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Discours de Madame la Ministre déléguée à la famille

Assemblée générale de l’Unaf – Toulon – samedi 23 juin 2012

 

(Seul le prononcé fait foi)

Monsieur le Président de l’UNAF,

Madame la députée,

Monsieur le préfet,

Mesdames et Messieurs les élus,

Mesdames et Messieurs les présidents des UDAF,

Mesdames, Messieurs,

Je suis particulièrement heureuse d’être parmi vous aujourd’hui à l’occasion de

cette Assemblée générale de l’Union Nationale des Associations Familiales qui représente

depuis plus de soixante ans les intérêts des familles et qui développe des services essentiels,

au quotidien pour elles et avec elles.

70 mouvements familiaux, 8000 associations, 700 000 familles : on mesure à l’énoncé de ces

chiffres l’importance de votre mouvement. On mesure aussi l’intensité de la mobilisation des

milliers de bénévoles qui l’animent et auxquels je tiens tout particulièrement à rendre

hommage aujourd’hui. Cet engagement désintéressé se traduit chaque jour par

d’innombrables attentions et actions au service des autres. Cette assemblée générale est aussi

l’occasion de célébrer cet investissement.

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Cette assemblée générale, c’est aussi le moment qui m’est donné de vous livrer la vision, la

volonté et la méthode que je mettrai au service des engagements que le Président de la

République et le Premier Ministre ont pris devant les Français pour les familles.

Ils ne peuvent être présents ce matin parmi vous mais comme le rappelait François Hollande

mercredi lors du dernier Conseil des Ministres, le travail du gouvernement se fait à partir des

orientations qu’il a lui-même présentées aux Français et c’est donc au nom de ces orientations

que j’ai le plaisir de m’exprimer devant vous, dans la continuité du message que Marisol

Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé, vous a adressé il y a quelques instants.

Pour comprendre le sens de ces engagements pris par le Président de la République, regardons

tout d’abord la société telle qu’elle est :

Aujourd’hui, en 2012, force est de constater qu’il existe aujourd’hui de multiples façons de

faire famille. Plus d’un enfant sur deux naît aujourd’hui hors mariage. Un enfant sur quatre ne

vit plus avec ses deux parents. Un enfant sur cinq vit dans une famille monoparentale. Un

enfant sur neuf vit dans une famille recomposée.

Telle est la réalité des familles. Je prendrai en compte la diversité de leurs situations.

J’entendrai la diversité de leurs aspirations. Je serai la Ministre de toutes les familles.

Il y a trente ans déjà, en 1981, devant vous, le Président de la République d’alors François

Mitterrand faisait le constat qu’il « n’est pas possible de parler de la famille comme d’une

entité homogène. Les changements sociaux et culturels, disait-il, ont été réalisés au sein de la

famille, ils ont été acceptés parce que la famille, loin d’être une institution figée dans des

structures immuables est un facteur d’adaptation au changement, le lieu où le changement

social s’opère le plus naturellement. »

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Cette diversité de « faire famille » est bien la preuve qu’il n’y a pas de déclin de la valeur

famille car elle demeure ce lien entre les générations à partir duquel les autres liens se

forment. Elle joue même à cet égard un rôle plus grand que jamais du fait de la prolongation

de la vie humaine.

Alors que les Français sont parmi les Européens les plus inquiets pour leur avenir et celui de

leur pays, ils sont les plus enclins -et de loin- à envisager un projet familial. Et bien que

nombre de nos concitoyens expriment leur défiance à l’égard de nos principales institutions

(l’Etat, la Justice, voire l’Ecole), la Famille reste un lieu de confiance dans une société de

défiance.

Une étude récente démontre que c’est aujourd’hui le cercle familial qui donne le plus de

satisfaction à nos concitoyens. Plus de quatre Français sur cinq estiment aujourd’hui que les

relations au sein des familles sont bonnes.

La famille n’est donc pas une valeur délaissée ou une institution menacée. Simplement, sont

de plus en plus nombreux nos concitoyens qui font et veulent faire famille d’une nouvelle

manière. Cela ne fait que confirmer ce que Philippe Ariès dans un très bel ouvrage sur

l’enfant et la vie familiale sous l’Ancien Régime écrivait : « Toute l’évolution de nos mœurs

contemporaines est incompréhensible si on néglige cette prodigieuse excroissance du

sentiment familial. Ce n’est pas l’individualisme qui a gagné, c’est la famille. »

Il est donc normal que le Président de la République ait pris des engagements forts pour les

familles, des engagements qui s’inscrivent dans un contexte de crise, d’une crise qui fragilise

nombre de nos concitoyens.

