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Département Universitaire des Soins Infirmiers UE 2.3 S2 Santé, Maladie, handicap, accident de la vie Anthropologie de la Douleur, souffrance, chronicité A. DUMOND Professeur d’anthropologie médicale

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Département Universitaire des Soins Infirmiers UE 2.3 S2 Santé, Maladie, handicap, accident de la vie. Anthropologie de la Douleur, souffrance, chronicité A. DUMOND Professeur d ’ anthropologie médicale. Visionnage. - PowerPoint PPT Presentation

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Page 1: Anthropologie de la Douleur, souffrance, chronicité A. DUMOND Professeur d ’ anthropologie médicale

Département Universitaire des Soins Infirmiers UE 2.3 S2Santé, Maladie, handicap, accident de la vie

Anthropologie de laDouleur, souffrance, chronicité

A. DUMONDProfesseur d’anthropologie médicale

Page 2: Anthropologie de la Douleur, souffrance, chronicité A. DUMOND Professeur d ’ anthropologie médicale

Visionnage

« Ma douleur est une araignée »:La souffrance chez les enfants hospitalisés de Baudouin Koenig et Brigitte Rousseau2003, (50min)•La douleur, mot effrayant, inacceptable, surtout chez un enfant. Pour Sophie, elle a un nom, celui de sa maladie, qu'elle représente comme une bête répugnante, une grosse araignée. Cela fait trois ans qu'elles vivent ensemble, trois longues années surtout quand on a huit ans. •A cet âge, les petites filles jouent à la poupée, rêvent de princesses. Sophie, elle, rêve d'être comme les autres enfants, d'avoir une vie normale, de pouvoir courir. La douleur, c'est aussi celle de Quentin qui rentre à l'hôpital pour une intervention. •La rencontre de ces enfants est une confrontation avec la douleur, caméléon tantôt sournois, insidieux, tantôt plus franc et contre laquelle des soignants ont décidé de lutter.

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• « La douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à une lésion tissulaire existante ou potentielle ou décrite en terme d’une telle lésion ».

• biopsychosociale

• La douleur aigüe• Perception qui semble appartenir au règne animal. Elle possède donc

une raison d'être: la « douleur-signal ». Utile pour l’organisme, elle est liée à une seule cause elle constitue un symptôme de cette maladie, traitement étiologique (cause) et curatif qui permettra la disparition de cette douleur.

• La douleur chronique • (3 à 6 mois), douleur inutile, destructrice elle n’est pas un symptôme,

elle est plurifactorielle, une douleur-maladie. Le traitement est compliqué, stratégie plurimodale, frustration du patient face à ce discours médical qui ne lui propose pas de traitement efficace. Douleur chronique rebelle: un catastrophisme (projection négative dans l’avenir), isolement social et familial.

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• A. Daudet dans son journal parlait d’une « douleur qui se glisse partout, dans ma vision, mes sensations, mes jugements ; c’est une infiltration », car la douleur brouille les repères personnels et sociaux. Cette douleur change la personnalité et parfois l’identité de l’individu.

• La souffrance

• Les réactions engendrées par la douleur correspondent à la notion de souffrance. C’est l’association à la fois des phénomènes physiques, moraux et psychologiques mettant en jeu tous les mécanismes affectifs, intellectuels et instinctifs.

• Degré de pénibilité de la douleur vécue..

• La souffrance varie beaucoup d’un individu à l’autre, elle dépend du contexte ou de la signification de la douleur. Elle introduit d’emblée l’importance du dialogue et de l’attitude.

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La douleur et la communication

• Définir sa douleur

• La douleur est subjective et individuelle. La douleur est à ce point indicible que le malade a du mal à la décrire.

• Le professionnel de santé et l’entourage tentent de cerner la douleur et son ressenti.

• La qualité de la douleur: serrement, élancement, serrement, brûlure, fourmillement, torsion…

• La durée: continue, ou brève intermittente• L’intensité: faible, moyenne, forte, très forte• La localisation: ventre, main droite• La douleur spontanée, ou provoquée• Le type de douleur: la douleur inflammatoire (la nuit ou matin),

la douleur mécanique (effort), la douleur neuropathique (chronique).

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• Gestion de la douleur

• Dans certaines circonstances, l’individu veut maîtriser l’information sur son état.

• La gestion du secret fait partie intégrante de l’expérience douloureuse pour de nombreux individus.

• Selon les circonstances et les interlocuteurs, l’individu souffrant connaît une modulation de sa douleur.

• La plainte

• La plainte traduit une demande de soins, de délivrance, de consolation. La plainte, dans l’expérience de l’hôpital où le sujet est séparé de sa famille et de ses proches, est un moyen pour lui de rompre l’isolement, d’instaurer un lien avec l’autre.

• La sonnette est un lien entre la chambre souvent synonyme de solitude et l’extérieur. Ne pas répondre à une plainte est de la négligence, le début d’une maltraitance.

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• Toutes les sociétés humaines intègrent la douleur dans leur vision du monde en lui conférant un sens, voir une valeur, qui en désamorce la nudité et souvent même l’acuité.

