Études Économiques Groupe http://etudes-economiques.credit-agricole.com
Trimestriel – N°17/091 – 31 mars 2017
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018
La concordance des temps
Le temps politique est long. Celui des marchés financiers extrêmement court. Enfin, celui de l’économie réelle pourrait être qualifié de temps intermédiaire. Il faut réconcilier ces trois temps différents pour composer un scénario économique et financier sans trop de discordances. Un scénario dans lequel le cycle prospère, voire se raffermit, sous réserve que les risques politiques ne se matérialisent pas par un resserrement drastique des conditions financières.
Zoom vidéo
Délicate partition
Un scénario d’accélération et de
diffusion de la croissance sans
risque inflationniste ni tensions
financières qui suppose que les
Banques centrales s’orientent
vers une politique monétaire
moins accommodante à petits
pas, voire à reculons.
Sommaire
Pays développés – Amélioration et synchronisation .................. 3
Pays émergents – Jusqu’ici tout va bien ? .............................. 14
Pétrole – Vers une nouvelle confrontation entre l’OPEP et les États-Unis ..................................................................... 17
Politique monétaire – Les resserrements ? À pas comptés, voire à reculons ...................................................................... 19
Taux d’intérêt – En hausse, mais pas de sell-off massif .......... 22
Taux de change – De la politique monétaire à la politique tout court ................................................................................ 25
Prévisions économiques et financières ................................... 27
Brexit, élection de Donald Trump aux États-Unis, programmes de rupture proposés aux électeurs en Europe : les ambitions politiques sont grandes, les solutions radicales, les histoires séduisantes. Une histoire américaine enthousiasmante au point de séduire les marchés, crédules, puis de les décevoir. Les agents, notam-ment les ménages, semblent faire preuve d’une plus grande perspicacité. Ils savent que la potion peut être amère avant que de très (très) éventuelles améliorations concrètes, en termes notamment d’emploi, de salaires, ne se dessinent. Le cycle se raffermit donc de façon « spontanée », sans stimuli
budgétaires, mais sous le regard nécessairement bienveillant des Banques centrales.
Un raffermissement plus synchrone
Les performances respectives des différentes gran-des économies ou grandes zones ne sont pas toutes aussi brillantes, mais elles s’améliorent toutes. La consommation demeure le moteur puis-sant de ce raffermissement plus synchrone et dans lequel la légère accélération de l’inflation ne constitue pas un danger. Créations d’emplois, progression des salaires, coût de l’endettement et
MONDE : Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 2
inflation toujours contenus mais, point important, dont la hausse est anticipée : les ménages arbitrent et, finalement, semblent ne rien sacrifier. Tardive-ment, modestement et inégalement, l’investisse-ment vient raffermir le cycle. Enfin, la demande de ceux qui font la course en tête (dont les États-Unis) apporte un soutien à ceux dont la croissance est moins vive et moins gourmande en importations (dont la zone euro). Le cycle économique se renforce et prospère. Au Royaume-Uni, aux États-Unis, il semble avoir digéré les chocs politiques avérés que sont le référendum en faveur du Brexit et, surtout, l’élection de D. Trump. En zone euro, il ne paraît pas altéré par l’imminence d’élections décisives.
Choc politique, frémissement financier, « résilience » réelle
Qu’il s’agisse du Brexit mais surtout de l’élection de D. Trump, les changements politiques récents constituent pourtant bien des chocs. Il ne s’agit plus de simplement déplacer le curseur de la politique économique vers un peu moins d’État, d’impôts et de protection sociale. Il s’agit de panser les blessures d’un grand corps social malade en désignant des boucs émissaires et en diabolisant notamment le « Reste du monde ». Les objectifs sont ambitieux. Sans même qu’il soit nécessaire de se prononcer sur l’efficacité des solutions proposées, il suffit déjà de constater qu’elles sont surtout radicales. Paradoxalement tellement radicales qu’elles ne se concrétisent pas aussi rapidement qu’on pourrait l’espérer pour ceux qui parient sur leur efficacité, le redouter pour ceux qui les jugent inappropriés et dangereuses. L’impact direct sur l’économie réelle, sur les comportements des agents est à court terme mineur car il faut franchir des obstacles institutionnels et/ou obtenir l’assentiment des parlements nationaux. L’impact se fait par « ricochet ». Les recettes proposées sont certes susceptibles d’affecter les anticipations des agents. Mais, surtout, elles exercent une influence décisive et immédiate sur les marchés.
Ainsi l’élection de D. Trump. Outre l’abrogation de l’Obamacare (Affordable Care Act ou ACA), l’assez présomptueux « Make America Great Again » promet une baisse des impôts dans le cadre d’une ambitieuse réforme fiscale, une forte réduction de la règlementation pour « libérer » les entreprises, le
lancement d’un vaste programme de travaux d’infrastructures et une politique protectionniste en termes de commerce international. Les marchés ont acheté ce discours revigorant sans discernement. Ils se sont lancés dans ce désormais fameux « Reflation Trade » alors même que le calendrier, la nature et l’ampleur de la relance budgétaire étaient incertains, si ce n’est inconnus. Relance budgétaire (sans même aborder la question de son finan-cement et encore moins s’interroger sur son ampleur et son impact) et accélération de la crois-sance au risque d’un soupçon d’inflation supplé-mentaire : un scénario propice à une appréciation du dollar, aux marchés actions, mais porteur d’une remontée des taux d’intérêt. Leurs spéculations enthousiastes ont été largement déçues par une première déconvenue. D. Trump éprouve des difficultés à fédérer les différentes factions du Parti républicain, afin de mener à bien la réforme de la protection sociale qui doit remplacer l’ACA. La marge de manœuvre est en effet étroite : il faut satisfaire les Républicains les plus radicaux qui jugent les modifications proposées insuffisamment audacieuses, tout en ne s’aliénant pas les élus modérés. Une déconvenue et un mauvais signal sur la capacité de l’administration à mettre en œuvre son programme. Les marchés actions n’ont pas apprécié. Le resserrement des conditions finan-cières était un risque mentionné en décembre. Il reste à l’ordre du jour et justifie que la Federal Reserve se montre vigilante.
Resserrement monétaire graduel et remontée modérée des taux longs
La mise en œuvre de politiques monétaires moins généreuses est dans l’air du temps. Les États-Unis ont ouvert le bal. Le resserrement monétaire est cependant un exercice autrement plus périlleux que l’assouplissement. Les risques ne sont pas symé-triques. Même si le cycle le justifie, priver une économie et, surtout, des marchés financiers d’un ingrédient essentiel de leur succès ne peut se faire que très (vraiment très) graduellement. Les Banques centrales seront donc vigilantes, ne reti-rant ou n’envisageant de retirer qu’à dose homéo-pathique leur soutien monétaire. Elles ne peuvent prendre le risque de voir remonter violemment les taux longs. Ceux-ci s’inscrivent sur une pente ascendante : une pente douce.
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 3
Pays développés – Amélioration et synchronisation
Les performances respectives des différentes grandes économies restent diverses, mais elles s’améliorent toutes. La consommation demeure le moteur de ce raffermissement plus synchrone dans lequel la légère accélération de l’inflation ne constitue pas un danger. Tardivement, modestement, l’investissement vient (enfin) soutenir le cycle.
États-Unis : des fondamentaux solides, des incertitudes fortes
Une accélération sensible de la croissance se profile en 2017 (2,2%, contre 1,6% en 2016). La consommation des ménages est solide et reste le principal moteur de la croissance : les consommateurs sont confiants, ont un emploi, dépensent facilement, d’autant plus que les revenus réels disponibles progressent.
Le dynamisme de la consommation des ménages est intimement lié à l’amélioration continue du marché de l’emploi. Le taux de chômage (4,7% en février) est proche de la plupart des estimations du taux de plein emploi. Plus de 2,2 millions d’emplois ont été créés en 2016 et les statistiques mensuelles de créations d’emplois disponibles pour 2017 ont été supérieures à la moyenne de 2016. Même en tenant compte du ralentissement des créations d’emplois que nous attendons pour le reste de 2017, le taux de chômage devrait se replier à 4,4% en fin d’année.
Le taux de démission progresse : cela suggère que les travailleurs considèrent que le marché du travail est porteur et leur permettra de trouver rapidement un autre emploi, probablement mieux payé et à de meilleures conditions. Par ailleurs, la stabilité du taux de participation, en dépit de facteurs démographiques exerçant une pression fortement baissière, illustre la capacité d’un marché du travail dynamique à inciter les travailleurs à rejoindre la population active. Une nouvelle baisse des ressources inemployées sur le marché du travail devrait conduire à une progression plus rapide des salaires, en hausse de 2,8% sur un an.
La situation financière des ménages est saine : cela favorise le financement d’achats importants. Le poids du service de la dette est faible. La progression du patrimoine net agrégé des ménages se poursuit, avec un effet de richesse positif sur les dépenses.
L’investissement des entreprises, confronté à un environnement difficile, a été poussif ces dernières années. L’an dernier, l’investissement non résidentiel, déjà faible, a pâti du recul de l’activité dans le secteur de l’énergie. Une reprise modérée de l’investissement en 2017 est inscrite dans notre scénario et de bonnes surprises ne sont pas à exclure. La politique de la nouvelle administration soutient le climat des affaires. Son attitude générale, favorable aux entreprises, pourrait stimuler le goût d’entreprendre, les fameux « animal spirits ». Les entreprises, réagissant à des règlementations moins pesantes et à une baisse de la fiscalité sur leurs profits, pourraient ainsi procéder à de nouveaux investissements et embaucher. Toutefois, même si la bonne tenue des marchés financiers est favorable à l’investissement, les entreprises attendront probablement des gestes concrets de Washington, avant de prendre de nouvelles initiatives.
0%
1%
2%
3%
4%
5%
6%
7%
8%
9%
nov.-10 déc.-11 janv.-13 févr.-14 mars-15 avr.-16
a/a
États-Unis : la consommation et les ventes au détail tirent la croissance
Ventes au détail
Conso. personnelleSource : Crédit Agricole CIB
-0,5%
0,0%
0,5%
1,0%
1,5%
2,0%
2,5%
T1-10 T1-11 T1-12 T1-13 T1-14 T1-15 T1-16
Ryhtme an., %
Investissement non résidentiel en % du PIB
Source : Crédit Agricole CIB
Etats-Unis : investissement des entreprisesdécevant par sa faiblesse
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 4
Les acquisitions de logements devraient continuer à progresser. À en juger par les données démographiques, les mises en chantier de logements restent inférieures à ce qui serait nécessaire pour faire face à la demande émanant des nouveaux foyers. Bien que plus coûteux (compte tenu de la tendance haussière des taux hypothécaires), l’accès au crédit hypothécaire s’est amélioré.
Le commerce extérieur devrait se dégrader et contribuer négativement à la croissance réelle de l’année 2017 (aux alentours de 0,4%). L’appréciation passée du dollar et la faiblesse de la croissance dans le reste du monde rendent les exportations américaines moins compétitives, tandis que la consommation domestique favorise les importations. Nos prévisions sur la demande extérieure nette n’intègrent ni les frictions croissantes autour du commerce international, ni les taxes d’ajustement aux frontières (BAT) proposées par les Républicains dans leur projet de réforme fiscale pour les entreprises n’auraient pas d’impact sur le commerce extérieur.
La baisse de la croissance réelle observée au premier trimestre devrait n’être que temporaire. Les données disponibles concernant cette période suggèrent que la croissance a ralenti (1,0% à 1,5%). La faiblesse régulière de la croissance au premier trimestre reflète moins de dépenses par les ménages pour le chauffage avec un hiver doux et des distorsions liées à des effets saisonniers résiduels ou simplement à un écart trimestriel normal d’une série statistique « bruitée ». Nous tablons sur le retour de la tendance de fond, plus solide, dans les trimestres suivants.
À 1,7% sur un an en janvier, l’inflation PCE1 sous-jacente reste
inférieure à l’objectif de 2% de la Fed. Elle devrait rester basse à court terme, puis augmenter avec la poursuite de l’amélioration du marché du travail et les hausses de salaires. Supérieures à la productivité, ces dernières exercent une pression haussière sur le coût unitaire du travail. Les entreprises tenteront de relever leurs prix, si les conditions de marché le leur permettent, afin de préserver leurs marges. Les anticipations d’inflation restent relativement bien ancrées. La mesure d’inflation privilégiée par la Fed atteindra 2% en fin d’année ou en début d’année prochaine.
Un plan de relance de Washington pourrait augmenter la
croissance d’environ 0,3% en 2018. Le calendrier, la nature et
l’ampleur du plan sont cependant très incertains.
