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LE MAGAZINE DE L’UNIVERSITé STENDHAL - GRENOBLE 3 - N° 14 Innover pour délier les langues Et si la femme idéale était un castrat ? La passion de la traduction littéraire

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Le magazine de l'université Stendhal – Grenoble 3

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Le magazine de L’université stendhaL - grenobLe 3 - n° 14

innover pour délier les langues

et si la femme idéale était un castrat ?

La passion de la traduction littéraire

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sommaireÉdito

AlphabetsLe magazine semestriel de l’université Stendhal - Grenoble 3 - N° 14 - Tirage : 6 000 exemplaires - Parution : janvier 2015.Dépôt légal à parution - ISSN : 1772-1873. Directrice de la publication : Lise Dumasy. Rédactrice en chef : Dominique Abry. Responsable éditoriale : Nadia Samba Robin. Ont collaboré à ce numéro : École doctorale LLSH, EJDG, ELLUG, Fondation Stendhal, galerie Caron-Bedout, LANSAD, SUAPS, UFR de Langues étrangères, UFR LLASICGraphisme et mise en page : service communication / Camille Bartoli. Fabrication : Coquand Imprimeur.Crédits photos : © Patrick Bedout, Christian Weininger (p.1, 15,16). © Paul Cabanis (p. 4). © Gilles Lansard / OT les Contamines (p. 23). © Thinstock (p. 3, 6, 7, 8, 11, 12, 24). © Université Stendhal / Bérangère Haëgy (p. 5), Utopikphoto (p. 13). © Frédéric Zoz (p. 23)

Contact : Université Stendhal - Grenoble 3 - Service communicationBP 25 - 38040 Grenoble cedex 9 - France. Tél. : 33 (0)4 76 82 43 49 - www.u-grenoble3.fr

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Partageons ensemble les valeurs des humanités

À l’heure où les valeurs fondamentales portées par les humanités sont mises à mal, il importe pour l’université de les défendre et de réaffirmer avec force leur importance vitale pour façonner un monde plus libre, celui d’aujourd’hui et, déjà, celui de demain.

Au travers de ce numéro d’Alphabets, vous retrouverez en filigrane plusieurs de ces valeurs auxquelles l’université Stendhal est particulièrement attachée.Lieu d’échanges, de formation à l’esprit critique, à l’analyse et à la synthèse, l’université Stendhal porte, en partenariat avec l’IEP, l’École de journalisme de Grenoble. Un groupe d’étudiants vient d’y lancer « Particité », un site d’infor- mation participative dont les lecteurs tiennent le rôle de rédacteur en chef.Innover et mutualiser les connaissances pour rendre efficace la formation en langues, telle est la roue motrice d’Innovalangues. Ce projet, lauréat des initiatives d’excel-lence en matière de formation, vise à faire des langues un atout maître – car maîtrisé – permettant aux étudiants de communiquer avec aisance dans des situations variées, et de devenir ainsi citoyens du monde ouverts aux cultures et aux autres.C’est un regard de tolérance, de bienveillance et de respect que Claude Coste nous invite à porter sur l’autre – homme, castrat ou femme. Cette dernière, muse du dessinateur Christian Weininger, est représentée avec art, fantaisie et légèreté, sous une forme allégorique empreinte de liberté.

Quête de l’intellectuel, de l’artiste, de l’homme de la rue, la liberté est l’aspiration de tous. Et l’on se doit d’élever la voix pour dire avec Paul Eluard :

« Sur toutes les pages luesSur toutes les pages blanchesPierre, sang, papier ou cendre

J’écris ton nom »Liberté

actualitésL'université Stendhal lance un nouveau MOOC

Soutenez les projets de la Fondation Stendhal !

Particité : le nouveau site d'information dont vous êtes le rédacteur en chef

FormationInnover pour délier les langues

rechercheEt si la femme idéale était un castrat ?

thèses

Perspectives

La passion de la traduction littéraire :rencontre avec Edmond Raillard

Regard sur « Les déesses » de Christian Weininger

Livres

Coup d'œil

Rencontre avec Coline Mattel, médaillée aux JO

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L’université stendhal lance le mooC(1) : "enseigner et former avec le numérique en langues"

soutenez les projets de la Fondation stendhal autour du plurilinguisme et de la francophonie !

Actualités

L’objet de ce cours est l’utilisation innovante du numérique dans l’enseignement / apprentissage des langues, par le biais de quatre approches : les formations hybrides en langues, la télé- collaboration, les outils de l’intercompréhension, l’exploitation du web social. Découvrir et comprendre les atouts et les limites de ces approches, inciter les apprenants à les intégrer dans leurs pratiques pédagogiques, encourager le partage d’expériences, d’idées pédagogiques, de sites et d’outils web : tels sont les objectifs de ce MOOC.

Proposé par l'université Stendhal, en collaboration avec l’ENS Cachan, ce cours de quatre semaines est accessible sur la pla-teforme France université numérique (FUN). Il s’adresse aux enseignants, aux étudiants des Écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPÉ), aux responsables pédagogiques de centres de langues, à toute personne intéressée et curieuse de découvrir de nouvelles approches pour l’enseignement-apprentissage des langues. (1) Massive open online course : formation en ligne ouverte à tous

Inaugurée en juin 2014, la Fondation Stendhal compte 5 membres fondateurs : le groupe d’édition Hachette Livre, le leader mondial des technologies de traduction automatique Systran, le spécialiste de l’édition digitale multimédia Beebuzziness, l’éditeur de la pla-teforme d’apprentissage de l’orthographe Orthodidacte Zeugmo, la communauté d’agglomération Grenoble Alpes Métropole.

Les fondateurs qui se sont engagés soutiennent :• le rayonnement du français à l’international,• les échanges culturels et économiques,• la diffusion du patrimoine scientifique et culturel français,• l’innovation dans la formation en langues étrangères et en

français par l’utilisation intensive et efficace des technologies de l’information,

• le renforcement de la mobilité des étudiants et des entreprises grâce à l’accent mis sur les langues et la dimension interculturelle,

• l’innovation dans la communication et le management.

Pour soutenir les projets de la Fondation Stendhal, vous pouvez vous aussi devenir membre donateur. Pour cela, téléchargez le formulaire de dons sur le site : www.u-grenoble3.fr/fondation-stendhal

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Actualités

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Particité : le nouveau site d'information dont vous êtes le rédacteur en chef !

L'équipe de Particité

« Selon des études, 23 % seulement du grand public croit à ce que relate le journaliste. Notre idée est de raviver la confiance du lecteur en l'impliquant dans le traitement de l'information », expliquent les co-fondateurs du projet. Convaincus qu'une simple plateforme de blogs ne permet pas de créer un dialogue direct entre une rédaction et son lectorat, ils ont imaginé un système de vote en ligne qui permet au lecteur de proposer des sujets ou de contribuer au travail d'enquête du journaliste en lui soumettant par exemple des interlocuteurs à solliciter. Un flux d’informations permettra aux adhérents de suivre l’avancée des sujets avec la possibilité de discuter avec les jour-nalistes et de créer un échange pour donner des idées ou des interlocuteurs à contacter.Ainsi, pour chaque article mis en ligne, les abonnés pourront connaître les sources utilisées, les méthodes employées, le matériel et le temps nécessaires à la construction du dossier. Et pour aller encore plus loin, le débat restera ouvert à tous une fois l'article publié, puisque les lecteurs auront la possibilité de prendre part à un forum de discussion.

La rédaction a fait le pari de s'appuyer sur un prix d'abonnement libre pour permettre à tout type de lectorat de s'impliquer. Pour lever les fonds nécessaires à la création du site, l'équipe s'est appuyée sur un système de financement participatif en ligne qui lui a permis de récolter 2 500 euros. Cela s'inscrit aussi dans une volonté revendiquée de rester un média indépendant.

Le site proposera sept rubriques (politique, social, science, sport, culture, économie, environnement) et soumettra de manière hebdomadaire 21 sujets aux internautes. Le plus plébiscité sera alors pris en charge par un journaliste pour un travail d'enquête approfondi et transparent.

Précisons que Particité bénéficie du soutien des journalistes Laurent Mauriac, Ziad Maalouf et Edwy Plénel, co-fondateur du site Médiapart, qui a accepté d'en devenir le parrain. Consultez le site : http://media.particite.fr/

Cinq étudiants de master à l'École de journalisme de Grenoble ont lancé à l'automne 2014 Particité, un site participatif d'enquêtes journalistiques locales dont le rédacteur en chef n’est autre que l'abonné lui-même !

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Formation

innover pour délier les langues !

La faiblesse des compétences en langues des étudiants au sortir du lycée, maintes fois publiquement soulignée, constitue une entrave à leur réussite. Les actions de positionnement en langues menées en France révèlent que la plupart des étudiants qui s’inscrivent en première année de licence n’ont atteint qu’un niveau élémentaire (niveau A2 du CECRL)2 en langue étrangère, que ce soit dans leur langue « forte » (LV1)3 – l’anglais pour 94 % des élèves du secondaire – ou dans leur deuxième langue de référence (LV2)3. Dans un tel contexte de décalage entre les cursus de forma-tion et les finalités sociales de l’apprentissage des langues, les universités sont confrontées à la nécessité de disposer d’une offre de produits d’évaluation et de formation en langues qui, dépassant le cadre des obligations de diplomation, intègrent le processus continu d’apprentissage tout au long du parcours d’études et au-delà.C’est précisément pour répondre à ces exigences fortes que le service LANSAD a entamé depuis plusieurs années un vaste et ambitieux chantier de rénovation des formations en langues, qui lui permet de se présenter actuellement comme un pôle moteur d’innovation dans ce secteur.

Les spécificités du service Lansad de l’université stendhal Hébergé à la Maison des langues et des cultures, sur le campus grenoblois, et doté d’équipements adaptés (salles équipées de petite taille, laboratoires de langues, régie son et vidéo), le service LANSAD offre tout d’abord une large palette de cours de langues à visée communicative. Ces cours, au format homogène (24 h ou 48 h/semestre), et dont la progression est bâtie sur la base de syllabus harmonisés, s’adressent à des publics hétérogènes par leur provenance disciplinaire et par leur niveau d’études (étudiants en formation initiale de tous les établissements d’enseignement supérieur grenoblois et publics de formation continue).