Le Président s’y est engagé : pas un euro ne sera ôté à la politique familiale. Comme il a eu

l’occasion de vous le réaffirmer dans le courrier qu’il vous a adressé avant même son élection,

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le principe de l’universalité des allocations familiales sera préservé car «elles constituent un

moyen d’élargir la reconnaissance nationale à toute la diversité des formes familiales. »

Dès les premières semaines de l’action de ce gouvernement, comme l’a rappelé à l’instant

Marisol Touraine, nous avons tenu l’engagement du Président d’augmenter l’allocation de

rentrée scolaire de 25 %. C’est une mesure de pouvoir d’achat, de justice sociale et

d’éducation qui traduit notre volonté de soutenir toutes les familles tout en portant une

attention particulière à celles qui sont les plus vulnérables afin de leur donner les moyens de

bien éduquer leurs enfants. C’est rester fidèle au principe que Jacques Delors nous invitait à

suivre : « La société doit apporter plus aux enfants auxquelles les familles peuvent apporter

moins. ». La charge de cette mesure pour la branche famille sera intégralement compensée.

Elle aura pour contrepartie un abaissement du plafond de l’avantage fiscal tiré du quotient

familial, qui fera contribuer les 5 % de ménages les plus aisés.

Nous avons tenu un autre engagement en rétablissant la possibilité de partir à la retraite dès 60

ans pour les personnes qui ont commencé à travailler à 18 ou 19 ans et qui ont suffisamment

cotisé. Et pour l’application de cette mesure, les mères de trois enfants ou plus pourront

valider deux trimestres d’assurance supplémentaires au titre de la maternité, en plus des

trimestres dont elles bénéficiaient déjà pour leurs deux premiers enfants.

Tout cela témoigne qu’une politique familiale se fonde à la fois sur l’idée de la permanence

d’une organisation familiale qui a traversé les siècles et les sociétés, mais aussi sur les

évolutions qui caractérisent cette structure familiale.

La maîtrise des naissances, l’accroissement du nombre de femmes exerçant un métier, font

partie intégrante désormais d’un nouveau modèle de familles qui témoigne bien que la famille

est une institution qui ne reste pas figée dans des structures immuables.

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De la même façon, une politique familiale se fonde également sur la reconnaissance que des

inégalités importantes subsistent entre les familles, inégalités de revenus, inégalités

géographiques, qu’il nous faut absolument corriger.

Et je redirais de la même façon que François Mitterrand : « Il n’y a pas de modèle familial,

chacun invente le sien, chacun doit pouvoir choisir. Mais c’est une responsabilité nationale

que d’assurer les conditions de ce choix. »

Trois axes vont structurer la politique que je compte mener.

Je les ai déterminés aussi au regard de l’expérience que j’ai acquise comme élue locale. En

exerçant la responsabilité de maire, j’ai été confrontée aux problèmes d’accueil des jeunes

enfants, d’exercice de la parentalité et aussi à la nécessité d’y apporter des réponses concrètes.

Je sais donc l’importance des territoires. Forte des engagements présidentiels, forte des

rencontres multiples et diverses avec l’ensemble des institutions et des associations

concernées par la politique familiale, forte de mon expérience, je souhaite vous présenter ces

trois axes :

- Assurer l’égalité entre les familles.

- Garantir l’accomplissement des missions de service public à l’enfance et à la famille ;

- Et un troisième axe, agir toujours en direction des familles vulnérables.

I- Assurer l’égalité entre toutes les familles

Nous parlions à l’instant des engagements du Président de la République, il en est un qui vise

à reconnaître les familles dans leur grande diversité : ouvrir le mariage et l’adoption à tous les

couples.

C’est une mesure d’égalité, ce seront les mêmes droits, mais également les mêmes devoirs,

pour tous.

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Mêmes droits et mêmes devoirs pour tous. Même responsabilité pour chacun, celle de

s’engager. S’engager vis-à-vis de l’autre, quand on choisit de s’unir par la loi. S’engager vis-

à-vis de ses enfants, quand on devient parent. S’engager à respecter leur droit d’être élevé

dans de bonnes conditions, de recevoir de l’amour, mais aussi des repères.

C’est une exigence individuelle légitime.

Cette mesure nous concerne tous, parce qu’elle s’inscrit dans une réflexion plus large, qui

concerne la diversité des modèles familiaux d’aujourd’hui. Je vous disais en débutant mon

propos qu’un enfant sur neuf vit dans une famille recomposée, et vous savez bien que cela

met en lumière la question des liens qui peuvent se nouer entre un enfant et un adulte exerçant

auprès de lui un rôle parental.

Pourquoi ne pas penser avec harmonie les liens qui unissent l’enfant et les adultes qui

l’élèvent ?

Il y a sur ces questions des visions différentes. Toutes doivent pouvoir s’exprimer et se

répondre dans le respect, et j’y veillerai.

J’écouterai, je discuterai, je débattrai, et avec le gouvernement, je souhaite accorder aux

familles les nécessaires libertés et maintenir, et faire comprendre, les règles qui protègent, qui

ordonnent notre vivre ensemble.

Je citerai à nouveau François Mitterrand, lui-même très attaché à la famille, aux valeurs

familiales, à sa propre famille : « Dans nos familles et dans vos familles, il faut déjà

développer cette conception que chacun doit-être lui-même sans dominer les autres. ». A

chacun d’entre nous de le penser et de le vivre.

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La politique familiale, c’est aussi assurer l’accomplissement, pour l’enfance et la famille, des

missions de service public répondant à leurs besoins. C’est le second axe dont j’aimerais vous

parler.