Les perspectives budgétaires réduisent la visibilité
La majorité républicaine du Congrès a insisté sur deux promesses importantes pendant la campagne :
l’abrogation de l’Obamacare (Affordable Care Act ou ACA) et une baisse des impôts dans le cadre d’une
ambitieuse réforme fiscale. En outre, le président Trump a appelé de ses vœux une forte réduction de la
règlementation qui pèse sur les entreprises, le lancement d’un vaste programme de travaux d’infrastructure et
une politique plus combattive (protectionniste) en termes de commerce international. Ces initiatives faisaient
partie du plan républicain pour « rendre sa grandeur à l’Amérique » (‘Make America Great Again’).
Face à cette politique, les marchés se sont lancés dans ce qu’ils ont appelé le « Reflation Trade ». Dans
l’optique des marchés, la nouvelle politique budgétaire aura pour effet de soutenir la croissance via les baisses
d’impôts, les allègements de règlementation et les dépenses d’infrastructure financées en partie par le
gouvernement fédéral.
1 Indice de prix des dépenses de consommation personnelle (Personal Consumption
Expenditure)
0%
1%
1%
2%
2%
3%
3%
4%
Etats-Unis : pressions inflation-nistes modérées, mais en hausse
Déflateur de l’indice PCE
Déflateur de l’indice PCE sous-jacent
Source :CA CIB
-2,0%
-1,5%
-1,0%
-0,5%
0,0%
0,5%
1,0%
1,5%
T1-10 T1-11 T1-12 T1-13 T1-14 T1-15 T1-16
Ryhtme an., cvs, %
Etats-Unis : contribution à la croissance des exportations nettes
Exportations nettes : contributionà la croissance réelleSource : CA CIB
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 5
Le calendrier, la nature et l’ampleur de la relance budgétaire sont cependant très incertains. Il nous semble
que les prix de marché ont sur-réagi aux projets de Donald Trump et des Républicains du Congrès. La
suppression des certaines règlementations pesantes sera certes favorable à la croissance. Nous n’attendons
cependant guère d’effet de la relance budgétaire cette année et rien ne garantit un effet important en 2018.
Les Républicains de la Chambre des Représentants sont peu enthousiastes à l’idée de grands projets
d’infrastructure, qui accroissent les déficits. Par ailleurs, des mesures protectionnistes créeraient des risques
baissiers pour la croissance, si les conflits commerciaux se multipliaient. D’éventuelles perturbations des
chaînes d’approvisionnement, en cas de restrictions sur les échanges mondiaux, pourraient peser sur la
profitabilité des entreprises et conduire à des prix plus élevés pour les consommateurs finaux. En conclusion :
des déceptions autour du « Reflation Trade » pourraient conduire à une dégradation des conditions sur les
marchés financiers.
La polarisation partisane limite les options en
termes de législation. Compte tenu des
procédures en vigueur, l’adoption de projets de
loi importants requiert 60 voix au Sénat. Les
Républicains, qui disposent de la majorité mais
pas des 60 voix requises, prévoient de recourir à
une procédure particulière (« le rapprochement
budgétaire », budget reconciliation en anglais)
qui leur permettrait d’adopter, avec une majorité
de seulement 51 voix, les réformes fiscales dans
le cadre de la loi de finances pour l’année fiscale
2018. En dépit de la majorité républicaine dans
les deux chambres et de la présence d’un
Républicain à la Maison-Blanche, les progrès
ont été lents.
Le projet de loi abrogeant l’Obamacare a été retiré car il a soulevé des objections de la part de
représentants républicains, conservateurs et modérés, surtout depuis que la publication d’un rapport du
CBO2 qui indiquait que le projet de loi ferait perdre leur assurance santé à 24 millions de personnes au
cours des dix prochaines années. Avec l’aide de Donald Trump, Paul Ryan (le président de la Chambre des
Représentants) espère obtenir les 216 voix nécessaires pour approuver l’abrogation, le mois prochain. La
question du Sénat va probablement retarder la résolution du problème de l’abrogation de l’Obamacare. Cela
retardera l’adoption des
mesures fiscales, qui
sont au cœur du projet
de relance budgétaire,
mais sont encore plus
contestées que l’abro-
gation de l’Obamacare.
Le projet de réforme
fiscale des Républicains
de la Chambre des
Représentants prévoit
une baisse de 35% à
20% de l’impôt sur les
sociétés. Les investisse-
ments des entreprises
pourraient être intégralement comptabilisés en charges, les intérêts nets ne seraient pas déductibles et les
pertes nettes d’exploitation ne seraient déductibles que dans certaines limites. La réforme créerait un
régime d’imposition territorial avec la mise en place d’une taxe d’ajustement aux frontières (Border
Adjustment Tax ou BAT) : les entreprises américaines qui exportent bénéficieraient d’une base d’imposition
plus basse, tandis que les importateurs devraient s’acquitter d’une taxe de 20% sur les importations.
2 Congressional Budget Office : bureau budgétaire du Congrès (groupe non-
partisan de fonctionnaires fédéraux chargés de fournir des données économiques au Congrès).
0
100
200
300
400
500
600
700
Jan-16 Apr-16 Jul-16 Oct-16 Jan-17
Etats-Unis : incertitudes élevéessur la politique économique
Source : Crédit Agricole CIB
Le programme républicain est ambitieux, pas de droit à l’erreur…
24-mars Projet de loi abrogeant l’Obamacare retiré
28-avr.Expiration du budget provisoire permettant le financement de l’année
fiscale en cours
● Cette question doit être traitée pour éviter une fermeture partielle des
administrations américaines (shutdow n)…
Juillet ?Présentation par la Chambre des Représentants d’un projet de budget
pour l’année fiscale 2018. Version du Sénat au T4 ?
● Comprendra des propositions de réforme fiscale dans le cadre
du‘rapprochement budgétaire’
31-juil. Début de la trêve parlementaire, qui prend fin le 5 septembre
1-oct. Début de l’année fiscale 2018
* Jo int Committee on Taxation : comité mixte sur la fiscalité (comité non partisan issu du
Congrès qui aide les parlementaires sur les questions fiscales).
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 6
Le président de la Chambre des Représentants, Paul Ryan, et le rapporteur du Comité des voies et moyens
(Ways and Means Committee), Kevin Brady, sont déterminés à inclure la BAT dans la réforme, celle-ci
devant générer des revenus de 1 200 Mds USD en dix ans, selon les projections. Ce revenu permettrait de
compenser l’abaissement du taux de l’impôt sur les sociétés : il permettrait ainsi à la réforme fiscale d’être
plus ou moins neutre en termes de déficit budgétaire. Le dogme républicain a toujours été la réduction du
poids de l’État et de la dette publique. Les opposants à la BAT sont évidemment les entreprises dont la
facture fiscale augmenterait avec sa mise en place ; ce sont, par exemple, les entreprises de la grande
distribution, comme WalMart ou les raffineries de
pétrole qui achètent leurs produits à l’étranger et
vendent sur le marché domestique américain.
À l’heure actuelle, plusieurs sénateurs répu-
blicains sont opposés à la mise en place d’une
BAT. Cela pourrait remettre en cause le projet de
réforme et de nombreux acteurs réfléchissent à
un « plan B ». Le problème est que les autres
mesures élargissant la base fiscale sont
impopulaires et qu’une mise en œuvre progres-
sive des changements aggraverait probablement
le déficit budgétaire à court terme. Cela qui irait à
l’encontre de la réduction du déficit public
souhaitée par de nombreux membres du
Freedom Caucus3 de la Chambre des
Représentants.
Il est peu probable que les Républicains soient aidés par les Démocrates, dès lors les possibilités qui
s’offrent à eux sont soit de trouver d’autres moyens de « financer » la baisse de l’impôt sur les sociétés, soit
d’accepter que la réforme va gonfler le déficit, ce
qui irait à l’encontre de la « règle Byrd ». Cette
dernière est une règle du Sénat qui permet aux
sénateurs, pendant le processus de rappro-
chement budgétaire, de bloquer une loi si celle-ci
conduit à une augmentation significative du déficit
budgétaire fédéral sur une durée de plus de dix
ans. Cette règle explique que les baisses
d’impôts adoptées sous George W. Bush aient
été programmées pour s’arrêter au bout de dix
ans.
L’adoption de la réforme fiscale via le processus
de « rapprochement budgétaire » ne sera
possible que si un consensus entre Républicains
est trouvé sur plusieurs sujets épineux. Cela
prendra beaucoup de temps, sans garantie de
succès. Ceci est intégré dans nos prévisions macro-économiques : celles-ci prennent certes en compte des
mesures budgétaires favorables à la croissance pour l’année 2018, mais l’ampleur de l’impact budgétaire
final reste incertaine.
3 Groupe de Républicains conservateurs siégeant à la Chambre des Représentants
20
30
40
50
60
70
80
90
1980 1990 2000 2010 2020D
ett
e e
n %
du P
IB
Etats-Unis : dette fédéraledétenue par le public
ProjectionsCBO
Source : Crédit Agricole CIB
-2,0
-1,5
-1,0
-0,5
0,0
0,5
1,0
2010T1
2011T1
2012T1
2013T1
2014T1
2015T1
2016T1
Etats-Unis : contribution des dépenses gouvernementales à la
croissance du PIB
Source : Crédit Agricole CIB
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 7
Zone euro : le cycle économique l’emporte sur le cycle politique
« Reprise modérée sans accélération » : le scénario dessiné en
décembre est conforté par les derniers chiffres de croissance qui nous
permettent, en outre, de légèrement réviser à la hausse notre
prévision de croissance pour 2017 et 2018 (à, respectivement, 1,7%
et 1,6%). Ainsi que cela était prévu, l’incertitude liée aux évènements
politiques de l’automne n’a pas impacté la croissance. La dynamique
de la demande intérieure a même été plus robuste qu’anticipé grâce,
notamment, à une croissance plus soutenue de la consommation
privée et de l’investissement. Ceci a permis de compenser une
contribution plus négative du commerce extérieur principalement due
à la croissance des importations. Si en moyenne annuelle la
croissance de la zone euro n’a pas accéléré en 2016 (1,7%), la
reprise se consolide avec la convergence accrue des rythmes de
croissance entre les pays membres, grâce à une accélération des
pays en retard dans le cycle. Les pays européens profitent en effet du
renforcement du cycle manufacturier global et de la reprise de la
demande mondiale de biens d’équipement. Les dynamiques
reflationnistes gagnent en intensité et leur transmission aux prix de
production mondiaux constitue une bonne nouvelle pour les
producteurs européens. Les dernières données d’enquête PMI
signalent une économie qui commence à tourner à plein régime et
une activité industrielle qui retrouve le rythme de croissance connu à
l’été 2011, avant la crise souveraine.
Dynamique des salaires, faible coût de l’endettement mais
également faible rémunération de l’épargne et soupçon
d’inflation : les ménages arbitrent et, finalement, semblent ne rien
sacrifier. La dynamique plus soutenue du revenu disponible couplée
à la consolidation de la reprise du crédit logement ont simultanément
permis aux ménages d’augmenter leur consommation et leur
investissement résidentiel, mais aussi financier. La baisse des taux
d’intérêt du crédit habitat a permis de compenser la hausse des prix
de l’immobilier, facilitant l’accession à la propriété partout dans la
zone. La faible rémunération de l’épargne et les effets de richesse
n’ont pas incité les ménages européens à augmenter leur propension
à consommer. Le taux d’épargne a, en effet, légèrement augmenté
pour maintenir une cible de revenu financier compensant une moindre
rémunération du capital. La remontée de l’inflation ne s’est pas encore
traduite par un ralentissement de la consommation : ce dernier, même
contenu, sera inévitable. Cependant, confrontés à la moindre
progression de leur revenu disponible réel, les ménages aban-
donneront cette cible de revenu financier et ajusteront leur taux
d’épargne légèrement à la baisse pour maintenir « à flot » le cycle de
leur consommation. La consommation de biens durables, à sa
troisième année de reprise, n’a pas encore atteint son point de
saturation : un faisceau d’indicateurs l’illustre. Les carnets de
commandes en provenance du marché intérieur auprès des
producteurs de biens de consommation ne cessent de s’améliorer.
Les flux de nouveaux crédits à la consommation en janvier étaient
encore en accélération (4,1% sur un an, après 3,9%). La demande de
crédit à la consommation est elle-même toujours attendue en hausse
au premier trimestre 2017, selon l’enquête BLS auprès des banques
de la zone. Les flux du crédit habitat accélèrent également en janvier
(2,7% sur un an). La remontée anticipée des taux d’intérêt dans la
zone euro est trop modeste pour briser l’élan de l’investissement
résidentiel dans les pays du sud. Elle pourrait accélérer le
ralentissement dans les pays où la remontée des prix immobiliers est
plus soutenue et ancienne (dont l’Allemagne et l’Irlande).
11,5
12,0
12,5
13,0
13,5
14,0
14,5
15,0% revenu
dispo.
UEM : taux d'épargne des ménages
Sources : Eurostat, Crédit Agricole S.A.
-10
-5
0
5
10
15
20
-2,5
-2,0
-1,5
-1,0
-0,5
0,0
0,5
1,0
1,5
2,0
2,5a/a, %a/a, %
UEM : marché du travail
Population active Emploi
Chômeurs (dr.) Sources : Eurostat, CA S.A.