Rompant avec le schéma traditionnel de constitution de groupes-classes par année académique, l’inscription à un cours de langue est proposée à l’étudiant à l’intérieur de tout cursus universitaire, quelle que soit la filière, depuis la première année du cursus universitaire jusqu’au doctorat. Cette inscription, établie à l’issue d’un bilan de compétences dans la ou les langue(s) ciblée(s), est ainsi adaptée au niveau et aux objectifs de chacun : obtention d’une certification, préparation d’un double diplôme, projet de mobilité internationale, professionnalisation en langues dans les

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(1) Langues pour spécialistes d'autres disciplines(2) Cadre européen commun de référence pour les langues(3) Langue vivante

Un des enjeux fondamentaux de tout cursus universitaire est de mettre l’étudiant en condition de réussir, dans son parcours socio-professionnel et personnel, par sa capacité à communiquer dans des contextes variés et dans des langues diverses. Pour y répondre, le service LANSAD(1) expérimente depuis quelques années diverses pratiques d’enseignement - apprentissage des langues qui l’ont conduit à se lancer avec ses partenaires dans le projet Innovalangues, lauréat des Initiatives d’excellence en formations innovantes (IDEFI).

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Formation

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métiers de l’éducation, de la communication, de l’édition… À côté de ce socle fondamental d’enseignements tournés vers la maîtrise de la langue de communication, le service LANSAD a diversifié son offre au fil des années. Il propose ainsi des ateliers de musique, de chant et de théâtre en plusieurs langues, des cours de langue et société, de médiation culturelle, de didactique des langues à l’école, d’intercompréhension en langues romanes… L’ensemble de son offre recouvre vingt langues cibles ; une attention particulière étant accordée aux langues minoritaires sans oublier la langue des signes française.

des dispositifs de formation souples et variésLes formations proposées se caractérisent par des modalités d’apprentissage souples et variées permettant de répondre aux besoins voire exigences des publics – notamment en termes d’horaires, de rythmes et de modalités de travail –, et susceptibles de soutenir par leur diversité la motivation des apprenants. Ainsi, l’offre comporte à présent : • cours en présentiel et/ou tutorés en ligne,• parcours individualisés d’apprentissage en autonomie tutorés

ou non,• ateliers de conversation et stages intensifs,• formations à la carte sur objectifs spécifiques,• dispositifs de soutien en ligne. Ce panel de formations, dont il n’y a pas d’équivalent à l’heure actuelle dans le milieu académique français, se veut modulable et déclinable en fonction des demandes des institutions et des individus.

Le public interuniversitaire, réparti en groupes de niveaux (de A1 à C2), est encadré par une centaine de formateurs (enseignants et tuteurs) dont une trentaine est activement impliquée dans l’élaboration des parcours de formations dont l’approche pédagogique inclut un accompagnement souple, graduel et structuré tout au long de l’apprentissage. Le déploiement de cette offre est soutenu à la fois par une démarche d’ingénierie et par une politique de formation des enseignants très volontariste, confortée par un fort ancrage dans la recherche.

Le défi du projet innovalanguesDu point de vue des porteurs du projet, « innover » signifie pour l’essentiel initier une dynamique de réflexion au sujet des pratiques de formation, de manière à les faire évoluer sur la base d’un alliage bien dosé entre expériences (réussies) et créativité.Si l’on adopte cette posture, l’innovation est donc constante, puisqu’on la considère comme une remise en cause permanente, dans un mouvement continu d’amélioration de pratiques revisitées et renouvelées, participant au développement d’une véritable spirale vertueuse. Déjà expérimentée ces dernières années au sein du service LANSAD, cette approche de l’innovation recèle des potentiali-tés intéressantes, réellement porteuses de changements dans les pratiques de formation soutenues par les technologies de l’information et de la communication.

Fort de cette expérience, le service LANSAD de l’université Stendhal et ses partenaires – l’Unité de technologie de l'éducation (UTE) de l'université de Mons, la société TOTEMIS, l’association Lingua e Nuova Didattica (LEND), le Réseau européen des associations de langues (REAL) – se sont lancés dans l’aventure Innovalangues. Ce projet ambitieux a obtenu le soutien du programme IDEFI qui sélectionnait des projets innovants en matière d’enseignement supérieur répondant aux standards internationaux. Le défi est de doter les institutions d’enseignement supérieur françaises de moyens fédérant et amplifiant les actions de formation en langues destinées à porter le degré de maîtrise en langues des publics à un niveau B2 certifié.

À ce niveau – avancé ou indépendant – les locuteurs sont en capacité d’aborder des sujets abstraits, complexes, liés à des sujets d’actualité mais aussi à des aspects techniques dans leurs domaines de spécialité. Leur degré de spontanéité et d’aisance à l’oral leur permet en interaction d’argumenter dans des débats et en monologue de présenter des communications dans des colloques ou séminaires.

un écosystème pour apprendre et enseigner les langues Innovalangues se propose de développer des parcours de formation adaptés aux aptitudes, aux compétences et aux besoins d’apprentissage des publics qui, au départ, diffèrent. Il s’agit donc de concevoir, valider scientifiquement et développer un système permettant de : • évaluer l’apprenant de manière diagnostique et formative ;• informer sur les compétences acquises et sur la marge de

progression ;• orienter vers une proposition de solutions de formation

disponibles ;• adapter les parcours de formations aux spécificités de

l’apprenant. Dénommé SELF, ce Système d’évaluation en langues à visée formative est une brique essentielle du projet Innovalangues.

S’y ajoutent d’ores et déjà trois autres composantes majeures : • THEMPPO (Thématique, prosodie, production orale) qui se

donne pour but la conception et le déploiement de modèles prototypiques de traitement de l'oral ;

• COCA (Compréhension orale, conception et assistance) qui a pour objectif le développement de solutions assistant aussi bien l’étudiant en situation de compréhension de l’oral que l’enseignant dans la conception d’activités centrées sur cette habileté ;

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Formation

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• GAMER (Gaming Applications for Multilingual Educational Resources) qui vise à produire des ressources ludiques pour l'apprentissage des langues.

Innovalangues vise aussi à décloisonner l’espace « classe de langue » par une offre assurant une diversité de modalités d’apprentissage (cours individualisé et tutoré, formation à distance, ateliers de conversation, stages intensifs…). L’idée est d’une part d’accroître le temps d’apprentissage alloué à la langue et d’autre part de soutenir l’engagement et la motivation des étudiants dans leur apprentissage. Ceci passe par la qualité et l’adéquation des supports de formation, un soutien – voire tutorat – mettant l’accent sur les aspects socio-affectifs ainsi que la diversité des modalités d’encadrement.

Pour permettre à ces actions innovantes de se développer de manière optimale, Innovalangues se propose de les rassembler dans un écosystème dont le socle sera l’Environnement numé-rique personnalisé d’apprentissage (ENPA). Les outils de formation seront à la disposition des apprenants souhaitant étudier de manière indépendante et des enseignants pour les aider à construire leurs actions de formation ou les accompagner dans la mise en place de pratiques innovantes ayant démontré leur efficacité. Au-delà de l’ENPA, l’écosystème Innovalangues vise à fédérer enseignants, concepteurs, ingénieurs pédagogiques, chercheurs impliqués dans l’apprentissage des langues au sein d’une com-munauté de pratiques afin d’adapter, enrichir et développer les modèles, solutions et ressources mis à disposition.

étapes clés du projet innovalangues

2012 | Innovalangues est lauréat de l’appel à projets "Initiatives d’excellence en formations innovantes" (IDEFI) : le projet est lancé.

2013 | Mise en place de la version béta de l’Environnement numérique personnalisé d’apprentissage (ENPA) d’Innovalangues.

2014 | Déploiement des premières formations sur l’ENPA à titre d’expérimentation.

2015 | Ouverture au public de l’ENPA d’Innovalangues avec des parcours, modèles, jeux et autres ressources pour l’apprentissage des langues.Le système d’évaluation en langues à visée formative (SELF) est disponible en anglais et italien.

2016 | Enrichissement de l’écosystème Innovalangues notamment avec des modules ciblés sur l’améliora-tion de la prosodie et la pratique de l’oral.

2017 | L’écosystème numérique Innovalangues est dispo-nible en 6 langues : allemand, anglais, espagnol, italien, japonais et chinois.

[email protected]

Pour consulter les publications sur le projet Innovalangues ou en savoir plus  : http://innovalangues.frhttp://lansad.u-grenoble3.fr

Chiffres clés du service Lansad

20 langues proposées4 000 étudiants21 enseignants-chercheurs44 enseignants et tuteurs45 ingénieurs pédagogiques14 personnels administratifs

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Recherche

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et si la femme idéale était un castrat ?

Claude Coste, professeur de littérature française à l’université Stendhal, nous livre le regard de Roland Barthes sur la célèbre nouvelle « Sarrasine » écrite par Balzac.

Et si la femme idéale était un castrat ? La réponse appartient peut-être à Sarrasine, une célèbre nouvelle de Balzac à laquelle Roland Barthes consacre un séminaire (1968-1969), et S/Z, le livre qu’il tirera de son travail en 1970.

Le sujet a, en effet, de quoi surprendre. Au cours d’une bril-lante soirée, le narrateur rencontre une jeune femme intriguée par la présence d’un vieillard mystérieux dont tout le monde prend le plus grand soin. Sur la promesse d’une nuit d’amour, le narrateur accepte de satis-faire la curiosité de son interlocutrice et lui raconte l’histoire suivante : au XVIIIe siècle à Rome, le sculpteur Sarrasine tombe éperdument amoureux de la chanteuse Zambinella ; entretenu dans l’erreur par une machina-tion, il découvre finalement que la chanteuse est un castrat. Bouleversée par ce récit qui lui révèle que l’étrange vieillard n’est autre que Zambinella, la jeune femme renonce à honorer sa promesse et demeure « pensive ».

