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Le LUTIN Temps forts Georges Lapassade Hommage L’éducation populaire Hors les murs Voix croisées La réforme du CNRS Campus La taxe d’apprentissage Dossier Autrement capables Le magazine de Paris 8 - N° 2 OCTOBRE 2008

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Le LUTINTemps forts

Georges Lapassade

Hommage

L’éducation populaire

Hors les murs

Voix croiséesLa réforme du CNRS

CampusLa taxe d’apprentissage

Dossier Autrementcapables

Le magazine de Paris 8 - N° 2 OCTOBRE 2008

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8e sens / OCTOBRE-DÉCEMBRE 2008

SOMMAIRE

8e sens est également consultable sur www.univ-paris8.fr

N°2

9-11 Temps forts e Le Lutin - Agendas culturel et scientifique

e Georges Lapassade

e Autrement capables

2 Sommaire

3 Editorial

12-13 Hommage

14-1920-2122-23

Hors les murs e L’éducation populaire

Campus e La taxe d’apprentissage - Portrait de Christian Chorier

Voix croisées e La réforme du CNRS

4-8 Dossier

8e sensMagazine de l’université Paris 82, rue de la LibertéSaint-Denis 93526 [email protected]

Directeur de la publication :Pascal Binczak

Comité de rédaction :

Marc EscolaVictor-Eduardo MarquezJoanna PitounJulien de Saint-JoresRenaud SiolyIsis Truck

Conception graphique :Lysiana Medine

Crédit photo :Service communication

Dépôt légal :N°ISSN : 1967-533X

Si vous souhaitez contribuer à la rédaction de 8e sens, merci de contacter le service communication

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Pascal BINCZAKPrésident de l’université Paris 8

8e sens / OCTOBRE-DÉCEMBRE 2008

Le projet de Campus Nicolas de Condorcet pour les sciences de l’homme et de la société à Aubervilliersa été retenu par le ministère le 11 juillet dernier. Notre université est l’un des membres fondateurs, avecnos partenaires de l’EHESS, l’EPHE, des universités Paris 1 et Paris 13, de ce qui sera le futur pôle d’ex-cellence français en Sciences humaines et sociales, sans doute l’un des plus importants en Europe. Nousdevons notamment cette belle réussite au travail collectif de la communauté universitaire de Paris 8, àla qualité de sa recherche mais aussi à sa cohésion autour d’un projet qui engage l’avenir de notre uni-versité, qui engage l’avenir des Sciences humaines et sociales.En effet, si la création du Campus Nicolas de Condorcet est un signe très encourageant, la situation desSciences humaines et sociales au plan national demeure néanmoins préoccupante. La réforme que subitactuellement le CNRS conduit, comme la loi LRU pour les universités, à une modification profonde desmodes de fonctionnement des établissements de recherche et d’enseignement supérieur. Mais la refontedu CNRS va plus loin encore que celle des institutions universitaires, puisqu’elle touche aux disciplinesde recherche elles-mêmes. La place des Sciences humaines et sociales au sein du CNRS fait aujourd’huidébat et nous suivrons avec attention les prochains développements de la restructuration en cours.Là encore, Paris 8 a un rôle essentiel à jouer pour la défense des Sciences humaines et sociales dans lepaysage scientifique national, rôle qu’elle assumera avec d’autant plus de force que notre université atoujours été à l’avant-garde ou à l’avant-poste des combats scientifiques et sociétaux.

Paris 8 et la défense des Sciences humaines et sociales

EDITO

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8e sens / OCTOBRE -DéCEMBRE 2008

DOSSIER

Autrement capables

Paris 8 entend devenir uneuniversité modèle en matière d’accessibilité et de formationadaptée aux usagers en situationde handicap. D’importants chantiers restent à mener,notamment en matière d’accessibilité des locaux et de sensibilisation des personnels et des usagers de l’université au caractère spécifique de l’accueil des personnes en situation de handicap. Mardi 15 avril une cérémonieofficielle et une conférence-débat inaugurale a réuni unnombreux public. Voici un bref aperçu desinterventions qui ont ponctuécette journée.

Table des intervenants : de gauche à droite , M-T. L’HUILLIER, J.LOPEZ-KRAHE, F. BAVAY,M-A. SALLANDRE, J-L. SIMON

CONFERENCE-DEBAT

Marie-Anne SALLANDRE Maître deconférences en Sciences du langagechargée de mission Handicap à Paris 8 -modératrice du débat Avant de distribuer la parole aux diffé-rents intervenants de la conférence,Marie-Anne SALLANDRE rappelle quel’enjeu pour l’université, dernier maillond’une chaîne éducative qui doit accueil-lir l’enfant en situation de handicap de-venu jeune adulte, est de rendre laconnaissance accessible à tous.

Elle présente la cellule handicap deParis 8 qui accompagne au quotidien lesétudiants en situation de handicap dansleur parcours à l’université et exposantles besoins et les objectifs auxquelsParis 8 souhaite répondre (cf. 8e Sens,n°1 – p10).

Viviane FOLCHER Maître de conférencesà Paris 8 - Psychologie et Ergonomie, « l’homme en développement »Viviane FOLCHER commence par exa-miner les définitions de l’homme quiont été admises dans les champs del’ergonomie et de la psychologie depuisles années 60. La première définition, qui a prévalujusque dans les années 60 est celle de :« l’homme malade » : l’homme est ma-lade, atteint dans son intégrité physiqueet psychique. Les actions mises enplace cherchent :

- à prévenir, guérir et éradiquer les ma-ladies selon un modèle bio-médical ; - prendre en charge, compenser et ou-tiller selon le modèle de ré-adaptation.Au fil des années, et sous l’impulsiondes travaux de chercheurs québécois,une seconde définition de l’hommeapparaît. C’est celle de : « l’hommeempêché » selon laquelle ce sont lessituations et la société qui produisentdu handicap. Les actions mises enplace cherchent d’une part, à éliminerles obstacles et les barrières qui em-pêchent une participation pleine et en-tière de tous les citoyens à la sociétécivile : qu’elles soient matérielles,technologiques, économiques, ou so-ciales. C’est le modèle socio-environ-nemental. D’autre part, les actionssont portées au niveau de la transfor-mation des lois dans le cadre de lalutte contre les discriminations.Ces définitions envisagent soit uneadaptation des hommes à la sociétésoit une adaptation de la société auxhommes dans leur diversité, en appré-hendant les hommes depuis les défi-ciences et impossibilités, dans une di-mension plutôt individuelle que

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DOSSIER

collective ou sociale. Aujourd’hui, ellespeuvent être enrichies d’une troisièmedéfinition. Celle de « l’homme capable » :dans laquelle il s’agit de considérer lespersonnes en situations de handicap àpartir des capacités et des pouvoirsd’agir qu’elles peuvent développer.L’homme capable est l’homme du « jepeux ».Il s’agit alors pour les psychologues etergonomes de contribuer à concevoir dessituations d’activité, des lieux de sociali-sation qui soient adaptés à tous et à cha-cun : puisque Paris 8 fait du handicap unepriorité, concevoir une université pour ledéveloppement des capacités et pouvoirsd’agir de tous et pour chacun est un objectif à atteindre.

Éric LAWRIN Médiateur à la Cité desSciences et doctorant à Paris 8, « LaVillette : un modèle d’accessibilité »Eric LAWRIN est depuis dix ans chargé del’accessibilité à la Cité des Sciences de laVillette. Il prépare également un doctoraten linguistique et travaille sur la tempo-ralité en langue des signes.Il raconte comment, dès sa création, laVillette a mené une politique exemplaireen matière d’accessibilité. D’abord en

permettant une entrée à tous par lamême porte. Ensuite, en recrutant deuxsalariés, son collègue aveugle et lui-même, sourd, pour mettre en œuvre desactions adaptées aux visiteurs en situa-tion de handicap. Il évoque également lelabel « tourisme handicap », dont laVillette peut se prévaloir.Plus précisément, il décrit l’accessibilitédu musée en terme de contenus. Parexemple, la traduction en relief des élé-ments d’exposition, des audio guidesspécifiques pour les personnes mal-voyantes ou encore l’équipement dessalles de conférences de boucles magné-tiques.