• Elles l’inscrivent au sein de réseaux de causalités visant à expliquer son origine et surtout elles se donnent les moyens symboliques et pratiques de la combattre avec les médecines particulières que chacune élabore.

• Les professionnels de santé et les soignés ne sont pas de la même culture : expression différente, savoir les décrypter

• « Ce ne sont pas seulement les malades qui intègrent leur douleur dans leur vision du monde, mais également les médecins et les infirmières qui projettent leurs valeurs, et souvent leurs préjugés, sur ce que vivent les patients dont ils ont la charge. »

• (LE BRETON D., 1995, p.136).

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• «Tu enfanteras dans la douleur.»

• C'est ce verset de la Genèse que l'on opposa au Dr James Young Simpson, d'Edimbourg, lorsqu'il effectua, le 8 novembre 1847, le premier accouchement sous anesthésie au chloroforme.

• Il répondit à ses détracteurs par cette autre citation biblique concernant la création d'Eve:

• «Dieu, voulant donner une compagne à Adam, fait tomber sur lui le sommeil pour lui prendre une côte et refermer la chair.»

• Simpson, non sans humour, en déduisait que Dieu avait été le premier anesthésiste.

• Les vertus de la douleur rédemptrice ont si bien imprégné notre inconscient collectif que cette croyance s'est inscrite durablement dans notre culture laïque.

La douleur et la religion

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• Profondément marquée par son héritage religieux (chrétien), la France a longtemps cru à la composante rédemptrice de la douleur.

• « Il faut savoir souffrir pour devenir un homme, mon fils » • Pour tous, la souffrance était alors perçue comme une épreuve

qui rend plus fort, qui virilise ou, a contrario, qui féminise : • « il faut souffrir pour être belle ». • Une expérience utile et nécessaire de toute vie humaine, une

valeur maturante.

• Il faudra attendre 1996, puis 1998, le Code de la santé publique a alors imposé aux établissements de santé, publics et privés, de mettre en œuvre les moyens propres à prendre en charge la douleur des malades.

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Expression de la douleur

• La relation entre douleur et culture n’est pas linéaire, car bien que la douleur et la culture soient universelles, la douleur réelle de l’autre, si proche soit-il, reste une expérience indivisible ; « le visage » de chaque douleur est personnel même si son expression est culturelle.

• Expression physique et organique

• Les expressions verbales et comportementales sont extrêmement variables, allant de l’absence de plainte à une grande démonstration.

• L’expression comportementale: hyperactivité du patient alors que douleur présente, modification des relations à l’environnement (incompréhension familiale), victime non reconnue.

• - la somatisation

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• Expression temporelle et psychologique

• Au cours du temps et en fonction des circonstances, le seuil de perception de la douleur peut changer pour une même personne. (influence de la fatigue, attention et diversion de l’attention)

• Phénomène d’anticipation de la douleur (chez le dentiste sur le fauteuil la douleur est déjà là, la mémoire de la douleur).

• L'historicité de la douleur: les événements de vie traversées par le sujet et ses proches (maladies, accidents et interventions chirurgicales) influence les nouveaux phénomènes douloureux. (appréhension du à l’expérience, multiplication des soins douloureux).

• La durée du phénomène douloureux influence nos réactions.

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« La douleur aux âges extrêmes de la vie reste insuffisamment reconnue et

traitée »

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Donner un sens à sa douleur

• Quand un patient trouve (donne) une signification à sa douleur, il recouvre le respect de soi et s'améliore, c’est un premier pas vers la guérison.

• En réorganisant sa souffrance, son expérience devient objective, et en même temps la gestion de sa vie s'améliore.

• Rattacher la souffrance à sa conduite est une tentation que l’on retrouve dans toutes lescultures. Face à la douleur ressentie tous les malades souffrent, mais on doit tenir compte du vécu du malade et de la signification culturelle des manifestations observées.

• Chez certains elle est méritée et la conséquence de fautes passées, la punition. Parfois c’est le sentiment d’injustice qu’éprouvent les malades qui prédomine ou c’est alors du plaisir ou un prix à payer pour faire partie d’une caste ou un groupe.

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La douleur dépend du contexte

• L’homme réagit à la lésion plus pour ce qu’elle représente que pour la douleur qu’elle provoque. (les conséquences).

• La douleur du soldat blessé au champ d’honneur et celle de l’ouvrier blessé à l’usine ou encore celle du prisonnier d’opinion qu’on torture, à intensité égale ne sont pas comparables.

• L’ambiance, la tonalité d’un lieu joue aussi un rôle dans la manière dont le malade assume sa condition. La nuit est un moment où la douleur est particulièrement sensible, aiguisée par la solitude et la peur, par l’effacement des repères et l’agitation familière du jour.

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Le syndrome méditerranéen

• Il serait une sorte de fourre-tout à partir de toute une série de signes extérieurs "exotiques", folkloriques dont les soignants ne comprennent pas la cohérence. (une incompréhension culturelle).

• Un syndrome basé sur des préjugés.

• Un syndrome qui peut entraîner une mauvaise prise en charge de la douleur.

