Transcript
Page 1: Oncocytome du sac lacrymal : à propos d’un cas

Journal français d’ophtalmologie (2013) 36, e181—e182

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

Fm

ss

D

LqamulplmmlLbeht

LETTRE À L’ÉDITEUR

Oncocytome du sac lacrymal : àpropos d’un cas�,��

Oncocytoma of the lacrimal sac: Case report

Introduction

Nous rapportons le cas d’un oncocytome du sac lacrymaldécouvert fortuitement en peropératoire au décours d’unedacryocystorhinostomie (DCR).

Cas clinique

Un homme de 87 ans est adressé pour prise en charge thé-rapeutique d’un larmoiement chronique gauche associé àune volumineuse tuméfaction canthale médiale homolaté-rale (Fig. 1). Il n’a pas d’antécédents notables hormis despolypes colorectaux. Il ne présente aucun autre signe fonc-tionnel. L’examen ophtalmologique est sans particularité.L’examen des voies lacrymales objective une sténose ducanal lacrymonasal avec probable dacryocystocèle gauche.L’examen otorhinolaryngologique ne retrouve aucune ano-malie au niveau des fosses nasales. Le patient est doncprogrammé pour une DCR gauche sous anesthésie géné-rale. Au décours de l’intervention, au temps d’ouverture dusac lacrymal, une tumeur mal limitée et hémorragique estdécouverte fortuitement. L’exérèse la plus complète pos-sible est réalisée et la pièce est envoyée au laboratoire pourexamen anatomopathologique. Aucune rhinostomie n’estdonc pratiquée, la DCR est interrompue. Les suites opéra-toires sont simples. Un scanner du massif facial effectuéle lendemain de l’intervention ne révèle que des rema-niements postopératoires localisés au niveau de la logelacrymale sans extension orbitaire ni lyse osseuse de la paroimédiale de l’orbite. L‘examen anatomopathologique retient

le diagnostic d’oncocytome du sac lacrymal sans signe demalignité (Fig. 2). Le patient est actuellement en cours de

� Article présenté lors d’une communication au congrès annuel dela Société ophtalmologique plastique, reconstructrice et esthétiquefrancaise (SOPREF) 2012.

�� Le texte de cet article est également publié en intégralitésur le site de formation médicale continue du Journal francaisd’ophtalmologie http://www.e-jfo.fr, sous la rubrique « Clinique »(consultation gratuite pour les abonnés).

dlos1dsrcco

0181-5512/$ — see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droitshttp://dx.doi.org/10.1016/j.jfo.2013.02.005

igure 1. Photographie préopératoire : tuméfaction canthaleédiale gauche évocatrice d’une dacryocystocèle.

urveillance : à un an postopératoire il ne présente aucunigne de récidive locorégionale.

iscussion

e larmoiement chronique est un motif de consultation fré-uente en ophtalmologie. Il peut résulter de nombreusestteintes notamment celles des voies lacrymales. Ce lar-oiement est généralement causé par une fibrose ou

ne inflammation chronique du sac lacrymal ou du canalacrymonasal [1]. Cependant, l’étiologie tumorale ne doitas être méconnue avec notamment les tumeurs du sacacrymal. Les tumeurs du sac lacrymal sont composéesajoritairement de tumeurs épithéliales, essentiellementalignes, puis viennent les tumeurs mésenchymateuses, les

ymphomes, les mélanomes et les tumeurs nerveuses [1].es adénomes oncocytaires sont des tumeurs épithélialesénignes. Leur incidence au niveau de la région orbitairest estimée à 0,3 par million par an [2]. Ces dernières sontabituellement localisées au niveau de la thyroïde, des para-hyroïdes et du rein, mais restent une entité rare au niveaue l’orbite et des annexes oculaires. Une revue récente de laittérature de Say et al. a recensé 212 cas publiés de tumeursncocytaires de l’orbite et des annexes avec la répartitionuivante : caroncule 59 %, sac lacrymal 19 %, conjonctive6 %, glande lacrymale 6 % [2]. Les tumeurs oncocytairesu sac lacrymal touchent de manière équivalente les deuxexes, à un âge moyen de 73 ans [2]. Les signes cliniques

encontrés sont classiquement un larmoiement (38 % desas [2]), une tuméfaction du canthus médial, une dacryo-ystite chronique. Aussi, certains signes cliniques peuventrienter vers une étiologie tumorale et donc nécessiter la

réservés.

Page 2: Oncocytome du sac lacrymal : à propos d’un cas

e182

Figure 2. A. Coupe histologique de la tumeur, coloration HES,géK

rnclmutpamtncs(p

latpdmc

demadl

rrt[t

C

Ltthopdne

D

Lr

R

[

[

[

[

[

rossissement × 400 : grandes cellules oncocytaires à cytoplasmeosinophile. B. Étude immunohistochimique avec anticorps anti-i67 : faible index de prolifération inférieur à 5 %.