Le site Internet propose également desservices adaptés. (ex : http://www.cite-sciences.fr/francais/lsf/accueil.php).En ce qui concerne la politique de sensi-bilisation auprès des salariés de l’éta-blissement, il cite à titre d’exemple laformation des nouveaux arrivants dans lecadre de séminaires sur la communica-tion non verbale. Plus généralement, ilinsiste sur les bénéfices d’un travail réa-lisé en étroite collaboration avec la di-rection des ressources humaines de laVillette.

Jaime LOPEZ KRAHE Professeur à Paris 8 -« les projets du laboratoire THIM »Jaime LOPEZ KRAHE présente les tra-vaux de recherche du laboratoire THIM -Technologies, Handicaps, Interfaces,Multimodalités qu'il dirige. Le principalaxe de recherche de THIM consiste àmettre la technologie au service des per-sonnes en situations de handicap. Pourles personnes aveugles, les membres deTHIM étudient notamment les technolo-gies de localisation à partir d'outils no-mades tel que le PDA.Pour les personnes sourdes et malen-tendantes, un site Internet a été mis enligne qui propose notamment un repèrelexical pour la LSF (http://ufr6.univpa-ris8.fr/desshandi/supl/projets/site_lsf/).En matière de LPC - langage parlé com-plété - des avatars signants sont égale-ment testés.

Pour les personnes à mobilité réduite,les chercheurs du laboratoire THIM éva-luent par des calculs précis la différencede temps de parcours entre des per-sonnes marchant et des personnes enfauteuil roulant afin de proposer des so-lutions quand l'accessibilité s'avère in-suffisante.

Jean-Luc SIMON membre du Groupementfrançais des personnes handicapées(GFPH) et du Conseil de l'Organisationmondiale des personnes handicapées(OMPH/DPI) - « Qui suis-je ? Handicapé ?Ou autrement capable ? »Jean-Luc SIMON, qui a présidé le Comitéfrançais de coordination pour l’année eu-ropéenne des personnes handicapées en2003, en rappelle le slogan « rien surnous, sans nous ». Plutôt que de parlerde « handicap », il préfère évoquer « lesautres capacités » développées : pourcommuniquer sans le son, se déplacersans marcher...Il critique la notion « d'incapacité au tra-vail », les personnes « autrement capa-bles » devant être considérées commeun facteur de développement et noncomme une obligation ou une charge,car elles mettent à jour des « ressources alternatives » souvent uti-lisables par tous. Il s'agit selon lui dechanger de point de vue, de se demanderpar exemple pourquoi celui qui conçoitun environnement est « incapable » de leconcevoir d'une manière adaptée enterme d’accessibilité.Il souhaite que la créativité soit mise enavant, que l'on comprenne que les per-

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DOSSIER

sonnes « autrement capables » consti-tuent un moteur pour la société dans sonensemble.

Marie-Thérèse L’HUILLIER enseignantede LSF et étudiante en Master à Paris 8 - « le projet Creagest »Marie-Thérèse L’HUILLIER, avant deprésenter en quoi consistera le projetCreagest auquel elle participe, procède àun rappel sur l'évolution de la législationencadrant la pratique de la langue dessignes en France. Elle en profite pouralerter l'assistance sur le danger quipèse aujourd'hui sur cette langue en rai-son de la politique systématisée d'inté-gration des enfants sourds.Le projet Creagest a pour objectif de pré-server ce patrimoine linguistique et cul-turel. Il s'agit de recueillir les gestes uti-lisés et créés par les personnessignantes. Ce projet d'envergure natio-nale est mis en œuvre par des cher-cheurs de Paris 8 en partenariat avec deschercheurs des universités de Paris 5, deLille et de Caen. Il s'agit de comprendrecomment la langue des signes émerge,soit par des enfants sourds, soit par lacréation de nouveaux signes produits

par des adultes. Un volet sur la gestua-lité naturelle des sourds et des enten-dants est également prévu.

Mme Francine BAVAY vice-présidente duconseil régional d’Ile-de-France, encharge du développement social, de l’éco-nomie sociale et solidaire, de la santé et duhandicapFrancine BAVAY considère que la ques-tion du handicap est une question de dé-mocratie et de citoyenneté qui traversenotre vie au quotidien. Elle évoque la politique du conseil régional qui souhaiteparvenir à une plus grande égalité dans l’accès aux transports. Elle donne également l'exemple du « conseil consultatif des citoyens handi-capés d'Ile-de-France », dont les avissont pris en considération.

Francine BAVAY exprime son soutien àParis 8 pour permettre à l'université d'être à la hauteur de l'enjeu que repré-sente cette « Année du Handicap » et desactions auxquelles elle donnera lieu. Eneffet, elle considère qu'il s'agit « d’améliorer l'accès à la vie banale », ens'appuyant notamment sur un droit

fondamental : l'accès à l'éducation, synonyme de liberté.

Patrick CURRAN Maître de conférences àParis 8 en Hypermédias - « (In)complé-tudes. Le partage créatif. La synergie desdifférences »Patrick CURRAN regrette l'inadaptationde l’interprétation du mot « handicap »,qu’il souhaite « apprivoiser ». Il mèneun travail de recherche sur les diffé-rences psychosensorimotrices. Ses tra-vaux portent notamment sur la synes-thésie, la relation entre les sens.Autrement dit sur le fait que lorsqu'on

perd un sens, on en développe d'autres.Ces enrichissements audiovisuels ouauditifs constituent un patrimoine qu'ilest essentiel de faire connaître et departager.

Cette dernière remarque ouvre unéchange avec le public, illustré par l'in-tervention d'une personne sourde qui,interpellée par le discours de PatrickCURRAN, se demande s'il serait possiblede créer un appareil qui permetted'écouter de la musique via des vibra-tions. En effet, elle-même surprend sou-vent son entourage quand elle évoque

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DOSSIER

son goût prononcé pour la musique, qu'elleressent… par le cœur. Cette idée, à laquelle répond positivement Patrick CURRAN, trouve également un écho favo-rable dans la réponse de Jean-Luc SIMONqui pense que sur un tel projet des per-sonnes aveugles pourraient égalementfournir une expérience enrichissante.Finalement, ces échanges entre le public etles intervenants de cette conférence abou-tissent à une conclusion commune : Le handicap constitue une force de créationet cette journée d'inauguration de l'Annéedu Handicap une leçon de vie.Cette journée d’inauguration s’est achevéepar une performance artistique, une créa-tion humoristique en langue des signes parle comédien Olivier CHETRIT (en couver-ture de ce numéro de 8e Sens), interprétépar Vincent BEXIGA ■

Paris 8 vous donne rendez-vous du 20 au 24 octobre pour :

Autrement capables La semaine de l’accessibilité

à Paris 8Au programme :■ mardi 21 octobre : un forumregroupant des entreprises, associations, etc. (hall du bâtiment A)

■ les mercredi 22 et jeudi 23 octobre :un colloque central et des tables rondes (Amphi X)

■ tous les jours : des ateliers de sensibilisation (salle A010), une exposition artistique (bibliothèque) et des spectaclesvariés (théâtre, danse, musique)

Pour en savoir plus :www.univ-paris8.fr

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TEMPS FORTS

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L’espace universitaire européen

Le LUTIN, un laboratoire équipé pour l’observation des usagesPar Charles TIJUSProfesseur de psychologie cognitive à Paris 8Directeur du LUTIN