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 8
La progression du revenu disponible restera soutenue par un
rythme de créations d’emplois élevé. Ce dernier a atteint 1,8% sur
un an à fin 2016, créant un « appel d’air » : une forte remontée de la
population active (1,1% au troisième trimestre sur un an) contribuant à
infléchir le rythme de réduction du nombre de chômeurs et du taux de
chômage. Cette dynamique devrait se poursuivre à un rythme à peine
plus faible, impliquant une moindre baisse du taux de chômage en
2017 et 2018 (-0,4 point par an, contre -0,8 point en 2016). Cela
porterait le taux de chômage à 9,1% à la fin 2018, un niveau de peu
supérieur au taux de chômage d’équilibre non inflationniste (NAIRU)
estimé par la BCE à 8,5%. Ce moindre recul du taux de chômage à ce
stade du cycle n’est pas surprenant : dynamisme de la population
active et rythme encore élevé, mais en léger ralentissement, des
créations d’emplois. Nous sommes toujours dans une phase de
croissance riche en emplois, accompagnée d’une légère reprise de la
productivité. Celle-ci est le produit d’une activité plus soutenue dans le
secteur manufacturier, seul secteur capable à ce jour de générer des
gains de productivité. Ces derniers autoriseront une « bascule » du
partage de la valeur ajoutée en faveur des profits. Les marges
pourront aussi bénéficier d’une évolution plus favorable des prix de
production, évolution redevenue positive depuis dans la plupart des
pays de la zone.
C’est sur ces hypothèses que se fonde notre prévision d’accélération
de l’investissement productif. La reprise de la composante
équipement est encore fragile (notamment dans les pays du sud) et
l’investissement productif est principalement tiré par les équipements
de transport. Dans une première phase du cycle, il s’agit tout d’abord
de répondre aux besoins des fonctions commerciales et logistiques
afin de réduire les stocks et avant que ne soient rénovés voire
étendus, lors d’une seconde phase, les équipements plus obsolètes.
Nous sommes en train de passer de la première à la seconde phase.
À cet égard, les différentes incitations fiscales incitant à l’innovation
dans l’industrie vont contribuer à promouvoir l’investissement en
machines et permettre à la seconde phase de gagner en puissance.
Cette reprise de l’investissement va renforcer la croissance en France
et en Italie. Elle ne sera pas suffisante pour freiner le ralentissement en
Allemagne. En Espagne, où la reprise de l’investissement a été
soutenue depuis trois ans, son ralentissement se couplera à celui des
dépenses des ménages.
Quid des principaux risques ? Pour l’année en cours, les risques en
provenance de l’environnement international sont orientés à la baisse :
la croissance et l’inflation mondiales pourraient surprendre positivement
avec une économie américaine dans la phase d’accélération cyclique
(et ce, sans stimuli budgétaires) et un monde émergent en reprise. Pour
2018, si le risque d’une erreur de gestion du policy-mix américain ne
peut être exclu, on suppose cependant que la BCE sera en mesure de
maintenir le découplage nécessaire des taux de la zone euro de ceux
des États-Unis. Quant aux risques endogènes, ils restent orientés à la
baisse. L’éloignement du risque déflationniste dans la zone euro
augmente la probabilité d’une sortie précoce de la politique
d’assouplissement monétaire. Retenant l’hypothèse du maintien de
coalitions ou de partis traditionnels au pouvoir, notre scénario suppose
que les primes de risque des pays périphériques ne se tendent pas trop
violemment à l’approche de la réduction du montant des rachats par la
BCE, prévue dès avril 2018. L’incertitude liée au cycle électoral
européen pourrait se traduire par une remontée du taux d’épargne, un
ralentissement plus marqué de la consommation, mais également faire
trébucher la timide reprise de l’investissement. Le maintien d’un rythme
de croissance supérieur au potentiel se fonde en effet sur l’hypothèse
-70
-60
-50
-40
-30
-20
-10
0
10
solde d'opinions
UEM : producteurs de biens de consommation durable
Commandes totales
Commandes à l'export.
Sources : Com. européenne, Crédit Agricole S.A.
-1,5
-1,0
-0,5
0,0
0,5
1,0
1,5
0
2
4
6
8
10
12
14
16
10 T1 11 T1 12 T1 13 T1 14 T1 15 T1 16 T1
a-a-1% pop. active
UEM : chômage
Taux de chômageNAIRUVariation du tx de chômage (dr.)
Sources : Eurostat, Crédit Agricole S.A.
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 9
d’un relais au ralentissement escompté de la consommation privée
assuré par l’accélération de l’investissement productif. Seul ce relais
permettra de refermer l’écart de production négatif dans la première
moitié de 2019. C’est le scénario que nous retenons.
Un cycle politique plus long que le cycle électoral
La difficulté des partis antisystème à accéder au pouvoir permet de ne pas élaborer des scénarii détaillés de
rupture économique à court terme. Cependant, leurs idées continuent à façonner les programmes politiques et
à alimenter la polarisation des électeurs européens avec une potentielle porosité avec les programmes des
partis traditionnels. Une lecture binaire du risque est donc à exclure et il faudra s’accommoder de ces
tendances sur un horizon de prévision assez long.
Les partis eurosceptiques n’accèdent pas au pouvoir.
Après l’échec du FPÖ à conquérir la présidence autrichienne en décembre, la percée contenue du PVV aux
élections néerlandaises de mars laisse espérer que l’euroscepticisme marque le pas en Europe. Le gain de
la droite néerlandaise europhobe et xénophobe (PVV et FvD) n’aura été que de 7 sièges, contre une projection
des sondages supérieure à 10. Par ailleurs, les autres partis eurosceptiques de gauche, comme de droite,
n’ont pas réussi à augmenter leur score. Le parti du Premier ministre sortant a contenu son recul, avec
33 sièges sur 150, conservant son titre de premier parti. Il devrait être en mesure de former une coalition
centriste avec trois autres partis. Si ce résultat rend presque nulle la probabilité d’un Nexit la sanction de la
coalition sortante se traduit cependant par une fragmentation politique accrue.
En Allemagne, la donne politique a également
quelque peu changé avec l’arrivée de Martin Schulz
comme candidat du SPD à la chancellerie. Celui-ci
offre au parti une formidable remontée dans la
course aux législatives fédérales, au point de
concurrencer dangereusement la CDU. Cette
perspective rend envisageable, mais peu probable,
la réalisation d’une coalition SPD/Verts/Die Linke
(parti de gauche) qui réorienterait le pays vers une
politique budgétaire plus flexible et un aménagement
des réformes « Hartz » afin de sécuriser l’emploi. À
l’opposé, une coalition CDU-CSU/Verts/FDP (parti
libéral) garantirait une poursuite de l’actuelle
politique, mais les divergences entre les Verts et le
tandem CSU/FDP en matière de politique d’asile ou
même de fiscalité rendent une coalition « Jamaïque » difficilement gouvernable. Enfin, la reconduite de
l’actuelle « Grande coalition » risque de devoir prendre en compte les revendications du SPD. Le parti
eurosceptique Afd a perdu de son élan et plafonne dans les sondages depuis l’arrêt des flux migratoires et la
mise en place d’une procédure accélérée de renvoi des demandeurs d’asile déboutés dans leur pays d’origine.
En France, l’élection présidentielle approche, avec le premier tour le 23 avril et le second tour le 7 mai.
Cette élection fait apparaître des clivages profonds entre les programmes des candidats. Le premier oppose
des politiques d’inspiration libérale, axées sur une politique de « l’offre », (François Fillon, Emmanuel
Macron) à des politiques plus interventionnistes, avec une relance par la demande et une hausse marquée
des dépenses publiques (Benoît Hamon, Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen). Une seconde ligne de
fracture s’organise autour du choix entre le protectionnisme et l’acceptation de l’économie mondialisée et du
libre-échange, débouchant sur la question de l’appartenance à l’Union européenne. Marine le Pen et Jean-
Luc Mélenchon optent pour une renégociation des traités européens avec à la clé une probable sortie de la
zone euro. En revanche, François Fillon, Emmanuel Macron et Benoît Hamon sont en faveur du maintien
dans la zone euro. La conséquence de ce double clivage est l’apparition d’un paysage politique plus
morcelé (avec cinq candidats majeurs) peu propice à l’émergence de larges coalitions d’adhésion. Cela
risque de rendre difficile l’obtention d’une majorité claire à l’Assemblée Nationale (les élections législatives
se tiennent les 11 et 18 juin), majorité prête à supporter le programme du prochain président de la
République.
0
10
20
30
40
50
2014 2015 2016 2017
%Allemagne : intentions de vote
aux prochaines législatives
CDU/CSU SPD VertsFDP Linke Afd
Sources : Forsa, Crédit Agricole S.A.
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 10
En Italie, nous prévoyons que le gouvernement Gentiloni reste en fonction jusqu’à la fin naturelle du mandat
en février 2018. Le Premier ministre démissionnaire M. Renzi doit se soumettre au débat interne du congrès
du Parti démocrate au mois d’avril et aux élections primaires à l’automne. Ceci diminue la probabilité
d’élections anticipées. Le caractère proportionnel de l’actuelle loi électorale (avec une prime de majorité à la
liste au seuil de 40%) augmente la probabilité d’une coalition à gauche (Parti démocrate, parti issu de la
scission des démocrates et gauche radicale) ou au centre (Parti démocrate, centristes et droite modérée). Les
chances d'une coalition menée par le mouvement antisystème Cinq Etoiles, avec la droite sécessionniste de la
Ligue du Nord et la droite extrême des Fratelli d’Italia, voit le jour sont minces. En effet, bien que le mouvement
ait de plus en plus investi des thèmes traditionnels de droite et drainé son électorat, l’héritage de gauche de la
plateforme politique fondatrice rend cette alliance compliquée et expose le mouvement à une perte
d’adhérents. Néanmoins, la récente remontée dans les intentions de vote du parti, qui le situe en mars devant
le Parti démocrate, est à observer avec attention.
En Espagne, bien que le gouvernement soit historiquement faible, car minoritaire pour la première fois depuis
le retour de la démocratie, la division de l’opposition devrait empêcher sa censure. Le retour des tensions
politiques est néanmoins à prévoir, car il lui faudra concilier engagement européen de réduction du déficit et
l’opposition des partis de gauche et régionalistes. C’est cet équilibre fragile que le gouvernement socialiste
minoritaire a réussi au Portugal, grâce à la bonne tenue de la croissance. Sa probabilité d’aller au bout de son
mandat pourrait considérablement augmenter, à mesure de sa hausse graduelle dans les sondages.
En revanche, en Grèce, en très grande difficulté dans les sondages, la courte majorité Syriza/Anel dispose
d’une très faible marge de manœuvre pour résister à la demande d’austérité des créanciers. Une chute du
gouvernement est possible, ce qui laisserait le champ libre, au regard des sondages actuels, au parti
conservateur et europhile Nouvelle Démocratie. Néanmoins, la baisse marquée de l’opinion publique en faveur
de l’euro et la suppression de la prime de majorité pourraient être facteur d’instabilité politique à plus long
terme.
Dans un contexte de fragmentation politique historique, il faut s’attendre à ce que les idées radicales et
populistes continuent à façonner les programmes politiques et ainsi alimenter la polarisation des
électeurs européens. Cependant, comme l’exemple de Syriza en Grèce l’atteste, l’accession ou le maintien
au pouvoir de partis populistes ne peut se faire qu’au prix d’un repositionnement moins
eurosceptique. De plus, l’émergence des principaux partis populistes en Italie (M5S) ou en Espagne
(Podemos) s’est effectuée sur une plateforme politique transversale, qui atteint ses limites, au moment de
clarifier son positionnement européen. Le risque d’une certaine porosité existe néanmoins : porosité de
certains sujets portés par les partis extrêmes, qui aurait pour conséquence de nationaliser certains débats
européens, de « zombifier » les institutions européennes en ignorant leurs normes et leurs valeurs. Dans le
sillage de la fragmentation politique, la fragmentation géographique, défendue par certains mouvements
sécessionnistes (Ecosse, Catalogne, ...), sera l’un des principaux risques politiques à surveiller.
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 11
Royaume-Uni : plus que jamais, le consommateur est roi
La « résilience » post-référendum s’est prolongée jusque fin 2016.
