education et mondes virtuels

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Education et mondes virtuels Sébastien Simao aka Tao vacano Avant de commencer, pour les néophytes, un monde virtuel est un espace crée par un logiciel informatique où des personnes se retrouvent modélisées par des avatars, représentations virtuelles pixélisées de la personne physique. Le but de cet article est d'esquisser les nombreuses possibilités de ces lieux dans de nombreux domaines et pour tout âge en donnant quelques exemples. Je parlerai principalement du logiciel OpenSim que je connais bien pour y travailler avec mes élèves mais bien d'autres existent. Il permet de se connecter dans un monde virtuel tri-dimensionnel libre où les serveurs appartiennent aux utilisateurs. Il peut être ainsi utilisé soit en réseau local (très pratique dans un établissement) soit via le net en se connectant à des « grilles » (regroupement de serveurs locaux). Dans ce cas je parlerai plutôt de la Francogrid, grille francophone. 1) Les premiers atouts L'engouement par les élèves est direct, ils retrouvent l'univers ludique dans lequel ils baignent mais ici pas de scénario pré-conçu, ni objectifs, toutes les créations (constructions, scripts) proviennent des utilisateurs. L'élève devient alors plus acteur que consommateur. A vous, toutefois, de fixer des règles d'utilisation  au départ. De plus, par rapport aux logiciels de construction 3D (Blender, Sketchup...), un atout indéniable est « l'immersivité ». Si vous construisez des fonds sous marins 3d (ce qui est le projet avec mes élèves) vous pouvez nager dedans tout en discutant de la faune et la flore rencontrées en eau profonde et les sensibiliser à l'écologie... Enfin  comme tout le monde est « présent » sur le même écran on peut créer des objets complexes à plusieurs, instaurant ainsi de véritables travaux de groupes facilitant la résolution de tâches complexes.  2) Communiquer C'est un domaine crucial dans les mondes virtuels et une de ses principales forces, là aussi contrairement à ce que l'on pense, on ne se replie pas sur soi-même mais on s'ouvre aux autres.  La plupart des communications se font en général à l'écrit en « chat » mais peuvent être aussi orales. C'est un bon moyen de travailler la langue surtout que vous n'allez jamais autant parler à vos élèves car beaucoup d'inhibitions sont levées : timidité, 

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Présentation des atouts des mondes virtuels pour l'Education au travers de nombreux exemples déjà existants

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Page 1: Education et Mondes Virtuels

Education et mondes virtuelsSébastien Simao aka Tao vacano

Avant de commencer, pour les néophytes, un monde virtuel est un espace crée par un logiciel informatique où des personnes se retrouvent modélisées par des avatars, représentations virtuelles pixélisées de la personne physique.

Le but de cet article est d'esquisser les nombreuses possibilités de ces lieux dans de nombreux domaines et pour tout âge en donnant quelques exemples.

Je parlerai principalement du logiciel OpenSim que je connais bien pour y travailler avec mes élèves mais bien d'autres existent. Il permet de se connecter dans un monde virtuel tri­dimensionnel libre où les serveurs appartiennent aux utilisateurs. Il peut être ainsi utilisé soit en réseau local (très pratique dans un établissement) soit via le net en se connectant à des « grilles » (regroupement de serveurs locaux). Dans ce cas je parlerai plutôt de la Francogrid, grille francophone.

1) Les premiers atouts

L'engouement par les élèves est direct, ils retrouvent l'univers ludique dans lequel ils baignent mais ici pas de scénario pré­conçu, ni objectifs, toutes les créations (constructions, scripts) proviennent des utilisateurs. L'élève devient alors plus acteur que consommateur. A vous, toutefois, de fixer des règles d'utilisation  au départ.

De plus, par rapport aux logiciels de construction 3D (Blender, Sketchup...), un atout indéniable est « l'immersivité ». Si vous construisez des fonds sous marins 3d (ce qui est le projet avec mes élèves) vous pouvez nager dedans tout en discutant de la faune et la flore rencontrées en eau profonde et les sensibiliser à l'écologie... 

Enfin  comme tout le monde est « présent » sur le même écran on peut créer des objets complexes à plusieurs, instaurant ainsi de véritables travaux de groupes facilitant la résolution de tâches complexes. 