Figure étrange et fascinante, le castrat naît de la pudeur. À Rome, dans la cité des papes, où il n’était pas convenable que des femmes chantent à l’église et sur les théâtres, son invention vient pallier un manque. En amputant avant leur puberté des enfants doués pour le chant, on fabriquait des artistes dont la voix, aigüe et puissante à la fois, assurait aux meilleurs d’entre eux un prestige de star et une fortune de rêve, comme le célèbre Farinelli ou comme la Zambinella de Balzac. Pouvant incarner tous les rôles, ils triomphaient principalement dans les rôles masculins auxquels ils donnaient une puissance de séduction, une force virile qui laissaient le public, en particulier féminin, au bord de la pamoison. S’il était parfaitement possible pour un castrat comme la Zambinella d’être distribué dans un rôle féminin, l’interprétation ne cherchait jamais à travestir la femme, tout au plus à la styliser, à la rendre symboliquement présente par les aigus de la voix.

N’est-il donc pas bien étonnant que Sarrasine confonde un corps de castrat et un corps de femme et surtout prenne pour féminine une voix qui ne l’était pas en dépit de la tessiture ? La nouvelle de Balzac est écrite au XIXe siècle, à une époque où les castrats devenaient plus rares, donnant naissance à un nouvel imaginaire. Si le XVIIIe siècle virilise le castrat, Sarrasine

insiste sur la confusion des identités afin de ménager un beau coup de théâtre – afin aussi de suggérer l’aveuglement passion-nel du sculpteur ou la mauvaise foi de son désir.

La psychanalyse réussit-elle à élucider ce mystère ? Les lettres S et Z, si elles renvoient aux initiales des protago-nistes, dessinent la clé d’une interprétation lacanienne : du s au

z, de la consonne sourde à la sonore, c’est le « tranchant oblique et illégal  » de la castration qu’entend

Barthes. Une castration qui touche un à un tous les protagonistes : la Zambinella,

bien sûr, mais aussi Sarrasine, et enfin le narrateur lui-même (privé

de sa nuit d’amour). En d’autres termes, c’est la

dure loi de la castration symbolique qu’illustrerait ce texte, en l'occurence l’acceptation du tabou de l’inceste ! Sans doute… Mais de façon générale, il ne faut pas surestimer l’usage que Barthes fait de la psychanalyse et du vocabulaire emprunté sans vergogne à Lacan.

Son travail critique cor-respond davantage à une

dérive personnelle qu’à une allégeance clairement reven-

diquée. Qu’est-ce qui fascine Barthes dans la castration – et

avec lui, à la même époque, Gilles Deleuze dans Logique du sens ou

Dominique Fernandez dans Porporino, ce roman des castrats et de l’homosexualité ?

Cette figure étrange jusqu’au malaise se présente évidem-ment comme un magnifique objet intellectuel : en abolissant la frontière entre deux états présentés comme incompatibles, la castration impose une forme de transgression très forte qui met fin à la distinction fondamentale du masculin et du fémi-nin, présente la féminité dont tombe amoureux Sarrasine, non plus comme un phénomène purement naturel, mais comme une construction mentale, relevant d’un imaginaire collectif ou singulier.

« À tous ceux qui déplorent le retard de la France ou qui s’affolent de l’invasion d’une prétendue

théorie du genre, on conseillera tout bonnement de se replonger dans S/Z. »

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Recherche

Dans le lointain sillage de Simone de Beauvoir (« On ne naît pas femme, on le devient ») et bien avant le développement de la fameuse théorie du genre, Barthes avec ses mots et son approche personnelle vient enrichir les débats qui agitent la société française aujourd’hui.

En faisant du castrat la manifestation d’un véritable « trouble dans le genre », le séminaire et le livre remettent utilement les pendules à l’heure. Si les ouvrages de Judith Butler sont des contributions importantes pour analyser comment les différentes sociétés modèlent les identités sexuelles, il n’a pas fallu attendre le mot « genre », les années 60 et la pensée américaine pour que ces questions fondamentales soient abordées de front. Dès les années 60 en France – et sans doute partout dans le monde dès que l’on s’interroge sur le masculin et le féminin –, ces questions n’ont pas manqué d’être traitées. À tous ceux qui déplorent le retard de la France ou qui s’affolent de l’invasion d’une prétendue théorie du genre, on conseillera tout bonnement de se replonger dans S/Z. Le lecteur s’enrichira au contact d’une pensée subtile, loin de tout manichéisme et de tout symbolisme univoque.

En relation étroite avec le sujet de la nouvelle de Balzac, Barthes propose de « traverser le mur ». Guidé par l’aventure de Sarrasine, le séminaire et le livre sont obsédés par l’abolition des frontières qui fondent le sens en séparant les réalités. Tout commence avec la position physique du narrateur installé près d’une fenêtre, regardant d’un côté le paysage funèbre et enneigé, de l’autre l’éclat d’une fête parisienne ; l’une de ses jambes ressent le froid de l’air venu de l’extérieur, l’autre la cha-leur du lieu où il se trouve. Puis arrive l’étrange vieillard à la fois homme et femme que l’histoire identifiera par la suite comme le castrat Zambinella… Le choix de la castration s’explique, bien au-delà de la sexualité ou du genre, par sa capacité à brouiller les lignes. Mais positive quand elle affole le sens, la castration impose également une puissance destructrice qui ne laisse rien indemne. On meurt beaucoup dans la nouvelle de Balzac, au propre et au figuré, comme le commentaire de Barthes le montre avec insistance. Mort du plaisir, la castration prive Zambinella, non pas de sa sexualité, mais de tout accès à la jouissance ; mort du désir, la castration par sa contagion frappe la jeune femme de dégoût et laisse le narrateur frustré ; mort de Sarrasine enfin assassiné sur les ordres du cardinal Cicognara, protecteur du chanteur.

Plus qu’à une abolition de la frontière entre le masculin et le féminin, la castration touche à la distinction plus fondamentale encore de la vie et de la mort. Si le « trouble dans le genre » (ou dans le sexe) propose des manifestations culturellement attestées et admises (androgynie, hermaphrodisme, trans-sexualité, etc.), l’effacement de la frontière qui sépare le monde des vivants et le monde des morts présente un scandale d’une tout autre ampleur. Spectre, fantôme, être surnaturel, avatar du comte de Saint-Germain ou de Cagliostro, le vieillard Zambinella se présente comme un « mort-vivant ».

Rédigeant son livre au Maroc, où il donnait des cours à l’univer-sité de Rabat, Barthes s’intéresse en parallèle à une nouvelle de Poe, La vérité sur le cas de M. Valdemar qui propose la même transgression : hypnotisé au moment de l’agonie, M. Valdemar se tient à mi-chemin de la vie et de la mort. Il ouvre soudain la bouche pour déclarer cette parole impossible : « Je suis mort »,

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et, l’hypnose prenant fin, se liquéfie en un instant sous les yeux des auditeurs. La même hantise se retrouve dans le choix d’un passage célèbre du Côté de Guermantes pour les étudiants marocains. Prise d’une attaque soudaine dans le jardin des Champs- Élysées, la grand-mère qui ne veut pas inquiéter le narrateur se réfugie longuement dans le chalet d’aisance pour se refaire un visage et dissimuler les traces de son malaise. Marquée elle aussi par la mort, la grand-mère dialogue grâce à Barthes avec le vieillard de Sarrasine ou le Valdemar de Poe. Quand Deleuze fait du castrat un moyen de brouiller « la logique du sens », Barthes propose de cette figure fascinante une approche qui assume la totalité du phénomène : esquissant une théorie du genre avant la lettre, il s’ouvre à la crise générale de la signification et se confronte à l’ivresse comme à l’inquiétude d’une navigation sans repères.

■ Claude Coste, éditeur, avec Andy Stafford, du Séminaire sur Sarrasine paru au Seuil en 2011.

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Parole disfluente : aspects phonétiques et phonologiquesMarine VerdurandSous la direction de Didier DemolinGIPSA-Lab, 12/06/2014

Production, compréhension et imitation des constructions causatives chez des enfants monolingues francophones et bulgarophones âgés de 3 à 6 ansYanka BezinskaSous la direction de Jean-Pierre Chevrot et Iva NovakovaLIDILEM, 30/06/2014

développement phonético-phonologique en fulfulde et bambara d’enfants monolingues et bilingues : étude du babillage et des premiers motsIbrahima Abdoul Hayou CisséSous la direction d’Elisabetta Carpitelli et Nathalie ValléeGIPSA-Lab, 18/09/2014

La diffusion de l'anglais dans le monde : le cas de l'algérieAnne-Sophie CordelSous la direction de Mohamed BenrabahLIDILEM, 16/10/2014

écrit de recherche universitaire : éléments pour une sensibili-sation au positionnement scientifique à travers la phraséologie transdisciplinaireMariam MrouéSous la direction Francis GrossmannLIDILEM, 23/10/2014

incidence d'une formation en intercompréhension sur l'acqui-sition de compétences en français et autres langues étrangères dans un contexte scolaire (lycée)Sandrine DéprezSous la direction de Christian DegacheLIDILEM, 14/11/2014

description de la phraséologie transdisciplinaire scientifique et réflexions didactiques pour l'enseignement à des étudiants non-natifs. application aux marqueurs discursifsThi Thu Hoai TranSous la direction d’Agnès TutinLIDILEM, 11/12/2014

modèle de vérification grammaticale automatique gauche-droiteAgnès SouqueSous la direction de Thomas LebarbéLIDILEM, 12/12/2014

L'apport de la voix chantée pour l'intégration phonético- phonologique d'une langue étrangère : application auprès d'italophones apprenants de FLeSandra CornazSous la direction de Nathalie ValléeGIPSA-Lab, 12/12/2014

dynamiques interactives dans le cadre d’activités de révision collaborative assistée par ordinateurPatrick DurelSous la direction de François MangenotLIDILEM, 15/12/2014

vers une adaptation sociodidactique du curriculum gabonais au second cycleHawa AlhassaneSous la direction de Marinette MattheyLIDILEM, 15/12/2014

travailler l'oral à travers l'utilisation d'un téléphone portable et d’internetHee-Kyung KimSous la direction de François MangenotLIDILEM, 16/12/2014

Thèses

sciences du langage et FLe

identité et altérité dans l’œuvre de hubert selby JrManuel RobertSous la direction de Claire ManiezCEMRA, 19/06/2014

évolution narrative et polyphonie littéraire dans l’œuvre de geoffrey ChaucerJonathan FruocoSous la direction de Denis BonnecaseCEMRA, 24/10/2014