II- Les missions de service public à l’enfance et à la famille

La première de ces missions est d’offrir aux parents des solutions d’accueil pour leurs enfants,

qu’elles soient individuelles ou collectives. Il convient de rechercher la meilleure adéquation

entre la demande et l’offre de structures. Comme il s’agit de répondre au plus près des

demandes, les solutions peuvent et doivent même être diverses selon les territoires. L’Etat doit

en revanche rester garant que la diversité ne devienne pas disparité. Sur cette question de la

diversité et des disparités territoriales, je vais saisir de façon imminente le Haut Conseil de la

famille, dont le mandat vient d’être prolongé afin qu’il puisse continuer de jouer dans les

meilleures conditions son rôle de réflexion et de concertation.

Je ne peux m’empêcher de rappeler que ces cinq dernières années, l’effort sur l’accueil de la

petite enfance a vu ses fruits gaspillés par le recul de la scolarisation des enfants de 2 à 3 ans.

Parmi les engagements que le Président de la République a pris en faveur de l’école, il y a

celui de revenir sur cette évolution. Et si cela ne pourra se faire que dans la durée, désormais

accueil de la petite enfance et scolarisation seront toujours pensés en étroite articulation.

La politique d’accueil de l’enfance répond à une double exigence. D’une part, permettre aux

parents de continuer à exercer une activité professionnelle ; d’autre part, donner à tous les

enfants, dès le plus jeune âge, les mêmes opportunités de réussite. C’est ce qu’exprime Gosta

Esping-Andersen lorsqu’il affirme que « l’inégalité s’enracine dans la petite enfance » et que

« plus on consacre de moyens à la prise en charge des jeunes enfants, plus on réduit les

risques sociaux au fil du temps. »

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Une autre mission que je souhaite mettre en avant : l’accompagnement de tous les parents

dans l’éducation et l’épanouissement de leurs enfants. Si « devenir » parent constitue un des

évènements les plus heureux qui puisse arriver dans une vie, « être » parent devient de plus en

plus difficile. Les ressources matérielles ne sont pas les seules ressources que les parents sont

en droit d’attendre. Il nous faudra développer et inventer, avec eux, des réponses à des

questions devenues quotidiennes afin de trouver le juste équilibre entre écoute et autorité. On

parle même aujourd’hui de dispositif « reparentalisation » pour les familles en plein désarroi.

C’est le moyen d’en finir avec un discours de culpabilisation.

Accompagner les parents c’est aussi améliorer les conditions dans lesquelles ils peuvent

consacrer une partie de leur temps à l’éducation de leurs enfants. Pourquoi ne pas réfléchir à

un congé parental mieux réparti qui leur permettra de partager tout à la fois la responsabilité

et la joie de l’accueil de l’enfant, mais également les mêmes chances de développement

professionnel.

Les missions que la collectivité doit assurer pour l’enfance et pour les familles sont

naturellement plus nombreuses encore – je pense notamment à la protection des enfants ou

des majeurs sous tutelle ou curatelle. Pour l’accomplissement de toutes – et ce sera le

troisième axe de mon action – une attention particulière sera toujours portée aux familles les

plus fragiles.

III- L’attention aux familles les plus fragiles

Vous savez combien les familles monoparentales occupent malheureusement une place

importante parmi ces familles les plus fragiles. C’est pour elles qu’il est plus particulièrement

important de faciliter l’accès aux modes d’accueil, d’améliorer les conditions de logement, de

garantir le versement des pensions alimentaires, de rompre l’isolement, car vivre seul dans la

société ne doit pas vouloir dire vivre isolé.

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Le récent rapport de l’UNICEF a rappelé que plus d’un enfant sur dix reste aujourd’hui privé,

en France, d’un ou plusieurs des éléments de ce qu’on pourrait pourtant regarder comme

l’essentiel – alimentation équilibrée, espace pour le travail scolaire, accès aux loisirs … . Il

souligne aussi que l’effort financier de la collectivité, si indispensable qu’il soit, n’est

pleinement efficace qu’avec le développement de services adaptés aux besoins des plus

fragiles. J’ai pu apprécier, lors de mon premier déplacement en tant que ministre, dans une

caisse d’allocations familiales, comme il est important d’assurer à la fois le service des

prestations et l’accompagnement social personnalisé.

***

Fidèle à la méthode définie par le Premier ministre, j’entends avancer sur tous ces sujets dans

l’écoute et la concertation. Le cadre de cette concertation peut être institutionnel – j’ai rappelé

l’importance que j’accorde aux travaux du Haut Conseil de la famille. Nous avons aussi

devant nous l’important rendez-vous de la négociation de la convention d’objectifs et de

gestion de la branche famille. Par-delà ce cadre institutionnel, j’irai à la rencontre de vos

associations dans les territoires, et la porte de mon ministère leur sera toujours ouverte. Au

service d’une ambition partagée pour les familles de notre pays, je compte sur vos

expériences, votre expertise, vos propositions.

Je vous remercie.