2) Communiquer

C'est un domaine crucial dans les mondes virtuels et une de ses principales forces, là aussi contrairement à ce que l'on pense, on ne se replie pas sur soi­même mais on s'ouvre aux autres.  La plupart des communications se font en général à l'écrit en « chat » mais peuvent être aussi orales. C'est un bon moyen de travailler la langue surtout que vous n'allez jamais autant parler à vos élèves car beaucoup d'inhibitions sont levées : timidité, 

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aspect physique, handicap, langue orale non maitrisée. Tout le monde se retrouve alors sur un pied d'égalité. Vous allez par conséquent mieux les cerner et vos relations s'en trouveront  renforcées et améliorées. D'ailleurs de nombreux psychologues, comme Yann Leroux travaillent dans ces mondes et mènent un travail de fond avec des jeunes.

3) Participer à des évènements, conférences, visiter

Sans être un spécialiste en informatique, il est possible de rapidement mener des expériences pédagogiques intéressantes via le net après une à deux heures d'initiation : soit en visitant des projets existants soit en participant à des évènements et cela quelle que soit la distance physique où l'on se trouve et sans aucune dépense d'argent.

La FrancoGrid et la Bibliothèque Francophone du métavers par exemple organisent, dans une reconstitution 3d de l'Opéra de Rennes, des représentations live d'opéras. A la fin du spectacle, il y a des possibilités d'échanges avec un public international et les artistes.

 Rien ne vous empêche d'ailleurs d'aller sur des grilles anglophones, italiennes, ou autres pour parler ou écrire en langue étrangère avec pourquoi pas une classe jumelée. Il existe de nombreuses grilles anglophones à vocation éducative (ReactionGrid, ScienceSim) qui sont en avance sur nous dans ce domaine. 

L'autre possibilité étant aussi d'écouter un conférencier pouvant se trouver à l'autre bout du monde dans un amphi virtuel. 

4) Construire, programmer, simulerCe paragraphe demandera pour l'éducateur une plus grande maîtrise du logiciel 

mais en contrepartie les possibilités sont quasi infinies..

a) CartographieLa topographie d'une région est donnée par 

des images en niveau de gris où le niveau indique la hauteur 3d, il est alors possible assez facilement à partir de « scan » de carte physique sur un Atlas de réaliser des cartes tri­dimensionnelles. Il devient alors par exemple sur la FrancoGrid, possible de voler avec les élèves dans le couloir Rhodanien sur la carte de France ou bien de simuler l'inondation de Polders sur la carte des Pays­Bas.

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b) ConstructionsElles se font principalement à partir d'objets 

de bases aux formes mathématiques simples ( cube, cylindre, sphère et forme dérivées). En liant, tournant et étirant ses objets on réalise alors des objets plus complexes que l'on peut ensuite texturer. C'est la principale tâche que je mène avec mes élèves de cinquième cette année, étant leur professeur de maths. On a par exemple longtemps travaillé sur la réalisation d'un phare. De nombreuses compétences du programme sont ainsi abordés ( géométrie dans l'espace, repérage, proportionnalité, symétries pour réaliser des objets plus rapidement...). Mais on peut travailler aussi d'autres compétences  dans des disciplines diverses : Technologie (décomposer des mécanismes, les reproduire) et Arts plastiques, cf. chapitre 5.

Cela peut même s'adresser aux plus jeunes, une professeure des écoles à Strasbourg emmène ses élèves de maternelle dans leur classe reconstituée et mène un travail didactique sur l'architecture du quartier et de son école

c) Scripter et simulerOpenSim est doté d'un moteur physique ainsi que d'un langage de programmation, il 

devient alors possible de représenter des objets mathématiques de type fractal ou complexe, visualiser des protéines, simuler des écosystèmes , tsunamis ( site du NOAA sur Second life® )...De nombreuses universités ou organismes de recherche commencent à investir les lieux...   

5) Arts et monde virtuel

a) Exposer des œuvres réellesOn peut facilement importer des images réelles 

et ainsi créer des musées virtuels pour privilégier l'échange avec le public sur ses œuvres. De nombreux artistes comme par exemple Patrick Moya sur Second Life® investissent les lieux ayant compris le potentiel.

b) Oeuvres virtuellesLa sculpture 3d peut être vue aussi comme 

objet d'art mélangé aux scripts et en interaction avec le spectateur  qu'il soit dans un monde virtuel ou réel (cf chapitre plus loin) l'évènement prend alors une tout autre dimension.  