La survie des identités celtiques du Xviiie siècle à nos joursLauren BrancazSous la direction de Susanne BerthierCEMRA, 27/11/2014

La gauche révolutionnaire et la question carcérale : une approche des années 1970 italiennesElisa SantalenaSous la direction de Christian Del VentoGERCI, 8/12/2014

Les références culturelles dans les titres d'articles de la presse russe contemporaineElena ChotovaSous la direction d’Isabelle DesprésILCEA, 12/12/2014

Langues étrangères

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Thèses

Communication, délibération et mouvements sociaux. L'espace public à l'épreuve du phénomène antinucléaire en France (1962-2012)Mikaël ChambruSous la direction de Bertrand CabedocheGRESEC, 13/06/2014

du besoin d'informations à la formulation des requêtes : étude des comportements de différents types d'utilisateurs visant l'amélioration d'un système de recherche d'informationsMarilyne LatourSous la direction de Laurence Balicco GRESEC, 24/06/2014

Communication publique et pratiques journalistiques au prisme des mutations sociales : la question de l’immigration en France (1980-2010)Paula de Souza PaesSous la direction d’Isabelle PailliartGRESEC, 25/11/2014

Communication

Thèses

du théâtre au musée : la scénographie et l'expositionMarion LyonnaisSous la direction de Luc BoucrisTraverses 19-21, 26/02/2014

identités et création dans l’œuvre de Wajdi mouawad Isabelle PatroixSous la direction de Jean-Pol MadouLLS, 19/05/2014

L'appropriation des œuvres littéraires en classe de secondeBénédicte MilcentSous la direction de Jean-François MassolTraverses 19-21, 10/11/2014

Le livre de poème(s) illustré. étude d’une production littéraire en France de 1995 à nos jours et de sa réception par les professeurs des écolesChristine ThibertSous la direction de Jean-François MassolTraverses 19-21, 6/12/2014

Pour une poétique du carnet dans la littérature française du XXe siècleSophie HébertSous la direction de Claude CosteTraverses 19-21, 9/12/2014

Les objets dans le roman grecMagdeleine CloSous la direction de Françoise LétoublonRARE, 10/12/2014

récits et relations dans les prisons chiliennes : 2007-2013 dix ateliers d’écriture dans la région du bío-bíoMaria Alejandra Figueroa-MunozSous la direction de François GramussetCRI, 19/12/2014

Lettres et arts du spectacle

habilitations à diriger les recherches

de la littérature patrimoniale à la création contemporaine pour la jeunesse : formes et enjeux d’une littérature adressée. Questions posées à son enseignementChristiane Connan Pintado13/06/2014

de la description de la langue à son enseignementMarie-Noëlle Roubaud Gaudez02/09/2014

Concordances entre aires celtique, romane et germanique.Cartographie et interprétation des variations géolinguistiquesDaniel Le Bris29/11/2014

du déséquilibre à l'écriture, histoires d'amérique Élisabeth Bouzonviller05/12/2014

La construction du sujet lecteur-scripteur de la maternelle à l'université : quatre temps d'une genèseCatherine Frier05/12/2014

modéliser le fonctionnement de la formation hybride en langues à travers des recherches ingénieriques Elke Nissen12/12/2014

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Perspectives

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La passion de la traduction littéraire : rencontre avec edmond raillard

Professeur à l'université Stendhal , Edmond Raillard mène des travaux de recherche sur la littérature, l’art et la société dans le monde hispanique actuel, enseigne la traduction spécialisée et traduit de nombreux ouvrages du catalan et de l’espagnol. Rencontre avec un homme discret, un amoureux des mots, qui nous fait partager sa passion.

Quand et comment êtes-vous venu à la traduction ? J’ai commencé à traduire des textes catalans et castillans en français lorsque j’étais lycéen à Barcelone. Un jour on a demandé à mon père, qui dirigeait l’Institut français de Barcelone, de tra-duire pour une galerie d’art un texte sur le peintre Antonio Saura. Étant très pris, il me confia ce travail. Par la suite, j’ai traduit beaucoup d’écrits de peintres : Antoni Tàpies, Joan Miró, Antonio Saura… et aussi des articles d’esthétique. À la fin des années 80, j’ai commencé à traduire de la fiction, avec Essence de Quim Monzó. Cela m’a permis d’entrer dans la communauté littéraire de l’éditeur de Monzó – Quaderns Crema à Barcelone –, de rencontrer des auteurs comme Sergi Pàmies ou Fernant Torrent dont j’ai ensuite traduit des ouvrages. Nous avons tissé des liens plus étroits au fil du temps et j’ai trouvé là, en quelque sorte, une famille littéraire.

vous traduisez essentiellement des ouvrages du catalan, alors que vous êtes par ailleurs aussi un spécialiste de l’espagnol. Y a-t-il une raison à cela ? Il y a assez peu de traducteurs de catalan ; la demande en ce sens est donc assez forte. Et puis, probablement parce que j’ai vécu assez longtemps en Catalogne, je crois que je parviens assez bien à m’identifier à ses auteurs et à rendre l’esprit de

cette langue. Quoi qu’il en soit, j’aime également l’espagnol – en particulier la richesse de ses variantes – et le traduire est un plaisir. Parmi les œuvres d'écrivains en langue castillane que je traduis de façon suivie, je suis particulièrement attaché à celle du majorquin José Carlos Llop, auteur de très beaux romans, comme Parle-moi du troisième homme ou Le rapport Stein. Lorsque vous traduisez un roman, avez-vous l’impression de (re)créer l’œuvre ou le sentiment de vous effacer derrière l’auteur ? Les deux ! En fait, il n’y a pas de règle générale, cela dépend des textes. Il est possible parfois de restituer la nature du texte sans que l’on sente qu’il a été écrit initialement dans une autre langue. Mais il peut s’avérer nécessaire de devoir quand même en don-ner l’indice, sans que ce soit trop marqué, sinon on perdrait l’essentiel. Il est important de préciser que l’espagnol et surtout le catalan sont moins « cartésiens » que le français. Ainsi, pour traduire, il est parfois nécessaire de déverbaliser, de repartir à la source de la pensée sans rester trop près du texte. Il faut réussir à rendre la souplesse du catalan, tout en respectant la syntaxe française.Cela étant, même lorsque l’on reste très proche du texte initial, on recrée de toute façon. Il s’agit donc, surtout au début de faire

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Perspectives

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les bons choix dans la stratégie de traduction (en termes de proximité ou d’éloignement), le ton, le traitement du référent et des éléments textuels. Dans la plupart des cas, les solutions pos-sibles sont multiples et c’est le travail d’écriture du traducteur que de les choisir en un mouvement d’équilibre dynamique. Plus je connais l’auteur, plus se crée durant le temps de la traduction une sorte d’identification et moins j’ai besoin de le consulter. Lorsque je travaille sur un ouvrage de Quim Monzó, il m’arrive de lui expliquer ce que va impliquer tel ou tel choix. C’est assez particulier, car durant ces échanges, qui peuvent durer plusieurs heures, il est comme pénétré et revit vraiment sa création litté-raire. Avec Sergi Pàmies, c’est différent : il relit ma traduction en français – car il le parle couramment – et me fait alors part de ses commentaires ou de questions sur certains de mes choix. Mais avec l’âge et l’expérience, j’assume de plus en plus mes choix et interroge de moins en moins les auteurs.

vous êtes aujourd’hui un traducteur confirmé, comment choisissez-vous les ouvrages que vous traduisez ? Essentiellement en fonction de la qualité des livres et de l’inté-rêt personnel que j’y trouve. Je crois qu’il faut surtout qu’ils me plaisent beaucoup. Pour traduire un livre de taille moyenne, il me faut environ un an. Sachant le temps que je vais y consacrer, j’ai besoin d’être « emballé », passionné, sinon cela devient un exercice fastidieux.Pour être honnête, il y a quelques années, j’ai évité certains livres simplement parce que je ne voulais pas corroborer une vision, à mon sens faussée, de la littérature catalane. À l’étranger, on pense souvent que c’est une littérature du terroir et des tradi-tions, parce que le catalan est une langue régionale, alors que cette littérature est aussi urbaine et très moderne. Aujourd’hui, je ressens moins cette crainte, sans doute à cause du succès en France d’auteurs comme Monzó et Pàmies, représentants de cette littérature urbaine et moderne, voire post-moderne. La preuve en est que je viens d’accepter de tra-duire pour Actes Sud un roman de Pep Coll sur un quadruple assassinat qui a eu lieu dans les Pyrénées dans les années 40 et dont les auteurs, bien que connus, sont restés impunis. C’est un roman fort qui revient sur l’histoire de ces vallées et donc sur un contexte très local. Je n’aurais pas fait ce choix naguère, mais je ne le regrette pas.

vous avez reçu différents prix pour vos traductions : le prix rhône-alpes du livre en 2008 pour Le dernier livre de sergi Pàmies, de sergi Pàmies, le prix écureuil la même année pour Le rapport stein de José Carlos Llop, le grand prix de la société des gens de lettres (sgdL) en 2013 pour l’ensemble de votre œuvre. Comment percevez-vous ces récompenses ? Y êtes-vous sensible ? Les traducteurs sont toujours en quête de reconnaissance car ils sont souvent oubliés. Récemment, le prix Courrier international du meilleur livre étranger a été attribué à Confiteor. Mais il n’y a eu ni dans les articles et autres supports de communication, ni lors de la cérémonie de remise du prix, la moindre mention du fait que le livre a été traduit du catalan, sans même parler du traducteur.S’il ne viendrait à l’esprit de personne de ne pas mentionner l’éditeur, le traducteur est trop souvent oublié, même si le code de la propriété intellectuelle le considère comme auteur de son texte. Certes, le traducteur n’invente rien et ne court pas le risque de se retrouver devant une page blanche, mais il réalise un vrai travail sur le texte et sur la langue. On dit parfois que le traducteur est un auteur frustré. C’est parfois le cas, mais

absolument pas le mien. Pour ma part, je suis ravi d’adopter pendant quelques mois le texte créé par un autre et de lui donner une nouvelle vie, différente. Donc, dans ce contexte, nous apprécions d’être reconnus, et tout particulièrement par nos pairs, qui savent de quoi il retourne. Dans le cas du prix de la SGDL, c’est aussi une reconnaissance de la place du traducteur dans le monde des lettres. Je dois reconnaître aussi qu’en France nous sommes de mieux en mieux reconnus notamment grâce à l’Association des traducteurs litté-raires de France, qui est très active. Son action a un impact sur le niveau des rémunérations, les rapports avec les éditeurs, et a permis que plus de journalistes soient attentifs à la qualité de la traduction des livres et en fassent mention.