éalisation d’un scanner voire d’une IRM orbitaire. Il s’agitotamment d’une tuméfaction étendue au-delà du tendonanthal médial, d’une hémolacrymie, d’une absence dearmoiement, d’une extériorisation de la tumeur vers leséats lacrymaux, d’un aspect induré à la palpation avec

ne adhérence aux plans profonds. Néanmoins, ces atteintesumorales du sac lacrymal sont fréquemment de diagnosticeropératoire, au décours d’une DCR pour dacryocystiteiguë ou chronique [3]. Leur découverte doit entraîner auinimum une biopsie du sac lacrymal pour examen ana-

omopathologique et l’interruption du geste de DCR ene réalisant pas la rhinostomie. Une étude menée sur lesaractéristiques histologiques de biopsie systématique duac lacrymal de 377 DCR a montré sept cas de lymphomes1,9 %), quatre papillomes (1,11 %), quatre infiltrats lympho-lasmocytaires (1,11 %) et deux carcinomes (0,5 %) [4].

Ces éléments doivent inciter le chirurgien à respecter’ouverture première du sac lacrymal au cours d’une DCRfin de prévenir la dissémination endonasale d’une éven-uelle tumeur du sac lacrymal découverte fortuitement en

eropératoire. Les oncocytomes ou adénomes oncocytairesu sac lacrymal sont des tumeurs épithéliales bénignes,ais certains cas d’oncocytome malin ou carcinome onco-

ytaire sont également rapportés [5]. Les oncocytes sont

Lettre à l’éditeur

es cellules épithéliales, caractérisés par un noyau rondt régulier, un cytoplasme éosinophile ainsi qu’une atypieitochondriale. Dans notre observation, les caractéristiques

natomopathologiques de la tumeur ainsi que le faible indexe prolifération en immunohistochimie ont permis de retenire diagnostic d’oncocytome bénin.

La prise en charge thérapeutique des oncocytomesepose sur la chirurgie qui demeure le traitement deéférence ; elle sera éventuellement complétée d’une radio-hérapie et/ou d’une chimiothérapie en cas de malignité5]. Une surveillance clinicoradiologique au long cours estoujours nécessaire afin de dépister une éventuelle récidive.

onclusion

’ophtalmologiste doit être sensibilisé à la possibilité d’uneumeur du sac lacrymal devant toute pathologie obstruc-ive des voies lacrymales. Au moindre doute, il ne doit pasésiter à réaliser une imagerie préopératoire. De plus, cettebservation permet de rappeler l’importance de l’ouvertureremière du sac lacrymal avant rhinostomie au décours’une DCR, permettant ainsi d’éviter la dissémination vers leez d’une tumeur du sac lacrymal découverte fortuitementt potentiellement maligne.

éclaration d’intérêts

es auteurs déclarent ne pas avoir de conflit d’intérêt enelation avec cet article.

éférences

1] Ducasse A, Adenis J-P, Fayet B, George J-L, Ruban J-M,et al. Les voies lacrymales. Rapport de la Société francaised’ophtalmologie 2006. Paris: Masson; 2006. p. 345—54.

2] Say EA, Shields CL, Bianciotto C, Eagle Jr RC, Shields JA. Onco-cytic lesions (oncocytoma) of the ocular adnexa: report of15 cases and review of literature. Ophthal Plast Reconstr Surg2012;28:14—21.

3] Chow DR, Browstein S, Codère F. Oncocytoma of the lacrimalsac associated with the chronic dacryocystitis. Can J Ophthalmol1996;31:249—51.

4] Anderson Nicholas G, Wojno Ted H, Grossniklaus Hans E. Cli-nicopathologic findings from lacrimal sac biopsy specimensobtained during dacryocystorhinostomy. Ophthal Plast ReconstrSurg 2003;19:173—6.

5] Yuen HK, Cheuk W, Cheng AC, Anh C, Chan N. Malignant onco-cytoma of the lacrimal sac as an unusual cause of epiphora.Ophthal Plast Reconstr Surg 2007;23:70—2.

B. Donnadieua,∗, J. Girea, M. Boulzea,C. Cohen-Pansieri b, S. Guigoua

a Service d’ophtalmologie, centre hospitalierd’Avignon, 305, rue Raoul-Follereau, 84902

Avignon cedex 9, Franceb Service d’anatomie et de cytologie pathologique,

centre hospitalier d’Avignon, 305, rueRaoul-Follereau, 84902 Avignon cedex 9, France

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected]

(B. Donnadieu)


Top Related