduction Pat-hed/Hedgehog est impliquée à de multiples reprises auxrocessus du développement embryonnaire à savoir celuies membres, une partie du cerveau, les follicules du cuirhevelu et les dents. La majorité des mutations identi-ées dans le gène Patched chez les patients atteints duG aboutissent à la synthèse d’une glycoprotéine tronquée.es arguments sont concordants avec l’hypothèse que lesnomalies de développements ou les malformations de cesatients sont dus à la disparition de « la fonction suppresseure tumeur » de Patched [1,4].

Le diagnostic prénatal par choriocentèse à partir de dix12 semaines d’aménorrhées (SA) peut être indiqué dans

e cadre du conseil génétique si la maladie est généti-uement confirmée dans la famille. Mais le recherche dea mutation dans l’ADN fœtale n’est pas systématique à

ause de l’expressivité variable de la maladie. Par ailleurs,’échographie prénatale permet d’identifier à 19 SA desalformations du système nerveux central, des anomalies

ertébrales et des tumeurs cardiaques permettant ainsi deréciser, in utero, l’évolutivité de la maladie [5].

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H. Omrani et al.

En post-natal, les enfants à risque de développer la mala-ie nécessitent un examen clinique annuel, en particulierermatologique et neurologique dans le cadre d’un dépis-age précoce d’un CBC et d’un médulloblastome. Le risquee développer un médulloblastome est maximum entre deuxt trois ans mais certain cas ont été diagnostiqués à l’âgee sept ans alors que le CBC se développe surtout à partire l’âge de 20 ans mais il a été diagnostiqué aussi chez desndividus depuis l’âge d’un ans. Sur le plan paraclinique, ilst recommandée une échographie du cœur à la naissance,n panoramique dentaire et des contrôles radiographiquesu squelette annuels, une IRM cérébrale jusqu’à l’âge deept ans [6].

Les fibromes ovariens représentent 5 à 6 % des tumeursénignes de l’ovaire dans la population générale, ils seévèlent entre 16 et 45 ans [5]. Ces fibromes touchent 25 %es patientes atteintes du SG et sont bilatéraux dans 75 % desas [1]. On retrouve rarement la présence de calcificationsais celles-ci sont spécifiques et leur association avec desbromes ovariens bilatéraux et nodulaires doit faire évoquer

e SG [6].Les fibromes ovariens sont souvent stables et asymp-

omatiques. Lorsqu’ils augmentent de volume ils sontesponsables de symptômes gastro-intestinaux et génito-rinaires. Par ailleurs, ils deviennent aussi délétèresis-à-vis du tissu ovarien qu’ils envahissent [5].

Le diagnostic différentiel se pose avec les myomes utérinous séreux, les tératomes matures, les tumeurs germinalesu épithéliales, les endométriomes et les kystes mésenté-iques.

Les fibromes ovariens doivent être traités par une résec-ion chirurgicale économique tout en préservant le tissuvarien sain ce qui constitue une problématique pour lesynécologues.

À notre connaissance aucune tumeur maligne de l’ovaire’a été rapportée dans le cadre du SG. En 1965, Abel etoltz ont décrit deux cas de fibrosarcomes ovariens isolés

en dehors du syndrome de Gorlin) dans une série de 170 cas7]. La récidive des fibromes ovariens est rarement rappor-ée, celle-ci expose les patientes à une série d’interventionsvec un risque de ménopause précoce et d’infertilité [5]. En990, Howell et al. ont rapporté le cas de deux patientestteintes du syndrome de Gorlin et présentant des fibromesécidivants [8], et en 2001, Seracchioli et al. ont présentée cas d’une patiente ayant développé des fibromes ova-iens récidivants dans le cadre du syndrome de Gorlin avecn traitement chirurgical conservateur respectant 90 % de’ovaire gauche et 70 % du droit [5]. Notre patiente a pré-enté des fibromes ovariens volumineux et récidivants aprèsa première chirurgie ce qui la exposée à un grand risque’infertilité ultérieur devant les résections répétées de sonissu ovarien envahie par ces fibromes.

Nous admettons que tout ovocyte perdu ne pourratre remplacée. Ainsi, dans le cadre du SG, il faut réali-er un dépistage systématique des fibromes ovariens afin’identifier les patientes à risque de défaillance ovariennerécoce. Un counseling à propos des différentes optionse conservation du potentiel de fertilité doit être mené

n fonction de l’âge, de l’évolutivité de la maladie et duoment souhaité de conception. Pour les jeunes patientes

a technique la plus recommandé est la cryoconservation duissu ovarien, [9] comme il a été le cas pour notre patiente.

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Gor

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[Medline].[9] Lobo RA. Potential options for preservation of fertility in

Fibromes ovariens récidivants dans le cadre du syndrome de

La décision d’une ovariectomie bilatérale avec hystérec-tomie nécessite un temps de réflexion et n’est pratiquéeque chez des patientes ayant des symptômes sévères et nondésireux de procréation. Un seul cas à été rapporté dans lalittérature pour cette indication [10].

Ainsi il semble que l’absence de symptomatologie cli-nique et en présence de fibromes ovariens stables il estrecommandé de ne pas intervenir pour préserver au maxi-mum la fertilité de la patiente qui par ailleurs n’est pasaffectée par le SG en lui-même.

Conclusion

Les fibromes ovariens bilatéraux sont rares, ils sont souventassociés au SG. La forme évolutive et récidivante de cesfibromes ovariens expose les jeunes patientes aux risquesde ménopause précoce et d’infertilité d’où la recomman-dation de n’intervenir qu’en présence de signes cliniquesou devant une augmentation du volume de ces fibromes.Lorsque leur résection s’avère nécessaire elle doit être éco-nomique tout en respectant au maximum le tissu ovariensain. Parallèlement, la cryoconservation ovarienne est latechnique recommandé pour les jeunes patientes qui désiregarder leur fertilité.

Conflit d’intérêt

Aucun.

[

lin 587

éférences

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women. N Engl J Med 2005;353:64—73.10] Burket RL, Rauh JL. Gorlin’s syndrome: ovarian fibromas at

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