La croissance s’est de nouveau révélée plus forte qu’attendu au
quatrième trimestre 2016 : à 0,7% sur un trimestre, elle a accéléré par
rapport aux deuxième et troisième trimestres (0,6% dans les deux cas)
pour évoluer à un rythme supérieur au taux de croissance potentiel. La
consommation des ménages est restée son principal moteur. Mais,
grâce à une forte hausse des exportations doublée d’une baisse des
importations, le commerce extérieur a également joué un rôle significatif
contribuant très positivement (1,3 point de pourcentage) à la croissance
du quatrième trimestre. En revanche, parallèlement, l’investissement
des entreprises a baissé (-1% sur un trimestre). Il est difficile de statuer
et de conclure définitivement qu’il s’agit du début d’une tendance
durable, mais les intentions d’investissement s’inscrivent en forte baisse
depuis plusieurs mois. Notre scénario table donc sur une poursuite de
la contraction de l’investissement au cours des prochains trimestres, les
incertitudes liées au Brexit incitant les entreprises, tout comme les
investisseurs étrangers, à revoir à la baisse leurs projets
d’investissement. L’érosion des marges, conséquence des pressions
haussières sur les prix des intrants, constitue un frein supplémentaire.
Le maintien de la croissance mondiale à un niveau relativement élevé,
la résistance de la consommation des ménages et l’amélioration de la
compétitivité des exportations pourraient cependant infléchir ce
diagnostic et soutenir l’investissement de façon plus importante
qu’attendu. Un risque haussier entoure donc nos prévisions.
Le point d’inflexion du cycle dépendra du comportement des
consommateurs. La poursuite de la forte progression de la
consommation des ménages depuis le référendum s’est largement
appuyée sur une croissance à deux chiffres des prêts à la
consommation provoquant une baisse supplémentaire du taux
d’épargne (à 5,6% au troisième trimestre 2016, contre 6,6% un an
auparavant). La croissance des salaires nominaux est restée
décevante, en dépit de la poursuite de la baisse du taux de chômage.
Compte tenu de la légère remontée du taux de chômage attendue dans
les mois qui viennent et de la progression toujours extrêmement faible
de la productivité (0,4% sur un an au troisième trimestre 2016), les
éventuelles pressions haussières sur les salaires devraient rester
limitées. Combinée à l’important rebond anticipé de l’inflation
(dépassant 3% vers la fin de l’année), la croissance des salaires réels
devrait devenir négative dans le courant de l’année. La progression du
revenu disponible réel brut a déjà baissé fortement au cours de l’année
écoulée : elle n’était plus que de 0,1% sur un an au troisième trimestre
2016. Les signes d’un ralentissement de la consommation des
ménages au tournant de l’année sont déjà visibles dans les indicateurs
avancés. La confiance des ménages, grevée par les anticipations de
prix plus élevés, a légèrement baissé depuis ses points hauts et les
ventes au détail (bien qu’elles ne soient pas un indicateur parfait de la
consommation finale des ménages) ont reculé pour le deuxième mois
consécutif en janvier.
Notre scénario central table ainsi sur un ralentissement de la
consommation des ménages au cours des prochains mois, en
raison de l’anticipation d’une baisse du pouvoir d’achat (liée à
l’accélération de l’inflation) et d’une dégradation du marché du travail.
L’ajustement de la consommation des ménages devrait néanmoins être
plus graduel que le ralentissement des revenus réels ne le suggère. La
baisse du taux d’épargne des ménages constitue un amortisseur. La
confiance des ménages continue de résister et les invite à moins
-8
-6
-4
-2
0
2
4
6
8
10
98 00 02 04 06 08 10 12 14 16 18
a/a, %
R-U : rémunérations et dépenses de consommation (termes réels)
Rémunérations réelles (déflatées par ledéflateur des dépenses de conso.)Consommation des ménagesSources :
ONS, CA S.A.
prév.
2
4
6
8
10
12
14
16
18
85 88 91 94 97 00 03 06 09 12 15 18
%
R-U : taux d'épargne des ménages
Récessions Taux d’épargne
Prévisions Sources : ONS, Crédit Agricole S.A.
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 12
épargner, alors que les conditions financières continuent de promouvoir
leur endettement.
Top départ vers l’inconnu
Au bout d’un processus législatif compliqué qui a duré un mois et demi, le projet de loi de Theresa May pour le
déclenchement de l’Article 50 (European Union Notification of Withdrawal Act 2017) a été adopté sans
amendements et a reçu l’assentiment royal le 16 mars. Le projet n’a pas rencontré une opposition franche, les
Travaillistes s’étant pour la plupart alignés derrière les vœux exprimés par leur électorat lors du référendum. La
voie est libre pour la Première ministre britannique afin d’entamer la procédure de sortie, ainsi qu’elle l’avait
souhaité « avant la fin du mois de mars ». Le 29 mars : c’est donc la date d’envoi de la notification de sortie,
date qui marque le début de longues négociations (deux ans pour avoir un accord de sortie et potentiellement
dix ans pour avoir un accord de libre-échange final) et dont l’issue est hautement incertaine, car conditionnée
par les concessions que les vingt-sept sont prêts à consentir à un partenaire qui pour chacun d’entre eux a une
envergure particulière.
La prochaine étape-clé de la procédure de sortie – ainsi que prévu par l’article 50 du Traité de Lisbonne –
consiste en l’adoption des « lignes directrices » des négociations par le Conseil européen le 29 avril prochain.
Ces orientations doivent être adoptées à l’unanimité et représentent une étape décisive du processus, dans la
mesure où elles vont révéler la tonalité adoptée par les vingt-sept. Donald Tusk, président du Conseil
européen, affiche la volonté d’un divorce « le moins pénible possible » pour l’UE, avec comme priorité de créer
« le plus de certitude et de clarté possible pour tous les citoyens, entreprises et États-membres susceptibles
d’être affectés négativement par le Brexit ». Suivront les négociations de l’accord de sortie. Bon nombre de
pays souhaitent une avancée notable sur les termes de la sortie même avant d’aborder toute question relative
aux relations futures entre l’UE et le Royaume-Uni, notamment en matière de commerce. Des progrès sur ce
front nous semblent peu probables avant les élections en Allemagne en septembre prochain. Michel Barnier,
président de la Commission européenne, principal négociateur côté UE, a d’ores et déjà annoncé une date
butoir pour trouver un accord : octobre 2018, soit six mois plus tôt que la sortie formelle, afin de prévoir du
temps pour le processus de ratification. Si le gouvernement britannique se montre optimiste sur sa capacité à
conclure un accord avec l’UE dans un laps de temps si court, les pourparlers risquent d’être tendus,
notamment lorsque sera abordée la question du passeport européen. Le principal risque reste celui d’une
sortie régie par les seules règles de l’OMC, solution par défaut la plus préjudiciable pour le commerce du
Royaume-Uni mais pour les pays européens qui lui sont les plus liés.
-16
-12
-8
-4
0
4
% Impact du Brexit sur le niveau du PIB à long terme
Scénario dégradé Scénario central
Scénario optimisteSources : Crédit Agricole S.A., études citées
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 13
Japon : le marché du travail reste le facteur-clé
La croissance aura finalement décéléré au cours de l’année 2016
(à 1,0%, contre 1,2% en 2015) tout en se maintenant à un niveau
« raisonnable ». Après deux années consécutives de baisse, la
consommation privée a augmenté de 0,4%. L’investissement rési-
dentiel, soutenu par la politique monétaire accommodante de la
Banque du Japon (BoJ), a progressé de 5,6%, après deux années de
baisse également. L’investissement des entreprises s’est modeste-
ment inscrit en hausse (1,5%, contre 1,1% en 2015). Enfin, les
exportations ont accéléré à partir du deuxième semestre pour afficher
une progression de 1,2% sur l’année. La plupart des facteurs ayant
soutenu la croissance en 2016 resteront à l’œuvre cette année. Nous
maintenons par conséquent notre prévision de croissance éco-
nomique à 1,3% pour 2017.
L’évolution de l’économie japonaise sera largement conditionnée
par la consommation privée, facteur-clé de notre scénario. Le
taux de chômage et le ratio emploi/candidat ont en effet,
respectivement, atteint 3,0% et 1,43 en janvier, des niveaux qui
n’avaient plus été observés depuis l’éclatement de la bulle de la fin
des années 90. La croissance de la rémunération globale des
salariés, reflet des conditions du marché du travail, est restée stable
en rythme annuel (2,2% en termes nominaux soit 2,3% en termes
réels). Le niveau élevé d’offres d’emploi par candidat suggère que
l’offre de travail reste soutenue, alors que le taux de chômage est déjà
faible : un tel contexte devrait être encore plus favorable à la hausse
des rémunérations. De fait, le nombre d’emplois salariés non
agricoles a atteint 63,2 millions en janvier : un record historique dans
un pays confronté à une situation démographique structurellement
défavorable. La bonne santé du marché du travail se traduit, en outre,
par une remontée du taux de participation au marché du travail,
facteur décisif à court et moyen terme pour la croissance.
La dynamique et la soutenabilité de la consommation dépendront
de l’évolution du marché du travail à moyen terme : compte tenu
de la persistance des difficultés démographiques, une hausse
régulière de la rémunération moyenne est nécessaire pour soutenir la
consommation. À cet égard, la décision du Parti libéral démocrate
(PLD) de prolonger son mandat de trois années supplémentaires, le
portant à neuf ans (ce qui garantit presque que Shinzo Abe restera
Premier ministre trois ans de plus), devrait avoir un impact positif sur
l’économie dans la mesure où son programme économique se
concentrera sur la réforme du marché du travail. Il s’attachera – entre
autres – à rectifier les écarts de rémunération entre les salariés dits
« réguliers » (les plus stables, en CDI à temps plein) et les salariés
dits « non-réguliers » (en situation plus précaire : CDD, temps partiel,
intérimaires, etc.).
57
58
59
60
61
62
63
64
90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 12 14 16
Millions
Emplois salariés nonagricolesSources : MIAC, CA CIB
Japon : l’emploi atteint des records historiques,malgré une situation démographique défavorable
58
59
60
61
62
63
64
65
80 83 86 89 92 95 98 01 04 07 10 13 16
%
Japon : la participation aumarché du travail s’améliore
Tx de participation aumarché du travail
Sources : MIAC, CA CIB
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 14
Pays émergents – Jusqu’ici tout va bien ?
La croissance de la sphère émergente va accélérer au cours de l’année, notamment parce que les craintes relatives aux déclarations (bruyantes) et menaces protectionnistes ont quelque peu reculé. Nous identifions quatre risques principaux : ceux-ci sont liés à Donald Trump, à la Fed, aux prix des matières premières et à la Chine.
En ce début d’année, nous estimions que la croissance émergente
allait commencer à accélérer en 2017 après trois années moroses,
mais que les inquiétudes politiques ou géopolitiques faisaient peser
une menace sur l’embellie pressentie des perspectives économiques.
Trois mois plus tard, notre scénario d’accélération de la croissance
reste pleinement d’actualité. Quant à nos craintes liées au contexte
politique et géopolitique, elles ont légèrement reculé.
La Russie et le Brésil sortent lentement de récession
Vue sous un angle géographique, l’accélération de la croissance
s’explique par la lente amélioration économique en Russie et, dans
une moindre mesure, au Brésil. La Russie est sortie de récession,
principalement grâce au rebond des cours du pétrole. Après avoir
considérablement baissé en 2014-2015, le prix du Brent a (plus ou
moins) doublé en un an environ. En conséquence, la récession russe
s’est modérée, de -3,8% en 2015 à -0,2% en 2016. La croissance
pourrait atteindre 1,5% en 2017.
L’amélioration a été plus graduelle, donc plus décevante, au Brésil.
Alors que la mise en place d’un nouveau gouvernement semblait
susceptible de soutenir la confiance et de stimuler la croissance, la
dynamique espérée n’a pas été au rendez-vous. Certaines réformes
du gouvernement tendront à mettre les ménages sous pression, ce
qui limite les perspectives de reprise de la consommation privée. Le
Brésil sortirait de récession en 2017 pour afficher un taux de
croissance modeste (0,6%). Il ne se passe rien de réellement exaltant
en Russie ou au Brésil : la croissance reste faible mais, au moins, la
récession est terminée.
Amélioration des exportations et de l’investissement
Au-delà de ces deux pays, la situation globale des pays émergents
s’améliore lentement. La consommation privée restera un des
principaux piliers de la croissance émergente en 2017. Mais
l’accélération de la croissance viendra probablement de l’inves-
tissement. Le renforcement de la demande mondiale devrait encou-
rager l’investissement des entreprises dans la sphère émergente.
L’amélioration de la demande mondiale a commencé à soutenir les
exportations des pays émergents, comme le montre leur progression
au cours des derniers mois.
Nous tablons également sur une baisse des taux d’intérêt réels : alors
que l’inflation accélère dans de nombreux pays émergents sous l’effet
du rebond des cours du pétrole, la plupart des Banques centrales ne
devraient pas suivre immédiatement le durcissement monétaire de la
Fed. En conséquence, les taux directeurs devraient baisser en termes
réels facilitant le financement des projets d’investissement.