Comment avez-vous procédé pour traduire Confiteor de Jaume Cabré ?Quand Actes Sud m’a proposé de traduire Confiteor, j’ai d’abord lu ses 850 pages en une semaine, sans pouvoir le lâcher. C’était un signe vraiment favorable : j’étais emballé. Je me suis fait un programme de travail très strict. En conservant deux mois de marge, j’ai divisé le nombre de pages par le nombre de semaines pour avoir des repères et savoir systématiquement quel devait être l’état d’avancée de la traduction à une date donnée.

J’ai eu beaucoup d’éloges pour cette traduction dans la presse, mais je n’ai pas rencontré de difficultés majeures. Tout ce qui a l’air très compliqué dans le roman, en l’occurrence les changements d’époque, de personnages et de narrateurs qui interviennent parfois dans un même paragraphe ou une même phrase, sont principalement des difficultés de composition réglées par l’au-teur et demandent seulement de l’attention. Parvenir à rendre les légers changements de ton a été plus complexe. C’est là un problème aisé à identifier à la lecture mais qui n’a pas été simple à résoudre et a exigé un vrai travail d’écriture, du doigté et de l’intuition. Il y a aussi des passages en langue « médiévale » qui demandent un travail particulier. Ayant déjà traduit par le passé de larges fragments de Raymond Lulle pour un livre Lulle-Tàpies, je n’étais

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pas en terrain totalement inconnu. L’aspect du texte peut-être le plus difficile et ce dont je ne suis absolument pas satisfait est la manière dont j’ai traduit les jurons. En catalan, les jurons sont très variés et extrêmement expressifs. Ils ont vraiment un impact extraordinaire. Le français me semble plus limité en la matière. Mais c’est sans doute un défaut de ma traduction que je suis à peu près le seul à voir.

Que ce soit pour Confiteor ou pour d’autres livres, je travaille avec un ordinateur et deux écrans, l’un pour le texte source, l’autre pour accueillir ma traduction, et j’essaie d’avoir un flux d’écriture le plus continu possible. Il s’agit d’un « mouvement » à trouver avec le bon ton pour traduire vite, surtout pas phrase par phrase, comme on le fait en cours. Sauf si cela doit conditionner la suite, je ne règle pas dans l’instant toutes les difficultés rencontrées car cela interromprait le flux. Je les signale d’une astérisque, ou j’écris des variantes ou mes doutes entre crochets, et je reviens dessus après avoir fini le premier jet.Il me semble aussi important de m’imprégner de l’univers du livre pour avoir le sentiment de « traduire vrai ». Au centre de Confiteor, il y a l’histoire d’un violon et il est question de luthiers. Je me suis procuré le meilleur ouvrage de lutherie qui existe, qui ne m’a pas servi à grand chose. Mais il était là, et pour moi il était une sorte de garant de mon travail. En revanche j’ai fait une compilation des morceaux de musique cités dans le livre. Je les écoutais souvent pendant que je traduisais.

Que pensez-vous des formations de traducteurs ? L’université Stendhal propose un master professionnel de traduction spécialisée multilingue qui est réputé à juste titre et dont les diplômés s’insèrent chaque année sans difficulté. Ces derniers font de la traduction pragmatique dans de nombreux domaines, mais il ne s’agit pas de traduction littéraire. Dans ce domaine, le marché est très limité et même des traducteurs chevronnés, dont c’est le seul métier, ont parfois du mal à s’en sortir. Il existe bien sûr de bonnes formations (plusieurs masters en France, une école à Bruxelles), mais développer à l’envi des formations à la traduction littéraire ne me paraît pas responsable. Dans la plupart des cas, on devient traducteur de textes littéraires par le hasard d’une opportunité, d’une rencontre. Proposer des stages de formation continue pour les traducteurs déjà en activité me paraît plus judicieux. Cela vient d’être mis en place conjointement par le Centre national du livre et l’Association des traducteurs littéraires de France.

Pensez à découvrir aussi les ouvrages suivants traduits par edmond raillard

Chansons d’amour et de pluie de Sergi Pàmies, J. Chambon, 2014Confiteor de Jaume Cabré, Actes Sud, 2013Les valises perdues de Jordi Puntí, Lattès, 2013La bicyclette statique de Sergi Pàmies, J. Chambon, 2012La ville d'ambre, José Carlos Llop, J. Chambon, 2011Mille crétins de Quim Monzó, J. Chambon, 2009Le rapport Stein de José Carlos Llop, J. Chambon, 2008La ville invisible d’Emili Rosales, Actes Sud, 2007

une formation plébiscitée : le master professionnel Lea traduction spécialisée multilingueCréé en 1992 sous la forme d’un Diplôme d’études supé-rieures spécialisées, le master Traduction spécialisée multilingue (TSM) forme des traducteurs professionnels de haut niveau, capables de s’insérer rapidement dans tous les secteurs d’activité, en France comme à l’étranger. À la suite d'une procédure de certification, ce master a obtenu dès 2009 le label EMT European Master’s in Translation décerné par le comité d'experts de la Direction générale de la traduction à la Commission européenne.

L’acquisition et le développement de compétences variées et spécifiquesLes étudiants du master TSM sont formés à la traduction de documents spécialisés et à l’interprétation de liaison. Ils doivent utiliser deux ou trois langues étrangères de manière performante et avoir une excellente maîtrise de leur langue maternelle.Cependant les compétences langagières et culturelles ne suffisent plus pour devenir traducteur aujourd’hui. Les compétences en recherche d’information et en informatique ainsi que des connaissances de base dans des domaines de spécialité sont indispensables. Il faut aussi savoir déterminer une stratégie adaptée à chaque situation de traduction, restituer les contenus selon le cahier des charges établi, appliquer les normes d’assurance qualité notamment en matière de révision et organiser la traduction de gros volumes grâce aux techniques de gestion de projet.

Pour permettre aux étudiants d’acquérir ces compétences, le master TSM allie pratique intensive de la traduction professionnelle, renforcement des connaissances en droit, sciences et techniques, enseignement théorique et pratique de terminologie, réflexion sur la traductologie et utilisation d’outils informatiques de pointe, notamment en traduction assistée par ordinateur et en gestion terminologique.

L’insertion professionnelle au rendez-vous La formation intègre deux stages, un projet de traduction commandité et la gestion de la jeune entreprise ATLAS. Les étudiants sont bien armés pour affronter le monde du travail, ce qui est confirmé par les résultats des enquêtes d’insertion. La durée moyenne d’accès au premier emploi est de 2  mois. Sur les 4 dernières promotions, 95 % des diplômés ont un emploi et 92 % en sont satisfaits.

« La formation m'ayant permis de m'ouvrir aux pratiques professionnelles d'entreprises inter-nationales de la traduction, j'occupe un poste enrichissant où il faut sans cesse satisfaire sa soif de culture, de connaissances et d'expertise pour répondre au mieux aux besoins des clients. »

Eddy-Pierre Larra, diplômé en 2009, traducteur-relecteur chez Alpha CRC

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À l’occasion d’un vernissage, Caroline Angé, maître de conférences en information-communication à l’université Stendhal, rencontre le responsable de la galerie Caron Bedout à Villeneuve-sur-Yonne. Intéressé par sa perception émotion-nelle des œuvres qui se refuse au prisme de l’histoire de l’art et du jugement esthétique, ce dernier décide de lui confier la rédaction de textes destinés à des catalogues d’exposition. C’est ainsi que Caroline Angé, captivée par une série de dessins de Christian Weininger, s'est retrouvée à écrire sur l'œuvre de cet artiste autrichien disparu prématurément (1961-2009).

Si cette série s’inscrit dans la tradition picturale dédiée au corps féminin, Christian Weininger en revisite largement le thème sous la forme de variations allégoriques. Caractérisé par une mise en page peu ordinaire et sous-tendu par un style

résolument énergique, le dessin de cet artiste contemporain nous astreint à sa propre interrogation du corps, comme si une réflexivité nouvelle, singulière et audacieuse, restait encore à explorer.

Marquée par ses travaux de recherche sur la question du genre, de l'altérité et de la parole chez la femme, Caroline Angé, s’interroge sur ce que les œuvres de Weininger nous disent de nous, de notre quête identitaire, de l’universalité de la femme. Dans une écriture empreinte de poésie, elle nous livre son regard sur Les déesses de Christian Weininger.

Les œuvres de ce dessinateur sont exposées en permanence à la galerie Caron-Bedout à Villeneuve sur Yonne et une exposi-tion "éphémère" aura lieu prochainement à Grenoble.

regard sur "Les déesses" de Christian Weininger

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FEMME. PAR DES TRAITS.

Qui suis-je ? Qui est-elle ?Elle m'accorde le privilège de réinterpréter son absolue présence.

Lueur dans les yeux d'un prisonnier.

Être pour un regard. C'est en tant qu'essentiellement Autre que l'Autre doit être vu.

Saisir la femme en son corps.Les traits de l’artiste sont inégaux et opposés. La voilà chosifiée – femme – transformée à l'état de forme. Suspension des valeurs entre le beau et le laid.

Mais, cette captation n'est qu'un moment à l'égard de ce corps. En le mouvement s'élabore déjà un autre corps. Légèreté. Toujours, elle s'envole. Je la retiens de mes yeux. Par le pied, par la main.

Les traits sans cesse déformés des formes re-tracées disent la monstruosité de l'unité.

Elle n'est pas une. Elle est plurielle dans sa beauté. Elle est autre dans l'érotisation de sa forme. Papillon, danseuse, ensorceleuse aux nues multiples. Sans cesse, le regard se voit reconduit à la recomposition permanente de son corps. Elle s'étend du haut de sa chevelure d'or vers ses membres amplifiés.