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c) La photographieIl est très facile de faire des photos dans les mondes 

virtuels en utilisant l'interface du logiciel. Un travail artistique peut être réalisé sur le cadrage et la lumière modifiable à volonté dans l'univers virtuel. Accompagné ensuite de retouches en post­production, vous pouvez obtenir des résultats intéressants comme sur cette photographie prise par Yann Mip.

d) MachiminaUn machimina consiste à filmer une scène se produisant dans un monde virtuel , les 

acteurs seront alors les avatars. Même si cela demande du travail : construction de décors, habits pour les avatars, scénario, réalisation, montage, par rapport à une séquence d'animation en 3d cela reste beaucoup plus abordable et beaucoup moins couteux en temps de travail et en puissance informatique utilisée qu'un film d'animation classique. Cela peut être aussi un moyen de communiquer sur vos créations via un site web.   

6) Interaction avec le réel

On oppose souvent virtuel au réel ce qui est à mon avis un non sens car les deux sont intimement liés. Quand on visite un lieu « virtuel » on est tenté d'en voir plus en réel comme pour l'opéra ou la plongée et inversement. Les lieux virtuels permettent d'avoir un autre angle d'approche. 

Mais on peut aller plus loin en les faisant interagir l'un sur l'autre, la démocratisation des « arduinos » permettent de faire ce lien via le net entre objets réels et virtuels.

Sur la Francogrid, des écoles hollandaises ont installé dans le cadre de leur projet ValueForAll des capteurs de ce style mesurant la pollution et de nombreux paramètres dans leur classe. A tout moment les élèves et adultes se connectant sur la grille peuvent voir ses valeurs et même rentrer en interaction en éteignant par exemple la lumière à distance si cela ne l'a pas été fait.

On peut de plus faire des conférences ou réunions en réalité mixte. Un écran projette dans un lieu réel les intervenants avatars et en retour les avatars par l'intermédiaire d'une caméra peuvent voir les intervenants dans le lieu réel et dialoguer avec eux. Cela permet ainsi de tenir des réunions à distance et de multiplier les échanges.

7) Les écueils à éviter

a) Contraintes techniquesElles sont principalement de deux ordres : le débit internet, et la carte graphique. 

Pour un particulier, un haut débit classique suffit mais dans les établissements les débits de connexion sont souvent faibles. Je vous préconise donc d'utiliser alors le logiciel en local. 

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Il faut de plus avoir des ordinateurs susceptibles d'afficher le rendu 3d en temps réel, évidemment là aussi ce n'est pas le cas de tous les établissements. Actuellement vous rencontrez peu de problèmes sur un ordinateur récent mais attention toutefois aux portables et EeePC mal adaptés à ce type d'utilisation.    

b) La communicationQuand on donne « un rendez­vous » sur le net de chez soi à une classe cela demande 

une formation à la communication avec les élèves en amont : Que faire en cas de problèmes ? Qui contacter ou à qui demander de l'aide si le référent n'est pas là ? Quel créneau horaire choisir ? Le mieux est je pense une formation préalable aux réseaux sociaux (Twitter, Facebook) pour résoudre ce type de questions   

c) L'insertion dans les programmesTout ce qu'on peut y faire prend aussi du temps pour être réalisé et c'est souvent un travail multiforme. Compte tenu de la pression à réaliser les programmes, il semble difficile de s'adapter à la progression d'une matière précise. Toutefois vous pouvez arguer justement de la transversalité pour obtenir des dotations pour un projet. Privilégiez d'ailleurs le travail en petit groupe de personnes car à distance les tâches sont souvent démultipliées.

d) Le temps investiMême si on vous  donnera des heures pour un projet dans les mondes virtuels, le travail fait hors classe sera très souvent sous­estimé.  Outre la mise en place, création du lieu et la progression pédagogique, il vous faudra aussi occuper les lieux pour en être le catalyseur même si au bout d'un certain temps les élèves par eux même arrivent à s'autogérer. L'éducation nationale tient à mon avis trop encore au concept de classe dans un lieu clôt pour évaluer ce qui se fait en dehors. C'est l'inconvénient majeur, il vous faudra donc aller chercher des motifs de satisfaction ailleurs, et comme c'est souvent le cas, ce sont les élèves qui vous le rendront...

Ainsi s'achève cet article, j'espère vous avoir convaincu des possibilités multiples et variées de ces mondes pour l'éducation. Si vous avez envie d'en savoir plus, je vous ai mis quelques références. De plus si l'expérience vous tente vous pouvez me twitter : @taovacano pour une visite dans ces mondes là.   

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