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L’effet placebo

• L’effet placebo (je plairai : séduction) est un effet subjectif, mais réel, produit sur une personne par un médicament ou un acte n’ayant pas d’efficacité démontrée mais provoquant la sécrétion de substances appelées endorphines, qui soulagent la douleur et divers autres symptômes.

• Pouvoir de l’imagination, de l’espoir et de la confiance. Avoir confiance ce qui implique une relation et avoir de l’espoir que cette relation va arranger les choses a une influence sur l’esprit qui exerce à son tour sur le corps. La notion de care : soigner et attacher de l’importance à la personne, indépendamment des traitement le cure.

• Même les médicaments efficaces sont doués d’effet placebo ! (aspirine lors d’un mal de crâne, si l’effet intervient au bout de dix minutes)

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• Quand un parent pose un baiser sur le « bobo » d’un enfant, si l’enfant cesse vite de pleurer, c’est un effet placebo.

• Dans l’effet placebo, il y a la notion de croyance en une illusion, ainsi cela pose la question faut-il mentir au patient pour son bien?

• Le premier médicament du médecin, c’est le médecin lui-même. Dans toute relation thérapeutique, le respect mutuel et la confiance que s’accordent soignant et patient se concrétise par un fort effet placebo.

• L’effet placebo peut être inversé : si le médecin suggère à son patient qu’un médicament peut le rendre malade, celui-ci éprouvera des effets désagréables: c’est ce qu’on appelle un effet nocebo.

• Une bonne communication, se préparer à la douleur et travailler dessus réduit certaine douleur. Une étude montre la douleur postopératoire se réduit chez les enfants quand les parents sont bien informés.

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Douleur et identité

• Recherche d’une identité

• La douleur peut parfois prendre une valeur identitaire, accordant au sujet un statut, une reconnaissance, une légitimité pour se défaire de responsabilités qui lui pèsent.

• Ainsi, un mal être peut être traduit par une douleur afin que la réponse soit plus présente. « je souffre donc je suis ». Le pain-prone patients ne sont jamais vraiment soulagés.

• Se retrouve chez certains détenus, chez certaines personnes âgées.

• Marquer un mal être• Le « besoin de traumatisme » chez les adolescents en voie de

construction de leur identité, la douleur cristallise dans la chair le mal être.

• Jouer avec la douleur contre la souffrance de la vie, avec la scarification chez certains adolescents.

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• La douleur comme nouvelle définition du corps

• Les membres fantômes: sentir une douleur dans un membre qui a été amputé.

• Le rejet de son corps non accepté par la société: malgré une lésion importante ne pas ressentir de douleur.

• La douleur pare feu

• La douleur peut protéger l’individu de contenus inconscients qui le détruiraient s’il venaient à jour de manière impromptus, elle fixe des affects permettant le maintien du sentiment d’identité (comme la folie, grande tristesse, à petite échelle la somatisation). Loin d’être destructive ou annonciatrice de lésion, elle assure une fonction de sauvegarde de l’individu.

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• La douleur comme définition de soi

• l’hypocondriaque : il se plaint de maux insidieux qui lui assurent une identité provisoire. Le médecin est consulté pour valider la plainte, mais la déception face aux soins reçus est nécessaire à la pérennité du  processus. Son corps ne vit que pour souffrir, il n’est soudé que par la douleur.

• Le masochiste : est en quête d’une jouissance sollicitant paradoxalement la mise en danger de l’intégrité physique. « Les sensations de la douleur, comme d’autres sensations de déplaisir, débordent sur le domaine de l’excitation sexuelle et provoque un état de plaisir » Freud ; ceci n’empêche pas le masochiste hors des lieux de son fantasme de souffrir comme tout le monde.

• L’asymbolie à la douleur : certaines personnes ne ressentent pas la douleur, malgré son existence. Ceci se passe souvent après un traumatisme crânien.

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La douleur infligée

• La douleur dans le rite de passage ou l’initiation

• La douleur accompagne les rites initiatiques de nombreuses sociétés, elle est une mémoire chevillée d’autant plus dans la chair qu’une marque signe désormais l’apparence physique de l’initié : circoncision, excision….

• La douleur est l’encre de la loi commune écrite sur le corps de l’initié.

• La douleur dans l’éducation

• Infliger la douleur pour punir d’une incartade, d’une infraction ou imposer un ordre, est de longue date un principe d’intimidation et de pouvoir, une manière de prise sur l’autre à proportion de son impuissance à se défendre.

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Conclusion

• Il semble extrêmement difficile de donner une définition exacte de la douleur. En effet, il existe autant de ressentis et donc de perceptions qu'il existe d'individus.

• Quel que soit le mode d’expression de la douleur, tout patient mérite une écoute de sa plainte.

• La prise en charge de la douleur chronique demande une écoute attentive et accueillante, et un non jugement et de faire préciser la demande par le patient, il faut demander pour savoir ce qu’il recherche.

• Il est important d’éduquer ce patient sur cette douleur chronique, analyser le contexte pour pouvoir lui proposer des stratégies et des objectifs, et insister sur leurs propres ressources.

• La douleur est le motif de consultation le plus fréquent, elle représente 40% au moins des motifs de consultations médicales.