Créé le 1er janvier 2004 à l’initiative duCNRS et inauguré en septembre 2004par François d’Aubert, alors ministre dela Recherche, le LUTIN (laboratoire desusages des techniques d’informationnumérique) est une plateforme duRéseau National de Recherche enTélécommunications (RNRT) et uneUnité Mixte de Services du CNRS (UMS2809), des universités Paris 8 (établis-sement principal), Paris 6, Compiègne,Rennes II, de l’ E.P.H.E., et de la Cité desSciences et de l’Industrie qui l’héberge.Le LUTIN a également participé auxprojets-phare qui ont servi au dépôt duPôle de Compétitivité CAP DIGITAL(IMVN) à vocation mondiale, plusieursdes projets Cap Digital comportant l’uti-lisation de la plate-forme LUTIN.Les équipes du LUTIN étudient lesusages des nouvelles technologies nu-mériques, avec par exemple : - le stylo numérique à l’école puisqu’onpeut visualiser le déroulement du tracédu stylo et comprendre, par exemple,que l’élève a résolu sa soustraction de

droite à gauche, au lieu de la faire degauche à droite, et avoir un diagnosticdes types d’erreurs, - le tableau blanc interactif qui rend lecours de l’enseignant et les interactionsavec les élèves bien plus riches, avec lapossibilité de revoir le déroulement ducours,- le papier électronique de haute défini-tion pour la lecture numérique avec despossibilités d’annotation, - le cartable électronique, ou bureau detravail de l’élève, à l’EnvironnementNumérique de Travail (ENT) qui facilite le travail scolaire, et qui a été distinguépar la Fondation Internet NouvelleGénération,- le jeu vidéo, avec l’analyse de près de120 jeux pour trouver les critères à re-tenir pour décerner un label de « joua-bilité »,- la radio numérique terrestre qui per-met à l’auditeur d’interagir, - la télévision HD et du cinéma 3D, quioffrent une plus grande qualité auximages, mais qui pourraient bien égale-

ment favoriser l’attention et la compré-hension des contenus,- les environnements virtuels en 3D quipermettent une immersion dans lescontenus.

Ces recherches interdisciplinaires (psy-chologie, ergonomie, informatique) pla-cent l’université Paris 8 et la Cité desSciences et de l’Industrie au premierplan de l’innovation technique orientéevers les utilisateurs. Ainsi, parmi lestrois millions de visiteurs annuels de laCité des Sciences et de l’Industrie,nombreux sont ceux qui participent auxobservations menées au LUTIN sur laconception et les usages des technolo-gies innovantes. Enfin, le LUTIN qui fé-dère de nombreux laboratoires pour larecherche fondamentale et la rechercheindustrielle avec les entreprises estaussi un lieu de formation aux nom-breuses techniques d’observation etd’expérimentation pour les étudiants deParis 8 et d’ailleurs. ■

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TEMPS FORTS

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Le financement du RNRT et du conseilrégional d’Ile-de-France (subventionSESAME à l’université Paris 8) a permisd’équiper le LUTIN pour la recherche fon-damentale et pour l’observation et l’ana-lyse des usages des nouvelles technolo-gies numériques.

La plateforme LUTIN à la Cité desSciences et de l’Industrie a pu ainsi êtreéquipée de plusieurs salles d’observation(dont une salle suffisamment grandepour l’observation de petits groupes depersonnes dans un environnementmodulable) ; d’une régie vidéo qui per-met la capture, le codage en ligne, lestockage des prises de vues des diffé-rentes salles et de caméras externes aulaboratoire pour étudier les usages enmobilité ; d’oculomètres ; d’un dispositifde recueil de données physiologiques ;d’un dispositif de recueil des potentielsévoqués. ■

Etude à la cité des sciences d’un système denavigation couplé avec des bornes interactives.Le participant est équipé de lunettes-caméra.

Au LUTIN, le parcours du regard est recueilliavec des casques oculométriques pour étudierla prise d’information visuelle sur un écran ouà l’extérieur.

Le parcours du regard est analysé pour détermi-ner ce sur quoi le regard a été porté et ce qui a étéignoré, ici pour l’utilisation d’un site Internet.

Les jeux vidéo sont analysés pour améliorer la jouabilité.

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TEMPS FORTS

10 Je suis étudiant à Paris 8. Le LUTINdispose de tous les appareils demesure nécessaires à nos études

et particulièrement au stage que j’ef-fectue sur le stylo numérique. Leschercheurs que nous rencontrons icinous permettent d’améliorer nosconnaissances théoriques et de mettreen place des protocoles d’expériencesinnovantes. ces derniers nous donnentla possibilité d’interagir avec les gensdirectement sur la théorie. Au LUTIN, l’ambiance est très convi-viale, propice aux échanges entre étu-diants et chercheurs. ■

Je suis en Master 1 de Psychologie àParis 8. Charles Tijus nous avait in-vité à visiter le LUTIN lors de la

Fête de la Science que la Cité desSciences organise tous les ans. J’ai étéimpressionnée. J’ai pu y découvrir lesoutils dont dispose le LUTIN et les dif-férents projets menés par les équipesde chercheurs. Je suis en stage dans le domaine du ci-néma 3D avec des spécialistes du ci-néma et des spécialistes de la fatiguevisuelle. Pour un même projet, on peututiliser l’oculométrie ou encore faire unrelevé de données physiologiques. C’estcomme un boulanger qui serait enmême temps pâtissier. Le but est d’êtreun très bon boulanger ET un très bonpâtissier. Polyvalence et pluridisciplina-rité sont les mots qui caractérisent lemieux la recherche au LUTIN. ■

Je suis étudiant en Master 2,en Ergonomie à l’universitéToulouse le Mirail et suis titulaire

d’un Master recherche en Sciencescognitives. Le stage que j’ai fait au LUTIN m’a per-mis de réaliser des études d’ergono-mie que j’avais vues en cours mais ja-mais pu réaliser. J’ai défini mon projetde stage autour de la conception ergo-nomique des jeux vidéo. Pendant mon stage j’ai été en relationavec les entreprises du jeu vidéo pourrecenser leurs besoins, faire des pro-positions et réaliser un cahier descharges. J’ai utilisé le casque oculo-métrique, le logiciel d’analyse vidéo,fait des questionnaires, des entre-tiens, analysé et présenté les résultatsde mon travail. J’ai appris beaucoupsur le jeu vidéo, le game play,

mais aussi sur les problématiques desinterfaces homme-machine, sur dessituations très diverses, utiliser diffé-rentes techniques, pour être le pluspertinent possible. J’ai travaillé avecun ergonome et un spécialiste del’oculométrie, une technique qui se dé-veloppe énormément dans les entre-prises. J’ai pu travailler en autonomieet exploiter mes idées. Le point fort duLUTIN, ce sont les multi-compétencesqui y sont réunies : des program-meurs, des psychologues, des ergo-nomes. ■

Propos recueillis par Stéphane HELENE, Étudiant en Master 2 en Psychologie à Paris 8

Paroles d’étudiants stagiaires au LUTIN

HAMID ZAKIA IVAN

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TEMPS FORTS

OCTOBRE

Mardi 7 octobre 2008 Conférence« Franchir le pas : les coalitions ethniques et raciales dans la ville de Los Angeles »Conférence du Professeur RaphaelSonenshein, lauréat de la ChaireTocqueville-Fulbright à l’Institut Françaisde Géopolitique de l’université Paris 8de 18h à 20h - Amphi XAccès libre sur réservation :01 49 40 67 63 ou par courriel à :[email protected]

Lundi 13 octobre 2008Forum de la cultureOrganisé par l'ACA - service d'action cul-turelle et artistique. 70 théâtres de Paris etsa région, des musées ainsi que des ciné-mas présentent leur programmation dansle hall principal de Paris 8.