Stabilisation de la Chine
Qu’en est-il de la Chine ? La Chine reste un risque, son problème de
dette n’ayant pas été résolu. Il s’agit cependant davantage d’un risque
s’inscrivant dans la durée que d’une menace imminente. Les liens
0%
1%
2%
3%
4%
5%
6%
7%
8%
Inde Chine Russie Brésil
BRICs: prévisions decroissance du PIB
2017 2018Source : Crédit Agricole CIB
0%
1%
2%
3%
4%
5%
6%
7%
Asie Moy.-Or./Afri. Europeémerg.
Am. Latine
Emergents : prévisionsde croissance du PIB
2017 2018Source : Crédit Agricole CIB
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 15
relativement étroits entre le gouvernement et le système bancaire
permettent aux autorités de continuer à soutenir la croissance via le
crédit. Simultanément, la balance des capitaux permet au système
financier de s’appuyer sur une base des dépôts assez importante. De
plus, bien que nous nous attendions à une augmentation des prêts
non-performants dans les prochaines années (en raison des plans de
relance récents), les marges de manœuvre budgétaires assez
importantes dont dispose le gouvernement devraient lui permettre de
soutenir le secteur bancaire, si cela devenait nécessaire. Au final,
notre scénario central table sur une croissance chinoise stable dans
les prochains trimestres.
Craintes de montée du protectionnisme : toujours présentes, mais apparemment en recul
Donald Trump a confirmé son intention de renégocier l’ALENA et
d’abandonner le Partenariat transpacifique4. Cependant, la pression
que le candidat Trump voulait exercer sur la Chine ne s’est pour
l’instant pas matérialisée, ce qui a conduit les marchés à réduire leur
perception des craintes liées au protectionnisme. Donald Trump devra
« faire quelque chose » pour démontrer à ses concitoyens (et
électeurs) qu’il promeut le retour des emplois aux États-Unis. La
volonté d’agir puis l’action pourraient, dans un avenir plus ou moins
lointain, éroder la confiance et limiter le développement du commerce
mondial. Tout en continuant à surveiller la situation de près, nous
sommes cependant moins tranchés qu’il y a trois mois sur les
conséquences négatives et concrètes que la politique de Donald
Trump pourrait avoir sur les pays émergents.
Les trois autres risques principaux
En dehors des incertitudes liées à la politique de Donald Trump, qui
constituent clairement le principal risque pour l’univers émergent, trois
autres risques pèsent sur notre scénario d’accélération graduelle de la
croissance.
1 - La vulnérabilité au durcissement monétaire de la Fed. Cer-
tains pays sont plus vulnérables parce qu’au cours des dernières
années, ils ont financé leur déficit courant avec des inves-
tissements en portefeuille et de la dette à court terme. C’est le
cas notamment de la Turquie, de la Malaisie, de l’Afrique du Sud
et de l’Indonésie. De nombreux pays émergents ont cependant
réduit leur déficit courant au cours des deux dernières années, ce
qui les a rendus moins vulnérables. Les marchés tablent, par
ailleurs, sur une hausse graduelle des taux et les prix intègrent
largement ce scénario. À moins que la Fed ne devienne
beaucoup plus agressive qu’attendu, la plupart des pays
émergents devraient être capables d’endurer le resserrement
monétaire sans grande difficulté.
2 - Les incertitudes sur les prix des matières premières.
L’important rebond des cours des matières premières depuis le
début de l’année dernière a donné un grand bol d’air aux pays
exportateurs et contribué à l’amélioration des perspectives pour
l’ensemble des pays émergents. Notre scénario de reprise en
2017 repose sur l’hypothèse d’une bonne tenue des cours des
matières premières. Que se passerait-il si cette hypothèse n’était
pas vérifiée ? Si les cours du pétrole chutaient (en réaction à une
hausse de la production américaine d’hydrocarbures par
4 Trans-Pacific Partnership ou TPP en anglais
-1%
0%
1%
2%
3%
4%
5%
6%
7%
KRW PLN ZAR TRY MXN CNY INR RUB BRL
Emergents : taux d'intérêt réels (3 mois)
Sources : Bloomberg, Crédit Agricole CIB
4
6
8
10
12
14
16
1992 1996 2000 2004 2008 2012 2016
a/a, %
Chine : évolution du PIB
Source : National Bureau of Statistics
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 16
exemple), la croissance, la balance des paiements et les devises
des pays émergents seraient impactées.
3 - La Chine et plus particulièrement son secteur financier et
son marché immobilier. D’une part, les autorités de
régulations chinoises durcissent les règles applicables aux
gérants d’actifs, ce qui pourrait conduire à une baisse du ratio
d’endettement dans les circuits de financement parallèles
(shadow banking). Cela pourrait donc peser sur la dispo-
nibilité du crédit dans l’économie et pénaliser les petites
banques. D’autre part, les prix de l’immobilier, dopés par le
développement du crédit bancaire, ont progressé à un rythme
élevé au cours des derniers trimestres. Une remontée des
taux d’intérêt, qui pourrait être liée à la politique de la Banque
centrale ou être provoquée par des tensions financières,
pourrait se traduire par une baisse des prix. Cela impacterait
alors la consommation privée (via un effet de richesse
négatif), le budget, le secteur de l’immobilier et le secteur
financier. Un risque de plus à surveiller pendant le reste de
l’année 2017.
Géopolitique – Que sait-on du monde de Donald Trump ?
L’arrivée de Donald Trump est un moment de bascule pour la géopolitique mondiale. Mais il serait simpliste de
croire à un « simple » renversement des alliances. Pour l’instant, tout ce que l’on sait, c’est que des
changements profonds sont en cours et que la situation est instable. C’est peu mais beaucoup : de multiples
scénarios sont possibles mais surtout, à ce stade, leur probabilité d’occurrence respective est égale.
Quels que soient ses déclarations contradictoires, le président américain a déjà déconstruit, avec une rapidité
sidérante, l’un des piliers de l’après-guerre, le multilatéralisme. Cette volonté de rompre avec le système a été
actée avec le retrait de l’accord de partenariat transpacifique et la volonté de renégocier les termes de l’accord
de libre-échange américain (ALENA). Clairement, D. Trump privilégie les négociations bilatérales.
Mais cette volonté de rupture suscite des réactions. Des anticorps en somme ! Ainsi, réveille-t-elle l’activisme
politique allemand. Les voyages du ministre des Affaires étrangères en Russie ou d’A. Merkel aux États-Unis
indiquent que Berlin veut garder la main sur le dossier ukrainien, sans doute en échange d’un investissement
dans l’Otan. En Asie, l’effet « anticorps » est plus dangereux. Bien que D. Trump ait reconnu le principe d’une
Chine Unique, cela n’a pas empêché un déploiement militaire américain en Corée du Sud déclenchant, en
retour, une mini-crise dans la région et, en réponse, l’augmentation des dépenses militaires chinoises. En
Amérique latine, les difficultés mexicaines au lendemain de l’élection de D. Trump ont réveillé la solidarité de
ses voisins. En réaction, les chefs d’États latino-américains ont exprimé leur volonté de renforcer la
coopération économique régionale, mais également avec d’autres puissances économiques, notamment celles
du projet avorté du « Partenariat Trans-Pacifique » (TPP). Néanmoins, pour l’instant, chacun s’inquiète de ses
propres débouchés commerciaux avec les États-Unis, car la région reste très dépendante de l’exportation de
ses matières premières.
Les Russes n’aiment pas attendre… Enfin, le nouvel échiquier géopolitique ne sera pas stable tant qu’une
orientation n’aura pas été donnée aux relations avec la Russie. À Moscou, on attend un « deal » sur l’Ukraine.
Et surtout, ce que V. Poutine veut, c’est un nouveau Yalta, qui définirait les frontières d’influence de l’Otan et
de la Russie.
Mais du côté américain, rien n’est clair. Un rapprochement avec la Russie mal perçu par l’opinion américaine
est un risque réel pour D. Trump, cerné par des « affaires russes ». Par ailleurs, le premier échange
téléphonique avec Vladimir Poutine n’a pas été celui que les Russes attendaient, car l’ouverture de Moscou
pour relancer la non-prolifération nucléaire a tourné court. D. Trump, qui n’avait pas l’air de bien connaître les
traités de réduction des armes stratégiques (Start) de 2010, aurait déclaré que ces derniers n’étaient pas à
l’avantage des États-Unis. Enfin, l’augmentation des dépenses militaires américaines n’est pas le signal que
les Russes voulaient. Cette situation d’attente est dangereuse. N’oublions pas que V. Poutine a pour stratégie
géopolitique de ne jamais perdre la main.
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 17
Pétrole – Vers une nouvelle confrontation entre l’OPEP et les États-Unis
Si la réduction de la production de l’OPEP a redonné espoir à un secteur malmené depuis deux ans, des signaux suggèrent un nouvel affrontement entre l’OPEP et les producteurs américains. Le prix du pétrole a augmenté, mais la production américaine pourrait bien à nouveau croître avec la reprise des investissements aux États-Unis. Les efforts de l’OPEP et notamment de l’Arabie saoudite ont bien favorisé une réduction des stocks, mais sans doute pas autant qu’espéré. L’Arabie saoudite pourrait donc être tentée de ne pas reconduire l’accord. En excluant toute nouvelle sanction contre l’Iran et une dégradation majeure de la situation en Libye, la vraisemblable augmentation de l’offre sur le second semestre 2017 devrait être absorbée par une croissance de la demande. Un marché pétrolier relativement bien approvisionné et des stocks qui restent élevés, devraient confiner le prix du baril entre 50 et 60 dollars en 2017.
Le début de l’année 2017 relance un regain d’optimisme parmi les
professionnels du secteur pétrolier. Depuis décembre dernier, le prix
du Brent a augmenté et se maintient jusqu’à présent dans une
fourchette comprise entre 50 et 60 dollars par baril. Sur les deux
premiers mois de 2017, l’OPEP a respecté ses engagements de
réduction de production. De nombreux producteurs annoncent une
augmentation de leurs investissements sur 2017. À fin janvier 2017, les
stocks pétroliers des pays membres de l’OCDE sont légèrement
inférieurs aux stocks douze mois auparavant.
Toutefois, la menace d’une nouvelle confrontation entre pro-
ducteurs américains et OPEP (Arabie saoudite en particulier) se
profile. Les activités de forage continuent à augmenter dans les
grandes zones de prospection aux États-Unis. La production de pétrole
américaine se stabilise. Certains grands producteurs internationaux
vont centrer leurs investissements sur les pétroles de schiste
américains et projettent une augmentation de leur production
américaine en 2017. La taxation des importations de pétrole, telle que
suggérée par le projet de réforme fiscale, pourrait bien accentuer la
confrontation entre les deux importants blocs producteurs de pétrole. Si
cette réforme conçue pour renforcer la compétitivité des producteurs
américains est susceptible de renforcer la cohésion entre pays
membres de l’OPEP, l’imposition de nouvelles éventuelles sanctions à
l’Iran peut en revanche être bien accueillie (du moins officieusement)
par les autres producteurs.
Notre scénario se base sur le prolongement de la tendance
actuelle. Nous tablons sur une croissance de la demande mondiale de
pétrole de 1,4 million de barils par jour. Les quotas de l’OPEP resteront
globalement bien respectés grâce à l’Arabie saoudite, avec toutefois
une légère dégradation à mesure que l’on se rapproche du 30 juin.
Nous supposons en revanche que l’accord ne sera pas étendu au-delà
du premier semestre 2017. L’administration américaine ne parviendra
pas à mettre en œuvre sa réforme fiscale à brève échéance. La relance
des investissements des producteurs aux États-Unis devrait juste
permettre une faible croissance de la production américaine sur la
seconde moitié de 2017. Les premières annonces des producteurs
laissent supposer que les investissements en 2017 resteront bien
inférieurs aux records historiques de 2013 et 2014. Malgré des gains de
productivité, les États-Unis ne devraient toutefois pas connaître la
frénésie et le raz-de-marée de pétrole des années 2012-2014. Harold
Hamm, magnat pétrolier ayant fait fortune en exploitant le pétrole de
schiste dans le Dakota du Nord et supporter de Donald Trump, a
récemment mis en garde le secteur contre une nouvelle escalade des
0
2
4
6
8
10
12
14Mb/j
Etats-Unis : production de pétrole
Pétroles de schiste Autres pétroles bruts
Offshore Autres liquidesSource : EIA
20
40
60
80
100
120
USD/bbl
Scénario Brent
Historique
Futures
Eco - mars 2017
Eco - déc. 2016
DJ consensus - mars 2017
Sources : ICIIS, ICE, DJ International, Crédit Agricole S.A.
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 18
investissements aux États-Unis. Selon Harold Hamm, toute croissance
de la production américaine non-contrôlée nuirait gravement à
l’ensemble du secteur qui aurait alors du mal à s’en relever. Enfin, bien
que la situation semble s’améliorer en Libye et au Nigéria,
l’environnement politique intérieur n’est pas suffisamment stable pour
considérer une reprise des productions libyenne et nigériane à pleine
capacité. Notre scénario est basé sur une production libyenne et
nigériane en 2017 de 0,65 et 1,65 million de barils par jour
respectivement.