Silencieuse est l'émotion qui saisit ce tracé.

Circulaire est ta beauté. Femme. Signifier par des traits, des élans, la forme sans cesse brisée dans la conception classique de l'harmonie. Alors même qu'il nous la donne à voir, elle ne se laisse pas saisir. Sa présence tient lieu de frontières qui sépare l'image projetée de son corps et l'étrangeté que ce corps engendre en soi.

Se défaire de l'image de l'Autre pour épouser le processus d'un corps en devenir, c'est le défaire des regards qui lui assignent un territoire.

Le trait saisit comme une vague qu'elle soit amplifiée par endroit, étriquée par d'autres. Il n'a de cesse de désobéir à la norme qui arraisonne le corps de la femme à une assimilation sociale.

Ouvrir les yeux du dehors. Le geste de l’artiste libère celui qui regarde autant que celle qui est regardée.

Moi qui regarde, femme. Je fais face à mon autre, si profondé-ment, à la fois dans le lointain et la périphérie de moi. Je suis alors atteinte, comme interdite sur le seuil de l'adhésion. Fascinée par cette expérience de l'altérité.

Elle est autre que moi. Nue en son être. Cristallisée autour d'un trait saillant.Une saisie de l'instant. Surprise, émue, interloquée par la rencontre d'une oeuvre qui capte le désir objectif d'une dispari-tion retardée. La subsistance de l'Autre.Dès lors, Elle, qui ne saurait se réduire à ces différences interroge le regard de l'artiste sur lui même. Ce tracé supprime la vérité qui devait en sortir. La forme par le fait d'extérioriser la présence de l'Autre tel qu'il la voit déploie non pas tant l'étrangeté, l'autre, les différences sexuelles.

Mais, dans la recomposition perpétuelle se réaffirme le face à face. L'expérience de l'Autre. Un miroir équivoque.

De ses yeux, elle n'est plus image de corps mais âme en son corps.

Femme. Déesse. Souveraine.

Tel est le regard « anthropomorphique » de Christian Weininger.

Caroline Angé, maître de conférences à l’université Stendhal

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ouvrages des ellug

Livres

Écriture, performance et théâtralité dans l’œuvre de George SandSous la direction de Catherine Nesci et Olivier BaraCollection Bibliothèque stendhalienne et romantique2014 - 530 pagesISSBN 978-2-84310-269-1ISSN 1294-0658Prix : 27 €

George Sand inscrit la théâtralité au cœur de son œuvre. Elle explore les limites du roman et du théâtre, interroge les fron-tières de l’être et du paraître. La théâtralisation de l’existence est l’invention de nouvelles relations sociales.

La Littérature de l’anarchismeAnarchistes de lettres et lettrés face à l’anarchismeVittorio FrigerioCollection Archives critiques2014 - 390 pagesISSBN 978-2-84310-271-4ISSN 1294-145XPrix : 25 €

Quels sont les rapports entre littérature et anarchisme depuis le milieu du XIXe siècle jusqu’à la fin des années 1930 ? Ce livre répond à cette question en explorant les œuvres des écrivains militants et l’image de l’anarchisme chez les littéra-teurs consacrés.

Littérature et conduites de classeTrois études de casPierre SèveCollection :Didaskein2014 - 246 pagesISSBN 978-2-84310-275-2ISSN 2102-4596Prix : 24 €

Comment les élèves s'y prennent-ils pour interpréter un roman ? Les lectures antérieures pèsent-elles comme on s'y attend ? L'auteur montre que leur influence est bien moindre que la guidance et les choix didactiques des maîtres.

Outre-MerHistoire de l’expansion coloniale italienneNicola LabancaCollection Italie plurielle2014 - 630 pagesISSBN 978-2-84310-270-7ISSN à venirPrix : 29 €

Ce livre propose une reconstruction de l’histoire de la colonisation italienne, des premières conquêtes jusqu’à la décolonisation. L’étude examine le processus d’expansion coloniale dans toutes ses dimensions dans le contexte de l’Italie libérale puis du fascisme avec les deux temps forts que représentèrent les guerres de Libye et d’Éthiopie. L’auteur met en évidence les singularités de la colonisation italienne dans une perspective souvent comparative.

Histoire d’Arthur et de MerlinRoman moyen-anglais du XIVe siècleTraduit par Anne Berthelot à partir du manuscrit AuchinleckCollection Moyen Âge européen2013 - 172 pages ISSBN 978-2-84310-262-2ISSN 1270-9794Prix : 20 €

La première traduction complète d’une adaptation moyen- anglaise du Merlin et de sa Suite revisite à la mode du XIVe siècle l’histoire arthurienne, de la conception diabolique de Merlin au couronnement d’Arthur et aux guerres qui suivent.

Journal de Bourbon et Autobiographie (extrait) Sir Walter BesantPréface, traduction et notes de Sophie GeoffroyCollection Paroles d’ailleurs 2013 - 124 pages ISSBN 978-2-84310-252-3ISSN 1286-8485Prix : 12 €

Sir Walter Besant fut le romancier anglais le plus populaire de son temps. Son parcours aurait été différent sans son séjour –initiatique à tous égards – de presque 7 ans dans l’océan Indien et son ascension du Piton des Neiges en août 1863.

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Pour plus d’informations : www.u-grenoble3.fr/ellug

Cahiers d'études italiennes, n° 17, 2013, 218 pagesTraduire : pratiques, théories, témoignages en Italie et en France du Moyen Âge à nos joursISBN 978-2-84310-259-2

Cahiers d'études italiennes, n° 18, 2014, 280 pagesDa Torino a Parigi : Laura Malvano storica e critica d’arte.Omaggio alla vita e all’operaISBN 978-2-84310-268-4

exercices de rhétorique, revue en ligne, n°3, 2014Sur l’histoireISBN 978-2-84310-274-5 ISSN électronique 2270-6909

gaïa, n° 16, 2013, 372 pagesISBN 978-2-84310-254-7

géolinguistique, n° 14, 2013, 208 pagesISBN 978-2-84310-264-6

iLCea, revue en ligne sur le site revues.org, n°19, 2014Acceptabilité et transgression en langues et cultures de spécialitéISBN 978-2-84310-280-6– ISSN électronique 2101-0609

LidiL, n° 48, 2013, 224 pagesL’émotion et l’apprentissage des languesISBN 978-2-84310-260-8

LidiL, n° 49, 2014, 208 pagesL’analyse des données didactiques :sélection, synthèse, description, interprétation ISBN 978-2-74310-272-1

recherches & travaux, n° 83, 2013, 160 pagesL’expérience du sujet lecteur : travaux en coursISBN 978-2-84310-267-7

iris, n° 35, 2014, 200 pagesImaginaires andalousISBN 978-2-84310-273-8

revues des ellug

Livres

Portraits d’ateliersUn album de photographies fin de siècleSous la direction de Pierre WatCollection Iconographie en débat 2013 - 220 pages ISSBN 978-2-84310-265-3ISSN 2258-224XPrix : 28 €

Paris, vers 1890, un amateur se procure un album de près de cent photographies représentant des ateliers d'artistes parisiens, ornées, pour la plupart, de la présence de leur principal occupant. Ce recueil fait figure d’emblème pour le siècle qui l’a engendré. Deux trajectoires, en apparence contradictoires, se croisent sans s’annuler l’une l’autre : celle qui vit la sacralisation de la figure de l’artiste, et celle, non moins puissante, de sa sécularisation. Dans l’atelier, le sacré et le commerce font bon ménage. C’est bien le XIXe siècle, avec ses religions mercantiles, sa nostalgie de Dieu et son commerce fétichiste des reliques, qui se donne à voir ici.

Récits marquisiensTraduction de Henri Lavondès Coordination de Jean-Marie PrivatCollection Paroles d’ailleurs2013 - 124 pages ISSBN 978-2-84310-252-3ISSN 1286-8485Prix : 12 €

L’ethnologue Henri Lavondès a naguère longuement séjourné aux îles Marquises. Il a traduit de nombreux récits traditionnels, collectés auprès de conteurs. Sa volonté était de faire connaître plus largement cette culture orale lointaine, pétrie de mythes, de légendes… et de poésie. Les traductions sont accompagnées de notes et d’un glossaire établis par Marie-Noëlle Ottino-Garanger qui permet aux lecteurs d’approcher les subtilités et les beautés de ces imaginaires culturels lointains.

Refonder l’enseignement des langues anciennes : le défi de la lecture Dominique AugéCollection Didaskein 2013 - 316 p. - 14 x 21,5 cmISSBN 978-2-84310-261-5ISSN 2102-4596Prix : 24 €

L’auteur s’applique à définir une didactique des langues an-ciennes qui place les élèves au cœur de leur apprentissage pour devenir des lecteurs autonomes en latin et en grec. La réflexion théorique est constamment illustrée par la pratique du terrain.

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Abufar, ou La Famille arabeMartial Poirson, Florence Filippi et Jacqueline RazgonnikoffL’HarmattanCollection Autrement mêmes2014 - 292 pagesISBN : 978-2-343-02481-3Prix : 30 €

Abufar ou La Famille arabe (1795) est l'avant-dernière tragé-die de Jean-François Ducis. Le désert d'Arabie est pour lui un espace transitionnel à mi-chemin entre Orient et Occident ; la tragédie pose ainsi les bases d'une dramaturgie et d'une scénographie du désert dont nous sommes héritiers en ligne directe. Première édition critique du texte, confrontée à sa parodie, ce volume vise à situer l'œuvre dans la vogue de l'orientalisme théâtral de la fin XVIIIe siècle.