Du 20 au 24 octobre Autrement capablesLa semaine de l’accessibilité à Paris 8. Ce temps fort de l’Année du Handicap àParis 8 se déclinera en de nombreuses activités. (cf. dossier p. 4-6)

Pour en savoir plus, rendez-vous surwww.univ-paris8.fr ou contactez le01.49.40.67.92

NOVEMBRE

20 et 21 novembre Savante BanlieueÉvénement porté par la communautéd'agglomération Plaine Commune en col-laboration avec les universités Paris 8 etParis 13, le CNRS et le CNAM, dans le ca-dre de la Fête de la Science.Manifestation scientifique résolument pluridisciplinaire, Savante Banlieueaccueillera 40 stands de laboratoires derecherche, des associations de culturescientifique et technique, ainsi que desconférences-débat sur le thème : « lessciences au service de la planète ? »de 9h30 à 17h30 - université Paris 13Accès : 99, Avenue Jean-Baptiste-Clément93430 Villetaneuse

Depuis Paris 8, bus 356 – destinationDeuil-la-BarreNavette spéciale : pendant la durée del’événement, un bus RATP part tous lesquarts d’heure de la place du 8-mai-1945à Saint-Denis pour l’Université Paris 13 àVilletaneuse.Pour en savoir plus : http://savanteban-lieue.plainecommune.fr/

Du 1er au 30 novembreFestival national du film documentaireLa bibliothèque universitaire de Paris 8proposera une sélection de films et unesérie de projections autour du thème « Résistances ».

DÉCEMBRE

Programme disponible très bientôt sur le site www.univ-paris8.fr

culturel et scientifique

Pour annoncer un événement que vous organisez ou auquel vous participez, merci d’écrire à :

[email protected]

Agendas

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Notre collègue, le Professeur Lapassade,s’est éteint le 30 juillet à la clinique deStains. Il a été incinéré le 6 août àVilletaneuse.

Entré à Vincennes d’abord en science poli-tique en 1972, puis en 1973 en sciences del’éducation, il n’a cessé d’être présent àParis 8 jusqu’à sa mort, puisqu’il avait tou-jours son bureau à l’UFR.

Eternel agitateur institutionnel (il pratiquaitl’analyse institutionnelle interne, l’autoges-tion pédagogique, l’observation participantedans la banlieue), il s’était fait un nomcomme l’un des fondateurs de la psychoso-ciologie française à la fin des années 1950.Ses interventions à l’UNEF, à la MNEF où il aformé les cadres du mouvement étudiant, àla dynamique des groupes dans les années1960, a joué un rôle dans le déclenchementdu mouvement de Mai 68.

Ses livres aussi ont joué un grand rôle danscette dynamique de critique des institutions :dans L’Entrée dans la vie, essai sur l’ina-chèvement de l’homme, il critique le mythede l’adulte. Ce livre est fort lu et a une in-fluence sur la loi de 1971 sur la formationpermanente. Il a aussi publié Groupe, orga-nisation, institution en 1965 : ce second ou-vrage est un manifeste fondateur de l’ana-lyse institutionnelle. A Paris 8, GeorgesLapassade s’est engagé dans l’expérimen-

tation, la réforme : il a introduit de nouvellesdisciplines (le berbère, par exemple, maisaussi l’AES - Administration économique etsociale - dont les Vincennois ne voulaientpas).

Auteur de quarante ouvrages, traduits dansle monde entier, Georges Lapassade a faitécole : à Paris 8, avec René Lourau,Jacques Ardoino, Michel Lobrot, RaymondFonvieille, puis avec la seconde, puis la troi-sième génération (Patrick Boumard, LucetteColin, Alain Coulon, Patrice Ville, Remi Hess,Benyounès Bellagnech, Augustin Mutuale,Kareen Illiade, etc.), il a fait exister une écoleinstitutionnaliste s’inscrivant dans la prolon-gement de la pédagogie institutionnelle. Desmilliers d’étudiants de sciences de l’éduca-tion ont travaillé avec lui l’art de penser lesdispositifs en pédagogie, l’individualisationde la formation, la recherche comme forma-tion, l’éducation tout au long de la vie.Ses travaux d’ethnologie sont respectés. Il a

HOMMAGE

Georges Lapassade, notre ami

Par Remi HESS,Professeur en sciences de l’éducation à Paris 8

G. Lapassade à Saint-GemmePhoto : Nadine Neiss

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13étudié les rites de possession en Tunisie, auMaroc, au Brésil, et en Italie du Sud. Ensuite,il s’est tourné vers l’ethnographie des jeuneset de la banlieue.

A l’intersection de l’ethnologie et de la péda-gogie, il avait institutionnalisé l’écriture dujournal de formation, de lecture, de re-cherche. Le diarisme se développa fortementen sciences de l’éducation à partir de 1976.Aujourd’hui, la méthode a fait le tour dumonde tant en ethnographie de l’école quedans la recherche de terrain. GeorgesLapassade s’était intéressé, ces dernièresannées, à la constitution d’une bibliothèquenumérique à l’UFR Sciences de l’éducationoù il accepta de mettre en ligne ses ouvragesépuisés ou inédits. Plusieurs de ses livres

sont sur le point de s’ajouter aux titres, déjàprésents, et en libre accès !

Georges Lapassade fut longtemps un intel-lectuel médiatique (il fut l’un des animateursdu Front homosexuel d’action révolution-naire). Il est devenu plus discret lorsqu’il s’estinstallé rue de la Liberté, à Saint-Denis, dansune maison qui fonctionna comme cité uni-versitaire à un moment où celle-ci n’existaitpas. Georges accueillait chez lui jusqu’à dixétudiants « nécessiteux » (formule qui se re-trouve sous sa plume), souvent sans papiers.Il était disponible pour aider les étudiants àécrire leurs mémoires de recherche, leursthèses. Il était heureux lorsqu’il réussissait àfaire entrer à la fac des étrangers ayant unfort désir d’étudier.

Il avait fait régulièrement des voyages auMaroc, en Italie, en Amérique latine, même sises problèmes de santé l’obligèrent à ralen-tir son rythme !Depuis 2002, il a participé à la création de larevue. Les IrrAIductibles, la revue planétaireet interculturelle d’analyse institutionnelle(Salle A 428) dont le n°15 rend hommage àGeorges Lapassade.

La plupart des livres de Georges Lapassaderéédités ou édités depuis 1996 le sont auxéditions Anthropos, notamment : L’Entrée dansla vie ; Groupe, organisation, institution ; Lesrites de possession ; Les Microsociologies ;Microsociologie de la vie scolaire ; Regardssur la dissociation adolescente (avecR.Schérer et J-Y. Rochex) ; Eloge de la dis-sociation ; le Mythe de l’identité (avec P.Boumard et M. Lobrot). Il a également éditéaux éditions Analyse institutionnelle sansfrontière (Paris 8) : Analyse institutionnelle etsocianalyse (2006) et De Vincennes à Saint-

Denis, essais d’analyse interne (2008). Ledernier cours de Georges Lapassade futpour l’IED (Institut d’Etudes à Distance)Il s’agissait d’une Introduction à la psycho-sociologie (produite avec L. Colin, R. Hess etG. Weigand) : 70 étudiants purent suivre enligne ce cours en 2008. Le dernier entretiende Georges fut pour Lucette Colin : il s’agitd’une méditation sur l’inachèvement : il estpublié dans L’Education tout au long de lavie, sous la direction de L. Colin et J.-L. LeGrand (Anthropos, 2008). ■

HOMMAGE

Groupe de pédagogie institutionnelle, 1987

8e sens / OCTOBRE-DÉCEMBRE 2008

Jeudi 13 novembre :Journée d’hommage à Georges Lapassade.

Présentation de ses œuvres à la bibliothèque universitaire

cet automne.

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Paris 8, université populaire ?