Notre scénario suppose donc un marché légèrement déficitaire en
2017 permettant une baisse modérée des stocks sur l’exercice. Grâce à
cet équilibre certes fragile, les prix du pétrole devraient continuer à
évoluer entre 50 et 60 dollars par baril sur 2017.
Confusions en Libye et au Nigéria
Les terminaux d’exportation de brut de Ras Lanuf et d’Es Sider (d’une capacité globale de 600 000 barils par
jour) font depuis début mars l’objet de convoitises entre les différentes factions armées libyennes. En dix jours,
les deux terminaux situés dans le croissant pétrolier ont changé de mains à plusieurs reprises. Repris en
septembre par les forces du général Khalifa Haftar ces deux terminaux stratégiques ont contribué à la reprise
de la production libyenne. La Libyan National Army du géneral Haftar assure aussi le contrôle des terminaux
pétroliers de Brega, Zueltima et Harriga (Tobrouk). En six mois, la production libyenne est passée de
300 000 barils par jour en août dernier à près de 700 000 barils par jour sur les deux premiers mois de 2017.
Mais, début mars, les deux terminaux ont été repris par les Benghasi Defence Brigades. Les terminaux ont
ensuite été remis aux Petroleum Facilities Guards, milice proche du gouvernement reconnue par la
communauté internationale et siégeant à Tripoli. Le 14 mars, avec (selon certaines sources) l’appui de troupes
russes, les forces du général Haftar auraient repris le contrôle des deux ports. Depuis le début des hostilités, la
production de pétrole libyenne aurait diminué d’un peu moins de 100 000 barils par jour. Il est toutefois difficile
d’estimer précisément les dommages occasionnés par les combats sur les infrastructures et l’impact à moyen
terme sur les capacités exportatrices libyennes.
Au Nigéria, les négociations entre gouvernement fédéral et milices du delta semblent progresser. Aujourd’hui,
seul le terminal de Forcados ne serait pas encore opérationnel. D’une capacité d’environ 220 000 barils par
jour, le terminal pourrait être mis en service pendant le deuxième trimestre. Cela permettrait alors à la
production de pétrole du Nigéria d’atteindre 1,9 million de barils par jour.
L’évolution de la situation intérieure en Libye et au
Nigéria peut rapidement impacter les cours du
pétrole. Si les situations se stabilisent, la production
cumulée de ces deux membres de l’OPEP peut très
vite augmenter de 200 000 à 400 000 barils par
jour. A contrario, une reprise des actes de sabotage
au Nigéria ou la reprise de combats fratricides en
Libye pourrait nettement réduire les productions.
Une chose est sûre : toute reprise significative de la
production pétrolière dans ces deux pays atténuera
l’impact des réductions de productions supportées
par les autres pays membres de l’OPEP, qui
demanderont alors probablement l’application de
plafonds aux deux pays. Les situations intérieures
politiques de la Libye et du Nigéria seront à
surveiller avec, notamment, une influence grandis-
sante russe au Moyen-Orient.
0,0
0,5
1,0
1,5
2,0
2,5
Mb/j
Production de pétrole brut
Libye NigériaSource : EIA
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 19
Politique monétaire – Les resserrements ? À pas comptés, voire à reculons
Les États-Unis ont ouvert le bal : la mise en œuvre de politiques monétaires moins généreuses est dans l’air du temps. Le resserrement monétaire est cependant un exercice autrement plus périlleux que l’assouplissement. Les risques ne sont pas symétriques. Même si le cycle le justifie, priver une économie et, surtout, des marchés financiers d’un ingrédient essentiel à leur succès ne peut se faire que très – vraiment très – graduellement.
Réserve fédérale : maintien des anticipations de hausse graduelle des taux
La hausse, largement attendue, des taux directeurs par le FOMC au
mois de mars a porté la fourchette du taux des Fed funds à 0,75%-
1%. La projection médiane (inchangée par rapport à celle de
décembre dernier) du taux des Fed funds de la Fed s’établit à 1,40%
à fin 2017, puis à 2,10% à fin 2018. Cela suppose deux hausses
supplémentaires de 25 points de base cette année, puis trois hausses
supplémentaires l’année prochaine. Le taux projeté à long terme
demeure à 3%. Les prévisions économiques du comité sont égale-
ment pratiquement inchangées, avec une croissance attendue à 2,1%
cette année.
La Fed devrait attendre le mois de septembre avant de relever
ses taux une deuxième fois cette année. Les perspectives
économiques justifient une normalisation monétaire plus rapide qu’au
cours des deux dernières années, mais notre scénario table sur un
« report » des hausses dans le temps : deux hausses interviendraient
en 2017, suivies de quatre en 2018. Les conditions vont se dégrader
sur les marchés financiers au cours des prochains mois, dégradation
motivée par la déception sur le calendrier et l’ampleur de la relance
budgétaire de Washington (reflation trade), ainsi que par une
résurgence des inquiétudes liées au commerce international. Un tel
contexte suggère que la Fed mènera la normalisation monétaire avec
prudence.
Banque centrale européenne : vers une inflexion de la politique monétaire
La BCE va graduellement entrer dans une phase de réduction de
son soutien monétaire à la zone euro. Depuis juillet 2011, chaque
décision de politique monétaire a favorisé davantage d’assouplis-
sement : baisses de taux, VLTROs, TLTROs, programmes d’achat de
titres privés, programme d’achat de titres publics, extension et
expansion de ces programmes.
Désormais, la BCE va graduellement – très graduellement – retirer ce
soutien. La première étape sera la suppression de la référence à la
possibilité de taux plus bas. Puis, la BCE va probablement indiquer
une fin du Quantitative Easing (QE), avant de s’engager sur un
tapering5 (au premier trimestre 2018), puis de commencer à remonter
ses taux (probablement pas avant mi-2019). Des débats sont en
cours sur la séquence de ce resserrement monétaire (une remontée
des taux avant la fin du tapering). La logique économique (apla-
tissement de la courbe, remontée de la devise), ainsi que la com-
munication de la BCE nous incite à penser que la remontée des taux
sera plus tardive que ce que ne pense le marché.
5 Réduction progressive des achats de titres
0
1
2
3
4
2016 2017 2018 2019 2020
%
Fed : rythme duresserrement monétaire
Longer Longer
Long terme
Source : FOMC mars 2017- projections économiques
FOMC de mars, projection médiane
Projection desmarchés (OIS)
2017 2018 2019 Lo ng terme
M édiane 1,375% 2,125% 2,875% 3,0%
OIS 1,300% 1,686% 1,868%
Chaque losange indique la valeur, arrondie au 8e de point de base le plus
proche, du taux des Fed funds (ou du centre de l’ intervalle) jugé approprié par
un membre du FOM C, à la fin de l’année calendaire spécifiée ou à long terme.
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 20
L’enjeu pour la BCE au cours du prochain trimestre sera de
parvenir à communiquer sur cet infléchissement de sa politique
monétaire : le passé a montré que le retrait des mesures de soutien
monétaire pouvait entraîner des sur-réactions.
Banque d’Angleterre : une hausse des taux à court terme nous semblerait prématurée
Les premiers éléments hawkish, déjà perceptibles lors de la réunion de
politique monétaire du mois de novembre, se sont matérialisés lors de
la réunion du mois de mars avec le vote de Kristin Forbes en faveur
d’une hausse du taux directeur de 25 points de base et des minutes
indiquant que « certains membres ont noté qu'il ne leur faudrait
qu’assez peu de nouvelles positives en termes de perspectives
d'activité ou d'inflation pour les amener à penser qu’une réduction plus
rapide de la politique de soutien monétaire pourrait être appropriée ».
La croissance a continué de surprendre positivement et les signes de
ralentissement imminent, bien qu’ils existent, sont restés assez limités.
La Banque d’Angleterre (BoE) a révisé sa prévision de croissance pour
le premier trimestre 2017 à 0,6% sur un trimestre, à la faveur
notamment de meilleures perspectives pour l’économie mondiale. Le
marché du travail est proche du plein emploi (le taux de chômage, à
4,7%, est à peine plus élevé que la nouvelle estimation du taux de
chômage naturel de la BoE de 4,5%). Avec l’anticipation d’une inflation
supérieure à la cible de la BoE de 2% pour une période de temps assez
longue (trois ans), la BoE se montre peu tolérante à des surprises
positives, notamment émanant de la consommation des ménages, de
la croissance des salaires et/ou des anticipations d’inflation.
Néanmoins, s’il n’est pas exclu que des voix hawkish supplémentaires
s’élèvent dans les prochains mois au sein du Comité de politique
monétaire, toute hausse de taux par la BoE serait prématurée tant
que les « circonstances exceptionnelles » (les incertitudes liées au
Brexit) continuent de faire peser un risque sur les perspectives de
croissance.
-0,6
-0,3
0,0
0,3
0,6
0,9
1,2
1,5
1,8
janv.-14 déc.-14 nov.-15 oct.-16 sept.-17 août-18 juil.-19 juin-20 mai-21 avr.-22
%
BCE : séquence de resserrement de la politique monétaire
Inflation a/a Inflation sous-jacente a/a Taux de dépôt Taux refi
ABSPP CBPP3
TLTRO I PSPP
PSPP
+
CSPP QE+ TLTRO II
Ralentissement QE, prolongation
Evocation du tapering
Tapering Fin du PSPP
Arrêt complet des
programmes
1ère hausse des taux
Taux de dépôt > 0%
Sources : BCE, Eurostat, CA CIB
-6
-4
-2
0
2
4
6
8
10
01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
a/a, %
Royaume-Uni : croissance descoûts unitaires du travail
Coûts unitaires du travail
Productivité (prod./heure), signe inv.
Coût horaire du travail
Moy. depuis 2001-2007 Sources : ONS, CA S.A.
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 21
Banque du Japon : prudence avant tout virage hawkish
La Banque du Japon (BoJ) ne devrait pas modifier sa politique,
bien que l’amélioration des perspectives d’inflation à court terme
soit de nature à la rassurer. L’inflation hors produits frais (la mesure
de l’inflation sous-jacente au Japon) a en effet atteint +0,1% sur un an
en janvier, sa première valeur positive depuis février 2016. Compte
tenu de la stabilisation des prix du pétrole depuis novembre dernier,
de leur niveau très bas à la même période l’an dernier et de leur
impact retardé sur les prix, l’inflation sous-jacente devrait continuer à
augmenter dans les prochains mois et atteindre 1% dans le courant
du troisième trimestre. Cependant, malgré cette amélioration à court
terme de l’inflation sous-jacente, on est encore loin d’une inflation
« pérenne » et tirée par la demande. La progression des salaires
tarde, en effet, à suivre le resserrement du marché du travail, un
phénomène qui suggère une forte réticence des entreprises à
augmenter les rémunérations. Aussi, à moins que la BoJ n’observe
des signes clairs de pressions inflationnistes tirées par la demande
(telle une hausse régulière de l’inflation sous-jacente), elle n’enverra
pas de messages suggérant un durcissement de sa politique
monétaire.
1,5
2,0
2,5
3,0
3,5
4,0
4,5
5,0
5,5
6,0-3
-2
-1
0
1
2
3
4
5
6
91 93 95 97 99 01 03 05 07 09 11 13 15 17
%a/a, %
Salaire de base
Tx de chômage (dr. inv.)
Sources : MHLW, MIAC, CA CIB
La BoJ devrait attendre des signes concrets depressions inflationnistes tirées par la demande
-0,6
-0,4
-0,2
0,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
1,2
janv.-16 mai-16 sept.-16 janv.-17 mai-17 sept.-17
Inflation hors produits frais
Prévisions
Sources : MIAC, CA CIB
La BoJ devrait être rassurée parl’amélioration à court terme de l’inflation
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 22
Taux d’intérêt – En hausse, mais pas de sell-off 6 massif
Les Banques centrales sont vigilantes, retirent ou envisagent de retirer à dose homéopathique leur soutien monétaire. Alors que les risques économiques et politiques s’accumulent, elles ne peuvent prendre le risque de voir remonter les taux longs. Ceux-ci s’inscrivent sur une pente ascendante : une pente douce.
Etats-Unis : une seule certitude, la hausse des incertitudes
Les taux américains ont augmenté : le dix ans s’affiche désormais à
près de 2,60% et la partie courte de la courbe anticipe 2,6 hausses
des taux de la Fed en 2017. Au regard des prix de marché, les
opérateurs sont assez optimistes sur le fait que les mesures de la
nouvelle administration conduiront à une accélération durable de la
croissance et de l’inflation, accélération suscitant des taux d’intérêt
plus élevés.
Le degré d’incertitude qui entoure les perspectives de taux est
cependant plus élevé que lors des trimestres précédents. L’ampleur
et la portée de l’expansion budgétaire sont incertaines et des
déceptions sont possibles sur le plan de la politique monétaire. Les
actifs risqués semblent de plus en plus surévalués au regard de la
plupart des mesures de valorisation et sont vulnérables à une
remontée des taux. Les risques politiques restent pleinement
d’actualité en Europe avec le déclenchement du Brexit, les élections
françaises, puis les élections italiennes au premier trimestre 2018.