Avant-gardes et littérature narrativeIsabelle Krzywkowski et Barbara MeazziLIRCES, EA n° 3159, Université de NiceCahiers de Narratologie n° 24 2013 ISSN électronique 1765-307XRevue en ligne en accès libre : http://narratologie.revues.org/6656

Les neuf articles réunis dans ce volume examinent les raisons pour lesquelles le roman est mis en cause dans les premières années du XXe siècle et se proposent de mettre à jour les spécificités et les critères d’un « roman d’avant-garde ». L’étude de ces nouvelles formes narratives ouvre également un espace pour relire les avant-gardes historiques et enrichir une anthropologie du récit et de la fiction.

ouvrages parus chez d'autres éditeurs

Un autre dix-septième siècleMélanges en l’honneur de Jean SerroyChristine Noille et Bernard RoukhomovskyHonoré ChampionCollection Colloques, congrès et conférences sur le ClassicismeNovembre 2013 - 295 pagesISBN : 978-2-7453-2739-0Prix : 50 €

Jean Serroy n’a eu de cesse que de redécouvrir le XVIIe siècle à travers ses textes, des plus parcourus aux moins fréquentés. Les auteurs ont rendu hommage à l’acuité et à l’intelligence de sa lecture. Leurs analyses de texte ont puisé à toutes les sources qui l’ont inspiré : déployant dans les œuvres roma-nesques ou théâtrales le sens des thèmes et l’enjeu des formes ; restituant en contexte la généalogie du libertinage ; reprenant dans une lecture renversée quelques textes cano-niques ; récapitulant enfin les images en mouvement que le XVIIe siècle donne de lui-même.

Chansons d’amour et de pluie Sergi PàmiesNouvelles traduites du catalan par Edmond RaillardActes Sud - Jacqueline ChambonMars 2014 - 144 pagesISBN : 978-2-330-03020-9Prix : 16,50 €

« Pour que personne ne dise que les romanciers ne parlent que d’eux-mêmes, nous finissons parfois par écrire des choses bien étranges », ironise Pàmies dans l’une des vingt-six nouvelles qui composent cet ouvrage, récital d’émotions et de réflexions sur la vulnérabilité et les rituels les plus absurdes de l’âge adulte. Il ose parler ouvertement de lui-même et des siens, revisitant les servitudes de l’hypocondrie sentimentale, s’immergeant dans les estocades de l’amour, la douleur des absents et le plaisir d’écrire.Dans sa prose incisive, l’humour ne perd pas pour autant ses droits.

The Classic Short Story 1870-1925. Theory of a Genre Florence Goyet Open Book Publishers2014 - 210 pages ISBN : 978-1-909254-75-6Ouvrage en anglais

À partir d’un corpus important, le livre dégage trois traits fondamentaux qui font de la nouvelle un genre à part entière. Celle-ci doit d’abord s'adapter à un lectorat précis. "Exotique", elle présente de façon frappante et pittoresque un spectacle que le lecteur connaît mais qui ne lui est pas familier. Enfin, c’est un genre monologique refusant toute polyphonie : la nouvelle ne laisse respirer qu’une seule vérité. C’est ce que montre l’analyse des nouvelles de Maupassant, Tchékhov, Verga, James et Akutagawa.

L’économie de l’attentionNouvel horizon du capitalisme ?Sous la direction d’Yves CittonLa découverteCollection Sciences humainesMai 2014 - 250 pagesISBN : 978-2-70717-870-1Prix : 24 €

Depuis une vingtaine d'années, on entend dire qu'une « nou-velle économie » est en passe de supplanter les anciens modes d'échange des biens matériels – une économie dont l'attention constituerait la première rareté et la plus précieuse source de valeur. À quoi ressemble donc cette économie de l'attention ? Quels nouveaux outils sont nécessaires pour en comprendre les mécanismes ? Que faut-il en craindre ou que pouvons-nous en espérer ?

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L’écrit scientifique : du lexique au discours. Autour de ScientextAgnès Tutin, Francis Grossmann Presses de l’université de RennesCollection Rivages linguistiques2014 - 246 pagesISBN : 978-2-7535-2846-8Prix : 17 €

L’étude de l’écrit scientifique, aujourd’hui en plein essor, vise en particulier à mieux cerner ce qui fait sa spécificité. Au centre des investigations menées, il y a la manière dont sont mises en scène, dans le lexique et le discours, les procédures de découverte et de validation des connaissances. L’ouvrage s’appuie sur un en-semble de recherches effectuées à partir du corpus Scientext, corpus en français et en anglais développé par plusieurs équipes de chercheurs sous la responsabilité du laboratoire LIDILEM à l’université Stendhal - Grenoble 3.

Les émotions dans le discoursEmotions in DiscoursePeter Blumenthal, Iva Novakova, Dirk SiepmannPeter Lang2014 - 434 pagesISBN 978-3-631-64608-3Prix : 74,70 €

Comment les mots permettent-ils d’appréhender ces ob-jets obscurs que sont nos émotions ? Diverses langues européennes offrent-elles les mêmes perspectives sur cette réalité mouvante, explorée aussi par plusieurs disciplines ap-pliquées (didactique, lexicographie, traitement automatique des langues) ? Le volume tente de répondre à ces questions en mettant en relief certaines innovations théoriques et métho-dologiques en sémantique lexicale et en analyse du discours.

C’était une autre époqueLa fin du monde ruralClaude CollinDossiers documentaires meusiensOctobre 2013 - 208 pages ISBN : 9782953714210Prix : 20 €

Au cours des trente années qui ont suivi la fin de la Seconde Guerre mondiale, un mode de vie rural pluriséculaire s’est consi-dérablement modifié et a même pratiquement disparu. Témoin de ce profond bouleversement, l’auteur tente d’en rendre compte à travers l’histoire de son village. Il a recueilli des témoignages de paysans, d’ouvriers agricoles, français ou étrangers, d’insti-tuteurs, d’artisans, ayant vécu cette période. Imprégné aussi de souvenirs personnels, cet ouvrage est l’histoire de la formidable mutation du monde paysan, telle qu’elle a été vécue au XXe siècle, sur la quasi-totalité du territoire national avec quelques variantes régionales.

Faire vrai. Balzac et l’invention de l’œuvre-mondeDominique MassonnaudDrozHistoire des idées et critique littéraire, n° 472Avril 2014 – 536 pagesISBN : 978-2-600-01719-0Prix : 58 €

Alors que le champ éditorial français accueille, depuis le début du XXIe siècle, des fictions longues marquées par l’héritage distancé de romans qui dialoguent avec l’Histoire, le point de vue macrogénétique développé ici s’attache à l’invention par Balzac d’une forme neuve, l’œuvre-monde, qui constitue un modèle d’écriture productif pour ses successeurs.

Fiction et économie Représentations de l’économie dans la littérature et les arts du spectacle, XIXe-XXIe sièclesSous la direction de Geneviève Sicotte, Martial Poirson, Stéphanie Loncle et Christian BietPresses de l’université de LavalCollection Monde culturel2013 - 280 pages ISBN : 978-2-7637-1833-0 Prix : 23 €

C’est à l’examen de pans variés de l'imaginaire économique dans la littérature et les arts du spectacle que se consacrent les contributeurs à ce recueil, avec la conviction que les productions esthétiques peuvent aider à saisir et à interpréter, dans la longue durée comme dans le contexte contemporain, les phénomènes économiques qui nous entourent.

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Imagination scientifique et littérature merveilleuseCharles Tiphaigne de La RocheSous la direction d’Yves Citton, Marianne Dubacq et Philippe VincentPresses universitaires de Bordeaux2014 - 392 pagesISBN : 978-2-86781-868-4Prix : 30 €

Imagination littéraire et investigation scientifique sont longtemps allées de pair. Les contributions réunies dans ce volume étudient un auteur méconnu, Charles Tiphaigne de la Roche (1722-1774). Ce médecin normand, savant érudit et rêveur inlassable, offre un cas exemplaire du tissage étroit entre l’émergence des nouvelles sciences de la vie, une sagesse critique inspirée de l’Antiquité et une imagination littéraire porteuse de merveilles en devenir.

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Méthodologie d'évaluation en éducation et formationGérard Figari, Dominique Remaud De Boeck 2014 - 216 pagesISBN : 978-2-8041-8477-3Prix : 32 €

Conçu à partir d’une rencontre entre chercheurs et praticiens, cet ouvrage décrit les fondements et les différentes phases de la conduite d’une « enquête évaluative ». Il s’agit, en effet, de proposer une « méthodologie générale » de l’évaluation en milieu éducatif et de formation. Cette méthodologie se construit autour de l’élaboration d’un référentiel de type nouveau, partagé entre les acteurs de l’évaluation. À partir de la conceptualisa-tion d’une situation complexe donnée à évaluer, se développe, sous les yeux du lecteur, un protocole exemplifié d’évaluation d’un objet ou d’un dispositif éducatif.

Le miroir : une médiation entre imaginaire, sciences et spiritualitéSous la direction de Claude FintzPresses universitaires de ValenciennesCollection Pratiques et représentations2014 - 354 pagesISBN : 978-2-3642-4015-5Prix : 22 €

Quelles relations entretiennent l'imaginaire, les sciences et les spiritualités, autour du miroir – tantôt motif, image et symbole ? À travers les siècles et les cultures, parcourus dans cet ouvrage, le lecteur se forgera la conviction que cette mise en relation contribue activement aux différentes modalités de la connaissance. Multipliant les angles d'attaque originaux, ce volume transcende les barrières disciplinaires pour conduire le lecteur vers de nouveaux horizons.

Para una arqueología del imaginario medieval. Mitos y ritos paganos en el calendario cristiano y en la literatura del medioevoPhilippe WalterUniversité nationale autonome du MexiqueCentre de Poétique, Ediciones Especiales, 682013 – 238 pagesISBN : 978-607-02-4722-4Prix : 24 €

L’imaginaire médiéval n’est pas fermé sur lui-même. Il par-ticipe des imaginaires de l’Antiquité (celte, gréco-romaine, scandinave, etc.) qu’il assimile et transforme à travers le christianisme. La littérature, les croyances, les rites et les fêtes témoignent de ce processus d’acculturation constitutif d’une culture pluriséculaire parfois encore vivante de nos jours.

Le parler des Savoies et ses histoires à rireDominique Abry-Deffayet et Nicolas AbryChristine Bonneton2013 - 192 pagesISBN : 978-2-8653-558-6Prix : 13,50 €

Depuis plusieurs siècles, le français et les dialectes savoyards cohabitent. Les Savoyards ont ainsi introduit dans leur français des régionalismes. Les quelque 600 mots de cet ouvrage, obtenus par enquêtes, traduisent les thématiques pour lesquelles le Savoyard a su enrichir le vocabulaire français qui n'avait pas cette culture alpine. Le livre présente aussi des contes et anecdotes facétieux, véritables petites perles du patrimoine littéraire oral savoyard. Ils montrent comment l’homme construit son identité par la marque de différences par rapport à ses semblables réputés comme niais. Ils font partie du patrimoine narratif et émargent au titre de chefs d’œuvre de l’Humanité reconnus par l’UNESCO en 2001.