Par Nicolas FASSEURA.T.E.R. à Paris 8, co-président dePeuple et Culture Ile-de-France

HORS LES MURS

Ce dossier du numéro 2 de 8e Sens porte surl'éducation populaire, mais encore faut-ilclarifier ce concept complètement

dépassé pour certains et si confus pour d'autres.Chaque mouvement donne de l’éducation popu-laire sa propre définition. Mais globalement,l'éducation populaire est constituée de l'en-semble de pratiques permettant à des habitantsd'un territoire de clarifier au mieux une situa-tion-problème, d'y exercer leur esprit critique etde produire des savoirs par l'action collective. Ils'agit ainsi de s'accaparer des savoirs savantspour produire des savoirs du quotidien dans unedémarche d'autoformation. Ce dossier surl'éducation populaire est une bonne nouvellepour deux raisons au moins. La première esttout simplement la promotion de l'éducationpopulaire à travers cette revue car les occasionssont rares pour attester de sa vivacité et de saconcrétisation dans la vie de tous les jours. La seconde est, plus précisément, sa promotion par l'université de Paris 8 implantée dans le département de Seine-Saint-Denis.

Son université populaire est un dispositif péda-gogique qui veut sortir l'université hors de sesmurs pour l'installer dans des quartiers popu-laires du Nord-Est francilien. Son objectif estd'accompagner des démarches autoformativescentrées sur la recherche.Ensuite, le département de la Seine-Saint-Denis est, depuis quelques années, ce lieu pri-vilégié d'expression d'acteurs de l'éducationpopulaire organisés en réseau, appuyé lui-même par le conseil général. A Saint Denis, s'organise, enfin, la Dyoniversité,cette université populaire est gérée par seshabitants, elle reprend la tradition des univer-sités populaires du XIXe siècle en entretenantune relation intelligible entre critique etconnaissance.

Ces trois démarches d'éducation populaire, décrites pluslonguement dans les pages suivantes, ne sont pas exceptionnelles car

il en existe bien d'autres plus discrètes et tout aussi efficaces. Ellesdémontrent toutes que l'éducation populaire, loin d'être dépassée, esttoujours bien vivante. ■

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8e sens / OCTOBRE-DÉCEMBRE 2008

HORS LES MURS

Projet d’université populaire expérimentale de Paris 8 :contribuer à l’éducation populaire du XXIe sièclePar Jean-Louis LE GRAND,Professeur en Sciences de l’éducation, Directeur de l’UFR SEPF de Paris 8

Ce projet s’inscrit dans l’esprit de lacharte de partenariat entre le conseilgénéral de Seine-Saint-Denis et l’ uni-versité Paris 8, consignée dans le Planquadriennal. Il renoue avec une cer-taine tradition utopique présente auxdébuts de notre université en voulantaccueillir des personnes qui n’ont jamais eu l’occasion ou la chance de venir étudier à l’université mais qui lesouhaiteraient. Les visées sont de :- créer des liens réciproques deconstruction en commun entre Paris 8et des structures locales, associations,mouvements, comités d'entreprises etautres travaillant dans une visée d'édu-cation populaire ;- faire en sorte que les modes universi-taires de connaissance soient au cœurdes quartiers et du monde populairequ'il ne touche que peu, d'habitude ;- permettre plus précisément à desjeunes "en revanche scolaire" ou à des

préretraités, par ailleurs investis locale-ment, de devenir de futurs "cadres" del'éducation populaire et de se diplômerce faisant.

Pour cela, le projet d’université populairese propose d’utiliser un certain nombrede moyens pédagogiques : - prendre les méthodes de formation àla recherche des chercheurs de 3e cyclepour des personnes n'ayant jamais fré-quenté l'université ;- construire ensemble avec le groupesélectionné le programme des activi-tés : conférences/débats dans des lieux(hors de Paris 8), utiliser au maximumles ressources du territoire, animer lesite Internet de l’université populaire ; - c’est une pédagogie active tournéevers la reconnaissance des expériencespersonnelles et collectives utilisant larecherche-action collective dans unidéal d’éducation populaire ; - aboutir par les contributions de ce

groupe (des mémoires) à une productioncollective contribuant à la recherche surl'éducation populaire du XXIe siècle etplus particulièrement dans le Nord-EstFrancilien ; - la validation universitaire d'un tel travailest essentiellement fondée sur la pro-duction d’un mémoire devant délivrer lefutur diplôme de l’université populaire(Bac+2) permettant d’entrer par équiva-lences en Licence 3 de Sciences del’éducation ou dans d’autres diplômeséventuels.

L’étudiant n’est pas tant un étudiantqu'apprenti-chercheur/animateur : ildevient membre du groupe qui pilotel'université populaire. Il a pour engage-ment de s'inscrire dans une démarched'écriture et de validation universitaire,ainsi que de continuer le travail d'ani-mation dans des lieux spécifiques dequartier, d’animer le site de l’universitépopulaire, etc… Mais l’université popu-

laire s’adresse aussi pour ses confé-rences-débats à toute personne quis’intéresse aux thèmes développés. Elleparticipe aux débats organisés, aux fo-rums Internet, à diverses activités. Dansun premier temps elle ne recherche pascontractuellement une validation uni-versitaire.

Des partenaires sont actuellementconcernés : citons notamment le conseilgénéral du 93 et sa mission pour l'édu-cation populaire à travers notammentJean Bourrieau, la mairie de Sevran, desassociations d'éducation populaire :Culture et liberté, Peuple et Culture.En conclusion, l’objectif est de rappro-cher l’université à travers ses missionsde recherche et de formation des res-sources locales et associatives quicontribuent à l’éducation populaire d’au-jourd’hui et de demain. ■

"Ecrire, lire, agir, produire, ensemble et en réseau, de la pensée pour le présent et le futur"

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Par Jean BOURRIEAUChargé de mission éducation populaire

L'état des lieux de l'éducation popu-laire en Seine-Saint-Denis mené en-tre décembre 2003 et février 2004 amontré la grande richesse et la diver-sité des acteurs de l'éducation popu-laire sur le département. Le réseaud'éducation populaire de Seine-Saint-Denis, initié en 2005 par le conseil gé-néral, est la proposition qui a sembléla plus appropriée pour notre terri-

toire en regard de ce qui existait déjàou était alors en émergence : portépar la mission « éducation populaire »,il doit permettre de rendre visiblecette richesse, d'aider à la mutualisa-tion des ressources et de répondreaux besoins logistiques dans une pé-riode où les associations sont engrande difficulté en raison des désen-gagements successifs de l'Etat.Premier acte du réseau qui se consti-tuait, le manifeste de l'éducation po-pulaire en Seine-Saint-Denis, permetde comprendre ce qui a commencéalors à se construire entre les asso-ciations et le conseil général : y sontrappelées des valeurs, des convic-tions. Ainsi, « nous avons la certitudeque la soif de connaissance etd'échanges que nous portons tous estindispensable pour que vive la démo-cratie. Nous revendiquons la richesseet le savoir dont chaque personne,

Un réseau d'éducation populaire en Seine-Saint-Denis

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chaque groupe est porteur et nous affirmons qu'elle constitue une exper-tise citoyenne indispensable à l'élabo-ration des politiques publiques. Lesméthodes de l'éducation populaire s'ap-puient sur l'expérimentation et la miseen pratique, l'appropriation collectivedes apprentissages de chacun ». Etc'est autour de deux axes, démocratieet éducation, que s'engage le travail.(voir le manifeste : http://www.educa-tionpopulaire93.fr/spip.php?article51)

Les acteurs de l'éducation populaireen Seine-Saint-DenisSi plus de 60 associations ou fédéra-tions sont aujourd'hui membres du ré-seau, les acteurs de l'éducation popu-laire en Seine-Saint-Denis sont plusnombreux encore et s'investissentdans tous les champs, tous les âges...D'autres associations bien sûr quiagissent au plus près de leur

territoire avec toujours la volonté de « faire avec » et de permettre à chacunde devenir véritablement acteur. Desdirections du département, par exem-ple pour la construction du schémades collégiens, la réhabilitation d'unespace vert ou une fouille archéolo-gique… Des établissements scolaires,associant les jeunes au projet de re-construction de leur collège ou les fai-sant acteurs de projets sur le quartieravec les habitants. Des villes, travail-lant à associer les associations et leshabitants à l'élaboration des projetsd'évolution du territoire.