Dans ce contexte, si les taux à dix ans peuvent s’inscrire en légère
hausse par rapport à leurs niveaux actuels, le degré élevé
d’incertitude rend un sell-off prolongé peu probable.
Quelle est la juste valeur du dix ans américain ? Un modèle très
simple de valorisation des obligations via une prime de risque fournit
des repères. Les taux à dix ans peuvent être exprimés en fonction de
la croissance et de l’inflation anticipées complétées par une prime de
risque. La prime de risque des Treasuries est ainsi égale à l’écart
[taux d’intérêt à dix ans - croissance anticipée - inflation anticipée].
La prime de risque des obligations est habituellement négative aux
États-Unis : ce phénomène s’explique par la présence de nombreux
acteurs captifs et insensibles aux prix. Les fonds de pension, les
compagnies d’assurance, les Banques centrales et les fonds
souverains sont en effet contraints d’acheter des obligations du Trésor
américain. Avant 2009, la prime de risque moyenne était de l’ordre
de -1,25%. Après 2009, avec les politiques monétaires accom-
modantes et la hausse des facteurs de risque, la prime de risque
moyenne est passée à -2%. Aujourd’hui, nous nous situons entre ces
deux régimes : ni dans la période de taux de crise post-2009, ni dans
celle d’explosion du crédit d’avant 2009.
Les prévisions à long terme pour la croissance américaine sont de
l’ordre de 2% à 2,5%, tandis que l’on peut s’attendre à une inflation à
long terme comprise entre 1,5% et 2%. En tablant sur une prime de
risque comprise entre -1,25% et -2%, la valeur « d’équilibre » des
taux américains à dix ans est comprise entre 2,00% et 2,75%.
6 Mouvement de vente massif, provoquant une remontée violente des taux de
rendement des obligations
-3,0
-2,5
-2,0
-1,5
-1,0
-0,5
0,0
2001 2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015
Les deux régimes de la primede risque obligataire
Prime de risque des obligations américainesMoy. pré-criseMoy. post-crise Sources : Bloomberg, Fed
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 23
À court terme (horizon de deux à trois mois), l’incertitude sur le plan
budgétaire qui sera finalement annoncé, les risques politiques en
Europe et la vulnérabilité des actifs risqués nous conduisent à adopter
un biais baissier sur les taux. Cependant, à moyen terme (horizon
d’un à deux ans), une hausse des taux américains, à 2,7% fin 2017 et
3% fin 2018, est inscrite dans notre scénario
En termes plus techniques, les positions de pentification de la courbe
des taux (segment cinq ans-trente ans) sont attractives. Le récent
mouvement de remontée des taux, emmené par les taux à cinq ans,
semble excessif. Nous attendons à court terme à un mouvement de
baisse avec un aplatissement de la courbe. Si les mesures de la
nouvelle administration américaine conduisaient en outre effective-
ment à une hausse durable de la croissance et de l’inflation, cela
devrait se traduire par une hausse des taux sur la partie longue de la
courbe et une pentification du segment cinq ans-trente ans.
Europe : un scénario en deux temps
En 2017, deux facteurs devraient dicter l’évolution les taux
européens :
Les risques politiques (en particulier en France et en Italie) ;
Le tapering de la BCE au premier trimestre 2018 (avec une
annonce probable au quatrième trimestre 2017).
Les risques politiques, tout d’abord. Notre scénario table sur
l’absence d’émergence de risques systémiques. En France, la
candidate de l’extrême-droite, Marine Le Pen, devrait atteindre le
deuxième tour, mais les sondages la donnent ensuite systéma-
tiquement perdante. En Italie, les derniers développements politiques
ont rendu des élections anticipées moins probables. Le parti
contestataire M5S (« Mouvement 5 étoiles ») a certes gagné du
terrain au cours des dernières années, mais ne sera probablement
pas en mesure de former le prochain gouvernement.
Les investisseurs devraient cependant être assez nerveux à
l’approche de ces échéances, ce qui conduit à adopter un biais
baissier sur les taux core à court terme (sur un horizon de deux mois),
ainsi qu’une pression haussière sur les spreads français et
périphériques. Cependant, selon notre scénario de non-maté-
rialisation de risques systémiques, la suite de l’année serait carac-
térisée par une remontée des taux core et un resserrement des
spreads France-Allemagne.
L’évolution des taux longs et les modalités de sortie du QE, par
ailleurs. L’annonce par la BCE du début de la réduction de ses
achats d’actifs (tapering) vers le quatrième trimestre de cette année
pourrait avoir un impact important sur les marchés core et
périphériques. Nos anticipations en termes de tapering ne s’appuient
pas sur l’évolution attendue de la croissance et de l’inflation, mais sur
des facteurs plus techniques de disponibilité des obligations. La BCE
pourrait encore modifier les règles qui régissent sa politique de QE
afin d’élargir la base des titres qu’elle est susceptible d’acheter, mais
la principale question est de savoir s’il y a assez d’investisseurs
prêts à vendre leurs obligations à la BCE.
Une majorité des emprunts d’État de la zone euro est détenue par des
investisseurs institutionnels (parmi lesquels des banques, des
Banques centrales, des fonds de pension, des compagnies d’as-
surance). Ces investisseurs détiennent ces obligations pour des
-10
-8
-6
-4
-2
0
2
4-100
0
100
200
300
400
1990 1994 1997 2000 2004 2007 2010 2014
% PIBpdb
L’expansion budgétaire est associée à la pentification de la courbe
Pente 5 ans 30 ans
Déficit budgétaire US (dr.)Source : Bloomberg
20
30
40
50
60
70
80
mars-16 juin-16 sept.-16 déc.-16 mars-17
pdb
Spread 10 ans France-AllemagneSource : Bloomberg
Le spread France-Allemagne devrait baisserune fois les risques politiques passés
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 24
motifs spécifiques qui peuvent relever de contraintes règlementaires,
d’une gestion de devises ou de gestion actif-passif, par exemple. Ils
sont a priori peu susceptibles de vouloir céder leurs obligations à la
BCE. Nous estimons à environ 1 650 milliards d’euros le montant des
titres disponibles que la BCE pourrait acheter sur le marché, ce qui
implique que celle-ci aura du mal à poursuivre le QE sous sa forme
actuelle au-delà du premier trimestre 2018.
Une annonce de tapering aura un effet haussier sur les taux core,
induisant des ventes de Bunds et une pentification de la courbe des
taux. Une telle annonce se traduira certainement également par un
écartement des spreads périphériques et semi-core. Toutefois, si les
spreads s’élargissaient de manière importante, la BCE pourrait
promouvoir un assouplissement du crédit, afin de soutenir le
marché périphérique. La BCE dispose encore d’un certain nombre
d’outils pour favoriser la transmission de sa politique monétaire,
notamment :
Rétablir les TLTROs avec des conditions plus accommodantes ;
Viser plus directement le bilan des banques ;
Cibler les actifs non core des banques européennes ;
Lancer des opérations d’achats visant les titres périphériques.
Aussi, un élargissement des spreads périphériques après l’annonce
du tapering est-il inscrit dans notre scénario. Ce dernier ne retient pas
de risque systémique et table sur une stabilisation des spreads après
une hausse initiale.
Les prix de marché récents suggèrent que la probabilité d’une hausse
des taux de la BCE d’ici mi-2018 est de plus de 50%. Le QE de la
BCE ne sera probablement pas terminé mi-2018 et il semble très peu
probable que la BCE se lance dans un cycle de hausses des taux
avant la fin du QE. L’accélération récente de l’inflation s’explique
largement par des effets de base et par les prix de l’énergie. L’inflation
sous-jacente reste faible. La BCE pourrait être amenée à réviser ses
prévisions d’inflation sous-jacente à moyen terme à la baisse, ce qui
affaiblirait un peu plus les arguments en faveur d’un relèvement des
taux directeurs. Les taux devraient baisser à court terme sur la partie
courte de la courbe euro, une évolution qui serait favorable aux
positions longues en obligations allemandes sur le secteur quatre
ans-six ans et aux swaps du secteur trois ans.
6
7
8
9
10
11
12
130,4
0,6
0,8
1,0
1,2
1,4
1,6
1,8
2,0
2004 2008 2012 2016 2020
%
a/a, %
Inflation sous-jacente ZE
Tx chômage retardé de 9 m. (dr.)
Prévisions
Sources : Bloomberg,ECB
Les prévisions d’inflation de la BCEpourraient être un peu trop optimistes
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 25
Taux de change – De la politique monétaire à la politique tout court
La divergence entre les politiques monétaires, notamment celle menée par la Fed et la BCE, n’est qu’un ingrédient de l’appréciation déjà forte du dollar. Cette dernière s’est largement nourrie du discours revigorant de D. Trump et de la défiance inspirée par l’euro à l’approche d’échéances électorales décisives. La capacité de la nouvelle administration à respecter ses engagements sera décisive. Rien n’est acquis. Et en l’absence de choc politique en Europe, l’euro peut reconquérir lentement un peu du terrain.
G10 : le côté obscur des Trumponomics
L’examen des facteurs qui ont influencé les devises du G10 ces
derniers mois suggère que les thèmes dominants ne devraient
guère changer au cours des trois mois à venir. Les risques
politiques en zone euro, en particulier, devraient persister avant les
deux tours de l’élection présidentielle française en avril et mai, puis
les élections législatives en juin. Les divergences de politique
monétaire entre une Fed hawkish et les autres Banques centrales du
G10 devraient s’accentuer. La crainte de mesures protectionnistes
aux États-Unis pourrait devenir décisive pour les marchés, avant la
publication mi-avril par le Trésor américain de son rapport sur les
politiques de change7. Enfin, les mesures de relance budgétaire et de
dérèglementation susceptibles mises en œuvre par l’administration
américaine pourraient être éclaircies et influer sur les taux longs.
La solidité des fondamentaux américains, la réforme fiscale et les
mesures de dérèglementation attendues de la part de la nouvelle
administration américaine devraient permettre à la Fed de
poursuivre sa normalisation monétaire et continuer de soutenir le
dollar contre les autres devises. Pour quantifier cette appréciation,
nous utilisons un modèle reliant les variations du taux d’intérêt
américain à deux ans et la performance du taux de change nominal
effectif du dollar8. La régression suggère qu’une hausse de 100 points
de base du taux à deux ans s’accompagne d’une appréciation de 8%
du dollar. Les attentes du marché à fin 2018 divergent actuellement
du dot plot de la Fed d’environ 35 points de base : une convergence
des anticipations du marché vers celles de la Fed se traduirait a priori
par une appréciation du dollar de 2,5% à 3,0%.
Alors qu’il n’a pas joué un rôle significatif au premier trimestre
2017, le thème du protectionnisme va progressivement s’im-
poser. La publication par le Trésor américain de son rapport sur les
politiques de change à la mi-avril va en effet attirer l’attention des
marchés sur les mesures de restrictions tarifaires et non-tarifaires,
que l’administration Trump veut imposer à ses principaux partenaires
commerciaux. Cela pourrait suffire à éroder le soutien dont les
devises à rendement élevé, les devises à risque et les « devises
matières premières » ont bénéficié depuis le début de l’année. Dans
ce contexte, les deux devises des antipodes (dollar australien et dollar
néo-zélandais) seraient les plus affectées par toute nouvelle
appréciation du billet vert. Dans le même temps, les « devises
pétrole » du G10 (couronne norvégienne et dollar canadien)
pourraient se montrer plus résilientes, en particulier si le rééquilibrage
7 « Semiannual Report on International Economic and Exchange Rate Policies »
8 Taux de change pondéré selon le poids des partenaires commerciaux des États-
Unis (Trade Weighted Index)
84
88
92
96
100
104
108
4%
6%
8%
10%
12%
mars-14 mars-15 mars-16 mars-17
Taux de change effectif du dollar et écart des taux à 2 ans Etats-Unis-G9
Sensibilité USD à hausse de 100 pdb de l’écart des tx 2a US-G9Tx de change effectif du dollar(dr.)
Sources : Bloomberg, CA CIB
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 26
du marché du pétrole commence à prendre forme au deuxième
trimestre.
Les risques politiques en zone euro devraient continuer de jouer
un rôle important dans l’évolution des devises du G10 au
deuxième trimestre. Les investisseurs vont évidemment se focaliser
sur le résultat des deux tours de l’élection présidentielle française
(avril et mai), puis sur celui des élections législatives (juin). Les
élections régionales allemandes en mai devraient également retenir
l’attention. La récente défaite du parti contestataire PVV aux Pays-
Bas peut être considérée comme un signe encourageant avant les
élections régionales allemandes et, surtout, avant les élections
générales de septembre. Nous restons cependant prudents à
l’approche l’élection présidentielle française. Le souvenir de sondages
d’opinion sous-estimant le vote contestataire avant le référendum
britannique sur l’UE et avant l’élection présidentielle américaine est
vivace... Notre scénario central continue néanmoins d’exclure la
victoire d’un candidat contestataire, une hypothèse qui sous-
tend nos prévisions d’appréciation modérée de l’euro au second
semestre 2017.