La Révolution française et le monde d’aujourd’huiMythologies contemporainesSous la direction de Martial PoirsonClassiques GarnierCollection Rencontres2014 - 554 pagesISBN : 978-2-8124-2556-1Prix : 49 €

Barthes enseigne à l’université de Rabat du 1er septembre au 31  août 1970. Après cette première année de cours, il rentre en France, interrompant le contrat de trois ans qui le liait au ministère de l’Éducation. Ce départ ne signifie pourtant pas la fin des échanges intellectuels avec le Maroc puisqu’il sera, en 1978, invité par l’université de Fez pour donner un séminaire consacré à « la lecture ». Il n’empêche : c’est sur un échec que se clôt la première expérience pédagogique de Barthes. Comment expliquer son arrivée dans un pays qu’il connaissait et appréciait beaucoup comme touriste et son départ précipité en 1970 ? Que s’est-il joué en quelques mois d’enseignement pour justifier un aller et retour aussi rapide ?

Médecine, sciences de la vie et littérature en France et en Europe de la Révolution à nos joursSous la direction de Lise Dumasy-Queffélec et Hélène SpenglertDroz2014ISBN 978-2-600-01696-4Prix : 49,35 € par volume

Ces travaux ont pris place dans une perspective réflexive qui porte sur la façon dont discours et représentations donnent à voir depuis le XIXe siècle, de façon théorique ou en le fictionna-lisant, le rapport entre sciences, techniques et pouvoirs. Ces actes de colloques sont édités en trois volumes : - Herméneutique et clinique (vol. 1),- L'âme et le corps réinventés (vol. 2),- Le médecin entre savoirs et pouvoirs (vol. 3).

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Romanesques - Revue du Centre d’études du roman et du romanesqueL’expérience romanesque au XIXe siècleCatherine Mariette-ClotClassiques Garnier2013 - 275 pagesISSN : 1776-3614

Réflexion collective sur l’« expérience romanesque » composée de douze contributions suivies d’un entretien avec le romancier contemporain Philippe Forest. L’ensemble est précédé par trois articles sur la notion de romanesque aux XVIIeet XVIIIe siècles.

Rousseau, le chemin de rondeJean-François PerrinHermannCollection Fictions pensantes2014 - 476 pagesISBN : 978-2-7056-8855-4Prix : 26 €

« Il faudrait pour ce que j’ai à dire inventer un langage », dit Rousseau, qui pense en écrivain autant qu’il écrit en penseur. Il a cherché un langage qui creuserait le temps, une parole qui se souviendrait de la perte. Depuis le Discours sur les sciences et les arts jusqu’aux Rêveries du promeneur solitaire, cette œuvre nous parle de la profondeur d’oubli dans laquelle il faut descendre pour simplement accéder à la nature humaine. Ce chemin de ronde est un théâtre de mémoire.

Perspectives européennes des études littéraires francophonesSous la direction de Claude Coste et Daniel LançonHonoré ChampionCollection Francophonies2014 - 359 pagesISBN : 978-2-7453-2578-5Prix : 55 €

L’Europe est un carrefour intellectuel entre le Nord et le Sud, l’Est et l’Ouest, en particulier pour l’étude des francophonies, un continent plurilingue dont les nations dialoguent entre elles et avec les penseurs postcoloniaux de tous les horizons mondialisés. Les études ici rassemblées portent non sur les grands auteurs mais sur les problématiques les plus contem-poraines au sein de recherches littéraires comparatistes.

Le « Travail allemand », une organisation de résistance au sein de la WehrmachtClaude CollinLes Indes savantes Collection La Boutique de l’Histoire2013 - 146 pages ISBN : 978-2-84654-000-0Prix : 22 €

À l’initiative des partis communistes français, allemand et autrichien, est mise en place en 1941 une organisation appelée TA – Travail allemand, dit aussi parfois Travail anti-allemand – avec pour objectif de pénétrer la machine de guerre ennemie et d’organiser au sein de la Wehrmacht elle-même des groupes d’opposants au nazisme, en lien avec la résistance française.

Le livre est constitué de cinq entretiens avec des protagonistes de cette histoire, encadrés par deux textes, l’un publié en 2004 et l’autre en 2008, qui rendent compte de l’évolution de la perception et de la connaissance du sujet par l’auteur. Si la Résistance fut essentiellement une affaire d’hommes, dans cette organisation, les femmes jouèrent un rôle capital. Si la mise en œuvre du TA est généralement attribué aux réfugiés allemands, il convient de signaler que les Autrichiens et d’autres germanophones des pays d’Europe centrale, le plus souvent juifs, y tinrent une place déterminante…

Yvain ou le chevalier au lion et Lancelot ou le chevalier de la charrette, Illustrés par les peintres préraphaélitesTraduction en français moderne de Philippe Walter et de Daniel PoirionDiane de Selliers2014 - 448 pagesISBN 978-2364370456Prix : 195 €

La légende arthurienne exaltée par la peinture préraphaélite du XIXe siècle. Une promenade enchanteresse mêlant deux univers liés par une même quête de valeurs, de beauté et de spiritualité.Philippe Walter, spécialiste des mythologies chrétiennes et de l’imaginaire médiéval, détaille avec une grande finesse les mythes auxquels Chrétien de Troyes fait appel. Laurence des Cars, directrice du musée de l’Orangerie et spécialiste de l’art du XIXe et du début du XXe siècle, révèle à quel point la légende arthurienne a influencé les peintres préraphaélites.

Yves Bonnefoy, histoire des œuvres et naissance de l’auteurDes origines au Collège de FranceDaniel LançonHermann2014 - 618 pagesISBN : 978 2 7056 8761 8Prix : 38 €

Entre l’apparition publique de La Révolution la nuit en janvier 1946 et l’édition des Poèmes en mai 1978, entre celle de ses premiers écrits critiques au sein de l’avant-garde surréaliste et le projet d’« études comparées de la fonction poétique » au Collège de France, la littérature et la pensée française ont vécu une profonde mutation au sein de laquelle Yves Bonnefoy a inscrit son œuvre de poète, prosateur atypique, critique de la poésie, historien de l’art, traducteur, éditeur et penseur d’une métaphysique post-théologique. Le livre présente une existence créatrice dans et contre son époque, scandée de moments décisifs en des lieux privilégiés, Italie dès le début des années cinquante, Provence ou États-Unis une décennie plus tard, sans oublier les années de formation à Paris.

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Coup d'œil

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Musculation et footing, course de vitesse et bondissements, et puis des sauts encore et encore… pour que la technique soit au point, pour se sentir affûté, pour avoir les meilleures sensations : tel est le travail – ou l’ascèse – d’un athlète de haut niveau en saut à ski. Coline Mattel est une passionnée qui s’exerce avant tout avec régularité. « Je n’ai pas effectué de préparation spécifique pour les jeux, mais l’état d’esprit dans lequel je me suis entraînée était diffé-rent. J’ai fait très attention à mon poids, notamment pendant les fêtes, car c’est très important d’être léger pour tenir longtemps en l’air. Et surtout j’étais encore plus concentrée, plus assidue, plus à bloc ». Ainsi, elle n’a pas manqué de cran en s’élançant du tremplin lors de la finale des JO. Pour comprendre cette discipline, il faut s’imaginer prendre de l’élan sur un tremplin situé à 90 m ou à 120 m du sol (selon le cas), se jeter ensuite dans les airs et voler sur près de 100 mètres (presque un terrain de football !) avant d’atterrir à skis sur une pente enneigée. Et pour corser le tout, il faut de l’élégance, car les juges attribuent les points, non seulement pour la longueur du saut, mais aussi pour le style en vol et à l'atterrissage. Le premier saut de Coline remonte à un été, alors qu’elle n’avait que 7 ans. « J’étais sur un tremplin de 30 m complètement tétanisée. J’ai finalement sauté, 8 mètres à peine, un tout petit saut. Mais j’y suis retournée pour surmonter et vaincre cette peur qu’il m’arrive encore parfois de ressentir… » Dès lors, elle

n’a pas cessé d’y remonter, usant tous les soirs le tremplin en face de la maison de ses parents aux Contamines-Montjoie, et depuis sa 11e année, ceux des différentes stations organisant des compétitions nationales ou internationales. Cela ne l’a pas empêchée d’obtenir son baccalauréat avec men-tion très bien, puis de commencer des études supérieures à l’université Stendhal. « Les enseignants se battent vraiment pour que je bénéficie des aménagements adéquats : dispense de contrôle continu, cours aménagés ou à distance, sessions d’examens décalées… C’est vraiment un soulagement car je ne voulais pas arrêter mes études. »

Si vous en doutiez encore, vous devriez être convaincu : Coline Mattel est une sauteuse d’exception, avec un mental de… bronze, mais l’or reste en vue. « Dans l’immédiat, ce qui compte, c’est de rester professionnelle dans l’entraînement et de me faire plaisir afin d’être là à chaque échéance. Il y a 5 coupes durant l’été et des compétitions tous les week-ends en hiver. Et puis, en 2015, il y a les championnats du monde. J’aimerais confirmer les résultats des jeux ou faire mieux. »

Pour sûr, on est en face d’une vraie championne dont on entendra encore parler. Alice Folco, responsable de la licence d’Arts du spectacle, et Jean-Philippe Devaluez, responsable des athlètes de haut niveau, l’ont compris et s’appliquent pour lui permettre de concilier études et carrière sportive.

rencontre avec Coline mattel, médaillée de bronze en saut à ski aux Jo À 18 ans et quelques mois, Coline mattel, étudiante en licence arts du spectacle a remporté la médaille de bronze en saut à ski aux Jeux olympiques de sochi. Pour cette jeune athlète souriante et décidée, qui participait aux Jo dans une discipline ouverte pour la 1re fois aux femmes, l’essentiel n’est pas de participer, l’objectif est de gagner.

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Partageons ensemble les valeurs des humanités

V comme... Valeurs

« Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai pour que vous ayez le droit de le dire. »