Education populaire et universitésEt l'université ? C'est en particulier dansleur rapport au territoire que des dé-marches d'éducation populaire peuventêtre travaillées et mises en œuvre : - dans la construction de véritablescoopérations autour de projets et

mieux encore dans la construction decoopérations durables ; - dans la prise en compte de la resti-tution au territoire (aux habitantsconcernés et pas seulement aux déci-deurs) des recherches ou des étudespour lesquelles ils ont été mobilisés ;

- dans l'utilisation pour ces restitu-tions de « médiations» (films, théâtre,expositions...) permettant au plusgrand nombre de se les approprier ;

- dans la mise à disposition de cesétudes et recherches au plus grandnombre, par le biais d'Internet parexemple ; il y a là toute une façon defaire à promouvoir qui, je le sais bien,bouscule tout autant les habitudes desenseignants, des chercheurs et desétudiants que celles des techniciensou des élus de notre département oudes associations. ■

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HORS LES MURS

Depuis plusieurs mois, laDionyversité, université populaire deSaint-Denis, s’est ouverte. La première question à se poser estde savoir le « pourquoi » d’une telleinitiative. Nous commencerons donc,par le « comment ». En effet, il n’y eutpas de recherche théorique, delongues discussions sur le pourquoidu comment, sur les caractéristiquesdu « projet », sur ses buts, non, celaest venu seul et naturellement. Depuis plusieurs années, une association locale proposait une conférence mensuelle autour de la croyance et de la religion.Progressivement, les auditeurs deces conférences ont souhaité élargir

les sujets de réflexions proposés àdes sujets sociaux, politiques,…

L’université populaire était en germe.C’est là, que certains breuvages sontintervenus et ont donné naissance àla Dionyversité. Durant un blanccassé (savoureux mélange de limo-nade et de vin blanc), il s’est avéréque la configuration de ces confé-rences mensuelles devenait trop li-mitée et ciblée par rapport aux demandes. Nous avons donc décidéd’offrir des cycles de 4 séances (1 parsemaine durant un mois) sur chaquethème. Nous avons ensuite directementabordé le « comment ». Nous étionsguidés par quelques principes élé-mentaires essentiels à nos yeux : - une gratuité totale, ce qui ne signi-fie pas que l’organisation de ces cycles n’a pas un coût (à nous detrouver le financement, nous accep-

Une université populaire à Saint-Denis ou La rencontre du blanc et de la limonade :

Par Philippe RAULINDyonisien, co-fondateur de la Dyoniversité

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tons toujours les dons et les soutiensfinanciers, merci d’avance) ;

- pas de procédure administrative :pas d’inscription, pas d’adhésion, pasde niveau requis pour l’entrée dansun cycle, pas de contrôle desconnaissances, pas d'examens, ni dediplômes délivrés ;- des intervenants de qualité, bénévoles, animant un cycle struc-turé en quatre séances formatées :1h apports / 1h dialogue entre parti-cipants/intervenants – partici-pants/participants.

Où trouver ces intervenants ? Facile.Très facile. Partout. Des universi-taires, des enseignants, mais passeulement, et loin de là, des syndica-listes, associatifs, artistes, militants,et toute personne voulant partagerun savoir, une envie ou une passionen respectant un de nos principe : laqualité des interventions.

Ce fut très simple, à chaque appeltéléphonique, les futurs intervenantsont toujours répondu « oui » immé-diatement, sans aucune hésitation. Pour cette première année, nousavons pu proposer 8 cycles de 4 fois2 heures : - l’éducation populaire (bien obligé) - la surveillance généralisée- les prisons - la désobéissance civile - la caricature - la critique des média - Wilhem Reich - femmes philosophes, femmes ré-volutionnaires. Les séances de la dyoniversité setiennent à la Bourse du travail deSaint-Denis. Ce lieu a été retenu nonpas pour des problèmes de salles oud’accès, mais pour la dimensionsymbolique à laquelle il est associé.Les cycles du dernier trimestre 2008sont prêts et commenceront en

octobre. Une nouveauté intéressantemarquera cette rentrée : les partici-pants désirent organiser des cycleset le mettent en pratique. Les audi-teurs sont devenus des organisa-teurs, et parfois même des interve-nants.

Pour en savoir plus :Site : http://www.dionyversite.org/Courriel : [email protected]

La Dionyversité est une universitépopulaire fondée par des habitants deSeine-Saint-Denis. Association loi1901, enregistrée à la préfecture deBobigny le 2 octobre 2007, l'article 2de ses statuts stipule :

« L'université populaire de Saint-Denis se donne pourmission de contribuer àl'amélioration de la diffusion populaire de l'esprit critique, dessavoirs et de la culture ; maisaussi de favoriser le développement deséchanges sociaux dans la cité, en incitant lescitoyens à échanger despoints de vue et des arguments raisonnés. Ce projet d'éducation popu-laire est mis en œuvre horsdes institutions universitaires traditionnelles, dans unesprit engagé de mixitésociale, de citoyenneté, de laïcité, de gratuité et de coopération mutuelle. »

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CAMPUS

Taxe d'apprentissage, mode d'emploi

Un des principaux défis des universitésconsiste à former les étudiants le mieux pos-sible notamment afin d'optimiser leur insertionprofessionnelle. Cela implique de réels parte-nariats université/entreprises qui peuvent

prendre la forme de stages, de ser-vices d'accompagnement à l'em-ploi, de financements de projets -à travers les fondations, parexemple - ou de contributions

financières aux formations dans lecadre du dispositif fiscal relatif la taxe

d'apprentissage.

La taxe d'apprentissage est un impôt versépar les entreprises pour contribuer au déve-loppement des formations technologiques etprofessionnelles. Il est obligatoire pourtoutes les entreprises sauf celles quiemploient au moins un apprenti et dont les

0.5% de la masse salariale n'excèdent pas452 € (ou 0.6% si elle comporte plus de 250salariés).

La taxe d'apprentissage se divise en deuxquotités : le quota (52 %) et le hors quota (48 %). Seul le hors quota concerne les uni-versités, le reste étant versé aux Centres de

Fo rma t i on d 'App r en t i s ( CFA ) e t au Fonds National de Développement et deModernisation de l'Apprentissage (FNDMA).Ce hors quota est réparti en trois catégories :A, B et C.

- A correspond aux formations de type CAP,BEP et baccalauréat ; - B correspond aux DUT, BTS, licences (pro-fessionnalisantes) et Bac + 4 ;- C correspond aux masters (professionnali-sants), Bac + 5 et plus.L'entreprise peutchoisir d'attribuer sa taxe d'apprentissage àune formation au titre d'une seule catégorie oubien de deux catégories par cumul, à conditionque les catégories soient immédiatement voisines.

Ce qui signifie qu'une université peut perce-voir au maximum (avec un cumul A + B) :- 0.006 x 0.48 x 0.8 = 0.2304 % de la massesalariale d'une entreprise de plus de 250 salariés ;- 0.005 x 0.48 x 0.8 = 0.192 % de la massesalariale d'une entreprise de moins de 250salariés.

Depuis 2005, le versement de la taxe d'ap-prentissage doit obligatoirement passer par un

OCTA (Organisme Collecteur de la Taxed'Apprentissage) à l'exception des subven-tions en matériel (taxe d'apprentissage verséeen nature).