Devises émergentes : potentiel d’appréciation limité
Les devises émergentes se sont appréciées, en moyenne, au premier
trimestre. Après sa baisse en fin d’année dernière, suite à l’élection de
Donald Trump, notre indice synthétique des devises émergentes a
regagné l’intégralité du terrain perdu depuis le début de l’année.
L’amélioration de la demande mondiale, des exportations des pays
émergents et le reflux des craintes concernant le protectionnisme ont
permis cette réappréciation.
Ce mouvement pourrait continuer à court terme. Nous restons
néanmoins prudents sur les devises émergentes dans une optique de
moyen terme : certaines incertitudes persistent concernant la politique
commerciale qui sera mise en œuvre par Donald Trump. Le président
américain devra probablement s’acquitter – au moins en partie – de
son mandat politique, ce qui pourrait se traduire par un retour des
craintes de montée du protectionnisme et pourrait à terme peser sur
les devises émergentes.
Le yuan chinois va graduellement perdre du terrain dans les mois qui
viennent, en raison du déficit persistent de la balance des capitaux
chinoise, ce qui devrait également peser, dans une certaine mesure,
sur les autres devises émergentes.
En outre, les devises des pays qui affichent des besoins de
financement extérieur importants pourraient avoir des difficultés à
s’apprécier, alors que la Fed va continuer à durcir sa politique
monétaire.
En dépit des réserves liées à la politique commerciale de D. Trump, il existe actuellement un vrai risque haussier sur nos prévisions. En effet, si les craintes de mise en place de mesures protectionnistes par l’administration Trump continuent de se dissiper, un nombre croissant d’investisseurs pourrait capituler et renforcer les flux d’investissement vers les pays émergents. Dans ce cas, les pays tournés vers l’exportation (notamment l’Asie) et les pays fortement intégrés à l’économie américaine (le Mexique, par exemple) seraient les principaux bénéficiaires.
6,0
6,1
6,2
6,3
6,4
6,5
6,6
6,7
6,8
6,9
7,0
2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017
Taux de change USD/CNY
Source : Crédit Agricole CIB
0
20
40
60
80
100
120
140
0
20
40
60
80
100
120
140
160
2000 2004 2008 2012 2016
Devises émergents et dollar
Prix du Brent (USD/bl)
Indice devises EM c/USD (+ =appréciation du change) - dr.Source : CA CIB
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 27
Prévisions économiques et financières
Taux d’intérêt
Taux de change
Matières premières
30-mars juin-17 sept.-17 déc.-17 mars-18 juin-18 sept.-18 déc.-18
Etats-Unis Fed funds 1,00 1,00 1,25 1,25 1,50 1,75 2,00 2,25
Taux 10 ans 2,40 2,50 2,60 2,70 2,80 2,90 2,95 3,00
Zone euro Repo 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00
Taux 10 ans (All.) 0,33 0,40 0,60 0,70 0,80 0,90 1,00 1,10
Spread 10a c/ EUR France 0,61 0,35 0,40 0,40 0,40 0,40 0,40 0,40
Italie 1,97 1,70 1,50 1,50 1,50 1,50 1,50 1,50
Taux de change USD
Pays industrialisés30-mars juin-17 sept.-17 déc.-17 mars-18 juin-18 sept.-18 déc.-18
Euro EUR/USD 1,07 1,06 1,08 1,10 1,10 1,13 1,15 1,16
Japon USD/JPY 111 113 116 117 115 114 112 110
Royaume-Uni GBP/USD 1,25 1,25 1,25 1,26 1,26 1,28 1,31 1,32
Suisse USD/CHF 1,00 1,01 1,00 1,00 1,01 0,99 0,98 0,98
Asie
Chine USD/CNY 6,89 7,07 7,25 7,25 7,19 7,16 7,16 7,17
Hong Kong USD/HKD 7,77 7,77 7,77 7,77 7,77 7,77 7,77 7,77
Inde USD/INR 64,85 65,50 66,50 67,50 68,00 68,50 69,00 69,50
Corée du Sud USD/KRW 1114 1150 1170 1190 1180 1170 1150 1130
Amérique latine
Brésil USD/BRL 3,12 3,25 3,30 3,35 3,40 3,35 3,50 3,35
Mexique USD/MXN 18,64 20,80 20,80 21,00 21,00 21,00 21,50 21,50
Europe - émergents
Pologne USD/PLN 3,92 4,08 3,93 3,82 3,79 3,65 3,57 3,51
Russie USD/RUB 55,94 59,00 58,00 57,50 57,50 57,00 56,50 56,00
Turquie USD/TRY 3,63 3,65 3,60 3,60 3,60 3,50 3,50 3,50
Métaux précieux T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4
Or USD/oz 1 250 1 240 1 230 1 250 1 260 1 280 1 280 1 300
30-mars2017 2018
T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4
Brent USD/BBL 53 57 56 59 60 65 66 68
2018201730-mars
Prix moy. du trim.
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 28
Scénario économique du Groupe Crédit Agricole S.A.
2016 2017 2018 2016 2017 2018 2016 2017 2018
Etats-Unis 1,6 2,2 2,5 1,2 2,3 2,4 -2,7 -3,2 -3,4
Japon 1,0 1,4 1,1 -0,3 0,6 0,9 3,8 3,9 3,8
Zone euro 1,7 1,7 1,6 0,2 1,5 1,2 3,1 3,0 2,9
Allemagne 1,8 1,8 1,7 0,4 1,7 1,5 8,4 7,9 7,9
France 1,1 1,3 1,4 0,3 1,3 1,1 -1,2 -1,1 -1,0
Italie 1,0 1,1 1,1 0,0 1,3 1,0 2,4 2,3 1,8
Espagne 3,2 2,6 2,3 -0,3 1,9 1,1 1,9 1,6 1,7
Pays-Bas 2,1 1,9 1,8 0,1 1,6 1,1 7,9 8,2 8,7
Autres pays développés
Royaume-Uni 1,8 1,8 1,4 0,7 2,7 2,9 -3,7 -2,7 -2,4
Canada 1,4 2,0 2,1 1,4 2,0 2,2 -3,3 -2,7 -2,1
Australie 2,9 2,7 2,8 1,3 2,1 2,3 -3,8 -3,9 -4,0
Suisse 1,3 1,4 1,5 -0,4 0,2 0,5 9,4 9,2 9,0
Asie 6,1 5,9 6,0 2,6 2,5 2,7 2,3 1,5 1,0
Chine 6,7 6,6 6,5 2,0 1,7 1,7 2,2 1,2 0,4
Inde 7,9 6,9 7,3 4,9 4,6 5,2 -1,0 -1,4 -1,5
Corée du Sud 2,7 2,7 3,0 1,0 1,8 2,0 7,2 6,0 5,5
Amérique latine -0,9 1,5 2,5 10,7 6,1 4,8 -2,1 -2,3 -2,5
Brésil -3,5 0,6 2,5 8,8 4,4 4,7 -1,2 -1,8 -2,0
Mexique 1,9 1,5 2,0 2,8 4,9 3,4 -2,9 -2,6 -2,9
Europe émergente 1,0 2,0 2,1 6,1 4,8 4,5 -0,3 0,1 -0,1
Russie -0,2 1,5 1,5 7,1 4,4 4,0 1,7 2,2 2,0
Turquie 1,4 1,5 1,5 7,7 7,4 7,0 -4,6 -4,4 -4,5
Pologne 2,8 3,8 3,4 -0,6 1,8 1,5 -0,5 -0,7 -1,2
Afrique, Moyen-Orient 2,4 2,4 2,9 6,4 7,4 6,1 -4,6 -2,6 -1,5
Arabie Saoudite 1,1 0,5 2,0 3,8 3,6 3,4 -8,6 -4,5 -1,9
Emirats Arabes Unis 2,1 2,6 3,0 2,5 2,9 3,0 1,4 3,1 4,2
Egypte 3,1 3,4 3,5 13,0 20,0 13,0 -5,5 -5,1 -4,5
Maroc 1,7 3,9 4,0 1,5 2,0 2,2 -2,3 -2,5 -2,6
Total 3,0 3,3 3,4 2,9 3,0 2,9 0,3 0,1 0,0
Pays industrialisés 1,6 1,9 2,0 0,7 1,8 1,8 0,0 -0,1 -0,2
Pays émergents 4,0 4,3 4,6 4,6 3,9 3,7 0,5 0,3 0,1
PIB (a/a, %) Inflation (a/a, %) Balance courante (% du PIB)
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 29
Comptes publics
Vous pouvez consulter nos prévisions économiques et financières sur notre site Internet.
2016 2017 2018 2016 2017 2018
Etats-Unis -3,2 -3,3 -3,3 76,7 77,4 77,7
Japon -5,1 -4,3 -4,2 212,8 217,0 220,9
Zone euro -1,9 -1,6 -1,4 91,5 90,3 89,1
Allemagne 0,5 0,3 0,3 68,3 66,0 63,5
France -3,3 -3,2 -3,3 96,1 96,4 96,7
Italie -2,6 -2,4 -2,0 132,9 132,3 131,4
Espagne -4,7 -3,3 -2,6 99,9 99,0 98,7
Pays-Bas -1,1 -0,5 -0,2 62,1 59,6 56,7
Belgique -2,9 -2,3 -2,4 106,8 106,5 106,1
Grèce -1,1 -1,1 0,7 180,2 180,9 177,8
Irlande -0,9 -0,5 -0,4 75,2 73,6 72,0
Portugal -2,3 -2,0 -2,2 130,3 129,1 128,0
Royaume-Uni -3,7 -3,3 -2,5 88,6 87,8 86,0
Solde budgétaire (% du PIB) Dette publique (% du PIB)
MONDE – Scénario macro-économique 2017-2018 La concordance des temps
N°17/091 – 31 mars 2017 30
Achevé de rédiger le 31 mars 2017
Crédit Agricole S.A. — Études Économiques Groupe 12, place des États-Unis — 92127 Montrouge Cedex
Directeur de la publication : Isabelle JOB-BAZILLE Rédacteurs en chef : Catherine LEBOUGRE – Armelle SARDA – Jean François PAREN
Comité de rédaction : Pays développés : Mike CAREY – [email protected] / Evan CARMEAN – [email protected]
Olivier ELUERE – [email protected] / Louis HARREAU – [email protected] Léopold JOUVEN – [email protected] / Catherine LEBOUGRE – [email protected]
Ludovic MARTIN – [email protected] / Slavena NAZAROVA – [email protected] Paola MONPERRUS-VERONI – [email protected]
Jean-François PERRIN – jean-franç[email protected] / Philippe VILAS-BOAS – [email protected] Kazuhiko OGATA – [email protected] / Yoshiro SATO – [email protected]
Pays émergents : Sébastien BARBE – [email protected] / Dariusz KOWALCZYK – [email protected]
Sylvain LACLIAS – [email protected] / Olivier LE CABELLEC – [email protected] Jean-Louis MARTIN – [email protected] / Tania SOLLOGOUB – [email protected]
Ada ZAN – [email protected]
Marchés financiers : Mohit KUMAR – [email protected]
Valentin MARINOV – [email protected] / Manuel OLIVIERI – [email protected]
Pétrole : Stéphane FERDRIN – [email protected]
Documentation : Dominique PETIT – Statistiques : Robin MOURIER
Réalisation & Secrétariat de rédaction : Fabienne PESTY
Contact : [email protected]
Cette publication reflète l’opinion de Crédit Agricole S.A. à la date de sa publication, sauf mention contraire (contributeurs extérieurs). Cette opinion est susceptible d’être modifiée à tout moment sans notification. Elle est réalisée à titre purement informatif. Ni l’information contenue, ni les analyses qui y sont exprimées ne constituent en aucune façon une offre de vente ou une sollicitation commerciale et ne sauraient engager la responsabilité du Crédit Agricole S.A. ou de l’une de ses filiales ou d’une Caisse Régionale. Le Crédit Agricole S.A. ne garantit ni l’exactitude, ni l’exhaustivité de ces opinions comme des sources d’informations à partir desquelles elles ont été obtenues, bien que ces sources d’informations soient réputées fiables. Ni Crédit Agricole S.A., ni une de ses filiales ou une Caisse Régionale, ne sauraient donc engager sa responsabilité au titre de la divulgation ou de l’utilisation des informations contenues dans cette publication.
Consultez les Études Économiques et abonnez-vous gratuitement à nos publications sur :
Internet : http://etudes-economiques.credit-agricole.com iPad : application Etudes ECO disponible sur l’App store
Android : application Etudes ECO disponible sur Google Play