Afin d'améliorer la collecte de la taxe d'ap-prentissage et son suivi à Paris 8, le Présidentde l'université a instauré en septembre 2007une mission « taxe d'apprentissage » dont lacharge est assurée par un enseignant-cher-cheur de l'université.

L'objectif de cette mission est de promouvoirles formations de Paris 8 auprès des entre-prises et d'organiser la collecte de la taxe ausein de l'université.En 2008, les versements des entreprises dansle cadre de ce dispositif ont permis de renou-veler l'équipement de salles informatiques etde laboratoires de langue, ainsi que d'acquérirdivers matériels pédagogiques (caméras,vidéoprojecteurs, entre autres). ■

Pour en savoir plus, rendez-vous surwww.univ-paris8.fr, rubrique « espace entre-prise »

Par Isis TRUCKMaître de conférences en Informatique à Paris 8Chargée de mission « taxe d'apprentissage »

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Taxe d’apprentissage

CAMPUS

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Portrait

Après de nombreuses années passées au sein du réseau du TrésorPublic et avoir été comptable dans différentes trésoreries, j’ai été affectéà Paris 8, le 1er novembre 2007 en qualité d’agent comptable et chef desservices financiers. C’était pour moi la découverte d’un nouvel environ-nement professionnel. Pourquoi ce désir de changement ? Plusieurs rai-sons. La raison principale est sans aucun doute l’intérêt que je portaisdepuis longtemps à la comptabilité des établissements publics à carac-tère scientifique culturel et professionnel au regard notamment de cettedualité de fonctions adoptée aujourd’hui par la plupart des universités,dont Paris 8, et qui regroupe à la fois les fonctions d’agent comptable etcelles de chef des services financiers. Cette caractéristique en effet, m’atoujours paru être la complémentarité indispensable à l’optimisationd’une bonne gestion financière et comptable. Cette nouvelle mission,exercée dans un cadre de travail très différent de celui que j’avais connujusqu’alors, m’a très vite convaincu du bien fondé de ce choix.

Après trois mois d’exercice au sein de l’université j’ai commencé vérita-blement à trouver mes marques, je me suis très vite rendu compte de lachance que j’avais de pouvoir m’investir dans mes fonctions au regardde cette dualité de fonctions qui revêt pour moi une importance toute par-ticulière à différents titres. Cette dualité permet d’être présent sur l’en-semble des fonctions financières et comptables et permet ainsi unemeilleure analyse des risques, avec la véritable possibilité de les préveniret par suite d’intervenir à tout moment. L’intérêt de cette dualité est d’ail-leurs multiple, elle permet manifestement de dégager un gain de pro-ductivité important au niveau des tâches matérielles pour ainsi permettrede se consacrer davantage aux véritables besoins d’analyse qui permet-

tront d’optimiser la gestion et améliorer la qualité comptable pour êtrenon seulement le garant de la fiabilité des comptes, mais aussi le conseilde l’ordonnateur au regard de la gestion financière aussi bien sur le courtque le moyen terme. De fait, le rôle de l’agent comptable ne se limite plusdésormais aux seules missions traditionnelles de contrôle et de vérifica-tion, ses missions ont considérablement évolué, l’agent comptable peutdésormais être un véritable partenaire stratégique.

Si les fonctions d’agent comptable rejoignent celles d’un receveur muni-cipal dans la mesure où elles impliquent la rigueur absolue, garante durespect de la réglementation, elles sont en revanche très différentes surle plan relationnel, et je découvre à cet égard combien les relations peu-vent être cordiales malgré les exigences réglementaires, je mesurechaque jour les efforts de chacun pour s’adapter à cette nécessairerigueur comptable et aux impératives contraintes budgétaires. A cetégard, l’accueil et la disponibilité de chacun ont grandement facilité maprise de fonction et m’ont en outre permis de me familiariser rapidementavec mon nouvel environnement.Mais au-delà de toutes ces considérations professionnelles, je découvreParis 8 avec ses spécificités, son universalité, son identité, son histoire,c'est-à-dire tout ce qui en fait son attachante et vraie personnalité. ■

Christian CHORIER, Agent-comptable de Paris 8

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VOIX CROISEES

Par Isis FOURNELProfesseur au département de Littérature française de Paris 8

Les 23 et 24. ■

La réforme du CNRS

Jean-Louis FOURNELProfesseur d’Italien à Paris 8Porte-parole de l’association« Sauvons l’université ! » (SLU)

La réforme du CNRS, ou « plan stratégique »,prévoit qu'il soit réorganisé par disciplines, enle divisant en instituts. Que pensez-vous decette réforme ?

La question importante c’est bien la division eninstituts et l’éventuelle partition de chacun desInstituts en un nombre limité de « domainesstructurants ». En effet, la création des institutsmet en place des entités qu’il sera plus facile,par la suite, de retrancher du CNRS ou, aucontraire, de privilégier dans la distribution desmoyens. Par ailleurs, l’organisation en institutsôte au CNRS de sa cohésion et tend à lui confé-rer plutôt un rôle d’agence de moyens qued’opérateur de recherches tout en faisant peserune menace évidente sur l’interdisciplinaritéqui est un des socles de l’organisme et une deses raisons d’être. Enfin, les fameux « domainesstructurants » doivent être choisis dans latransparence après un débat entre scientifiqueset non imposé du haut par le pouvoir politique :le pilotage de la recherche publique ne peutrelever des seules décisions gouvernemen-tales. Ce qui est en jeu ici c’est donc bien nonseulement un démembrement du CNRS maisune modification radicale de l’ensemble de lapolitique de recherche publique.

Plus précisément, quel impact cette réformeaura-t-elle sur la recherche en scienceshumaines et sociales (SHS) ?

Sur ce point, il est bien difficile de faireconfiance aux assurances du ministère quant àl’égalité de traitement entre les disciplines, sur-tout au vu de ce qui s’est passé ces dernièressemaines : je pense notamment à l’expositionde la tripartition des SHS par une petiteannonce « offre d’emploi » (destinée à recruterle futur directeur scientifique des SHS) du jour-nal Le Monde à la fin du mois d’août 2008 : lesSHS seraient ainsi divisées en trois « domainesstructurants » intitulés respectivement« Homme, société et environnement » (fourre-tout allant de la sociologie ou des sciences poli-tiques au développement durable), « Culture etsociétés dans l’histoire » (soit les derniers desMohicans, travaillant sur des sujet peu rentables car trop « historiques ») et enfin« Comportement et cognition » (le seul domainequi apparemment tienne à cœur aux personnesqui nous gouvernent). Cette organisation, déjàévoquée de façon unilatérale en juin dernier etalors fort mal reçue par la communauté deschercheurs, devait être un des objets de lanégociation prévue à la rentrée et voilà qu’ellenous est imposée. Je ne dirai rien du limogeagebrutal début septembre de la directrice scienti-fique des SHS, dont il est pourtant difficile dedire qu’elle s’était opposée farouchement à laréforme en cours. Mais sans doute n’allait-elleencore pas assez loin pour le ministère et ladirection du CNRS, voire - dit-on – pour

l’Elysée… A terme, l’objectif pourrait bien êtrela réduction, voire la disparition, des SHS ausein du CNRS avec une diminution massive dunombre d’Unités Mixtes de Recherche (UMR) etun reversement de la recherche en SHS dansles seules universités.

Avec un tel projet, des pans entiers de larecherche publique en SHS seront purement etsimplement sacrifiés, notamment tous ceux quin’ont pas de rentabilité sociale ou économiqueimmédiate et/ou qui nécessitent des cher-cheurs à temps plein dans des domaines« pointus » ne correspondant pas à des disci-plines enseignées à l’université. Je termineraisur une donnée édifiante : à l’heure actuelle 45 % des chercheurs en SHS au CNRS ont plusde 55 ans : du même coup, s’il y avait une seulechose à faire non pas pour développer larecherche publique en SHS au CNRS mais toutsimplement pour qu’elle ne meure pas ce seraitde lancer un plan massif de recrutement dejeunes chercheurs. Nous n’en prenons pas lechemin.

Le CNRS a-t-il besoin d'être réformé selonvous ? Que proposez-vous ?

Il est indéniable que le fonctionnement duCNRS pourrait être meilleur et plus fluide. Il estaussi probable que des blocages bureaucra-tiques constituent des handicaps sérieux audéveloppement harmonieux de la recherchepublique en France. Il n’est pas faux de pointerparfois le saupoudrage des moyens et leursinégalités injustifiées entre les différentes sec-

tions, l’opacité qui en résulte, l’absence devolontarisme qui conduit à la concentration destrois quarts des personnels permanents duCNRS en Ile-de-France. Mais quels que puis-sent être tous ces symptômes d’une situationinsatisfaisante on ne peut réformer un grandorganisme comme celui-ci que dans la concer-tation. Le pire serait de céder à la tentation dela table rase ou à des solutions simplistes quisouvent empilent de nouvelles bureaucratiessur les anciennes (nous sommes en train d’enfaire la triste expérience avec l’AERES et l’ANR).Règlera-t-on ces questions en faisant éclater leCNRS en une multitude d’établissements sansliens véritables entre eux, en renonçant auxfécondes collaborations entre universités etgrands organismes par le biais des UMR, enécartant les ponts et croisements entre des dis-ciplines qui ne sont qu’apparemment hétéro-gènes ? Pour ma part, je ne le crois pas.

Alain TRAUTMANNDirecteur de recherches CNRS àl'Institut Cochin (Paris)

La réforme du CNRS, ou « plan stratégique »,prévoit qu'il soit réorganisé par disciplines, en le divisant en instituts. Que pensez-vous decette réforme ?

La réforme du CNRS est présentée par le gou-vernement comme une nécessité technique,pour moderniser le CNRS. La réalité est toute

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VOIX CROISEES

autre, et ne peut être comprise que dans lecontexte actuel, celui de « l'économie de laconnaissance » . Au-delà des interprétationshabituelles, cette dernière signifie brutalementque la recherche et l'enseignement supérieurdevraient désormais être au service de l'écono-mie, et que le gouvernement devrait avoir lesoutils nécessaires pour orienter et piloter dansle détail ce type d'activité, décider quel type derecherche doit être financé ou arrêté. C'est unchangement de paradigme majeur : la décisionde financer des recherches ne serait plus baséesur la qualité de la recherche, évaluée par desscientifiques, mais avant tout sur son utilitépotentielle, évaluée par l'administration. Cechangement implique une réduction drastiquede l'autonomie et de la liberté des chercheurs.Une structure comme le CNRS était particulière-ment favorable à cette autonomie et cetteliberté. Le CNRS n'est donc plus compatibleavec ce nouveau paradigme. La découpe duCNRS en instituts n'est pas une simple restruc-turation. C'est le début de la fin du CNRS. Laréforme du CNRS vient compléter un dispositifbasé sur une agence de financement (ANR) etd'évaluation (AERES), toutes deux étroitementcontrôlées par le ministère.

Plus précisément, quel impact cette réformeaura-t-elle sur la recherche en sciences duvivant ?

Ce qui importe n'est pas tel ou tel découpage,mais l'esprit qui y préside, celui de l'utilité/ren-tabilité avant tout. En l'occurrence, pour lessciences du vivant, cela signifiera un affaiblisse-

ment de la recherche fondamentale en faveurdes applications biomédicales. La dominationdu biomédical est déjà à l'œuvre dans la nou-velle définition des programmes de l'ANR ainsique dans la restructuration de l'Inserm enInstituts biomédicaux chargés de coordonnerl'ensemble de la recherche en biologie du pays(coiffant donc le CNRS).

Le CNRS a-t-il besoin d'être réformé selon vous ?Que proposez-vous ?

Comme bien d'autres, je pense que les réformesdont le CNRS a besoin ne sont pas des réformesde structure, mais des réformes dans ses modesde fonctionnement. L'activité de recherche estde plus en plus plombée par des demandescroissantes de l'administration (que ce soit duCNRS, du ministère ou de l'Europe), et par la len-teur de cette administration (particulièrementvrai pour le CNRS). Je considère que la restruc-turation du CNRS est inutile, et que les mesuresqui l'accompagnent (réduction du budget duCNRS, réduction du nombre de postes statu-taires avec augmentation concomitante despostes précaires) sont exactement le contrairede ce dont nous aurions besoin.

Jean-Louis Fournel

Alain Trautmann

Page 24: Dossier - Lutin Userlabmettre la technologie au service des per-sonnes en situations de handicap. Pour les personnes aveugles, les membres de THIM étudient notamment les technolo-gies

Marie-Claire Ropars-Willeumier(dir.)L’Art sans sujetCe volume, dans la tradition de lacollection « Esthétiques hors cadre »,interroge de manière innovante et audacieuse cette notion fondamentale qu'est le sujet dansl'art. Est-il une instance utile, indispensable, qui éclairerait tousles processus artistiques ? Peut-on, au contraire, en faire abstraction lorsqu'il s'agit d'appréhender l'œuvre et son créateur ? Chacun à leur manière, et en croisantles approches philosophique, littéraire et esthétique, les auteurs mettent à l’épreuvecette idée d’un art sans sujet.Format : 137 x 220 mm,176 pages. Prix : 20 €

Odile Redon Des forêts et des âmes. Espace etsociété dans la Toscane médiévaleÉtudes rassemblées par LaurenceMoulinier-BrogiCe recueil d’études rassemble la pensée et la passion portées parOdile Redon tout au long de sa vie à la Toscane médiévale. Odile Redon n’a cessé d’arpenterl’espace toscan, de l’investir et del’étudier, - espace qui l’a consacréecomme l’historienne d’une ville,Sienne -.N’oubliant jamais qu’elleétait aussi géographe, elle s’est attachée à l’histoire physique d’unterritoire, comme à l’histoire économique, sociale et spirituelle des individus qui la peuplaient. La forêt était l’équivalent occidentaldu désert pour les âmes en quête de solitude, et ces “déserts” qui entouraient Sienne au Moyen Âgeétaient, comme ailleurs en Europe,paradoxalement peuplés d’ermites(tel Guillaume de Maleval, étudiédurant de longues années par l’auteur). Format : 137 x 220 mm,304 pages. Prix : 25 €

Marie-France Auzépy et Joël Cornette (dir.) Des images dans l’histoire Face à la rareté des travaux universitaires spécifiquementconsacrés à l’image, les auteurs de ce livre s’interrogent sur l’image commesource à part entière, archive susceptible d’analyse, porteuse de sens au même titre qu’un document écrit.L’étude menée ici est comparatiste, ouverte dans l’espace (Arménie, France, Pays-Bas, Espagne,Amérique, Turquie) et dans le temps (Moyen-Âge,Renaissance, Les Lumières).Format : 137 x 220 mm,304 pages. Prix : 27 €

Jacques Siracusa Vacances sociologiquesLes analyses sociologiques de l’université portent rarement sur l’activité de l’enseignant sociologue. L’auteur, maître deconférences depuis une dizained’années, décrit ici son apprentissage du métier et sesconditions de travail. Il s’intéresseensuite aux manières d’évaluer et de s’exprimer dans la discipline.Interrogeant l’absence de standards de correction, les pratiques coutumières, la valorisation de moyens d’expression acquis, scolaires et inappropriés, il pointe et critique des vacances de l'enseignement sociologique.À partir de son expérience, en exposant ses réponses ou seséchecs, l'auteur, parle de difficultés rarement renduespubliques.Format : 137 x 220 mm,232 pages. Prix : 20 €

Le partage des savoirs : Les Presses Universitaires de Vincennes